Cas clinique n° 1

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Cas clinique n° 1
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex moteur
Cortex sensitif
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
Afférences
respiratoires
SOIF
D’AIR
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
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Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
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mars
Vol 8 2016
1
n°
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Attention ceci est un compte-rendu et/ou résumé des communications de congrès
dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche ;
ainsi les données présentées sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités
de santé françaises et doivent donc ne pas être mises en pratique.
Le contenu a été réalisé sous la seule responsabilité du coordonnateur, des auteurs
et du directeur de la publication qui sont garants de son objectivité.
Les laboratoires AstraZeneca ne sont pas intervenus dans le choix et la rédaction des articles.
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Revue
des
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Maladies
Respiratoires
Actualités
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des Maladies
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Actualités
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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016), 8
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Actualités
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
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mars
Vol 8 2016
n°
1
SOMMAIRE
Séminaire d’Approfondissement et de Perfectionnement en Pneumologie (SAPP)
Édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
Éditorial
B. Maître, F. Chabot ........................................................................................................ 1
Cas cliniques
Cas clinique n° 1
B. Crestani, C. Danel, M.-P. Debray, R. Borie, L. Tabeze, A. Justet, M. Aubier, C. Taillé ....................... 3
Cas clinique n° 1 — Commentaires
Dyspnée avec trouble ventilatoire obstructif au cours d’un syndrome de Gougerot-Sjögren
B. Crestani, C. Danel, M.-P. Debray, R. Borie, L. Tabeze, A. Justet, M. Aubier, C. Taillé ....................... 5
Cas clinique n° 2
J.-L. Vachiéry ...............................................................................................................13
Cas clinique n° 2 — Commentaires
Interactions cœur-poumons – hypertension pulmonaire et maladies cardiaques gauches
J.-L. Vachiery ...............................................................................................................15
Cas clinique n° 3
P. Priou ......................................................................................................................20
Cas clinique n° 3 — Commentaires
Le syndrome obésité-hypoventilation : approche diagnostique et thérapeutique
P. Priou ......................................................................................................................23
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 1
08/03/2016 13:21:49
Cas clinique n° 4
F. Lebargy.....................................................................................................................29
Cas clinique n° 4 — Commentaires
Une dyspnée chez une patiente atteinte d’une neurofibromatose de type 1
F. Lebargy.....................................................................................................................32
Cas clinique n° 5
N. Guibert....................................................................................................................36
Cas clinique n° 5 — Commentaires
Bronchoscopie interventionnelle pour la prise en charge d’une sténose maligne proximale
symptomatique : Pour quels patients ? Quelles alternatives ?
N. Guibert....................................................................................................................38
Cas clinique n° 6
H. Nunes......................................................................................................................45
Cas clinique n° 5 — Commentaires
Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
H. Nunes......................................................................................................................49
Synthèses
Dyspnée : des concepts à la clinique
C. Morelot-Panzini, T. Similowski........................................................................................60
Syndrome d’hyperventilation chronique
B. Chenuel...................................................................................................................69
Attention ceci est un compte-rendu et/ou résumé des communications de congrès
dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche ;
ainsi les données présentées sont susceptibles de ne pas être validées par les autorités
de santé françaises et doivent donc ne pas être mises en pratique.
Le contenu a été réalisé sous la seule responsabilité du coordonnateur, des auteurs et du directeur
de la publication qui sont garants de son objectivité.
Les laboratoires AstraZeneca ne sont pas intervenus dans le choix et la rédaction des articles.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 2
08/03/2016 13:21:49
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 1-2
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
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thracique
PaO2
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Vol 8 2016
n°
1
Éditorial
L
es Séminaires d’Approfondissement et de Perfectionnement en Pneumologie (SAPP) ont
pour objectif de parfaire les connaissances des internes de la spécialité et des jeunes
chefs de clinique ayant déjà une expérience pratique en pneumologie. Placés sous
l’égide de la Société de Pneumologie de Langue Française et du Collège des Enseignants
de Pneumologie, les SAPP complètent la formation dispensée lors des séminaires du DES
de pneumologie destinés à acquérir les bases de la spécialité et les réunions régionales ou
nationales de formation continue.
Le thème « Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques » a été choisi pour la session 2016 par le conseil scientifique de la Société de Pneumologie de Langue Française,
Sous ce titre, nous avons voulu évoquer le symptôme le plus fréquemment rencontré par
les pneumologues, avec des aspects complémentaires, cliniques et thérapeutiques, en
soulignant l’importance de la physiopathologie.
Les cas cliniques illustrent ces pathologies où les attitudes notamment exploratoires
et thérapeutiques ont beaucoup évolué ces dernières années. Les cas cliniques sont donc
variés et mettent en exergue l’importance d’un examen clinique de qualité, l’apport d’un
bilan précis, morphologique avec le scanner, fonctionnel respiratoire intégrant l’étude du
sommeil, et le monitorage de l’assistance ventilatoire.
Les autres cas cliniques font le point sur les critères évolutifs des pneumopathies
infiltrantes avec la recherche des co-morbidités, le choix des investigations pour explorer
les interactions cardio-pulmonaires et guider les traitements de l’hypertension pulmonaire,
et l’état des lieux concernant le bilan et le traitement d’une obstruction proximale et
tumorale des voies aériennes.
Les synthèses proposées constituent une mise au point sur deux sujets, la dyspnée,
des concepts à la clinique avec les implications thérapeutiques et le syndrome d’hyperventilation chronique.
La formule d’enseignement de ces séminaires est reconduite depuis 10 ans avec deux
parties distinctes : une journée consacrée à des présentations sous forme de commentaires
de cas cliniques. Les observations ont été choisies et rédigées par les orateurs « experts ».
Elles sont soumises à un groupe de participants qui répondent aux questions avant d’avoir
le commentaire de l’expert. Cette formule permet des échanges plus actifs et d’enrichir
les discussions. La demi-journée suivante est réservée aux mises au point.
Nous remercions tous les experts qui ont accepté de se soumettre à l’exercice de
présentation, synthèse et commentaires des cas cliniques, d’avoir aussi accepté de rédiger
des mises au point et ainsi permis la réalisation de ce cahier spécial de la Revue des
Maladies Respiratoires.
Ce séminaire a lieu dans la maison du Poumon, un symbole supplémentaire de l’accueil
que la Société de Pneumologie de Langue Française souhaite réserver aux jeunes pneumologues. Cela engendre quelques contraintes liées à un espace réduit mais les réunions
précédentes ont été un succès et nous avons donc choisi de reconduire cette formule.
*Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Maître).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 1
08/03/2016 13:21:49
2
B. Maître et al.
Nous voudrions remercier vivement les laboratoires Astra Zeneca. Ils participent à
l’organisation logistique de ces journées et à la publication de ce numéro Actualités,
montrant ainsi leur profond attachement à la formation des jeunes pneumologues. Le
partenariat établi avec la SPLF depuis la création des SAPP n’a jamais été remis en cause
et nous souhaitons les remercier de nouveau pour leur fidélité.
F. Chabot1, B. Maître2,*
de pneumologie, CHU Nancy, Hôpitaux de Brabois,
rue du Morvan, 54500 Vandoeuvre-lès-Nancy, France
2Hôpital Henri Mondor, AP-HP, 51 avenue du Maréchal
de Lattre de Tassigny, 94010, Créteil cedex, France
1Département
Liens d’intérêts
F. Chabot : Au cours des 5 dernières années, François Chabot a perçu des honoraires ou
financements pour participation à des congrès, communications, actions de formation,
participation à des groupes d’experts, travaux de recherche de la part des Laboratoires
Actelion, Almirall, Boehringer-Ingelheim, Chiesi, GSK, Novartis, de la société AGEvie et
des firmes Air Liquide, Bréas, Covidien, Fischer & Paykel, Philips, Respironics, Resmed,
Weinmann.
B. Maître : L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 2
08/03/2016 13:21:49
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 3-4
ISSN 1877-1203
Revue
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Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
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Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
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édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
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INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 1
B. Crestani1,*, C. Danel2, M.-P. Debray3, R. Borie1,
L. Tabeze1, A. Justet1, M. Aubier1, C. Taillé1
1Service de pneumologie A, Centre de compétence pour les maladies pulmonaires rares,
DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, hôpital Bichat,
46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
2Département d’anatomie pathologique, DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux
de Paris, hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
3Service de radiologie, DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux de Paris,
hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
Observation clinique
Une femme de 50 ans est adressée pour prise en charge thérapeutique d’un asthme sévère.
L’interrogatoire retrouve la notion d’une toux chronique évoluant depuis une vingtaine
d’années pour laquelle elle a consulté à de multiples reprises différents médecins. La patiente
n’a jamais fumé. Elle est enseignante dans des collèges et lycées. Elle ne signale pas d’exposition environnementale particulière. Elle n’a pas d’animal à son domicile. Les antécédents
familiaux sont sans particularité, en dehors d’une fille asthmatique. Elle ne prend aucun
traitement en dehors des traitements inhalés (corticoïdes et bronchodilatateurs) prescrits pour
sa pathologie respiratoire. La toux est apparue il y a près de 17 ans, après la naissance de sa
seconde fille. Il s’agit d’une toux sèche, diurne et nocturne, sans facteur déclenchant identifié.
Il est apparu secondairement une dyspnée d’effort qui la gêne pour les efforts modérés de la
vie courante. La toux s’est compliquée de fractures costales, d’une incontinence urinaire, de
hernies inguinales bilatérales, et a abouti à une mise en invalidité. Un reflux gastro-œsophagien
a été authentifié par une fibroscopie œsogastrique montrant une œsophagite. Elle reçoit des
inhibiteurs de la pompe à protons depuis de nombreuses années sans bénéfice apparent sur la
toux. Elle a une rhinite perannuelle ancienne. Elle est en surpoids (77 kg pour 1,68 m, soit un
indice de masse corporelle [IMC] augmenté à 28 kg/m2). Outre les inhibiteurs de la pompe à
protons, de multiples traitements ont été tentés au fil des années sans efficacité : corticoïdes
oraux, corticoïdes inhalés, bronchodilatateurs à courte et longue durée d’action, multiples
sirops antitussifs, nébulisations de lidocaïne, gabapentine, antihistaminiques, etc.
Dans le service, le bilan biologique usuel est sans anomalie. Les éosinophiles sont
mesurés à 330/mm3. Les IgE totales sont élevées à 135 kUI/L et les IgE anti-Aspergillus
sont négatives. L’électrophorèse des protéines plasmatiques est normale. Les épreuves
fonctionnelles respiratoires (EFR) effectuées par la patiente figurent dans le tableau 1 et
la radiographie thoracique à la figure 1.
*Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Crestani).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 3
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4
B. Crestani et al.
Tableau 1. Résultats des épreuves fonctionnelles
respiratoires.
CPT, L (% théo.)
6,85 (134)
CVF, L (% théo.)
2,79 (89)
VR, L (% théo.)
4,06 (229)
VR/CPT (%)
59,2
VEMS, L (% théo.)
1,03 (38)
VEMS/CVF (%)
36,7
DLCO (% théo.)
73
Figure 1. Radiographie thoracique.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 4
Questions
• Quelles sont vos hypothèses diagnostiques à ce stade ?
Une tomodensitométrie (TDM) thoracique a été effectuée dont voici les coupes les plus représentatives.
• Quelles sont les anomalies principales sur ces coupes ?
Est-­ce que cela oriente votre diagnostic ?
• Quels examens complémentaires proposez-­vous ?
Figure 2. Scanner thoracique : A et C : coupes millimétriques en
inspiration, B : coupe millimétrique en expiration, D : coupe en
mini-­MiP (maximum intensity projection).
08/03/2016 13:21:50
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 5-12
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
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EXCESSIF
Cortex sensitif
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respiratoires
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Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
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mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 1 :
Dyspnée avec trouble ventilatoire obstructif
au cours d’un syndrome de Gougerot-Sjögren
B. Crestani1,*, C. Danel2, M.-P. Debray3, R. Borie1,
L. Tabeze1, A. Justet1, M. Aubier1, C. Taillé1
1Service de pneumologie A, Centre de compétence pour les maladies pulmonaires rares,
DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, hôpital Bichat,
46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
2Département d’anatomie pathologique, DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux de
Paris, hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
3Service de radiologie, DHU FIRE, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, hôpital Bichat,
46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France.
Suite du cas clinique
Les EFR ont mis en évidence le développement progressif d’un trouble ventilatoire obstructif
sévère sans réversibilité après inhalation de bêta-2 agonistes, avec distension thoracique
(Tableau 1). La radiographie thoracique est normale (Fig. 1). Le scanner thoracique montre
un aspect en mosaïque des densités pulmonaires en rapport avec une perfusion en mosaïque,
les vaisseaux pulmonaires étant de plus petits calibres dans les zones les moins denses,
comparativement aux zones de plus hautes densités (Fig. 2A-B). Il s’y associe une quinzaine
de petits nodules, de répartition aléatoire dans les deux poumons, la plupart de 1 à 2 mm,
le plus volumineux étant mesuré à 5 mm dans le lobe inférieur droit (Fig. 2C-D). Il n’y a
pas de kyste.
Le bilan auto-immun est négatif (anticorps antinucléaires, anti-ECT y compris anti-SSA
et anti-SSB, facteur rhumatoïde, anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles
humains [ANCA]). Une immunoélectrophorèse des protéines plasmatiques et urinaires ne
détecte pas de protéine monoclonale. Une endoscopie bronchique est macroscopiquement
normale. Les biopsies bronchiques montrent une métaplasie malpighienne et quelques
polynucléaires éosinophiles dans la sous-muqueuse. Le lavage broncho-alvéolaire (LBA)
*Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Crestani).
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RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 5
08/03/2016 13:21:50
6
B. Crestani et al.
Tableau 1. Résultats des épreuves fonctionnelles
respiratoires.
CPT, L (% théo.)
6,85 (134)
CVF, L (% théo.)
2,79 (89)
VR, L (% théo.)
4,06 (229)
VR/CPT (%)
59,2
VEMS, L (% théo.)
1,03 (38)
VEMS/CVF (%)
36,7
DLCO (% théo.)
73
Figure 2. Scanner thoracique en inspiration profonde (A) puis en
expiration forcée (B) mettant en évidence un trappage gazeux. On
détecte plusieurs nodules dont le plus volumineux mesure 5 mm (C,
flèche pleine) ; les petits nodules sont plus facilement visibles en
MIP (D, tête de flèche).
Figure 1. Radiographie pulmonaire lors de l’évaluation.
est de qualité insuffisante pour une analyse cytologique. La
recherche d’agents pathogènes (bactériologie, mycologie,
bacille de Kock [BK]) dans l’aspiration bronchique et le LBA
est négative au direct et en culture. Le bilan identifie l’existence d’un syndrome de Gougerot-­Sjögren primitif jusque-­là
méconnu avec une sécheresse buccale, oculaire et vaginale
subjective, associée à une sécheresse oculaire objective (test
de Schirmer : 4 mm en 5 min à chaque œil), et une sialadénite
de grade 3 sur la biopsie de glandes salivaires accessoires.
Au total, il existe un trouble ventilatoire obstructif sévère
non réversible, accompagné d’une toux invalidante, dans le
contexte d’un syndrome de Gougerot-­Sjögren. On propose la
réalisation d’une biopsie pulmonaire devant l’existence de
micronodules au scanner thoracique, à la recherche notamment d’une hémopathie lymphoïde et/ou d’une amylose.
La biopsie pulmonaire chirurgicale est réalisée sous
vidéothoracoscopie du côté droit, avec un échantillonnage
des trois lobes. Les suites ont été simples. L’examen anatomopathologique conclut à l’existence d’une bronchiolite
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 6
constrictive avec hyperplasie diffuse des cellules neuroendocrines (en anglais, diffuse idiopathic pulmonary neuroendocrine cell hyperplasia [DIPNECH]) (Fig. 3 et 4). Il n’y a
pas d’amylose ni de dépôts de chaînes légères ; il n’y a pas
d’aspect évocateur de pneumopathie interstitielle lymphoïde
ni de bronchiolite folliculaire.
Commentaires
Cette observation singulière illustre la difficulté du diagnostic
de pathologies aussi fréquentes que la toux chronique ou un
trouble ventilatoire obstructif sévère, ainsi que le démembrement nécessaire des atteintes bronchiques au cours des
connectivites, notamment le syndrome de Gougerot-­Sjögren,
une maladie fréquente et probablement sous-­diagnostiquée
par les pneumologues.
Les bronchiolites constituent un groupe hétérogène de
maladies respiratoires caractérisées par une atteinte des
bronchioles, petites voies aériennes de moins de 2 mm de
diamètre dépourvues de cartilage et de glandes, et présentant un épithélium cylindrique simple [1,2]. Les bronchioles consistent en bronchioles terminales et bronchioles
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Cas clinique n° 1 : — Dyspnée avec trouble ventilatoire obstructif au cours d’un syndrome de Gougerot-­Sjögren
7
Figure 3. Biopsie pulmonaire. A : Lésions centroacinaires (cercles) avec épaississement des parois bronchiolaires, contrastant avec un
parenchyme pulmonaire distendu (HES × 2.5). B : Amas de cellules neuroendocrines ou tumorlet (< 5 mm) dans la paroi d’une bronchiole
(*) dont la lumière est partiellement obstruée (HES × 100). C : Encart du même territoire avec forte positivité du cytoplasme des cellules
pour la chromogranine A prouvant leur nature neuroendocrine (× 400).
la résistance des voies aériennes car leur tranche de section
est très importante par rapport à celle des voies aériennes
proximales, et il faut une atteinte diffuse des bronchioles
pour observer une altération fonctionnelle respiratoire.
Au plan anatomopathologique
Figure 4. Biopsie pulmonaire. Bronchiole avec épaississement
fibreux de la paroi associé à une hyperplasie des cellules
neuroendocrines au niveau de l’épithélium (encart).
membraneuses, qui sont de pures voies de conduction
gazeuse, et en bronchioles respiratoires, qui contiennent des
alvéoles dans leur paroi. La transition des bronchioles terminales vers les bronchioles respiratoires se traduit également
par l’effacement de la musculeuse. Cette zone de transition
est particulièrement la cible des surcharges particulaires. Les
bronchioles respiratoires, dont le diamètre est inférieur ou
égal à 0,5 mm, communiquent directement avec les canaux
alvéolaires. L’acinus, lobule pulmonaire primaire, comporte
une bronchiole terminale et deux à cinq générations de
bronchioles respiratoires. Les bronchioles participent peu à
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 7
L’atteinte histologique des bronchioles, ou bronchiolite, est
une lésion relativement fréquente au cours des maladies
respiratoires. D’un point de vue anatomopathologique, les
lésions élémentaires des bronchioles sont relativement peu
nombreuses et stéréotypées (Tableau 2) [2]. Ces lésions élémentaires peuvent être associées entre elles, et traduire un
même processus lésionnel avec des lésions d’âge différent.
La bronchiolite cellulaire, habituellement lymphocytaire
et plasmocytaire, est relativement peu spécifique, accompagnant tous les types de bronchiolites cliniques.
La bronchiolite granulomateuse se définit par la présence
de granulomes au contact des bronchioles. L’orientation
étiologique tient compte des caractéristiques anatomopathologiques des granulomes (caractère bien limité ou mal
structuré, avec ou sans nécrose, avec ou sans cellule géante
ou corps étrangers).
La bronchiolite folliculaire est caractérisée par l’existence
de follicules lymphoïdes comprimant les parois bronchiolaires
et réduisant la lumière aérienne.
La bronchiolite oblitérante se définit par la présence de
bourgeons fibro-­inflammatoires polypoïdes dans les lumières
des bronchioles, s’étendant fréquemment jusqu’aux alvéoles,
mais très exceptionnellement limités aux bronchioles.
La bronchiolite constrictive se caractérise par un épaississement fibreux de la paroi bronchiolaire qui aboutit à
une sténose irrégulière de la bronchiole avec parfois une
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8
B. Crestani et al.
dilatation kystique de la lumière limitée par une mince paroi
fibreuse [2]. Au stade ultime, la bronchiole est réduite à
une mince cicatrice fibreuse, et peut se confondre avec
l’atélectasie d’aval secondaire à la lésion bronchiolaire.
À part, la bronchiolite respiratoire du fumeur se caractérise par des dépôts d’anthracose dans la paroi bronchique et
fréquemment l’accumulation de macrophages empoussiérés
dans les alvéoles, une fibrose péribronchiolaire, qui peut
s’étendre dans les alvéoles adjacentes, et s’associe à des
distorsions anguleuses des lumières. Des lésions fibreuses
bronchiolaires peuvent s’observer chez les sujets exposés
à l’amiante, ou à des particules minérales ou métalliques
(silice, kaolin, mica, oxyde de fer, oxyde d’aluminium).
Les lésions des bronchioles peuvent s’accompagner de
lésions secondaires : bouchons muqueux, bronchiolisation du
revêtement alvéolaire en amont des sténoses bronchiolaires,
distension des espaces aériens en amont et en aval des
lésions bronchiolaires. Enfin, les lésions bronchiolaires peuvent prendre des aspects plus spécifiques du fait de lésions
plus étendues et donner des présentations radiocliniques
volontiers caractéristiques : granulomatose à cellules de
Langerhans, panbronchiolite diffuse, fibrose bronchocentrique, hyperplasie des cellules neuroendocrines [2].
Au cours du syndrome de Gougerot-­Sjögren, l’atteinte
bronchiolaire est particulièrement fréquente et parfois
sévère [3]. Il s’agit le plus souvent de bronchiolite cellulaire, avec une prédominance de lymphocytes T CD4,
éventuellement associée à une bronchiolite folliculaire [4].
Des cas de panbronchiolite diffuse ont été rapportés [5]. La
bronchiolite constrictive ne semble pas être une complication
du syndrome de Gougerot-­Sjögren [3].
Le scanner thoracique est un outil indispensable au diagnostic des maladies bronchiolaires. Il doit être d’excellente
qualité et comporter des coupes en expiration profonde afin
de mettre en évidence le trappage gazeux caractéristique.
Les bronchioles normales ne sont pas visibles sur un scanner
thoracique. Mais les bronchioles dont la paroi est épaissie
(inflammation et/ou fibrose), ou dont la lumière est dilatée
et comblée par du mucus, peuvent devenir visibles. Les
bronchioles apparaissent alors comme des opacités linéaires
centrolobulaires branchées auxquelles sont souvent associés
de petits nodules centrolobulaires en rapport avec une
inflammation péribronchiolaire réalisant au maximum un
aspect d’arbre en bourgeons (Fig. 5). L’atteinte bronchiolaire s’accompagne d’atélectasies sous-­segmentaires et
de trappage gazeux. Le trappage gazeux est objectivé sur
des coupes en expiration, qui, comparées aux coupes en
inspiration, montrent une absence d’augmentation de la
Imagerie des maladies bronchiolaires
Dans les maladies bronchiolaires obstructives, la radiographie
thoracique peut être normale, ou montrer une distension,
comme dans la bronchiolite constrictive, des nodules ou des
infiltrats réticulo-­nodulaires.
Figure 5. Aspect d’arbre en bourgeons dans une bronchiolite
folliculaire d’origine infectieuse (tuberculose pulmonaire), bien
visible en MIP.
Tableau 2. Classification anatomopathologique des lésions élémentaires bronchiolaires.
Bronchiolites
cellulaires
Peut accompagner tous les types de bronchiolite.
Bronchiolites
granulomateuses
Mycobactérioses, vascularite (polyangéite granulomateuse), sarcoïdose, PHS, syndrome de
Gougerot-­Sjögren, maladie de Crohn, pathologie d’inhalation, asthme.
Bronchiolites
folliculaires
Connectivites (notamment syndrome de Gougerot-­Sjögren et polyarthrite rhumatoïde), déficits
immunitaires acquis ou congénitaux, pneumopathies d’hypersensibilité, certaines pathologies
infectieuses.
Bronchiolites
oblitérantes
Infections (bactéries, mycoplasme, virus) ; médicaments ; inhalation ; greffe de moelle.
Transplantation pulmonaire ; radiothérapie ; connectivites (notamment syndrome de Gougerot-­
Sjögren et polyarthrite rhumatoïde) ; pneumopathie d’hypersensibilité ; pneumopathie chronique à
éosinophiles ; maladies inflammatoires chroniques de l’intestin.
Bronchiolites
constrictives
Infections (virus, mycoplasme) ; connectivites (polyarthrite rhumatoïde) ; allogreffe de cellules
souches hématopoïétiques ;
Transplantation pulmonaire ; médicaments ; exposition à des fumées, poussières, à des toxiques
inhalés ; idiopathique.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 8
08/03/2016 13:21:51
Cas clinique n° 1 : — Dyspnée avec trouble ventilatoire obstructif au cours d’un syndrome de Gougerot-­Sjögren
densité des zones « trappées », contrairement au poumon
normal dont la densité augmente physiologiquement lors de
l’expiration. L’hétérogénéité du parenchyme à l’expiration
peut parfois également être observée sur les coupes en
inspiration, du fait d’une hypoperfusion par vasoconstriction
hypoxique secondaire à l’hypoventilation des territoires avec
atteinte bronchiolaire et d’une redistribution vasculaire
préférentielle dans les territoires non atteints. On observe
un aspect en mosaïque des densités pulmonaires, dont
l’origine perfusionnelle peut parfois être reconnue lorsque
les vaisseaux pulmonaires apparaissent de plus petits calibres
dans les zones les moins denses. Ces zones claires en inspiration restent claires en expiration, du fait de l’obstruction
bronchiolaire. Enfin, le scanner peut être rigoureusement
normal, ce qui ne doit pas faire repousser le diagnostic de
bronchiolite.
