burkina faso : afghanistan 2001/2002

Transcription

burkina faso : afghanistan 2001/2002
U
Avant octobre :
Soutenir les populations
vulnérables en liant réponse à
l’urgence et réhabilitation
ACTED est née en Afghanistan en 1993
et n’a jamais quitté ce pays. D’abord
centrée sur le soutien des populations
du Sud et des kaboulis, l’association a
ensuite développé ses activités au NordEst de la capitale, dans une vaste zone
touchée par les conflits et rapidement
divisée par une ligne de front cristallisant
l’opposition entre les forces taliban et
celles de l’Alliance du Nord. ACTED a
travaillé dans les deux zones, depuis ses
bureaux respectivement pakistanais et
tadjik.
Dans le Nord-Est de l’Afghanistan, les
trois dernières années ont été particulièrement difficiles pour des populations
déjà très vulnérables (tremblements de
terre de 1998; combats dans le Shamali
en 1999 entraînant d’importants déplacements de population vers le Panjsheer
et Kaboul; combats en 2000 à Khwaja
Ghar et Taloqan générant des mouvements de populations vers le Badakhshan; et sécheresse particulièrement
sévère pour les paysans en zone de
culture pluviale). En 2001, ACTED a
également étendu ses activités au NordOuest du pays pour venir en aide des
populations de la province de Faryab,
très touchée par les effets de la sécheresse.
L’une des forces d’ACTED est de préparer ses équipes à opérer rapidement,
même dans des zones très difficiles,
notamment près des lignes de front où
se concentrent les déplacés lors des
conflits. D’autre part, ACTED prépare
ses activités d’urgence dans le cadre
d’une perspective de moyen terme et
met en œuvre des projets qui répondent à trois objectifs: répondre aux
besoins immédiats, démarrer les projets
de réhabilitation et préparer le développement.
Les principaux bénéficiaires visés par les
programmes d’ACTED en Afghanistan
sont constitués de groupes vulnérables
(personnes âgées, enfants, veuves), de
victimes des catastrophes naturelles, et
de victimes des conflits internes (déplacés, populations locales). En 2001,
ACTED soutenait environ 10 000
familles de déplacés dans les provinces
de Takhar et du Badakhshan, 4 000
familles de déplacés dans le Panjsheer,
7 000 familles de déplacés dans la
province de Baghlan, 40 000 familles
souffrant de la sécheresse dans la
province de Faryab et 10 000 familles
souffrant de la sécheresse et manquant
des ressources nécessaires pour en fuir
les effets dans le district de Shar-iBuzurg. Sachant qu’une famille afghane
compte en moyenne 6 personnes,
ACTED soutenait jusqu’en octobre
environ 426 000 personnes.
contrôlée par Massoud, n’était plus
accessible depuis Kaboul. L’aide ne
pouvant plus être acheminée depuis le
Pakistan, il fallait y accéder depuis le
Tadjikistan.
A ces contraintes politiques s’ajoutaient
un environnement géographique particulièrement hostile et la menace de l’hiver. Il n’y avait que peu de chemins pour
accéder aux populations en danger, et
l’arrivée des premières neiges promettait de les rendre impraticables. ACTED
a fait vite, s’appuyant sur son expérience des situations d’urgence et sa
connaissance du pays.
La stratégie et le dispositif
d’ACTED
En octobre, la priorité était d’agir
auprès des populations vulnérables et
plus que jamais isolées, avant l’arrivée
de l’hiver, et sans attendre une résolution politique du conflit. Les expatriés
d’ACTED se sont rapidement retrouvés
à Douchanbé, capitale du Tadjikistan,
constituant une équipe de crise.
Très vite après l’assassinat de Massoud
et l’attentat du World Trade Centre, les
Talibans ont ordonné aux expatriés de
quitter le pays. Répondre aux besoins
des populations vulnérables devenait un
véritable défi politique et logistique.
ACTED a alors lancé un appel à la
communauté des bailleurs de fonds
institutionnels et à la générosité des
donateurs privés prenant en compte
tous les besoins des populations vulnérables. La stratégie mise en place visait à
agir immédiatement à l’intérieur du
pays, partout ou cela était possible, et à
préparer, dans les pays frontaliers, l’intervention dans les autres zones.
