EEW - Dossier scientifique - La séquestration et les émissions de
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Etat de l’Environnement wallon Etudes - Expertises La séquestration et les émissions de gaz à effet de serre provenant des écosystèmes terrestres en Région wallonne Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon Ce Rapport est réalisé sous la responsabilité exclusive de son auteur et n'engage pas la Région wallonne Prof. Bas van Wesemael Département de Géographie Faculté des Sciences Université catholique de Louvain Septembre 2006 Les Rapports sur “l’état de l’environnement wallon” sont établis par la Direction générale des Ressources naturelles et de l’Environnement (DGRNE) du Ministère de la Région wallonne, en étroite collaboration avec les universités et les centres de recherche francophones de Wallonie et de Bruxelles (Art. 5 du Décret du 21 avril 1994 relatif à la planification en matière d’environnement dans le cadre du développement durable). Le 31 mai 2002, le Gouvernement wallon a adopté une convention -cadre pour financer la mise en place d’une coordination inter-universitaire, fondée sur une équipe scientifique permanente et sur un réseau d’expertise. Cette convention-cadre a été passée avec le Centre d’Etude du Développement Durable (CEDD) de l’Institut de Gestion de l’Environnement et d’Aménagement du Territoire (IGEAT) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB). L’équipe scientifique est pluridisciplinaire et travaille avec la DGRNE qui assure la coordination générale. Les chercheurs comme les experts scientifiques sont issus de différentes universités. http://environnement.wallonie.be/eew 2 Table des matières 1 DESCRIPTION GÉNÉRALE DE LA PROBLÉMATIQUE ......................................................................... 4 1.1 1.2 1.3 2 LE DIOXYDE DE CARBONE (CO2) ...................................................................................................................... 4 LE MÉTHANE (CH4) ET LE PROTOXYDE D’AZOTE (N2O) ................................................................................... 5 LA SÉQUESTRATION DU CARBONE DANS LES ÉCOSYSTÈMES TERRESTRES ......................................................... 5 ETAT ET ÉVOLUTION ................................................................................................................................... 6 2.1 FLUX DE CO2 ISSU DES ÉCOSYSTÈMES TERRESTRES.......................................................................................... 6 2.1.1 Méthode.................................................................................................................................................. 6 2.1.2 L’évolution des flux de CO2 des quatre principaux compartiments terrestres (1990-2004) .................. 7 2.1.3 Projection de flux de CO2 en 2012 ....................................................................................................... 10 2.2 FLUX DE N2O ET DE CH4 DES ÉCOSYSTÈMES TERRESTRES.............................................................................. 12 2.2.1 Méthode................................................................................................................................................ 12 2.2.2 L’évolution des flux de N2O et de CH4 provenant des sols arables et des prairies .............................. 12 3 FACTEURS EXPLICATIFS........................................................................................................................... 14 4 IMPACTS.......................................................................................................................................................... 15 5 RÉPONSES ET RECOMMANDATIONS..................................................................................................... 16 6 RÉFÉRENCES ................................................................................................................................................. 18 Liste des illustrations Figure 1 : Flux principaux de GES au niveau global (Watson et al., 2000)................................................................. 4 Carte 1 : Stock de carbone organique dans les sols en Région wallonne (2000) .......................................................... 8 Carte 2 : Biomasse forestière en Belgique (en 2000).................................................................................................... 8 Figure 2 : Evolution des flux de CO2 provenant des écosystèmes terrestres en Wallonie ........................................... 9 Tableau 1 Production de fumier et de lisier convertie en densité de carbone pour chaque région agricole................ 11 Figure 3 : Evolution des stocks de carbone dans la biomasse forestière simulée par le modèle EFOBEL suivant le scénario ‘business as usual’................................................................................................................................ 12 Figure 4 : Evolution des émissions de N2O provenant des sols agricoles en Région wallonne ................................. 13 Carte 3 : Emissions directes de N2O par hectare de SAU en Région wallonne pour l’année 1990 ............................ 13 Tableau 2 Bilan des flux de GES provenant des écosystèmes terrestres en Wallonie pour les années 1990 et 2003 . 