Jusqu`au bout du monde (Nanook of the north)

Transcription

Jusqu`au bout du monde (Nanook of the north)
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L'oBservatoire - projections recherches
cinéma
Jusqu'au bout du monde (Nanook of
the north)
séance du 30 août 2007
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"My interest in films, from then on, grew." Robert Flaherty
"Nous, les Russes, avons appris davantage de Nanook of the North que de tout autre film étranger. Nous
l'avons usé à force de l'étudier. Ce fut, d'une certaine façon, nos débuts." Serguei Eisenstein (à Robert
Lewis Taylor du New Yorker)1[ ]
En 1910, Robert J. Flaherty (1884-1951) part explorer la côte est de la Baie d'Hudson (nord du Canada), pour le
compte d'un constructeur de chemin de fer. Il découvre la vie des Esquimaux.
Entre 1910 et 1912, il entreprend deux explorations qui lui permettent de cartographier la région, de photographier
et de lier des relations avec les indigènes.
En 1913, son commanditaire lui suggère d'emmener une caméra (une Bell and Howell, pour les amateurs). Lors de
l'expédition suivante, il tourne quelque chose comme 17 heures de rushes, en marge de ses prétextes officiels. "My
interest in films, from then on, grew."
A son retour, alors qu'il a amorcé le travail de montage, Flaherty oublie (par inadvertance comme souvent quand
on oublie) un mégôt dans ces bandes, qui enflamme le négatif nitrate. Il ne reste de ces premiers films qu'une copie
positive. Plus tard, Flaherty a précisé que ce malheur n'en était pas un, tant la qualité des rushes était douteuse et
le montage rendu difficile par son amateurisme.
Finalement, Flaherty trouve dans le fourreur français Revillon un mécène qui lui permet de repartir filmer. En 1920,
il gagne à nouveau la Baie d'Hudson : cette fois il s'agit explicitement de tourner un film. Son séjour durera 16 mois.
C'est ce film que nous verrons ce soir : la vie de l'Esquimau Nanook et de sa famille, la lutte contre les éléments
impitoyables, et pour nous, une forme assez radicale (mais pas absolue -et en un sens c'est ce qui fait problème
avec de film) d'altérité. Film "ethnologique", réalisé par un scientifique de formation, tournant d'abord de manière
amateure sur son terrain d'exploration,Nanook of the north. A story of life and love in the actual Arctic
est
généralement
présenté
comme
le 2[ ] (ce qui
premier
évidemment n'adocumentaire
pas grand intérêt
mais soulève de passionnantes questionsquid
:
des "enregistrements"Lumières ?).
de
3
Comme dit André Bazin, Nanook, malgré son grand âge, "supporte encore admirablement l'épreuve". Le critique
3[ ]. Je ne me prononcerais pas
avance "les qualités majeures du genre : une authencité poétique qui n'a pas vieilli"
sur "l'authencité poétique", si ce n'est pour reformuler l'hypothèse et prétendre Nanook,
que
le film, est sauvé par
ses images -ce sont elles qui, contre tout attente, n'ont pas vieilli. Et en cela on peut légitimement parler de
documentaire, dans le sens le plus noble du terme. Les images parviennent (par leur charge "auratique" -caractère
des seules véritables "documents") à absenter la lourdeur humaniste du propos, l'ethnologie naïve, la construction
narrative ou dramatique, le (nécessaire) travail de reconstitution, les projections phantasmatiques du
filmeur-monteur Flaherty. Le film suinte quelque chose d'infiniment précieux, qui a à voir avec le temps, le grain des
choses et la survivance des êtres à travers l'enregistrement mécanique4[ ]. Pensez au tout premier plan sur
l'étendue artique, où l'eau et la glace luisent sous un ciel plombé.
5[ ], à
C'est ce regard là, attentif aux images surtout, et
qu'on
leurtentera
magie
de conserver jeudi soir. C'est donc
4
tant mieux si le film est muet !
Rendez-vous chez Antoine jeudi 30 août, 21 heures au plus tard ! Ceux qui souhaitent picniquer viennent plus tôt !
8, Allée d'Andrézieux, Paris 18è.
code : 15A93. 8ème étage.
01 42 57 70 61
Pour finir, je cède la parole à Deleuze (Cours sur le cinéma, à Vincennes, mars 1982).
(Le propos se retrouve dans le tome L'Image-mouvement
1
du livre sur leCinéma, Minuit, 1983, aux pages 199 et
s.)
5
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