Le Nord Est du pays, zone très durement touchée par la sécheresse et les
conflits, située pour partie en zone
Ainsi, avant même la chute de la ligne de
front et l’effondrement de l’autorité taliban, ACTED a pu acheminer et pré-
Octobre : Intensifier la réponse
à l’urgence
DOSSIER
SITUATIONS DE CRISES
AFGHANISTAN 2001/2002
BURKINA FASO :
AVENTURE N°96 - AUTOMNE 2002 - LA GUILDE EUROPEENNE DU RAID
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D
OSSIERDE CRISES
SITUATIONS
positionner une aide d’urgence répondant aux besoins de plus de 800 000
personnes vulnérables (soit 16% de la
population vulnérable totale).
Si ACTED a été l’une des quelques
ONG à pouvoir continuer à travailler
pendant cette période, c’est grâce au
réseau logistique et humain tissé par
l’association depuis quelques années
dans la région. Cette implantation régionale d’ACTED qui s’est appuyée depuis
bientôt 10 ans sur ses bureaux pakistanais mais aussi tadjiks pour venir en aide
au peuple afghan lui a permis d’agir,
même au plus fort du conflit.
Dans le Nord-Est afghan, les ressources
humaines en personnel expatrié et les
moyens logistiques ont été renforcés.
ACTED a transféré le personnel expatrié de ses bases du Nord vers celles du
Nord-Est et a recruté du personnel
expatrié et local. Au Tadjikistan, une
équipe de gestion de crise mise en place
dans la capitale a permis de superviser la
mise en œuvre de l’opération, qui a utilisé pleinement le support logistique des
programmes d’ACTED au Tadjikistan. À
Islamabad, ACTED a utilisé son bureau
de liaison pour coordonner ses activités
avec les bailleurs de fond, la communauté humanitaire et les ONG.
Le pipeline entre le Tadjikistan et l’Afghanistan a fonctionné sans interruption
depuis 1998. Il a permis à ACTED d'apporter sans risques et à un coût raisonnable des dizaines de milliers de tonnes
d'aide humanitaire lors des crises précédentes (le tremblement de terre de
1998, la crise des populations déplacées
en 1999 au Panjsheer et à Shamali).
ACTED a renforcé ce pipeline. En
outre, l’antenne de Douchanbé et les
bases tadjikes situées le long de la frontière afghane (Pyanj, Farkhor) ont été
développées afin d’offrir un support
logistique plus efficace pendant la crise.
Après octobre : Mettre en place
les bases de la reconstruction
ACTED oriente ses programmes de
reconstruction autour d’un certain
nombre de secteurs et de principes,
utilisant au mieux ses forces.
Les principaux bénéficiaires visés par les
programmes d’ACTED en Afghanistan
sont constitués de groupes vulnérables
(personnes âgées, enfants, veuves), de
victimes des catastrophes naturelles, et
de victimes des conflits internes (déplacés, populations locales). En 2002,
ACTED soutient environ 15 000 familles
dans les provinces de Takhar et du
Badakhshan, 30 000 familles dans la plaine du Shamali, 10 000 familles dans la
province de Baghlan, 20 000 familles
dans la province de Faryab et 15 000
familles à Kaboul. ACTED soutient
actuellement environ 540 000
personnes.
Une réponse intégrée prenant
en compte des domaines divers
À ce jour, les principaux secteurs d’activités d’ACTED en Afghanistan sont la
sécurité alimentaire et l’aide alimentaire,
la réhabilitation d’infrastructures, la
réhabilitation de l’habitat, la distribution
de biens de première nécessité non
alimentaires, la réhabilitation rurale, l’assainissement, la mise en place d’un outil
d’aide à la décision via un SIG (Système
d’Information Géographique) et la
protection du patrimoine archéologique.
L’aide alimentaire et d’urgence continue.
ACTED a déjà distribué plus de 3000
tonnes de blé.