16 3 1 Description générale de la problématique 1.1 Le dioxyde de carbone (CO2) Il existe un échange de gaz à effet de serre (GES), notamment de CO2 entre la végétation, le sol et l’atmosphère. Les principaux flux de GES au niveau mondial sont représentés dans le diagramme de la figure1. La différence entre les quantités de CO2 assimilées par la végétation lors de la photosynthèse (120 Pg C an-1)1 et le carbone émis par la respiration autotrophe des plantes (60 Pg C an-1) résulte en une production de matière organique qui est décomposée dans le sol en grande partie par la respiration hétérotrophe (55 Pg C an-1). Figure 1 : Flux principaux de GES au niveau global (Watson et al., 2000) Le solde du bilan (soit environ 5 Pg C an-1) forme de l’humus stable qui est récalcitrant à la dégradation. Ce bilan ne tient pas compte des feux qui provoquent une oxydation directe des tissus produits par la photosynthèse et de la matière organique en voie de décomposition résultant en une émission de 4 Pg C an-1. Dès lors la photosynthèse devrait être compensée par la respiration hétérotrophe et les processus perturbateurs (feux, maladies…) dans un écosystème en équilibre et il n’y aurait pas d’échange net de CO2 entre l’atmosphère et les écosystèmes terrestres. En réalité, des activités humaines (telles que le défrichement de la forêt tropicale), des facteurs perturbateurs naturels (tels que des incendies et des maladies de la végétation forestière) et la variabilité climatique peuvent influencer les facteurs de ce bilan à court terme, ce qui peut engendrer des émissions de carbone en provenance de la végétation ou du 1 Au niveau les flux de GES sont exprimés en Pg an-1 (Peta gram) ce qui correspond à 1015 g. Dans la littérature l’unité de Gt (Giga tonne) est aussi souven,t utilisée : 1Gt = 1 Pg. 4 sol ou des piégeages de carbone dans la végétation ou dans le sol. Cette perturbation du bilan de GES provenant des écosystèmes terrestres explique en partie pourquoi l’accroissement du taux de CO2 dans l’atmosphère (3,3 Pg C an-1) est inférieur aux émissions de CO2 liées à l’utilisation de combustibles fossiles (6,3 Pg C an-1). Le piégeage annuel de carbone par les écosystèmes terrestres (2,3 Pg C an-1) est quant à lui supérieur aux émissions de CO2 liées au changement d’affectations des terres, ce dernier étant dominé par la déforestation rapide des forêts tropicales (1,6 Pg C an-1), ce qui résulte en une séquestration nette de CO2 par les écosystèmes terrestres (0,7 Pg C an-1) (Watson et al., 2000). 1.2 Le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O) Les échanges entre le sol et l’atmosphère contribuent pour 30 % aux émissions globales de CH4 et pour 70 % à celles de N2O. Le budget global de N2O, un GES dont le Potentiel de Réchauffement Global (PRG) est 310 fois plus élevé que celui du CO2, est fortement influencé par les pratiques agricoles et surtout par l’apport d’azote sous forme d’engrais minéraux et organiques (fumier...) et de résidus de cultures. Le N2O est produit en faibles concentrations dans les sols pendant les processus microbiens de nitrification et de dénitrification. Les émissions globales de CH4, un GES dont le PRG est 21 fois plus élevé que celui du CO2, sont surtout réalisées en zones humides et en particulier dans les rizières. Le CH4 se produit surtout dans le sol par décomposition microbienne en conditions d’anaérobie. La production directe de CH4 par les animaux (digestion par les ruminants) et de N2O par les effluents d’élevage (avant épandage) est également une source importante de GES, mais cette source n’est pas directement liée au sol et ne sera pas abordée dans dans la discussion du bilan de GES des écosystèmes terrestres wallons. 1.3 La séquestration du carbone dans les écosystèmes terrestres Comme expliqué ci-avant, le bilan des flux de GES de tout écosystème géré par l’homme n’est pas en équilibre. Cela implique que les activités humaines, présentes et passées, résultent en la création de sources ou de puits de CO2. La superficie forestière en Région wallonne a augmenté d’un peu plus de 20 % depuis la fin du XIXe siècle (Laurent & Lecomte, 2007 : La composition, l’évolution et l’exploitation de la forêt in : « Rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007 », p184-195). Ce sont surtout des landes et d’autres terres agricoles délaissées qui ont été reboisées. Les forêts wallonnes sont donc relativement jeunes et plantées sur des sols assez pauvres. Cela implique que les stocks de carbone dans la biomasse et dans le sol ont fortement évolué et évolue toujours. La gestion forestière, le choix des essences, la durée des rotations et le type de récolte ont un impact important sur le bilan de carbone dans ces écosystèmes et donc sur les flux de GES provenant du sol et de la biomasse ligneuse. Les terres agricoles sont par definition des écosystèmes fortement influencés par l’activité humaine. Comme la production végétale a un cycle de vie très court (exportations annuelles des cultures), il n’y a presque pas de possibilité de séquestration dans la biomasse. Par contre, le taux de matière organique dans le sol peut fortement évoluer grâce au bilan des intrants organiques et de leur décomposition. Cette évolution des teneurs en carbone organique dans les sols (COS) peut donner lieu à des émissions de GES (en cas de perte de COS) ou à de la séquestration (en cas de gain de COS). Récemment, Freibauer et al. (2004) ont fait une étude bibliographique sur les types de gestion agricole qui favorisent la séquestration de carbone dans les sols. Il ressort de cette étude que les mesures suivantes sont les plus prometteuses (en ordre décroissant d’importance) : épandage des amendements organiques sur les terres arables au lieu des prairies, introduction de cultures pérennes (prairies, cultures d’arbres) sur les terres arables en jachère, pratique de l’agriculture biologique, remontée des nappes dans les tourbières cultivées. La séquestration de carbone par le semis direct ou le labour simplifié a surtout été démontré aux Etats Unis. Les résultats des études en Europe ne sont pas toujours en accord. 