Prévalence des infections uro-génitales à Chlamydia

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Prévalence des infections uro-génitales à Chlamydia
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Prévalence des infections uro-génitales
à Chlamydia trachomatis en cabinet
de médecine générale
Prevalence of Chlamydia trachomatis uro-genital infections
in general practice offices
Stéphanie Faverjon, Michèle Amoudry
exercer 2012;101:61-2.
[email protected]
Thèse présentée
et soutenue
publiquement
le 28 juin 2011
à la faculté
de médecine
de Grenoble.
Contexte
Méthode
L’infection uro-génitale à Chlamydia trachomatis (CT)
est la première cause d’infections sexuellement transmissibles (IST) d’origine bactérienne dans les pays
industrialisés1. Chez les femmes infectées, elle peut
être à l’origine de douleurs chroniques (4 % des cas),
d’infertilité tubaire (3 %) ou de grossesse extra-utérine
(2 %)1. En 2003, l’Agence nationale d’accréditation
et d’évaluation en santé a recommandé un dépistage
opportuniste et ciblé de ces IST dans les centres de
soins à vocation de dépistage2. Elle incitait à réaliser
des études pilotes afin d’évaluer la pertinence et la
faisabilité du dépistage dans la population consultant
en ambulatoire.
• Principal : mesurer la prévalence des infections génitales basses à CT chez les femmes de 18 à 30 ans,
asymptomatiques, consultant en cabinet de médecine
générale.
• Secondaires : évaluer la faisabilité du dépistage par
autoprélèvement vaginal et son acceptabilité par les
patientes.
Étude d’opinion par questionnaire fermé évaluant la
faisabilité du dépistage avant puis après l’étude. Il
était demandé aux MG de dire si, selon eux, le mode
d’autoprélèvement par écouvillon était acceptable par
les patientes, si le dépistage était réalisable au cours
d’une consultation, et s’il était possible en médecine
générale. Trois réponses étaient proposées : « oui,
moyen, non ».
En fin de consultation, chaque MG devait systématiquement proposer le test de dépistage par auto-prélèvement vaginal à chaque femme appartenant à la
population cible. Si la femme acceptait, elle faisait le
test au cabinet médical à l’aide du kit « Abbott multiCollect Specimen Collection » et répondait anonymement à une question sur son accord pour refaire ce test
si nécessaire. Les analyses des tests ont été réalisées
par amplification génique par Polymerisation Chain
Reaction au sein d’un seul laboratoire. Le jour du 400e
test correspondait à la fin de la période d’inclusion.
Afin d’évaluer la faisabilité et l’acceptabilité, les MG
disposaient d’un tableau de bord permettant de relever
chaque cas de non-délivrance du test et chaque cas
de refus des femmes.
Population étudiée
Résultats
Deux populations ont été étudiées. Les 90 médecins
généralistes (MG) exerçant à moins de 35 km d’Albertville (Savoie) ont été invités à participer à l’étude.
Par ailleurs, les femmes consultant ces MG, si elles
étaient âgées de plus de 18 ans et de moins de
31 ans, et avaient eu au moins un rapport sexuel,
étaient invitées à participer à l’étude. Les femmes
atteintes d’une infection uro-génitale et celles ayant
reçu un traitement antibiotique dans le mois précédent
n’ont pas été inclues.
Quarante MG, soit 44 % de la population sollicitée,
ont accepté de participer à l’étude. 494 patientes ont
été inclues en 14 semaines. Dans 8 % des cas (n = 40),
le test n’a pas été proposé par le MG, majoritairement
par oubli (42 % des cas). Lorsque le test a été proposé,
il a été refusé dans 9 % des cas (n = 39). Les femmes
refusaient le test par peur de l’écouvillon (33 %), manque de temps (23 %) et d’intérêt (18 %).
Parmi les 415 tests acceptés, 13 n’ont pas pu être
analysés : 8 en raison d’une erreur d’utilisation ou de
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du mois.
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Objectifs
N° 101
Mots-clés
Chlamydia
trachomatis
Prévalence
Médecine
générale
Recherche
Thèse du mois
conditionnement, 4 tests ont été emmenés à domicile
et n’ont pas été rendus.
402 tests ont été analysés. 7 étaient positifs, soit une
prévalence du CT parmi la population testée de 1,7 %
(IC95 = 0,5-3,0).
Parmi les 402 femmes dont le test a été analysé, 399 se
sont déclarées prêtes à refaire le test si nécessaire.
Avant l’étude, 35 des 40 MG (87,5 %) ont déclaré que
les femmes accepteraient le mode de prélèvement. Tous
ont exprimé cette opinion après l’étude. Avant l’étude,
29 médecins pensaient que le dépistage était réalisable
durant leur consultation, 30 ont exprimé cette opinion
après l’étude. Enfin, 34 estimaient que ce dépistage
était généralisable en médecine générale avant l’étude,
et 35 avaient cette opinion après l’étude.
Parmi les femmes âgées de 18 à 30 ans sexuellement actives qui consultent en milieu ambulatoire dans la région d’Albertville, la prévalence
du Chlamydia trachomatis est de 1,7 %.
Commentaires
Le principal point fort de cette étude est d’avoir mis en
évidence l’excellente acceptabilité (91 %) du test par
autoprélèvement vaginal auprès des femmes ciblées.
Cependant, quelques faiblesses méthodologiques
limitent la portée du résultat principal de cette étude.
L’absence de randomisation des MG en diminue la
validité externe. Le faible nombre d’oublis de proposition du test est étonnant. Il suggère que plusieurs
« oublis » n’ont pas été signalés par les MG. Cela altère
la fiabilité du dénominateur de cette étude, d’autant
plus qu’il est probable que les oublis n’étaient pas
totalement aléatoires. Enfin, il est dommage que le lieu
de résidence des femmes n’ait pas été pris en compte :
les femmes résidant hors du périmètre géographique
de l’étude n’ont pas été inclues.
Il est plus difficile d’étudier la faisabilité du prélèvement
au cabinet en raison de la probable sous-déclaration
des oublis de proposition du test. Les opinions des MG
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Résultat principal
sur la faisabilité du test sont elles aussi incertaines étant
donné qu’ils avaient tous préalablement accepté de
participer à l’étude et donc de proposer le test.
En pratique, les infections à CT peuvent être recherchées facilement chez les femmes jeunes par la méthode d’autoprélèvement vaginal, cette technique étant
bien acceptée dans cette population. De même, les
décideurs en santé publique savent maintenant qu’un
dépistage ciblé du CT devrait être réalisé auprès de la
population des jeunes femmes sexuellement actives,
et que cette technique de prélèvement est envisageable.
Florent Verfaillie – UFR Amiens
Anthony Chapron – UFR Rennes
Références
1. Paavonen J, Eggert-Kruse W. Chlamydia trachomatis impact on
human reproduction. Hum Reprod Update 1999;5:433-47.
2. Anaes. Évaluation du dépistage des infections uro-génitales
basses à Chlamydia trachomatis en France. Février 2003. Disponible sur : http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_464119/
evaluation-du-depistage-des-infections-uro-genitales-bassesa-chlamydia-trachomatis-en-france (consulté le 14/02/12).
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