Madagascar.

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Madagascar.
Une épopée malgache (mai/juin 2011)
Les hauts plateaux :
Madagascar est une destination hors du commun, cette île résolument ancrée dans l’océan
indien et séparée de l’Afrique par le canal du Mozambique (environ 400 km) est traversée par le
tropique du Capricorne.
Elle offre une symphonie de couleurs mélangeant le rouge de la latérite dégradé jusqu’au
jaune en passant par l’ocre avec le brun des montagnes et toute la gamme des verts des rizières, des
forêts primaires, des forêts secondaires, se conjuguant avec le bleu des lacs, de la mer et souvent du
ciel.
Onze heures de vol pour atteindre Antananarivo, la capitale, abrégée en Tana pour les initiés.
Notre arrivée de nuit ne nous permet pas d’avoir un contact direct avec la ville, nous passons la nuit
dans un très bel hôtel de charme aux chambres spacieuses et agréables ; les appareils de chauffage
dont elles disposent nous révèlent tout de suite que bien que nous soyons dans la zone intertropicale,
les nuits peuvent être fraîches car nous sommes sur les hauts plateaux entre 1200 et 1400 mètres
d’altitude.
Au matin, nous traversons Tana encore endormie dans la fraîcheur nocturne, la banlieue
semble être assez pauvre et nous prenons la route du sud. Très vite, dans la plaine, nous sommes au
milieu des rizières d’un vert tendre. Quelques briqueteries utilisent l’argile latéritique comme matériau
afin d’ériger les constructions à étages qui sont posées telles des taches rouges sur l’émeraude des
rizières.
Une première halte devant des boutiques d’artisanat local en bordure de route permet aux
étourdis de se procurer un chapeau de paille car le soleil s’avère peu à peu cuisant contrastant avec une
ombre fraîche en raison de l’altitude.
Nous allons apprécier l’ingéniosité malgache à Ambatolampy où on récupère tout ce qui est en
aluminium pour le refondre dans des creusets alimentés au charbon de bois. C’est une fonderie
totalement artisanale utilisant un matériel sommaire pour un résultat superbe : des cocottes et des
récipients de toutes tailles étincelants, cependant nous émettons quelques réserves quant à la qualité du
contact alimentaire.
En sortant nous traversons le marché du village accompagnés d’enfants très gentils et
respectueux, ils regardent avec un brin de curiosité les « Vaza », c’est ainsi qu’on nomme les étrangers
depuis qu’une reine cherchait à identifier les non malgaches en employant une locution contenant ce
mot.
La campagne que nous traversons, ensuite est marquée par l’empreinte de la proximité de la
capitale : les cultures sont rizicoles et horticoles ; le long de la route des légumes (carottes, pommes de
terre, igname) sont proposés bien propres et bien brillants aux éventuels acquéreurs qui assureraient la
revente en ville.
Une halte à Antsirabé va nous permettre de nous restaurer d’un bon repas servi par une
magnifique malgache avant d’entreprendre le périlleux déplacement en pousse-pousse, moyen de
transport peu connu des européens. Cette charrette tirée à bras humains s’avère un peu cahotante à
travers les rues de cette station balnéaire qui fut très prisée des colons européens. La gare et l’hôtel
thermal d’Antsirabé sont les vestiges imposants du passé colonial. Cette ville a une grande vocation
artisanale avec plusieurs spécialités :
- le papier antaimoro est une fabrication originale de papier ; on utilise l’avoa ou hafotra,
arbuste à fibres solides que l’on réduit en pâte avec de l’eau dans un mortier avant de l’étaler
sur une étoffe pour le séchage. Maintenant on le décore avec des fleurs disposées sur la pâte
encore humide, et après séchage on a un papier du plus bel effet qui sert de marque page ou de
carte postale ou même de tableau déroulant. L’origine de ce papier particulier remonte au
16ème siècle, la découverte de cette fabrication du papier a permis de recopier le Coran apporté
par des arabes naufragés qui ont fait souche car leur livre sacré était devenu inutilisable en
raison de son usure, il était impératif de trouver un nouveau support pour le recopier et le
diffuser ensuite.
- Le deuxième artisan, encore plus ingénieux fabrique des miniatures de pousse-pousse, de
voitures et surtout de vélos. Il nous fait une brillante démonstration de la fabrication d’un
vélo : un morceau de tube pour les roues, du fil de pêche pour les rayons, un morceau de tube
plastique (pour perfusions) comme pneu, des éléments métalliques qu’il façonne pour le cadre
et en 15 minutes, il fabrique un magnifique vélo miniature.
- Le troisième utilise les cornes de zébus de toutes tailles et de toutes formes, il les découpe et
les façonne avec des meules afin de produire une foule d’objets depuis des peignes jusqu’à des
colliers en passant même par des dés à coudre.
L’ingéniosité de ces artisans est extraordinaire ainsi que leur habileté, le produit élaboré est d’une
finesse remarquable.
L’étape suivante peut être sportive pour ceux qui le souhaitent, nous arrivons à proximité de
Manandona et sur la piste une batterie de VTT nous attend. Les plus courageux s’élancent sur la
piste pour un parcours d’environ 5 Km, heureusement assez plat, avec des traversées de pont de
bois où parfois il manque une latte. Nous pédalons au milieu des rizières, des enfants nous saluent
et même nous encouragent, des adultes nous souhaitent la bienvenue, c’est une découverte hors du
commun de la campagne malgache accueillante, bienveillante et amicale. Pratiquement tout le
monde peut s’exprimer en français et la communication est aisée avec des habitants ouverts et
communicatifs.
Nous arrivons au gite de Bako Bako , prés du village, entouré de rizières ; c’est une maison
traditionnelle tenue par Jean Gustave –le vieux coq- Il nous accueille, entouré de sa famille, et
nous souhaite la bienvenue avec simplicité mais chaleureusement. Le gîte est très simple, fait de
dortoirs à 4 lits, les douches se réduisent au seau d’eau…chaude, les toilettes sont à l’extérieur.
Mais le dîner dans la salle commune basé sur un « romava », plat traditionnel malgache, sorte de
pot au feu à base de brèdes, est excellent. Peu à peu, tout le village arrive et nous entraîne sur la
place où on nous apporte du rhum arrangé. Les villageois jouent avec des instruments de fortune
des airs de la culture locale, puis se lancent dans les danses traditionnelles : du zébu, du coq, des
moissons etc…. Tout le village participe en toute simplicité, tous les enfants s’en donnent à cœur
joie , et, le rhum aidant, les « vaza » s’y mettent aussi ; c’est une fête spontanée, bon enfant, nous
ne sommes pas vraiment des étrangers mais des hôtes en visite. L’ambiance est tellement amicale
qu’il est difficile de la traduire par des mots, il faut la vivre, la ressentir pour comprendre qu’on est
dans une relation d’exception.
Le lendemain nous continuons d’apprécier le contact avec les Hautes Terres, en évoluant dans
le paysage emblématique malgache : un ensemble de collines, de crêtes de montagnes, de villages
cramponnés sur les flancs, laissant la terre arable à la culture ; ils sont constitués de maisons
hautes à 2 ou3 étages, en brique avec des toits de chaume de plus en plus remplacés par de la tôle
ondulée (inexplicablement car cela emmagasine la chaleur, c’est très bruyant sous la pluie et très
dangereux lors de cyclones), les demeures dans les tons rouges tranchent sur le vert des rizières.
