Cet article a été rédigé par notre amie Hoang Thi Phuong

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Cet article a été rédigé par notre amie Hoang Thi Phuong
Cet article a été rédigé par notre amie Hoang Thi Phuong, membre de
l’l’Association d’Amitié et de Coopération Vietnam France.
Il propose une lecture historique et politique des liens entre écriture,
alphabétisation et culture au Vietnam.
La suite de cette réflexion consacrée au journalisme, au roman et au théâtre
sera publiée dans le prochain numéro de Perspectives.
Le “quốc ngữ” et l’avènement du Việt Nam
Une langue écrite ancienne du vietnamien avait existé, avant la domination chinoise,
avant notre ère, les signes, répétitifs, sur les tambours en bronze, les outils en pierre
taillée, sur des socs de charrue, sur les flans des montagnes… en témoignent. Dans le but
d’anéantir la culture vietnamienne, au début de leur occupation, les chefs militaires
chinois Nhâm Diên, Sĩ Nhiếp avaient ordonné à l’époque, la destruction par le feu de tous
les écrits. Le ramassage systématique de tous les tambours de bronze en 43 décidé par Mã
Viện, comme la destruction des ouvrages écrits par les Minh au 15ème siècle visaient le
même objectif.
Aussi pour écrire, les Vietnamiens ont eu recours successivement au :
- chữ Hán, chữ nôm - le chinois classique, pendant la domination chinoise (40-938/939)
- chữ nho : écriture démotique créé par les Vietnamiens sur la base du Hán
- Quốc ngữ, une création d’écriture latinisée, dès le milieu du 16ème siècle pour arriver
en 1651 à une forme proche de l’actuelle, grâce aux efforts des évangélisateurs européens
notamment portugais, italien et français, dont le but premier était de pouvoir transcrire les
textes religieux dans une écriture facilement accessible à la masse.
En 1945, tout de suite après la déclaration de l’Indépendance, le jeune gouvernement de
la RDVN se préoccupe de l’éducation. Le Président Hồ Chí Minh avait appelé le peuple
entier à s’atteler à trois tâches prioritaires : (diệt giặc đói, diệt giặc dốt, diệt giặc ngoại
xâm)
- enrayer la famine
- enrayer l’analphabétisme
- vaincre les agresseurs étrangers
Dès le lendemain de la Déclaration d’Indépendance, au cours d’une réunion du
gouvernement provisoire le 3/9/45, le Président lança une campagne de lutte contre
l’analphabétisme : « Un peuple ignorant est un peuple faible. C’est pourquoi je propose
d’élargir la campagne de lutte contre l’analphabétisme » proclamait-il.
Quelques 95% de la population vietnamienne d’alors (sur 22 millions d’habitants) ne
savaient ni lire, ni écrire. La tâche était de taille.
Le choix fut vite décidé. Les Vietnamiens optaient pour le « Quốc ngữ » - écriture
nationale.
D’où vient le vietnamien ?
De nombreuses thèses :
- Un vietnamien ancien aurait existé : des recherches auraient établi une écriture capable
de transcrire le vietnamien ancien – le Khoa Đẩu – des signes ont été retrouvés sur des
vestiges.
- Plus probablement, le vietnamien fait partie du groupe des langues viêt-muong de la
branche môn-khmer de la famille des langues austroasiatiques.
- Pendant plus de mille ans de domination chinoise, jusqu’à l’an 938 de notre ère, la seule
écriture utilisée au Vietnam était l'écriture idéographique chinoise, chữ Hán/chữ nho, la
même que celle pratiquée en Chine à la même époque, mais lu en vietnamien. La langue
écrite, en chữ Hán, était exclusivement utilisée dans l'administration et dans la littérature,
et n’était maîtrisée que par une infime minorité de la population.
