Entorse de l`articulation trapézo-métacarpienne du pouce et « contre
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Entorse de l`articulation trapézo-métacarpienne du pouce et « contre
MedActuel DPC recommandé par : votre développement professionnel continu – vol. 14 no 5 9 avril 2014 Objectifs pédagogiques ◾ Connaître le geste technique responsable de la blessure. Bien appréhender l’atteinte anatomique et l’investigation. ◾ Savoir comment aborder le traitement. ◾ médecine du sport Entorse de l’articulation trapézo-métacarpienne du pouce et « contre » au volley-ball Affiliations * Professeur associé au Collège de Médecine des Hôpitaux de Paris. L’auteur ne déclare aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article. par le Dr Jacques Rodineau* Conseil de rédaction et révision scientifique Ce texte fait suite à une présentation réalisée récemment par le Pr Jacques Rodineau à l'invitation de l'Association des médecins du sport québécois (AQMS). L'approche clinique française qu’il présente colle à celle de notre médecine du sport québécoise. Le Pr Rodineau a plusieurs publications à son crédit et il est d'une grande rigueur scientifique. Il est toujours intéressant de connaître l'approche européenne dans ce domaine spécialisé. – Dr François Croteau Président du conseil Dr François Croteau Directeur médical du Groupe Santé, Québec, Rogers Média. Médecin de famille à la retraite, anciennement à l'Hôpital Santa-Cabrini, Montréal; Ancien président du comité de DPC du Collège des médecins du Québec D ans les études consacrées aux aspects traumatiques du volley-ball1-7, les blessures portent le plus fréquemment sur les chevilles, les genoux, les mains et les doigts, les épaules et le rachis lombaire. La phase de jeu qui occasionne le plus de lésions au pouce et aux doigts est le « contre », technique de défense contre les smashs, utilisée par un ou trois joueurs dans les matchs qui se jouent à six contre six, généralement par un seul joueur au beach-volley. Le ou les « contreurs » s’opposent à l’attaque d’un seul joueur et sautent avec un léger temps de retard par rapport à ce dernier afin non seulement de s’opposer au passage du ballon dans leur propre camp, mais aussi de marquer le point en faisant directement tomber le ballon dans le camp adverse. Pour cela, ils doivent sauter haut et « passer » le plus possible les mains au filet. Ce geste s’effectue donc les bras tendus vers le haut et vers l’avant, et les mains largement ouvertes pour opposer la plus grande surface possible à l’adversaire. C’est lors du contact avec le ballon smashé avec force et vitesse que la plupart des lésions des mains surviennent (figure 1). Les lésions liées à un contre se présentent avant tout sous la forme d’entorses de gravité variable au niveau des articulations métacarpophalangiennes du pouce et interphalangiennes proximales des doigts. L’anatomie, la physiopatho- Dre Johanne Blais Membre du Conseil de FMC de la faculté de médecine de l’Université Laval; Responsable du Comité de FMC du dépt. de médecine familiale de l’Université Laval; Professeur titulaire de clinique, CHUQ, Hôpital Saint-François-d’Assise. Dr Roger Ladouceur Responsable du Plan d’autogestion de DPC, Collège des médecins du Québec; Professeur agrégé de clinique du dépt. de médecine familiale de l’Université de Montréal; Médecin de famille, Hôpital de Verdun du CSSS du Sud-OuestVerdun. Figure 1 – Le contre au volley-ball est une cause fréquente d’atteinte de l’ATM. logie, la symptomatologie clinique, l’apport de l’imagerie et le traitement de ces différentes lésions ligamentaires et/ou osseuses sont bien connus et codifiés. En revanche, il n’en est pas de même pour les atteintes de l’articulation trapézo-métacarpienne (ATM), siège de lésions diverses : entorses de gravité variable, luxations, fractures articulaires du trapèze et du premier métacarpien. Le diagnostic est trop souvent éludé et ces lésions sont fréquemment mal évaluées, voire complètement méconnues. Elles sont régulièrement traitées de façon inadaptée. Elles peuvent laisser des séquelles non négligeables. Cette méconnaissance des problèmes causés à l’articulation métacarpophalangienne du pouce tient au fait que cette articulation est complexe sur les plans anatomique, physiologique, clinique, radio logique et thérapeutique. Anatomie et anatomophysiologie L’articulation trapézo-métacarpienne ne comprend pas uniquement l’articulation située entre le trapèze et le premier métacarpien. En effet, il existe aussi une articulation entre le trapèze et le deuxième métacarpien, mais son importance sur le plan clinique est modérée. L’articulation entre le trapèze et le premier métacarpien est définie