Vanneste - La Brique

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Vanneste - La Brique
Dossier municipales
Le feu tricolore passe au rouge ?
L
e Front National est en perte de vitesse à Lille,
comme partout en France, grâce au recyclage
par Sarkozy de ses principaux thèmes de campagne (nationalisme, immigration, sécurité).
Le roi de l'UMP a avalé comme ça un bon
quarteron des électeurs frontistes. Le Pen est vieux et va
bientôt passer l'arme à “droite”, et donc la main. Par ailleurs, le FN n'a plus de fric, il vient de revendre le « Paquebot » (siège du parti à St-Cloud, 92) et ne focalisera
ses dépenses que sur quatre candidats en France, dont
Marine à Hénin-Beaumont. Face à Gollnisch, légitime
héritier comme leader du parti, le Chef octogénaire a
donc été amené à redéployer sa politique sur une ligne
antagoniste à ce qu'elle a toujours été, afin de baliser un
« pré carré » pour sa succession. Ce pré national, c’est vers
la gauche qu’il l’oriente à présent, soit les questions sociales (chômage, pauvreté, insécurité « sociale »), éternel
cheval de Troie des fascismes.
Et là, il cartonne. Chez nos voisins du Pas-de-Calais, la
« moderniste » Marine Le Pen a drainé aux législatives de
2007 de 45 à 53 % des voix sur Hénin-Beaumont, avec le
concours du fidèle militant local Steeve Briois (il a fait le
lit électoral d'une Marine Le Pen parachutée là pour arrêter de parasiter la succession « légitimiste » de Gollnisch
au niveau national). Tout ça sur un discours populiste qui
voudrait donner l'image d'un Front « 1er parti ouvrier de
France », dans un bassin minier déserté par la gauche
(courants PS opposés, UMP-UDF divisés, communistes
exsangues...). Mais c'est à peu près leur seul succès. Le
camp « social » du Front, Marine – Briois – Soral1 etc., ce
camp se heurte à des attaques et des dissidences de pas
mal de leurs dirigeants locaux (Ph. Bernard, L. Pécharman, Chr. & M. Baeckeroot)*, dégoûtés d'un parti qui se
« dynastiserait » en préparation de l'après-Le Pen et se renierait en affichant ex- « cocos » et beurettes sexy. On voit
aujourd'hui que cette frange encore plus conservatrice et
réactionnaire (autoproclamée « droite nationaliste ») profiterait grandement à un courant, assez souterrain depuis
toute l'existence du FN : les solidaristes, ou nationaux-ré-
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En mai 1968, plusieurs élus et responsables aujourd'hui
sur le devant de la scène, ont débuté leur carrière plus
proches de la ba�e de base-ball que des cravates et des
mains serrées. C'est notamment le cas d'Alain Madelin,
Gérard Longuet, Patrick Devedjian, Charles Pasqua...
ou du chroniqueur radio Patrice Gélinet. Des groupes
comme les SAC (services d'ac�on civique), Occident ou
Ordre Nouveau furent coordonnés par Foccart (éminence grise de De Gaulle), pour former et armer ces ancêtres des groupuscules droi�stes actuels, afin
d'endiguer le communisme, coûte que coûte.
volutionnaires (Duprat, FANE, PNFE, etc), refaçonnés
sous le visage, plus « sage », d'identitaires [cf encadré
blanc], apparemment jamais à court de ces subtiles et
identiques dénominations adjectives...
Une ènième Nuit des Longs couteaux ?
Pendant ce temps là... A Lille, donc, le petit remue-ménage s'organise.
