Où placer son argent en 2015

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Où placer son argent en 2015
lundi 5 janvier 2015 LE FIGARO
24
L'ÉVÉNEMENT
Les Français doivent revoir leurs placements
Avec des taux d’intérêt proches de zéro, gérer un patrimoine est devenu une aventure en terrain inconnu.
ANNE BODESCOT
[email protected]
Les taux d’intérêt n’ont jamais été
aussi faibles, comme l’inflation,
tombée à 0,3 % sur un an en France… Les épargnants sont confrontés à un environnement qu’ils
n’ont jamais connu. « C’est un
nouveau monde, celui des taux
d’intérêt zéro : pas de rémunération
sur le monétaire, à peine plus pour
les obligations, et un immobilier
qui, au mieux, stagne », constate
Guillaume Dard, PDG de Montpensier Finance. Le livret A en a
déjà fait les frais. Tombé à 1 % seulement en août dernier, il pourrait
plonger plus bas encore au 1er février prochain si le gouvernement
n’intervient pas. Les livrets fiscalisés, massacrés fiscalement, sont
aussi en perte de vitesse.
Même l’assurance-vie ne sortira
pas indemne de cette nouvelle
donne. En 2013, elle avait rapporté
en moyenne 2,80 % selon la FFSA.
Les meilleurs contrats s’affichaient encore à plus de 3 %. Mais
cette année, les assureurs ne sont
pas pressés de dévoiler les rémunérations servies à leurs clients
pour 2014, car ils n’ont pas de
bonnes nouvelles à annoncer. L’effondrement des taux sur
les marchés financiers hypothèque les performances des
Depuis trois ans, les prix des logements anciens baissent en pente
douce. En 2014, ils ont encore reculé de 2 % à 3 % en moyenne selon les professionnels, après un fléchissement de près de 2 % en 2013.
Cette moyenne cache d’importantes disparités, avec d’un côté les
grandes villes, où les prix résistent
plus ou moins et de l’autre les campagnes, où ils ont chuté de 10 % à
15 % en moyenne l’an dernier.
Cela devrait se poursuivre cette
année. « Si les taux d’intérêt restent
aussi bas, les prix reculeront de 3 %
au maximum », estime Laurent Vimont, président de Century 21. Et
la Fnaim s’attend à voir les prix
flancher d’environ 2 % cette année.
Dans ce contexte, l’investissement dans la pierre très prisé par
les Français pour se procurer notamment des revenus complémentaires à la retraite est-il opportun ? « Investir dans de l’immobilier
locatif est une bonne façon de diversifier son patrimoine. D’autant que
les taux des crédits immobiliers
n’ont jamais été aussi bas », répond
Gilles Étienne chez Cyrus Conseil.
À condition de prendre de nombreuses précautions. « Il est important de bien choisir la ville dans laquelle on investit, car dans certaines
les offres de logements à louer sont
très abondantes », avertit JeanFrançois Buet, président de la
Fnaim. La qualité du bien est fondamentale et il doit être situé dans
un quartier recherché par les locataires. « L’investisseur ne doit pas
se demander s’il habiterait dans le
logement, mais s’assurer que celuici correspond aux besoins des loca-
Évolution des prix
PRIX DES APPARTEMENTS, fin 2014
en €/m2 évolution
VILLE
2014/2013
Bordeaux
3 571
+4,5 %
Strasbourg
2 593
+2,5 %
Nice
3 912
+1,5 %
1 907
+0,5 %
Nantes
3 071
+0,1 %
Lyon
3 303
-1,7 %
Tours
2 522
-2,1 %
Marseille
2 666
-2,9 %
Dijon
2 214
-3,6 %
Paris
8 399
-3,6 %
A
Clermont-F.
Source : Fnaim
Infographie
0,77 %
Rendement
de l’emprunt d’État
français à dix ans
1%
taires de la ville », ajoute JeanFrançois Buet. Il faut faire une
étude du marché des loyers locaux
et veiller à ne pas acheter trop
cher. D’autant que les chances de
réaliser une forte plus-value à la
revente se sont amenuisées et qu’à
Paris les loyers seront encadrés
cette année. « L’investisseur doit
avoir un an de loyer sous forme
d’épargne pour pouvoir faire face à
une défaillance du locataire. Les incidents de paiement ont augmenté », ajoute Laurent Vimont.