de façon très variée dans la littérature médicale. Selon Foucher8, cette articulation est en obliquité dans les trois plans de l’espace et son socle, le trapèze, est mobile. Pour définir les mouvements de la colonne du pouce, cet auteur a proposé de prendre cette articulation en considération, avec le pouce en position de repos et non pas de rétropulsion, position dite « anatomique ». Ainsi définie, la surface articulaire du trapèze comporte une courbure concave sagittalement et convexe transversalement. La surface articulaire du premier métacarpien es t quadrangulaire avec quatre tubérosités, l’exSuite à la page 18 Dre Francine Léger Médecin de famille; Professeur adjoint de clinique au département de médecine familiale de l’Université de Montréal; Service de périnatalité du CHUM. Dre Diane Poirier Médecin, M.Sc.; Chef du service des soins intensifs au CSSS Richelieu-Yamaska; Professeur d’enseignement clinique au CHUS; Membre du comité de formation continue de Médecins francophones du Canada > Congrès AQMS 2014 Pour tout renseignement, visiter aqms.org/formation-acf.html L’AQMS est fière d’annoncer que le congrès 2014 sera international, en collaboration avec l’ACMSE et la FIMS, et tenu à Québec 18 au 21 juin. La majorité des conférences seront en anglais sans traduction simultanée. Cependant, les sessions organisées par l’AQMS seront en français : les 19 et 20 juin auront comme thème les variantes anatomiques et pathologies associées, alors que le 21 juin sera sur les pathologies complexes du poignet. Pour vous inscrire : http://www.fims2014.org www.ProfessionSante.ca – 9 avril 2014 – L’actualité médicale – 17 MedActuel DPC > entorse de l’articulation trapézo-métacarpienne du pouce et « contre » au volley-ball > Suite de la page 17 terne et l’interne étant les plus accentuées. L’insertion de la capsule articulaire se fait à distance des surfaces articulaires. Cette capsule est large et lâche, et sa laxité explique la franche mobilité de l’articulation, avec possibilité de rotation axiale. Cette capsule articulaire est renforcée par des ligaments et par le tendon de certains muscles longs du pouce. Ces ligaments ont été décrits en des termes très variés, mais Zancolli a proposé une nomenclature qui, à l’heure actuelle, est admise par la majorité des auteurs et doit être adoptée. Lorsque le pouce est en position de repos, on peut déterminer un ligament radial et un ligament cubital, ainsi qu’un ligament dorsal et un ligament palmaire : > le ligament radial est assez tenu et ne renforce que faiblement la capsule, ce qui explique la facilité de la luxation en dehors du premier métacarpien. En abduction, le tendon long abducteur du pouce est susceptible de renforcer le ligament radial, mais il n’en demeure pas moins qu’il existe un point faible externe; > le ligament cubital joue un rôle fondamental dans la stabilité : la solidité de ce ligament explique que la rupture ligamentaire à ce niveau est moins fréquente que l’arrachement osseux; > le ligament dorsal, disposé en « V », est plus résistant que le ligament palmaire et joue un rôle important dans la stabilité du premier métacarpien, notamment au cours d’une prise distale. collection D. Le Viet Figure 2 – Examen clinique de l’ATM après immobilisation soigneuse du trapèze À la palpation, la douleur est localisée au niveau de la base du premier métacarpien. La pression axiale sur la colonne du pouce provoque une douleur et permet de déclencher des crépitations (figure 2). La mobilité de l’articulation trapézo-métacarpienne doit être étudiée de façon comparative : seule une augmentation de la mobilité par rapport au côté opposé permet d’affirmer le diagnostic d’entorse grave. La laxité doit être recherchée sur le plan frontal lors de mouvements d’abduction radiale et d’adduction cubitale, également sur un plan orthogonal par rapport au précédent de façon à rechercher une augmentation de la rétropulsion. prendre trois clichés : le pouce en position neutre, en rétropulsion et en antépulsion. Sur ces clichés de face, le trapèze est toujours facilement analysé. Le cliché de profil, le plus classique, est réalisé la main en pronation; le bord radial du pouce (en légère flexion) repose sur toute la longueur de la plaque et les quatre doigts longs reposent sur la plaque par la pulpe. Le bord cubital de la main doit être soulevé dans une position de pronation de 20° à 30°, alors que la position du pouce est la même que précédemment. Le rayon doit être centré sur l’articulation métacarpo-phalangienne du pouce. Si la clinique est évocatrice d’une lésion ligamentaire de l’articula- Les clichés dynamiques sont rarement indispensables au diagnostic positif. Diagnostic clinique