5 Les articles 3.3 et 3.4 du Protocole de Kyoto prévoient que la séquestration de carbone dans les écosystèmes terrestres peut-être déduite des émissions anthropiques de GES. Seules les activités de boisement ou de reboisement peuvent être pris en compte pour l’article 3.3. L’accord de Marrakesh a déterminé un plafond relatif à la prise en compte de la gestion forestière (0,03 Mton C an-1 pour la Belgique). La séquestration de carbone suite à des ‘activités additionnelles humaines’ dans les sols agricoles est par contre entièrement prise en compte. La séquestration éventuelle doit être calculée suivant le système ‘net-net’. Cela implique que les flux de GES en 1990 sont comparés avec ceux de la première période d’engagement (2008-2012). Il est supposé que le niveau de COS suite à un changement de gestion (agricole ) atteint un nouveau équilibre en 20 ans. Pour les cultures bioénergétiques, il est supposé que l’incinération de biomasse ne produit pas de flux net de CO2. Une quantité de carburant fossile équivalente pour produire la même quantité d’énergie (calorifique) que celle produite par l’incinération de la biomasse est ensuite calculée. L’inventaire des GES de 2003 transmis par la Belgique au secrétariat de l’UNFCC mentionne dans la catégorie ‘Land Use Change and Forestry’ uniquement l’évolution du stock de carbone dans la biomasse forestière pour la période 1990-2000. L’évolution du stock de carbone dans les sols sous prairies et sous cultures sont encore actuellement difficiles à quantifier avec certitude en Région wallonne. Pourtant l’inventaire de 2006 prend en compte le changement de stock de carbone dans les sols sur base des taux de changement entre 1990 et 2000 (Lettens et al., 2005a). La Région wallonne dispose d’un réseau de profils de sol analysés dans les années 1950 –1970 et re-échantillonné, vérifié et marqué sur le terrain en 2005 (Goidts et van Wesemael, soumis). Ce réseau permet de suivre l’évolution du taux de carbone dans les sols agricoles et devrait être utilisé dans le futur pour l’inventaire des émissions de CO2 issu des sols agricoles. 2 Etat et évolution 2.1 Flux de CO2 issu des écosystèmes terrestres 2.1.1 Méthode Les émissions de CO2 issues des écosystèmes terrestres peuvent être calculées soit par des mesures directes des flux de CO2 entre l’écosystème terrestre et l’atmosphère, soit par la différence de stocks de carbone des compartiments d’une année à l’autre (méthode des bilans). Dans ce dernier cas, on estime que le changement du stock de carbone est dû à une fixation de CO2 atmosphérique (par photosynthèse) ou à une émission de CO2 lors de la respiration hétérotrophe. Cette méthode des bilans est la plus adaptée pour calculer les flux à long terme au niveau régional ou national (voir inventaire national des gaz à effet de serre : Belgium’s Greenhouse gas inventory (1990-2004) National Inventory Report submitted under the UNFCC). Nous considérons les quatre compartiments suivants : sols arables, sols sous prairies, sols forestiers et biomasse forestière. La biomasse agricole n’est pas prise en compte étant donné qu’il n’y a pas de stockage de carbone à long terme dans ce compartiment comme c’est le cas dans la partie ligneuse des forêts. Les stocks de carbone organique dans le sol (COS) ont été calculés à partir des données de concentration de COS dans les 30 premiers cm du sol. Les données proviennent de la cartographie des sols (1950-1970) et des analyses réalisées pour établir des avis de fumure par le réseau Requasud et les Centres d’information Agricole des provinces de Luxembourg, Liège et Hainaut pour la période 19902000. Les données sont regroupées par unité homogène de territoire (Landscape Unit : LSU) définie par rapport à l’utilisation du sol et l’association de sol (LSU). Pour chaque unité, une moyenne et le niveau de confiance du stock de carbone sont présentés (Lettens et al., 2004, 2005a). Les émissions ou la 6 séquestration annuelle de CO2 par le sol ont été estimées en multipliant les changements de teneurs en carbone entre 1990 et 2000 par les surfaces de terres arables, de prairies et de forêts correpondantes provenant de l’INS (surfaces agricoles) et de l’inventaire forestier. Cette méthode ne tient pas compte de la migration éventuelle de carbone dissout en profondeur ni des effets d’accumulation ou de perte de carbone dans le sol suite à un changement de l’utilisation du sol. Sur base des différences de stock de COS entre 1990 et 2000 (terres arables et prairies) et entre 1960 et 2000 (forêts), les taux de changements de COS suivants ont été déterminé par Lettens et al. (2005b) pour la Wallonie : (i) une séquestration de 0,1 tonne C ha-1 an-1 pour les terres arables et de 0,8 tonne C ha-1 an-1 pour les forêts et (ii) une émission de 0,5 ton C ha-1 an-1 pour les sols sous prairies. Ces tendances au niveau régional sont difficiles à expliquer. Le réseau de suivi de la matière organique dans le sol installé par Goidts et van Wesemael (soumis) montre des tendances à long terme (1960-2005) différentes : séquestration de 0,44 tonne C ha-1 an-1 dans les sols sous prairies et une émission de 0,07 tonne de C ha-1 an-1. Ces tendances peuvent être expliquées par (i) la réduction de la quantité de fumier et de lisier épandu par hectare de terre arable à cause de la croissance de la surface cultivée avec un cheptel qui n’a pas beaucoup évolué et (ii) une croissance de la densité du cheptel par surface de prairie. Le stock de carbone dans la biomasse forestière a été déterminé en utilisant les inventaires permanents des ressources forestières de Wallonie (IPRFW) de 1984 et de 2000. Perrin et al. (2000) et Van de Walle et al. (2005) expliquent l’utilisation et la sensibilité des facteurs d’expansion qui permettent de calculer le stock de carbone à partir du volume en bois fort. Ces stocks peuvent également être spatialisés à travers les unités homogènes (Lettens et al., soumis). Pour la période 1990-2000, la séquestration annuelle de CO2 par la biomasse forestière a été estimée par une extrapolation linéaire des stocks obtenus au cours des deux inventaires (1984 et 2000). Pour la période 2001-2004 ainsi que pour les scénarios, la séquestration de C dans les sols forestiers a été calculée par un modèle déterministe (EFOBEL, Perrin, 2005). Ce modèle permet de suivre la croissance de la forêt pour tous les points de l’inventaire forestier. 