Les rentabilités locatives sont
disparates. Les villes les plus dynamiques où les prix de la pierre sont
les plus élevés sont les moins
rentables. On peut ainsi obtenir 4,11 % brut à Paris
(avant impôt sur le revenu, CSG et impôts locaux), 3,4 % à Cannes et
4,78 % à Lyon selon la
Fnaim. Mais les investisseurs peuvent encore
prétendre à une rentabilité de 8,81 % à Nevers,
7,43 % à Troyes et 7,39 %
à Limoges par exemple.
À condition de parvenir
à louer leur bien, ce qui
n’est pas toujours facile
dans les villes les plus
touchées par la crise.
Certains investisseurs
miseront sur l’ancien,
d’autres préféreront investir
“
Il est important
de bien choisir la ville
dans laquelle
on investit
”
JEAN-FRANÇOIS BUET, PRÉSIDENT
DE LA FNAIM
dans le neuf via le nouveau dispositif Pinel, version améliorée de
l’ex-Duflot. Dans ce cadre désormais, les particuliers peuvent opter
pour trois durées d’investissement, de six, neuf ou douze ans. La
réduction d’impôts est alors de 12,
18 ou 21 %. Et l’investisseur peut,
après une première période d’engagement, continuer à louer son
bien pendant trois années de plus.
Il pourra aussi louer l’appartement
à un de ses enfants (non rattaché au
foyer fiscal) ou à ses parents, sans
perdre l’avantage fiscal. Ces nouvelles souplesses semblent séduire
les particuliers. « À l’automne, les
Français ont montré leur intérêt
pour ce dispositif, mais ils ont préféré attendre qu’il soit voté avant d’investir », explique François Payelle,
président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). « Nous
pensons vendre au moins 40 000 logements via ce dispositif en 2015,
contre 30 000 avec le Duflot en
2014 », ajoute-t-il. ■
publié leurs taux ont suivi la
consigne. La Macif a annoncé une
baisse de 0,40 % de ses rendements. Chez AG2R La Mondiale, la
chute est de 0,30 % à 0,40 %. À ce
rythme, l’assurance-vie ne devrait pas offrir plus de 2,5 % en
moyenne en 2014. Certains experts ont même avancé des chiffres plus faibles, entre 2,2 % et
2,4 %. Un rendement dont il faut
de surcroît ôter 15,5 % de prélèvements sociaux (CSG, CRDS…), et
parfois un impôt en cas de retrait
(l’assurance-vie n’y échappe
qu’après huit ans, dans certaines
limites).
Certains contrats vont donc
rapporter cette année autant que…
le plan épargne logement. Un placement que les Français redécouvrent depuis quelques mois, car il
sert 2,5 %, exonérés d’impôt, et
seulement soumis aux prélèvements sociaux. Surtout, sa rémunération ne risque pas de
s’émousser à l’avenir. Elle est garantie pour quinze ans (sur un
plan ouvert aujourd’hui).
?
Taux du livret A et du
livret développement
durable depuis
le 1er août 2014
Investir dans l’immobilier
ne s’improvise plus
DANIÈLE GUINOT £@danieleguino
années futures. Le gendarme de
l’assurance, l’ACPR, leur a donc
demandé de ne pas se montrer généreux et de mettre en réserve
une partie de leurs gains financiers, en prévision des années de
vaches maigres qui s’annoncent. Les premières
compagnies à avoir
Où placer
son argent
en 2015
L’assurance-vie et le livret A
rapportent peu. Mais opter
pour la Bourse ou
l’immobilier locatif n’est
pas sans risque.
Cap sur les fonds
diversifiés
Pour certains professionnels, se
contenter d’un placement qui
rapporte à peine plus de 2 % n’est
pas pénalisant : avec une inflation
quasi nulle, le capital reste bien
préservé. Mais le chiffre reste décevant pour les Français qui investissent à long terme, pour leur
retraite par exemple. Or, pour espérer gagner davantage, ils n’ont
pas le choix : ils doivent prendre
plus de risques et investir sans garantie en capital au moins une
partie de leurs avoirs.