Les zébus, parfois récalcitrants, sont utilisés pour les labours des rizières car il n’y a pas la
moindre mécanisation des cultures, cela donne une impression de calme, de paix, de contact étroit
avec la nature. Il faut ajouter à l’exemplarité de cette visite, son contexte : les jeunes malgaches
qui nous guident de village en village, à la rencontre des habitants, paysans ou artisans, ont
constitué une association qui distribue les recettes générées par notre séjour aux villages
concernés, pour le développement de la région en équipement collectif. Nous allons même
rencontrer le descendant d’un roi local qui nous racontera l’histoire de sa famille et nous fera
visiter son « palais » : une maison à 2 étages, confortable et fonctionnelle à proximité du tombeau
des ancêtres. Nous passerons ainsi une journée à travers les rizières, parfois en marchant sur les
diguettes (excellent test pour l’équilibre !). Au dernier village, des attelages de zébus, avec des
charrettes, nous attendent pour nous ramener au village. Le village possède une école primaire qui
accueille un grand nombre d’enfants (on souhaite aux jeunes mariés 7 garçons et 7 filles) de la
maternelle au cours moyen ; l’enseignement se fait en malgache et en français. Les grands sont
très fiers de montrer leurs cahiers très bien tenus et nous chantent leur hymne national. Notre visite
a provoqué émoi et agitation mais l’accueil a été empreint de gentillesse teinté de curiosité
lorsqu’on leur a dit qu’un certain nombre de visiteurs étaient…des professeurs.
Des hauts plateaux à l’Océan Indien :
Nous allons passer des Hauts Plateaux à l’Océan Indien en traversant la grande forêt
orientale dotée d’une végétation luxuriante couronnant une série de croupes et de collines
entrecoupées de dépressions cultivées. La culture tavy domine, elle se fait en parcelles
aménagées par essartage (brûlis) en pleine forêt cette riziculture est pluviale et itinérante.
On brûle la végétation coupée et desséchée, puis on sème directement le riz sous la cendre
avec un bâton à fouir, juste avant l’arrivée présumée des pluies. Le riz joue un rôle
fondamental dans l’alimentation des malgaches qui en consomment en moyenne 120 Kg
par personne et par an. La riziculture est un élément culturel de la Grande Ile car les
paysages rizicoles sont partout : riziculture inondée, base du décor des Hautes Terres,
rubans de rizières tapissant les fonds de vallées, parcelles rectangulaires quadrillant les
plaines et rizières de crue au bord de lacs ou de cours d’eau.
Le parcours en train Fiaranantsoa – Manakara est une vraie expédition bien que les
rails, les bas côtés et les wagons aient été restaurés dans un but surtout touristique et pour
éviter les déraillements qui étaient fréquents. Ce train emporte, outre les autochtones et le
fret, une trentaine de touristes, obligatoirement en première classe. Nous partons pour un
voyage de 10 à 12 heures pour 167 Km, selon l’état de la voie et les besoins divers dans
les gares. Il y a de nombreuses haltes dans les gares de campagnes desservies souvent
uniquement par le train, le parcours est aussi émaillé de 67 ponts et 48 tunnels, ce qui
explique les 10 années d’efforts nécessaires aux ouvriers chinois pour accomplir cet
ouvrage qui désenclavait les Hauts Plateaux. Ces pauses nous permettent de descendre et
de nous mêler à la foule bigarrée, chaleureuse, dominée par les marchands ambulants.
On nous propose du poulet grillé, du porc grillé, des pains, des gâteaux, des fruits
(bananes surtout), des épices (poivre gris et rouge) et des rafraîchissements. Nous avons
l’impression d’avoir changé de monde et d’époque tout en ayant conscience que nous ne
sommes pas dans un milieu africain mais un lieu vraiment spécifique : l’ile rouge. La
langue française y est autant utilisée que la langue malgache et nous pouvons
communiquer avec les habitants qui parlent volontiers avec nous ; nous nous apercevons
que nous sommes dans un monde en pleine mutation car il y a une grande différence
vestimentaire et de comportement entre les jeunes qui s’inspirent du modèle ( ?)
occidental et les personnes plus âgées plus traditionnelles, c’est surtout caractéristique
chez les jeune filles. Sur la fin du trajet deux éléments sont insolites : la voie ferrée coupe
la piste de l’aéroport de nous passons devant le phare de Manakara, ville sur l’Océan
indien.
Nous ne séjournons pas en ville, mais en banlieue dans un hôtel/Lodge sur la plage en
bordure de l’Océan Indien. Nous y relevons encore les stigmates du tsunami qui a ravagé
une partie du restaurant et l’océan nous paraît passablement agité, malgré cela les
pêcheurs se risquent sur les flots déchaînés dans des embarcations de fortune. Nous allons
sur un plan d’eau beaucoup plus calme : le Canal des Panganales, à bord de deux grandes
pirogues propulsées par des rameurs qui chantent pour accompagner la cadence ; ce décor
et ces chants créent une ambiance bien particulière. Nous allons jusqu’à l’embouchure du
canal sur l’océan indien et nous parcourons ensuite une petite partie de ce canal. Celui-ci
suit la côte orientale sur 600 Km parallèlement à l’océan, reliant lacs, lagunes et rivières,
il a pour but de pallier au cabotage côtier trop dangereux sur l’océan. Ce canal est
navigable jusqu’à Manabjary, mais les péniches ne peuvent naviguer qu’entre Toamasina
et Vatomandry. C’est une véritable artère liquide, faute de routes praticables, qui traverse
une végétation luxuriante, sur laquelle circulent les barques de pêcheurs et des agriculteurs
qui vont vendre leurs produits sur les marchés.
Après une agréable promenade en pirogue, nous abordons dans un petit village de
pêcheurs que nous visitons avant d’aller sur la plage. Les pêcheurs rentrent sur de frêles
esquifs à la rame, surfant sur des vagues énormes pour ramener des prises très diverses
dont la quantité ne semble pas mettre en danger le peuplement des fonds marins. Certains
osent se baigner dans ces rouleaux déferlants et la température de l’eau semble
convenable. Pendant ce temps nos hôtes ont dressé une table à l’ombre des filaos sur
laquelle le rhum arrangé nous attends, délicieusement frais et très agréable ; les bouteilles
se vident peu à peu, alors arrivent sur la table d ‘énormes langoustes cuites, une par
personne, accompagnées de 5 gigantesques dorades, ce qui transforme notre pique nique
en véritable festin, dans l’agréable fraîcheur des alizés. A la fin du repas, point de sieste,
mais une expo/vente d’artisanat local. Nous déambulons dans le village au milieu de
nombreux enfants heureux et gentils, de gens très gentils et affables d’un contact très
facile. Le soir, après le plantureux repas au restaurant, toujours avec langoustes, fruits de
mer et poisson, les villageois sont venus nous faire entendre leur musique locale, tout le
village se tenait derrière les musiciens et nous les avons priés de venir exécuter sur la piste
du restaurant des danses spécifiques. Très rapidement, nous nous mêlons à eux et
apprenons les pas, finalement c’est une fête extraordinaire entre les visiteurs et la
population du village qui se terminera tard dans la nuit, mettant fin dans la joie à notre
épisode sur l’Océan Indien.
La forêt pluviale :
Nous quittons le bord de mer par la route des ravilana, arbres du voyageur, et filons
vers l’ouest, la forêt pluviale gagne peu à peu sur les ravilana. La structure de celle-ci varie en
fonction de l’altitude qui s’étage du niveau de la mer jusqu’à 2300 m d’altitude. Il y a 5500
espèces végétales différentes dans cette forêt dont 80% endémiques. Cette forêt a été mise en
danger par la présence d’espèces de bois précieux telles que le palissandre ou le bois de rose
car on coupait la forêt pour se procurer ces bois à haute valeur. Il y a aussi de très nombreuses
plantes médicinales que des pharmaciens étudient mais qui ont peu de chance de finir en
médicament, vu le peu de plus value qu’elles procureraient à leur mise sur le marché !! Il y a
aussi des espèces animales très rares. La forêt est défrichée par endroits pour abriter des
plantations ; nous faisons une halte dans l’une d‘elles, en cours de route, car elle vient
d’échoir à un nouveau régisseur qui va tenter de relancer les productions.
