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UNIVERSITE D’ANGERS
FACULTE DE MEDECINE
Année 2015
THESE
pour le
DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE
Qualification en : DERMATOLOGIE-VENEREOLOGIE
Par
Joana MARTINS épouse HERICHER
Née le 29/08/1988 à Eaubonne
Présentée et soutenue publiquement le : 29 mai 2015
ÉVALUATIONS MÉDICALE ET ÉCONOMIQUE PRÉALABLES
A LA PRISE EN CHARGE DES PLAIES PAR TÉLÉMÉDECINE
AU CHU D’ANGERS
Président : Monsieur le Professeur DARSONVAL Vincent
Directeur : Monsieur le Professeur MARTIN Ludovic
1
LISTE DES ENSEIGNANTS DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE D’ANGERS
Doyen
Vice doyen recherche
Vice doyen pédagogie
Pr. RICHARD
Pr. PROCACCIO
Pr. COUTANT
Doyens Honoraires : Pr. EMILE, Pr. REBEL, Pr. RENIER, Pr. SAINT-ANDRÉ
Professeur Émérite : Pr. Gilles GUY, Pr. Jean-Pierre ARNAUD
Professeurs Honoraires : Pr. ACHARD, Pr. ALLAIN, Pr. ALQUIER, Pr. BASLÉ, Pr. BIGORGNE, Pr. BOASSON,
Pr. BOYER, Pr. BREGEON, Pr. CARBONNELLE, Pr. CARON-POITREAU, Pr. M. CAVELLAT, Pr. COUPRIS, Pr. DAUVER,
Pr. DELHUMEAU, Pr. DENIS, Pr. DUBIN, Pr. EMILE, Pr. FOURNIÉ, Pr. FRANÇOIS, Pr. FRESSINAUD, Pr. GESLIN,
Pr. GINIÈS, Pr. GROSIEUX, Pr. GUY, Pr. HUREZ, Pr. JALLET, Pr. LARGET-PIET, Pr. LARRA, Pr. LE JEUNE, Pr. LIMAL,
Pr. MARCAIS, Pr. PARÉ, Pr. PENNEAU, Pr. PENNEAU-FONTBONNE, Pr. PIDHORZ, Pr. POUPLARD, Pr. RACINEUX,
Pr. REBEL, Pr. RENIER, Pr. RONCERAY, Pr. SIMARD, Pr. SORET, Pr. TADEI, Pr. TRUELLE, Pr. TUCHAIS, Pr. VERRET,
Pr. WARTEL
PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS
ABRAHAM Pierre
Physiologie
ASFAR Pierre
Réanimation
AUBÉ Christophe
Radiologie et imagerie médicale
AUDRAN Maurice
Rhumatologie
AZZOUZI Abdel-Rahmène
Urologie
BARON Céline
Médecine générale
BARTHELAIX Annick
Biologie cellulaire
BATAILLE François-Régis
Hématologie ; Transfusion
BAUFRETON Christophe
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
BEAUCHET Olivier
Gériatrie et biologie du vieillissement
BEYDON Laurent
Anesthésiologie-réanimation
BIZOT Pascal
Chirurgie orthopédique et traumatologique
BONNEAU Dominique
Génétique
BOUCHARA Jean-Philippe
Parasitologie et mycologie
CALÈS Paul
Gastroentérologie ; hépatologie
CAMPONE Mario
Cancérologie ; radiothérapie
CAROLI-BOSC François-Xavier
Gastroentérologie ; hépatologie
CHABASSE Dominique
Parasitologie et mycologie
CHAPPARD Daniel
Cytologie et histologie
COUTANT Régis
Pédiatrie
COUTURIER Olivier
Biophysique et Médecine nucléaire
CUSTAUD Marc-Antoine
Physiologie
DARSONVAL Vincent
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique
de BRUX Jean-Louis
Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
DESCAMPS Philippe
Gynécologie-obstétrique
DIQUET Bertrand
Pharmacologie
DUVERGER Philippe
Pédopsychiatrie
ENON Bernard
Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire
FANELLO Serge
Épidémiologie, économie de la santé et prévention
FOURNIER Henri-Dominique
Anatomie
FURBER Alain
Cardiologie
GAGNADOUX Frédéric
Pneumologie
GARNIER François
Médecine générale
2
GARRÉ Jean-Bernard
Psychiatrie d’adultes
GOHIER Bénédicte
Psychiatrie
GRANRY Jean-Claude
Anesthésiologie-réanimation
GUARDIOLA Philippe
Hématologie ; transfusion
HAMY Antoine
Chirurgie générale
HUEZ Jean-François
Médecine générale
HUNAULT-BERGER Mathilde
Hématologie ; transfusion
IFRAH Norbert
Hématologie ; transfusion
JEANNIN Pascale
Immunologie
JOLY-GUILLOU Marie-Laure
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
LACCOURREYE Laurent
Oto-rhino-laryngologie
LASOCKI Sigismond
Anesthésiologie-réanimation
LAUMONIER Frédéric
Chirurgie infantile
LEFTHÉRIOTIS Georges
Physiologie
LEGRAND Erick
Rhumatologie
LERMITE Emilie
Chirurgie générale
LEROLLE Nicolas
Réanimation
LUNEL-FABIANI Françoise
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
MALTHIÉRY Yves
Biochimie et biologie moléculaire
MARTIN Ludovic
Dermato-vénéréologie
MENEI Philippe
Neurochirurgie
MERCAT Alain
Réanimation
MERCIER Philippe
Anatomie
MILEA Dan
Ophtalmologie
NGUYEN Sylvie
Pédiatrie
PELLIER Isabelle
Pédiatrie
PICHARD Eric
Maladies infectieuses ; maladies tropicales
PICQUET Jean
Chirurgie vasculaire ; médecine vasculaire
PODEVIN Guillaume
Chirurgie infantile
PROCACCIO Vincent
Génétique
PRUNIER Fabrice
Cardiologie
REYNIER Pascal
Biochimie et biologie moléculaire
RICHARD Isabelle
Médecine physique et de réadaptation
RODIEN Patrice
Endocrinologie et maladies métaboliques
ROHMER Vincent
Endocrinologie et maladies métaboliques
ROQUELAURE Yves
Médecine et santé au travail
ROUGÉ-MAILLART Clotilde
Médecine légale et droit de la santé
ROUSSEAU Audrey
Anatomie et cytologie pathologiques
ROUSSEAU Pascal
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique
ROUSSELET Marie-Christine
Anatomie et cytologie pathologiques
ROY Pierre-Marie
Thérapeutique
SAINT-ANDRÉ Jean-Paul
Anatomie et cytologie pathologiques
SENTILHES Loïc