« Les actions sont le seul vecteur
d’investissement
à
potentiel
aujourd’hui. Il y aura encore de la
volatilité, mais les Bourses européennes vont être soutenues par la
baisse de l’euro et celle du pétrole », martèle Guillaume Dard. De
nombreux gérants promettent
ainsi un retour en grâce des actions européennes, en perte de vitesse ces derniers mois. Une occasion de redécouvrir les charmes
du plan d’épargne en actions
(PEA), oasis fiscale qui leur est réservée. Mais d’autres se méfient
de la nervosité des marchés. Ils se
souviennent aussi que, l’an dernier, ce sont les actions américaines (qui profitent de la hausse du
dollar) qui ont sauvé les performances et que les fonds obligataires ont, contre toute attente, fait
des prouesses. « Conserver des
portefeuilles bien diversifiés est
donc important, qu’il s’agisse de
répartition géographique ou par
classe d’actifs », souligne Bernard
Aybran, directeur général délégué
d’Invesco AM. Dans l’assurancevie, les fonds qui proposent ces
stratégies clés en main devraient
continuer à séduire. Comme les
SCPI. Depuis qu’elles sont proposées dans les contrats d’assurance-vie et échappent ainsi à la lourde fiscalité de l’immobilier, ces
sociétés investies en bureaux et
qui versent, en loyers, plus de 4 %
par an, ont un succès croissant.
Même si leur valeur n’est pas garantie. ■
L’or pourrait souffrir d’une
nouvelle hausse du dollar
2,2 à
2,5 %
Or
COURS DE L’ONCE D’OR,
en dollars
1 383
1 350
1 300
1 250
1 188
1 200
1 150
1 140
1 100
1er janv. 2014
2 janv. 2015
Source : Bloomberg
Infographie
Rendement moyen
attendu des contrats
d’assurance-vie
en 2014
2,50 %
Taux du plan épargne
logement (PEL), garanti
pour toute la durée
du placement
Depuis deux ans, l’or pâlit. Pour
la première fois depuis 1998, le
métal précieux a enchaîné deux
années de baisse. L’or, qui avait
chuté de 28 % en 2013, a encore
cédé 1,5 % en 2014. L’once a terminé l’année à 1 184 dollars malgré un rebond de près de 6 % en
décembre. « En fin d’année, la
demande pour l’or physique a
augmenté en Chine et en Inde,
principaux consommateurs d’or
au monde, ce qui a soutenu les
cours », explique Emmanuel
Painchault, gérant de fonds chez
Edmond de Rothschild Asset Management.
En revanche, les investisseurs
qui avaient massivement cédé
leurs fonds investis dans de l’or
physique (au travers d’ETF) en
2013 ont continué, dans une
moindre mesure, à se délester de
cet actif. D’autant que l’or a perdu de son attrait depuis que les
prix à la consommation baissent,
notamment sous l’effet de la chute des cours du pétrole. Le métal
précieux est une valeur refuge
contre l’inflation, il n’est pas une
« arme » antidéflation...
De plus, l’envolée du dollar est
traditionnellement peu favorable
au métal précieux. Celle-ci devrait se poursuivre et 2015 ne
s’annonce donc pas sous les
meilleurs auspices pour le métal
précieux. D’autant que la hausse
des taux d’intérêt américains
prévue l’année prochaine devrait
inciter les investisseurs à privilégier des actifs plus rémunérateurs que l’or et servant des revenus.
« 2014 a été une année de transition et 2015 devrait être une année de consolidation », estime
Emmanuel Painchault. Pour
Goldman Sachs, le cours de
l’once
pourrait
tomber
à
1 050 dollars dans un an, la Société générale table même sur des
cours de 950 dollars au quatrième
trimestre 2015. Très loin des
1 923,70 l’once touchés en septembre 2011.
Diversification
de portefeuille
Pour certains experts, les tensions géopolitiques pourraient
toutefois mettre l’or en avant de
la scène cette année.
Les épargnants ont-ils encore
intérêt à détenir de l’or dans
leurs portefeuilles ? « Le métal
précieux peut être une source de
diversification. Mais il ne doit pas
représenter plus de 2 % à 5 % de
son portefeuille », avance Pierre
Sabatier, stratège chez PrimeView. Ce dernier préconise d’investir de préférence dans des
pièces d’or. ■
D. G.

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