La première est celle de la vanille, nous découvrons que ce n’est pas forcément la gousse
noire dans un tube en verre que nous trouvons dans nos épiceries : la vanille est une
orchidacée grimpante à fleurs jaunes qui se développent en grappes sur de longues pousses
semblables à des lianes, elles sont hermaphrodites. Pendant longtemps on n’a pas pu
acclimater cette plante à Madagascar par absence de pollinisateur (insecte, colibri etc .) ,
jusqu’à ce qu’un botaniste découvre la pollinisation à la main, à l’aide, le plus souvent, d’une
épine de citronnier. Les gousses, ainsi obtenues, sont plongées dans de l’eau à 70°C, puis
séchés u soleil, ils perdent ainsi leur humidité, fermentent, la gousse qui était verte devient
brun foncé et se couvre d’un givre blanc (vanilline) qui donne l’arôme. Les gousses de vanille
sont ensuite calibrées, mises en bottes et conditionnées. Madagascar est le 1er producteur et
exportateur mondial avec 1200 T/an. La vanille est le « pétrole brun » de la Grande île.
La deuxième production de cette plantation est le clou de girofle : c’est le bouton floral du
giroflier, arbuste originaire des Moluques qui met 8 ans pour donner des fruits d’un rose
profond. Les boutons sont cueillis, puis étalés au soleil et laissés à sécher plusieurs jours. Un
arbre peut donner jusqu’à 50 Kg de clous par an. Madagascar en est le 2ème producteur
mondial
La troisième production est le poivre, épice obtenue par des baies de différentes espèces de
poivriers (famille des pipéracées). C’est le piper nigrum qui produit selon le stade de la
récolte des poivres :
- le poivre vert est obtenu par la conservation humide de baies immatures
- le poivre blanc est constitué de baies mûres débarrassées de leur péricarpe
-
le poivre noir provient de baies presque mûres fermentées puis séchées
le poivre rouge est la baie parvenue à pleine maturité
le poivre gris est du poivre moulu qu’on ne trouve qu’en poudre car c’est un mélange
du péricarpe noir et du cœur blanc.
D’autres productions sont moins importantes, comme le café (robusta et arabica) et la canelle.
Le nouveau régisseur s’est lancé dans la distillation de produits tels que le ylang ylang qui set
de base à des parfums, ou encore d’extraits à finalité médicinales pour lutter contre la toux, le
stress, les rhumatismes etc. mais cette pharmacopée nécessite des expérimentations.
Nous arrivons au village de Ranomafana qui signifie « eaux chaudes », en effet c’est
une petite station thermale réputée pour les rhumatismes, l’asthme et les douleurs gastriques.
La piscine naturelle a été aménagée en piscine de cure d’une irréprochable propreté et très
fonctionnelle. Plusieurs d’entre nous sont allés tester les vertus de cette eau, bonne idée car le
lendemain c’était l’épreuve de marche dans le parc national de Ranomafana . Il couvre 40 000
de forêt tropicale humide, nous allons la parcourir pendant 5 heures à la découverte de
diverses plantes et bambous endémiques et surtout à la recherche de nos premiers lémuriens.
Ici il y a 15 espèces différentes notamment le lémur bamboo qui se nourrit d’une espèce
particulière de bambou, mais aussi il y a le fulvus rufus, le lèmur rubrivater. Dans un silence
relatif nous suivons nos guides qui ont envoyé des éclaireurs pour débusquer les lémuriens.
Finalement nous rencontrons une famille de lémur bamboo dont un des membres, occupé à
déguster une tige de bambou, se laisse photographier à volonté. Plus loin, c’est toute une tribu
qui batifole dans les arbres en poussant des cris aigus, difficile ici de déterminer l’espèce car
ils nous font un ballet extraordinaire dans les arbres à une hauteur considérable.
Pour finir, lorsque nous atteignons le point extrême de notre visite, au point de vue du sommet
de la montagne, une mangouste se glisse timidement vers nous sous le crépitement des
appareils de photo, puis s’enhardit pour essayer de grapiller un peu de gâteau qu’on nous a
offert pour récupérer de l’effort. Nous avons eu la chance de ne pas avoir eu de pluie dans
cette zone qui reçoit 1 600mm de précipitations par an. Nous reprenons notre bus et
traversons la forêt par une route très sinueuse, juste un arrêt à Fianarantsoa dans un restaurant
chinois pour avaler le plus mauvais repas de notre séjour à Madagascar. Nous allons, à
nouveau, changer de décor.
Ambalavao / Ranohira :
Notre séjour/visite à Ambalavao sera marqué par plusieurs aspects :
La route d’accès (RN7) file entre des rizières en gradin qui apparaissent au détour de virages
impressionnants, car nous sommes toujours sur les Hautes Terres. Le col d’ambalavao
débouche sur une cuvette qui abrite le village du même nom ; il doit son essor à sa promotion
au rang de chef lieu de district en 1900. L’école s’est installée, puis les commerçants ont
suivi, car une garnison merina y a été détachée. La route qui a suivi a permis le
désenclavement de la nouvelle cité et peu à peu, le marché à zébus d’Ambalavao est devenu le
plus important de l’île ; les marchands de bestiaux qui alimentent les conserveries voisines
viennent s’approvisionner ici en zébus qui ont parfois parcouru des centaines de kilomètres
pour être vendus. Le vignoble et le tabac ont acquis leur droit de cité dans la vallée et
tapissent les flancs de la dépression. Les sommets qui entourent cette cuvette sont sacrés, car
ils sont le lieu de séjour des morts gardés par les hommes du village. Peu de personnes sont
autorisées à gravir le mont Ambondromba (1936 m) pour aller plonger leur tête dans le
capuchon de nuages qui recouvre souvent le sommet. Le rocher conique d’Itandana est
tellement sacré qu’il est interdit même de le montrer du doigt, son nom signifie « lieu de
résistance » car les betsileo y ont soutenu un siège de deux mois face à l’armée merina et
nombre d’entre eux ont préféré mourir que se rendre.
Nous allons donc, à l’écart du village, installer notre…campement : 9 tentes igloo,
rouge, montées par nos amis les guides. Pendant que nous admirons notre nouveau gîte
(certains avec une petite appréhension), les gens du village sont arrivés avec des provisions et
préparent notre repas du soir en invitant ceux qui le veulent à participer à sa confection. C’est
une forme remarquable d’écotourisme car les villageois se partagent les revenus générés par
notre nuitée. Le repas sera précédé par moultes libations de rhum arrangé particulièrement
délicieux que nos hôtes partagent avec nous ; il ne sera sans doute pas étranger au
déchaînement musical auquel nous aurons droit pendant le repas, dans la pénombre vespérale,
puis aux danses locales frénétiques auxquelles nous nous mêlons. Le repas est excellent, mais
le rhum arrangé, la musique et la danse jusqu’à une heure tardive ont quelque peu embrumé la
fin du festin et la pénombre n’est pas seule responsable. Le coucher se fait donc en douceur,
libéré de toute inquiétude, mais la nuit fut claire et l’altitude aidant, elle fut froide, limite
glaciale et le lever du soleil qui réchauffa l’atmosphère fut le bienvenu.