Focus sur les bronchiolites constrictives
Dans la littérature en langue anglaise, même récente,
les termes Bronchiolitis obliterans ou Obliterative bronchiolitis sont parfois utilisés pour désigner la bronchiolite
constrictive, ce qui peut prêter à confusion [6‑8]. Le terme
descriptif Obliterative bronchiolitis est souvent utilisé pour
marquer le fait que les mécanismes lésionnels responsables
de l’obstruction bronchique sont multiples, associant fibrose
et inflammation, la fibrose n’étant pas la seule cause de
l’obstruction.
9
présentant un pemphigus paranéoplasique [14], ou une
maladie inflammatoire du tube digestif [15].
Lorsqu’aucune étiologie n’est identifiée, on parle de
bronchiolite constrictive idiopathique ; il s’agit d’une pathologie tout à fait exceptionnelle, qui toucherait plutôt des
femmes [16]. Retenir ce diagnostic nécessite d’avoir conduit
une enquête étiologique extrêmement précise.
Données cliniques
La dyspnée d’effort est le symptôme principal de la bronchiolite constrictive. L’intensité de la dyspnée est variable
mais la maladie peut entraîner une insuffisance respiratoire
chronique mortelle. La toux est fréquente, habituellement
non productive. L’auscultation pulmonaire peut être normale
ou retrouver un freinage expiratoire avec des sibilants si la
maladie est plus évoluée.
En fonction de l’étiologie, la dyspnée peut survenir
dans les suites immédiates d’un épisode respiratoire aigu
clairement identifié : exposition à des vapeurs toxiques, ou
maladie infectieuse par exemple. Plus souvent il survient
de façon retardée, parfois plusieurs années plus tard. Dans
certains cas, il n’existe aucun événement aigu. Le profil
évolutif est variable, en partie en fonction de la cause. Chez
les transplantés pulmonaires ou après allogreffe de cellules
souches hématopoïétiques, on observe le plus souvent une
aggravation progressive. En cas d’exposition toxique, on
observe fréquemment une stabilisation quelques années
après l’arrêt de l’exposition [10].
Étiologies
De nombreuses causes de bronchiolite constrictive et de
nombreuses associations pathologiques ont été décrites. Les
connectivites (polyarthrite rhumatoïde surtout, lupus systémique) sont parmi les plus fréquentes [9], avec les causes
infectieuses (mycoplasme, virus respiratoires, notamment
adénovirus, virus respiratoire syncytial, virus influenza et
parainfluenza), les agents toxiques inhalés (charbon activé,
dioxyde d’azote, dioxyde de soufre, ammoniac, chlore, phosgène, gaz brûlants, cendres volantes, vent de sable, crack
cocaïne, fibres de verre, diacétyle et ses dérivés utilisés
comme arômes dans l’industrie alimentaire, notamment
l’industrie du pop-­corn) ou absorbés (papavérine contenue
dans le jus de Sauropus adrogynus) [1,8,10]. Certains médicaments ont été associés au développement d’une bronchiolite
constrictive : nimésulide (un anti-­inflammatoire non stéroïdien), sels d’or, D-­pénicillamine, rituximab, sulfaméthoxypyridazine (sulfamide à usage vétérinaire en France mais utilisé
en médecine humaine dans certains pays asiatiques), talc,
tiopronine, topotécan (liste non exhaustive établie d’après
les catégories IV.c et IV.n du site www.pneumotox.org). La
bronchiolite constrictive peut se développer dans le contexte
d’une transplantation pulmonaire ou cardio-­pulmonaire ; seul
le poumon greffé est atteint, et il s’agirait d’un phénomène
de rejet chronique. Elle peut compliquer une allogreffe de
cellules souches hématopoïétiques ; il s’agirait alors d’une
réaction du greffon contre l’hôte [8,11‑13]. Une bronchiolite constrictive a également été décrite chez des patients
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 9
Imagerie
L’imagerie thoracique est évocatrice lorsqu’elle montre un
trappage gazeux caractéristique. Elle peut être faussement
rassurante. En effet, dans une série de 38 patients avec
bronchiolite constrictive prouvée par biopsie chez des militaires américains ayant servi en Irak ou en Afghanistan, la
radiographie thoracique était normale dans tous les cas. Le
scanner thoracique était également le plus souvent normal,
et ne montrait un trappage gazeux que dans 15 % des cas
seulement [17].
Altérations fonctionnelles respiratoires
au cours des bronchiolites
Les EFR peuvent être normales ou montrer un trouble
ventilatoire restrictif, obstructif, ou mixte [10]. Dans des
séries récentes de bronchiolite constrictive prouvée histologiquement, les EFR sont le plus souvent normales [10]. Ainsi,
dans la série précédente de 38 patients avec bronchiolite
constrictive prouvée par biopsie, les EFR étaient normales
dans 34 % des cas. Quand elles existaient, les anomalies
consistaient en une diminution isolée de la diffusion libre de
CO (DLCO) (50 % des cas), un trouble ventilatoire restrictif
isolé (8 %), un trouble ventilatoire obstructif isolé (5 %), ou
08/03/2016 13:21:51
10
un trouble ventilatoire mixte (3 %) [17]. Étonnamment, dans
cette série, les tests fonctionnels d’exercice montraient une
réserve ventilatoire normale [17]. Lorsqu’il existe, le trouble
ventilatoire obstructif est habituellement non réversible,
mais il existe des cas d’amélioration après inhalation d’agonistes bêta-­2 adrénergiques ou corticoïdes oraux.
Diagnostic
Le diagnostic de certitude de bronchiolite constrictive
nécessite une biopsie pulmonaire chirurgicale. La biopsie
transbronchique est de peu de sensibilité. La place de la
cryobiopsie n’est pas établie. La décision de réaliser une
biopsie chirurgicale dépend du contexte étiologique. La
biopsie chirurgicale est discutable lorsque le tableau radio-­
clinique est caractéristique dans un contexte étiologique bien
défini. Ainsi, elle n’est jamais réalisée chez les transplantés
pulmonaires ou après allogreffe de cellule souches hématopoïétiques lorsque les tableaux radio-­clinique et fonctionnel
respiratoire sont caractéristiques.
Traitement
Le traitement de la bronchiolite constrictive est d’abord
préventif en évitant les expositions professionnelles et
environnementales. Lorsque le diagnostic a été porté, il
est impératif d’éliminer la cause lorsqu’elle est identifiée
(agent toxique, médicament). L’utilisation des corticoïdes
par voie générale, seuls ou en association avec les immunosuppresseurs, se discute en fonction des étiologies. Dans
les connectivites, il a été décrit des améliorations après
anti-­TNF ou cyclophosphamide et il est légitime de tester
leur efficacité [9,18]. En revanche, il semble qu’ils soient
inefficaces dans la bronchiolite constrictive induite par le
diacétyle [19]. L’utilisation de corticoïdes inhalés associés
à des bronchodilatateurs à longue durée d’action apporte
un bénéfice sur la fonction respiratoire après allogreffe de
cellules souches hématopoïétiques [20]. L’azithromycine
diminue le risque de développer une bronchiolite obstructive
après transplantation pulmonaire [21] ; son efficacité dans
les autres formes de bronchiolite constrictive est inconnue,
mais on sait que les macrolides ont une efficacité parfois
spectaculaire dans des formes particulières de bronchiolite,
surtout la panbronchiolite diffuse [22] mais également des
bronchiolites cellulaires associées aux connectivites [3]. La
transplantation pulmonaire est parfois le seul traitement
possible dans les formes évoluées de bronchiolite constrictive, quelle que soit l’étiologie.
Hyperplasie pulmonaire diffuse
idiopathique des cellules neuroendocrines
L’hyperplasie des cellules neuroendocrines est fréquemment observée au cours des maladies respiratoires chroniques [23]. L’hyperplasie pulmonaire diffuse idiopathique
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 10
B. Crestani et al.
des cellules neuroendocrines (DIPNECH dans la littérature
en langue anglaise) est une lésion anatomopathologique qui
peut prendre différents aspects anatomopathologiques :
prolifération généralisée de cellules neuroendocrines
dispersées ; petits nodules ; prolifération linéaire de cellules neuroendocrines pulmonaires. Dans tous les cas, ces
proliférations restent confinées à l’épithélium bronchique
et bronchiolaire [24]. Lorsque la prolifération franchit la
membrane basale, on parle de tumorlets, qui peuvent être
localisés ou diffus. Lorsque ces nodules dépassent 5 mm de
diamètre, on les qualifie de tumeurs carcinoïdes. Il s’agit
d’une condition prénéoplasique, qui peut se compliquer
de tumeurs carcinoïdes typiques de faibles grades ou
atypiques de grades intermédiaires [25]. Il n’y a pas de
critère clinique et histologique consensuel pour définir la
DIPNECH bien que certains critères quantitatifs aient été
récemment proposés [26]. Il semble que les caractéristiques
cytologiques des cellules neuroendocrines soient différentes
dans l’hyperplasie réactionnelle des cellules neuroendocrines
et dans la DIPNECH [27].
L’association à une bronchiolite constrictive a été décrite
initialement par Aguayo et al. [28]. Moins d’une centaine
de cas ont été décrits depuis cette date [24,29‑31]. Une
DIPNECH peut être détectée dans le bilan d’une autre
affection, sans symptôme respiratoire. L’association à une
bronchiolite constrictive donne un tableau radio-­clinique
assez caractéristique. Il s’agit généralement de femmes
(4 à 7 femmes pour 1 homme) d’âge moyen (compris entre
31 et 67 ans dans deux séries récentes), généralement non
fumeuses, qui présentent une toux chronique (généralement
depuis plus de 5 ans), généralement associée à une dyspnée d’effort [24,29,31,32]. Les EFR montrent un trouble
ventilatoire obstructif avec distension, habituellement non
réversible après bronchodilatateurs. La DLCO est généralement peu abaissée. Le trouble ventilatoire obstructif tend à
s’aggraver chez certains patients tandis qu’il demeure stable
chez d’autres. Dans la série la plus importante actuellement
publiée (30 patients) le volume expiratoire maximal en une
seconde (VEMS) au diagnostic était abaissé à 50 % de la
valeur prédite, le VR augmenté à 223 %, tandis que la DLCO
était abaissée à 75 % [24]. Le scanner thoracique montre
de façon presque constante des nodules pulmonaires, bien
limités, dont le diamètre est généralement compris entre 5
et 10 mm, en nombre variable, parfois innombrables [32,33].
Les nodules peuvent être périphériques ou à prédominance
péribronchovasculaire, et prédominent dans les parties
inférieures et moyennes des poumons. Un trappage gazeux
est pratiquement constamment retrouvé, avec un aspect
en mosaïque. Un épaississement des parois bronchiques
est fréquent tandis que les bronchectasies sont rares. Des
zones d’atélectasie périphérique sont fréquentes. Le scanner
thoracique peut exceptionnellement être normal [29,33].
Il y a peu de données concernant le lavage broncho-­
alvéolaire. Une lymphocytose (30 %) était détectée dans
deux cas de la série de Davies et al. [29]. L’hyperplasie des
cellules neuroendocrines peut être mise en évidence sur les
biopsies transbronchiques (30 % des patients dans la série de
Carr et al.), mais si elle est absente, une biopsie pulmonaire
chirurgicale est nécessaire [24]. La biopsie transpariétale
d’un nodule peut montrer une tumeur carcinoïde et peut
suffire à confirmer le diagnostic de DIPNECH lorsque le
08/03/2016 13:21:51
Cas clinique n° 1 : — Dyspnée avec trouble ventilatoire obstructif au cours d’un syndrome de Gougerot-­Sjögren
tableau radioclinique est caractéristique [24]. Le dosage
sanguin de marqueurs associés aux tumeurs neuroendocrines (chromogranine A) constitue seulement un élément
d’orientation [24].
L’évolution de la maladie respiratoire est mal connue.
Les séries disponibles montrent que le trouble ventilatoire
obstructif est le plus souvent stable, mais une aggravation
progressive et le développement d’une insuffisance respiratoire chronique sont possibles. L’évolution de la prolifération
neuroendocrine est mal connue. Des nodules augmentant de
taille doivent être prélevés car outre les tumeurs carcinoïdes,
l’association DIPNECH et adénocarcinome bronchique primitif
a également été rapportée sans qu’on sache s’il s’agit d’une
simple coïncidence [29‑33].
Le traitement de la DIPNECH n’est pas codifié. Les
patients reçoivent généralement des corticoïdes inhalés et
des bronchodilatateurs à longue durée d’action, sans qu’on
sache si ce traitement est bénéfique. Les corticoïdes oraux
ne semblent pas améliorer le trouble ventilatoire obstructif
sauf dans de rares cas [29]. L’utilisation d’octréotide (un
analogue de la somatostatine) a permis d’améliorer la
toux et de réduire les concentrations de chromogranine A
sérique chez certains patients [24,31]. L’effet sur la fonction
respiratoire est incertain. Comme dans les autres tumeurs
neuroendocrines, la voie mTOR est activée dans les cellules
neuroendocrines de la DIPNECH [34], et l’utilisation d’un
inhibiteur de cette voie a été proposée [35]. La transplantation pulmonaire a été réalisée avec succès sans récidive
de la maladie [29,36].
L’errance diagnostique est fréquente dans toutes les
séries de la littérature, et le diagnostic d’asthme a souvent
été porté à tort pendant de nombreuses années avant que
la DIPNECH ne soit identifiée. La patiente décrite dans cette
observation a été traitée par octréotide à libération prolongée pendant 18 mois, sans bénéfice sur les signes fonctionnels
et la fonction respiratoire, puis par sirolimus (rapamycine,
un inhibiteur de la voie mTOR), pendant 6 mois, également
interrompu pour inefficacité.
Les liens physiopathologiques entre la prolifération des
cellules neuroendocrines et développement de la bronchiolite constrictive sont incertains. Les cellules neuroendocrines produisent des médiateurs profibrosants tels que la
bombésine ou la sérotonine [27,37,38] qui pourraient être
responsables du développement de la fibrose péribronchique.
L’association à des formes génétiques de prolifération de
cellules neuroendocrines (néoplasie endocrinienne multiple
de type 1 [NEM 1]) a été décrite [29].
[3]
[4]
[5]
[6]
[7]
[8]
[9]
[10]
[11]
[12]
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Liens d’intérêts
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet
article.
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mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 2
J.-L. Vachiéry
Département de cardiologie, clinique des maladies vasculaires pulmonaires,
cliniques universitaires de Bruxelles, hôpital Érasme, 808, route de Lennick,
1070 Bruxelles, Belgique
Observation clinique
Histoire médicale
Un homme né en 1961 est adressé à la consultation de cardiologie pour une dyspnée
inexpliquée. Il présente l’association d’une hypertension artérielle systémique, d’une
hypercholestérolémie, d’un diabète de type II et d’une obésité sévère (IMC > 40 kg/m²).
Il n’a jamais fumé, mais rapporte une prise de « coupe-faim » entre 1985 et 1990 sous la
forme de prescriptions magistrales contenant des extraits thyroïdiens, de la digitaline, un
diurétique et de la dexfenfluramine. Il exerce la profession de dermatologue de manière
très active.
Son histoire médicale débute en février 2011 par un épisode de flutter auriculaire,
traité par cardioversion électrique. Le bilan cardiologique réalisé à l’époque est strictement normal, ce qui est confirmé en janvier 2012 lors d’un examen préopératoire
pour un remplacement de la hanche. L’intervention se déroule sans incident, mais le
patient présente en postopératoire un épisode transitoire de désaturation artérielle
en oxygène dont l’origine est attribuée à une infection bronchique. Depuis mars 2012,
il signale une dyspnée progressivement croissante, à la montée de trois étages, puis
après 200 m sur terrain plat. Il est examiné pour la première fois à la consultation de
pneumologie au mois d’avril 2012. On note une saturation de pouls en oxygène abaissée
(SpO2 à 92 %), un trouble ventilatoire restrictif rapporté à l’obésité et une réduction de
la capacité de diffusion rapportée au volume alvéolaire à 60 % des valeurs prédites. Une
polysomnographie révèle un syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) sévère,
traité par pression positive continue. Au mois d’août 2012, on suspecte l’apparition
d’une polyglobulie (hématocrite 55 %) qualifiée d’inexpliquée et traitée par saignée. La
gazométrie artérielle montre à ce moment un pH à 7,45, une PaCO2 à 46 mmHg et une
PaO2 à 59 mmHg à l’air ambiant. Une oxygénothérapie de longue durée est prescrite
mais les plaintes s’aggravent en décembre 2012 avec une SpO2 à 91 % sous 2 L/min
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (J.-L. Vachiéry).
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08/03/2016 13:21:52
14
J.-­L. Vachiéry
d’oxygène, chez un patient alors avec une dyspnée classe
fonctionnelle New York Heart Association 3 (NYHA). Le
traitement médical comprend de l’aspirine, de l’oxygène,
un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine,
un inhibiteur calcique, de la simvastatine et de l’insuline.
Examen physique
Dans ce contexte, le patient est examiné à la consultation de
cardiologie. L’examen physique confirme la présence d’une
obésité morbide (indice de masse corporel [IMC] : 48 kg/m²).
La pression artérielle est de 145/85 mmHg, la fréquence
cardiaque de 70 battements par minute. L’auscultation
cardiaque et pulmonaire est non contributive. On note la
présence d’œdèmes des membres inférieurs remontant
jusqu’à mi-­mollets, ainsi qu’une dermite ocre.
à 60 %, une capacité pulmonaire totale à 75 % des valeurs
prédites et un KCO à 50 % des valeurs prédites. La scintigraphie pulmonaire ne montre pas d’anomalies de perfusion.
La gazométrie à l’air ambiant n’est pas modifiée. Le scanner
thoracique révèle un léger emphysème aux sommets, des
images en verre dépoli sans ligne septale et une dilatation
du tronc de l’artère pulmonaire. Un cathétérisme cardiaque droit est réalisé (Fig. 1) et retrouve : une pression
artérielle pulmonaire moyenne (PAPm) à 61 mmHg, avec
une pulmonary arterial wedge pressure (PAWP) estimée à
16 mmHg sur la base de valeurs moyennées, un gradient
diastolique pulmonaire (DPG) est calculé à 26 mmHg. Les
résistances vasculaires pulmonaires (RVP) sont calculées
à 5,45 UW, le débit cardiaque est à 8,25 L/min pour un
index à 2,6 L/min/m² La pression auriculaire droite est
mesurée à 15 mmHg.
Questions
Examens complémentaires
L’électrocardiogramme de repos révèle une déviation axiale
gauche, un rythme sinusal régulier et un aplatissement des
ondes T dans les dérivations précordiales.
L’échocardiographie, dont la qualité est limitée par
la corpulence du patient, montre une pression artérielle
pulmonaire systolique (PAPs) estimée à 60 mmHg, associée à
une dilatation du ventricule droit. Le dosage de NT Pro-­BNP
s’inscrit dans les valeurs normales (< 150 pg/mL).
Sur base de ces éléments, le patient est admis pour
réaliser une mise au point complémentaire, comprenant
un cathétérisme cardiaque droit. La fonction pulmonaire
est caractérisée par une capacité vitale à 80 % des valeurs
prédites, un volume expiratoire maximal en une seconde
(VEMS) à 75 % des valeurs prédites, un rapport de Tiffeneau
PAP
• Peut-­on poser un diagnostic de certitude sur la cause
de l’hypertension pulmonaire ?
• Quels éléments manquants permettraient de progresser dans la conclusion ?
• Quelle serait votre stratégie thérapeutique ?
Les tracés originaux des PAP, de remplissage gauche
(PAWP) et droite (résistance artérielle pulmonaire [RAP])
sont représentés. On note une fluctuation respiratoire importante et un gradient diastolique (PAPd [pression pulmonaire
artérielle diastolique]-­PAWP) élevé. La pression auriculaire
droite est augmentée à 15 mmHg. L’index cardiaque est de
3,2 L/min/m² et la RVP calculée à 5,45 UW sur base d’une
valeur moyennée de PAWP de 16 mmHg.
PAWP
RAP
0,5-4C
100
50
± 25 mmHg
15 mmHg
0
Paper speed 12,5 mm/s
Figure 1. Cathétérisme cardiaque droit.
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Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 2 :
Interactions cœur-poumons – hypertension
pulmonaire et maladies cardiaques gauches
J.-L. Vachiéry
Département de cardiologie, clinique des maladies vasculaires pulmonaires,
cliniques universitaires de Bruxelles, hôpital Érasme, 808, route de Lennick,
1070 Bruxelles, Belgique
Commentaires
Peut-on poser un diagnostic de certitude sur la cause
de l’hypertension pulmonaire ?
Il n’est pas possible, sur base de la présentation clinique et des examens réalisés, de
poser un diagnostic définitif. Cependant, l’évaluation de ce patient illustre un certain
nombre de points importants. En effet, la première partie (non invasive) de la mise au
point permet de déterminer une probabilité d’hypertension pulmonaire (HTP). S’il existe
des causes évidentes de dyspnée, on note une aggravation progressive des symptômes et
de l’hypoxémie qui suggèrent l’apparition d’un phénomène nouveau. L’échocardiographie
de repos montre une pression artérielle pulmonaire systolique (PAPs) estimée à > 45 mmHg
ainsi que des signes de dysfonction cardiaque droite. Sur ces bases, il existe une probabilité
élevée d’HTP [1]. En effet, les nouvelles recommandations des sociétés européennes de
cardiologie et de pneumologie proposent un algorithme diagnostic basé sur :
1) la présence de symptômes compatibles avec un diagnostic d’HTP ;
2) une probabilité échocardiographique comprenant une estimation de la PAPs et la présence d’autres signes d’HTP (dilatation des cavités droites, épanchement péricardique,
indices de dysfonction ventriculaire droite) ;
3) enfin, une probabilité d’HTP basée sur la combinaison des deux éléments précédents.
En l’absence de facteurs de risque d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ou d’hypertension pulmonaire postembolique (HTPPE), le cathétérisme cardiaque est recommandé face à
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16
J.-­L. Vachiéry
ce phénomène « actif » font l’objet d’intenses débats, tout
d’abord en raison de l’absence d’homogénéité des termes
utilisés [1,3,4]. De plus, il existe une confusion entre la
manière de caractériser un phénomène pathophysiologique
et le caractère prédictif des données hémodynamiques. Les
recommandations des sociétés savantes proposent aujourd’hui
de distinguer l’HTP postcapillaire isolée (IpcPH) de l’HTP postcapillaire combinée à une composante précapillaire (CpcPH)
sur la base du gradient diastolique (PAPm-­PAPO) et/ou de la
résistance vasculaire pulmonaire (RVP) (Tableau 2) [1,3,4].
Dans l’insuffisance cardiaque, une analyse de cohorte récente
rapporte une prévalence de CpcPH de l’ordre de 12 % dans
les dysfonctions systoliques et de 13 % dans l’insuffisance
cardiaque à fraction d’éjection préservée [5]. Dans les
deux cas, la présence d’une composante précapillaire est
associée à une réduction de la survie, comparée à une forme
dite « isolée » [5]. Les liaisons cœur-­poumons, dangereuses
s’il en est, contribuent certainement au développement de la
composante précapillaire : le syndrome d’apnées du sommeil
(SAS), la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO),
mais aussi l’embolie pulmonaire et l’HTPPE y jouent un rôle
confondant qu’il convient d’identifier [3,5].
Une des clés de la distinction entre HTP pré-­et postcapillaire est donc la mesure précise de la pression de remplissage
gauche par l’estimation de la pression auriculaire gauche
via le tracé d’occlusion de l’artère pulmonaire qui reflète
la pression télé-­diastolique du ventricule gauche (PTDVG).
Cette mesure doit être réalisée dans des conditions optimales
de remplissage (soit en dehors des épisodes de décompensation cardiaque) et de préférence en fin d’expiration afin
de limiter la contribution de la pression alvéolaire sur les
pressions intravasculaires. La présence de mouvements
respiratoires importants et donc à l’origine de variations de
pression intra-­thoracique, ainsi que certaines comorbidités
(obésité, BPCO) peuvent amener à des erreurs de mesure
qui peuvent conduire à des diagnostics erronés [1,3,4]. En
cas de doute, il est recommandé de procéder à une mesure
directe de la PTDVG par cathétérisme cardiaque gauche [1].
Dans le cas de notre patient, on notera une mesure de PAWP
moyennée à 16 mmHg, mais des mouvements
respiratoires qui empêchent d’obtenir une
mesure fiable permettant de poser un diagnostic définitif. Il est donc nécessaire de
RAP
pousser les investigations avant de prendre
une décision thérapeutique.
0,5-4C
une probabilité élevée d’HTP. En outre, les patients présentant
une probabilité intermédiaire d’HTP et des facteurs de risques
devraient également bénéficier d’un bilan invasif (Tableau 1).
L’algorithme diagnostique reposera ensuite sur la réalisation
d’examens complémentaires permettant de confirmer la
présence ou non d’une cause cardiaque ou respiratoire d’HTP.
Il conviendra également d’adresser les patients présentant
une HTP sévère, à un centre spécialisé dans la prise en charge
des maladies vasculaires pulmonaires (Centre de Compétence
régional ou Centre de référence national).