2.1.2 L’évolution des flux de CO2 des quatre principaux compartiments terrestres (1990-2004) La teneur moyenne en carbone dans les sols wallons en 2000 (calculée pour une profondeur de 30 cm) varie, selon l’utilisation du sol, de 48 tonnes C ha-1 pour les terres arables, à 75 tonnes C ha-1 pour les sols sous prairies et à 96 tonnes C ha-1 pour les sols forestiers (Lettens et al., 2005b). D’autre part, il existe une variation spatiale des stocks de carbone selon le climat, l’utilisation principale du sol et le type de sol. Les sols qui contiennent les quantités de carbone organique (C) les plus élevées (plus de 100 t C/ha) sont localisés essentiellement dans les fagnes (tourbières) et sur les hauts plateaux ardennais, où la forêt domine et où les conditions climatiques (liées à l'altitude) favorisent l'accumulation de carbone. Le climat ardennais présente en effet, par rapport aux autres régions naturelles, des températures plus faibles et des périodes de gel plus longues, qui réduisent l'activité biologique et la minéralisation du carbone dans les sols. La majorité des sols agricoles situés dans les régions de grandes cultures (régions limoneuse et sablolimoneuse) possèdent, quant à eux, les quantités de matière organique les plus faibles (comprises entre 25 et 50 t C/ha) (Carte 1). 7 Carte 1 : Stock de carbone organique dans les sols en Région wallonne (2000) La teneur en carbone dans la biomasse (BOC) est estimée en moyenne à 95 tonnes C ha-1 sur l’ensemble du territoire wallon avec les valeurs les plus élevées pour les forêts de conifères (103 tonnes C ha-1) et les plus faibles pour les forêts mixtes (88 tonnes C ha-1). La distribution spatiale des teneurs en BOC montre des valeurs maximales pour les forêts feuillues dans la région limoneuse (162 tonnes C ha-1). Certaines forêts de conifères et de feuillus dans les Ardennes présentent également des valeurs de BOC élevées (141 tonnes C ha-1) (carte 2). Carte 2 : Biomasse forestière en Belgique (en 2000) Source : Lettens et al. (soumis) 8 Pour la période 1990-2004, les écosystèmes wallons séquestrent entre 2 656 et 4308 kton CO2 an-1 (Figure 2). Cette séquestration représente 1,8 % des émissions totales de CO2 en Région wallonne. Les émissions issues des sols sous prairies sont largement compensées par les quantités de C séquestrées dans les terres arables et surtout des forêts (au niveau des sols et de la biomasse ). Les quantités séquestrées ne montrent pas de tendance temporelle, sauf pour un pic de séquestration dans la biomasse en 2001-2003 qui s’explique par une capitalisation du bois sur pied (Perrin, 2005). Emissons Figure 2 : Evolution des flux de CO2 provenant des écosystèmes terrestres en Wallonie 1000 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 -2000 Séquestration kt CO 2 -1000 1990 0 -3000 -4000 -5000 -6000 sols sous prairies sols sous culture sols forestiers biomasse forestière Sources : Rapport national des inventaires d’émissions de gaz à effet de serre (1990-2004) ; UCL-GEOG; FUSAGx En général, la teneur en COS augmente du sud vers le nord en Europe. La Belgique connaît pourtant des teneurs en C faibles par rapport à d’autres pays du nord ouest de l’Europe (Jones et al., 2005). Ce sont surtout le Royaume Uni et les pays scandinaves qui disposent de zones de tourbières avec des teneurs en COS comprises entre 25 à 35 %. Quant à la biomasse forestière, Perrin (2005) a montré que la valeur de BOC estimée pour la Wallonie (95 tonnes C ha-1) est comprise entre les valeurs de 57-59 tonnes C ha-1 renseignées pour le Danemark, les Pays-Bas et la France et la valeur de 105,7 tonnes C ha-1 estimée en Allemagne. Grâce à la densité des observations du stock de carbone dans le sol et dans la biomasse réalisées à différentes périodes, la Belgique est un des rares pays européens qui dispose de données mesurées de séquestration de CO2 par les écosystèmes terrestres. Smith et al. (2005) ont estimé sur base de taux de séquestration de carbone provenant de la littérature et de surfaces soumises à des pratiques agricoles que le potentiel de séquestration de carbone dans les terres arables au Royaume Uni, en Suède et en Finlande est inexistant. Contrairement à la situation en Wallonie (séquestration du carbone de 2656 à 4308 kton CO2 an-1), le taux de séquestration en Flandre est faible et passe d’environ 340 kton CO2 an-1 en 1990 à 38 kton CO2 an-1 en 2005 (van Steertegem, 2005). Cette diminution est attribuée à plusieurs facteurs : (i) la diminution de la surface boisée en Flandres (-6 % entre 1990 et 2005), (ii) l’augmentation des récoltes en bois qui diminue la séquestration de carbone dans la biomasse des forêts et (iii) l’augmentation des émissions issues des sols agricoles. 9 Bellamy et al. (2005) ont calculé les émissions de CO2 provenant des sols du Royaume-Uni pendant les 25 dernières années. Ils ont estimé que les émissions issues des sols représentent 8 % des émissions totales. 