En décembre, les Jeunesses Identitaires de Nice (leur fief)
se sont -enfin- pris une condamnation pour « reconstitution de ligue dissoute », puisque c'est simplement le nouveau nom d'Unité Radicale (extrême-droite méchante),
dissoute depuis l'attentat sur Chirac, un 14 juillet par un
de leurs avortons. Habituellement plus ou moins en sommeil sur la Métropole, ce groupe fédère petit à petit les
diverses franges de l'extrême-droite ou de la droite extrême pour absorber ce qui transpirera de l'aile droite des
partis de Le Pen, Mégret, Villiers, Dupont-Aignan... et
une fois de plus, tenter de faire feu de tout bois. Le 20 janvier a scellé l’une de ces nouvelles unions sacrées, qu'on
annonçait dès l'analyse de la présence étrangement
païenne au dernier rassemblement anti-IVG des cathos
trads’ de Pro Vita (cf. La Brique N° 5, p.2). Les « bleusbruns-rouges » d'un côté dans le 62 ouvrier, et un courant
« bleu-brun-noir », en amont, sur la Métropole et le Dunkerquois. Reste que depuis que la commission d'enquête
parlementaire sur le DPS (service d'ordre du FN) a abouti
indirectement à la création d'un MNR sans Le Pen, l'extrême-droite française, malgré la « surprise » du 21 avril
2002, semble aussi bien fragilisée par l'extrémité des gouvernements UMP “décomplexés” que par sa fragmentation et sa crise « identitaire ». Mais pas encore assez :
malgré les « puretés » politiques brandies, nos joyeux recomposés constitueront sans doute, à l'instar de leurs
aînés [cf. encadré gris], autant de « think »-tanks prêts à
noyauter les gouvernements et institutions à venir, en attendant leur heure. Le ministère-laboratoire d'Hortefeux
sert déjà d'argument à ces furies pour nuire à des assos
comme le large RESF, Ras l'Front, etc. On va déjà bien rigoler devant le « cosmopolitisme » de ces « nouvelles fronBien des éléments dis�nguent aujourd'hui ces groupes
de feu Unité Radicale, de feu le GUD (syndicat -violentd'extrême-droite universitaire), mais une possibilité
d'instrumentalisa�on et de recyclage par un Etat de
plus en plus « policier » laisse imaginer sans trop de
peine les nervis « iden�taires » d'aujourd'hui aux
postes à pourvoir demain. C'est déjà en par�e le cas
via les porosités entretenues entre le DPS (service d'ordre du FN) et consorts, et la « diploma�e » française
au Congo, aux Comores... où l'on a pu retrouver ces
sbires de Bob Denard former les polices des dictateurs
entretenus par l'Etat cocorico, et se recycler auprès du
Front, ou vice versa.
tières » et autres « ordres nouveaux »... sur les listes des
candidats à venir.
Au Nord, y avait les corons...
Face à ces petits rats en chemise noire, qui voient un
grand Groupe d'Union Divers-extrême-droite profiler
leurs fantasmes, le FN métropolitain est donc plutôt moribond : depuis l'éviction de Philippe Bernard* en décembre, perquisitionné et entendu par les flics pour ses
derniers frais de campagne, le parti installe à la candidature son petit champion du parachutage-in extremis : Eric
Dillies*. C'est dire si le Front a la foi...
1 : Ce « sociologue ex-communiste » gesticulant et, préférant
peut être rêgner en enfer que servir au paradis, a joué le « poisson pilote » du FN en vue d'une « réconciliation nationale » avec
les déçus de la gauche. Son grand truc : « S'il vivait aujourd'hui,
Marx voterait Le Pen, seul à proposer une alternative au capitalisme »... Marx serait content d'entendre ça...
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S.L.
* : élus FN ou ex FN de Lille - alentours :
-Eric Dillies : Madelinois, élu municipal parachuté à SeclinNord (15% aux cantonnales 2004). Bombardé cette fois sur Lille
depuis le 15/01 en remplacement de Ph. Bernard.
-Philippe Bernard : élu au conseil municipal de Lille (11%), pour
l'instant évincé de la Liste FN.
-Luc Pécharman : élu municipal de Lomme, a quitté l'étiquette
FN par solidarité à Bernard. Vient de fonder sans surprise, et
tout en finesse, un groupe Lomme-Identité.
-Christian et Myriam Baeckeroot : depuis longtemps proches de
la « droite nationaliste », ils ont quitté la mandature FN de Tourcoing en novembre, dégoûtés de voir Le Pen « brouiller les
pistes » (virer soralo-social, affiches beurette...). Vont pourtant
voter UMP si Vanneste passe le 1er tour (et il le passera NDLR,
d'ailleurs il a les mêmes buts en matière de sécurité, etc).
-Frédéric Butez : élu municipal de Marcq-en-Baroeul,
soutient Bernard sans avoir quitté le Front.