Si l’échocardiographie permet d’orienter le diagnostic
et d’évaluer la fonction cardiaque droite et gauche, elle
ne suffit pas à poser un diagnostic d’HTP : le cathétérisme
cardiaque droit reste l’examen de choix pour confirmer le
diagnostic et asseoir les décisions thérapeutiques qui découlent de la démarche diagnostique [2]. Cet examen permet
de recueillir l’ensemble des variables d’intérêt, comprenant
l’estimation de la pression auriculaire gauche par la mesure
de la pression d’occlusion de l’artère pulmonaire (PAPO ou
PAWP (pulmonary artery wedge pressure)). La classification
hémodynamique de l’hypertension pulmonaire distingue une
forme précapillaire (pression artérielle pulmonaire moyenne
[PAPm] ≥ 25 mmHg et PAWP ≤ 15 mmHg) d’une forme post-­
capillaire (PAWP > 15 mmHg). Cette dernière peut être
retrouvée dans 50‑100 % des cas chez les patients souffrant
d’insuffisance cardiaque gauche ou dans les maladies valvulaires. Cependant, elle n’est dans la grande majorité des cas
qu’un « symptôme » de la pathologie cardiaque [3,4]. L’HTP
des maladies cardiaques gauches est essentiellement passive,
par élévation de la PAWP et donc de la pression auriculaire
gauche en réponse à une dysfonction diastolique, une insuffisance mitrale et à une perte de la compliance de l’oreillette
gauche [3,4]. Une faible proportion de patients présente une
élévation exagérée de la PAPm qui n’est pas uniquement
expliquée par un phénomène passif mais par un enchaînement
de mécanismes conduisant à une vasoconstriction et qui peut
conduire à un remodelage vasculaire (par hypertrophie de
la média) représentant une maladie vasculaire pulmonaire
(Fig. 2). La terminologie et la définition hémodynamique de
PAP
PAWP
100
Quels éléments manquants
permettraient de progresser
dans la conclusion ?
50
± 25 mmHg
15 mmHg
0
Paper speed 12,5 mm/s
Figure 1. Cathétérisme cardiaque droit.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 16
Le diagnostic différentiel entre l’HTAP
et les HTP liées aux maladies cardiaques
ou respiratoires repose sur les éléments
suivants :
1) la présentation clinique et le phénotype
du patient ;
2) les données échocardiographiques et
fonctionnelles ;
08/03/2016 13:21:53
Cas clinique n° 2 : — Interactions cœur-­poumons – hypertension pulmonaire et maladies cardiaques gauches
17
Tableau 1. Probabilité d’HTP et indication
de cathétérisme cardiaque (d’après [1]).
Tableau 2. Définitions hémodynamiques de l’HTP
postcapillaire (d’après [1]).
Probabilité d’HTP
(écho)
Absence de facteurs de risque
d’HTAP/HTPPE
Définition
Caractéristique
Faible
HTP postcapillaire
Envisager un diagnostic alternatif
PAPm > 25 mmHg et
PAWP > 15 mmHg
Intermédiaire
Envisager un diagnostic alternatif
Suivi échocardiographique
Forme isolée
DPG < 7 mmHg et/ou RVP ≤ 3 UW
Élevée
Forme combinée
DPG ≥ 7 mmHg et/ou RVP > 3 UW
Indication de mise au point d’HTP
avec cathétérisme cardiaque droit
Probabilité d’HTP
(écho)
Présence de facteurs de risque
d’HTAP/HTPPE
Faible
Envisager un suivi
échocardiographique
Intermédiaire
Élevée
Envisager une mise au point
complète avec cathétérisme
cardiaque droit
Indication de mise au point d’HTP
avec cathétérisme cardiaque droit
3) la contribution de la circulation pulmonaire à la limitation à l’effort ;
4) les données hémodynamiques invasives.
La présence d’un syndrome métabolique, l’âge et une
histoire de maladie cardiaque gauche sont autant d’éléments
en faveur d’un diagnostic d’HTP compliquant une affection
cardiaque. Ceci est renforcé par la présence de signes
échocardiographiques suggérant une maladie structurelle
cardiaque et d’éléments en faveur d’une élévation des
pressions de remplissage gauche (Tableau 3). La présence
d’une dilatation de l’oreillette gauche est invariablement
la signature d’une composante cardiaque gauche expliquant
l’HTP. Dans la majorité des cas, les symptômes et la limitation
de la capacité d’effort des maladies respiratoires est d’origine
ventilatoire, ce qui doit être évalué par une exploration
fonctionnelle d’exercice [1,6]. Il existe cependant un faible
nombre de patients qui présentent une limitation d’origine
cardiaque expliquée par la présence d’une HTP sévère [6].
L’ergospirométrie est donc un examen essentiel à la démarche
diagnostique et l’évaluation fonctionnelle des HTP.
Le diagnostic différentiel de l’HTP repose toujours sur
l’évaluation invasive par cathétérisme cardiaque droit. Cet
examen doit être réalisé dans des conditions optimales de
remplissage (soit en dehors d’une phase d’insuffisance cardiaque décompensée) et requiert une attention particulière
dans l’analyse des tracés de pression [1,3,4]. Ceci concerne
plus particulièrement la mesure de la PAWP qui peut être
sous l’influence des mouvements respiratoires, justifiant
parfois une mesure directe de la PTDVG (voir plus haut),
principalement chez les patients présentant des facteurs
de risque cardiovasculaire chez lesquels une angiographie
coronaire est parfois nécessaire [1,3,4].
L’évaluation hémodynamique est systématiquement
réalisée au repos, mais un test de remplissage ou une étude
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 17
Passive ↑ in mPAP
•
•
•
•
Loss of LA compliance
Diastolic dysfunction
Pulsatile load by PAWP
Exercise-induced MR
Added component
Further ↑ in mPAP
•
•
•
•
Endothelial dysfunction
↑ No ↑ and ET-1 activity
Vasoconstriction
BNP induced vasodilation
Significant PVS
RV failure
Death
• Vascular remodelling
• Decreased vascular compliance
• Blunted response to vasodilators
Figure 2. Mécanisme de l’HTP des cardiopathies gauches (d’après [3]).
Légende de la figure 2 : LA : Left Atrium ; PAWP : Pulmonary Artery
Wedge Pressure ; MR : Mitral Regurgitation ; NO : Nitric Oxide ;
ET-1 : Endothelin 1 ; BNP : b-Type Natriuretic Peptide ; PVD :
Pulmonary Vascular Disease ; RV : Right Ventricule.
hémodynamique à l’effort peuvent parfois s’avérer utiles
en cas de doute, afin d’identifier une élévation anormale
de la PAWP. Cependant, l’absence de standardisation des
méthodes, la définition d’une réponse normale et la difficulté
technique (en ce qui concerne le test à l’effort) ne permettent pas de recommander ces tests de provocation de la
circulation pulmonaire en pratique clinique courante [1,3,4].
Des données récentes montrent que la réponse à un test
de remplissage dépend de l’âge, du sexe et de la quantité
de liquide administrée [7]. Dans le cas de notre patient,
l’évaluation a été complétée par un cathétérisme cardiaque
gauche et une épreuve d’effort avec mesure de VO2 max qui
permettaient de poser un diagnostic d’HTP postcapillaire
combinée à une composante précapillaire, cette dernière
pouvant être en partie expliquée par la présence d’une
hypoxémie chronique et d’un SAS. Le cathétérisme cardiaque gauche permet de mesurer une PTDVG > 20 mmHg,
permettant de confirmer le diagnostic de CpcPH. L’épreuve
d’effort avec VO2 max montre une ventilation maximale
n’atteignant pas 60 % de la ventilation maximale volontaire
calculée à partir du VEMS, ce qui permet d’exclure une cause
ventilatoire. En outre, une VO2 au pic d’effort < 13 ml/kg/
min et une élévation de la pente ventilation/production de
CO2 (VE/VCO2) > 45 témoignent d’une limitation cardiaque
à l’effort par le biais de l’HTP.
Quelle serait votre stratégie
thérapeutique ?
La première démarche de la prise en charge d’une HTP
postcapillaire (isolée ou non) est de s’assurer :
08/03/2016 13:21:53
18
J.-­L. Vachiéry
Tableau 3. Diagnostic différentiel non invasif de l’HTP des maladies cardiaques gauches.
Présentation clinique
Échocardiographie
Autres éléments
Âge > 65 ans
Pathologie cardiaque structurelle :
valvulopathie, dilatation de l’OG > 42 mm;
dysfonction/hypertrophie VG
Anomalies ECG : HVG, BBG, ondes Q,
arythmie auriculaire
Symptômes d’insuffisance
cardiaque (orthopnée)
Indices Doppler d’élévation des pressions
de remplissage G
Radiographie/CT thoracique : lignes de
Kerley, épanchement pleural, œdème
pulmonaire
Syndrome métabolique
Absence de signes d’atteinte ventriculaire
droite ou d’épanchement péricardique
Histoire de maladie
cardiaque (fibrillation
auriculaire, valvulopathie,
coronaropathie)
Indices combinés : taille de l’OG, temps
d’accélération pulmonaire, estimation de
PAWP
Légende : OG : oreillette gauche ; ECG : électrocardiogramme ; HVG : hypertrophie ventriculaire G ; BBG : bloc de branche gauche.
Tableau 4. Essais cliniques randomisés contre placebo dans l’HTP des maladies cardiaques gauches (adapté
d’après [3,4]).
Agent
N
Durée
Critère de jugement primaire
Résultat
16 semaines
PAPm corrigée par rapport au placebo
Pas d’effet
Insuffisance cardiaque systolique
Riociguat (8)
201
Insuffisance cardiaque diastolique
Riociguat (9)
48
16 semaines
PAPm corrigée par rapport au placebo
Pas d’effet
Sildénafil (10)
52
12 semaines
PAPm corrigée par rapport au placebo
Pas d’effet
1) que l’évaluation hémodynamique a été réalisée dans des
conditions stables sur le plan clinique, en veillant à améliorer la balance hydrique si cela s’avère nécessaire ;
2) que le patient bénéficie du meilleur traitement de l’affection responsable ;
3) qu’il n’existe pas de facteur confondant ou de comorbidité pouvant contribuer à l’HTP.
La prévalence élevée de pathologies cardiovasculaires
dans les maladies respiratoires impose les mêmes précautions
pour les HTP liées à la BPCO, au SAS et aux pathologies
interstitielles.
Certaines cibles thérapeutiques qui ont fait le succès du
traitement de l’HTAP ont été testées dans le traitement de
l’insuffisance cardiaque gauche, qu’elle soit liée ou non à
une altération de la fonction systolique [3,4]. C’est le cas
des antagonistes des récepteurs de l’endothéline (bosentan,
darusentan, tezosentan), d’inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (iPDE5, sildénafil) et de l’époprosténol [3,4].
Aucune de ces études n’a atteint le critère de jugement
primaire. De plus, aucune de ces études n’a inclus une stratégie de stratification des sujets en fonction de la présence
ou non d’une HTP. La réalité est assez frappante : moins de
300 patients présentant une HTP secondaire à une maladie
cardiaque gauche ont été inclus dans des essais cliniques
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 18
randomisés contrôlés (Tableau 4) contre dix fois plus au
cours de la même période dans les essais cliniques dans
l’HTAP [1,8‑10] ! Il n’y a donc aujourd’hui aucune preuve
d’efficacité et de sécurité permettant de recommander
l’utilisation d’un traitement validé de l’HTAP pour soigner
un patient souffrant d’une HTP liée à une maladie cardiaque
gauche [1,3,4].
Pour notre patient, la recommandation principale fut
de réaliser une chirurgie de réduction gastrique, ce qui a
conduit à faire disparaître le diabète, contrôler l’hypertension artérielle, corriger le SAS… et réduire considérablement
l’HTP.
Liens d’intérêts
Au cours des 5 dernières années, Jean-Luc Vachiéry a perçu
des honoraires ou financements pour participation à des
congrès, participation à des groupes d’experts, de la part des
Laboratoires Actelion Pharmaceuticals, Bayer HealthCare,
Merck.
Au cours des 5 dernières années, Jean-Luc Vachiéry a été
investigateur principal d’études cliniques promues par le
Laboratoire Actelion Pharmaceuticals.
08/03/2016 13:21:53
Cas clinique n° 2 : — Interactions cœur-­poumons – hypertension pulmonaire et maladies cardiaques gauches
Références
[1] Galiè N, Humbert M, Vachiéry JL, Gibbs S, Lang I, Torbicki A,
et al. 2015 ESC/ERS guidelines for the diagnosis and treatment of pulmonary hypertension. Eur Respir J 2015;46:903‑75.
[2] Forfia P, Vachiéry JL. Echocardiography in pulmonary hypertension. Am J Cardiol 2012;110:16‑24.
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Am Coll Cardiol 2013;62:D100‑8.
[4] Rosenkranz S, Gibbs JS, Wachter R, De Marco T, Vonk-­
Noordegraaf A, Vachiéry JL. Left ventricular heart failure and
pulmonary hypertension. Eur Heart J. 2015 Oct 27. pii:ehv512.
[5] Gerges M, Gerges C, Pistritto AM, Lang MB, Trip P, Jakowitsch J,
et al. Lang IM. Pulmonary Hypertension in Heart Failure. Epidemiology, right ventricular function, and survival. Am J Respir Crit Care Med 2015;192:1234‑46.
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RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 19
19
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Bhella PS, et al. Hemodynamic responses to rapid saline loading: the impact of age, sex, and heart failure. Circulation
2013;127:55‑62.
[8] Bonderman D, Ghio S, Felix SB, Ghofrani HA, Michelakis E,
Mitrovic V, et al, for the LEPHT Study Group. Riociguat for
patients with pulmonary hypertension caused by systolic left
ventricular dysfunction: A phase IIb double-­blind, randomized,
placebo-­controlled, dose ranging hemodynamic study. Circulation 2013;128:502‑11.
[9] Bonderman D, Pretsch I, Steringer-­Mascherbauer R, Jansa P,
Rosenkranz S, Tufaro C, et al. Acute hemodynamic effects of Riociguat in patients with pulmonary hypertension associated with
diastolic heart failure (DILATE-­1): A randomized, double-­blind,
placebo-­controlled, single-­dose study. Chest 2014;146:1274‑85.
[10] Hoendermis ES, Liu LCY, Hummel YM, van der Meer P, de Boer
RA, van Veldhuisen DJ, et al. Effects of sildenafil on invasive
hemodynamics and exercise capacity in heart failure patients
with preserved ejection fraction and pulmonary hypertension:
A randomized controlled trial. Eur Heart J 2015;36:2565‑73.
08/03/2016 13:21:53
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 20-22
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
Disponible en ligne sur
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 3
P. Priou
Département de pneumologie, CHU Angers, 4, rue Larrey, 49900 Angers, France
Observation clinique
Motif de consultation
Un homme âgé de 53 ans vous est adressé pour une recherche de syndrome d’apnée du
sommeil devant une somnolence diurne invalidante associée à des ronflements. Il est
chauffeur routier, en arrêt de travail, après la survenue de plusieurs accidents de la voie
publique sur endormissement.
Antécédents, comorbidités, facteurs de risque
Il fume 15 cigarettes par jour depuis 30 ans, est obèse, diabétique de type 2 non insulinorequérant sous antidiabétique oral, hypertendu traité par une trithérapie antihypertensive.
Il a fait un séjour en réanimation il y a 4 ans pour une insuffisance respiratoire aiguë
hypercapnique suite à un traitement par morphiniques pour un lumbago. Il n’a pas de
terrain atopique, ni de terrain familial ou personnel d’asthme.
Examen physique
Il pèse 131 kg pour une taille de 1,64 m, il décrit une dyspnée d’effort survenant à la
marche rapide, ne pratique pas d’activité physique. L’échelle d’Epworth est à 18/24. On
note des œdèmes des membres inférieurs modérés, prenant le godet, et habituels d’après
lui. La saturation de pouls en oxyhémoglobine est à 92 % au repos. L’auscultation retrouve
des sibilants uniquement en expiration forcée.
Vous réalisez des gaz du sang du fait de l’IMC à 48 kg/m² qui montrent une PaO2 à
60 mmHg, une PaCO2 à 53 mmHg, un pH à 7,38 et des HCO3 – à 32 mmol/L. La radiographie
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (P. Priou).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 20
08/03/2016 13:21:54
Cas clinique n° 3
21
de thorax est sans particularité, ne montre notamment pas
d’ascension de coupole, hormis une cardiomégalie. Vous
demandez une polysomnographie qui est représentée à la
figure 1. Les épreuves fonctionnelles respiratoires montrent
une capacité vitale (CV) à 76 % des valeurs prédites, un
volume expiré maximal en 1 seconde (VEMS) à 75 % des
valeurs prédites, et un rapport VEMS/CV à 69 %. Après
bronchodilatateur, le VEMS n’est pas modifié. La capacité
pulmonaire totale (CPT) est à 81 % des valeurs prédites. Le
rapport volume résiduel (VR)/CPT est à 139 % des valeurs
prédites. Le transfert du monoxyde de carbone retrouve une
DLCOsb à 63 % des valeurs prédites et le rapport DLCO/VA
(volume alvéolaire) à 65 % des valeurs prédites.
Questions
• Comment interpréteriez-­vous la polysomnographie
(Fig. 1) ?
• Quels diagnostics serait-­il licite d’évoquer avant la réalisation des examens ? Au vu du bilan, lequel retiendriez-­
vous ? Demandez-­vous des examens complémentaires ?
• Quels mécanismes physiopathologiques expliquent les
troubles gazométriques dans le syndrome d’apnée du
sommeil ?
• Quels facteurs peuvent favoriser le développement
d’une hypertension pulmonaire chez l’obèse ?
• Quelle stratégie thérapeutique proposez-­vous, et sur
quels critères ? Comment pouvez-­vous surveiller son
efficacité et que surveillez-­vous ? Quelles sont les alternatives thérapeutiques sur le plus long terme ?
• Quelles adaptations du traitement pouvez-­vous être
amené(e) à faire devant une oxymétrie sous ventilation
non invasive (VNI) avec un masque naso-­buccal comme
celle-­ci sans relevé de fuites sur la machine ? (Fig. 2).
• Quelle mesure devra être prise avant la reprise du travail chez ce patient ?
Ambiance
ve. ld.
Position do.
lg.
Act.
120db
Ronfl.
60db
120db
Inspi.
60db
± ãVs
1mn
Apnées
Hypopnées
Otet.
Cent.
Inde.
0mn
100%
90
Sp02
80
70
160c/mn
Pouls
40
HYPNO.
Eveil
S.P.
N1
N2
N3
MJ & MPJ
MEV
Heure
23
0
1
2
3
4
5
6
7
Valid.
Figure 1. Polysomnographie.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 21
08/03/2016 13:21:54
22
P. Priou
%
Sp02
100,00
97,50
95,00
92,50
90,00
87,50
85,00
82,50
80,00
22:00
00:00
02:00
04:00
06:00
04:00
06:00
mercredi, 11 juin 2014
l/min
Fuites
40,00
35,00
30,00
25,00
20,00
15,00
10,00
5,00
0,00
22:00
00:00
02:00
mercredi, 11 juin 2014
Figure 2. Oxymétrie sur ventilateur avec analyse des tracés : saturation-­fuites.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 22
08/03/2016 13:21:55
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 23-28
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édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
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Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
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mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 3 :
Le syndrome obésité-hypoventilation :
approche diagnostique et thérapeutique
P. Priou
Département de pneumologie, CHU Angers, 4, rue Larrey, 49900 Angers, France
Commentaires
Comment interpréteriez-vous la polysomnographie (Fig. 1) ?
La polysomnographie montre un aspect en peigne de la courbe de saturation évoquant un syndrome d’apnée hypopnée obstructif du sommeil (SAHOS) très sévère, associé à des plages de
désaturations plus prolongées contemporaines des phases de sommeil paradoxal témoignant
d’une hypoventilation en sommeil paradoxal. En effet, en sommeil paradoxal, l’activité des
muscles respiratoires (diaphragme et muscles accessoires) est diminuée, la respiration est
irrégulière et superficielle, l’ensemble entraînant une diminution de la ventilation alvéolaire,
une majoration de l’hypercapnie et de l’hypoxémie. On note également de très nombreux
micro-éveils, témoins de la fragmentation du sommeil liée aux événements obstructifs, et
responsables en partie de la somnolence diurne excessive. Le sommeil lent profond est très
peu présent, ceci s’expliquant par la fragmentation du sommeil empêchant sa survenue.
Quels diagnostics serait-il licite d’évoquer avant la réalisation
des examens ? Au vu du bilan, lequel retiendriez-vous ?
Demandez-vous des examens complémentaires ?
Les deux étiologies principales à discuter concernant l’insuffisance respiratoire chronique
hypercapnique sont l’overlap syndrome (associant une bronchopneumopathie chronique
obstructive [BPCO] et un SAHOS) et le syndrome obésité-hypoventilation (SOH). L’overlap
syndrome concerne les patients BPCO avec un indice de masse corporelle (IMC) plus élevé
que les autres. Ces derniers développent plus rapidement, à des stades de sévérité de
la BPCO moins sévères, une hypercapnie et une hypertension pulmonaire. Il constitue
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (P. Priou).
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RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 23
08/03/2016 13:21:55
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P. Priou
Ambiance
ve. ld.
Position do.
lg.
Act.
120db
Ronfl.
60db
120db
Inspi.
60db
± ãVs
1mn
Apnées
Hypopnées
Otet.
Cent.
Inde.
0mn
100%
90
Sp02
80
70
160c/mn
Pouls
40
Eveil
S.P.
N1
N2
HYPNO.
N3
MJ & MPJ
MEV
Heure
23
0
1
2
3
4
5
6
7
Valid.
Figure 1. Polysomnographie.
%
Sp02
100,00
97,50
95,00
92,50
90,00
87,50
85,00
82,50
80,00
22:00
00:00
02:00
04:00
06:00
04:00
06:00
mercredi, 11 juin 2014
l/min
Fuites
40,00
35,00
30,00
25,00
20,00
15,00
10,00
5,00
0,00
22:00
00:00
02:00
mercredi, 11 juin 2014
Figure 2. Oxymétrie sur ventilateur avec analyse des tracés : saturation-­fuites.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 24
08/03/2016 13:21:57
Cas clinique n° 3 : — Le syndrome obésité-­hypoventilation : approche diagnostique et thérapeutique
le principal diagnostic différentiel du SOH [1]. Les signes
cliniques (dyspnée d’effort, somnolence) ne sont pas
spécifiques.
Chez ce patient la spirométrie montre une diminution du
volume expiratoire maximal en une seconde/capacité vitale
(VEMS/CV) à 69 % qui n’est pas significative et ne permet pas
de retenir le diagnostic de BPCO, d’autant que l’obésité peut
souvent être associée à une augmentation des résistances
des voies aériennes inférieures [2]. Il n’existe pas non plus
de trouble ventilatoire restrictif. Devant l’insuffisance respiratoire chronique hypercapnique, l’obésité et l’absence de
pathologie expliquant l’hypercapnie, on peut donc retenir
le diagnostic de SOH [3]. L’insuffisance respiratoire aiguë
hypercapnique dans les antécédents va tout à fait dans
le sens d’un SOH puisqu’il s’agit le plus souvent du mode
d’entrée dans la maladie [4,5].
Le transfert du CO vise à explorer le mécanisme de
l’hypoxémie. Le trouble de diffusion de la membrane
alvéolo-­capillaire, traduit par l’altération du DLCOsb et du
DLCO rapporté au volume alvéolaire, doit faire suspecter deux
pathologies chez ce patient : un emphysème centro-­lobulaire
compte tenu de son passé tabagique et de la distension relative
(volume résiduel/capacité pulmonaire totale [VR/CPT] > 130 %
des valeurs prédites), et/ou une hypertension pulmonaire
(présence d’œdèmes des membres inférieurs qui doivent faire
rechercher d’autres signes d’insuffisance cardiaque droite).
Le bilan doit donc être complété par un scanner thoracique pour rechercher l’emphysème, et une échographie
cardiaque pour rechercher des signes en faveur d’une
hypertension pulmonaire et évaluer la fonction ventriculaire gauche, d’autant que ce patient cumule les facteurs
de risque cardio-­vasculaires. Il est à noter que les patients
atteints de SOH ont plus de comorbidités cardio-­vasculaires
que la population générale [6].
Quels mécanismes physiopathologiques
expliquent les troubles gazométriques
dans le syndrome d’apnée du sommeil ?
Les conséquences de l’obésité sur la ventilation sont
complexes [7] :
• restriction des volumes pulmonaires minime et inconstante, touchant principalement le volume de réserve
expiratoire ;
• diminution de la compliance de la paroi thoracique [8] ;
• troubles des rapports ventilation/perfusion du fait d’atélectasies basales ;
• altération du fonctionnement des muscles respiratoires :
augmentation du travail des muscles respiratoires du fait
d’une augmentation de la charge (notamment en décubitus dorsal) avec donc un coût en oxygène plus élevé,
moindre efficacité du travail des muscles respiratoires
liée aux conditions d’acidose et d’hypoxémie et au déplacement du diaphragme en position moins physiologique
du fait de l’obésité abdominale (particulièrement en
décubitus) [9] ;
• altération du contrôle des centres respiratoires avec
une réponse au CO2 diminuée secondaire à une rétention chronique de bicarbonates (initiée par l’hypercapnie
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 25
25
nocturne et par les apnées) [10], et à la résistance à l’insuline et à la leptine liées à l’obésité viscérale (l’insuline et la leptine ayant un effet stimulant sur les centres
respiratoires) [11] ;
• troubles respiratoires nocturnes (ventilation d’obèse ou
SAHOS) participant à l’instauration de l’hypercapnie nocturne et donc à la rétention de bicarbonates facilitant l’hypercapnie diurne [12].
L’hypoxie nocturne et la fragmentation du sommeil liées
au SAHOS pourraient également altérer le fonctionnement
des centres respiratoires [13].
Quels facteurs peuvent favoriser
le développement d’une hypertension
pulmonaire ?
