Insuffisance cardiaque
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Insuffisance cardiaque
1 TRONC COMMUN – SOINS CRITIQUES : Module Cardiologie Résumé de lecture - Insuffisance cardiaque DIRECTION DES SOINS INFIRMIERS ET DES REGROUPEMENTS CLIENTÈLES © Tous droits réservés, CHUM, août, 2014 2 DOCUMENT SYNTHÈSE Ŕ INSUFFISANCE CARDIAQUE (IC) & ŒDÈME AIGU PULMONAIRE (OAP) L’insuffisance cardiaque (IC) est un syndrome évolutif qui résulte d’une altération de la capacité des ventricules à se remplir ou à éjecter le sang. L’IC est la conséquence d’une insulte primaire qui provoque une atteinte au muscle cardiaque consécutive à une sollicitation prolongée et excessive de celui-ci. Dans une majorité de cas, la coronaropathie et les lésions qu’elle entraîne au cœur et principalement au ventricule gauche, représente la cause sous-jacente la plus fréquente de l’IC. Parmi les autres conditions qui augmentent le risque de développer une insuffisance cardiaque, l’on retrouve : Nature de l’insulte Atteinte cardiovasculaire Habitudes de vie Maladie infectieuses Effets des médicaments Troubles métaboliques Facteurs de risque Hypertension Coronaropathie, ischémie Maladie des valves cardiaques Maladie vasculaire périphérique Consommation de drogues Abus d’alcool Fièvre rhumatoïde Exposition à des agents cardiotoxiques (chimio) Diabète PHYSIOPATHOLOGIE ET MÉCANISMES D’ADAPTATION Afin de préserver la fonction contractile du cœur et pour assurer un débit sanguin adéquat, des mécanismes compensatoires sont rapidement mis en place. Ceux-ci visent à augmenter le volume sanguin, les pressions de remplissage du cœur, la fréquence cardiaque, ainsi que la masse musculaire cardiaque. Les mécanismes d’adaptation les plus importants sont les suivants : Activation de systèmes neurohormonaux : libération de norépinéphrine, activation du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) et du système nerveux sympathique (SNS); Hypertrophie et remodelage ventriculaire Activation des systèmes neurohormonaux Le SNS compense pour le faible débit cardiaque par la libération de catécholamines soit l’épinéphrine, la norépinephrine, et la vasopressine. Ces hormones causent une 3 importante vasoconstriction et permettent d’augmenter la pression artérielle, la fréquence cardiaque et la contractilité. L’activation du SNS amène un soutien à court terme, mais devient inadéquat et même nuisible lorsque sollicité à long terme. L’activation du SRAA favorise une rétention des liquides en créant une rétention de sel et d’eau dans l’organisme, augmentant ainsi la précharge. Le déclenchement du SRAA résulte de l’incapacité du cœur à assurer un débit cardiaque adéquat, ce qui stimule la sécrétion de l’hormone rénine par les reins. Une chaîne d’événements physiologiques est déclenchée aboutissant à une hypervolémie. La conversion de l’angiotensine I par le biais de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA), résulte en la libération importante d’angiotensine II, un puissant vasoconstricteur qui augmente la résistance vasculaire systémique (RVS), la PA et le travail du VG. Ainsi, une RVS élevée réduit davantage le DC. L’aldostérone, hormone minéralocorticoide libérée par les glandes surrénales sous l’effet de leur stimulation par l’angiotensine, stimule la rétention sodique au niveau des tubules distaux des reins. Finalement, des hormones telles les peptides natriurétiques sont libérées en réaction à la distension des chambres cardiaques. Ces hormones provoquent de la vasodilatation et induisent la diurèse. La stimulation persistante du SNS provoque des dysrythmies (tachycardies), une diminution du temps de remplissage ventriculaire, une augmentation de l’activité des myocytes et de leur dépense d’énergie, et finalement la mort cellulaire. Ces mécanismes aggravent davantage la réponse hémodynamique. Une augmentation chronique de la postcharge cause une diminution du débit