intro à la visite

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intro à la visite
Introduction à la visite du monument
Abbaye de Montmajour
Arles
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I° L’abbaye et son histoire
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Situation géographique
L’abbaye Saint Pierre de Montmajour est située à 4 kilomètres au nord-est de la ville d’Arles. Cette ville
connue pour son histoire et ses monuments antiques a vu s’écouler les siècles. Entouré de marécages,
l’emplacement de l’abbaye formait alors une île qui, par sa situation entre la plaine de La Crau et la chaîne des
Alpilles, constituait l’entrée de la vallée des Baux.
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Des légendes aux origines de l’abbaye de Montmajour
Selon les légendes arlésiennes, la fondation de l’abbaye serait due à :
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Saint Trophime, le premier évêque d’Arles, qui au Ier siècle après Jésus-Christ serait venu se réfugier
dans une grotte du rocher de Montmajour;
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Childebert Ier, le fils de Clovis, qui aurait fait construire une première église au VI° siècle pour l’offrir à
un groupe de moines ;
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ou encore Charlemagne, venu chasser les Sarrasins d’Arles au début du IX° siècle et qui aurait fait
creuser des tombes pour accueillir les corps des chrétiens défenseurs de la ville.
La réalité est bien différente, même si la première vocation du lieu était bien de recueillir des morts. Les
invasions Sarrasines avaient poussé les populations à se réfugier en campagne et un petit groupe d’hommes
pieux avaient choisi le rocher pour ensevelir leurs morts et prier pour les vivants. La fondation de l’abbaye
quant à elle, date de 949, où une religieuse du nom de Teucinde fit l’acquisition du rocher et l’offrit aux
hommes qui s’étaient regroupés en une communauté monastique. L’abbaye tient son nom de son
emplacement : mons major qui signifie la montagne majeure, la plus grande.
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Qu’est-ce qu’une abbaye ?
Les monastères, ordres et congrégations sont des instituts de vie sacrée, où l’objectif est de prendre comme
modèle la vie du Christ. Les moines sont des religieux regroupés en communauté formant un monastère où ils
recherchent la solitude et sont en rupture avec le monde extérieur. Il aussi existe des religieux non moines qui
suivent des règlements semblables mais agissent sur la société en dehors de leurs établissements appelés des
chanoines.
Une abbaye rassemble une communauté de moines, et est régie par un abbé qui peut être clerc ou laïc. Ils vivent
dans un ensemble de bâtiments utiles aux différents temps de vie monastique. L’abbaye est délimitée par une
clôture, une limite à l’intérieur de laquelle seuls les religieux sont admis.
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Les habitants d’une abbaye
Les religieux sont des moines, des novices et des oblats. Les oblats sont des enfants qui ont été donnés par leurs
parents au monastère pour y être élevés. Ils peuvent ensuite rester intégrés à l’abbaye. Les novices sont
délibérément venus au couvent et accomplissent, avant de faire leurs vœux, une période de préparation. Le
noviciat dure un an, entrecoupé de plusieurs périodes à la fin desquelles on vérifie la volonté du novice
d’intégrer la communauté. Les moines sont ceux qui ont prononcé leurs vœux. Ces derniers concernent la
chasteté, la pauvreté et la stabilité (c’est-à-dire l’engagement de demeurer au monastère).
C’est parmi les moines qu’est choisi l’abbé, et il est élu à vie par eux (dans ce cas, selon la règle de Saint
Benoît). Il est choisi en fonction de son mérite, de sa sagesse et de sa doctrine. Il est le gestionnaire de l’abbaye
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et veille à ce que les religieux obéissent aux règles (respecter les trois temps de vie, effectuer les tâches qui leur
sont propres) et suivent leurs vœux. Il leur sert de guide. Il a donc autorité sur les moines qui lui doivent
obéissance. Il nomme également ceux qui l’assistent dans le gouvernement de l’établissement.
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Saint Benoît et sa règle
Les moines de l’abbaye de Montmajour sont des bénédictins qui ont choisi de suivre la règle de Saint Benoît
(qui portera son nom), composée au VI° siècle.
Benoît est né vers 480 à Nursie en Italie. Il va contribuer au développement du monachisme en Italie
méridionale en fondant un monastère à Mont-Cassin et en rédigeant une règle adoptée dans de nombreux
monastères : la règle bénédictine. Il l’a conçue comme un règlement de spiritualité qui définit l’organisation
interne d’un établissement rassemblant une communauté. Présentée comme une série de conseils, la règle
s’applique à ceux qui veulent imiter le Christ, vivre sa vie et accomplir leur salut (aller au Paradis). Cette
initiation à la vie monastique prévoit aussi des sanctions contre ceux qui commettent des fautes.