Une hypertension pulmonaire complique fréquemment le
SOH et se développe selon plusieurs mécanismes :
• respiratoires : l’hypoxie, l’hypercapnie et l’acidose chronique qui s’aggravent la nuit, particulièrement quand il
existe un SAHOS associé, entraînent une vasoconstriction
hypoxique des artérioles pulmonaires, puis une dysfonction
endothéliale, enfin un remodelage vasculaire ;
• cardiaques : une cardiomyopathie hypertrophique excentrique liée à l’obésité (mais aussi au diabète et à l’hypertension artérielle souvent présents dans le SOH)
entraîne une insuffisance cardiaque diastolique et ajoutant donc une composante postcapillaire à l’hypertension
pulmonaire [14].
La prise d’anorexigènes est plus fréquente dans cette
population.
L’obésité est également un facteur de risque de maladie
thromboembolique qui pourrait favoriser une hypertension
pulmonaire postembolique.
Quelle stratégie thérapeutique proposez-­
vous à court terme et sur quels critères ?
Comment pouvez-­vous surveiller son
efficacité ? Quelles sont les alternatives
thérapeutiques sur le plus long terme ?
La ventilation en pression positive représente le traitement
de référence du SOH. Actuellement, les données de la littérature sont insuffisantes pour établir des recommandations
solides sur les indications de la pression positive continue
(PPC) ou de la ventilation non invasive (VNI) [7]. La PPC
serait efficace sur les troubles respiratoires obstructifs et
l’hypoxémie nocturne chez 57 % de patients SOH et 43 %
nécessiteraient la mise en place d’une VNI [15]. Une étude
espagnole récente montre que la VNI améliore significativement les volumes mobilisables en comparaison à la PPC mais
que les deux sont comparables en termes d’amélioration
clinique et polysomnographique [16]. Compte tenu de la
sévérité du SAHOS, il est logique de commencer par la
mise en place d’une PPC en faisant une titration par PPC
autopilotée. En cas de persistance de plages de désaturations
08/03/2016 13:21:57
26
P. Priou
prolongées ou en l’absence d’amélioration de la capnie
transcutanée au cours de la nuit ou de la PaCO2 diurne, il
est nécessaire de passer à une VNI barométrique en mode
Spontaneous Timed (ST) en ajoutant une aide inspiratoire
d’au moins 7 à 8 cmH2O à la pression expiratoire titrée [17].
Les études récentes comparant le mode Average Volume
Assured Pressure Support (AVAPS) au traditionnel mode ST
ne montrent aucun apport significatif de la ventilation avec
un volume courant cible [18]. En cas de persistance d’une
hypoxémie nocturne réfractaire, l’ajout d’une oxygénothérapie sur la VNI serait nécessaire.
La mise en place de la ventilation doit faire l’objet d’un
monitoring rapproché pour rechercher des fuites (nécessitant
un ajustement de l’interface), des asynchronies patient/
ventilateur (pouvant nécessiter des modifications de réglages
des trigger inspiratoire, expiratoire, pente et temps inspiratoire), la persistance d’une hypoventilation alvéolaire
et/ou des limitations de débit (nécessitant l’adaptation des
pressions). Il existe différents outils :
• l’oxymétrie nocturne adaptée sur le ventilateur, lisible
en même temps que les courbes de fuites/pression/débit
de la machine sur des logiciels spécifiques (ex : ResScan®,
DirectView®…) : saturation moyenne nocturne, temps passé
sous 90 % de saturation, index de désaturation [19] ;
• les données machines : fuites, volume courant moyen,
index d’apnées-­hypopnées, taux de déclenchements inspiratoires du patient qui sont des données fiables chez le
patient dans un état stable [20] ;
• la capnographie transcutanée (PtcCO2), pour vérifier l’efficacité de la ventilation et l’absence de persistance de
phases d’hypoventilation alvéolaire. La valeur absolue ne
peut pas être considérée du fait d’un manque de concordance avec la PaCO2 artérielle, mais l’évolution de la
PtcCO2 au cours de la nuit reste une information intéressante notamment pour mettre en évidence l’hypoventilation en sommeil paradoxal [21] ;
• la polygraphie ventilatoire sous VNI en cas de difficultés
non résolues par les outils précédents (voir Fig. 3‑5).
Le patient devra être réévalué 1 mois après la mise en
route du traitement. Le sevrage tabagique reste bien sûr indiqué et doit être favorisé au moins par un conseil minimal. Les
traitements dépresseurs respiratoires doivent être proscrits
(benzodiazépines, morphiniques, hypnotiques). Une prise en
charge de l’obésité doit également être initiée, consultation
avec nutritionniste ou diététicienne. Par ailleurs, la chirurgie
bariatrique est une alternative thérapeutique intéressante,
la seule qui peut aboutir à une guérison du SOH. En effet,
elle permet de diminuer la sévérité des complications métaboliques et respiratoires de l’obésité (le SAHOS ou le SOH),
et de diminuer la mortalité toute cause confondue chez les
patients super-­obèses [22]. Elles montrent une amélioration
des volumes mobilisables (CV et VEMS), de la dyspnée, des
gaz du sang et de la réponse au CO2 [23]. Cependant, le
risque péri-­opératoire global est de 0,5 à 1,5 % et est majoré
chez les patients présentant un SAHOS, un SOH, un syndrome
métabolique, un diabète ou une pathologie cardiaque [24].
%
Sp02
100,00
97,50
95,00
92,50
90,00
87,50
85,00
82,50
80,00
23:00
00:00
01:00
02:00
03:00
04:00
05:00
03:00
04:00
05:00
jeudi, 3 octobre 2013
Fuites
l/min
40,00
35,00
30,00
25,00
20,00
15,00
10,00
5,00
0,00
23:00
00:00
01:00
02:00
jeudi, 3 octobre 2013
Figure 3. Oxymétrie sur ventilateur avec analyse des tracés (saturation-­fuites) : désaturations prolongées contemporaines de fuites au
niveau du masque.
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08/03/2016 13:21:58
Cas clinique n° 3 : — Le syndrome obésité-­hypoventilation : approche diagnostique et thérapeutique
27
Saturation
100
90
80
79
74
60
40
20
1
1:00
4:00
7:00
Figure 4. Capnographie transcutanée montrant une hypoventilation en sommeil paradoxal.
%
Sp02
100,00
97,50
95,00
92,50
90,00
87,50
85,00
82,50
80,00
00:00
01:00
02:00
03:00
04:00
05:00
samedi, 30 mars 2013
Sp02
%
100,00
97,50
95,00
92,50
90,00
87,50
85,00
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80,00
23:00
00:00
01:00
02:00
03:00
04:00
05:00
06:00
jeudi, 23 mai 2013
Figure 5. Oxymétrie machine chez un même patient sous masque facial (A) et masque nasal (B), sans changement des paramètres de la
machine, événements obstructifs favorisés par le masque facial.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 27
08/03/2016 13:21:59
28
Quelles adaptations du traitement
pouvez-­vous être amené(e) à faire devant
une oxymétrie sous VNI avec un masque
naso-­buccal comme celle‑ci, sans fuites
sur les données machine (Fig. 2) ?
Si la pression expiratoire est basse, on peut dans un premier
temps l’augmenter (ainsi que la pression inspiratoire dans
la même mesure pour garder la même aide inspiratoire)
afin de mieux contrôler le collapsus des voies aériennes
supérieures.
Si la pression expiratoire est déjà élevée, il faut essayer dans
un premier temps de préférence un masque nasal, éventuellement avec une mentonnière en cas d’ouverture buccale. En
effet, le masque naso-­buccal entraîne un recul de la mandibule
qui peut favoriser des événements obstructifs et nécessiter des
pressions thérapeutiques beaucoup plus élevées [25].
Quelle mesure devra être prise avant
la reprise du travail chez ce patient ?
Avant la reprise du travail, après au moins 1 mois de traitement,
vous devrez organiser dans un laboratoire de sommeil adapté
des tests de maintien d’éveil afin de vérifier qu’il ne persiste
pas de troubles de la vigilance contre-­indiquant la conduite
automobile. Ils doivent être réalisés quand le patient n’a pas
de dette de sommeil sur les dernières nuits, que le traitement
est efficace. Les quatre tests de maintien d’éveil de 40 min
doivent retrouver une latence moyenne d’endormissement
supérieure à 33 min, seuil prédisant une conduite réelle sûre,
sans endormissement rapide à l’un des tests.
Liens d’intérêts
Au cours des 5 dernières années, Pascaline Priou a perçu des
financements pour participation à des congrès de la part
d’ALISEO, prestataire de services à domicile.
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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 29-31
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 4
F. Lebargy
Service des maladies respiratoires et allergiques, CHU Maison-Blanche,
51092 Reims, France
Observation clinique
Il s’agit d’une femme âgée de 70 ans adressée pour une dyspnée. Elle n’a exercé aucune
activité professionnelle. Elle n’a jamais fumé. Elle est mariée et mère de trois enfants.
Ses antécédents concernent une hypertension artérielle traitée par furosémide et
aténolol, un accident vasculaire hémorragique (il y a 10 ans) ayant laissé comme séquelle
une difficulté à la marche, un angor fonctionnel sur coronaires saines.
La dyspnée est survenue assez brutalement, sans facteur déclenchant. Selon ses dires,
cette dyspnée est récente (moins de 3 mois). Elle survient pour des efforts modérés tels
que la marche à sa propre allure ou la réalisation des tâches ménagères (stade III sur une
échelle du Medical Research Council [MRC]). Il n’y a pas de dyspnée de repos ni d’orthopnée.
Il n’y a pas de symptôme associé : ni toux, ni expectoration, ni sifflement respiratoire.
L’examen clinique note un poids de 63 kg pour 160 cm (perte de poids d’environ 7 kg
depuis 1 an pour ayant justifié un bilan digestif endoscopique qui s’est révélé normal), une
auscultation pulmonaire normale, une pression artérielle à 120/70 mmHg, des bruits du
cœur réguliers à une cadence ventriculaire de 70/min, un éclat de B2 au foyer pulmonaire,
une cyphoscoliose, des troubles de l’équilibre avec un élargissement du polygone de
sustentation et un signe de Romberg. À noter quelques neurofibromes cutanés et deux
taches café au lait dans le dos et sur le bras (Fig. 1).
L’exploration fonctionnelle respiratoire mesure un volume expiratoire maximal en
une seconde (VEMS) à 1,77 L (99 % préd.), une capacité vitale lente (CVL) à 2,40 L (110 %
préd.), un rapport VEMS/CVF (capacité vitale forcée) à 74 %, une CPT à 3,44 L (69 %
préd.), un volume résiduel (VR) à 1,20L (70 % préd.), une diffusion libre de CO (DLCO)
non réalisable (impossibilité de maintenir l’apnée pendant 10 secondes). La gazométrie
artérielle en air ambiant est la suivante : PaO2 : 58 mmHg ; PaCO2 : 28 mmHg, pH : 7,44,
HCO3 – : 19 mmol/L, SaO2 : 88 %. Le test de marche est interrompu dès la deuxième
minute après un parcours de 59 m en raison d’une dyspnée (6/10 sur l’échelle de Borg)
et d’une désaturation (SpO2 à 79 %). La scintigraphie pulmonaire de ventilation/perfusion
est normale. Un test d’hyperoxie est réalisé : la PaO2 augmente à 495 mmHg permettant
de calculer un shunt de 18 %. Le bilan biologique est le suivant : hématies : 5 Tera/L, Hb :
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (F. Lebargy).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 29
08/03/2016 13:21:59
30
F. Lebargy
146 g/L, leucocytes : 8,8 g/L (polynucléaires neutrophiles
57 %), plaquettes : 307 g/L, créatininémie : 74 µg/L, filtration
glomérulaire : 49 ml/min (MDRD), transaminases hépatiques
normales, bilirubine totale : 20 µmol/L, gamma-­glutamyl
transférase : 146 UI/L, phosphatases alcalines : 237 UI/L,
protéine C-­réactive : 4 mg/L, bilan immunologique négatif,
sérologie VIH négative.
Le scanner thoracique montre les lésions pulmonaires
suivantes (Fig. 2).
Questions
• Comment interpréter les lésions pulmonaires tomodensitométriques ? Quels sont les grands cadres nosologiques de ces lésions ?
• Comment peut-­on expliquer la discordance entre la
relative préservation des paramètres ventilatoires et la
sévérité de l’hypoxémie ? Comment expliquer le mode
brutal de survenue de cette dyspnée ?
• Quel bilan doit-­o n réaliser pour confirmer ces
hypothèses ?
• Quel traitement peut-­on envisager ?
Figure 1. Photographies du revêtement cutané de l’avant-bras et
du dos.
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08/03/2016 18:45:48
Cas clinique n° 4
31
Figure 2. Coupes tomodensitométriques.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 31
08/03/2016 13:22:00
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 32-35
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
Disponible en ligne sur
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
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Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
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mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 4 :
une dyspnée chez une patiente atteinte
d’une neurofibromatose de type 1
(maladie de Von Recklinghausen)
F. Lebargy
Service des maladies respiratoires et allergiques, CHU Maison-Blanche, 51092 Reims,
France
Commentaires
Les lésions radiologiques visualisées sur le scanner thoracique correspondent à des formations kystiques et peuvent être différenciées des autres formations aériques grâce à leurs
caractères sémiologiques rappelés dans le tableau 1 [1].
Ainsi, la présence de kystes multiples et bilatéraux sur le scanner thoracique répond
à la définition d’une maladie kystique pulmonaire diffuse (MKPD) qui regroupe plusieurs
entités énumérées dans le tableau 2 [2-3]. Habituellement, le terrain (sexe, tabagisme), le
contexte familial (notion de maladie génétique), l’aspect radiologique des kystes (forme,
distribution pulmonaire), l’existence de lésions associées (cutanées, rénales…) constituent
des aides pour le diagnostic étiologique de la MKPD. L’algorithme diagnostique des MKPD
est présenté dans le tableau 3 [2-3].
Dans le cas rapporté, la notion d’une neurofibromatose de type 1 (NF1), connue par la
patiente, rendait très probable le diagnostic de MKPD associée à une NF1. La maladie de Von
Recklinghausen ou NF1 est une dysplasie ectodermique et mésodermique autosomale dominante, dont l’expression clinique est variable, caractérisée par des lésions cutanées (neurofibromes cutanés, de taches café au lait, hamartomes iriens pigmentés [nodules de Lisch]).
D’autres atteintes sont possibles et font la gravité de la maladie : musculo-squelettiques
(cyphoscoliose), neurologiques périphériques (neurofibromes plexiformes chalazodermiques)
et centrales (gliome du nerf optique, astrocytome, méningiome, neurofibrome) [4]. Les
atteintes thoraciques peuvent comporter des neurofibromes intra-thoraciques (intercostaux,
médiastinaux, endobronchiques) et des pneumonies interstitielles dont la prévalence au sein
des NF1 est discutée mais probablement rare (5,5 %) [5]. Une revue récente de la littérature
analysant 64 cas de pneumopathie interstitielle associée à une NF1 révèle que l’âge moyen
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (F. Lebargy).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 32
08/03/2016 13:22:00
Cas clinique n° 4 : — une dyspnée chez une patiente atteinte d’une neurofibromatose de type 1 (maladie de Von Recklinghausen)
33
Tableau 1. Définition des images aériques pulmonaires selon la Fleischner Society [1].
Lésion
Définition
Kyste
Hyperclarté parenchymateuse sphérique à paroi fine (< 2 mm) entourée de poumon sain
Cavité (excavation)
Espace aérique à l’intérieur d’une condensation pulmonaire, une masse ou un nodule,
typiquement à paroi épaisse (> 2 mm) de forme plus irrégulière qu’un kyste Bulle
Hyperclarté sphérique localisée, de taille > 1 cm de diamètre entourée d’une paroi fine
(< 1 mm), habituellement accompagnée de modifications emphysémateuses du tissu
pulmonaire adjacent
Bleb
Espace aérique kystique, à paroi fine, adjacent à la plèvre viscérale de taille < 1 cm
Pneumatocèle
Espace aérique approximativement rond, à paroi fine, dans le parenchyme pulmonaire,
le plus souvent causé par une infection, un traumatisme ou une inhalation de produits
hydrocarbonés (essence…) et habituellement transitoires.
Tableau 2. Classification nosologique des MKPD.
Classification
Description
Néoplasiques
Lymphangioléiomyomatose sporadique ou associée à une sclérose tubéreuse
de Bourneville
Histiocytose langerhansienne ou non langerhansienne y compris la maladie
de Herdheim Chester
Autres néoplasies : cancers primitifs ou métastatiques (sarcomes,
adénocarcinomes, blastomes pleuropulmonaires)
Génétiques/congénitales
Syndrome de Birt Hogg Dubé
Syndrome de Protée, neurofibromatose, syndrome d’Elhers-­Danlos
Malformations congénitales bronchopulmonaires, dysplasies
bronchopulmonaires
Associées aux syndromes
lympho-­prolifératifs
Pneumonie interstitielle lymphoïde
Bronchiolite folliculaire
Syndrome de Sjögren
Maladie à déposition de chaînes légères
Amylose
Infectieuses
Pneumocystis jirovecii
Pneumonie à staphylocoque
Papillomatose respiratoire récidivante
Infections fongiques endémiques (coccidioïdomycose, paragonimiose)
Associées à une PID
Pneumonie d’hypersensibilité
Pneumonie desquamative
Induites par le tabac
Histiocytose langerhansienne pulmonaire
Pneumopathie interstitielle desquamative
Bronchiolite respiratoire
Divers
Pseudo-­kystes post-­traumatiques
Poumon des cracheurs de feu
Syndrome hyper-­IgE (Buckley)
des patients est de 50 ans, avec une prédominance masculine
(sex ratio : 2/1). Ces pneumopathies sont symptomatiques
dans 89 % des cas, s’exprimant le plus souvent par une
dyspnée (80 % des cas). Le profil fonctionnel est variable
(normal : 3 %, obstructif : 43 %, restrictif : 37 %, mixte : 17 %).
La diffusion libre de CO (DLCO) est abaissée dans 94 % des
cas. Au plan de l’imagerie, les aspects tomodensitométriques
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 33
associent des hyperdensités en verre dépoli (37 % des cas),
des réticulations (50 %), des bulles (50 %), des lésions
emphysémateuses (25 %) et des kystes (25 %). Les aspects
en rayons de miel ne sont pas rapportés mais les études
tomodensitométriques de ces atteintes interstitielles sont
peu nombreuses (8 cas rapportés dans la littérature). La
patiente dont nous signalons l’observation n’avait jamais
08/03/2016 13:22:00
34
F. Lebargy
Début aigu,
fièvre, frissons…
MKPD
I. Présentation
Clinique
II. Analyse
TDM
III. Diagnostic
évoqué
IV. Confirmation
Envisager une cause
infectieuse
Chronique/pauci symptomatique
Kystes ronds,
réguliers, creusés
dans un
parenchyme
pulmonaire sain,
avec répartition
diffuse
Kystes de petite
taille, de forme
elliptique, adossés
à la plèvre et aux
vaisseaux,
prédominant dans
les bases
Kystes irréguliers de
forme bizarre
associés à des
nodules et des
cavités prédominant
dans les lobes
supérieurs
Kystes ronds de tille
variable. Association
possible à des HD
en verre dépoli,
épaississements
septaux et nodules,
de répartition diffuse
LAM
BHD
HPL
PIL/BF/SS
MDCL /amylose
Recherche AML
Recherche STB
Dosage VEGF-D
BPC?
Recherche
fibromes cutanés
Biopsie cutanée
Recherche tumeur
rénale
Génotypage FLCN
Tabagisme
Lésions osseuses
Biopsie pulmonaire ?
Génotypage BRAF
Recherche syndrome
sec
Anti SSA-SSB
Auto-immunité/
Dysimmunité
Myélome
Biopsie pulmonaire
Aspect kystiques
ne répondant pas
à ceux décrits
précédemment
PID/ trauma
Cancers
Tabac
Tabagisme
Exposition Ag
Cancer connu
LBA
Biopsie
pulmonaire
Tableau 3. Algorithme pour le diagnostic de maladie kystique pulmonaire diffuse (MKPD).
fumé et présentait des images kystiques de petite taille
à paroi fine, bien différentes des lésions d’emphysème. Il
n’existait pas de déficit ventilatoire objectif. La DLCO n’était
pas réalisable. Le test de marche révélait une désaturation
à l’effort précoce. En définitive, il existait une discordance
entre, d’une part, la faible profusion des kystes pulmonaires
et les paramètres fonctionnels respiratoires préservés et,
d’autre part, l’intensité de la dyspnée, de l’hypoxémie de
repos et d’effort. Une dysfonction systolique ou diastolique
du ventricule gauche (VG) a donc été éliminée par un examen
cardiaque. Une scintigraphie pulmonaire de ventilation/
perfusion a permis d’écarter une maladie thromboembolique.
L’échographie cardiaque par voie transœsophagienne a
confirmé l’existence d’une hypertension pulmonaire (HTP).
Le diamètre de la chambre de chasse du VG est mesuré à
19 mm. L’aorte thoracique ascendante est mesurée à 35 mm
au niveau des sinus de Vasalva, l’aorte ascendante à 28 mm.
Les cavités cardiaques gauches sont de taille normale. Il n’y
a pas de valvulopathie mitrale. Le rapport E/A du flux mitral
antérograde est < 1, témoignant d’une anomalie de relaxation, banale à cet âge. L’oreillette et l’auricule gauches sont
libres de tout thrombus. La surface de l’auricule gauche est
normale. Les cavités droites sont dilatées avec un rapport
VD/VG > 1. Le ventricule droit (VD) est hypokinétique avec un
tricuspide annular plane systolic excursion (TAPSE) à 14 mm.
La pression artérielle pulmonaire systolique (PAPs) sur le flux
d’insuffisance pulmonaire (IP) est estimée à 94 mmHg. Il n’y a
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 34
pas de solution de continuité visible en échographie transœsophagienne au niveau du septum interatrial. Cependant on
observe à l’épreuve de contraste un passage de contraste
de l’atrium droit à l’atrium gauche dès les premiers cycles
cardiaques. Les phénomènes sont accentués par les efforts de
toux. L’échographie oriente vers une HTP et l’existence d’un
foramen ovale dont l’ouverture, à la faveur de l’HTP, pourrait
expliquer le caractère brutal de survenue de la dyspnée.
Dès lors, il était justifié de recourir à des mesures hémodynamiques par cathétérisme cardiaque droit, confirmant le
diagnostic d’HTP (PAP : 82/24/43), de type pré capillaire
(pression artérielle pulmonaire d’occlusion [PAPO] : 7 mmHg,
DC : 2,7 L/m2, risk assessment and predictor tool [RAPT] :
15 U Wood), non modifiée par le NO [4].
L’aspect cutané est caractéristique d’une NF1, maladie
qui était connue de la patiente, deux de ses filles étant
porteuses d’une NF1. Après avoir éliminé les hypertensions
artérielles pulmonaires dues aux médicaments ou associées
aux connectivites (groupe I), les HTP dues aux insuffisances
ventriculaires gauches (groupe II) et les HTP postemboliques
(groupe IV), nous avons retenu le diagnostic d’HTP associée à
la NF1, classée dans le groupe V de la classification clinique
des HTP [7‑8]. Il s’agit d’une cause rare d’HTP (8 cas dans le
Registre français des HTP) [9]. Une prédominance féminine
est possible. L’HTP survient tardivement dans l’évolution
de la NF1, l’âge moyen au moment du diagnostic est de
62 ans (53‑68 ans). La dyspnée et les signes cardiaques droits
08/03/2016 13:22:01
Cas clinique n° 4 : — une dyspnée chez une patiente atteinte d’une neurofibromatose de type 1 (maladie de Von Recklinghausen)
sont les signes les plus fréquents. Au moment du diagnostic,
les valeurs hémodynamiques sont sévèrement perturbées
avec une diminution de l’index cardiaque (moyenne 2,3 L/
m2 [1,9‑4,7 L/m2]) et des résistances vasculaires indexées
élevées (moyenne 15,1 mmHg/L/min/m2 [4,5‑25,9]). Tous
les patients sont en classe III du score de dyspnée de la New
York Heart Association (NYHA) avec une altération prononcée
du test de marche (distance parcourue moyenne : 180 m).
Cinq patients avaient une maladie kystique pulmonaire
diffuse associée, souvent peu marquée contrastant avec
l’importance de l’élévation des résistances vasculaires
pulmonaires. La recherche d’une mutation ponctuelle du
gène BMPR2 ou d’un réarrangement de grande taille était
négative dans tous les cas.
La patiente a bénéficié d’une oxygénothérapie de
déambulation et d’un traitement vasodilatateur combiné
(ambrisantan/sildénafil). Après deux années de surveillance,
la dyspnée s’est améliorée (NYHA II) et le test de marche lui
permet de parcourir 120 m.
Conclusion
Le cas rapporté illustre le caractère multifactoriel de la
dyspnée au cours des maladies systémiques. La discordance entre l’altération des volumes pulmonaires et/ou
de l’étendue des lésions radiologiques et l’intensité de la
dyspnée doit inciter à rechercher une atteinte cardiaque
ou vasculaire pulmonaire (maladie thromboembolique,
HTP).
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 35
35
Liens d’intérêts
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article.
Références
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08/03/2016 13:22:01
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 36-37
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
Disponible en ligne sur
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 5
N. Guibert
Service de pneumologie-allergologie, hôpital Larrey, 24, chemin de Pouvourville,
31059 Toulouse, France.
Observation clinique
Motif d’hospitalisation
Un homme âgé de 65 ans est hospitalisé pour dyspnée de repos d’installation rapidement
progressive sur les 2 derniers mois.