Mais, au fait, pourquoi avions nous bivouaqué dans ce lieu peu confortable et froid ?
C’était la question du petit déjeuner qui accompagnait le lent éveil des corps engourdis par le
froid et l’humidité nocturne.
La réponse vint de l’orée de la forêt tout proche : un babillage ininterrompu sortait de
la canopée, des petits cris doux et aigus. Mais qu’était-ce donc ? Nous prenons nos appareils
photo et partons à la découverte de l’origine de ces conciliabules matinaux. Sous la couverture
végétale, c’est l’ébahissement : des dizaines de lémuriens sautent d’arbre en arbre en poussant
de petits cris en prenant leur petit déjeuner constitué de fruits de la taille d’une cerise
ocre/orangé. Ces animaux peu farouches, ici, sont magnifiques, blancs rayés de noir, avec une
queue très longue, blanche annelée de noir ou de gris. On dirait de véritables peluches qui
nous regardent avec de petits yeux curieux tout en continuant leur manège : certains se
disputent le fruit, d’autres se font des câlins, d’autres encore semblent voler d’une branche à
l’autre en un ballet aérien incessant. Nous passons un long moment, figés d’admiration devant
le spectacle extraordinaire de cette vie sauvage, nous essayons de capter sur la carte photo un
instantané du spectacle.
Nous quittons les familles lémuriennes pour partir à l’assaut de l’ensemble rocheux
auquel le bois est adossé. Dans la paroi rocheuse, une grotte a été murée par des blocs de
rochers assez réguliers, de forme rectangulaire en façade ; c’est un tombeau : le défunt a été
déposé dans cette cavité du rocher, il a fallu des spécialistes de l’escalade pour mettre en place
les moyens pour hisser le cercueil le long de la paroi à pic et le glisser dans la cavité, ensuite
pour la murer ; Le défunt repose en paix ainsi dans une position élevée et nul n’ira troubler
son sommeil éternel. Du sommet de l’ensemble rocheux, nous avons une très belle vue sur la
campagne environnante et nous découvrons des plantes endémiques de l’île. En quittant notre
poste d’observation, nous retrouvons nos amis lémuriens, cette fois certains sont au sol,
nullement effrayés, ils posent pour la photo souvenir.
Au retour, un incident ou plus exactement un accident va me permettre de faire une
visite imprévue à l’hôpital local ; j’ai pu mesurer ainsi dans quel dénuement médical
fonctionne un hôpital de campagne malgache : un médecin très aimable et qui s’avérera très
compétent nous a reçu, il nous a annoncé qu’il fallait recoudre la plaie du doigt (majeur) au
niveau de la deuxième phalange, il a bien nettoyé la plaie mais… l’hôpital n’avait pas de fil
pour coudre la plaie, il a donc fallu aller chercher le fil dans une pharmacie du village.
Lorsque ce fut fait, on s’est aperçu qu’il n’y avait pas l’aiguille avec, donc retour au village
pour l’aiguille et en même temps acheter un anesthésique injectable localement pour coudre
sans douleur, ainsi que du désinfectant pour la suite du voyage. Lorsque toutes les conditions
sont remplies, le médecin recoud habilement la blessure, fait un magnifique pansement, nous
souhaite un bon voyage, la facture de l’intervention nous a laissés bouche bée tant la somme
demandée nous paraissait dérisoire. Nous avons pris conscience des conditions de
fonctionnement d’un hôpital de campagne malgache et combien le besoin d’une aide
internationale est indispensable, car le dévouement des médecins locaux est à toute épreuve.
Nous pouvons alors continuer notre voyage avec l’une d’entre nous qui a un doigt…en forme
de… baobab !
Le parc national de l’ISALO :
Nous allons poursuivre notre route par la RN 7 en traversant un grand plateau aride et
désolé sur lequel nous allons rencontrer des troupeaux importants qui marchent depuis des
jours pour se rendre au marché aux zébus d’Ambalavao. Nous arrivons à Rahonira , porte
d’entrée du Parc National de l’Isalo. Il couvre 81 450 Ha dans le massif du même nom,
composé essentiellement de grès jurassiques qui s’étagent de 515 m jusqu’à 1268 mètres. Ces
grès, relativement tendres, sont entaillés de profonds canyons dominés de pics aux formes
insolites. Les fonds de canyons sont humides en permanence et portent donc une végétation
luxuriante de palmiers, de pandanus et de fougères, alors que sur les grandes étendues arides,
la moindre anfractuosité rocheuse abrite des plantes xérophytiques dont les racines cherchent
l’eau au cœur de la roche et les troncs, les tiges, les feuilles emmagasinent l’eau de
ruissellement ; ce sont les pachypodiums, les aloès et les euphorbes.
Après une nuit dans le confortable Satrana Lodge, très récent (2009) et bien gardé,
parfaitement intégré au paysage, nous partons pour une promenade dans le Parc et le massif
de l’Isalo. Cela commence par une ascension sur un petit sentier entouré par cette végétation
parfaitement adaptée aux escarpements rocheux arides. La température est encore agréable et
la pente n’est pas trop raide. Arrivés au sommet, nous découvrons des tombeaux BARA, ici ,
encore les défunts sont placés dans des anfractuosités de la roche, refermés, ensuite par un
amoncellement de pierres. Certains sont au milieu de la paroi abrupte et la sépulture a dû
demander des prouesses d’escalade. Après une marche aisée sur le plateau, nous arrivons a un
promontoire qui domine un gigantesque canyon qui, par bien des aspects, est semblable au
« Gran Canyon » américain ou à celui de la « Fish River » en Namibie. Nous restons un long
moment en contemplation de cette œuvre de la nature réalisée par l’érosion différentielle.
Nous nous arrachons à la contemplation de ce site grandiose pour entamer la descente vers le
fond du canyon, nous passons à proximité d’un tombeau bara ouvert duquel dépasse un
cercueil original : il est laqué de noir et rouge, posé sur des roulettes et constellé de pièces de
monnaie rivetées sur les flancs, pour le cas où le défunt en aurait besoin dans l’au-delà.
Nous poursuivons notre descente et, là, nous rencontrons les habitants de cette partie boisée et
herbeuse : les lemon maki , de magnifiques lémuriens roux et gris avec une magnifique queue
annelée de blanc et noir. Ils vivent ici en bandes hiérarchisées guidées par une femelle
dominante, ils se déplacent avec une aisance remarquable sur les falaises a pic et dans les
arbres. Là, encore, nous avons droit à une fantastique parade de la part de ces animaux ( nos
ancêtres selon certains) qui ne semblent pas craindre l’Homme ; ils donnent l’impression
d’être un peu plus « terrestres » que ceux d’Ambalavao : leur évolution au sol est un régal
pour les yeux et il est difficile de s’arracher à ce spectacle si extraordinaire.