Il se forgeait parallèlement une écriture « phonétique » pour transcrire certains mots du
vietnamien (parlé), notamment des noms de lieux, de plantes, d'animaux, etc. À partir de
l'indépendance du Vietnam, au 10ème siècle de notre ère, ce système phonétique se
formalisa : tout en utilisant des caractères Hán pour transcrire phonétiquement des mots
vietnamiens, on créa de nouveaux caractères, toujours basés sur le Hán, pour en traduire
d'autres, ce fut la naissance du chữ Nôm - l’écriture du Sud, méridionale.
Cette forme d'écriture connut son apogée au 18ème siècle, où des œuvres majeures en
Nôm furent composées, notamment le très célèbre Kim Vân Kiều de Nguyễn Du. Les
empereurs Tây Sơn l'utilisèrent même comme écriture officielle durant leur règne (17881802).
Dans le mouvement d’évangélisation de l’Asie et en particulier, du Vietnam, aux 15ème,
16ème et notamment au 17ème siècle, des prêtres jésuites portugais, espagnols, italiens et
français, avec une contribution significative des intellectuels vietnamiens ont réussi la
transcription du vietnamien oral avec l’alphabet latin, accouplé à un système de signes de
tonalité. Un nom est le plus souvent cité, le père jésuite français, Alexandre de Rhodes
avec le dictionnaire Dictionarium Annamaticum Lusitinum et Latinum réédité à Rome en
1651. C’est ainsi que naquit le Quốc ngữ, littéralement « écriture nationale ».
Depuis le 20ème siècle et particulièrement depuis la Révolution d’août en 1945, il connut
un développement fulgurant et joue un rôle important dans l’avènement du Việt Nam.
L’alphabétisation de tout un peuple devenait ainsi une tâche urgente, s’alignant sur le
même front que la lutte contre la famine, la lutte contre l’agression étrangère. Dès le 8
septembre 1945, un décret annonçait la création de Nha Bình dân học vụ - l Service de
l’alphabétisation populaire. Le Président de la jeune République lançait un appel
pathétique où on lisait : Que ceux qui savent lire enseignent à ceux qui ne le savent pas
encore… Que ceux qui ne savent pas encore lire fassent un effort pour apprendre. Si
l’épouse ne sait pas lire que le mari se charge de lui le apprendre, de même entre frères
et sœurs, aînés et cadets, que les uns enseignent aux autres, si les parents ne savent pas
lire que les enfants le leur apprennent… On voyait partout des mots d’ordre : au front,
nous combattons pour chasser les agresseurs étrangers, à l’arrière, éliminons
l’ignorance… Une personne de plus qui va en classe c’est une pierre de plus pour bâtir
notre Indépendance…
Une des tâches urgentes du moment était de relever le niveau culturel du peuple. À
l’occasion de la première rentrée scolaire du nouveau régime, dans une lettre adressée à
tous les élèves du pays, le Président écrivait : La patrie vietnamienne sera renommée,
éclatante ou ne sera pas, le peuple vietnamien pourra-t-il monter sur l’estrade de la
gloire pour rivaliser avec les puissances des cinq continents ou non, cela dépendra de
vous tous, de votre part importante à l’effort pour l’étude.
Une organisation colossale se mit en place dans tout le pays. Des cours de formation
pédagogique express étaient montés. Les enseignants devenaient ainsi militants, soldats
d’un front nouveau. En une année, d’août 1945 au 19 août 1946, 95.000 enseignants ont
été formés.
Les classes bình dân học vụ étaient données partout où l’on pouvait, dans les maisons
communes, les temples, les pagodes, au pied des banians, dans un coin de marché…,
pour écrire, c’était de la craie blanche mais aussi des morceaux de charbon, de chaux, de
brique fraiche…, comme tableau, les portes, des lits de planche, des cours en brique, tout
comme les murailles, des paniers plats, le dos des buffles, tout pouvait faire affaire et
contribuait à l’œuvre commune…
Le pays entier était baigné dans ce courant d’alphabétisation « patriotique » si on en croit
les slogans qui ornaient le paysage : Aller en cours c’est faire de la Résistance… Quand
on apprend à lire, on contribue au succès de la Résistance… chaque classe ‘bình dân học
vụ’ c’est un nid de propagande pour la Résistance …
Les résultats ne se firent pas attendre, en novembre 1946, un peu plus d’un an après,
quelques 2 500 000 personnes (exactement 2 520 678) étaient alphabétisées.