Antécédents/facteurs de risques
Comme seul antécédent notable, on relève un tabagisme à 50 paquets-année non sevré.
Examen physique
Le performans status est évalué à 2, le poids est à 55 kg pour un poids de forme à 63 kg, soit
une perte de 8 kg en 2 mois. La dyspnée est de grade IV de la New York Heart Association
(NYHA), il décrit une toux invalidante, une difficulté de drainage d’expectorations purulentes, parfois hémoptoïques. Il n’y a pas de signes de détresse respiratoire aiguë, la
saturation en O2 est à 88 % en air ambiant, 93 % sous 2 L/min d’oxygène.
Examens complémentaires
Le bilan biologique met en évidence un syndrome inflammatoire marqué (protéine C-réactive :
197 mg/L, polynucléaires neutrophiles : 14,5 g/L) sans autre anomalie majeure. La
gazométrie en air ambiant révèle une hypoxémie isolée à 56 mmHg. La radiographie
thoracique montre une atélectasie droite. Le scanner thoracique avec injection de produit
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (N. Guibert).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 36
08/03/2016 13:22:01
Cas clinique n° 5
de contraste va révéler une obstruction non critique (50 %)
du tiers inférieur de la trachée et complète de la bronche
principale droite par une volumineuse tumeur provenant du
lobe supérieur droit, responsable d’une atélectasie complète
du poumon droit. L’artère pulmonaire est perméable. Les
images du scanner thoracique sont représentées sur la
figure 1.
Quel(s) examen(s) vont permettre
de guider votre attitude thérapeutique
initiale ? Justifiez ?
Dans le cas présenté ici, le scanner n’a pas permis d’analyser le lit d’aval, ni le parenchyme sous-­jacent du fait de
l’atélectasie complète. L’artère pulmonaire était perméable.
En bronchoscopie souple, vous observez un envahissement
du 1/3 inférieur de la trachée, responsable d’une sténose
purement intrinsèque (50 %) et d’une obstruction complète
d’origine mixte, principalement extrinsèque de la bronche
principale droite. Vous franchissez avec un bronchoscope fin
la sténose, autorisant le drainage d’abondantes sécrétions
purulentes et confirmant la présence d’un lit d’aval viable.
Les biopsies réalisées (compliquées d’une hémorragie rapidement contrôlée après instillation de xylocaïne adrénalinée)
sont en faveur d’un carcinome malpighien. Vous complétez
le bilan d’extension de la maladie et ne mettez en évidence
aucune autre anomalie que la masse hilaire et des adénopathies multiples dans les loges 11R, 10R, 7 et 4R, classant
la maladie stade IIIB.
37
Questions
• Quel(s) examen(s) vont permettre de guider votre attitude thérapeutique initiale ? Justifiez ?
• Quelle est alors votre prise en charge initiale ? Justifiez.
• Quelles sont les modalités du geste et les différentes
techniques disponibles pour lever cette obstruction ?
Justifiez vos choix.
• Quelle aurait été votre attitude si ce patient était
actuellement en échec d’une seconde ligne de chimiothérapie par docétaxel, mais en bon état général (PS 1)
jusqu’à la semaine précédente, et avait été adressé
en détresse respiratoire aiguë avec critères d’intubation ? Justifiez.
• Quelle aurait été votre attitude si le patient s’était présenté pour des crachats hémoptoïques minimes et une
dyspnée pour les efforts soutenus sans autre symptomatologie respiratoire et que le scanner révélait une obstruction estimée à 50 % de la bronche principale droite,
sans atélectasie ? Justifiez.
• Quelle aurait votre attitude chez un patient PS 4, traité
pour un adénocarcinome métastatique au cerveau (responsable d’une hémiplégie droite), actuellement responsable d’une atélectasie droite avec envahissement
de l’artère pulmonaire ?
Figure 1. Scanner thoracique injecté mettant en évidence une
obstruction de la basse trachée et de la bronche principale droite
responsable d’une atélectasie droite.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 37
08/03/2016 13:22:01
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 38-44
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
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édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
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Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
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mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 5 :
Bronchoscopie interventionnelle pour la prise
en charge d’une sténose maligne proximale
symptomatique : Pour quels patients ?
Quelles alternatives ?
N. Guibert
Service de pneumologie-allergologie, hôpital Larrey, 24, chemin de Pouvourville,
31059 Toulouse, France
Commentaires
Quel(s) examen(s) vont permettre de guider votre attitude
thérapeutique initiale ? Justifiez.
Les examens indispensables pour la prise en charge adaptée d’une obstruction maligne
proximale sont le scanner thoracique injecté et la bronchoscopie souple.
La bronchoscopie souple est l’examen clé. Elle permet de préciser le mécanisme de la
sténose (obstruction intra-luminale, extrinsèque, mixte), sa localisation et son extension.
Seules les obstructions des voies aériennes proximales (trachée/bronches principales/tronc
intermédiaire) bénéficient d’une prise en charge interventionnelle. La prise en charge des
atteintes lobaires ou plus distales n’a d’intérêt que pour le contrôle d’une hémoptysie ou
le drainage d’une pneumopathie rétentionnelle, le bénéfice sur la dyspnée étant alors peu
probable. Enfin, l’élément fondamental est de vérifier la viabilité du lit d’aval, condition
indispensable à la réussite du geste. Dans le cas des obstructions critiques, l’utilisation
d’endoscopes ultrafins peut être intéressante [1]. Enfin, la mini-sonde d’échographie
radiaire [2] peut également être utile pour l’analyse des rapports vasculaires et la recherche
de zones de destruction cartilagineuse à couvrir en priorité par stent [3]. Enfin, les prélèvements histologiques vont évidemment constituer un des arguments pour poser l’indication
d’un geste interventionnel. En l’absence de signes de détresse respiratoire ou de sepsis
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (N. Guibert).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 38
08/03/2016 13:22:02
Cas clinique n° 5 : — Bronchoscopie interventionnelle pour la prise en charge d’une sténose maligne proximale symptomatique
mal contrôlé, celui-­ci peut être évité en présence d’une
histologie très chimio-­sensible, notamment de carcinome
neuro-­endocrine à petites cellules [4].
Le scanner injecté permet quant à lui surtout d’analyser
les rapports vasculaires et la perméabilité de l’artère pulmonaire. Les reconstructions 3D peuvent aider à définir les
caractéristiques de la sténose, la perméabilité de l’arbre
bronchique, et à choisir le modèle et les dimensions d’un
éventuel stent [5,6]. L’analyse du parenchyme est également
essentielle. En effet, là aussi, il n’est intéressant de lever une
obstruction maligne qu’en cas de parenchyme sous-­jacent
sain (emphysème sévère, lymphangite, atteinte métastatique
en lâcher de ballons).
Dans le cas présenté ici, le scanner n’a pas permis d’analyser le lit d’aval, ni le parenchyme sous-­jacent du fait de
l’atélectasie complète. L’artère pulmonaire était perméable.
En bronchoscopie souple, vous observez un envahissement
du 1/3 inférieur de la trachée, responsable d’une sténose
purement intrinsèque (50 %) et d’une obstruction complète
d’origine mixte, principalement extrinsèque de la bronche
principale droite. Vous franchissez avec un bronchoscope fin
la sténose, autorisant le drainage d’abondantes sécrétions
purulentes et confirmant la présence d’un lit d’aval viable.
Les biopsies réalisées (compliquées d’une hémorragie rapidement contrôlée après instillation de xylocaïne adrénalinée)
sont en faveur d’un carcinome malpighien. Vous complétez
le bilan d’extension de la maladie et ne mettez en évidence
aucune autre anomalie que la masse hilaire et des adénopathies multiples dans les loges 11R, 10R, 7 et 4R, classant
la maladie stade IIIB.
Quelle est alors votre prise en charge
initiale ? Justifiez.
Chez ce patient, la première étape du traitement relève
d’une désobstruction par bronchoscopie interventionnelle.
Le geste apparaît parfaitement justifié pour plusieurs
raisons. Le patient est symptomatique à la fois sous la forme
d’une dyspnée significative, de crachats hémoptoïques et
par la présence d’une pneumopathie postobstructive qui
retarderait la mise en route du traitement et expose au
risque de sepsis sévère, potentialisé par les éventuels épisodes d’aplasie chimio-­induit. L’efficacité des traitements
sera ici incertaine et, quoi qu’il arrive, retardée. Cette
histologie est peu chimio-­sensible et la radiothérapie ne
lève une atélectasie que dans 25 à 50 % des cas ; de manière
tardive (délai médian de 24 jours) [7,8]. La bronchoscopie
interventionnelle offre une levée immédiate de l’obstruction, à l’origine d’une amélioration radiologique rapide (24
à 72 heures, selon l’ancienneté de l’obstruction).
L’évaluation de la sténose est en faveur d’une réussite
du geste. L’atteinte est proximale, le lit d’aval et l’artère
pulmonaire, perméables.
Les caractéristiques du patient et de sa maladie sont
également favorables. Le carcinome épidermoïde localement
avancé apparaît le meilleur candidat pour ce geste du fait de
sa présentation (bourgeon endo-­luminal de croissance lente,
lit d’aval plus volontiers perméable) [9].
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 39
39
Enfin, la désobstruction permet parfois de modifier
l’attitude thérapeutique ultérieure. La chirurgie est parfois
plus conservatrice que prévue après debulking premier bronchoscopique [10,11]. Dans ce cas, la chirurgie était a priori
contre-­indiquée par l’atteinte trachéale et ganglionnaire N2
multi-­site. Il existe également un rôle complémentaire de
la bronchoscopie de désobstruction et de la radiothérapie.
Le stade Tumor, Nodes, Metastasis (TNM) doit être réévalué
après le geste. La tumeur est plus facile à délimiter après
levée de l’atélectasie, et sa position dépend des variations
anatomiques (déviation médiastinale) liées à la rétraction
parenchymateuse [12,13]. Sa taille et donc les champs
d’irradiation sont parfois modifiés et revus à la baisse après
debulking. Le drainage de pneumopathie obstructive doit
également faire reconsidérer les atteintes ganglionnaires
médiastinales potentiellement infectieuses et faussement
retenues pathologiques au bilan initial.
Il est évidemment indispensable avant toute prise de
décision de corriger les éventuelles causes surajoutées de
dyspnée, fréquentes dans ce contexte (correction d’une
anémie, traitement d’une insuffisance cardiaque, d’une
embolie pulmonaire).
Quelles sont les modalités du geste
et les différentes techniques disponibles
pour lever l’obstruction bronchique ?
Justifiez vos choix.
Le geste doit être ici réalisé sous bronchoscopie rigide.
Cet abord est indispensable en cas d’obstruction critique
avec atteinte trachéale. Il offre un meilleur contrôle des
voies aériennes, la possibilité de retirer rapidement de
larges pièces tumorales, un meilleur contrôle d’éventuelles
complications hémorragiques ou obstructives.
Cette tumeur est hémorragique, n’autorisant pas un debulking mécanique d’emblée. Une technique thermique doit être
utilisée dans un premier temps, à visée hémostatique, et
constituera le premier temps de la désobstruction [4,14]. Le
laser permet une désobstruction immédiate et prolongée mais
expose au risque de perforation si celui-­ci n’est pas appliqué de manière tangentielle par rapport à l’axe de la voie
aérienne traitée [15,16]. La thermo-­coagulation représente
une alternative moins coûteuse dont l’efficacité est équivalente [4,14]. La cryothérapie ou encore la photothérapie
dynamique ne sont pas adaptées aux situations d’obstruction
critique du fait de leur efficacité retardée. Après coagulation,
les pinces rigides ou le biseau du trachéoscope ou de tubes
rigides de diamètres adaptés permettent la désobstruction
rapide de toute la composante intra-­luminale. Enfin, du fait
d’une compression extrinsèque significative de la bronche
principale droite, la mise en place d’une prothèse est, quoi
qu’il arrive, indiquée. Hors sténose très nécrotique ou grande
distorsion, les prothèses siliconées doivent être utilisées en
première intention car faciles à mettre en place et à retirer,
bien tolérées et entraînant moins de réaction granulomateuse
que les prothèses métalliques [17,18]. En revanche, le choix
entre une prothèse droite de la bronche principale droite
08/03/2016 13:22:02
40
N. Guibert
pour lever la compression extrinsèque ou d’une prothèse en
Y afin de couvrir l’ensemble des lésions peut être discuté.
L’essai randomisé multicentrique français SPOC a montré
que la mise en place d’un stent retarde la récurrence locale
après désobstruction des tumeurs intra-­luminales [19]. Les
traitements préalablement reçus et la probabilité de leur
réussite à venir sont d’autres éléments entrant en compte
dans cette discussion. Ici, le patient a bénéficié de la mise en
place d’une prothèse en Y recoupée afin de couvrir l’ensemble
des lésions ; après laser et désobstruction mécanique. Le
caractère peu chimio-­sensible de l’histologie a également
été considéré dans cette prise de décision.
L’ensemble des techniques disponibles pour la prise en
charge bronchoscopique des obstructions malignes proximales est détaillé dans le tableau 1.
Quelle aurait été votre attitude
si ce patient était actuellement en échec
d’une seconde ligne de chimiothérapie,
mais en bon état général (PS 1) jusqu’à
la semaine précédente, et avait été
adressé en détresse respiratoire aiguë
avec critères d’intubation ? Justifiez.
Il est bien établi que les patients présentant une détresse
respiratoire aiguë compliquant une obstruction maligne
des voies aériennes doivent être intubés ; la bronchoscopie
interventionnelle permettant dans la grande majorité des
cas une extubation précoce (75 à 90 % dans les 24 heures
suivant le geste) [20‑24]. Il est probable que le patient puisse
ici récupérer rapidement une qualité de vie satisfaisante
après lever de l’obstruction et ce geste apparaît donc justifié
quelles que soient les options thérapeutiques.
Quelle aurait été votre attitude si le
patient s’était présenté pour des crachats
hémoptoïques minimes et une dyspnée
pour les efforts soutenus sans autre
symptomatologie respiratoire et que le
scanner révélait une obstruction estimée
à 50 % de la bronche principale droite,
sans atélectasie ? Justifiez.
Dans ce cas de figure, la sténose des voies aériennes est peu
significative (< 60 %) et surtout peu symptomatique (dyspnée
stade II NYHA, pas de troubles ventilatoires ou de complications infectieuses obstructives). Le geste n’apparaît donc
pas indiqué en premier lieu, puisque l’on peut espérer des
traitements spécifiques (chimiothérapie et radiothérapie) de
contrôler l’évolution locale de la maladie. Le raisonnement
ne serait pas le même après échec d’une ou plusieurs lignes
de traitement dans la mesure où la probabilité de réponse
objective aux traitements de deuxième et troisième lignes est
plus qu’incertaine. Le geste peut alors être proposé d’emblée
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 40
Figure 1. Scanner thoracique injecté mettant en évidence une
obstruction de la basse trachée et de la bronche principale droite
responsable d’une atélectasie droite.
pour prévenir les complications liées à l’évolution locale de
la maladie. Un arbre décisionnel est proposé dans la figure 2.
Quelle aurait été votre attitude
chez un patient PS 4, traité pour
un adénocarcinome métastatique
au cerveau (responsable d’une hémiplégie
droite), actuellement responsable d’une
atélectasie droite avec envahissement de
l’artère pulmonaire ?
Le geste de bronchoscopie de désobstruction présente la
particularité d’être à la fois invasif et palliatif, rendant
la sélection des patients « candidats » délicate. Quelques
facteurs pronostiques indépendants simples peuvent aider
à guider les indications préférentielles [9]. L’état général
(médiane de survie : 2,9 mois pour un patient ASA 4 vs
13 mois pour un score ASA 2), l’histologie (médiane : 6,3 mois
pour les carcinomes épidermoïdes vs 3,7 et 3,2 mois pour
les adénocarcinomes et les carcinomes à petites cellules,
respectivement) ou encore le stade de la maladie (3 mois
pour une maladie métastatique vs 9,2 mois pour un stade IIIA)
sont autant d’éléments à prendre en compte même si les
indications doivent être discutées au cas par cas.
Ici, un certain nombre d’éléments liés aux caractéristiques de la sténose ou au patient rendent ce geste invasif
parfaitement inutile. L’atteinte de l’artère pulmonaire rend
le geste inutile, voire expose au risque d’aggravation de la
dyspnée par majoration de l’effet espace mort lors de la levée
de l’atélectasie. L’objectif du geste est l’amélioration de la
qualité de vie, démontrée par une étude récente portant
sur un large effectif (n = 947) qui relève une amélioration
significative de la qualité de vie mesurée par le questionnaire
SF-­6D [25]. Pour autant, il faut au préalable s’assurer que
l’altération de la qualité de vie est liée à l’obstruction des
voies aériennes. Dans ce dernier cas de figure, l’état général
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Générale
Générale +++ ou locale
selon opérateur, degré
d’obtruction et durée
estimée de la procédure
Générale +++ ou locale
selon opérateur, degré
d’obtruction et durée
estimée de la procédure
Générale
Générale +++ ou locale
Générale +++ ou locale
selon opérateur, degré
d’obtruction et durée
estimée de la procédure
Générale +++ ou locale
selon opérateur, degré
d’obtruction et durée
estimée de la procédure
DEBULKING
MÉCANIQUE
LASER
ÉLECTRO­
COAGULATION
ARGON PLASMA
COAGULATION
STENT SILICONE
STENT MÉTALLIQUE
CRYOTHÉRAPIE
PHOTOTHÉRAPIE
DYNAMIQUE
Anesthésie
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 41
Compressions extrinsèques ou
mixtes
Obstructions proximales
critiques, intra-luminales ou
mixtes
Obstructions proximales
critiques, intra-luminales ou
mixtes
Lésions très proximales, peu
hémorragiques et purement
intraluminales
Indication
Activation d’une substance
photo-sensibilisante par une
source lumière
Réaction photo-toxique, mort
cellulaire
• D
ilatation d’un cryogène
• C
ycles de congélation
rapide et de décongélation
lente
• D
éshydration et
cristallisation cellulaire,
microthrombi
Obstructions malignes
exophytiques non critiques
Obstructions malignes
exophytiques non critiques
(sauf cryo-extraction)
En deuxième intention sauf
• Auto-expansive
• Placée à l’aide d’un fil
lésions très nécrotiques ou
guide sous contrôle radio ou grande distorsion
bronchoscopique
• Bronchoscopie souple ou
rigide
• Larguée au travers d’un
pousse prothèse inséré par
le tube rigide
• Ajustement à la pince
Courant électrique à haute
fréquence
+/- Argon comme vecteur
(APC)
ourtes pulsations dans
• C
l’axe bronchique à 30 à
50 W
• Sonde souple ou rigide
Résection au biseau des tubes
rigides et à la pince
Principe
• AG et bronchoscopie rigide
systématique
• Altération de la clairance
ciliaire
• Risque (rare sauf
compression extrinsèque
pure) de migration
Risque de sténose cicatricielle
si traitement circonférentiel
• Coût
• Risque de perforation et
fistule bronchovasculaire
Complications sévère 20 %
(hemorragiques, perforation)
Inconvénients
• Bon contrôle symptomatique
(hémoptysie)
• Efficacité prolongée
• Faible coût
• Facile
• Pas de perforation
• Efficacité prolongée
• Synergie d’action avec
la chimiothérapie et la
radiothérapie
• Effet retardé
• Rétention de matériel
tumoral
• Bronchoscopie de nettoyage
• Photo-toxicité
• Technique contraignate
• Complications hémorragiques
• Effet retardé
(sauf cryo-extraction
et spray cryotherapy)
• Rétention de matériel
tumoral
• Nécessité
d’une seconde bronchoscopie
de nettoyage
• Mise en place facile
• Complications fréquentes
• Possible en souple (à éviter
• ( granulomes, perforation,
rupture)
hors urgence vitale et absence
• Difficiles à retirer
d’accès au rigide)
• Respect de la clairance
• Bonne tolérance
• Peu de réactions
granulomateuses et
ischémiques locales
• Faciles à retirer
• Efficacité immédiate
• Coût
• Peu de complications si
opérateur entrainé
• APC : traitement des lésions
étendues et hémorragiques
• Désobstruction rapide,
immédiate et prolongée
• Peu de complications si
opérateur entraîné
• Rapidité
• Coût
Avantages
Tableau 1. Techniques disponibles pour la prise en charge d’une obstruction maligne des voies aériennes proximales.
Cas clinique n° 5 : — Bronchoscopie interventionnelle pour la prise en charge d’une sténose maligne proximale symptomatique
41
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42
N. Guibert
OBSTRUTION DES VOIES AÉRIENNES PROXIMALES
Détresse respiratoire aiguë
OUI
-
Viabilité du lit daval et du parenchyme
Perméabilité de l’artére pulmonaire
Tumeur peu/pas chimio-sensible
OUI
BRONCHOSCOPIE
INTERVENTIONNELLE
NON
CAO > 70% et/ou symptomatique
BRONCHOSCOPIE
INTERVENTIONNELLE
NON
Chimiothérapie +/−
Radiothérapie
Bilan d’operabilité et de resecabilité
Chimiothérapie +/−
Radiothérapie
Chirurgie
CAO > 70% et/ou peu/ pas symptomatique
Bilan d’operabilité et de resecabilité
Chimiothérapie +/−
Radiothérapie
Chirurgie
Figure 2. Arbre décisionnel pour la prise en charge d’une obstruction maligne proximale des voies aériennes.
et l’atteinte neurologique dominent le tableau clinique et
rendent le pronostic sombre à court terme. Il apparaît donc
peu licite de proposer un geste invasif, et une optimisation
des soins de support semble plus pertinente ici.
Ces derniers, reposant notamment sur une prise en charge
optimale de la dyspnée et de la douleur, un soutien nutritionnel mais aussi psychosocial, ont démontré leur efficacité sur
la qualité de vie [26]. Quoi qu’il en soit, les soins de support
ne doivent pas constituer une alternative au geste mais
doivent être proposés à l’ensemble des patients au vu de
leur complémentarité avec les traitements spécifiques [26].
L’objectif dans le contexte de l’obstruction proximale est
l’amélioration de la sensation subjective de dyspnée plus que
des paramètres fonctionnels ou de l’hématose. La dyspnée
est dite « chronique » lorsqu’elle a été ressentie de manière
quotidienne sur une durée totale de 3 mois sur les 6 derniers mois ; « réfractaire » en l’absence de thérapeutique
susceptible de traiter l’étiologie sous-­jacente (échec d’un
talcage pleural ou d’une bronchoscopie interventionnelle,
par exemple, dans ce contexte).
La morphine par voie systémique constitue la thérapeutique la plus étudiée. Son utilisation en oncologie thoracique
a été extrapolée à partir des données issues d’études ayant
évalué la morphine orale à faible dose (10 à 20 mg/j) chez
les patients souffrant d’une dyspnée réfractaire compliquant
l’évolution d’une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Celles-­ci ont montré sur de petits effectifs
(randomisés vs placebo) une amélioration significative de la
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 42
dyspnée. On n’observe pas à ces doses de risque accru de
détresse respiratoire aiguë ou de confusion [27‑29].
La morphine nébulisée est parfois utilisée dans la dyspnée réfractaire en oncologie. Cette voie d’administration
découle de la présence de récepteurs opioïdes dans les voies
aériennes. L’efficacité des inhalations de morphine n’a pas
été prouvée mais les résultats inconstants sont possiblement liés aux différentes méthodes de nébulisation [29].
Une délivrance au niveau alvéolaire serait à l’origine d’une
efficacité renforcée [30].
Le furosémide nébulisé est une alternative qui n’a pas été
évaluée dans le contexte du cancer du poumon mais qui a donné
des résultats encourageants sur des petites cohortes de patients
BPCO même si le mécanisme d’action reste mal élucidé [31,32].
Si les benzodiazépines sont largement utilisées pour
le traitement symptomatique de la dyspnée réfractaire
en oncologie thoracique, les preuves de leur efficacité
manquent. Une méta-­analyse des essais randomisés ayant
évalué leur intérêt (BPCO et cancers avancés ; 7 études,
200 patients) ne rapporte pas d’amélioration significative
de la dyspnée [33]. Leur utilisation doit probablement être
réservée au traitement de deuxième ou troisième intentions
après échec des morphiniques et des mesures non pharmacologiques dans la dyspnée chronique et évidemment à la
prise en charge de la dyspnée aiguë en fin de vie.
Enfin, il existe des mesures non pharmacologiques afin de
lutter contre la dyspnée réfractaire d’origine néoplasique.
Le patient doit être formé aux techniques de respiration qui
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Cas clinique n° 5 : — Bronchoscopie interventionnelle pour la prise en charge d’une sténose maligne proximale symptomatique
limitent la sensation subjective de dyspnée et l’angoisse qui
en découle. Il s’agit de la respiration abdominale et de la
respiration à lèvres pincées ou l’expiration lente, et la limitation de la mise en jeu des muscles respiratoires accessoires
doit permettre de retarder l’épuisement respiratoire. La
ventilation non invasive est habituellement considérée trop
invasive dans le contexte de la dyspnée chronique liée à
l’évolution d’un cancer du poumon. Une étude randomisée a
montré une efficacité supérieure sur le contrôle de la dyspnée
en comparaison à l’oxygène seul [34]. Cependant, celle-­ci
est associée à l’apparition d’autres symptômes invalidants
comme l’inconfort lié au masque ou l’angoisse qu’elle génère
et ne semble pas adaptée à la fin de vie.