sanguin ainsi qu’une congestion pulmonaire et de l’œdème périphérique. Hypertrophie myocardique Ce processus engendre le remodelage du cœur, qui aggrave davantage la capacité de remplissage du cœur. Dans l’insuffisance cardiaque, le volume croissant du myocarde est causé par des myocytes de plus en plus gros approchant précocement la fin de leur cycle de vie. Alors que de plus en plus de myocytes meurent, une charge excessive est placée sur le myocarde restant. Les nouvelles cellules générées deviennent progressivement moins efficaces à mesure que le processus pathologique progresse. Le remodelage cardiaque représente un mécanisme progressif d’adaptation, permettant ainsi d’augmenter le volume d’éjection et la force de contraction, Ces mécanismes permettent une adaptation à court terme et deviennent toutefois rapidement inadéquats dès que la demande sur le cœur augmente. À long-terme, ils provoquent des conséquences néfastes sur le cœur en augmentant la précharge et la postcharge, l’augmentation de la demande en O2 du cœur, l’ischémie myocardique, la détérioration de la contractilité et l’apparition de foyers arythmogènes. 4 CLASSIFICATION DE L’IC La classification de l’IC selon la New York Heart Association (NYHA) est fréquemment utilisée pour quantifier et surveiller l’impact fonctionnel de l'insuffisance cardiaque pour un même individu. Classes Symptômes Descriptions Classe I Aucun symptôme Classe II Symptômes pendant les activités ordinaires Symptômes pendant les activités moins qu’ordinaires Pas de limitation, l'activité physique ordinaire n'entraîne pas de fatigue anormale, de dyspnée ou de palpitations, Limitation modeste de l'activité physique : à l'aise au repos, mais l'activité ordinaire entraîne une fatigue, des palpitations ou une dyspnée, Classe III Classe IV Symptômes au repos Réduction marquée de l'activité physique : à l'aise au repos, mais une activité moindre qu'à l'accoutumée provoque des symptômes, (ex : s’habiller) Impossibilité de poursuivre une activité physique sans gêne : les symptômes de l'insuffisance cardiaque sont présents, même au repos et la gêne est accrue par toute activité physique. CATÉGORIES D’INSUFFISANCE CARDIAQUE De façon générale, on retrouve 2 catégories d’insuffisance cardiaque, selon qu’elle touche principalement le cœur gauche ou le cœur droit. Insuffisance ventriculaire gauche Trouble de la contractilité du VG → diminution DC → vasoconstriction artérielle et augmentation de la RVS i.e. augmentation de la postcharge → congestion et œdème dans la circulation et alvéoles des poumons 2 sous-catégories o Insuffisance systolique o Insuffisance diastolique Manifestations cliniques : diminution de la tolérance à l’effort, rétention de liquides, symptômes respiratoires À long-terme, entraîne une dysfonction et une insuffisance du cœur droit Insuffisance ventriculaire droite Trouble de contractilité du VD 5 Habituellement consécutive à une insuffisance cardiaque gauche Peut aussi résulter d’un état aigu comme une embolie pulmonaire ou infarctus du VD, ou bien d’un problème plus chronique tel une hypertension pulmonaire L’insuffisance ventriculaire gauche engendre une augmentation de la pression en amont, soit dans l’oreillette gauche et la circulation pulmonaire, et finalement dans le cœur droit. À mesure que le cœur droit perd de sa force de contraction, le sang refoule au niveau systémique causant de l’œdème des membres inférieurs. Manifestations courantes : distension veineuse jugulaire, pression veineuse centrale accrue, faiblesse, œdème périphérique ou sacré, hépatomégalie, ictère, sensibilité à la palpation du foie, symptômes GI (diminution appétit, anorexie, nausées, sensation de plénitude inconfortable. Insuffisance cardiaque systolique Englobe toute anomalie du muscle cardiaque ayant pour effet de réduire la contractilité pendant la systole et la quantité de sang pouvant être pompée à l’extérieur