En fait, l’engouement qui animait chacun était énorme. Le peuple, paysan
principalement, venait tout juste de sortir de la longue nuit de l’esclavage, encore tout
embué par mille et uns tabous, croyances, rétrogrades, obscurantistes pour beaucoup, les
gens s’en donnaient à cœur de joie. D’ailleurs, en même temps avec l’alphabétisation
était accouplé la tâche de divulgation, de mise en place d’un mode de vie moderne,
littéralement xây dựng nếp sống mới. Et on s’évertuait à créer des ca dao – chant
populaire – pour lesquels les Vietnamiens avaient un don tout particulier, les ca dao
clamaient les bienfaits du savoir, distillaient des pratiques nouvelles, progressistes, qui
incitaient les uns et les autres à rivaliser dans le mouvement.
Les ca dao furent très nombreux et couvraient tous les aspects de la vie quotidienne. Les
règles d’hygiène, corporelle, alimentaire, le savoir-vivre dans la famille, en société, le
slogan cần, kiệm, liêm, chính (diligence, économie, intégrité, droiture) de l’Oncle Hồ,
les techniques de culture, d’élevage, mais aussi les méthodes de lutte appropriée pour
chacun dans la Résistance furent les multiples thèmes, utiles et naturels. Ces chants
populaires eurent alors un support nouveau, le Quốc ngữ , facilement maîtrisé car trois
mois d’étude suffisaient, devenaient des armes d’autant plus redoutables quand ils
rencontraient un milieu tout prêt à les accueillir. Ils ensemencèrent des idées, des
concepts, des techniques à un rythme défiant toute concurrence.
J’étais alors en Nouvelle Calédonie, où mes parents étaient travailleurs immigrés dans les
mines de l’île. Les Vietnamiens étaient en liesse. Radieux, les uns et les autres se
racontaient les bribes de nouvelles de la Révolution d’août qu’ils arrivaient à saisir à la
radio. Fini le sort de coolie. Fini l’asservissement. Finis les coups de cravache, les
punitions, les suppressions de salaire. La tête haute, ces travailleurs ratatinés, malgré leur
jeunesse, la trentaine dans l’ensemble, semblaient métamorphosés. Ils avaient troqué leur
condition pour un statut de citoyen libre !!!
La vie des travailleurs changea de cours : ils s’organisaient pour s’aligner sur les activités
mises en place au pays natal. Des cours d’alphabétisation avaient permis à nombre
d’entre eux de pouvoir finalement écrire, lire eux-mêmes des lettres à leur père, mère,
frères et sœurs au pays. Une vie plus saine, plus rangée dans la perspective d’un
rapatriement proche remplaça une vie incertaine, à la dérive, pour la plupart. Des liens de
solidarité se multiplièrent.
Partout du Nord au Sud du pays, grâce à la mise en place de cette campagne
d’alphabétisation et de construction d’un mode de vie moderne, étaient repoussés les
mauvaises habitudes, le vol, le jeu, les coutumes rétrogrades dans les enterrements, les
mariages. Un vent de jeunesse soufflait. La vie devenait plus saine, sous tous ses aspects.
Là, c’était une classe bình dân học vụ. Ici, on s’entraînait à des exercices d’éducation
physique, d’arts martiaux. Là-bas on déchiffrait un document de vulgarisation de
techniques culturelles…
Ces activités de diffusion, liées à une organisation efficace du travail des champs, de
transport des vivres du grenier du Sud vers le Nord, en 1946, le pays arriva à surmonter la
lourde famine de 44, 45 où quelques 2 millions de Vietnamiens décédèrent, privés de
nourriture, victimes de politiques inhumaines tant des impérialistes nippons que des
colonialistes français.