En conclusion, la sélection des patients pour la prise
en charge bronchoscopique d’une obstruction des voies
aériennes centrales est délicate. Si l’évaluation préalable des
caractéristiques de la sténose par l’imagerie et l’endoscopie
pour prédire une réussite du geste est simple, c’est la sélection du patient qui apparaît difficile. Aucune donnée fiable
de la littérature ne permet de définir le patient qui tirera un
grand bénéfice du geste. L’indication dépend évidemment du
retentissement clinique de l’obstruction, doit être discutée
au cas par cas, guidée par un certain nombre de facteurs
pronostiques simples (état général, histologie et stade de la
maladie, projet thérapeutique global) et doit s’intégrer dans
une prise en charge multimodale de la maladie. Les traitements de la dyspnée réfractaire des patients pour lesquels
le geste n’apparaît pas utile reposent principalement sur la
morphine par voie orale ou nébulisée, sur l’apprentissage de
techniques non médicamenteuses et sur les benzodiazépines
en deuxième intention ou en fin de vie.
Liens d’intérêts
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article.
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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 45-48
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 6
H. Nunes
Service de pneumologie, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, hôpital
Avicenne, université Paris 13, Sorbonne-Paris Cité, EA2363 « Réponses cellulaires
et fonctionnelles à l’hypoxie », Bobigny, France
Observation clinique
Motif de consultation
Un homme âgé de 78 ans est adressé en mars 2009 à la consultation de pneumologie pour
une dyspnée et la découverte d’anomalies radiologiques.
Antécédents et mode de vie
Ce patient a comme antécédents notables un pneumothorax droit traité par repos seul
à l’âge de 25 ans et un reflux gastro-œsophagien. Son seul traitement est de l’alginate
de sodium (Gaviscon®). Le patient est retraité, ancien agent comptable sans exposition
professionnelle ou environnementale. Il est ancien fumeur à 50 paquets-année.
Histoire de la maladie
Il se plaint d’une dyspnée d’effort d’aggravation progressive depuis 4 ans, associée à une
toux sèche. Le médecin traitant demande une radiographie puis une tomodensitométrie
thoracique en haute résolution (TDM-HR) (Fig. 1) et l’adresse ensuite en consultation. Le
patient est actuellement essoufflé lorsqu’il marche en côte ou à la montée d’un étage
(classe fonctionnelle New York Heart Association 3 [NYHA]). Il n’a pas de signes orientant
vers une connectivite, notamment douleurs articulaires. À l’interrogatoire, on retrouve
une bronchopathie sonore, pas de somnolence diurne nette.
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (H. Nunes).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 45
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46
H. Nunes
Figure 1. Tomodensitométrie thoracique en haute résolution montrant un aspect de syndrome fibrose-­emphysème combinant un aspect de
pneumopathie interstitielle commune (réticulations, bronchectasies par traction et rayon de miel à prédominance basale et périphérique),
et un emphysème des sommets. Dans certaines zones, il est difficile de distinguer un rayon de miel confluant macrokystique et un
emphysème para-­septal.
Examen clinique
Examens complémentaires
Le patient se dit fatigué mais son état général est conservé,
le poids est à 96 kg pour une taille de 1,78 m. La tension
artérielle est à 150/80 mmHg, le pouls à 75/min, la SpO2
en air ambiant à 95 %. Il existe un hippocratisme digital. À
l’auscultation, on note des crépitants velcros des deux bases
et une diminution du murmure vésiculaire des sommets. Le
score de l’échelle de somnolence d’Epworth est calculé à 3.
Le bilan auto-­immun est négatif (facteur rhumatoïde, facteur
antinucléaire [FAN], anticorps antigènes nucléaires solubles
[AC anti-­ECT], AC anti-­peptides cycliques citrullinés [anti-­
CCP] et anti-­cytoplasme des polynucléaires neutrophiles
[ANCA]) et le dosage d’alpha-­1 antitrypsine, normal. Les
explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) et le test de
marche des 6 minutes (TM6’) en air ambiant sont dans le
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 46
08/03/2016 13:22:03
Cas clinique n° 6
47
tableau 1. Les gaz du sang en air ambiant sont les suivants :
pH = 7,43, PaO2 = 77 mmHg, PaCO2 = 34 mmHg, bicarbonates
= 22,5 mmol/L. L’électrocardiogramme (ECG) montre un bloc
de branche droit incomplet isolé. L’échographie cardiaque
transthoracique montre un ventricule gauche (VG) de taille
normale sans anomalie de la cinétique segmentaire, une
fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) conservée
à 59 %, un rapport E/A normal ; la vitesse de régurgitation
tricuspidienne permet d’estimer la pression artérielle pulmonaire systolique (PAPs) à 30 mmHg.
Questions
• Quel est votre diagnostic et dans quel syndrome celuici s’intègre-t-il ? Quelles sont les particularités cliniques
et fonctionnelles de ce syndrome ?
• Quelles autres comorbidités pourraient participer à la
dyspnée de ce patient ?
• • Devant cette aggravation de la dyspnée, comment
confirmez-vous une progression de la FPI ?
• Cet événement coronarien est-il étonnant chez ce
patient et quel élément paraclinique simple aurait pu
aider à le prédire ?
• Sur quels éléments paracliniques suspectez-vous l’apparition d’une hypertension pulmonaire (HTP) ? Réalisezvous un cathétérisme cardiaque droit pour la confirmer ?
• Quel bilan étiologique de cette dyspnée aiguë préconisez-vous ?
La polysomnographie confirme l’existence d’un syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS), avec
un index d’apnée hypopnée (IAH) à 35/h, désaturant.
En l’absence d’agent antifibrosant disponible à l’époque
de la prise en charge, seul un traitement antireflux par
oméprazole (Mopral®) est prescrit ainsi qu’une réhabilitation respiratoire. Une pression positive continue (PPC) est
débutée mais elle est mal tolérée si bien que le patient
l’arrête rapidement de son propre chef. Le patient est revu
régulièrement. Il se plaint d’une majoration lente et isolée
de son essoufflement. Les résultats des EFR à 6 et 12 mois
figurent dans le tableau 1.
Devant cette aggravation de la dyspnée,
comment confirmez-­vous une progression
de la FPI ?
La progression de la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est
confirmée (Tableau 1). Une oxygénothérapie de déambulation à 2 L/min est instituée. En septembre 2010, le patient
accepte de participer à un essai thérapeutique de phase 3
évaluant le nintédanib en double aveugle vs placebo, ce qui
permet de le stabiliser. En août 2011, lors d’une visite de suivi
programmée, le patient se plaint d’une majoration franche
de son essoufflement depuis 2 mois. L’ECG est modifié, avec
l’apparition de signes de nécrose antérieure. La troponine
est négative.
En reprenant l’interrogatoire, le patient signale qu’il a
eu en mi-­juin 2011 une douleur angineuse typique qui a duré
2 heures. Le patient est vu par un cardiologue qui confirme
l’infarctus antérieur du myocarde. À l’échographie cardiaque
transthoracique, la fraction d’éjection ventriculaire gauche
(FEVG) est diminuée à 45 %, avec une hypokinésie apicale
et antéro-­apicale, et une pression artérielle pulmonaire
Tableau 1. Évolution des explorations fonctionnelles respiratoires et du TM6’.
Explorations fonctionnelles respiratoires
VEMS, ml (% valeur théorique)
CVF, ml (% valeur théorique)
VEMS/CVF, % (% valeur théorique)
CPT, ml (% valeur théorique)
VR, ml (% valeur théorique)
DLCO (% valeur théorique)
KCO (% valeur théorique)
TM6’
Débit O2
Distance parcourue, m
SpO2 avant test, %
SpO2 minimale, %
Borg avant test
Borg après test
Mars 2009
Septembre 2009
Mars 010
Mars 2012
2 810 (83)
3 630 (81)
76,9 (101)
5 720 (80)
2 070 (76)
40
72
2 720 (80)
3 550 (80)
75,7 (100)
5 630 (79)
2 040 (75)
39
65
2 360 (71)
2 640 (60)
82,1 (108)
– – 22
44
2 410 (73)
2 810 (64)
80,4 (106)
– – 18
35
AA
435
94
88
0
5
AA
410
94
87
2
6
AA
380
92
83
3
8
– – – – – – Abréviations : VEMS : volume expiré maximal en une seconde, CVF : capacité vitale forcée, CPT : capacité pulmonaire totale, VR :
volume résiduel, DLCO : capacité de diffusion du monoxyde de carbone, KCO : capacité de diffusion du monoxyde de carbone rapporté
au volume alvéolaire. AA : air ambiant.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 47
08/03/2016 18:52:07
48
systolique (PAPs) à 40 mmHg. La scintigraphie myocardique
montre une image d’hypofixation apicale constante au
repos et à l’effort avec dilatation marquée de la cavité VG
et hypokinésie diffuse sans aspect d’ischémie d’effort. La
coronarographie retrouve des lésions bitronculaires (sténose non significative de l’interventriculaire antérieure,
et sténose significative de la première diagonale et de
l’artère interventriculaire postérieure), sans indication à
une revascularisation.
Cet événement coronarien est-­il
étonnant chez ce patient et quel élément
paraclinique simple aurait pu aider
à le prédire ?
Un traitement associant clopidogrel-­acide acétylsalicylique (Duoplavin ®), périndopril (Coversyl®), ivabradine
(Procoralan®), atorvastatine (Tahor®) est mis en place. L’essai
thérapeutique est arrêté.
La dyspnée s’aggrave progressivement, au moindre effort
(classe fonctionnelle NYHA 4), avec l’apparition d’œdèmes
des membres inférieurs et une orthopnée à un oreiller. Les
besoins en oxygène augmentent, avec la nécessité d’une
oxygénothérapie de repos à 1 L/min et un débit jusqu’à 5 L/
min à l’effort.
Une nouvelle échographie cardiaque transthoracique en
mars 2012 montre une FEVG à 55 %, des pressions de remplissage normales, une dilatation des cavités droites et une
PAPs estimée à 49 mmHg sur la vitesse de régurgitation tricuspidienne. L’angio-­TDM thoracique ne montre pas d’embolie
pulmonaire (EP) et une progression des lésions de fibrose
et d’emphysème. L’EFR est rapportée au tableau 1. Les gaz
du sang en air ambiant sont les suivants : pH : 7,41, PaO2 :
65 mmHg, PaCO2 : 42 mmHg, bicarbonates : 27 mmol/L. Le
Brain Natriuretic Peptide (BNP) est à 500 pg/ml.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 48
H. Nunes
Sur quels éléments paracliniques
suspectez-­vous l’apparition d’une
hypertension pulmonaire (HTP) ?
Réalisez-­vous un cathétérisme cardiaque
droit pour la confirmer ?
Il est décidé de ne pas réaliser de cathétérisme cardiaque
droit et le patient reçoit un traitement par furosémide (Lasilix®).
En décembre 2012, il vient aux urgences en raison d’une
détérioration respiratoire. Il y a un mois, après un contage
avec son petit-­fils de 3 ans, il a fait un épisode d’allure virale,
avec de la fièvre à 39°C, des frissons, des myalgies et une
rhinorrhée claire. Il a vu son médecin traitant qui a prescrit
un traitement symptomatique qui a permis de l’améliorer
transitoirement. Depuis 1 semaine, son essoufflement s’est
aggravé rapidement avec une douleur basi-­thoracique droite,
une toux et des expectorations claires.
À l’examen, la tension artérielle est à 120/70 mmHg, le
pouls à 115/min, la fréquence respiratoire à 30/min, la SpO2
sous O2 à 1 L/min à 85 %. Il existe un tirage et une cyanose.
L’auscultation pulmonaire est inchangée. Les mollets sont
souples et indolores et on note une turgescence jugulaire et un
reflux hépato-­jugulaire sans œdèmes des membres inférieurs.
Les gaz du sang sous O2 à 1 L/min sont les suivants :
pH : 7,43, PaO2 : 47 mmHg, PaCO2 : 33 mmHg, bicarbonates : 27 mmol/L. Le bilan biologique montre une protéine
C-­réactive à 120 mg/L, une procalcitonine à 0,1 ng/mL,
des D-­dimères à 800 ng/ml et un brain natriuretic peptide
à 1 080 pg/ml. Une antibiothérapie par Rocéphine® et
Rovamycine® est instituée d’emblée, associée à une majoration des diurétiques et une oxygénothérapie à haut débit
au masque à haute concentration.
Quel bilan étiologique de cette dyspnée
aiguë préconisez-­vous ?
08/03/2016 18:52:07
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 49-59
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
Cas clinique n° 6 :
Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
H. Nunes
Service de pneumologie, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, hôpital Avicenne,
université Paris 13, Sorbonne-Paris Cité, EA2363 « Réponses cellulaires
et fonctionnelles à l’hypoxie », Bobigny, France
Commentaires
Quel est votre diagnostic et dans quel syndrome
celui-ci s’intègre-t-il ? Quelles sont les particularités cliniques
et fonctionnelles de ce syndrome ?
La tomodensitométrie thoracique en haute résolution (TDM-HR) montre un pattern de pneumopathie interstitielle commune certaine, caractérisée par l’association de réticulations, des
bronchectasies par traction, un rayon de miel et une prédominance basale et périphérique
sans signe d’incompatibilité. En l’absence de cause retrouvée, notamment exposition professionnelle ou environnementale, connectivite/vascularite patente ou prise médicamenteuse
pneumotoxique, le diagnostic de fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) peut être retenu [1].
Ici, il existe un important emphysème des sommets avec par endroits des zones où il est
difficile de distinguer un rayon de miel confluant macrokystique d’un emphysème paraseptal.
Il s’agit d’une FPI dans le cadre d’un syndrome fibrose-emphysème (SFE).
Le SFE a été rapporté essentiellement au cours des pneumopathies interstitielles diffuses
(PID) idiopathiques [2], mais il peut également se rencontrer dans d’autres contextes
étiologiques, en particulier au cours des connectivites, notamment la polyarthrite rhumatoïde [3], des vascularites à anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) [4], ou
des formes familiales de fibrose pulmonaire [5]. La réalité du SFE reste encore controversée,
le débat étant de considérer le SFE comme une entité bien individualisée ou comme la
simple combinaison de deux conditions survenant sur un terrain commun. En effet, près
de 70 % des patients atteints de FPI étant fumeurs anciens ou actifs, il n’est pas étonnant
qu’une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) puisse être associée, avec ou
sans emphysème. La prévalence d’une BPCO chez les patients ayant une FPI varie beaucoup
dans la littérature, entre 6 et 51 %, en fonction des cohortes et des critères diagnostiques
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (H. Nunes).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 49
08/03/2016 13:22:04
50
H. Nunes
Figure 1. Tomodensitométrie thoracique en haute résolution montrant un aspect de syndrome fibrose-­emphysème combinant un aspect de
pneumopathie interstitielle commune (réticulations, bronchectasies par traction et rayon de miel à prédominance basale et périphérique),
et un emphysème des sommets. Dans certaines zones, il est difficile de distinguer un rayon de miel confluant macrokystique et un
emphysème para-­septal.
utilisés [6]. Dans la cohorte nationale prospective Cohorte
Fibrose (COFI) incluant des cas de FPI incidents, le SFE
touche 19,5 % de l’ensemble des patients ayant une FPI de
découverte récente.
Le SFE s’accompagne habituellement d’un profil clinique et fonctionnel particulier que présente le patient
ici [2,7,8]. Les patients sont le plus souvent des hommes,
très tabagiques. Ils ont une dyspnée sévère (NYHA 3 ou 4
dans 46 % des cas). L’EFR montre une capacité de diffusion
du monoxyde de carbone (DLCO) effondrée contrastant
avec des volumes pulmonaires relativement préservés du
fait des effets cumulés de la fibrose et de l’emphysème sur
la diffusion et des effets opposés de la restriction et de la
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 50
distension [2,7,8]. Le rapport volume expiré maximal en
une seconde/capacité vitale forcée (VEMS/CVF) est plus
bas que chez les patients ayant une FPI sans emphysème
et il peut éventuellement y avoir un trouble ventilatoire
obstructif [2,7,8]. L’hypoxémie est également plus marquée, et la désaturation à l’exercice plus profonde. Le
Composite Physiological Index (CPI) a été conçu pour apprécier la sévérité de la FPI en tenant compte de l’effet sur
la fonction respiratoire de l’emphysème associé [CPI = 91
– (0,65 × DLCO %) – (0,53 × CVF %) + (0,34 × VEMS % )] [9].
Il serait particulièrement adapté au SFE [10].
Les patients ayant un SFE développent fréquemment une
hypertension pulmonaire (HTP) [10]. Malgré des données
08/03/2016 13:22:05
Cas clinique n° 6 : — Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
contradictoires, la survie des patients ayant un SFE est
probablement plus sombre que celle des patients ayant une
FPI sans emphysème, la différence étant essentiellement
dictée par l’HTP [10,11].
Quelles autres comorbidités pourraient
participer à la dyspnée de ce patient ?
Le patient a un indice de masse corporelle (IMC) à 30,3 kg.m–2,
il est obèse, ce qui pourrait contribuer à sa dyspnée. L’IMC
des patients ayant une FPI est élevé [6], comme l’ont attesté
non seulement une étude américaine (28,2 ± 4,6 kg.m–2) mais
aussi la cohorte nationale COFI (27,4 ± 4,3 kg.m–2), et plus de
70 % des patients ont un surpoids (obésité : 34 % dans l’étude
américaine et 25 % dans COFI) [12]. La surcharge pondérale
est un élément important à prendre en considération dans
la FPI car elle peut participer à la dyspnée et imposer des
mesures spécifiques. L’IMC pourrait être associé à la mortalité, les patients en surpoids ayant, de façon surprenante,
un meilleur pronostic [12].
Le score d’Epworth est ici normal, mais cela n’exclut
pas l’existence d’un syndrome d’apnée obstructive du
sommeil (SAOS). Le SAOS est une complication fréquente
de la FPI, avec une prévalence de 59 et 88 % dans deux
études américaines pour un seuil d’index d’apnées/
hypopnées (IAH) ≥ 5/h [13,14]. Ces études rétrospectives
étaient toutefois limitées par des biais de recrutement. Dans
l’étude grecque prospective de Mermigkis et al., explorant
par polysomnographie 92 patients consécutifs ayant une
FPI nouvellement diagnostiquée, 85 % avaient un SAOS.
Celui-­ci était léger (IAH ≥ 5/h et < 15/h) dans 20 % des cas,
et modéré à sévère (IAH ≥ 15/h) dans 65 % [15]. Les résultats
préliminaires de la cohorte nationale prospective COFI sont
similaires puisque 62 % des patients ont un SAOS modéré à
sévère et 40 % un SAOS sévère (IAH ≥ 30/h).
Les liens pathogéniques entre FPI et SAOS sont méconnus.
Bien que les patients ayant une SAOS modéré à sévère aient
un IMC et une circonférence du cou supérieurs à ceux sans
SAOS ou avec un SAOS léger, les corrélations entre IMC et
IAH sont globalement médiocres [13‑15]. Il n’y a pas de
relation nette entre la présence ou la sévérité du SAOS et les
paramètres fonctionnels respiratoires [13‑15]. Par ailleurs,
les questionnaires dédiés ont une mauvaise performance
pour dépister un SAOS dans le contexte de FPI, avec une
sensibilité de 75 % et une spécificité de 15 % pour l’échelle
de somnolence d’Epworth, et une sensibilité de 88 % et
une spécificité de 50 % pour le Sleep Apnea Scale of Sleep
Disorders [13]. Il faut souligner que dans COFI, les patients
ayant un SAOS modéré à sévère ont plus fréquemment une
cardiopathie ischémique (53,6 % vs 11,7 %, p = 0,009).
La question d’une exploration systématique du sommeil
chez les patients ayant une FPI mérite donc d’être soulevée
d’autant plus que quelques données récentes suggèrent une
influence du SAOS et/ou de son traitement sur le pronostic.
La désaturation nocturne pourrait excéder celle d’un exercice maximal chez les patients ayant une FPI [16,17], et
être associée au score de dyspnée, à la pression artérielle
pulmonaire systolique (PAPs) et à la survie [16]. De plus, les
patients traités et compliants à la CPAP ont une amélioration
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 51
51
de la qualité de vie et des variables du sommeil mesurées
par divers instruments, en particulier le Functional Outcomes
of Sleep Questionnaire et le Fatigue Severity Scale, 1 an
après l’instauration de la ventilation [15]. Malgré des biais
évidents, les patients compliants auraient également une
meilleure survie que les patients non compliants [15].
Pour finir, le défaut d’entraînement à l’exercice a été
peu étudié dans la FPI, mais il est probable qu’il contribue
à la dyspnée chez une proportion significative des patients,
ce qui explique le bénéfice de la réhabilitation respiratoire
constaté dans certaines études [18,19]. Une épreuve d’effort,
lorsqu’elle est réalisable, est intéressante pour objectiver
ce mécanisme de la dyspnée.
Devant cette aggravation de la dyspnée,
comment confirmez-­vous une progression
de la FPI ?
L’histoire naturelle de la FPI est encore insuffisamment
connue. Alors que la majorité des patients atteints ont
un déclin fonctionnel lentement progressif qui aboutit à
l’insuffisance respiratoire terminale et au décès, certains
restent parfaitement stables. Une minorité va avoir une détérioration plus rapide et inexpliquée de la maladie, subaiguë
ou aiguë, qui peut survenir chez des patients auparavant
progresseurs ou stables [20].
La surveillance des patients ayant une FPI repose principalement sur une EFR et un test de marche de 6 minutes
(TM6’) tous les 3 à 6 mois. Seules les mesures successives
de la CVF et de la DLCO ont été correctement évaluées
pour apprécier l’évolution fonctionnelle de la FPI [20]. La
CVF a été choisie plutôt que la CVL. Les deux sont généralement identiques au cours des pathologies respiratoires
restrictives, mais certains patients ont plus de facilité à
faire une CVL qu’une CVF, notamment les tousseurs. Malgré
les biais de sélection inhérents à ce type d’essai, la vitesse
de déclin de la CVF a pu être estimée à partir du bras
placebo des protocoles thérapeutiques entre 150 et 200 ml/
an [20]. Une progression significative de la FPI est définie
par une baisse des valeurs absolues de la CVF ≥ 10 % ou de
la DLCO ≥ 15 % sur 6 mois par rapport à l’EFR initiale. La
progression doit idéalement être confirmée sur un deuxième
EFR à 1 mois d’intervalle [20]. Ces chiffres ont été établis
sur la base de leur association avec la mortalité dans de
grands échantillons ou dans les essais cliniques sur la FPI.
Un déclin de la CVF dit « marginal », entre 5 et 10 %,
classiquement considéré dans les limites de reproductibilité
du test, est aussi associé à une surmortalité et ne doit donc
pas être sous-­estimé [21,22].
La variation de la CVF pourrait être moins appropriée
dans le SFE que dans la FPI sans emphysème pour juger de
l’aggravation de la maladie [7,8]. Les patients ayant un SFE
ont un déclin annuel de la CVF significativement moindre [7].
Une variation longitudinale du VEMS ≥ 10 % semble être le
meilleur indice fonctionnel associé à la mortalité [8].
Plusieurs études ont aussi montré qu’une diminution de
la distance parcourue au TM6’ ≥ 50 m sur 6 mois est associée
à la mortalité [23]. Une perte de 30 m pourrait constituer le
08/03/2016 13:22:05
52
H. Nunes
seuil le plus pertinent d’un point de vue pronostique [23,24].
L’intérêt pronostique de répéter la TDM-­HR dans le suivi des
patients ayant une FPI a été mal évalué, en particulier sa
valeur ajoutée par rapport aux EFR, et la mesure du score
de fibrose est complexe en pratique clinique.
Cet événement coronarien est-­il
étonnant chez ce patient et quel élément
paraclinique simple aurait pu aider
à le prédire ?
Bien que les mécanismes pathogéniques soient incomplètement élucidés, l’association entre FPI et coronaropathie
n’est probablement pas fortuite [6]. Plus généralement
devant un patient ayant une FPI essoufflé, il ne faut surtout
pas méconnaître une éventuelle comorbidité cardiovasculaire [6]. La forte prévalence de ces dernières a en effet
été rapportée dans plusieurs cohortes de FPI, avec un niveau
atteignant 45 % pour la cardiopathie ischémique et 11 % pour
l’insuffisance cardiaque dans une cohorte américaine [25].
La relation entre coronaropathie et FPI a été étayée par
plusieurs études cas-­contrôles. Dans le travail princeps
de Kizer et al., la prévalence d’une coronaropathie à la
coronarographie était de 15,9 % chez les patients en bilan
prégreffe ayant une « fibrose pulmonaire », ce qui correspondait à un HR de 2,37 [IC 95 % : 1,22‑4,60] par rapport
aux patients ayant une pathologie respiratoire non fibrosante
(HR = 4,42 en présence de lésions pluritronculaires) [26]. Une
coronaropathie significative (sténose > 50 % sur au moins une
artère) est plus fréquente dans la FPI que dans l’emphysème
(28,6 % vs 9,8 %, p = 0,019) [27] et que dans la BPCO (28,8 %
vs 16,1 %, p < 0,081) [28]. De façon intéressante, l’étude
de Hubbard et al. issue du réseau britannique de médecins
généralistes a analysé le risque de maladies cardiovasculaires par rapport à la population générale avant et après
le diagnostic de la FPI [29]. Avant le diagnostic de la FPI, il
existait déjà un risque accru de cardiopathie ischémique.
Après le diagnostic de FPI, l’incidence d’un nouveau et
premier événement coronarien aigu était plus élevée chez
les patients ayant une FPI que chez les sujets contrôles,
évaluée à 19,3/1 000 personnes-­année (HR = 3,14 [IC 95 % :
2,2‑4,87]) [29]. Ces résultats ont été confirmés dans un
autre travail plus récent, y compris après correction sur les
facteurs de risque cardiovasculaires [30].