Nous continuons notre route sur un plateau pierreux et nous arrivons en bordure d’un autre
canyon dans lequel coule une rivière. Bien sûr, dans le fond du canyon la végétation est
luxuriante (palmiers, fougères et bambous). De loin, nous croyons percevoir un bruit de
cascade, bruit un peu insolite dans ce milieu aride et sec, mais ce n’était pas le fruit de notre
imagination assoiffée, un peu plus loin en contrebas dans la gorge une magnifique cascade
alimente une… piscine naturelle. Mais il faut descendre par un sentier étroit, parfois abrupte,
qui zigzague dans la falaise pour arriver au niveau de la rivière, dans une fraîcheur ombragée
de palmiers et de fougères. En remontant le cours d’eau nous arrivons au bassin naturel dans
lequel se déverse la cascade ; le plan d’eau est d’un magnifique bleu turquoise, un paradis
après l’enfer de la traversée du plateau torride, le plus grand nombre ne résistera pas à l’appel
de cette eau fraîche et va s’y plonger avec délice. Il faudra cependant remonter, retraverser le
plateau pour atteindre la forêt de tapia où un plantureux pique nique nous attend, préparé par
notre équipe de guides. Il nous faudra une partie de l’après midi pour revenir à notre point de
départ ; mais le décor dans lequel nous évoluons est véritablement magique grâce aux
variations de la lumière et le coucher de soleil sur l’Isalo est une féérie et une symphonie de
couleurs.
Le sud : Sur le Canal du Mozambique.
Notre randonnée à travers l’île rouge continue : nous finissons, avec notre véhicule la
traversée de l’Isalo, toujours au milieu de rochers aux formes étranges.
Nous traversons un village à l’aspect curieux : un village _ champignon, c’est
l’agglomération d’ILAKAKA, symbole d’une ruée vers la fortune, possible encore au 21ème
siècle. Ici on a découvert des gisements de saphir, immédiatement des dizaines de milliers de
personnes se sont ruées vers cet El dorado…du saphir. Des trous ont été frénétiquement
creusés un peu partout, des mines se sont organisées ; le village porte les stigmates des
poussées anarchiques : baraquements de fortune ( !), urbanisation le long d’une seule rue
principale avec toute la gamme depuis l’habitation opulente en dur, jusqu’à la baraque en
planches et même l’amoncellement de cartons. Cette artère est particulièrement embouteillée
par les…piétons : une foule disparate, au sein de laquelle règne une ambiance particulière
parfois un peu oppressante, déambule entre les édifices en bois, hôtels, restaurants, bars, night
clubs, boutiques pour acheteurs de saphirs, commerces en tout genre ( même un magasin de
vente de 4X4) car ceux qui font fortune veulent tout, tout de suite et les biens matériels
viennent se mettre à la disposition des clients potentiels. En périphérie, une multitude de
petites maisons de prospecteurs et de mineurs d’étend jusqu’à proximité des galeries creusées
dans le sol. Il est possible de visiter ces galeries, mais ce n’est pas sans risques car dans la
hâte, la frénésie de la recherche, les galeries sont mal étayées. On sent partout cette fébrilité
d’individus cosmopolites qui savent que d’un coup de dé du destin (ou plus exactement d’un
coup de pioche heureux) la fortune peut sourire. Cependant les chances s’amenuisent car ce
sol creusé bien plus qu’un gruyère a livré la plus grande partie de ses trésors et, de plus, ce
qu’il en reste est de plus en plus réglementé. Un des derniers Far West de la planète s’éteint
lentement.
Nous arrivons en vue du Canal du Mozambique qui sépare Madagascar de l’Afrique
par 400 kilomètres d’étendue d’eau. Nous sommes sur le territoire des Mahafaly et des
Antandoy, éleveurs de zébus, animaux sur lesquels repose toute leur civilisation et même le
fait religieux, car l’importance du cheptel est symbole de richesse et détermine la hiérarchie
de chaque lignage dans une région pauvre qui ne veut pas se l’avouer. Cela se traduit par la
magnificence des tombeaux mahafaly placés au bord des routes qui révèlent la richesse du
défunt par de splendides décorations colorées sur les parois maçonnées, évoquant des scènes
de la vie courante ou des faits marquants, le tout peint de manière naïve. Ils sont la copie de
tombeaux royaux et peuvent dépasser une superficie de 200m². Des poteaux en bois, sculptés
et peints ornent leur sommet. La mise en place de ces tombeaux a pu durer plusieurs mois et
s’accompagne d’une hécatombe de zébus.
Tuléar, à la fin de la RN7, est un ancien comptoir colonial très cosmopolite ;
l’architecture, avec ses imposantes bâtisses à colonnades, ses jalousie, ses vérandas, révèle
son passé. Les commerces se sont concentrés sur le front de mer, ils sont souvent tenus par
des indiens ou des Karana, musulmans à majorité shiite que la pratique religieuse rend
austère.
Nous ne ferons que passer à Tuléar, pour rejoindre Ifaty par l’autoroute A9 !!!! : 26
Km de routes totalement défoncées avec des trous énormes, nous mettrons 1h30 pour faire le
parcours avant d’arriver au lodge « les dunes d’Ifaty », lodge magnifique, en bordure de mer.
Le nom est quelque peu macabre car il signifie « au cadavre », mais c’est un paradis pour
sports nautiques. Nous sommes installés sur la bordure d’un vaste lagon que la barrière
rocheuse protège des requins, la profondeur n’excède jamais les 6m, faisant de ce site un
aquarium naturel géant très riche. Nous faisons une agréable promenade en bateau à voile
jusqu’au récif frangeant, dans ces pirogues à voile carrée, taillées dans un seul arbre, un seul
balancier équilibre le frêle esquif, pendant que les plus téméraires se lancent dans
l’exploration des fonds marins. A la descente du bateau, nous sommes accueillis par un
gazouillis de très jeunes filles qui tentent de vendre des paréos ou proposent …des
massages…sur la...plage. De longs marchandages s’en suivent, pour les paréos bien sûr, et par
la suite toutes sortes d’objets artisanaux vont apparaître pendant notre repas en bordure de la
plage.
L’après midi nous visitons le « jardin des baobabs », un parc bien aménagé qui
présente toutes les plantes endémiques du lieu et surtout les fameux baobabs souvent de taille
très impressionnante.
Le lendemain, depuis Tuléar, nous regagnons Antananarivo par avion.
Antanarivo :
Retour à la capitale, 2 millions d’habitants, retour aux embouteillages monstres, aux
klaxons incessants, à la foule bigarrée. Nous grimpons, depuis la plaine où est l’aéroport, la
colline historique de l’Imérina, pour nous rendre à notre restaurant « le grill de la Rova »
Nous dominons, du haut de la colline, la plaine du Betsimitatatra, constellée de rizières d’un
vert tendre. Les quartiers s’étagent sur les flancs des collines en un dédale de ruelles,
d’escaliers, de ponts, de passerelles. Nous sommes sur la colline la plus élevée : Antirova et
nous comprenons pourquoi notre souffle est un peu court car nous sommes à 1431 mètres
d’altitude. Cette partie de la ville paraît serrée frileusement autour de la ROVA (palais royal /
citadelle datant de 1610), la basse ville a gagné peu à peu sur les rizières. Du haut de la colline
nous pouvons voir l’ensemble de la partie sud de la ville quelque peu complexe en raison des
retouches successives : la « Zoma » (marché du vendredi devenu quotidien) s’était installée
sur les marécages asséchés d’Analakely, elle a cédé sa place à un quartier moderne
reconstruit par…les japonais et le marché a été transféré à Antanimena. L’imposante Avenue
de l’Indépendance trace un trait rectiligne reliant les deux grands pôles de la ville. Le lac
Anosy marque le centre de l’agglomération, il a remplacé le marais qui s’étendait aux pieds
de la colline, il est ceinturé de jacarandas qui mettent une note violette au milieu du rouge et
du vert dominant dans la ville.