Comme touché par une baguette magique, le pays entier se transformait.
C’est ainsi que s’organisa la vie de la jeune République et l’inévitable Résistance armée
qui se prolongea pendant trente ans.
Le Quốc ngữ
Avec le Hán puis le Nôm, maîtrisés que par une petite minorité, plutôt de milieux aisés,
mandarinaux, les créations littéraires étaient très limitées, principalement en vers, la prose
seulement avec le Hán.
L’utilisation du Quốc ngữ, obligatoire par un décret colonial de janvier 1882,
accompagnée de la rencontre avec la civilisation occidentale, va donner naissance à
d’autres genres littéraires. La prose va se développer intensément, du fait du contexte
historique du pays. Le journalisme, le roman, le théâtre moderne verront le jour et seront
autant d’outils de communication dans le développement de la société comme de la
révolution vietnamienne.
Pour apprendre à lire, à écrire le Quốc ngữ , il suffit de trois mois de travail. Cette
écriture est la transcription du vietnamien oral, donc une forme développée de langue
écrite.
Pour apprendre le Hán, il faut compter des années de travail, on dit qu’il en faut une
bonne dizaine et même plus. Car on ne connaît que le mot appris, on ne peut pas former
d’autres mots. En plus, les Vietnamiens doivent lire le Hán à la vietnamienne, les réalités
vietnamiennes ne sont pas représentées dans cette écriture. Ce qui avait conduit à la
création du Nôm.
Dans ses débuts, le Quốc ngữ, purement réservé à la vulgarisation des textes
évangéliques chemina lentement durant les 17, 18 et 19ème siècles, car objet de méfiance,
de rejet, les religions nouvelles étant très mal accueillies par les pouvoirs impériaux de
l’époque et furent douloureusement persécutées.
Au 20ème siècle, des mouvements de vulgarisation à caractère culturel, mais surtout
patriotique, politique influèrent fortement sur l’extension de la connaissance du Quốc
ngữ. Parmi lesquels on note le rôle de l’école Đông kinh nghĩa thục en 1906, dont
l’existence ne dura qu’un peu plus d’un an, car rapidement réprimée par l’administration
colonialiste qui y voyait un danger. Établie à Hà Nội, cependant elle aura un
retentissement et une influence à l’échelle nationale.
Bien plus tard, les mêmes objectifs furent poursuivis par le Hội Truyền bá quốc ngữ Association pour la diffusion du Quốc ngữ - créée en 1938.
Đông Kinh nghĩa thục
Dans le but d’éveiller le sentiment patriotique tout en élevant le niveau culturel
populaire, un groupe de lettrés avaient créé l’École « Đông Kinh nghĩa thục », une école
gratuite, dont le but premier était d’enseigner aux gens la connaissance du « Quốc
ngữ », choix délibéré suite à l’intérêt qu’elle présente car « Khỏi đôi đường tiếng, chữ
khác nhau. Chữ ta, ta đã thuộc làu., Nói ra nên tiếng, viết câu nên bài. Sẵn cơ sở để khai
tâm trí » (Nous n’aurons pas à faire face à cette dualité oral/écrit. Notre écriture, nous la
connaissons maintenant parfaitement. Dès qu’on parle on entend notre langue, dès qu’on
écrit on crée des textes en notre langue. On a donc ce qu’il faut pour développer l’esprit).
Hội truyền bá quốc ngữ (Association de la diffusion du quốc ngữ)
Avec la fondation du Parti Communiste en 1930, le mouvement de diffusion du Quốc ngữ
allait connaître une expansion nouvelle.