Les maladies cardiovasculaires et la FPI partagent trois
facteurs de risque majeurs : l’âge, le sexe masculin et le
tabac. Le surpoids et le SAOS pourraient aussi jouer un rôle.
Enfin, les patients ayant une FPI auraient également un risque
accru de diabète et d’hypertension artérielle (HTA) [6,30]. Il
faut cependant souligner que l’association observée entre FPI
et coronaropathie persiste après ajustement sur les facteurs
de risque cardiovasculaires et qu’une coronaropathie peut
être découverte chez des patients asymptomatiques et sans
facteur de risque cardiovasculaire. De plus, il a été montré
que l’existence d’une coronaropathie grève significativement
la survie des patients ayant une FPI [28].
La recherche systématique d’une coronaropathie chez
les patients ayant une FPI pourrait donc se justifier, mais les
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 52
Figure 2. TDM-­HR thoracique révélant sur les coupes
médiastinales des calcifications coronariennes sévères (grade 4) de
l’interventriculaire antérieure, diagonale et circonflexe.
modalités précises de dépistage ont été mal évaluées. Un
moyen simple pourrait être de regarder les coronaires sur
les coupes médiastinales de la TDM-­HR thoracique, comme
cela est bien illustré chez le patient rapporté ici (Fig. 2). En
effet, il a été suggéré que la performance de la TDM standard
non injectée et sans synchronisation cardiaque pourrait être
comparable à celle du coro-­scanner pour l’évaluation de
la charge calcique. La TDM-­HR a fait l’objet d’une étude
rétrospective incluant 57 patients ayant une FPI investigués
par coronarographie dans le cadre d’un bilan prégreffe [31].
Le score calcique sur la TDM-­HR était évalué visuellement
par trois radiologues : grade 0 = absence de calcifications
visibles (score : 0) ; grade 1 = traces de calcifications (score :
1‑10) ; grade 2 = calcifications légères (score : 11‑100) ;
grade 3 = calcifications modérées (score : 101‑400) et grade
4 = calcifications sévères (score > 400). La présence de
lésions coronariennes de tout type à la coronarographie était
prédite par un score calcique de grade 3 ou 4 (HR = 6,18,
[IC 95 % : 1,6‑61,0]). Les résultats étaient encore meilleurs
pour prédire une coronaropathie significative, avec un
HR de 25,2 (sensibilité : 81 %, spécificité : 85 %, valeur
prédictive positive [VPP] : 68 % et négative [VPN] : 92 %).
La reproductibilité interobservateur était très bonne, avec
un kappa de 0,86 [31].
Sur quels éléments paracliniques
suspectez-­vous l’apparition d’une
hypertension pulmonaire (HTP) ?
Réalisez-­vous un cathétérisme cardiaque
droit pour la confirmer ?
Le patient rassemble ici plusieurs éléments qui suggèrent
l’existence d’une HTP : une PAPs ≥ 45 mmHg associée à une
dilatation des cavités droites à l’échographie transthoracique
(ETT), une DLCO < 30 %, un rapport CVF %/DLCO % > 1,5 et
08/03/2016 13:22:05
Cas clinique n° 6 : — Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
Figure 3. TDM-­HR thoracique montrant un verre dépoli étendu
multifocal.
un Brain Natriuretic Peptide (BNP) élevé. Le cathétérisme
cardiaque droit ne doit pas être systématique, il pourrait
se justifier ici s’il est impossible de trancher entre une HTP
pré-­ou postcapillaire chez ce patient ayant une SFE et une
cardiopathie ischémique.
La prévalence de l’HTP dans la FPI s’échelonne entre
20 et 50 % selon le stade évolutif de la maladie et les critères diagnostiques retenus [6]. L’HTP est généralement
modérée puisque seulement 2 à 9,1 % des candidats à
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 53
53
une transplantation pulmonaire ont une PAP moyenne
(PAPm) > 40 mmHg [32,33]. L’HTP est particulièrement
fréquente au cours du SFE, où elle concerne jusqu’à 90 %
des cas, et dans ce contexte, elle est fréquemment sévère
(PAPm > 40 mmHg dans 48 % des cas) [2,11,34]. L’HTP
retentit sur le statut fonctionnel des patients ayant une
FPI et leur qualité de vie. Ils sont plus dyspnéiques que les
patients indemnes d’HTP, ils recourent plus fréquemment
à une assistance pour leurs activités de la vie courante et
sont plus enclins à être hospitalisés [33]. Leur capacité à
l’exercice est réduite, avec une distance plus courte et/
ou une désaturation plus intense au TM6’, et à l’épreuve
d’effort une VO2max plus basse et une limitation respiratoire
plus prononcée [32,35‑38]. L’HTP a un impact significatif sur
la survie des patients ayant une FPI indépendamment des
paramètres fonctionnels respiratoires.
Il est donc important de rechercher une HTP au cours de
la FPI, mais son diagnostic peut être difficile. Un algorithme
est proposé dans la figure 4. Bien qu’imparfaite, l’ETT reste
l’examen le mieux évalué. La vitesse de régurgitation tricuspidienne (VRT) n’est malheureusement mesurable que
chez la moitié des patients ayant une PID, et l’estimation de
la PAPs est imprécise [37,39,40]. Arcasoy et al. ont montré
qu’un seuil de PAPs ≥ 45 mmHg avait une sensibilité, spécificité, VPP et VPN de 85, 17, 60 et 44 %, respectivement, chez
des candidats à une transplantation avec diverses PID [39].
Des résultats semblables ont été obtenus dans des études
restreintes à la FPI [37,40]. La normalité de la PAPs à l’ETT ne
permet donc pas d’exclure une HTP. La détection d’anomalies
morphologiques du ventricule droit est un élément supplémentaire à prendre en considération indépendamment de la
VRT. Considérant ces anomalies, la sensibilité, spécificité,
VPP et VPN étaient de 46 %, 53 %, 57 % et 74 % [39].
L’apport diagnostique des EFR est modeste. Il n’y a pas
de corrélation entre les volumes pulmonaires et la PAPm. Le
niveau d’hypoxémie et la diminution de la DLCO semblent les
meilleurs paramètres pour identifier une HTP. La nécessité
d’une oxygénothérapie associée à une DLCO < 40 % serait
spécifique de l’existence d’une HTP chez les patients ayant
une FPI, mais très peu sensible [32]. La diminution de la DLCO
peut néanmoins être due à l’HTP, à la FPI elle-­même ou à
l’emphysème éventuellement associé. C’est la raison pour
laquelle certains auteurs ont suggéré que le rapport CVF %/
DLCO %, qui traduirait un trouble de diffusion « disproportionnée » par rapport au degré de restriction, pourrait être
un indicateur plus fiable de l’existence d’une maladie vasculaire, avec un seuil à 1,5. Dans l’étude de Nathan et al., une
DLCO < 40 % avait une sensibilité de 75,7 %, une spécificité
de 34,4 %, un chiffre < 30 %, une sensibilité de 53,7 % et une
spécificité de 72,1 %. Le rapport CVF %/DLCO % > 1,5 était un
peu meilleur, avec une sensibilité de 75,6 % et une spécificité
de 55,7 % [41]. Zisman et al. ont créé un modèle de prédiction basé sur une régression linéaire multivariée intégrant la
SpO2 en air ambiant et le rapport CVF %/DLCO %. L’équation
obtenue [PAPm = –11,9 + 0,272 × SpO2 + 0,0659 × (100-­SpO2)
2 + 3,06 × (FVC %/DLCO %)] avait une meilleure performance
diagnostique que l’ETT [40,42]. L’inconvénient est bien sûr
la complexité du calcul en routine. La mesure du facteur
membranaire et du volume capillaire par la technique de
double diffusion permet théoriquement de distinguer la part
respective de la composante interstitielle et vasculaire dans
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54
H. Nunes
Patient ayant une FPI
Nécessité d’une oxygénothérapie
DLCO < 40%
Ratio CVF%/DLCO% > 1,5
Candidats à une transplantation pulmonaire
ETT
VRT ≤ 2,5m/s
2,5 < VRT ≤ 3,4m/s
VRT > 3,4 m/s* ou anomalies
des cavités cardiaques droites
Mesure de la VRT impossible
Incertitude persistante sur ICG
±
Episodes répétés d’ICD
±
Cathétérisme cardiaque droit
PAPm> 25 mmHget PAPO < 15 mmHg
Suivi selon les indications
cliniques
Suivi ETT tous les 6 mois
Exclusion des autres causes d’HTP
Figure 4. Algorithme pour le diagnostic d’HTP chez les patients ayant une FPI.
Abréviations : CVF : capacité vitale forcée, DLCO : capacité de diffusion du monoxyde de carbone, ETT : échographie cardiaque
transthoracique, VRT : vitesse de régurgitation tricuspidienne, ICG : insuffisance cardiaque gauche, ICD : insuffisance cardiaque droite,
PAPm : pression artérielle pulmonaire moyenne, PAPO : pression artérielle pulmonaire d’occlusion, HTP : hypertension pulmonaire.
* Bien que l’estimation de la pression artérielle systolique (PAPs) à l’ETT reste imprécise, une VRT > 3,4 m/s correspond à une
PAPs > 55‑60 mmHg, soit une suspicion d’hypertension pulmonaire sévère ou « disproportionnée ».
± : La réalisation du cathétérisme cardiaque doit être discutée au cas par cas dans la mesure où il n’y a pas de données suffisantes sur
l’efficacité d’un traitement spécifique de l’hypertension artérielle pulmonaire.
la réduction de la DLCO, mais sa capacité à détecter une
HTP n’a jamais été évaluée dans la FPI. L’épreuve d’effort
peut être utile, lorsqu’elle est réalisable, en objectivant une
augmentation de l’espace mort (VD/VT) en faveur d’une HTP.
En cas d’HTP, la TDM thoracique peut mettre en évidence
une dilatation de l’artère pulmonaire (AP) (diamètre maximal
du tronc de l’AP > 29 mm ou supérieur à celui de l’aorte
ascendante). Toutefois ni le diamètre de l’AP, ni le rapport
AP/aorte n’ont fait leur preuve comme prédicteur d’une HTP
chez les patients ayant une PID [43,44], peut-­être parce que
les forces de traction liées à la restriction pulmonaire provoquent une distension mécanique de l’AP sans nécessairement
d’HTP sous-­jacente. Peu d’études se sont intéressées à la
valeur prédictive du dosage du BNP ou du N-­terminal pro-­
BNP. D’après une étude incluant des patients ayant diverses
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 54
PID, un dosage élevé pourrait indiquer l’existence d’une HTP
définie par une PAPm > 35 mmHg [36].
Bien que le diagnostic définitif d’HTP repose sur le
cathétérisme cardiaque droit, il s’agit d’un examen invasif
qui ne doit être effectué que chez des patients sélectionnés.
Les recommandations de la Task Force prescrivent la réalisation d’un cathétérisme cardiaque droit dans les situations
suivantes :
(i) confirmation d’une HTP chez les candidats à une transplantation pulmonaire ;
(ii) suspicion d’HTP sévère ou « disproportionnée » qui pourrait éventuellement relever d’un traitement de l’HTAP ;
(iii) poussées d’insuffisance cardiaque droite récurrentes ;
(iv) ETT non concluante alors que la suspicion clinique est
forte [45].
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Cas clinique n° 6 : — Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
Pourrait y être ajoutée la situation où il persiste une
incertitude quant à l’existence d’une cardiopathie gauche,
en particulier une dysfonction diastolique qui n’est pas rare
chez les patients ayant une FPI, et peut être sous-­estimée
par l’ETT [38]. Il faudra néanmoins mettre en balance les
risques et les bénéfices individuels. En effet, le traitement de
l’HTAP n’a jamais démontré formellement son efficacité dans
l’HTP associée à la FPI, notamment dans le seul essai récent
bien conduit avec le bosentan [46]. De plus, ce traitement
pourrait être délétère et aggraver l’hypoxémie chez les
patients ayant une FPI par le biais d’une majoration des
inégalités ventilation/perfusion.
55
Quel bilan étiologique de cette dyspnée
aiguë préconisez-­vous ?
En cas de détérioration respiratoire aiguë au cours de la
FPI, un bilan étiologique doit être réalisé systématiquement
(Tableau 2). En effet, les causes sont variées et il faut savoir
les éliminer avant de conclure à une exacerbation aiguë. Une
cause est identifiée chez près de la moitié des patients [47].
Cette détérioration respiratoire aiguë peut être due à une
infection respiratoire (69,8 %), un pneumothorax (12,3 %),
une insuffisance cardiaque (6,8 %), une embolie pulmonaire
(2,7 %) ou rester d’origine incertaine (8,2 %) [47].
Tableau 1. Évolution des explorations fonctionnelles respiratoires et du TM6’.
Explorations fonctionnelles respiratoires
VEMS, ml (% valeur théorique)
CVF, ml (% valeur théorique)
VEMS/CVF, % (% valeur théorique)
CPT, ml (% valeur théorique)
VR, ml (% valeur théorique)
DLCO (% valeur théorique)
KCO (% valeur théorique)
TM6’
Débit O2
Distance parcourue, m
SpO2 avant test, %
SpO2 minimale, %
Borg avant test
Borg après test
Mars 2009
Septembre 2009
Mars 010
Mars 2012
2 810 (83)
3 630 (81)
76,9 (101)
5 720 (80)
2 070 (76)
40
72
2 720 (80)
3 550 (80)
75,7 (100)
5 630 (79)
2 040 (75)
39
65
2 360 (71)
2 640 (60)
82,1 (108)
– – 22
44
2 410 (73)
2 810 (64)
80,4 (106)
– – 18
35
AA
435
94
88
0
5
AA
410
94
87
2
6
AA
380
92
83
3
8
– – – – – – Abréviations : VEMS : volume expiré maximal en une seconde, CVF : capacité vitale forcée, CPT : capacité pulmonaire totale, VR :
volume résiduel, DLCO : capacité de diffusion du monoxyde de carbone, KCO : capacité de diffusion du monoxyde de carbone rapporté
au volume alvéolaire. AA : air ambiant.
Tableau 2. Bilan proposé devant une détérioration respiratoire aiguë de FPI.
Bilan biologique
Bilan standard, LDH, D-­dimères, (NT-­pro)-­BNP, procalcitonine
Imagerie thoracique
Radiographie thoracique
TDM-­HR thoracique
Angio-­TDM thoracique (D-­dimères élevés, forte probabilité clinique EP)
Bilan cardiovasculaire
ECG
ETT (PAPs, FEVG)
Enquête infectieuse
Hémocultures
Examen cytobactériologique des crachats
Antigénuries légionelle et pneumocoque
Sérologies mycoplasme, légionnelle, Chlamydiæ
Prélèvement naso-­pharyngé PCR multiplex virus et mycoplasme
Patient sous corticoïdes ou immunosuppresseurs : expectoration induite pour
Pneumocystis jirovecii si LBA non réalisable
LBA si réalisable : bactériologie standard, mycologie, parasitologie dont
Pneumocystis jiroveci, virologie
Abréviations : LDH : lactico-­déshydrogénase, BNP : Brain Natriuretic Peptide, TDM-­HR : tomodensitométrie en haute résolution, ECG :
électrocardiogramme, ETT : échographie transthoracique, PAPs : pression artérielle pulmonaire systolique, FEVG : fraction éjection
ventriculaire gauche, LBA : lavage broncho-­alvéolaire, EP : embolie pulmonaire.
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56
H. Nunes
Tableau 3. Critères diagnostiques de l’exacerbation aiguë de FPI [1].
Exacerbation aiguë « certaine »*
Exacerbation aiguë « suspecte »
Diagnostic antérieur ou concomitant de FPI
Apparition ou aggravation inexpliquée de la dyspnée ≤ 30 jours
TDM-­HR : (nouvelles) opacités en verre dépoli et/ou condensations bilatérales
surajoutées à un aspect réticulé ou de rayon de miel compatible avec une PIC
Absence d’infection : aspiration trachéale ou LBA
Exclusion des causes potentiellement responsables
Insuffisance ventriculaire gauche
Embolie pulmonaire
Pneumothorax
Causes d’Acute Lung Injury
> 1 critère manquant
Dyspnée > 30 jours
Opacités unilatérales
Absence de prélèvements
perendoscopiques
Abréviations : TDM-­HR : tomodensitométrie en haute résolution, PIC : pneumopathie interstitielle commune, LBA : lavage broncho-­
alvéolaire.
*Les critères gazométriques ne sont plus indispensables, contrairement à la définition initiale [57,58].
A
B
Figure 5. A : Coupe d’angio-­TDM thoracique montrant un verre dépoli diffus. B : Coupes séquentielles en inspiration maximale confirmant
que le verre dépoli est artéfactuel.
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Cas clinique n° 6 : — Une fibrose pulmonaire idiopathique qui s’essouffle
Concernant les infections respiratoires, des prélèvements
perendoscopiques sont requis pour pouvoir porter le diagnostic d’exacerbation « certaine » selon les recommandations
internationales (Tableau 3) [48]. Néanmoins, comme ici, une
fibroscopie bronchique est rarement envisageable compte
tenu de l’état respiratoire précaire des patients et le LBA
peut même déclencher ou aggraver une exacerbation. Le
diagnostic différentiel est donc souvent très difficile, voire
impossible. Une fièvre et une élévation de la CRP, bien
que plus rares, sont possibles au cours d’une exacerbation
aiguë [47,49,50], mais la procalcitonine est normale [51].
En cas de documentation microbiologique, les germes responsables sont variés, les opportunistes représentant 57,1 %
des cas jusqu’à encore récemment [47]. À ce titre il faut
signaler que dans l’essai PANTHER, les exacerbations étaient
significativement plus fréquentes chez les patients du bras
trithérapie (prednisone + azathioprine + N-­acétylcystéine),
soulevant le rôle potentiel d’une infection passée inaperçue
chez des patients immunodéprimés [52]. Depuis l’utilisation
moindre des traitements par corticoïdes et immunosuppresseurs, le risque d’infections opportunistes est faible, mais il
reste exceptionnellement possible [47].
Les infections virales occupent une place particulière.
En effet, les virus peuvent être la cause d’une détérioration
respiratoire aiguë, mais ils pourraient également être des
triggers d’une véritable exacerbation, comme cela est le cas
ici. Leur rôle pourrait expliquer la variation saisonnière des
exacerbations avec une recrudescence entre décembre et
mai [51,53]. Dans l’étude systématique de Wooton et al., un
virus était mis en évidence chez 9 % des patients ayant une
exacerbation et jamais chez les patients en état stable [54].
Il faut aussi toujours rester vigilant vis-­à-­vis d’une origine
cardiovasculaire à la détérioration respiratoire aiguë, en
particulier une poussée d’insuffisance ventriculaire gauche,
un événement coronarien aigu et/ou un trouble du rythme
supra-­ventriculaire [6]. Le problème de la coronaropathie
a déjà été abordé ci-­dessus. Plusieurs publications corroborent également un surrisque de maladie thromboembolique
veineuse chez les patients ayant une FPI [6,29,30,55,56].
Dans l’importante étude de Hubbard et al. déjà citée, les
patients avaient plus souvent une histoire de thrombose
veineuse profonde avant le diagnostic de la FPI, ainsi qu’une
incidence plus élevée en cours de suivi par rapport à la
population générale, estimée à 5,9/1 000 personnes-­année
(HR = 3,39 [IC 95 % : 1,57‑7,28]) [55]. Une autre étude cas-­
contrôle britannique a montré une augmentation significative
de l’incidence de l’embolie pulmonaire et de la thrombose
veineuse profonde chez les patients ayant une FPI (respectivement 9,3/1 000 personnes-­année, HR = 6,42 [IC 95 % :
4,30‑9,57] et 4,3/1 000 personnes-­année, HR = 2,11 [IC 95 % :
1,37‑3,27]) [30]. Enfin, une étude recensant les certificats
de décès aux États-­Unis a indiqué qu’au sein des morts ayant
un diagnostic de FPI, 1,74 % avait aussi un code « maladie
thromboembolique veineuse », ce qui représentait un chiffre
34 % supérieur à la population générale, et significativement
plus haut que chez les morts ayant une BPCO ou un cancer
bronchique [56].
Plusieurs points sont importants à noter dans la démarche
diagnostique de l’embolie pulmonaire chez un patient ayant
une FPI et présentant une détérioration respiratoire aiguë.
D’une part les patients sont souvent âgés, ce qui doit être
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 57
57
pris en compte pour interpréter le dosage des D-­dimères
qui peuvent être augmentés au cours d’une exacerbation
D’autre part, si une angio-­TDM thoracique est demandée
pour une suspicion d’embolie pulmonaire, il est absolument
indispensable de compléter l’examen par des coupes séquentielles pour bien visualiser le parenchyme pulmonaire. En
effet, l’acquisition de la TDM injectée n’est pas réalisée
en inspiration maximale, si bien que les images peuvent
donner une impression de surcroît de densité qui peut en
imposer à tort pour du verre dépoli diffus d’exacerbation
(Fig. 5). Par ailleurs, du fait de la redistribution vasculaire,
l’opacification vasculaire est parfois de mauvaise qualité
dans les zones de fibrose.
Chez ce patient, une antibiothérapie par Rocéphine®
et Rovamycine® est instituée d’emblée, associée à une
majoration des diurétiques et une oxygénothérapie à haut
débit au masque à haute concentration. Sur l’angio-­TDM
thoracique, il n’y a pas d’embolie pulmonaire et les coupes
séquentielles montrent un verre dépoli multifocal (Fig. 3).
Le bilan microbiologique non invasif devient négatif. L’ETT
est inchangée par rapport à l’examen précédent en dehors
d’une majoration de la PAPs à 80 mmHg. Le diagnostic d’exacerbation aiguë est finalement retenu et un traitement par
bolus de méthylprednisolone (Solu-­Médrol®) 1 g/j pendant
3 jours débuté dès le retour du bilan étiologique à J2. Malgré
ce traitement, l’état du patient s’aggrave, nécessitant une
oxygénothérapie à haut débit par Optiflow®. Il est décidé de
ne pas le transférer en réanimation et il décède à J6.
Liens d’intérêts
Non transmis.
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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 60-68
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
Disponible en ligne sur
Édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
SYNTHÈSE N° 1
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
C. Morelot- Panzini*, T. Similowski
Service de pneumologie et réanimation médicale, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière,
Charles-Foix, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris, cedex 13, France
Neurophysiologie respiratoire expérimentale et clinique, Sorbonne Universités,
UPMC université Paris 06, INSERM, UMRS 1158, Paris, France.
Préambule
La dyspnée est un symptôme transversal en pneumologie. En effet, que l’on s’intéresse à la pathologie oncologique, interstitielle, infectieuse, vasculaire, neuromusculaire, immuno- allergologique, bronchique ou autre, la dyspnée va apparaître au cours de l’évolution de celle- ci.
La fi n de vie des patients atteints de maladies respiratoires chroniques est souvent dominée par la dyspnée, et l’anxiété qui en est corollaire. La dyspnée est donc un élément fédérateur de la pratique pneumologique : en comprendre les mécanismes, en appréhender l’impact clinique et pronostique, et savoir la prendre en charge à tous les stades des maladies respiratoires (mais aussi des insuffi sances cardiaques, des maladies neuromusculaires, et de l’obésité) sont des enjeux fondamentaux.
Impact
La dyspnée est la « cousine germaine » de la douleur, avec laquelle elle partage de nombreuses caractéristiques. C’est une souffrance tant physique que psychologique, et, en tant que telle, elle nécessite d’être soulagée indépendamment de sa cause, à titre de symptôme. C’est une source majeure d’altération de la qualité de vie, là encore autant du fait de son retentissement physique (limitation des capacités d’exercice) que du fait de son retentissement psychologique (anxiété, dépression, désinvestissement) (Fig. 1). À ce titre, elle nécessite avant toute chose écoute et empathie, qui constituent les fondements d’une prise en charge holistique. La dyspnée est extrêmement fréquente, y compris lorsque l’on considère des populations « non sélectionnées », hors de tout suivi respiratoire [1,2]. Sa fréquence augmente avec l’âge [3]. En termes pronostiques, la présence d’une dyspnée a intrinsèquement une forte valeur prédictive de la survie, qui est indépendante et Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (C. Morelot- Panzini).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
parfois plus forte que la valeur pronostique d’indicateurs
physiologiques, comme le volume expiré maximal en une
seconde (VEMS) dans la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) ou la fraction d’éjection dans l’insuffisance
cardiaque [4]. Souffrir de dyspnée alors que l’on est placé
sous assistance ventilatoire en réanimation a une valeur
pronostique négative à court terme [5] et contribue au développement du stress post-­traumatique souvent associé aux
séjours en réanimation [6]. En soins palliatifs, la dyspnée est
une préoccupation souvent plus importante que la douleur,
non seulement du fait de sa fréquence, mais également du
fait de la moindre codification de sa prise en charge et d’une
connaissance moindre des équipes soignantes [7].