Gynécologie-obstétrique
SUBRA Jean-François
Néphrologie
URBAN Thierry
Pneumologie
VERNY Christophe
Neurologie
WILLOTEAUX Serge
Radiologie et imagerie médicale
ZAHAR Jean-Ralph
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
ZANDECKI Marc
Hématologie ; transfusion
3
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
ANNAIX Claude
Biophysique et médecine nucléaire
ANNWEILER Cédric
Gériatrie et biologie du vieillissement
AUGUSTO Jean-François
Néphrologie
BEAUVILLAIN Céline
Immunologie
BELIZNA Cristina
Médecine interne
BELLANGER William
Médecine générale
BLANCHET Odile
Hématologie ; transfusion
BOURSIER Jérôme
Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
BRIET Marie
Pharmacologie
CAILLIEZ Éric
Médecine générale
CAPITAIN Olivier
Cancérologie ; radiothérapie
CASSEREAU Julien
Neurologie
CHEVAILLER Alain
Immunologie
CHEVALIER Sylvie
Biologie cellulaire
CONNAN Laurent
Médecine générale
CRONIER Patrick
Chirurgie orthopédique et traumatologique
de CASABIANCA Catherine
Médecine générale
DINOMAIS Mickaël
Médecine physique et de réadaptation
DUCANCELLE Alexandra
Bactériologie-virologie ; hygiène hospitalière
DUCLUZEAU Pierre-Henri
Nutrition
FERRE Marc
Biologie moléculaire
FORTRAT Jacques-Olivier
Physiologie
HINDRE François
Biophysique
JEANGUILLAUME Christian
Biophysique et médecine nucléaire
JOUSSET-THULLIER Nathalie
Médecine légale et droit de la santé
KEMPF Marie
Bactériologie-virologie ; Hygiène hospitalière
LACOEUILLE Franck
Biophysique et médecine nucléaire
LETOURNEL Franck
Biologie cellulaire
MARCHAND-LIBOUBAN Hélène
Histologie
MAY-PANLOUP Pascale
Biologie et médecine du développement et de la reproduction
MESLIER Nicole
Physiologie
MOUILLIE Jean-Marc
Philosophie
PAPON Xavier
Anatomie
PASCO-PAPON Anne
Radiologie et Imagerie médicale
PENCHAUD Anne-Laurence
Sociologie
PIHET Marc
Parasitologie et mycologie
PRUNIER Delphine
Biochimie et biologie moléculaire
PUISSANT Hugues
Génétique
SIMARD Gilles
Biochimie et biologie moléculaire
TANGUY-SCHMIDT Aline
Hématologie ; transfusion
TURCANT Alain
Pharmacologie
novembre 2014
4
COMPOSITION DU JURY
Président du jury :
Monsieur le Professeur DARSONVAL Vincent
Directeur de thèse :
Monsieur le Professeur MARTIN Ludovic
Membres du jury :
Monsieur le Professeur MARTIN Ludovic
Monsieur le Professeur ABRAHAM Pierre
Monsieur le Docteur HALLIGON Jean
Madame le Docteur WEIL Dominique
Madame le Docteur LEFRANCOIS Florence
5
LISTE DES ABREVIATIONS
AMI4 : abréviation de la cotation d’actes médico-infirmiers
ARS : Agence Régionale de Santé
CHU : Centre Hospitalier Universitaire
CPS : Carte Professionnelle de Santé
Cs/C1 : abréviations de la cotation d’une Consultation
DMS : Durée Moyenne de Séjour
EHPAD : Etablissement Hébergeant des Personnes Agées Dépendantes
HPST : Hôpital, Patients, Santé et Territoire
OCDE : Organisation pour la Coopération et le Développement Economique
PTM : Prescription de Transport Médical
QCM : Question à Choix Multiples
TELAP : Télémédecine Appliquée aux Plaies
VSL : Véhicule Sanitaire Léger
6
PLAN
INTRODUCTION
METHODES
Étude sur les coûts des prescriptions de transport médical
Étude sur la prise en charge hospitalière au sein du service de Dermatologie du CHU
d'Angers des patients présentant des plaies
Évaluation des besoins de télémédecine concernant la prise en charge des plaies au CHU
d'Angers
Évaluation des besoins des correspondants (EHPAD)
RESULTATS
DISCUSSION
Apport de nos études dans l’évaluation de la prise en charge des plaies par télémédecine
La télémédecine en France
La télémédecine appliquée à la prise en charge des plaies chroniques
Perspectives
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
ANNEXES
7
INTRODUCTION
Les plaies, et notamment les plaies chroniques (ulcères de jambes, escarres...), représentent un
véritable enjeu de santé publique de par leur coût économique et humain1. Ces pathologies
concernent avant tout les personnes âgées. Elles sont à l'origine d'hospitalisations prolongées et
répétées, coûteuses, qui peuvent dégrader l'état du patient (grabatisation)2. Mais la prise en charge
ambulatoire des plaies est difficile : l'évolution démographique médicale est défavorable et la
population de notre région vieillit (dans les pays de la Loire, en 2030, la population de la région se
composerait de 30,7% de personnes âgées de plus de 60 ans et en 20 ans les plus de 80 ans devrait
augmenter de plus de 100 000 personnes soit plus de 50%)*. En outre, les thérapeutiques locales des
plaies chroniques évoluent rapidement et les médecins généralistes, pourtant en première ligne face
à ces patients, n'ont pas toujours la possibilité d'actualiser leurs connaissances dans ce domaine3. De
nouvelles modalités de diagnostic, d'évaluation et de suivi doivent alors être mises en place pour
permettre une prise en charge optimale des patients.