Le 25 mai 1938 fut créée l’Association de la diffusion du quốc ngữ avec des noms comme
Nguyễn Văn Tố, Bùi Kỷ, Président et Vice-Président, Phan Thanh et Quản Xuân Nam,
Secrétaire et Secrétaire-Adjoint, Đặng Thai Mai, Võ Nguyên Giáp, Trésorier et
Trésorier-Adjoint, Hoàng Xuân Hãn, Nguyễn Văn Huyên, Lê Thước, conseillers. Sa
mission était : enseigner aux compatriotes vietnamiens la connaissance du quốc ngữ
pour pouvoir lire facilement dans notre langue les informations utiles pour la vie
quotidienne.
L’Association se préoccupait de la rédaction d’ouvrages didactiques où sont présentées
des notions élémentaires en histoire, géographie, en hygiène, en science… largement
diffusés.
Le professeur Hoàng Xuân Hãn, alors professeur au célèbre lycée Bưởi (l’actuel lycée
Chu Văn An), en tant que conseiller de l’Association, participe à la commission des
manuels scolaires. Il fut l’auteur du célèbre abécédaire d’alors où les lettres de
l’alphabet étaient décrites à l’aide des vers « ca dao », ce qui facilite immensément la
mémorisation. Le même abécédaire servira plus tard la campagne de « Bình dân học
vụ » - alphabétisation populaire en 1945.
La même association sera fondée le 5-1-1939 à Huế, d’autres dans tout le centre
jusqu’en 1943. En Cochinchine, la même entité ne sera établie que le 5 novembre 1944.
Ces différents mouvements contribuèrent à étendre la connaissance d’une écriture dont le
rôle sera déterminant dans le développement et la lutte pour l’indépendance du pays.
Le journalisme, le roman, le théâtre
Car c’est avec le Quốc ngữ dont l’écriture structurelle simple est facile à apprendre, à
lire, à écrire, les écrits en vietnamien moderne en prose virent leur véritable naissance.
Par ailleurs la rencontre avec l’Occident avait permis l’arrivée de genres littéraires
nouveaux : le journal, le roman, le théâtre moderne.
La mainmise française sur le Việt Nam avait divisé le territoire national en colonie pour
le Sud Vietnam – nommée à l’époque la Cochinchine et en protectorat pour le Nord – le
Tonkin, et le Centre – l’Annam. Afin de consolider leur pouvoir, l’administration
colonialiste avait organisé l’enseignement du Quốc ngữ d’abord en Cochinchine. Et bien
après dans le Nord et le Centre. C’est là aussi qu’était créé le premier journal en Quốc
ngữ, Gia Định báo, en 1865.
Dans l’histoire journalistique du Việt Nam, le Gia Định báo fut le premier moyen de
communication totalement nouveau et deviendra ainsi un moyen tout particulier qui va
élargir les possibilités pour diffuser encore plus largement le Quốc ngữ comme les
pensées, le savoir, les informations sur ce qui se passait.
En tant que premier journal en langue vietnamienne, il jouait à la fois le rôle de journal
officiel pour l’administration coloniale et de presse pour le public avec des informations
en tout genre : économique, religieuse, culturelles, sociales… Sous la direction de
Trương Vĩnh Ký (Pétrus Ký), le journal va permettre au public d’approcher des études,
recherches, des traductions, la poésie, le roman. Trois objectifs étaient poursuivis : faire
connaître le Quốc ngữ, encourager des études modernes (sous-entendu des sciences…),
encourager le peuple aux études.
Ce qui est à noter c’était le rôle des journaux dans la diffusion des œuvres littéraires :
avant d’être imprimées en tant que livres, les créations littéraires étaient d’abord
divulguées dans les journaux.
La multiplication des titres journalistiques, mais surtout, l’élargissement territorial,
d’abord au Centre, puis particulièrement, au Nord, à Hà Nội, dans les premières
décennies du 20ème siècle, dont beaucoup à tendance progressiste. Ce qui va marquer un
tournant dans le développement du journalisme, des œuvres littéraires, de l’accès aux
savoirs dans tout le pays via une grande extension de l’apprentissage du Quốc ngữ.