2.1.3 Projection de flux de CO2 en 2012 Pour les sols agricoles, l’évolution des stocks de carbone a été modélisé selon deux scénarios climatiques de l’IPCC et deux scénarios de gestions agricoles. Le premier scénario climatique suppose une croissance économique globale et une utilisation accrue de carburants fossiles (A1FI). Le deuxième scénario climatique se base sur une population globale qui diminue après le milieu du 21ème siècle et une évolution vers une économie des services et de la technologie informatique avec l’introduction des technologies propres (B1). Les scénarios de gestions agricoles sont les suivants : (i) (ii) l’utilisation d’amendements organiques (surtout sous forme de fumier et de lisier) est continue et s’effectue au même niveau qu’en 2002 (BAU) et l’utilisation d’amendements organiques est restreinte de manière à ce que les taux de liaison au sol de toutes les exploitations agricoles en Région wallonne soient inférieurs à 1 afin de respecter la législation en vigueur au niveau des zones vulnérables pour les nitrates (ZVN2). Le modèle RothC-26.3 développé au centre de recherches de Rothamstead-UK (Coleman et al., 1997) a été utilisé pour prédire les stocks de carbone au sein de chaque LSU en Wallonie et ce, à partir • • • • des stocks initiaux de carbone existants en 1960 déterminés par Lettens et al. (2004) ; le climat observé (1960-2000) et le climat prédit (2000-2012) par les scénarios IPCC ; les intrants en carbone via les résidus de culture3 ; la gestion des amendements observée (1960-2000, Tableau 1) et la gestion prédite (20002012) par les scénarios de gestion. Le modèle est capable de prédire le stock de COS pour chaque LSU à partir des stocks initiaux de 1960 avec une marge d’erreur de 1,02 t C ha-1 en 1990 et de 1,10 t C ha-1 en 2000. Pour la Wallonie, le modèle n’est pas sensible aux scénarios climatiques ni aux scénarios de gestion pour la prédiction des stocks de COS en 2012. Cela s’explique d’une part par la période relativement courte pendant laquelle l’augmentation de la température n’est pas encore très importante et d’autre part, par le fait que les amendements organiques en Wallonie sont réalisés en majorité à des niveaux correspondants à des apports en azote égaux ou situés juste en dessous des normes définies pour les ZVN. Une épandage de 1,3 à 1,8 t C ha-1 correspond à une dose d’azote organique de 120 à 160 kg N ha-1 (Tableau 1). Si l’on combine les quatres scénarios (climat et gestions agricoles), le flux de CO2 provenant des terres arables et des sols sous prairies resteraient faibles en 2012. Une faible émission de CO2 issue des sols sous prairies en 2004 (639 kt CO2 an-1) devrait évoluer en une faible séquestration de carbone en 2012 (-91,7 kt CO2 an-1). Pour les terres arables, une tendance opposée devrait se produire : une faible séquestration en 2004 (-122,2 kt CO2 an-1) devrait évoluer en une faible émission en 2012 (151 kt CO2 an-1). 2 VANDENBERGHE, C., BONTEMPS, P-Y. et MARCOEN, J-M. 2006. Le programme de gestion durable de l’azote en agriculture en Région wallonne (premier programme d’action 2002-2006) : Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon. Groupe de recherche environnement et ressources azotées (GRENERA), Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux. 46 p. 3 Données extraites des parcelles expérimentales du Centre de Recherche Agronomique de Gembloux (Frankinet et al., 1993). 10 Tableau 1 Production de fumier et de lisier convertie en densité de carbone pour chaque région agricole Fumier et lisier (t C ha-1 an-1) Région agricole Limoneuse Condroz Herbagère Liégeoise Campine Hennuyère Haute Ardenne Herbagère Famenne Famenne Ardenne Jura 1958 1970 1,05 1,19 1,07 1,15 2,44 2,39 1,25 1,48 1,52 1,81 1,62 1,67 1,15 1,29 1,25 1,47 0,99 1,15 Source : (van Wesemael et al, sous presse) 1980 0,99 0,92 1,99 1,15 1,71 1,37 1,14 1,36 1,36 1990 1,05 0,96 1,80 1,13 1,63 1,37 1,28 1,72 1,28 2002 1,07 0,99 1,67 1,06 1,48 1,40 1,39 1,79 1,31 L’évolution de la biomasse de la forêt wallonne pour la période 2000-2012 est décrite par Perrin (2005). Il a utilisé le modèle EFOBEL pour définir un scénario de gestion ‘business as usual’ (BAU) et quatre scénarios de gestion forestière extrêmes : (1) remplacer tous les épicéas par du Douglas, (2 et 3) augmenter ou diminuer de 10 ans la période de révolution des épicéas, et (4) diminuer la mise en attente des parcelles avant la plantation. Suivant le scénario BAU, le stock de C dans la biomasse forestière passerait de 47,3 Mt C en 2000 à 55,7 Mt C en 2012 (Figure 3), ce qui implique une augmentation de 18,3 % par rapport au stock de 2000 au terme de la première période d’engagement du Protocole de Kyoto (Perrin, 2005). Entre 2008 et 2012, la séquestration annuelle varierait ainsi entre 2,7 et 2,9 % des émissions anthropiques belges de 1990. Des autres scénarios, seuls deux donnent des résultats différents. La variation de la période de révolution des épicéas de 10 ans (aussi bien à la baisse qu’à la hausse) provoquerait une augmentation du stock de carbone dans la biomasse de 8 % (si on augmente la prériode de révolution) et une diminution de 10 % (si on diminue la période de révolution) par rapport au stock de 2000. L’incertitude sur la modélisation des stocks de COS dans le sols forestiers est beaucoup plus élevée que la différence entre les stocks de COS en 2000 et en 2012. Cela empêche de prédire les flux de CO2 provenant des sols forestiers. 