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Les Iden�taires (le Bloc, ou les Jeunesses du même nom)
sont aujourd'hui légalisés. Leur condamna�on est, comme
l'a rappelé leur président niçois Philippe Vardon, en
« demi-teinte ». Ils ont bien été condamnés pour avoir mal
traves� la con�nuité d'un groupe dissous sous la loi de
1936 condamnant les ligues (Unité Radicale), mais ont
néanmoins été autorisés à poursuivre leurs ac�vités, pour,
selon le juge, « savoir ainsi qui ils sont ». Ce groupuscule
dont la raison sociale était longtemps, à Lille comme ailleurs, de sédimenter dans le folklore White Power à coups
d'autocollants jaunes, sort aujourd'hui doucement de sa
puberté poli�que, en s'alliant avec les transfuges FN, notamment. Pécharman*, par exemple, n'a pas a�endu pour
former sa liste « Lomme-Iden�té », de même Philippe Eymery et son « Défi dunkerkois ». Si l'homme est un loup
pour l'homme (Lomme ?), apparemment les rats noirs le
sont aussi.
VANNESTE : FALLAIT PAS L’INVENTER
Christian Vanneste est un homme du Nord. Si on ne peut lui reprocher d'avoir été parachuté dans la région, on peut
regretter qu'il n'en soit jamais parti. En place depuis 1983 et sa fonction d'adjoint au maire de Tourcoing, député
du Nord, il est affilié au Centre National des indépendants... mais n' a rien d’un centriste.
J
uin 2004, il propose un amendement en vue de
faire introduire dans les manuels scolaires une reconnaissance du " rôle positif de la présence française Outre-Mer ". Cet amendement sera retiré de la loi
en 2005 aprés le tollé médiatique suscité par cette officialisation de faits historiques. Il est aussi un des fervents partisans du fichage de l'ADN des étranger-e-s. Mais la
Métropole a elle aussi droit à l'attention de Vanneste. Sa
"demande de généralisation de la vidéo-surveillance pour
sécuriser la ville"1, en est un bon exemple. Jetez un oeil à
ses objectifs pour la ville; avec en 1 “Tourcoing ville propre”et en 2 “Tourcoing ville sécurisée”; le ton est donné.
Amusant pour quelqu'un qui ne respecte pas les lois luimême.
Quand la répression est faite par un délinquant
Rappelons à cet effet la double condamnation pour des
propos homophobes : « Pour moi leur comportement est
un comportement sectaire », ou encore « l’homosexualité
est une menace pour la survie de l’humanité […] »2. Sa
condamnation3, première en France pour un élu, lui a valu
une notoriété aussi soudaine que détestable.
Les qualités d' un homme de droite
Voila donc un homme très à droite et qui assume : « La
droite doit être le parti de la France et de la liberté. Plus
que jamais, nous devons assumer fièrement nos convictions et nos valeurs »4. Il est partie intégrante de la droite
décomplexée de Sarkozy, qui a préferé mentir que de devoir changer de poulain quelques semaines avant la course
" Il ne sera pas réinvesti aux législatives. Je condamne fermement ce qu’il a dit. Je ne veux ni de près ni de loin être
associé à des propos homophobes."5 Officiellement Vanneste n' a pas été investi pour les législatives, il était donc
candidat sous l'étiquette CNI. Mais l'UMP n'ayant volontairement pas mis de candidat en face, Vanneste fut réelu.
En mars, il est tête de liste UMP aux municipales à Tourcoing. Parce qu’il est le meilleur candidat possible pour
l’UMP à Tourcoing, et que le but d’un parti est de remporter les élections, pas de complaire à des minorités revendicatives. Thierry Lazaro, secrétaire de l’UMP-Nord,
justifie ce choix et en profite au passage pour remettre en
cause une décision de justice. « De facto, nous soutenons
Christian Vanneste, car il a le soutien des militants locaux
de l’UMP [...]l’équité n’a pas toujours été respectée lors de
son procès. »6 Rien à ajouter..
Tourcoing est une ville stratégique pour la future présidence de la CUDL. On comprend mieux pourquoi l'UMP
est derrière Vanneste : mieux vaut risquer de perdre les
voix de quelques homos de droite, que de perdre Tourcoing et laisser une fois de plus la gestion des affaires communautaires au PS.
A.S
1 : Blog de Christian Vanneste.
2 : Pour plus de détails voir www.ldh-toulon.net
3 : Condamnations en 1ère instance par le tribunal correctionnel
de Lille le 24 Janvier 2006 et par la cour d' appel le 25 Janvier
2007.
4 : Interviewé par Le Monde
5 : Le candidat Sarkozy dans Le Figaro, 31 Janvier 2007.
6 : Le Monde, 10 janvier 2007.
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