Anne-Marie Javouhey L

Transcription

Anne-Marie Javouhey L
Des figures fondatrices
Anne-Marie Javouhey
et les sœurs de Saint-Joseph
de Cluny
L
a congrégation des sœurs de Saint-Joseph de Cluny a été fondée en mai 1807 par AnneMarie Javouhey (1779-1850), une mystique surtout connue par ses actions.
Anne-Marie Javouhey naît le 10 novembre 1779 à Jallanges dans la Côte-d’Or où son père
loue une ferme. Elle est la cinquième enfant d’une famille qui en comptera dix et l’aînée des
filles. Elle grandit dans le contexte de la Révolution française et d’une Eglise persécutée et
en ruines… A l’adolescence, elle entend l’appel de Dieu à se consacrer à l’éducation des
petites filles et des orphelins. C’est durant cette période mouvementée que clandestinement,
elle se consacre à Dieu lors d’une messe.
Après de nombreux essais et échecs, elle comprend qu’elle est appelée à quelque chose
de neuf. Alors qu’elle ignorait qu’il existe des personnes d’autres couleurs de peau, un matin
elle se voit entourée d’enfants noirs, mulâtres et entend sainte Thérèse d’Avila lui dire « Voici
les enfants que Dieu te donne, je serai la protectrice de ton ordre ». Mais elle ne comprend
pas.
Le 12 mai 1807, elle prend l’habit en compagnie de trois de ses sœurs et de cinq
compagnes. La congrégation est fondée et prendra le 29 mai 1812 le nom des Sœurs de
Saint Joseph de Cluny, suite à l’acquisition par son père du couvent des Récollets à Cluny.
Alors que la congrégation est encore naissante, elle est touchée par la misère des
victimes des guerres et des épidémies. Elle ouvre des hôpitaux et des dispensaires.
Anne-Marie Javouhey apprend qu’un grand nombre d’enfants sont livrés à eux-mêmes à
Paris ; elle part y ouvrir des écoles. Les enseignants manquent, elle applique une nouvelle
méthode éducative venue d’Angleterre, l’enseignement mutuel, et ainsi se fait remarquer par
son audace et sa perspicacité. Les sphères ministérielles s’y intéressent. Le gouverneur de
l’île Bourbon (la Réunion) lui demande des sœurs pour l’éducation des enfants noirs et
mulâtres de l’île, comme la vision d’un matin le lui avait annoncée. C’est le déclic qui va
engager l’avenir…
Ainsi, alors que la congrégation ne compte que quinze sœurs, elle en envoie cinq audelà des océans. Six mois de voyage dans des conditions terribles parce que l’Evangile
presse et ne peut être refusé. A partir de 1817, la fondatrice envoie des sœurs dans les
missions : la Réunion, puis le Sénégal, la Guyane, les Antilles, Saint-Pierre-et-Miquelon,
l’Inde, la Polynésie.
A partir de 1819, Anne-Marie Javouhey va s’employer à former des missionnaires africains
pour évangéliser l’Afrique. C’est dans l’Oise puis dans l’Aude qu’elle va faire venir des
Sklerijenn n° 41
10
jeunes africains pour les instruire et les préparer à être enseignants ou prêtres selon la
vocation de chacun.
Le 1er février 1822, elle s’embarque pour le Sénégal. Elle va
y admirer la ferveur des musulmans dans l’assiduité à
pratiquer leur religion, mais elle va aussi y découvrir la
profonde misère, les maladies, l’esclavage …
En 1828, elle part en Guyane avec son frère et des
religieuses. Ils s’installent d’abord à Cayenne, puis à Mana.
C’est là qu’un projet de libération de plus de cinq cents
esclaves va se réaliser. Une population est remise debout,
apprend à connaître et à servir Dieu et vivra désormais dans
la dignité. Chacun, quand il est prêt, reçoit une terre, une
maison…qu’il apprend à cultiver, entretenir…ainsi, elle
prouve qu’ils sont « enfants du Père commun ».
Anne–Marie Javouhey rentrera définitivement en France en 1843. Elle aura encore à faire
face à la jalousie, la souffrance et l’humiliation, mais continuera à tenir bon et à fortifier sa
congrégation.
Elle meurt à Paris le 15 juillet 1881. Elle aura gouverné sa congrégation pendant 44 ans et
laissa plus de mille sœurs aux quatre coins du monde. Elle sera béatifiée par Pie XII en
1950.