11 Figure 3 : Evolution des stocks de carbone dans la biomasse forestière simulée par le modèle EFOBEL suivant le scénario ‘business as usual’ Résineux 70.00 Feuillus 60.00 Stock de carbone (MtC) 50.00 40.00 30.00 20.00 10.00 0.00 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Années Source : Perrin (2005) 2.2 Flux de N2O et de CH4 des écosystèmes terrestres 2.2.1 Méthode Les pratiques agricoles, et le sol agricole en particulier, constituent une source importante de N2O, un GES dont le pouvoir de réchauffement global est 310 fois plus élevé que celui du CO2. Les émissions directes de N2O issues des sols agricoles en Région wallonne ont été calculées en utilisant la méthode IPCC (1996 IPCC Revised Guidelines). Cette méthode utilise un facteur d’émission de N2O qui est exprimé en pourcentage de la quantité de N épandu sous forme de fertilisants. Nous avons utilisé un facteur d’émission par défaut de 1,25 % et des données d’activité spécifiques à la Région wallonne. Le sol est aussi un puit de taille limitée pour le CH4. Boeckx et Van Cleemput (2001) ont estimé la capacité d’oxydation des sols sur base d’une revue de la littérature : ils ont obtenu pour les terres arables les valeurs moyennessuivantes: 1,5 kg CH4 ha-1 an-1 ; pour les sols sous prairies : 2,5 kg CH4 ha-1 an-1 et pour les sols forestiers : 4,2 kg CH4 ha-1 an-1. 2.2.2 L’évolution des flux de N2O et de CH4 provenant des sols arables et des prairies Les émissions de N2O issues des sols agricoles diminuent graduellement en Wallonie : elles sont passées de 3,63 kton N2O an-1 en 1990 à 3,42 kton N2O an-1 en 2003 (Figure 4). Les émissions de N2O les plus élevées sont enregistrées dans les régions Limoneuse et Sablo-limoneuse et les plus faibles dans les Hautes Ardennes et la région jurassique (Carte 3). Cette distribution spatiale coïncide avec la répartition de la charge en bétail exprimée en UGB par hectare de surface fourragère (Carte Agr 2.1 du TBE 2005). 12 Figure 4 : Evolution des émissions de N2O provenant des sols agricoles en Région wallonne 3.70 3.65 3.60 3.55 kton N2O 3.50 3.45 3.40 3.35 3.30 3.25 3.20 3.15 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 Source : MRW-DGRNE-DPA (Cellule Air, André Guns) La capacité d’oxydation de CH4 dans les sols wallons est marginale et presque constante pour la période 1990-2004. Les sols sous prairies séquestrent 0.9 kton CH4 an-1, les terres arables 0.6 kton CH4 an1 et les sols forestiers environ 2.0 kton CH4 an-1. Carte 3 : Emissions directes de N2O par hectare de SAU en Région wallonne pour l’année 1990 N2O (kg/ha) 2.43 - 2.97 2.98 - 3.71 3.72 - 4.65 4.66 - 5.45 5.46 - 6.88 0 50 Km Source : van Wesemael et al.(sous presse) 13 Comme en Flandre, les émissions de N2O provenant des sols en Région wallonne sont en diminution ces dernières dix années. Pourtant, les émissions de N2O provenant des sols sont presque deux fois plus élevées en Flandre (6,08-5,09 kton N2O an-1) qu’en Wallonie. Les émissions de N2O provenant des sols en Belgique et au Luxembourg sont élevées (10,7 kg N2O ha-1) par rapport à d’autres pays européens (1,7 kg N2O ha-1 pour la Grèce et 7,4 kg N2O ha-1 pour l’Allemagne (Boeckx et Van Cleemput, 2001)). Seules les Pays Bas présentent des émissions plus élevées, estimées à 14,2 kg N2O ha-1. Le taux d’émission de N2O est très bien correlé avec l’intensification de l’agriculture exprimée en surface de terre agricole par habitant. 3 Facteurs explicatifs Une fois que les flux de GES provenant des écosystèmes terrestres sont exprimés en équivalent CO2, l’importance des différents sources et puits ainsi que leur évolution peut être évaluée (Tableau 2). Les émissions de N2O provenant du sol représentent une source importante de GES qui compense presque totalement la séquestration nette de CO2 liée à l’évolution du stock de COS dans les sols (forestiers et agricoles). Selon la méthode IPCC, les intrants d’azote déterminent le niveau des émissions de N2O. Pour la Belgique, les intrants azotés proviennent pour moitié des engrais minéraux et pour l’autre moitié, en parts égales, de l’utilisation de fertilisants organiques, des résidus de cultures et de la production d’urine et de fèces pendant le pâturage (Boeckx et Van Cleemput, 2001). Depuis 1990, l’apport d’engrais azotés minéraux diminue (voir Goor, F. 2007. L’agriculture in : « Rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007 », p.39-59). La même tendance peut être observée pour la production d’azote organique. L’azote produit par les bovins (90 % de l’azote organique total) diminue depuis 1995. Les communes pour lesquelles les émissions sont les plus élevées correspondent à celles caractérisées par la charge en bétail la plus élevée. L’évolution la plus importante des stock de COS dans les sols agricoles a eu lieu entre 1960 et 1990 (Lettens et al., 2005b). Les stocks ont augmenté dans les sols sous prairies et ont diminué pour les terres arables (voir Van Wesemael, B. 2007. Les teneurs en matières organiques dans les sols en Région wallonne. Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon, 12 p.). Bien que la production de fumier n’a pas évolué de manière équivalente (Tableau 1), la conversion des prairies en terres arables, surtout occupées par des cultures fourragères, a résulté en une concentration des applications des effluents d’élevage sur les prairies et une dilution sur les terres arables. Entre 1990 et 2000, ces tendances ont été inversées : on observe une diminution des stocks de COS dans les sols sous prairies et une légère augmentation dans les terres arables. Pendant cette période, le changement d’occupation des sols était presque négligeable (4,4 % de diminution de surface sous prairies) et la raison pour laquelle les stocks de COS évoluent de cette manière n’est donc pas claire (Lettens et al., 2005b). Les quelques piste d’explications qui méritent d’être exploitées sont les suivantes : 1) une règlementation plus stricte en ce qui concerne les épandages d’effluents d’élevage pour respecter les prescriptions du Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA) ; 2) l’érosion hydrique plus importante des sols agricoles ; 3) le développement de l’agriculture biologique et des pratiques agri-environnementales qui augmentent la couverture végétale et donc le retour des résidus végétaux dans les terres arables ; 4) la tendance vers un travail réduit du sol et vers le semis direct. 