Nous avons souhaité évaluer si le développement de la télémédecine au CHU d'Angers permettrait
d'anticiper une diminution du coût économique de la prise en charge des plaies chroniques. Le
développement d'une activité de télémédecine permettrait-il de diminuer le coût financier relatif aux
prescriptions de transport médical ? Réduirait-il la durée moyenne de séjour hospitalier (au sein du
service de Dermatologie et au sein de l'hôpital) ? Existe-t-il une demande de la part des structures
de proximité (e.g. EHPAD) ?
Pour répondre à ces questions, nous avons mené plusieurs études. Nous avons estimé le coût
économique des prescriptions de transport médical dans le cadre des consultations spécialisées de
plaies chroniques du service de Dermatologie du CHU d'Angers. L'impact de la prise en charge de
ces pathologies sur la durée moyenne de séjour en hospitalisation a été évalué par 2 études : au sein
du service de Dermatologie et au sein du CHU dans son ensemble. Enfin, afin d'anticiper une
viabilité de cette activité, l'évaluation des besoins en ville a été réalisée auprès des EHPAD.
*
source : ars.paysdelaloire.fr Colloque sur la Dépendance, Odile Soulas
8
METHODES
a. Étude sur les coûts des prescriptions de transport médical
Nous avons mené une étude prospective comptabilisant l’ensemble des prescriptions de transport
médical (PTM) rédigées du 26 février au 28 avril 2013 (9 semaines) au cours des consultations
spécialisées de plaies du service de Dermatologie du CHU d'Angers. Pour chaque PTM rédigée, les
différents critères influant le montant pris en charge par l’Assurance Maladie ont été recueillis. Ces
critères comprenaient : la distance kilométrique entre le domicile du patient et le lieu de la
consultation, la prise en charge ou non à 100% et le mode de transport médical (VSL, moyen de
transport personnel ou ambulance).
b. Étude sur la prise en charge hospitalière au sein du service de Dermatologie du CHU d'Angers
des patients présentant des plaies
Nous avons mené une d’Angers qui se compose de 26 lits (21 lits d'hospitalisation complète et 5 lits
d'hospitalisation de semaine) concernant les séjours des patients présentant des plaies, hospitalisés
entre le 9 septembre et le 8 novembre 2013 (9 semaines). Le service de Dermatologie gérait une file
active de 5858 patients au 31 décembre 2012.
Pour chaque séjour, les données suivantes ont été recueillies :
-
la durée totale du séjour,
-
le motif d'hospitalisation,
-
le type de plaie présentée (indépendamment du motif d’hospitalisation),
-
le médecin adressant le patient en hospitalisation (médecin traitant, dermatologue ou
autre),
-
le temps moyen de pansement infirmier,
-
le(s) motif(s) de maintien en hospitalisation (à J5, J10, J15, J20),
-
les motifs de sortie.
Les motifs justifiant la prise en charge hospitalière des plaies étaient répartis en 8 catégories (les
motifs de maintien en hospitalisation étaient répartis selon les mêmes catégories) :
-
Nécessité d’une évaluation dermatologique de la plaie au moins hebdomadaire,
-
Nécessité de personnel infirmier expérimenté pour les soins (soins difficiles à
domicile),
-
Réalisation d’actes techniques,
-
Nécessité de matériel à prescription hospitalière,
-
Comorbidités limitant la prise en charge des plaies à domicile,
9
-
Problème social empêchant la prise en charge des plaies à domicile,
-
Absence d’évolution favorable au domicile par inobservance ou refus de soins,
-
Autres (notamment motif d’hospitalisation n’étant pas celui du soin de la plaie).
Les types de plaies étaient séparés en :
-
plaie aiguë (traumatique, brûlure, chirurgicale),
-
plaie chronique (d’origine veineuse, artérielle, mixte, tumorale, angiodermite
nécrotique, pied diabétique),
-
une troisième catégorie permettait de classer les autres types de plaies ne répondant
pas à ces définitions.
Les motifs de sortie comprenaient :
-
La cicatrisation complète de la plaie,
-
L’amélioration permettant d’espacer le suivi médical,
-
L’amélioration permettant de simplifier le travail infirmier,
-
La fin de l’acte technique ou de l’utilisation du matériel hospitalier,
-
Les problèmes annexes résolus (comorbidités, problème social…)
-
Le transfert dans un autre service pour la gestion d’autres pathologies
-
L’absence d’évolution favorable malgré la réalisation des soins en hospitalisation
-
Autres.
c. Évaluation des besoins de télémédecine concernant la prise en charge des plaies au CHU
d'Angers
Nous avons mené une étude observationnelle transversale sur l'ensemble du CHU d'Angers. Le 27
février 2014, les services du CHU d'Angers ont été contactés téléphoniquement afin de recenser
l'ensemble des patients hospitalisés et porteurs de plaies, sans préjuger de leur nature. Les services
avaient été mis au courant de la réalisation de l'étude quelques semaines auparavant par courrier
électronique adressé aux cadres de santé et chefs de service. Suite au recensement, un questionnaire
nominatif était adressé aux médecins ou internes prenant en charge le patient afin d'évaluer l'impact
de la prise en charge des plaies sur la durée moyenne de séjour et d'estimer l'intérêt de la mise en
place d'un suivi par télémédecine dans ce contexte.
d. Évaluation des besoins des correspondants (EHPAD)
Pour évaluer ces besoins, l'ensemble des EHPAD du Maine-et-Loire a été contacté. Les cadres de
santé de chaque établissement ont été contactés téléphoniquement pour présenter l'objectif de
l'étude, son déroulement et les objectifs attendus. Un questionnaire était ensuite adressé par mail ou
par fax aux responsables de ces établissements. Dans chaque cas étaient collectés la capacité
10
d'accueil de l'établissement, le nombre de résidents présentant des plaies, si celles-ci étaient à
l'origine de difficultés de l'équipe soignante, si la prise en charge avait nécessité le recours à une
consultation spécialisée ou une hospitalisation et enfin si le recours à un service de télémédecine
aurait eu un impact bénéfique sur la réalisation des soins et sur le nombre de consultations ou
d'hospitalisations. Afin de faciliter le remplissage du questionnaire par les équipes soignantes, les
réponses étaient proposées sous forme de QCM avec des fourchettes de pourcentage.