Depuis 1817 et le premier départ, la congrégation a toujours été internationale, au-delà de
toutes frontières (pays, couleurs, âges, milieux sociaux…).
Aujourd’hui encore, 2 900 sœurs, originaires de plus de soixante pays (dont un tiers de
l’Inde) sont présentes dans environ quarante-cinq pays différents sur les cinq continents.
Anne-Marie Javouhey se veut disponible à tous appels. En route pour l’outre-mer, à
Alençon, elle découvre des malades mentaux laissés à l’état animal. Elle s’arrête. Les sœurs
resteront plus d’un siècle à leur service.
En 1819, quand elle découvre l’Afrique, elle est immédiatement séduite. Dans toutes
cultures, elle sait – sans angélisme – reconnaître ce qu’il y a de bon. Elle est très vite
persuadée que le développement de l’Afrique ne se fera que par la formation d’enseignants,
de maires, de prêtres africains…
Face à l’esclavage qui la révolte, elle agit avec pragmatisme. La liberté ne se décrète
pas, elle s’apprend.
Son éducation se veut toute maternelle et donc progressive et complète : formation
intellectuelle, professionnelle, artistique, morale, spirituelle…
Pour elle, faire la volonté de Dieu, c’est mettre l’homme debout, tout l’homme et tous les
hommes.

La congrégation aujourd’hui en Bretagne :
- Dans le Finistère, la congrégation est présente par un centre de soins à Briec-de-l’Odet et
deux établissements scolaires, l’ensemble scolaire Anne-Marie Javouhey à Brest et l’école
maternelle et primaire Sainte-Anne à Briec.
- Dans le Morbihan, les sœurs sont présentes à Gourin auprès d’une école maternelle et
primaire, Saint-Pierre, et d’un collège lycée, Sainte-Jeanne d’Arc, avec préparation aux
Sklerijenn n° 41
11
concours paramédicaux. A Cléguérec, elles animent un centre spirituel, Ti Mamm Doué.
On compte aussi deux communautés de Sœurs aînées à Plouray et à Cléguérec.
En France, comme dans le monde entier, les sœurs, en lien avec des laïcs, témoignent de
l’amour de Dieu par le biais d’engagements très variés au service de l’homme, notamment
dans le domaine de la santé, de l’éducation et de la promotion de la femme.

La pédagogie d’Anne-Marie Javouhey est inspirée par une conviction
développement intégral de l’homme dans une attitude de respect et de confiance.
forte :le
« L’éducation consiste à permettre à l’homme d’être davantage et pas seulement d’avoir
davantage ; que l’homme doit être plus, non seulement pour soi mais aussi avec les autres
et pour les autres. »
Elle promeut une certaine vision de l’homme : faire confiance aux possibilités de toute
personne, croire aux capacités de chacun, s’engager avec audace dans la formation et le
développement de tout être humain.
Elle s’engage : tout homme a droit au respect et à une formation humaine et spirituelle.
« Sa lumière ne s’est pas éteinte dans la nuit. Elle vit car ses filles de toutes races, de toutes
nations, poursuivent dans l’Eglise l’oeuvre que le Seigneur lui a confiée. »
Martine KERFOURN
Remerciements à Sœur Marie-Pierre Lallemant pour sa collaboration
Sklerijenn n° 41
12

Documents pareils

Histoire d`Anne-Marie Javouhey - Soeurs de Saint

Histoire d`Anne-Marie Javouhey - Soeurs de Saint Le pape Pie VII s’arrête à Chalon-sur-Saône après avoir sacré empereur Napoléon, en 1804. Anne et ses trois sœurs vont le rencontrer, il les encourage. D’autres jeunes filles se joignent à elles. A...

Plus en détail

Qui était Anne-Marie JAVOUHEY

Qui était Anne-Marie JAVOUHEY 1807 : 12 mai, fondation de la congrégation par la prise d'habit et la profession, à chalon, des quatre soeurs Javouhey (devenues soeur Anne Marie, Soeur Marie-Thérèse, Soeur Marie Joseph et Soeur ...

Plus en détail

Bienheureuse Anne-Marie Javouhey (1779-1851)

Bienheureuse Anne-Marie Javouhey (1779-1851) vocation. Pour eux elle ouvrit à Bailleul dans l'Oise, le premier séminaire africain de France. Trois des séminaristes seront ordonnés en 1840 : c'étaient les premiers prêtres sénégalais. En 1824, ...

Plus en détail