Après le repas, nous visitons la ville haute dominée par les belles maisons anciennes
qui évoquent les familles princières auxquelles ont succédé les résidents étrangers de l’époque
coloniale. Le palais de justice de Ranavalona II dresse sa silhouette néo-classique, il
remplaça, en 1881, la pierre sur laquelle les rois prononçaient leurs discours et rendaient la
justice. Le fronton est soutenu par des colonnes ioniques, un motif sculpté de deux lances
croisées symbolise la justice royale. Les belvédères sous le palais de la Rova dominent toute
la capitale et permettent d’identifier les collines sacrées et nous pouvons noter la profonde
interpénétration de la ville et des rizières. Nous ne pouvons visiter le palais de la Rova car il a
été détruit par un incendie en 1995 et la reconstruction est très lente. Cette cité royale
construite avec le concours d’architectes français et britanniques mariant le style merina
traditionnel aux apports européens et asiatiques ; elle abritait une nécropole, des pavillons et
plusieurs palais monumentaux déterminés et orientés en fonction de la géomancie dictée par
les astrologues royaux qui voulaient en faire une image d’un ordre idéal du monde en
invoquant les ancêtres. La porte d’entrée, en forme d’arc de triomphe, est surmontée par un
« voromahery », l’épervier royal(1855), oiseau coiffé d’une aigrette à sept points symbolisant
la puissance de la monarchie malgache. Tout ce qui a pu être sauvé de l’incendie de la Rova a
été exposé dans le palais d’Andafiavaratra (signifiant « en dehors de la Rova) qui était la
résidence du 1er ministre ; c’est une imposante construction en briques et en pierres, coiffée
d’un dôme en verre, elle date de 1872 quand elle a remplacé un magnifique palais de bois à
deux étages, elle porte l’empreinte britannique de son concepteur : William Pool. Ce palais a
connu bien des vicissitudes, il fut tour à tour caserne, tribunal, école des beaux arts, atelier
d’arts appliqués malgaches, bureau du Président de la république (1958-1972) puis du 1er
Ministre (1972-1975), ravagé par un incendie en 1975, il a été restauré pour devenir le musée
des restes de la Rova.
Notre soirée s’achèvera dans la banlieue de la capitale, à l’hôtel du bois vert, niché
dans un parc de 3 ha offrant une conception originale de l’hôtellerie malgache, très conviviale
et surtout une cuisine remarquable. Un groupe de danseurs et de chanteurs animera notre
soirée d’une manière inoubliable. Une partie du groupe va terminer son voyage le lendemain
et l’autre partie va repartir pour une nouvelle aventure.
Le Nord : La région d’Antsiranana
Le Parc de la montagne d’Ambre :
C’est une nouvelle aventure qui commence après le vol Antananarivo-Antsiranana
(Diego-Suarez). Elle débute sur une magnifique baie longue de 156 Km à cheval sur l’Océan
Indien et le Canal du Mozambique. Deuxième baie (par la taille) après celle de Rio de Janeiro,
elle a été visitée par une grande quantité « d’étrangers » à l’île, au cours de l’histoire : des
yéménites qui malheureusement ont apporté un fléau qui perdure, le quat, puis des portugais
d’où le nom ancien de la ville (Diégo et Suarez les 2 amiraux), des pirates au 18ème siècle, les
français au 19ème et, finalement, en 1972, les malgaches récupèrent la pleine propriété. La
conséquence évidente est le cosmopolitisme de la ville : malgaches, chinois, arabes, indiens,
comoriens auxquels il faut ajouter les métis. La langue parlée n’est pas toujours perceptible
car elle est un mélange de tous les idiomes importés.
La baie, à la forme d’un trèfle à quatre feuilles, offrait 250 Km² d’abri aux navigateurs
et aurait connu, à la fin du 17ème siècle, l’éphémère République de Libertalia : un repaire de
flibustier de tout poils sous la houlette d’un gentilhomme provençal, Mission, et d’un
dominicain italien défroqué, Caraccioli. Ils auraient bâti une cité, doté d’un parlement, élu
pour trois ans par toute la population, ils auraient partagé leur temps entre agriculture (des
hommes et des femmes auraient été fournis par la reine d’Anjouan) et piraterie. Mais ils
évitaient toute effusion de sang inutile et libéraient les esclaves. Ils partageaient équitablement
leurs revenus. Bien sûr, l’histoire que je viens de vous résumer est très diversement acceptée :
le chroniqueur qui la rapporte est Daniel Defoe (auteur de Robinson Crusoë), ceux qui
penchent pour la vraie démocratie égalitaire y croient car tous les lieux et personnages cités
ont existé et c’est vérifiable, ceux qui penchent pour la démocratie reposant sur un matelas de
billets de banque réfutent cette histoire. De plus qui aurait manipulé les tribus des collines
environnantes, qui vivaient en bonne intelligence, pour les pousser à détruire ce « modèle »,
ce dangereux exemple ? Car c’est l’époque où les têtes couronnées commencent à entendre
des murmures de contestation du pouvoir absolu, et bien plus tard, ceux qui s’accrochent à
leurs privilèges ne veulent pas y croire non plus.
Nous abandonnons la philosophie de l’Histoire pour revenir à une situation plus terre à
terre. Nous avons trois 4X4, plus très jeunes, qui nous attendent et dans lesquels nous
embarquons en direction du Parc National de la Montagne d’Ambre, déjà couronné d’une
imposante masse nuageuse. La Montagne d’Ambre s’avérera un îlot de verdure luxuriante au
sein d’une région chaude et sèche car c’est un massif volcanique qui culmine à 1475 mètres ;
il forme donc une barrière aux alizés et aux vents de « mousson » selon la saison, elle
provoque la condensation (altitude=fraîcheur) de l’humidité fournie par la mer proche et
fournit plus de 2500mm de précipitations par an. Le Parc National couvre 18 200 ha et
représente un véritable impluvium (réceptacle qui concentre les pluies reçues). L’état de la
piste est caractéristique de la forte pluviosité et du ruissellement intense, seuls, les 4X4
peuvent atteindre le point de départ de la visite. Nous sommes dans la forêt pluviale composée
d’espèces végétales très diverses depuis les grands arbres de plus de 20 m de haut, jusqu’aux
mousses et aux lichens qui s’accrochent le plus haut possible pour avoir de la lumière, en
passant par les orchidées, les palmiers, les fougères arborescentes et les « filiformes », seuls
cactus originaires d’Afrique et de Madagascar. Nous allons suivre le sentier botanique
pendant une demi-journée afin de faire connaissance avec la flore et la faune qui présente une
grande variété de plantes et de vie animale. Nous aurons beaucoup de mal à apercevoir les
lémuriens typiques de cette forêt : le Eulémur couronné ou le Eulémur fauve qui sont des
espèces diurnes, inutile d’espérer pour les espèces nocturnes. Par contre, certains firent
connaissance avec de minuscules parasites inoffensifs : des sangsues qui arrivent à se faufiler
sous les jambes des pantalons, mais elles ne peuvent prélever qu’une quantité infime de
sang. Nous verrons aussi des cascades qui sont des lieux sacrés où se déroulent les fijoroana,
cérémonies de prières et d’offrandes demandant la protection où le pardon des ancêtres. Les
offrandes en billets de banque montrent que la population locale a de gros besoins d’aide ou
de…pardon !
Nous reviendrons à pieds à travers le village de Joffreville : ancienne base militaire
française fondée en 1903 par le colonel …Joffre. C’était en même temps un lieu de
villégiatures pour colons fuyant la canicule de Diego Suarez. Aujourd’hui c’est une ville
fantôme qui baigne dans une atmosphère hors du temps : les restes de l’Ecole Normale,
transformés en collège portent les stigmates des ouragans, une grande partie de l’immeuble
est dévastée. La ville encore vivante offre un aspect beaucoup plus typique avec ses maisons
en raphia, on n’utilise que les pétioles et les nervures pour réaliser les panneaux, les planches,
les parois, la couverture et les portes. Notre lodge, « l’hôtel nature lodge » est bâti selon ce
modèle (bois, raphia et bambou) et s’avère très confortable avec des bungalows très spacieux.