11
RESULTATS
a. Étude sur les coûts des prescriptions de transport médical
164 consultations spécialisées de plaies ont eu lieu sur la période concernée au cours desquelles 103
PTM ont été rédigées (soit 62,8% des consultations). Le coût d'une consultation plaie était de
35,60€ pour une consultation avec un angiologue (C1 + AMI4) et 40,60€ avec un dermatologue (Cs
+ AMI4). Le coût des consultations en elles-mêmes s'élevait donc à 3463 euros.
82 PTM ont été rédigées pour un transport en VSL (soit 79,6%) et 21 PTM pour un transport en
ambulance (soit 20,4%).
Le transport en ambulance était comptabilisé selon un forfait (départemental ou agglomération
selon la distance kilométrique entre le domicile du patient et le lieu de consultation) auquel
s’ajoutait le tarif kilométrique de 2,19 euros et une valorisation trajet court dégressive jusqu’au
19ème kilomètre parcouru. Le coût des PTM en ambulance s'élevait à 4527 euros pour 16 patients se
répartissant sur 21 consultations, soit un coût moyen de 215,6 euros pour le transport d’une
consultation (Tableau I).
Un transport en VSL était comptabilisé sur la base d’un forfait départemental auquel s’ajoutait le
tarif kilométrique de 0,85 euro ainsi qu’une valorisation trajet court également dégressive jusqu’au
19ème kilomètre parcouru. Le coût des PTM en VSL s'élevait à 6802,9 euros pour 51 patients se
répartissant sur 82 consultations spécialisées de plaies soit un coût moyen de 82,9 euros par
consultation (Tableau I).
Tableau I. Evaluation du coût économique assumé par l'Assurance Maladie des Prescriptions de transport
médical des patients suivis en externe par la consultation spécialisée plaies du service de Dermatologie du CHU
d'Angers
Consultations
Transport médical
Transport en
Transport en VSL
ambulance
Coût sur l'ensemble
3498,6
11329,9
4526,99
6802,9
33,97
110
215,57
82,96
des consultations (en
euros)
Coût moyen d'une
consultation (en
euros)
12
Au total, le coût assumé par l'Assurance Maladie sur mars et avril 2013 pour la seule prise en
charge des PTM s’élevait à 11329 euros alors que le remboursement de la consultation en ellemême s’élevait à 3498,6 euros. Le transport médical représente un coût de près de 3,2 fois le
montant de la consultation à laquelle le patient se rend.
b. Étude sur la prise en charge hospitalière au sein du service de Dermatologie du CHU d'Angers
des patients présentant des plaies
Sur les 9 semaines de l’étude, 35 séjours de patients présentant des plaies ont été répertoriés. La
durée moyenne de séjour (DMS) était de 17,6 jours [4-43 jours].
Les plaies prises en charge en hospitalisation étaient principalement des plaies chroniques (25
séjours) : 4 plaies tumorales, 10 ulcères veineux (dont un associé à un eczéma de contact, 2 associés
à une dermite érosive et 1 compliqué d’érysipèle), 1 escarre, 5 ulcères mixtes (dont 1 avec
microangiopathie et 1 associé à une dermite érosive), 2 ulcères artériels (dont 1 avec ulcères
microangiopathiques et 1 avec vascularite), 1 angiodermite nécrotique, 2 pieds diabétiques dont 1
avec ostéite. Les plaies aiguës représentaient une proportion moindre (4 séjours) et comprenaient
des causes infectieuses (dont 2 érysipèles) et une plaie traumatique. Les autres plaies prises en
charge comprenaient : une évolution nécrotique d’un purpura vasculaire, 2 intertrigo érosifs, 1
cylindromatose, 1 cryoglobulinémie et 4 dermatoses bulleuses.
Les patients étaient principalement adressés par des médecins non dermatologues : médecins
généralistes (14 hospitalisations, 40%), médecins urgentistes (4 hospitalisations, 11,4%), transferts
d’autres établissements de santé (4 hospitalisations, 11,4%), angiologues (3 hospitalisations, 8,6%)
et autres (5 hospitalisations, 14,3%). Les dermatologues étaient à l'origine de 5 hospitalisations
(14,3%) (Figure 1).
Figure 1. Répartition des spécialités médicales adressant les patients porteurs de plaies en hospitalisation
13
Le motif d’hospitalisation principal était la nécessité d’une évaluation dermatologique au moins
hebdomadaire de la plaie, ce qui était le cas pour 27 séjours. Les autres motifs d’hospitalisation
étaient : la nécessité de personnel infirmier expérimenté pour les soins de plaies (9 séjours), les
comorbidités et problèmes sociaux empêchant la prise en charge des plaies à domicile
(respectivement 5 et 1 séjours) et l’absence d’évolution favorable au domicile pour 1 séjour. Pour 5
des 35 séjours répertoriés, le soin de la plaie n’était pas le motif d’hospitalisation principal, il
s’agissait alors principalement de bilans (cancérologie, maladie inflammatoire systémique), d’actes
programmés (introduction d’une corticothérapie systémique, chimiothérapie) ou d’effets
secondaires d’un traitement (dyspnée sous dapsone). Parmi les 35 séjours, 2 étaient des
hospitalisations programmées dites « de semaine » dont le maintien des patients en hospitalisation
n'a pas été nécessaire après réalisation des bilans ou actes techniques.
Le temps moyen de pansement au cours de l'hospitalisation était de 18,1 minutes [5-30 min].