L’ordre cistercien
Au cours des XI° et XII° siècles, certains groupes de moines (en Italie, puis en France) voulurent retourner à
une vie cénobitique stricte ou conserver des éléments de la vie érémitique dans l’observance de la règle. Un
nouvel ordre, issu de l’ordre bénédictin mais créé en réaction à celui-ci, allait naître. En 1098, l’abbé Robert
quitte son abbaye de Molesmes et fonde ce qu’il appellera le « nouveau monastère » à Cîteaux. Il sera suivi par
des frères puis par d’autres moines. Le but de l’ordre cistercien est de vivre intégralement la règle, de
retourner à la simplicité de la vie quotidienne, du culte et de l’art ; d’être en rupture avec le monde, et
d’observer la pauvreté, le silence et le travail manuel. On verra alors dans l’art cistercien une réaction au faste
et à l’ostentatoire de l’art bénédictin : l’architecture sera très épurée, presque dépouillée.
Ce « nouveau monastère » fondera des abbayes filles qui essaimeront à leur tour, formant alors la
congrégation de l’ordre cistercien comme par exemple, les sœurs provençales : Sénanque, Silvacane et Le
Thoronet.
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Les principes de la règle bénédictine
Elle repose sur l’obéissance à l’abbé, la vie des moines étant très hiérarchisée autour de sa personne.
Elle réglemente la vie quotidienne des moines : trois principes de vie sont établis et reposent sur la prière, la méditation et
le travail manuel. Elle fixe des horaires pour l’exécution de ces différents temps de vie. Certains moines portent le titre de
moines prêtres ou d’officiers claustraux. Dans ce cas, ils étaient chargés de différentes tâches qui permettaient à l’abbaye
de fonctionner.
Le respect des principes de la règle permet aux moines d’aboutir à plusieurs vertus, toujours dans le but d’imiter le
Christ : l’humilité, la piété, le silence, le mépris des biens, la chasteté et l’obligation du travail
II° L’architecture : adaptée au différents temps de vie et
représentative des différents siècles qui s’y sont écoulés
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La nécropole rupestre
L’abbaye Saint Pierre de Montmajour fut fondée au X° siècle. A cette époque, des tombes rupestres existaient
déjà sur le rocher de Montmajour. Ces tombes anthropomorphes avaient été creusées pour accueillir des
défunts parmi les premiers moines.
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Cette époque est marquée par la chute des Carolingiens et la Provence va se constituer en comté dissocié de la
France (à cette époque divisée en Francie occidentale et Francie orientale).
• La chapelle semi troglodyte (Saint Pierre)
La seule construction restante de l’abbatiale primitive est l’ermitage Saint Pierre. Cette chapelle du XI° siècle
est située au sud de l’abbaye, en contrebas. Elle est actuellement l’objet de restauration et ne peut pas encore
être ouverte au public. Il est toutefois nécessaire de la mentionner, au regard de son importance dans l’histoire
de l’abbaye. Elle est composée de 2 vaisseaux formant nef et d’une grotte naturelle utilisée comme lieu de
méditation et de cellules pour les moines. L’un des 2 vaisseaux est entièrement creusé dans la roche et semble
être le plus ancien. Le deuxième, construit en pierre et décoré, vient s’appuyer sur la partie troglodyte. Ce mode
de construction s’inspire d’un procédé traditionnel de l’art de bâtir en Provence calcaire. Les nefs contiennent
des arcades appareillées retombant sur des colonnes avec chapiteaux décorés qui, au côté Sud, encadrent des
ouvertures donnant sur l’extérieur. Cette petite église est un témoignage des humbles débuts de l’aventure
monastique de Montmajour.
Les X° et XI° siècles verront la Provence dirigée par la Maison comtale de Provence : Guillaume le Libérateur
fut le premier comte puis ses descendants seront ses successeurs.
• L’abbatiale romane (Notre Dame)
Durant les XII° et XIII° siècles, l’église Notre Dame puis les bâtiments conventuels (cloître, salle du chapitre,
réfectoire, dortoir, cuisine, hôtellerie, logement de l’abbé, cellier, bibliothèque) furent construits. La simplicité
de son plan, la plénitude de ses volumes, la nudité des parements, l’élégance des voûtes et la puissance des
murs gouttereaux font de l’église un exemple de l’art roman provençal, utilisé tardivement (à l’époque les pays
du nord utilisaient déjà l’art gothique).