Nous y complèterons notre connaissance de la faune avec la découverte des caméléons, des
geckos et des uroplatus.
Les tsingy de l’Ankarana :
Une autre grande étape va être consacrée au massif de l’Ankarana. Deux heures de
route et nous arrivons en vue d’une piste, encore une fois seuls les 4X4 peuvent l’emprunter
car il y a des passages très difficiles, surtout lorsque la pente est forte. Nous sommes un peu
secoués à cause des ornières très profondes. Nous avons traversé de grandes étendues
sauvages peuplées de satrana et nous arrivons à un col à partir duquel nous pouvons voir la
mer dans un lointain brumeux. On entrevoit aussi une sorte de canyon, un peu comme les
lavakas, mais en plus grand, ce sont des entailles réalisées par l’érosion dans un sol friable,
car ici nous sommes sur des collines d’argile latéritique (argile pétrifiée rouge). Brutalement,
c’est un choc, en arrivant sur le bord du canyon : le fond est finement sculpté par l’érosion en
une véritable dentelle de roche rouge. Nous avons l’impression de surplomber une autre
planète, rouge, peut-être mars. Les silhouettes fantomatiques de ces tsingy ressemblent à des
stalagmites à l’air libre, d’un rouge tendre. Il y a des milliers de pointements de toutes tailles
qui en font un paysage hors du commun, il ressemble a celui de Brice Canyon aux Etats-Unis
mais en moins surdimensionné et beaucoup plus fin. La nature est capable de sculpter à
grande échelle des tableaux en 3 dimensions qui ont le pouvoir de nous transporter sur une
autre planète. Nous restons un long moment en promenade sur les bords de la dépression, à
chaque emplacement, le paysage révélé est autre tout en étant semblable. Il faut éviter de trop
s’approcher du bord car, justement cette féérie subtile est fragile car formée dans une roche
très friable et fluante. Nous savons que ce décor n’est pas figé pour une longue période,
l’érosion qui l’a créé, le détruira en quelques décennies, seule consolation, d’autres se
constituent un plus loin mais ce ne sera pas un cycle infini. Un peu plus loin, un autre site,
tout aussi impressionnant est niché au creux d’un petit canyon dans lequel coule timidement
la rivière qui l’a sculpté. Nous descendons jusque dans le lit de la rivière, dans cet
environnement rouge, pour être au niveau des « stalagmites », certaines peuvent mesurer trois
mètres de haut. Ces géants carmins, s’étagent en espalier jusqu’au rebord de la vallée, nous ne
pouvons les approcher car ce site qui commence à être connu se dégraderait encore plus vite.
Nous ne pouvons que contempler ce paysage original, puissamment beau, ce site est tout
simplement merveilleux, un décor de conte de fée où il n’y aurait qu’un seul méchant :
Chronos (le temps qui dévore ce qu’il crée !).
Nous repartons, éblouis, vers les Tsingy gris, et, sur la route, nous faisons une halte au
village d’Anivorano, nous voyons une direction indiquant « lac Antanovo ». Nous n’irons pas
car ce site est sacré, il est mystérieusement enchâssé dans un lieu tout aussi mystérieux car
une légende l’entoure :
« Les habitants d’un village auraient refusé de l’eau à un voyageur, contrairement à toutes
les lois de l’hospitalité malgache ; le voyageur épuisé et assoiffé, ayant de grands pouvoirs
secrets engloutit le village sous les eaux et changea les habitants en crocodiles. Seul témoin
de la scène : une femme. Son enfant s’était mis à pleurer et à hurler, elle sortit du village pour
ne pas déranger les habitants, dès qu’elle fut loin, l’enfant s’arrêta de se plaindre. Quand elle
voulut revenir au village, l’enfant recommença ses pleurs, elle repartit loin, s’assit sous un
tamarinier pendant que son enfant reposait à nouveau ? Soudain, le village s’engloutit dans
un trou gigantesque qui se remplit d’eau »
Voila comment un ouvala (grand creux de dissolution dans le calcaire) est à l’origine
d’une légende érigée en lieu de culte : Ce lac est sacré, on y vient pour demander amour,
santé, descendance et fortune à grand renfort de sacrifices de poulets et de zébus. Les
Sakalava croient que les crocodiles abritent les âmes des villageois disparus ainsi que celles
de leurs ancêtres, donc on les vénère et il est « fady » (sacrilège) de s’y baigner ( !!), de
cracher au bord ou d’y satisfaire un besoin naturel. Les crocodiles doivent vraiment contenir
les âmes des ancêtres, car comment expliquer que, dès qu’ils entendent les tambours qui
préludent à la fête et aux sacrifices d’animaux dont on va laisser les restes sur les bords, ils se
précipitent …pour participer à la fête et…au festin !!
En arrivant près des tsingy de l’Ankarana, nous descendons dans une grotte pour
essayer de voir quelques unes des 14 espèces de chauve-souris qui y vivent. Nous verrons
surtout leurs yeux rouges et nous les apercevrons accrochées aux parois dans l’obscurité.
Lorsque l’obscurité tombe et qu’elles nous frôlent nous avons un petit frisson en pensant
qu’elles représentent le lien avec l’au-delà. Cette grotte est un lieu privilégié de rencontre
entre les vivants et les ancêtres des habitants de la région. Des cérémonies rituelles y ont lieu
en hommage aux ancêtres : « fidirana an-davaka ». Tous les 5 ans , il y en a une plus
importante « Tsangan-tsaina » : changement du mât sur lequel flotte le drapeau des
Ankarana. Ces cérémonies sont suivies avec beaucoup de ferveur et les étrangers y sont
acceptés s’ils font preuve d’un esprit désireux d’apprendre et de partager.
Les tsingy gris :
C’est encore un parc naturel au nord d’Ambilobe, d’une superficie de 18 255 Ha. Il
renferme un ensemble géologique spectaculaire, fait de rivières, canyons, enchâssés dans une
forêt tropicale, tantôt sèche, tantôt verte. Le mélange des deux mondes, minéral et végétal est
absolument magnifique.
Ce massif calcaire a émergé d’une mer il y a plus de 100 millions d’années, au
moment de l’activité volcanique quaternaire. Dès son apparition à l’air libre, ce bloc calcaire a
été attaqué par l’érosion pluviale sous la forme mécanique et chimique. La combinaison des
deux phénomènes a donné un incroyable réseau d’eaux souterraines de plus de 100Km. Il t a
de spectaculaires marmites de géant et des passages souterrains énormes. De plus, des
mouvements telluriques plus récents ont ajouté un apport basaltique et de cendres éruptives.
L’érosion pluviale a rongé le sommet calcaire du massif pour donner d’étranges crêtes
aiguisées, parfois en tuyaux d’orgues discordants que l’on nomme « tsingy », ce vqui signifie
« marcher sur les pointes ». La partie basaltique est souvent formée de phonolite et donne des
sons qui peuvent paraître étranges quand on les percute. Des belvédères permettent d’observer
sans risques cette formation spectaculaire et étrange. Les plus courageux vont pouvoir
s’engager dans le massif sur un sentier balisé et surplomber les dépressions profondes, au
point qu’il y a deux passages sur des ponts suspendus. La température monte très vite en
raison de la réverbération du massif et d’une ombre plus réduite ; la température et le décor
donnent l’impression d’être dans un endroit infernal, dans un autre monde. C’est une aventure
surprenante que d’évoluer au cœur de ce massif si mystérieux pour les néophytes en géologie.