La nécessité d’une évaluation dermatologique au moins hebdomadaire était responsable d'un
maintien en hospitalisation de 9 patients (soit 25,7% des séjours analysés). En effet, on estimait que
la prise en charge des plaies en hospitalisation complète, lorsqu'il s'agissait du seul motif de
maintien de l'hospitalisation, était responsable du maintien en hospitalisation de 6,6 jours en
moyenne [0-13jours]. Du personnel infirmier expérimenté était nécessaire pour 3 séjours et ne
permettait pas un retour à domicile du patient. Il s'agissait principalement de soins en rapport avec
des dermatoses bulleuses (pemphigoïde bulleuse notamment) et exigeaient un temps de pansement
conséquent (20 à 30 minutes) dont la bonne réalisation conditionne la rémission. Le maintien en
hospitalisation était alors évalué à 8,7 jours en moyenne.
Les comorbidités des patients (e.g. troubles cognitifs), les effets secondaires de traitement (e.g.
dyspnée sous dapsone) et la survenue de complications au cours de l’hospitalisation (rétention
hydrosodée, érysipèle, insuffisance rénale aiguë, infection herpétique…) ont nécessité le maintien
en hospitalisation de 10 patients et ont abouti à un décès pour un patient et à un transfert en service
spécialisé pour un autre patient. La nécessité de réalisation d'actes techniques (réalisation de tests
allergologiques, traitement des plaies par pression négative V.A.C®, transfusion) nécessitait le
maintien en hospitalisation de 3 patients. Les problèmes sociaux étaient le motif de maintien en
hospitalisation de 3 patients.
c. Évaluation des besoins de télémédecine concernant la prise en charge des plaies au CHU
d'Angers
Nous avons recensé 97 patients porteurs de plaies sur les 1386 hospitalisés le 27 février 2014 au
CHU d'Angers. Cinquante et un questionnaires sont revenus complétés dans le service de
Dermatologie, soit un taux de participation de 45,4%. Six patients ne présentaient, en réalité, pas de
14
plaies. Les types de plaies étaient des plaies chirurgicales/post-opératoires (10 soit 22,2%), escarres
(7 soit 15,6%), ulcères des membres inférieurs (artériels, veineux ou mixtes) (6 soit 13,3%), plaies
traumatiques (3 soit 6,7%), pieds diabétiques (3 soit 6,7%), plaies superficielles (dermabrasion...) (2
soit 4,4%), vascularite (1 soit 2,2%), et 12 types de plaies n'étaient pas précisés (soit 26,7%)
(Tableau II).
Quatorze plaies étaient responsables d'une augmentation de la durée moyenne de séjour
(participation à une anémie inflammatoire, difficulté du suivi des plaies à domicile pour les patients
isolés...). Les médecins responsables des patients hospitalisés estimaient qu'un suivi par
télémédecine aurait pu être envisageable à la sortie du patient pour 17 patients porteurs de plaies et
que cela aurait eu un impact favorable sur la DMS pour 4 d'entre eux (1 escarre, 1 ulcère des
membres inférieurs, 1 pied diabétique, et 1 plaie de mécanisme non précisé).
Tableau II. Types de plaies recensées au CHU d'Angers sur l'ensemble des patients hospitalisés le 27 février 2014
Types de plaies recensées :
- plaies chirurgicales/post-opératoires : 10 (soit 22,2%)
- escarres : 7 (soit 15,6%)
- ulcères de jambes : 6 (soit 13,3%)
- plaies traumatiques : 3 (soit 6,7%)
- pied diabétique : 3 (soit 6,7%)
- plaies superficielles : 2 (soit 4,4%)
- vascularite : 1 (soit 2,2%)
- non renseignées : 12 (soit 26,7%)
d. Évaluation des besoins des correspondants (EHPAD)
126 établissements ont été contactés au cours du mois de juin 2014. 28 d'entre eux étaient en réalité
des foyers logements où les soins étaient réalisés par des infirmières libérales qui ne pouvaient pas
répondre à notre questionnaire. 2 établissements n'ont pas souhaité recevoir le questionnaire. 96
EHPAD ont donc participé à notre étude.
15
126 établissements contactés
28 foyers logement exclus de l’étude
2 établissements ont refusé de participer à l’étude
96 questionnaires envoyés
69 établissements non répondeurs
27 questionnaires retournés remplis
Figure 2. Organigramme des questionnaires envoyés aux EHPAD
27 questionnaires nous ont été retournés remplis soit un taux de réponse de 28%. Le nombre de
résidents de ces EHPAD s'élevait à 2069 [31-218], soit une moyenne de 76,6 résidents par
établissement. Parmi eux, 119 résidents étaient identifiés par les infirmières comme porteurs de
plaies soit une moyenne de 4,6 par établissement.
Concernant les difficultés rencontrées par les équipes soignantes, 2 établissements considéraient
n'avoir jamais rencontré de difficultés pour la prise en charge des patients porteurs de plaies de leur
établissement (7,4%), 14 ont rencontré des difficultés : rarement (<15%) soit 51,8%, 7
occasionnellement (30-50%) soit 26%, 3 assez fréquemment (50-75%) soit 11,1%, et 1 équipe était
en difficulté lors de chaque prise en charge de plaie soit 3,7%.
9 établissements ont estimé que la mise en place éventuelle d'un service de télémédecine aurait
apporté une aide aux équipes soignantes dans moins de 25% des cas (soit 33,3%), 4 établissements
ont estimé qu'une aide aurait été apportée dans 30 à 50% des cas (soit 14,8%). L'aide aurait été
possible dans 50 à 75% des cas pour 2 établissements (soit 7,4%) et dans plus de 75% des cas par 3
établissements (soit 11,1%). Enfin 5 établissements ont estimé qu'une aide aurait été apportée à
chaque fois (soit 18,5%) et 3 établissements étaient sans opinion.