La priorité est donnée à la relance d’une
production agricole mise à mal par trois
années de sécheresse (1999/2001), des
mouvements de populations incessants
et une pauvreté qui a entraîné une décapitalisation chaque année plus dramatique. Il faut donner aujourd’hui à la
population afghane les moyens d’assurer
demain sa sécurité alimentaire, et ce
malgré des conditions géographiques et
climatiques difficiles, voire extrêmes.
ACTED a déjà distribué plus de 900
tonnes de semences de blé et de fertilisants en 2002.
L’habitat est aussi un domaine clef et
ACTED concentre ses programmes,
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AVENTURE N°96 - AUTOMNE 2002 - LA GUILDE EUROPEENNE DU RAID
notamment dans le cadre du soutien au
retour des déplacés internes et plus
récemment des réfugiés, sur la reconstruction en 2002 de plus de 12 500
maisons détruites.
L’eau est également un secteur dans
lequel il est vital de s’investir pour assurer aux Afghans un accès à l’eau potable,
limitant ainsi le risque de catastrophes
sanitaires, mais aussi pour reconstruire
les systèmes d’irrigation (175 puits, 80
réservoirs, 7000 latrines).
La réhabilitation et la reconstruction des
infrastructures est une autre nécessité.
ACTED a déjà réhabilité des kilomètres
de routes, et a notamment œuvré à la
réouverture en décembre du Tunnel de
Salang, lien économique et symbolique
entre le Nord et le Sud du pays. ACTED
redonne vie aux innombrables bâtiments publics endommagés ou détruits :
les lycées, les hôpitaux à Kaboul mais
aussi en province dans la plaine du
Shamali, Takhar, Baghlan, Faryab.
Partout et dès que cela est possible, le
rôle de la communauté internationale
est d’aider les Afghans à retrouver une
activité économique leur assurant un
revenu. La relance économique passe
en partie par cette recomposition des
circuits commerciaux. Dans ce cadre, il
est important de soutenir la création de
micro-projets, sur une base de crédit.
De plus, il s’agit de privilégier systématiquement l’utilisation des ressources et
produits locaux.
Parce que sauver des vies ne suffit pas
pour reconstruire un pays, ACTED a
étendu son action à la culture. Dans un
pays en transition, ACTED a choisi de
promouvoir les activités culturelles pour
leur contribution essentielle dans le
maintien/le rétablissement de la paix et
de la stabilité de la région. ACTED participe à la sauvegarde et la mise en valeur
du patrimoine.
Des principes clefs
Il ne faut pas oublier le travail qui est à
réaliser autour de la réinsertion des
groupes hautement vulnérables dans les
communautés. Une attention toute
DOSSIER
SITUATIONS DE CRISES
particulière est portée aux femmes,
pour lesquelles il faut mettre en œuvre
des programmes, adaptés aux contextes
locaux (les données ne sont pas les
mêmes dans les villes, dans les zones
rurales, dans le Nord, dans le Sud.
Le pilier de la reconstruction est bien
sûr la population locale qui doit être
associée à la conception et à la mise en
œuvre des projets. Systématiquement,
la mise en œuvre d’un projet doit créer
un échange entre les Afghans et les
intervenants extérieurs et doit stimuler
la création à terme de structures locales
afin que les Afghans s’approprient les
outils de leur développement. ACTED
s’appuie aujourd’hui sur des équipes
afghanes nombreuses et extrêmement
compétentes qui travaillent souvent
avec l’association depuis des années;
jamais leur aide ne sera si précieuse et
essentielle qu’en ces temps de reconstruction.
À un niveau plus politique, ACTED s’appuie sur des mécanismes de coordination et de coopération qui créent un
dialogue permanent entre l’association
et les autorités afghanes.
ACTED s’appuie sur les points forts
suivants: sa longue présence parmi les
communautés, des deux côtés de l’ancienne ligne de front, ses cadres dirigeants locaux, et son réseau logistique
très dense, atout indispensable pour
réussir la mise en œuvre de projets et
relever le défi logistique présenté par
l’Afghanistan. ■
ACTED
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