L’interrogatoire oriente le clinicien vers un traumatisme de la colonne du pouce, soit lors d’un choc direct, soit, beaucoup plus souvent, lors d’un mécanisme indirect de cisaillement commissural lié à une abduction radiale forcée. Le sujet ressent une douleur vive qu’il localise au niveau de la tabatière anatomique. Dans les suites, la gêne fonctionnelle est des plus variables et il arrive souvent qu’elle soit discrète, quelle que soit la lésion. À l’examen, la tabatière anatomique est le siège d’un empâtement de constitution précoce. Une ecchy mose est parfois observée. Bilan d’imagerie Tout traumatisme de l’articulation trapézo-métacarpienne justifie un examen radiographique, car l’apparition rapide d’un œdème au niveau de la tabatière anatomique et l’absence de spécificité des signes cliniques ne permettent par d’affirmer que le tableau clinique correspond à une lésion ligamentaire de l’articulation trapézo-métacarpienne ou à une fracture du trapèze ou de la base du premier métacarpien. L’exploration radiologique doit être guidée par l’examen clinique, mais elle comporte obligatoirement certaines incidences qui ne sont ni faciles à réaliser, ni aisées à interpréter du fait de l’obliquité des axes de l’articulation. Pour le cliché de face, il faut essayer d’être parallèle au plan d’antépulsionrétropulsion, mais le meilleur repère reste, en position intermédiaire, le plan de l’ongle9. Pour le cliché de profil, il faut être parallèle au plan d’abduction-adduction, lui-même parallèle au plan de f lexion-extension des articulations métacarpo-phalangiennes et interphalangiennes du pouce9. Le cliché de face peut être pris en pronation forcée, commissure contre la plaque, ou en position intermédiaire, le poignet de profil, sans inclinaison radiale, l’ongle parallèle à la plaque. Pour Kapandji9, le bord cubital doit reposer sur la plaque avec 15° d’extension du poig net , le r ayon i ncl i né de 30° et, dans cette position, il faut 18 – L’actualité médicale – 9 avril 2014 – www.ProfessionSante.ca tables. La plupart des traits de fracture semblent émaner d’un centre fracturaire interne. > Les fractures partielles se présentent sous différents aspects, dont le plus classique est la fracture de Bennett qui intéresse une grande partie de la base et comporte une subluxation dorsale du premier métacarpien. > Les fractures totales compren nent les fractures à double fragment basal en « Y » de Rolando et les fractures basales uniques, dites « obliques longues ». > Les fractures mixtes associent un trait intracapsulaire et un trait extracapsulaire donnant des fractures en « Y » ou en « Y » inversé. > Les fractures comminutives présentent des aspects variés et sont fréquemment caractérisées par une impaction. tion trapézo-métacarpienne, deux incidences orthogonales sont nécessaires selon la technique de Kapandji. Elles permettent de rechercher un arrachement ligamentaire et témoignent d’une entorse grave ou d’une subluxation, voire d’une luxation de l’articulation trapézo-métacarpienne. Les clichés dynamiques sont rarement indispensables au diagnostic positif. Ils permettent de mettre en évidence une laxité radiale ou palmaire sur les incidences en hyperabduction radiale, ou en rétropulsion, ou en flexion compression-axiale. Les examens de contraste que sont l’arthrographie et l’arthroscanner ont une indication exceptionnelle dans les traumatismes récents. Ils ne doivent être demandés qu’en cas de réelle incertitude diagnostique. > Les fractures du trapèze se caractérisent par une apparence de rareté, d’où, probablement, la difficulté de les mettre en évidence sur le plan radiographique. Elles se présentent sous des aspects variés : fractures sagittales et fractures frontales à trait vertical, fractures à trait horizontal, fractures cunéennes ou parcellaires. Selon Foucher8, la plus fréquente est la fracture de la tubérosité externe, qui peut être parfois déplacée du fait de l’absence d’insertion ligamentaire à ce niveau. Elle s’accompagne d’une subluxation du premier métacarpien, analogue à celle observée dans la fracture de la base du premier métacarpien. > Les luxations sont des lésions rares, bien que la luxation de l’articulation trapézo-métacarpienne soit la plus fréquente parmi les luxations carpo-métacarpiennes. Le déplacement est le plus souvent externe etse traduit par une touche de piano, aisée à reconnaître lors de l’examen clinique. Les subluxations de l’articulation trapézo-métacarpienne sont plus fréquentes. Diagnostic différentiel Traitement Physiopathologie La mobilité de la colonne du pouce dépend essentiellement de l’articulation trapézo-métacarpienne. Plus le pouce s’éloigne de sa position de verrouillage