12 équipes soignantes estimaient qu'une diminution des consultations/hospitalisations aurait été
possible dans moins de 25% des cas (44,4%), 2 que cela aurait été possible dans 30 à 50% des cas
(7,4%), 2 dans 50 à 75% des cas (7,4%), 1 dans plus de 75% des cas (3,7%). 3 équipes estimaient
que cela était possible à chaque fois (11,1%) et 1 équipe estimait qu'un avis par télémédecine
n'aurait pas pu éviter cette consultation spécialisée (3,7%). Enfin, 5 établissements n'ont pas
répondu à cette question.
16
DISCUSSION
Les études réalisées nous donnent des arguments pour penser que le développement de la
télémédecine permettrait d'anticiper une diminution du coût économique et humain de la prise en
charge des plaies chroniques. Nos études s’inscrivent dans le cadre d’une politique institutionnelle
locale et régionale avec l’ARS.
APPORT DE NOS ETUDES DANS L’EVALUATION DE LA PRISE EN CHARGE DES PLAIES
PAR TELEMEDECINE
Impact économique de la télémédecine sur les PTM
Nous avons montré que la prescription de transport médical représentait 3,2 fois le coût d'une
consultation pour prise en charge des plaies en externe (multiplication par 3 du coût assumé par
l’Assurance Maladie). La prise en charge externe des plaies dans le Maine et Loire pourrait donc
voir son impact économique diminuer dans le cas d’une mise en place de la télémédecine en
supprimant le facteur des Prescriptions de Transport Médical.
En effet, la prise en charge des plaies chroniques requiert des évaluations fréquentes afin d'ajuster le
traitement4 et donc des déplacements répétés. WOOTTON et al. ont rapporté, après revue de la
littérature, une diminution de 43 à 70% des trajets en utilisant la télémédecine5. Si dans certains cas
la consultation spécialisée ne peut être évitée, la télémédecine permet au moins de limiter celle-ci
aux patients la nécessitant réellement6,7. Au-delà du bénéfice économique, une diminution du
nombre de trajets améliore la qualité de vie de ces patients, souvent âgés, dépendants et fragiles 8.
Cependant, le but du développement de la télémédecine est de limiter et non de supprimer ces
consultations spécialisées4. En effet, il existe certaines limites à ce nouveau mode de prise en
charge. Un suivi régulier par télémédecine, n'a pas toujours un impact positif sur la qualité de vie
des patients : l'étude menée par PECINA et al. montre que cela peut aggraver le ressenti du patient
sur sa santé physique9. De plus, limiter une prise en charge médicale à cette seule modalité, pourrait
être une perte de chance pour le patient vu ponctuellement par des médecins ne maîtrisant pas tous
ses antécédents.
Conséquences du développement de la télémédecine sur les DMS des patients hospitalisés
a. Au sein du service de Dermatologie du CHU d’Angers
Notre étude apporte des arguments pour penser que l'hospitalisation et son maintien ne nécessitent
pas toujours le recours aux ressources techniques spécifiques d'un service hospitalier de
17
Dermatologie. Or, une prise en charge hospitalière représente un coût économique et humain non
négligeable, notamment du fait des soins de nursing, de l'hébergement, des repas, des transports et
au niveau administratif.
La prise en charge des plaies est un motif fréquent d’hospitalisation en dermatologie. Une expertise
semble d’autant plus nécessaire que les étiologies des plaies sont multiples (ulcères veineux,
artériels, angiodermite nécrotique etc.) et relèvent de la spécialité. La nécessité d’un avis
dermatologique concernant ces pathologies apparaît clairement puisque les médecins non
dermatologues sont les acteurs directs de l'hospitalisation pour plaie dans 85,3% des cas. La
mise à disposition d'une alternative dermatologique, obtenu par télémédecine, intervenant
précocement dans la prise en charge pourrait limiter le nombre de ces hospitalisations à celles
limitées par des dermatologues en permettant notamment l’initiation et la surveillance des
soins locaux à domicile.
Par ailleurs, on observe que la DMS de ces patients présentant des plaies est supérieure aux DMS
concernant les maladies de peau et de tissus sous cutanés dans leur ensemble puisque celles-ci
étaient de 6,2 jours en 2008 † . Cependant, la prise en charge des plaies n'est pas le seul motif
d'augmentation de la DMS. En effet, la prise en charge des comorbidités des patients apparaît en
être le principal facteur (maintien en hospitalisation de 10 patients). Les patients qui sont
maintenus en hospitalisation pour des comorbidités restent en service de Dermatologie car les
autres services hospitaliers et les structures de proximité manquent d'expérience dans la prise
en charge des plaies. L'alternative de la prise en charge par télémédecine, après traitement de
l'épisode aigu en hospitalisation, permettrait également de limiter la survenue de ces complications
chez des patients fragiles.
La nécessité d'un avis dermatologique au moins hebdomadaire allonge, quant à elle, la DMS de 9
hospitalisations soit 25,7% des hospitalisations répertoriées sur la période de l'étude. Sur ces séjours,
la partie "télé-expertise" de l'activité de télémédecine permettrait un retour à domicile plus précoce
des patients en continuant le suivi médical à distance voire en évitant les hospitalisations non
nécessaires et en limitant ainsi les déplacements aux patients fragiles et aux personnes âgées.
De même, la nécessité pour certains soins de recourir à un personnel infirmier expérimenté est
responsable d'un allongement de 3 séjours. Cette proportion est faible au regard de la nécessité d'un
avis dermatologique spécialisé et de la prise en charge des comorbidités. Une "télé-assistance" qui
pourrait voir le jour au sein de l'activité de télémédecine permettrait un suivi infirmier et des
conseils délivrés par les infirmières spécialisées au personnel soignant du domicile ou en EHPAD et
ne limiter ainsi les hospitalisations qu'en dernier recours, alors même que les soins ne suffisent plus.
†
source : Eco-Santé OCDE 2010, d’après données PMSI-MCO de la Drees
18
b. Au sein du CHU d'Angers
Du fait de leur prévalence élevée, les plaies se rencontrent également régulièrement dans les autres
services hospitaliers, indépendamment du motif d'hospitalisation initial des patients.