du cœur. Manifestations : en plus des signes et symptômes d’insuffisance du cœur gauche, le client présente une diminution de la fraction d’éjection, généralement inférieure à 40% Les coronaropathies et leurs séquelles sont la cause sous-jacente dans 2/3 des cas En cas d’insuffisance cardiaque gauche systolique, le volume ventriculaire télédiastolique est élevé et entraîne une augmentation de la pression ventriculaire supérieure à celle d’un cœur normal, et font augmenter ainsi les pressions veineuses pulmonaires et auriculaires gauches. L’augmentation de la pression vasculaire pulmonaire provoque une transsudation de liquides des capillaires pulmonaires vers l’espace interstitiel alvéolaire, liquide qui finit par être poussé à travers la paroi des alvéoles, créant ainsi un œdème pulmonaire. Insuffisance cardiaque diastolique Désigne une anomalie du muscle cardiaque qui l’empêche de se relâcher, de s’étirer ou de se remplir pendant la diastole Résulte d’une dysfonction du VG, touche donc principalement le cœur gauche Se traite différemment de l’ICS Fraction d’éjection préservée, souvent supérieure à 50% Causes principales semblables à l’ICS Détectable par le cathétérisme cardiaque et l’épreuve d’effort SIGNES ET SYMPTÔMES L’IC peut se manifester de nombreuses façons, selon l’ampleur du remodelage et de la dysfonction ventriculaires. 6 Afin de diagnostiquer l’IC, il importe en premier lieu de déterminer l’ampleur de l’anomalie structurale sous-jacente du cœur par le biais d’examens d’imagerie et certaines analyses de laboratoire. IC GAUCHE - Dyspnée au repos ou à l’effort : La dyspnée représente un symptôme cardinal d’une atteinte du ventricule gauche suggérant ainsi une progression de la maladie - Orthopnée - Œdème aigu pulmonaire - Râles, wheezing - Douleur, oppression thoracique - Palpitations cardiaques - Tachycardie - Fatigue et faiblesse - Pouls faible, filant, rapide - Fraction d’ejection inf. à 30% et la présence d’IC de catégorie III ou IV sont fortement corrélées avec des arythmies ventriculaires et un risque accru de mortalité IC DROITE - Nycturie et oligurie - Anorexie, perte de poids, nausées - Distension des veines du cou - Gallop S3 - Reflux hépatojugulaire - Ascite, hépatomégalie, anasarque - Cyanose périphérique ou centrale, pâleur - Tachycardie - Fatigue et faiblesse - Pouls faible, filant, rapide APPROCHE THÉRAPEUTIQUE En cas de manifestation d’une IC aigue, les soins consistent à stabiliser la condition clinique du patient, ainsi qu’à établir le diagnostic, l’étiologie et les facteurs précipitants. Les objectifs de la thérapie sont d’augmenter les chances de survie et de prévenir les complications. Diminuer la précharge Pourquoi : améliorer le DC, diminuer le retour sanguin vers le cœur et éviter la surcharge liquidienne Moyen : nitroglycérine, Diurétiques IV, limiter l’apport liquidien, diète restreinte en sodium, antagonistes de l’aldostérone (possible contre-indication si créatinine élevée) - Les nitrates sont employés pour réduire la précharge et vasodilater les artères coronaires si l’IC aigue a pour cause une coronaropathie 7 Diminution de la postcharge et de la résistance vasculaire systémique Morphine : les effets bénéfiques résultent probablement d’un effet apaisant sur le patient. On observe ainsi une diminution de l’anxiété, une diminution de la production de catécholamines, et une réduction de la RVS Vadilatateurs : nitroprussiate de sodium (Nipride) : réduit également la précharge. Induit une relaxation du tissu musculaire lisse Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’ANG II : augmentation du volumen d’ejection et du débit cardiaque, ainsi qu’une faible diminution de la précharge Antagonistes des récepteurs de l’ANG : prévenir le remodelage du cœur, résultant en une diminution des risques d’arythmies; traitement de1er recours chez les patients qui ne tolèrent pas les IECA; utiliser en