La flore s’est adaptée en devenant « rupicole », c'est-à-dire adaptée aux roches calcaires, le
pandanus voisine avec l’adinia (sorte de liane) ou le taimpapango à l’écorce blanche. Ici, il y a
encore 11 espèces de lémuriens, certains diurnes, d’autres nocturnes, certains sont très petits,
si petits qu’ils peuvent de loger dans de petits creux des arbres. L’espèce la plus rare est le
propithèque noir qu’il est extrêmement difficile de rencontrer. Nous trouverons diverses
espèces de lémuriens, de serpents, de scorpions, d’escargots dans notre traversée de la forêt
avant d’atteindre la spectaculaire partie calcaire. Ces tsingy de l’Ankarana laissent
l’impression d’être au début de la création du monde de par leur aspect inhospitalier, ces
crevasses profondes et torturées, cette dominante gris/blanc qui reflète une lumière violente
mais blafarde, une nature malmenée, cela contraste avec l’aspect apaisant des tsingy rouges ;
ici le paysage désolé, bien que très beau, laisse un peu mal à l’aise, comme si la nature
envoyait un message avertissant de sa puissance , de sa force, de son évolution inéluctable,
nous montrant que l’effet du temps va bien au-delà de la durée de vie humaine qu’il faut
savoir rester humble face à ce spectacle.
La mer d’émeraude :
Noue allons longer cette magnifique baie, encore un peu sauvage, espace naturel
protégé, bénéficiant d’un climat idéalement tempéré oscillant entre 20 et 30°C. L’alizé qui
souffle en permanence atténue les effets du soleil. Une grande boucle longeant la baie nous
conduit à un embarcadère sympathique. Un navire nous y attend, ancré dans une mer
incroyablement limpide, navire est un bien grand mot, plutôt une grande barque de 15 m de
long, à voile triangulaire. Il y a juste la place pour notre groupe de 12, plus le guide et le pilote
avec son aide. La mer est transparente, tiède et accueillante dans la baie ; nous longeons les
rives qui portent quelques bâtisses mais loin d’être surchargées comme c’est le cas dans les
baies « à la mode », nous approchons de la passe vers la haute mer qui conduit au large, la
tension monte un peu devant les vagues qui deviennent de plus en plus grandes et même
déferlantes au niveau de la passe. Nous serrons tous un peu plus fort notre gilet de
sauvetage… Le vent force un peu, on nous distribue des cirés de marin et on enferme nos
appareils photo dans des caissons étanches. La couleur de la mer vire peu à peu au vert
émeraude, une couleur magnifique, mais l’enthousiasme est un peu tempéré par le fait que
nous embarquons un peu d’eau à chaque vague. Le silence se fait dans le bateau, on n’entend
plus que le clapotis de l’eau, le bruit de l’étrave fendant la vague et le sifflement du vent dans
la voile. Soudain, un craquement sinistre, suivi d’un claquement sec , le mât se brise net et la
voile s’effondre à tribord, un moment d’inquiétude suit pas encore de panique, nous sommes
en mer, secoués par les vagues, nous n’avons plus de mât, pas de rames, que faire ?
Soudain, le doux bruit d’un moteur Yamaha de 45 CV se fait entendre, notre bateau avait un
moteur !!! le pilote l’a démarré. Nous allons nous réfugier dans une petite crique à l’abri où il
y a un village de pêcheurs ; ils vont nous confectionner un nouveau mât et pendant ce temps,
nous pouvons voir de plus près, les crabes de mangrove, «énormes », mais si délicieux cuits
dans notre assiette. En quelques minutes on nous fabrique un nouveau mât et nos pouvons
poursuivre notre aventure à travers la mer d’émeraude. Les couleurs sont magnifiques et les
embruns nous rafraîchissent agréablement. Nous accostons sur une plage de sable fin, en
débarquement « mouillé », mais l’eau est à 28°C. Une baraque nous attends, elle va nous
servir de cabine de déshabillage, de réfectoire et de refuge à l’ombre car le soleil est ardent,
heureusement, il y a notre ami, l’alizé. Une longue baignade, très agréable vu la température
de l’eau et de l’air, nous permet de patienter pendant que nos guides vont pêcher notre repas
de midi. Il arrive sous la forme de poissons frétillants : dorades, poissons perroquets et
d’autres inconnus mais délicieux grillés, surtout précédés de rhum arrangé et de pinces de
crabe de mangrove. Le retour se fait à la voile et l’alizé nous pousse si fort que nous allons
plus vite qu’avec le moteur ; nous sommes, à nouveau copieusement arrosés par les vagues
que le bateau affronte vaillamment ; nous arrivons au port, quelque peu humides, mais vu la
température, c’est un plaisir. Cette aventure, en mer d’émeraude, laisse un souvenir
inoubliable : mer verte et rebelle sous un ciel bleu d’azur, le long de côtes issues d’un
volcanisme récent mais avec des plages de sable corallien ultrafin : un décor paradisiaque !!
Antsiranana :
Antsiranana est une ville très curieuse avec ses rues poussiéreuses baignées de soleil,
elle a des aspects de port sud américain, ses maisons en bois sont perdues au milieu des fleurs,
son plan en damier est dû aux militaires qui l’ont développé. Son site exceptionnel et sa
fonction de carrefour près de La Réunion, de Nosy Be (le plus grand pôle touristique de
Madagascar) et des Comores. Ses plages désertes et pourtant magnifiques, son climat chaud et
lumineux vont certainement attirer de plus en plus de voyageurs. La ville est imprégnée d’une
ambiance assez particulière, nonchalante, paisible et chaleureuse.
Le port contient un des plus grands chantiers de l’Océan Indien de réparation et de
construction navale. Le port de commerce exporte les produits de l’arrière pays : café, cacao,
ylang ylang, canne à sucre, poivre noir, ses activités multiples ont attiré beaucoup de monde
et la ville est devenue très cosmopolite. La barrière montagneuse du Tsaratanana rend les
communications avec l’arrière pays laborieuses, mais le port devrait connaître un nouvel essor
grâce à un projet économique régional.
La place du 14 octobre est le vieux centre caractérisé par son comptoir à colonnades
pastel et ses maisons à véranda. L’artère principale de la ville est la rue Colbert qui offre un
bel exemple d’architecture coloniale avec les restes de l’Hôtel de la Marine, palace de la
période coloniale en piteux état actuellement, tout comme un kiosque à musique, lui,
carrément abandonné. La placette marquée par un buste du maréchal Joffre offre un très beau
point de vue sur le port qui abrite des cargos, des porte-conteneurs et des bateaux de pêche au
thon concurrencés par de nombreux navires-usines mauriciens, français et américains. Nous
allons remonter toute la rue Colbert à la recherche des dernières emplettes avant le retour pour
Antananarivo où nous allons prendre l’avion pour Paris.
Ce voyage découverte plus qu’aventure s’avère être extraordinaire, hors du commun
car l’accueil malgache est simple, chaleureux, amical (toute idée de profit autre que collectif
est écartée), la pratique de la langue française est un plus qui favorise les échanges, l’histoire
de la civilisation malgache est très riche. Nous avons rarement quitté un pays avec cette
impression d’avoir visité, non pas une contrée, mais d’être allé visiter des amis. La simplicité
de l’accueil et surtout le contact simple et franc, la sollicitude de nos hôtes, les décors
absolument hors du commun en font un voyage qui restera inoubliable.
M.MARTY le 10/10/2011

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