Le taux de réponse à notre questionnaire était de 45,4%. Six patients ne présentaient pas de plaie,
ceci peut s'expliquer par le fait que le recensement était fait auprès des cadres/infirmiers des
services qui ont relevé tous les soins de pansements (soins de picc line etc.) alors que le
questionnaire a été rempli par le médecin responsable du patient et qui n'a retenu que les plaies.
Une importante proportion des plaies recensées (22,2%) étaient en réalité des plaies post
opératoires/chirurgicales (lambeau cutané...). Dans ces cas particuliers, la plaie chirurgicale fait
donc partie du motif d'hospitalisation. Cependant, la télémédecine pourrait également y jouer un
rôle lors d'évènements sur cicatrice en post opératoire après retour à domicile ainsi que pour
les patients isolés pour qui il n'est pas facile de se rendre en consultation. Les équipes de
chirurgie pourraient être formées à l’utilisation de cette technique afin de suivre leurs patients après
sortie d’hospitalisation. Le suivi par télémédecine dans ce cas permettrait de diminuer les
consultations post opératoires plutôt que d'influer sur les durées moyennes de séjour et ainsi réduire
les coûts de transport comme nous l'avons vu dans notre première étude.
Notre étude est cependant monocentrique et l'orientation universitaire de notre établissement peut
biaiser certains de nos résultats.
Il ressort également de notre étude que les plaies ont un impact négatif sur la DMS pour environ un
tiers des patients hospitalisés. Une faible proportion des médecins les prenant en charge estimerait
que la mise en place d'un service de télémédecine pourrait avoir un effet favorable pour les durées
d'hospitalisation (4 séjours). Cela peut refléter un manque de connaissance de cette alternative de
suivi mais également un manque de confiance sur sa fiabilité et son efficacité. Dans les autres cas,
la DMS dépendait d'autres problèmes médicaux.
Evaluation des besoins des structures de proximité : EHPAD
Vingt-huit pour cent des questionnaires envoyés nous ont été retournés remplis. Ce faible taux de
réponse peut s'expliquer par la méthodologie employée (sondage). Lors du contact téléphonique,
plusieurs établissements avaient émis des réserves sur la pertinence de leur participation à une telle
étude du fait du faible nombre de résidents porteurs de plaies. Cela peut être une explication
supplémentaire à l'absence de réponse de certains établissements. Par ailleurs, certains résultats
peuvent avoir été sous-évalués du fait du caractère rétrospectif de notre questionnaire induisant un
biais de mémorisation.
Les EHPAD participantes ont fréquemment associé quelques remarques au questionnaire, traduisant
le ressenti des équipes soignantes confrontées à la prise en charge de plaies chroniques. D'après les
19
équipes, les médecins généralistes ne sont pas toujours formés aux nouvelles thérapeutiques
locales des plaies et manquent souvent de temps pour les examiner et assister à la réfection du
pansement. Les infirmières agissent donc sans prescription médicale, selon leurs habitudes et
un protocole de pansement peut changer d'un jour à l'autre en fonction de l'infirmière prenant en
charge le patient. La mise en place d'un service de télémédecine, permettrait une « formation » des
médecins des EHPAD ainsi que des infirmières.
Ces établissements sont également intéressés par la possible diminution du nombre de transports en
cas de développement de cette activité. En effet, les patients porteurs de plaies sont parfois fragiles
et difficilement transportables. De plus, s'il ne s'agit pas d'une affection de longue durée, ces
transports médicaux sont coûteux et à la charge du patient.
Pour les équipes soignantes, la possibilité de contacter un dermatologue et/ou une infirmière
spécialisée dans la prise en charge des plaies permettrait une prise en charge plus rapide. En effet,
en cas de difficulté rencontrée lors de la prise en charge de plaies chez un patient plusieurs
protocoles de pansements étaient essayés avant une consultation.
La plupart des établissements participant à l'étude ont signalé que l'activité de télémédecine serait
utile dans la prise en charge des plaies chroniques mais également pour les problèmes
dermatologiques auxquels ils peuvent être confrontés au quotidien.
LA TELEMEDECINE EN FRANCE
Bien qu'il existe en France des projets de télémédecine aboutis, peu d'études ont été publiées8,10,11,12.
La démographie médicale défavorable incite à développer des expériences de télémédecine dans les
zones rurales isolées. La loi HPST (septembre 2009, chapitre "amélioration de l'accès à des soins de
qualité") donne une définition du cadre juridique de la télémédecine : pratique médicale à distance
utilisant les techniques de l'information et de la communication. Chaque ARS rédige un plan
régional de santé puis un programme régional de développement de la télémédecine. C'est le cas en
Basse-Normandie (étude « TELAP ») et en Languedoc-Roussillon (étude « CICAT »). Le projet
"Domoplaie" développe différentes facettes de la télémédecine :
-
la téléconsultation : acte médical en présence du malade (visioconférence)
-
la télé-expertise : acte médical en dehors de la présence du malade
-
la télé-assistance : assistance d'un professionnel de santé à un autre professionnel de santé en
train de réaliser un soin
Se pose la question de la sécurité informatique. Un consentement du patient est nécessaire à la mise
en route du projet. L'authentification des patients est obtenue par la carte vitale et celle des
médecins par une carte professionnelle CPS.
20
Figure 3. Organisation du réseau de télémédecine appliquée aux plaies en Basse-Normandie (TELAP)‡
Le projet Domoplaie se poursuivra jusqu'en décembre 2015. Dans un domaine où les publications
françaises sont rares, nos études permettent donc une estimation des bénéfices attendus au
développement de la télémédecine.