14 Concernant l’évolution du stock de COS dans les sols forestiers, les tendances se basent sur deux mesures : en 1960 et en 2000. Pendant ces 40 ans, les stocks de carbone ont augmenté de plus de 50 %. Des explications possibles résident dans le fait qu’une partie importante de la forêt wallonne est encore assez jeune, ce qui implique que la biomasse produite a évolué en parallèle avec la production de litière (aussi bien des feuilles que des racines). Une autre explication réside dans l’extensification de la gestion forestière qui favorise le retour des résidus de récolte. La séquestration de CO2 réalisée à travers la croissance de la biomasse forestière a l’effet le plus important dans le bilan des flux de GES (Tableau 2). Bien que cette séquestration diminue légèrement entre 1990 et 2003, il est prévu que celle-ci continue d’être le puit le plus important de CO2 au moins jusqu’au 2012 (Figure 2). Cela s’explique par la forte productivité des forêts wallonnes. Perrin (2005) mentionne trois raisons possibles pour cette productivité importante : 1) la tendance à capitaliser le matériel sur pied, particulièrement en peuplements feuillus, 2) la sélection des meilleures provenances en essences résineuses pour le reboisement 3) la politique de conservation de la nature. 4 Impacts Les écosystèmes terrestres en Wallonie permettent une séquestration nette de GES qui passe de 1 609 ktonnes CO2 eq en 1990 à 2 253 ktonnes CO2 eq en 2003 (Tableau 2). Le puit qui séquestre le plus de GES dans ce bilan correspond à la croissance des forêts. Cette séquestration compense 3,5 à 4,9 % des émissions totales de GES en Wallonie estimées pour l’année de référence 19904. Ce bilan ne tient pas compte des émissions directes de CH4 provenant du cheptel ni des émissions liées au stockage des effluents d’élevage. Par ailleurs, le stockage de carbone dans la biomasse et dans les sols a des effets secondaires qui sont décrits plus en détails dans les chapitres du rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007 : ‘La matière organique dans les sols5’(SOLS 2), ‘La fertilité et la biodiversité dans les sols6’(SOLS 1) et ‘l’érosion hydrique des sols agricoles7’ (SOLS 3). 4 Les flux de CO2 provenant des écosystèmes terrestres, qui au contraire des flux de N2O et CH4 ne sont pas inclus dans les émissions totales de GES, ont été soustraits du total des émissions avant le calcul de ces pourcentages. 5 VAN WESEMAEL, B. 2006. La matière organique dans les sols en Région wallonne. Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon. Département de Géographie, Faculté des Sciences, Université catholique de Louvain. 12 p. 6 GENOT, V., COLINET, G. et BOCK, L.. 2006. La fertilité des sols agricoles et forestiers en Région wallonne. Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon. Laboratoire de Géopédologie, Unité sol-écologie-territoire, Faculté universitaire des sciences agronomiques de Gembloux. 73 p. 7 DAUTREBANDE, S. et SOHIER, C. 2006. L’érosion hydrique et les pertes en sols agricoles en Région wallonne. Dossier scientifique réalisé dans le cadre de l’élaboration du Rapport analytique 2006-2007 sur l’état de l’environnement wallon. Hydrologie & Hydraulique Agricole, Génie Rural & Environnemental, Faculté universitaire des sciences agronomiques de Gembloux. 121 p. 15 Tableau 2 Bilan des flux de GES provenant des écosystèmes terrestres en Wallonie pour les années 1990 et 2003 Sources 1990 2003 kton CO2 eq. Agriculture Évolution du COS dans les terres arables -142 -150 Évolution du COS dans les sols sous prairies 668 642 N2O émis par le sol 1 125 1 056 CH4 séquestré par les sols agricoles -31 -31 Forêts Évolution de la biomasse -6 428 -6 192 Récolte de bois 4 675 3 866 Évolution du COS dans les sols forestiers -1 433 -1 402 CH4 séquestré par les sols forestiers -43 -42 Bilan total -1 609 -2 253 Un signe négatif fait référence à une séquestration de CO2, tandis qu’un signe positif signifie une émission de CO2. 5 Réponses et recommandations Des mesures spécifiques qui visent à séquestre du CO2 dans les écosystèmes terrestres n’existent pas encore en Wallonie ni dans d’autres pays signataires du Protocole de Kyoto. Des programmes de recherche, tels que ‘Quantification de l’évolution de la teneur en carbone dans les sols agricoles de Wallonie’ (2003-2007, Direction Générale de l’Agriculture) sont financés par l’administration wallonne afin d’étudier le potentiel de séquestration du carbone dans les écosystèmes terrestres en Wallonie. La Politique Scientifique belge a financé deux projet de recherche, METAGE8 et CASTEC9 dans le cadre de son programme d’appui au développement durable (PADD II). Ce deux projets ont produit les chiffres nécessaires à l’établissement des inventaires nationaux de GES. Pourtant, d’autres politiques comme la gestion des effluents d’élevage, le code de bonnes pratiques agricoles, le code forestier, les circulaires sur les aménagements en forêt, l’agriculture biologique et les mesures agri-environnementales ont un effet sur les flux de CO2 provenant des écosystèmes terrestres. Plusieurs mesures et pratiques agricoles permettent de séquestrer ou d’émettre des GES à partir du sol. Pour les terres arables, nous mentionnerons par