association d’un IECA si dysfonction systolique Milrinone Augmenter la contractilité Les patients dont le VG est sévèrement atteint peuvent présenter de l’hypotension et pourraient ne pas tolérer des médicaments visant à réduire la précharge et la postcharge. Les inotropes s’avèrent être des agents de choix dans ces circonstances. Dopamine, dobutamine, milrinone, lanoxin (attention : K+, risque de toxicité si hypokaliémie) Betabloquants dans les cas d’insuffisance systolique. Previennent également le remodelage du ventricule. Moyens invasifs : ballon intra-aortique selon les cas Favoriser l’oxygénation et diminuer la demande d’O2 Favoriser le repos (la maladie mais aussi certains médicaments peuvent causer de la fatigue Administrer de l’O2 : la méthode d’administration d’O2 (effractive ou non) dépend habituellement du degré d’hypoxémie et d’acidose ainsi que de l’état de conscience du patient Betabloquants si insuffisance diastolique. Diminuent la demande en réduisant la FC, et allouent plus de temps au remplissage ventriculaire. Administrer une ventilation non effractive, type BIPAP, permettant de : Diminuer le travail inspiratoire (diminuer le travail des muscles respiratoires). Diminution de la précharge (peep diminue retour veineux). 8 - Améliorer l’oxygénation et les échanges gazeux (Le peep va garder une pression continue dans l’alvéole pour empêcher le transsudat de passer la membrane alvéolocapillaire) ANALYSES DE LABORATOIRE FSC : porter une attention particulière au taux d’Hb et aux globules blancs. Une anémie sévère ou une infection peuvent constituer des diagnostics différentiels. Électrolytes, urée, créatinine : connaître la fonction rénale du patient, évaluer la réponse aux médicaments administrés, prévenir les risques d’Arythmies pouvant être causés par des débalancements électrolytiques Saturation Gaz artériels Imagerie Échographie cardiaque : permet de déterminer s’il y a présence d’anomalies du myocarde, des valves cardiaques ou du péricarde ou pour déterminer quelles cavités cardiaques sont atteintes. Permet également de déterminer la fraction d’éjection Radiographie pulmonaire : déterminer l’atteinte pulmonaire COMPLICATIONS PULMONAIRES LIÉES À L’INSUFFISANCE CARDIAQUE Les manifestations cliniques de l’IC résultent d’une hypoperfusion des tissus et d’une congestion des organes. Initialement, symptômes n’apparaissent qu’à l’effort. Avec le temps, surviennent également au repos. Afin de déterminer si la dyspnée du patient résulte d’une IC ou d’une complication pulmonaire, effectuer un taux de BNP. L’IC augmente la tension contre la paroi ventriculaire gauche en raison de la précharge excessive dans les ventricules et favorise la libération de BNP. Œdème pulmonaire et insuffisance cardiaque Phénomène caractérisé par la présence de liquide rempli de protéines dans les alvéoles (causant une pression hydrostatique élevée dans les capillaires pulmonaires), empêchant les échanges gazeux en perturbant la voie de diffusion normale entre l’alvéole et le capillaire Provoque une accumulation excessive de liquide séreux ou sérosanguin dans les espaces interstitiels et les alvéoles pulmonaires Causé par des pressions auriculaires et ventriculaires gauches accrues Les complications principales d’un OAP sont la fatigue et l’insuffisance respiratoire. 9 Manifestations : dyspnée importante, anxiété, expectoration spumeuses, rosées, peut éprouver la sensation d’étouffement, battement ailes du nez, muscles saillants dans le cou, inspiration bruyante, secrétions audibles au moment de l’expiration, diaphorèse, peau froide, livide, cyanotique RÉFÉRENCES Dumitru, I., & Ooi, H.H. (2014). Heart Failure. Medscape. Disponible en ligne : http://emedicine.medscape.com/article/163062-overview Urden, D.L., Stacy, M.K., & Lough, M.E. (2014). Soins critiques, Chenelière Education. Wagner Dorman, K., & Hardin-Pierce, G.M. (2014). High-Acuity Nursing, PEARSON.