physiologique, plus sa stabilisation ligamentaire devient précaire et vulnérable. L’adduction cubitale met en tension le ligament radial, l’abduction radiale sollicite le ligament cubital et la rétropulsion forcée, le ligament palmaire. Les sollicitations se font avant tout en hyperabduction du pouce et, bien que solide, le ligament cubital subit des traumatismes répétés et peut se déchirer ou être arraché lors d’un contre. Le ligament radial est sollicité lors d’une hyperadduction cubitale. Le ligament palmaire, tendu en adduction dorsale-rétropulsion du pouce, est particulièrement sollicité lors de contacts violents avec le ballon. Figure 3 – Traitement orthopédique d’une lésion de l’ATM Le diagnostic différentiel est établi par ordre de fréquence des fractures de la base du premier métacarpien, des fractures du trapèze et des luxations trapézo-métacarpiennes. > Les fractures de la base du premier métacarpien sont les lésions les plus fréquemment observées à ce niveau. Elles ont été l’objet de nombreuses classifications : fractures intra-articulaires de type Bennett et Rolando et fractures extra-articulaires transverses, obliques ou complexes; fractures extracapsulaires, le plus souvent stables en dehors des fractures transversales, et fractures intracapsulaires, le plus souvent ins- Les entorses bénignes affirmées par l’examen clinique, au besoin répété au huitième jour, n’entraî nent qu’une simple immobilisation à but antalgique. En cas de douleur persistante, l’infiltration locale d’un corticoïde permet de régler rapidement le problème et d’éviter l’apparition d’une arthrite post-traumatique. En cas d’entorse grave ou de subluxation, il faut proposer un traitement orthopédique consistant en l’utilisation d’une orthèse statique ou dynamique ou en la confection d’un gantelet antibrachial en résine (figure 3). Le pouce est placé en po- sition d’abduction modérée. Un rembourrage au niveau de la tabatière permet de maintenir un contre-appui. L’articulation interphalangienne du pouce est laissée libre. La durée d’immobilisation est habituellement de trois semaines. Selon Foucher 8 , l’avantage de cette méthode orthopédique est la simplicité, mais elle ne permet pas une bonne ouverture commissurale du fait de la position d’abduction modérée utilisée. En outre, elle peut présenter des inconvénients au niveau de l’articulation métacarpo-phalangienne avec, au maximum, un risque de dislocation de cette dernière. Enfin, elle n’est pas exempte de complications cutanées. Aussi, certains auteurs10 proposent un traitement chirurgical, mais ils s’accordent à reconnaître que la suture directe, notamment du ligament cubital, est souvent techniquement impossible à réaliser et n’empêche ni l’évolution vers une instabilité chronique ni le risque de développement ultérieur d’une rhizarthrose. Aussi plaidentils en faveur d’une ligamentoplastie, technique fondée sur l’importance des lésions anatomiques et le degré d’instabilité fonctionnelle. D’autres auteurs considèrent que l’embrochage à foyer fermé métacarpo-trapézien est une solution thérapeutique simple et efficace qui constitue une option de rechange à la ligamentoplastie. Conclusion > Les entorses de l’articulation trapézo-métacarpienne ne sont pas fréquentes durant un contre au volley-ball, mais elles ne sont pas exceptionnelles non plus. > Le diagnostic repose sur l’examen clinique, bien que les signes observés ne permettent pas de poser un diagnostic différentiel entre lésion ligamentaire et fracture. > L’imagerie occupe une place importante dans l’évaluation des ces entorses. > Le traitement non chirurgical a la faveur des volleyeurs et des volleyeuses. Le traitement opératoire doit être réservé à des cas particuliers. < Consultez les références dans professionsante.ca/ medecins/formation/medactuel/ entorse-pouce-29891 entorse de l’articulation trapézo-métacarpienne du pouce et « contre » au volley-ball > MedActuel DPC 1.Aagaard H, Scavenuuis M, Jorgensen U. An epidemiological analysis of the injury pattern in indoor and in beach volley-ball. Int J Sports Med. 1997; 18: 217-21. 2. Bhairo N.H, Nijsten M.W, Van Dalen K.C, Ten-Duis H.J. Hand injuries in volley-ball. Int J Sports Med. 1992; 13: 351-4. 3. Gangitano R, Pulvirenti A, Ardito S. Lesioni traumatiche da pallavolo: rilievi clinicostatistice. Ital J Sports Traumatol. 1981; 3: 31-4. 4. Gerberich S.G, Luhman S, Finke C, Priest J.D, Beard B.J. Analysis of severe injuries associated with volley-ball activities. Physician and Sports Medicine 1987; 15: 75-9. 5. Schafle M.D, Regua R.K, Patton W.I, Garrick J-C. Injuries in the 1987 National Amateur Volley-ball Tournament. 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