exemple les mesures agri-environnementales telles que les tournières enherbées et la couverture des sols en hiver, ainsi que les pratiques de gestions agraires, telles que le semis direct, le labour réduit, le travail minimal du sol, la gestion des effluents d’élevage, la conversion des terres arables en prairies, la production de cultures de biomasse, la gestion des résidus de cultures, la production de compost, l’épandage de boues de stations d’épuration (et autres matières organiques exogènes), ainsi que l’agriculture biologique. Tous ces mesures présentent la capacité de séquestrer le carbone dans le sol et/ou dans la biomasse. Smith et al. (2005) ont établi une méthode pour estimer la séquestration de GES dans les sols en appliquant ces mesures pour la Belgique, le Royaume Uni, la Finlande et la Suède. Ils ont d’abord estimé les surfaces agricoles où chacune de ces mesures ont été appliquées pour les années 1990, 2000 et les superficies où elles le seront probablement en 2010. Ils ont ensuite multiplié cette surface par un taux de séquestration par hectare provenant de la littérature, ce qui permet de calculer une séquestration nette en faisant la différence par rapport à l’année de référence 1990. Cette méthode indique que l’on peut s’attendre pour la Belgique à une séquestration nette de 0,22 tonnes CO2 ha-1 an-1 en 2010, si les pratiques 8 9 Modelling Ecosystem Tace Gas Emissions Carbon Sequestration Potential in different Belgian Terrestrial Ecosystems 16 décrites plus haut sont appliquées sur des surfaces réalistes en tenant compte de la législation environnementale et de la politique de promotion des mesures agri-environnementales. Selon la même méthodologie, la séquestration de carbone dans les sols d’autres pays semblerait être encore plus faible. Suivant les hypothèses décrites plus haut (Smith et al., 2005), les mesures de gestion agricole et agrienvironnementales prévues pour 2010 mèneraient à une séquestration supplémentaire de 90,3 ktonnes CO2 an-1 dans les terres arables en Région wallonne. Pour les sols sous prairies, l’incertitude des effets de la gestion sur la séquestration de carbone est beaucoup plus élevée et le potentiel de séquestration ne peut pas être calculé. Le potentiel de séquestration lié à la croissance de la biomasse forestière en Région walonne est beaucoup plus élevé (il représente 3,11 Mt CO2 an-1 cad 2,2 % des émissions belges de GES en 1990 (Perrin, 2005)). Contrairement à la gestion des terres arables et des prairies, la séquestration de carbone lié à la croissance de la biomasse forestière est plafonnée, par l’article 3.4 du Protocole de Kyoto, à 110 kton CO2 an–1, soit un dixième du potentiel de séquestration existant en Région wallonne. . La séquestration nette de CO2 par les écosystèmes terrestres est non négligeable par rapport au total des émissions de GES en Région wallonne (3,5-4,9 % des émissions en 1990, l’année de référence du Protocole de Kyoto). Les modèles prédisent que cette séquestration continuera et qu’elle augmentera même légèrement d’ici 2012. Bien que la séquestration de carbone la plus importante est due à l’évolution de la biomasse forestière, les sols forment un réservoir de carbone très important. Jusqu’en 2012, les modèles ne prévoient pas de flux de CO2 importants à partir de ce réservoir vers l’atmosphère. Au contraire, les quatre scénarios examinés plus haut indiquent que les quantités de carbone dans les sols augmenteraient légèrement, ce qui résulterait en une séquestration de CO2. La variabilité spatiale des teneurs en COS est très importante, ce qui complique la détermination des effets des mesures de gestion agricole sur l’évolution de ce réservoir. Comme la Belgique dispose d’un réseau de données de COS historique (1950-1970), une situation unique en Europe, il convient de mettre à jour ce réseau avec des données les plus récentes possibles. Ce réseau permettra d’étendre le suivi du stock de carbone dans la biomasse forestière (par l’inventaire forestier) aux trois autres principaux compartiments qui interviennent dans le cycle du carbone terrestre (sols forestiers, sols arables, sols sous prairies). Une initiative pour étendre ce réseau a été lancée dans le cadre d’un projet de recherche financé par la DGA (Goidts et van Wesemael, soumis). Vu la variabilité spatiale du COS, l’effet de la gestion agraire sur l’évolution des stocks au sein d’une parcelle demande l’analyse d’un très grand nombre d’échantillons. Vu que les changements de COS induits par la gestion agraire ne dépassent pas les 2 t C ha-1 an-1 (Freibauer et al., 2004), l’évolution maximale du COS sur une période raisonnable (3-5 ans) se limite à environ 5 t C ha-1. Une étude sur la variabilité du taux de carbone dans les terres arables en Ardenne et dans la région jurassique a montré qu’il faudrait analyser entre 7 et 129 échantillons par parcelle d’environ 1 hectare pour détecter un changement de 5 t C ha-1 (Stevens et al., 2006). Les techniques d’analyse classiques ne permettent pas de traiter ce grand nombre d’échantillons à un coût raisonnable. De nouvelles techniques d’analyses hyperspectrales basées sur la réflectance dans l’infrarouge se montrent prometteuses pour analyser en temps réel un grand nombre d’échantillons (Stevens et al., 2006). L’application de ces nouvelles techniques pour déterminer le taux de carbone dans les sols arables à partir de mesures aéroportées ou manuelles est en voie de développement. Des zones pilotes en Ardenne et dans la région jurassique ont été examinées en 2003 et 2005. 17 6 Références Bellamy, P.H., Loveland, P.J., Bradley, R.I., Lark, R.M. & Kirk,G.J.D., 2005. 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