Au XII° siècle, le mariage de Doulce, héritière du titre comtal avec le comte de Barcelone, Raymond-Bérenger,
transmet la régence du comté à la famille des Barcelone-Aragon. Leur maison dirigera la Provence jusqu’au
XIII° siècle. Cette période sera entravée par les conflits avec les comtes de Toulouse et les seigneurs des Baux,
tous deux prétendants au comté de Provence.
La paix reviendra entre eux avec l’intervention du roi de France Louis IX en 1245. La mort du comte de
Toulouse promis à la dernière héritière du comté laisse la place à Charles d’Anjou, le frère du roi Louis IX. Il
devient comte de Provence en 1246 et fonde la première maison d’Anjou qui dirigera la Provence jusqu’en
1382. A cette date, des conflits éclatent entre les deux héritiers nommés par la dernière reine. C’est finalement
Louis d’Anjou qui sera le comte de Provence, créant ainsi la deuxième maison d’Anjou. En 1481, le dernier
héritier Charles III d’Anjou-Sicile, lègue le royaume de Provence à Louis XI, roi de France. La Provence perd
alors son indépendance et est intégrée au royaume de France.
Les XIV° et XV° siècles voient les Anglais reconquérir des territoires français : la Guerre de Cent ans et le
passage des Grandes Compagnies terrorisent la région, la ville d’Arles est assiégée par Du Guesclin donc
l’abbaye se dote d’une tour défensive. A partir de cette époque, l’abbaye va connaître une profonde période de
déclin, due à ces temps de misère mais également à la mise en commende de l’abbaye. Les abbés vont alors se
contenter de percevoir les bénéfices et abandonnèrent la vie monastique.
• Le monastère classique (Saint Maur)
Au XVI° siècle, la France est unifiée mais est menacée par l’empire de Charles Quint. Cette période est
troublée par les persécutions religieuses, notamment le massacre de la Saint Barthélémy.
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Le siècle suivant symbolisa le passage de la monarchie féodale à la monarchie absolue et donc du combat des
rois (Louis XIII et Louis XIV) et de leurs cardinaux (Richelieu et Mazarin) contre les princes et les protestants
pour asseoir leur autorité.
L’abbaye accueille en 1639 de nouveaux moines, de la congrégation de Saint Maur, chargés de restaurer la
règle de Saint Benoit. Ils prônaient le retour aux prémices de la règle et la fin des privilèges accordés aux
moines.
A la fin du XVIII° siècle, la France vit un climat révolutionnaire qui va donner une fin (provisoire) à la
monarchie.
La renaissance spirituelle des mauristes va s’associer à une reconstruction architecturale débutée en 1703, à
l’ouest de l’abbaye médiévale. Les anciens bâtiments étaient dans un tel état de vétusté que la partie occidentale
s’effondra en 1704. Le bâtiment est construit dans un style classique et moderne. Sa conception verticale à
niveaux superposés présente une harmonie d’ensemble associée à une simplicité décorative. Les mauristes ont
diffusé en province cette architecture palatiale qui allie monumentalité, beauté et fonctionnalité. Ce monastère
constitue un exemple majeur parmi les 200 monastères réformés par les religieux de Saint Maur et témoigne de
la volonté d’ancrer leur lieu de vie dans une architecture empreinte de modernité.
Ce monastère est aujourd’hui à l’état de ruines après avoir subi les conséquences de la Révolution : l’abbaye est
sécularisée en 1786 puis vendue comme bien national en 1791, le monastère Saint Maur est alors utilisé par sa
propriétaire comme carrières de pierres. En 1795, l’abbaye est parcellée et est vendue à plus de 20 propriétaires,
la destruction s’arrête à ce moment-là. La tour est achetée en 1797 par le peintre Jacques Réattu qui la sauve
d’une démolition certaine.
• L’abbaye du XIX° siècle au XXI° siècle
En 1822, le département des Bouches du Rhône rachète la chapelle Sainte Croix (construite au XII° siècle pour
accueillir les pèlerins laïcs en dehors de la clôture) pour la remettre à la ville qui commença à rassembler toutes
les parcelles composant l’abbaye. L’inspecteur des Monuments Historiques, Prosper Mérimée fit classer
l’abbatiale médiévale en 1840, le monastère mauriste fut classé en 1921. L’abbaye fut l’objet de plusieurs
campagnes de restauration mais elles n’empêchèrent pas le réfectoire de s’effondrer en 1941. Il fut reconstruit
par l’architecte en chef des Monuments Historiques Jean-Pierre Dufoix en 1994-1995 dans le cadre d’un vaste
programme mettant en scène création contemporaine et patrimoine. L’architecte Rudy Riciotti a également
réaménagé le cellier des moines (monastère Saint Maur) en 1999-2000, dans la perspective d’ouvrir l’intégralité
du monastère au public (après restauration et aménagement).
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