LA TELEMEDECINE APPLIQUEE A LA PRISE EN CHARGE DES PLAIES CHRONIQUES
La Dermatologie est l'une des spécialités médicales qui se prête le plus à la pratique de la
télémédecine du fait d'une sémiologie visuelle13 et les nouvelles technologies rendent sa réalisation
possible. BINDER et al. ont rapporté que la qualité d'image était suffisante voire excellente dans
89% des téléconsultations14. Au sein même de la Dermatologie, le suivi des plaies chroniques est
d'autant plus adapté à l'usage de la télémédecine du fait de sa reproductibilité. Il a été rapporté
une importante concordance dans l'évaluation des plaies chroniques entre les consultations
classiques et les consultations par télémédecine (en utilisant des critères précis : pourcentage de
‡
Source : http://www.telesante-basse-normandie.fr/
21
macération, nécrose, bourgeonnement)7. De plus, contrairement à d'autres domaines, l'association
de photos et de quelques renseignements cliniques est suffisant pour poser un diagnostic correct et
mettre en place une thérapeutique15,16. Dans un tiers des cas, un avis donné par télé-expertise
débouche sur une modification thérapeutique, illustrant la confiance des médecins spécialistes
sollicités dans cette forme de consultation7. Les études pilotes menées retrouvent même un bon
niveau de satisfaction du personnel soignant et des patients8.
D'autres avantages économiques, non suspectés initialement, peuvent voir le jour suite au
développement de la télémédecine. Les médecins généralistes sont le plus souvent en première ligne
lorsqu'il s'agit de prendre en charge des plaies chroniques. Ce motif représente une importante
proportion de leurs consultations17. Or, une prise en charge optimale des plaies chroniques requiert
une connaissance actualisée des nouveaux dispositifs médicaux, ce dont ne bénéficient pas toujours
les médecins généralistes. La télémédecine, en favorisant le contact entre médecins spécialistes
et généralistes18, permet une formation de ces derniers par rapport à ces nouvelles
thérapeutiques7. Non seulement, le nombre de consultations spécialisées pourrait baisser mais
également les besoins des médecins généralistes de recourir à l'avis d'un spécialiste. Au-delà de
l'impact favorable sur le plan économique, le développement de la télémédecine permet également
l'optimisation de la prise en charge des plaies chroniques en permettant un diagnostic plus précoce
et donc la mise en place rapide d'une thérapeutique19.
PERSPECTIVES
Le bénéfice apporté20, nuancé par quelques limites surmontables, a permis à la télémédecine de
faire ses preuves dans certains pays. Ainsi, aux Pays-Bas, la « télé-dermatologie » est remboursée
depuis 2005. Selon l'étude de VAN DER HEIJDEN et al., cela a permis d'éviter 68% des
consultations spécialisées dans la population totale et donc une réduction de 18% du coût
économique21. Différentes techniques sont possibles concernant la télémédecine. Ainsi, il est
possible de solliciter un avis spécialisé en temps réel, en différé (« store and forward ») voire même
via l'utilisation de réseaux sociaux (Facebook ®22).
Ces résultats encourageants dans les études menées en France et dans les pays ayant mis en place ce
mode de prise en charge, laissent penser que la télémédecine pourrait se développer dans les autres
domaines de la Dermatologie (cancérologie20, dermato-pédiatrie 12,23).
22
CONCLUSION
La télémédecine permet la réalisation d'économies sur différents postes de dépenses : diminution du
nombre d'aller-retour en ambulance pour se rendre sur les lieux de consultations, réduction de la
durée moyenne de séjour hospitalier en apportant une alternative à la suite de la prise en charge.
L'intérêt du développement d'une activité de télémédecine est donc double : répondre à un besoin
croissant en Dermatologie (vieillissement de la population et évolution défavorable de la
démographie médicale) tout en réalisant des économies sur les coûts assumés par l'Assurance
Maladie.
23
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25
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS .......................................................................................................... 6
PLAN ................................................................................................................................................... 7
INTRODUCTION .............................................................................................................................. 8
METHODES....................................................................................................................................... 9
a. Étude sur les coûts des prescriptions de transport médical .......................................................... 9
b. Étude sur la prise en charge hospitalière au sein du service de Dermatologie du CHU d'Angers
des patients présentant des plaies ..................................................................................................... 9
c. Évaluation des besoins de télémédecine concernant la prise en charge des plaies au CHU
d'Angers ......................................................................................................................................... 10
d. Évaluation des besoins des correspondants (EHPAD) ............................................................... 10
RESULTATS ..................................................................................................................................... 12
a. Étude sur les coûts des prescriptions de transport médical ........................................................ 12
b. Étude sur la prise en charge hospitalière au sein du service de Dermatologie du CHU d'Angers
des patients présentant des plaies ................................................................................................... 13
c. Évaluation des besoins de télémédecine concernant la prise en charge des plaies au CHU
d'Angers ......................................................................................................................................... 14
d. Évaluation des besoins des correspondants (EHPAD) ............................................................... 15
DISCUSSION ................................................................................................................................... 17
1/ Apport de nos études dans l'évaluation de la prise en charge des plaies par télémédecine ....... 17
Impact économique de la télémédecine sur les PTM ..................................................................... 17
a. Au sein du service de Dermatologie du CHU d’Angers ..................................................... 17
b. Au sein du CHU d'Angers ................................................................................................... 19
Evaluation des besoins des structures de proximité : EHPAD ....................................................... 19
2/ La télémédecine en France......................................................................................................... 20
3/ La télémédecine appliquée à la prise en charge des plaies chroniques ...................................... 21
4/ Perspectives................................................................................................................................ 22
CONCLUSION................................................................................................................................. 23
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................... 24
TABLE DES MATIERES................................................................................................................ 26
LISTE DES FIGURES .................................................................................................................... 27
LISTE DES TABLEAUX ................................................................................................................ 28
26
LISTE DES FIGURES
Figure 1. Répartition des spécialités médicales adressant les patients porteurs de plaie en
hospitalisation
Figure 2. Organigramme des questionnaires envoyés aux EHPAD
Figure 3. Organisation du réseau de télémédecine appliquée aux plaies en Basse-Normandie
(TELAP)
27
LISTE DES TABLEAUX
Tableau I. Evaluation du coût économique assumé par l'Assurance Maladie des Prescriptions de
transport médical des patients suivis en externe par la consultation spécialisée plaies du service de
Dermatologie du CHU d'Angers
Tableau II. Types de plaies recensées au CHU d'Angers sur l'ensemble des patients hospitalisés le
27 février 2014
28

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