Toutefois le développement de cette écriture ne dut son expansion explosive qu’à la
Révolution d’août avec la campagne nationale de lutte contre l’analphabétisme, à la
décision du gouvernement de la RDVN à l’utilisation obligatoire de la langue
vietnamienne et du Quốc ngữ dans l’enseignement à tous les niveaux.
En 2010, le Vietnam commémorait le 65ème anniversaire du Bình dân học vụ. Le pays
avait, cette année-là, achevé la tâche d’alphabétisation populaire et généralisé
l’enseignement primaire dans tout le pays.
De même que le journalisme se développa le roman et le théâtre moderne. Dès les années
1930, la littérature en Quốc ngữ se développaient rapidement en quantité et en qualité et
formait le fondement du roman en prose, de la poésie moderne qui s’affranchissait des
règles rigides de la poésie Hán, de la critique littéraire, du théâtre moderne créant les
bases de la littérature moderne vietnamienne. On notait particulièrement l’influence du
groupe Tự lực văn đoàn, qui créa le roman moderne à l’instar des auteurs occidentaux.
On est obligé de reconnaître, en ces débuts du 21ème siècle, le développement éclatant de
la littérature des années 1945. On se pose souvent et encore la question : comment se faitil que des auteurs, jeunes, la majorité avait de 20 à 30ans, ont-ils réussi à créer une
époque aussi éblouissante dans la littérature vietnamienne ? Sans aucun doute, parmi les
raisons, il y a l’utilisation du Quốc ngữ à la place du Hán ou du Nôm.
On peut en dire autant en ce qui concerne l’Internet, aujourd’hui.
Pourtant, il n’y pas que des avantages.
Cette latinisation du vietnamien a malheureusement contribué à couper la langue de son
héritage culturel et historique. À l'exception d'une poignée d'intellectuels, plus personne
ne connaît aujourd'hui l'écriture qui a été utilisée durant de nombreux siècles. Les
Vietnamiens ont été coupés de leur histoire, de leur culture et de leur littérature. Plus
aucun Vietnamien ne peut lire aujourd'hui dans leur version originale des œuvres
littéraires des siècles passés, ni les innombrables inscriptions qui ornent les pagodes, les
temples et les sanctuaires dans les villes et villages du pays. Plus personne ne peut lire les
poètes que le pays a produits, ni les annales impériales qui racontent l'histoire du
Vietnam. Personne ne peut vérifier ce qu'affirment les historiens contemporains sur
l'histoire du pays. Le passé n'est intelligible que par des spécialistes, dont les intellectuels
chinois eux-mêmes. De même au niveau des familles, celles qui conservent encore des
registres généalogiques ne peuvent pas savoir ce que leurs ancêtres y ont confié sur
l’histoire de la famille. C’est ainsi que des familles de l’île de Lý Sơn, au large de Quảng
Ngãi, ont découvert par hasard et récemment des documents impériaux chargeant leurs
ancêtres de missions dans les Iles Hoàng Sa – alias Paracels.
Ainsi, sur la langue écrite vietnamienne on peut dire que si nous avons les preuves d’une
écriture en vietnamien ancien, elle est devenue langue morte il y a bien longtemps. Les
écritures utilisées, au fil de l’histoire, le chữ Hán, le chữ Nôm, le Quốc ngữ sont toutes
des écritures d’emprunt.
Celle, en cours actuellement, le Quốc ngữ, a accompagné, ces derniers siècles, la lutte,
combien difficile, inégale, entre un Việt Nam pauvre, ignorant, face à des géants, à la fois
économiquement, intellectuellement, militairement, pour la sauvegarde de son
indépendance.
Il nous reste à gagner la bataille de l’acquisition de connaissances scientifiques,
économiques, de gestion suffisantes pour assurer à notre peuple un développement
vraiment durable, y compris des politiques, stratégies sages afin de conserver notre
patrimoine culturel pour les générations futures.
Một lớp học Bình dân học vụ.
Une classe “Bình dân học vụ”
Phổ cập giáo dục.
Généraliser l’enseignement primaire

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