Définition
La définition « officielle » de la dyspnée, actuellement
considérée comme consensuelle est la suivante : « La dyspnée est une expérience subjective d’inconfort respiratoire
faite de sensations qualitativement distinctes et d’intensité
variable » [8]. Cette définition peut être « raffinée » pour
mieux prendre en compte certains aspects clés qui doivent
guider la prise en charge : « Le terme dyspnée décrit un
ensemble de sensations respiratoires, survenant à l’exercice
ou au repos, dont l’affect est désagréable, et qui peuvent
s’accompagner de modifications ventilatoires et neurovégétatives. L’évaluation de son intensité est subjective. Elle
entraîne des réponses physiologiques et comportementales
dyspnée
anxiété, peur
frustation, colère
dépression
dimension
sensorielle
dimension
affective
modalité
intensité
désagrément
décharge
corollaire
comparaison
réponse
stimulus
ventilatoire
efférence
efférence
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susceptibles d’altérer le mode et la qualité de vie des
patients. »
De cette définition se dégagent quatre notions fondamentales. La première est celle de subjectivité : il peut y
avoir une dissociation complète entre le symptôme et les
signes physiques et biologiques (gaz du sang), et le discours
du patient suffit à établir la présence d’une dyspnée. La
seconde est celle de multimodalité : il existe différentes
sensations dyspnéiques (manque ou soif d’air, suffocation,
effort respiratoire anormal, oppression thoracique…) [9]
comme il existe différentes sensations douloureuses ;
elles procèdent généralement de mécanismes physiopathologiques distincts [9]. La troisième notion est celle de
« multidimensionnalité » [10] : on ne parle de dyspnée que
si la dimension sensorielle (percept) est associée à un affect
négatif (dimension affective) ; l’intensité de chacune de ces
dimensions peut varier indépendamment (analogie musicale :
le volume sonore peut varier indépendamment du plaisir
d’écoute : il n’est pas nécessaire que ce volume soit fort pour
qu’une musique que l’on n’aime pas soit ressentie comme
désagréable). En l’absence d’affect négatif, on parle de
« sensations respiratoires », et non de dyspnée. La dernière
notion fondamentale qui découle de la définition de la
dyspnée est celle de « diffusivité ». La dyspnée a un impact
non seulement respiratoire, mais aussi neurovégétatif,
émotionnel et comportemental (Fig. 1) [11,39].
Cette définition est complexe mais elle est aisée à
appréhender dès lors que l’on considère la dyspnée comme
une « souffrance respiratoire », terminologie qui contient
implicitement tous les éléments exposés ci-­dessus.
empreinte
émotionnelle
réponse
comportementale
immédiate
retrait
(arrêt effort)
action
(consultation, appel,
prise d’un traitement)
détresse
panique
syndrome anxieux
réponse
comportementale
tardive
mode de vie
évitement
adaptation
aménagement
participation
handicap
qualité de vie
syndrome dépressif
Figure 1. Modèle psychophysiologique de la dyspnée.
L’équilibre entre la commande ventilatoire « efférente » et les afférences décrivant l’état du système respiratoire (cadre en bas à gauche)
est à l’origine de la dyspnée, avec une dimension sensorielle multimodale d’une part, et une dimension affective ou émotionnelle d’autre
part (anxiété, peur, frustration, colère, dépression). Cet affect donne lieu à une réponse comportementale à court terme, visant à soulager
la dyspnée (arrêt d’un effort, prise d’un médicament, consultation). En l’absence d’efficacité, l’anxiété se majore, pouvant déboucher
sur un état de panique. Dans le même temps, « l’expérience dyspnéique » fait l’objet d’une mémorisation (« empreinte émotionnelle »),
qui va être à l’origine de modifications comportementales à long terme (modification du mode de vie, avec pour objectifs de ne plus être
exposé à la dyspnée liée à une situation donnée). Si ces modifications contraignent le patient à abandonner des activités dont il n’arrive
pas à faire le deuil, elles entrainent une dégradation de la qualité de vie et peuvent déboucher sur un syndrome dépressif.
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Mécanismes physiopathologiques
de la dyspnée
Il semble que les voies afférentes impliquées dans la dyspnée
soient multiples, redondantes et différentes selon le stimulus
dyspnéisant en cause [12]. En outre, comme évoqué ci-­dessus,
il n’existe pas une mais différentes sensations respiratoires qui
sont sous-­tendues par des mécanismes distincts [11]. L’étude
de la dyspnée est d’autant plus compliquée qu’il est ardu
de définir précisément un stimulus physique à l’origine de
celle-­ci. Lorsqu’un sujet se brûle, on peut aisément incriminer
et quantifier le stimulus responsable. En revanche, lorsqu’un
patient atteint de BPCO est dyspnéique à l’effort, est-­ce dû
au travail métabolique, à l’augmentation des résistances
aériennes, à la fatigue musculaire inspiratoire ou à l’altération
des gaz du sang artériels [13] ? Tous ces stimulus sont susceptibles d’activer des récepteurs différents. Ainsi plusieurs voies
afférentes sont potentiellement impliquées dans les sensations
respiratoires. L’élimination individuelle aiguë ou chronique
d’un des récepteurs concernés est incapable à elle seule de
supprimer la sensation dyspnéique, ce qui suggère qu’aucun
de ces récepteurs n’est indispensable à cette modalité sensorielle. Il semble de fait exister plusieurs voies afférentes
parallèles et probablement redondantes [12,14,15].
C. Morelot-­Panzini et al.
Fibres C pulmonaires
La stimulation des fibres C pulmonaires s’accompagne
quant à elle de dyspnée. Ceci peut être mis en évidence
expérimentalement par une stimulation pharmacologique
directe des fibres C pulmonaires au moyen d’une injection
intraveineuse d’adénosine [21]. Ce mécanisme se retrouve
en situation clinique dans l’œdème aigu pulmonaire, ces
récepteurs sont alors stimulés par l’augmentation du volume
dans l’interstitium [22,23].
Mécanorécepteurs de la paroi thoracique
Il existe au sein de la paroi thoracique des mécanorécepteurs,
lesquels sont localisés au niveau des muscles respiratoires
comme le diaphragme et les muscles intercostaux. Il s’agit
des organes de Golgi et des fuseaux neuromusculaires qui
transmettent au cortex des informations sur la longueur, la
tension et le déplacement de ces muscles. La projection corticale se fait plus particulièrement dans le cortex limbique,
zone clé dans le traitement affectivo-­cognitif des afférences
respiratoires [24]. Ces récepteurs sont susceptibles de contribuer à la genèse de certaines modalités dyspnéiques [25].
Chémorécepteurs
Afférences
Les afférences mises en cause dans la genèse des sensations
de dyspnée véhiculent les signaux provenant de récepteurs
intrapulmonaires et bronchiques médiés par le nerf vague,
de mécanorécepteurs des voies aériennes supérieures et de
la paroi thoracique ainsi que de chémorécepteurs centraux
et périphériques.
Récepteurs vagaux
Au niveau de l’arbre trachéobronchique et du parenchyme
pulmonaire, il existe plusieurs types de récepteurs dont
la voie afférente commune est le nerf vague. Deux types
d’afférences respiratoires véhiculées par le nerf vague
ont plus spécifiquement été identifiés dans les sensations
respiratoires.
Récepteurs à l’étirement à adaptation lente
Les récepteurs à l’étirement à adaptation lente (Slowly
Adaptating Strech Receptors – SARs) sont fortement impliqués
dans le soulagement de la dyspnée. Ces récepteurs, situés à
proximité des fibres musculaires lisses des grosses bronches
ainsi que dans le parenchyme pulmonaire, sont sensibles aux
variations de pression et donc de volume pulmonaire [16].
C’est ainsi que leur stimulation par l’augmentation du volume
courant insufflé est capable de supprimer la sensation de soif
d’air [17]. De la même façon, l’inhalation de furosémide, connu
pour activer ces récepteurs [18], soulage la dyspnée [19,20].
Au contraire, l’absence de stimulation de ces récepteurs est
susceptible de s’accompagner d’une dyspnée de type « soif
d’air » ; cette situation peut être rencontrée en clinique lorsque
l’on ventile les patients atteints de syndrome de détresse
respiratoire aiguë (SDRA) avec de faibles volumes courants.
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Les chémorécepteurs centraux et périphériques sont la
principale source d’afférences métaboliques. Les chémorécepteurs périphériques sont situés dans les parois artérielles
des bifurcations carotidiennes et des divisions de la crosse
de l’aorte. Les récepteurs carotidiens sont essentiellement
sensibles à l’hypoxémie, mais l’hypercapnie peut également
les activer, et l’hypocapnie profonde au contraire peut les
inhiber. Ces récepteurs sont médiés par le nerf glossopharyngien. Les récepteurs situés au niveau de la crosse de
l’aorte sont principalement sensibles à l’hypoxémie et plus
particulièrement à la diminution de la pression partielle en
oxygène (PaO2) plutôt qu’aux situations au cours desquelles
le contenu artériel en O2 est diminué sans diminution franche
de la PaO2 (anémie peu sévère, intoxication au CO). C’est
ainsi que ces récepteurs seront stimulés par une insuffisance
circulatoire (diminution de la PaO2).
Les chémorécepteurs centraux sont quant à eux majoritairement responsables de la sensibilité au CO2 [26]. Lorsque la
PaCO2 s’élève, le CO2 passe dans le liquide céphalorachidien
où il va former le H2CO3 puis se dissocier en ions H+ et HCO3 –.
C’est l’ion H+ qui va stimuler les chémorécepteurs centraux.
Cette stimulation induit une dyspnée de type « soif d’air »
d’autant plus intense que le système respiratoire est dans
l’incapacité de répondre à l’augmentation de la commande
ventilatoire induite par ladite hypercapnie. Ainsi, l’induction
d’une hypercapnie chez des patients ventilés tétraplégiques
ou chez des volontaires sains curarisés induit une dyspnée
décrite comme de la « soif d’air » [16,27]. Au contraire, chez
les patients atteints de syndrome d’hypoventilation congénitale et qui n’ont pas de sensibilité à l’hypercapnie, celle-­ci
n’entraîne pas de sensation d’inconfort respiratoire [27].
En résumé, toutes ces afférences respiratoires sont donc
impliquées dans la dyspnée, leur stimulation se soldant soit
d’une augmentation de la souffrance respiratoire, soit à
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Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
l’inverse d’un soulagement de celle-­ci. Les fibres C musculaires inspiratoires semblent ainsi jouer un rôle clé dans
la dyspnée de type « effort excessif inspiratoire » [25]. La
stimulation des chémorécepteurs centraux ou périphériques
génère la sensation de « soif d’air » [16]. Les récepteurs
irritants bronchiques semblent davantage impliqués dans
la sensation « d’oppression thoracique » qui accompagne
la bronchoconstriction induite par leur stimulation [28]. À
l’inverse, la stimulation de certaines afférences respiratoires s’accompagne d’un soulagement de la dyspnée. Parmi
ceux-­ci les récepteurs à l’étirement semblent jouer un rôle
majeur [17,19,29]. La stimulation des mécanorécepteurs des
voies aériennes supérieures sensibles au débit, à la pression
et au froid peut également, en réponse au menthol ou à
l’administration d’air sec, s’accompagner d’une amélioration
de la sensation de dyspnée induite expérimentalement [30]
ou rencontrée en situation clinique [31].
Intégration centrale
Comme souligné ci-­dessus, la notion de « dyspnée » impose
un affect négatif qui résulte d’un traitement affectivo-­
cognitif des informations transmises par les afférences
respiratoires (Fig. 2). L’imagerie cérébrale fonctionnelle a
permis d’identifier plusieurs zones distinctes d’intégration
centrale de la dyspnée : l’insula antérieure droite, le vermis
cérébelleux, le cortex cingulaire et l’amygdale [14,32].
Ces aires cérébrales sont impliquées dans des composantes
différentes de la dyspnée. Par exemple, l’insula antérieure
droite et l’amygdale droite semblent impliquées dans les
composantes affective et émotionnelle de la dyspnée [33].
De plus, les aires cérébrales activées diffèrent selon la
nature du stimulus. Par exemple, lors de l’application
d’une charge inspiratoire résistive à un volontaire sain,
ce sont les aires motrices primaires, le cortex prémoteur,
ainsi que le cortex pariétal et limbique qui sont activés. En
revanche, en réponse à une charge métabolique comme une
hypercapnie, c’est le tronc cérébral et le cortex limbique
qui sont préférentiellement activés. L’implication du cortex
limbique dans la perception émotionnelle de la dyspnée
semble fondamentale. Par exemple, les patients ayant un
antécédent d’accident ischémique de l’insula antérieure
droite ont une perception amoindrie de la dyspnée [34].
Modèle physiopathologique
Le traitement affectivo-­cognitif des informations transmises
par les afférences respiratoires ne peut être rendu possible
que si le système cortical est capable de comparer l’ordre
donné par la commande respiratoire, émise principalement
par les centres respiratoires bulbaires mais également
par le cortex moteur, et la réponse effective du système
respiratoire transmise par les afférences respiratoires.
Afin que le cortex somesthésique puisse comparer ordre et
réponse, une décharge corollaire est envoyée des centres
respiratoires bulbaires (en cas de commande automatique)
ou du cortex moteur (lors d’une commande corticale) vers
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63
le cortex somesthésique. Cette comparaison entre décharge
corollaire et informations transmises par les afférences respiratoires fait alors l’objet d’un traitement cognitif au niveau
du cortex somesthésique, de l’aire motrice supplémentaire
et du cortex limbique avec un rôle clé de l’insula, centre
homéostasique de l’organisme et de la conscience du soi [35]
et de l’amygdale impliquée dans les réponses émotionnelles
secondaires [36]. Si cette comparaison est « satisfaisante »,
il n’y a pas de dyspnée et, en pratique, pas non plus de
sensations respiratoires, les informations afférentes étant
considérées comme « inutiles » et filtrées (on ne s’aperçoit
pas que l’on respire tant que la respiration est « normale »).
Si la comparaison n’est pas satisfaisante, la sensation respiratoire (résultat du traitement cognitif des stimulus provenant
de l’appareil respiratoire) est « connotée » négativement, ce
qui définit la dyspnée. L’existence d’un déséquilibre entre la
force des muscles respiratoires et la charge mécanique qu’ils
ont à surmonter pour produire la ventilation, d’une part, et
l’impossibilité de produire une activité ventilatoire adaptée
au niveau du dioxyde de carbone dans le sang, d’autre part,
sont les deux principaux déterminants initiaux de la chaîne
neurophysiologique qui conduit à la dyspnée.
Prenons l’exemple des deux principales sensations
respiratoires – l’effort/travail respiratoire excessif et la
soif d’air. L’effort excessif proviendrait d’une décharge
corollaire transmise des centres moteurs corticaux vers le
cortex somesthésique (Fig. 2). En d’autres termes, cette
sensation apparaît lorsque survient un déséquilibre entre la
charge imposée aux muscles respiratoires et leur capacité à
surmonter cette charge. L’exemple typique illustrant cette
situation est le patient souffrant de BPCO : l’augmentation du
volume pulmonaire liée à la limitation des débits expiratoires
et à l’inflation dynamique impose une augmentation de travail
inspiratoire que les muscles respiratoires ne peuvent satisfaire. C’est ce déséquilibre entre l’effecteur (les muscles) et
la commande qui provoque la dyspnée. La soif d’air résulterait
quant à elle d’une décharge corollaire qui transmettrait au
cortex somesthésique une « copie » de l’information issue
des centres de la commande respiratoire centrale du tronc
cérébral (Fig. 2) [27,37]. Cette sensation est principalement
induite par l’hypoxémie et l’hypercapnie qui entraînent toutes
deux une augmentation de l’intensité de la commande respiratoire centrale. C’est l’inadéquation entre l’augmentation
de cette commande respiratoire et la réponse ventilatoire à
cette commande qui induit la dyspnée. On peut à nouveau
prendre l’exemple de la BPCO pour illustrer ce mécanisme.
L’hypercapnie induite par la modification des rapports ventilation/perfusion entraîne une augmentation de la stimulation
centrale qui ne peut être satisfaite par une augmentation de
la ventilation puisque l’effecteur est défectueux. À l’inverse,
la ventilation artificielle, en optimisant les échanges gazeux
et en soulageant le travail des muscles respiratoire, diminue
la sensation de dyspnée.
Parallèlement à cette séquence d’événements neurosensoriels, la dyspnée met en mouvement, systématiquement, et
pratiquement par définition, des réponses comportementales
qui seront influencées par sa prise en charge (Fig. 1). À
l’origine de ces réponses se trouve le fait que la dyspnée
est indissociable de la peur, car interprétée par le cerveau
comme une menace vitale. Cette association a des racines
évolutives extrêmement anciennes : ainsi, les poissons, peu
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C. Morelot-­Panzini et al.
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex moteur
Cortex sensitif
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
Afférences
respiratoires
SOIF
D’AIR
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
Figure 2. Modèle physiopathologique de la dyspnée.
La dyspnée résulte d’un déséquilibre entre l’intensité de la commande motrice respiratoire centrale et l’information donnée par les
afférences respiratoires provenant de l’effecteur (appareil respiratoire : poumon, paroi thoracique, muscles respiratoires, récepteurs des
voies aériennes et chémorécepteurs centraux et périphériques).
Une copie de l’information motrice provenant du cortex moteur dans le cas de « l’effort excessif », du tronc cérébral pour « la soif
d’air » est projetée sur le cortex somesthésique. L’inadéquation entre les afférences respiratoires et les décharges corollaires conduit à
la sensation de dyspnée.
sujets à l’émotion, sont caractérisés par des comportements
d’évitement qui leur font fuir les environnements délétères
pour les échanges gazeux (hypoxiques ou hypercapniques).
L’intime association de la dyspnée et de la peur chez les
mammifères peut être vue comme un mécanisme protecteur : si la respiration devient difficile, il est vital de faire
quelque chose. Cette association différencie la dyspnée de
la douleur, dont l’association psychophysiologique à une
menace vitale n’est pas constante, y compris pour des douleurs excruciantes. L’anxiété et la peur ne sont pas les seules
émotions associées à la dyspnée : on relève parfois (mais
généralement en plus) dans le discours des sujets soumis
à des dyspnées expérimentales ou des patients souffrant
de dyspnées cliniques un vécu de colère, de frustration, ou
de dépression [38]. L’émotion associée à la dyspnée est à
l’origine d’une réponse comportementale immédiate (arrêter
un effort, prendre un médicament dont on sait qu’il soulage
la dyspnée, chercher une aide médicale). Si cela ne débouche
pas sur un soulagement de la dyspnée, l’anxiété va se majorer (cercle vicieux), pouvant déboucher sur une véritable
panique. Ceci rend compte de la composante émotionnelle
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et comportementale des situations de détresses respiratoires aiguës, généralement associée à anxiété et agitation.
Parallèlement à la réaction à court terme, la dyspnée, ou
plus précisément la « situation dyspnéisante », va créer
une empreinte émotionnelle durable. Celle-­ci peut-­être à
l’origine de réponses comportementales tardives, qui vont
modifier le mode de vie du patient (évitement, adaptations,
aménagements de la participation sociale…). Lorsque ces
modifications sont associées à la perte de possibilités dont
le deuil s’avère impossible (coping), la qualité de vie se
dégrade avec le corollaire dépressif correspondant (Fig. 1).
Évaluation de la dyspnée : vers un modèle
multidimensionnel
Évaluer la dyspnée et décrire ses caractéristiques sont des
étapes fondamentales de sa prise en charge mais aussi de son
exploration. La meilleure connaissance des mécanismes de la
dyspnée et la prise en compte du caractère multidimensionnel
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Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
de ce symptôme ont autorisé le développement d’outils
permettant d’évaluer à la fois son intensité mais aussi ses
caractéristiques sensorielles et affectives.
Mesures psychophysiques
Les échelles les plus simples sont celles ordinales graduées de
0 à 10 qui mesurent une intensité ou alors celles catégorielles
qui proposent un champ sémantique permettant de caractériser la dyspnée. L’échelle visuelle analogique (EVA) est
l’échelle analogique de référence : elle mesure « l’inconfort
respiratoire », 0 correspondant à l’absence totale d’inconfort
et 10 à une sensation insupportable [39]. L’alternative est
l’échelle de Borg modifiée qui guide le patient au moyen
d’une catégorie sémantique [39]. Ces échelles ne peuvent
évaluer qu’une dimension de la dyspnée dont la nature est
conditionnée par la labellisation des extrémités (inconfort
respiratoire ou intensité de la dyspnée).
D’autres échelles évaluent le retentissement de la dyspnée
sur les activités de la vie quotidienne des patients ainsi que
sur leur qualité de vie au cours de certaines pathologies spécifiques. C’est le cas des échelles Medical Research Council
et New York Heart Association qui permettent d’évaluer
le retentissement sur l’activité fonctionnelle des patients
souffrant respectivement de BPCO et d’insuffisance cardiaque.
Mesures psychosensorielles
Les échelles et les scores ci-­dessus ne prennent cependant
en compte qu’une seule dimension de la dyspnée. L’une des
évolutions les plus récentes et les plus marquantes dans le
domaine de la physiopathologie de la dyspnée est la reconnaissance de son aspect multidimensionnel. Ces dernières
années, de nouveaux questionnaires ont été développés dans
l’objectif de prendre en compte cet aspect. Parmi ces questionnaires, le Multidimensionnal Dyspnea Profile (MDP) est
constitué d’échelles ordinales graduées de 0 à 10 qui quantifient les différentes composantes de la dyspnée (Fig. 3) [38].
Ce questionnaire distingue ainsi une composante affective
immédiate qui quantifie l’inconfort respiratoire, une composante sensorielle qui décrit la nature de la perception
(« effort excessif », « soif d’air », « constriction thoracique »,
« effort mental ») et enfin la réponse émotionnelle qui en
découle (anxiété, peur, frustration, colère, dépression…).
Prise en charge thérapeutique
de la dyspnée
La nature multidimensionnelle de la dyspnée, qui met en jeu
perception sensorielle, cognition, et émotion, implique que
la prise en charge ne puisse pas être monolithique. C’est évidemment particulièrement vrai lorsqu’un traitement à visée
« physiopathologique » de la maladie sous-­jacente ne suffit
pas à faire disparaître le symptôme (bronchodilatateur dans
la crise d’asthme simple, par exemple). Il est alors impératif
d’associer à ce traitement « étiologique » des traitements
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symptomatiques, et une prise en charge psychologique (qui
commence par le dialogue, l’information et l’empathie).
Les connaissances physiopathologiques des mécanismes
de la dyspnée prennent tout leur intérêt dans cette optique.
On peut en effet agir sur les afférences respiratoires impliquées dans la dyspnée en stimulant certaines afférences
réputées pour soulager la dyspnée ou en inhibant d’autres.
On peut également moduler le traitement cognitif de ces
informations respiratoires.
Approche pharmacologique
Les opioïdes systémiques constituent actuellement le seul
traitement symptomatique de la dyspnée dont l’efficacité est
incontestable [40]. Les effets de cette substance pharmacologique sur la commande centrale sont bien connus et, dans
le même temps, craints par de nombreux pneumologues.
Par la réduction de la commande ventilatoire, les opioïdes
réduisent le déséquilibre commande-­réponse (Fig. 2).
Néanmoins, les études révèlent qu’à faible dose, la réduction
de la commande centrale est peu intense et ne peut, ainsi,
expliquer totalement l’effet bénéfique des opioïdes sur la
dyspnée. Ceux-­ci agissent également au niveau des voies de
transmission centrale de la dyspnée, comme ils le font pour
la douleur [40]. De plus, une étude récente suggère un effet
direct de la morphine sur le cortex cortico-­limbique [41]. Les
morphiniques sont efficaces à faible dose sur la, avec une
réduction moyenne de l’intensité de la dyspnée de 20 mm sur
une échelle visuelle analogique, ainsi il n’est pas recommandé
d’augmenter les doses au-­delà de 30 mg/j [42]. À cette dose,
les effets secondaires respiratoires sont inexistants, les principaux effets indésirables étant d’ordre digestif (nausées,
vomissements) ou neurologique (vertiges, confusion) [43].
Seuls 10 % des patients ne sont pas soulagés par ces faibles
doses, probablement pour des raisons génotypiques [44],
la majorité des patients étant soulagée par une dose de
10 mg/j [42]. Enfin, l’innocuité de la morphine prescrite
à 30 mg/j a été démontrée y compris chez des patients en
insuffisance respiratoire terminale [45].
La progression des mécanismes physiopathologiques de
la dyspnée et l’amélioration de l’évaluation de celle-­ci ont
ouvert d’autres voies thérapeutiques. Le rôle fondamental
des récepteurs à l’étirement des bronches distales soulignés
ci-­dessus a permis de suggérer l’utilisation du furosémide
administré en nébulisation. En effet, des études animales
attestent son action sur les canaux chlore des récepteurs
à l’étirement [18], ce qui expliquerait son potentiel thérapeutique à la dose de 40 mg sur des dyspnées expérimentales [19,20] et cliniques [46]. Néanmoins, son bénéfice
demeure hétérogène et non prédictible.
Approche non pharmacologique
La stimulation des récepteurs des voies aériennes supérieurs s’accompagne d’un soulagement de la dyspnée, ce
qui pourrait expliquer l’efficacité de l’oxygène médical ou
de l’air sec sur des dyspnées réfractaires de patients non
hypoxémiques [31].
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66
C. Morelot-­Panzini et al.
A. Échelle A1 - AFFECT
Ni agréable
Ni génant
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Insupportable
B. Échelle A2 - AFFECT
Je n’éprouve pas ce sentiment
Déprimé(e)
0
1
2
3
4
J’éprouve ce sentiment de la pire façon imaginable
5
6
7
8
9
10
Anxieux(se)
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Frustré(e)
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
En colère
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Effrayé(e)
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
C. CHOIX QS - QUALIFICATEUR SENSORIEL
Étape 1
Étape 2
Ne s’applique pas S’applique S’applique le mieux
Je dois fournir un travail ou un effort musculaire pour respirer
Je manque d’air ou j’étouffe ou je sens que j’ai besoin d’air
J’ai la sensation que ma poitrine et mes poumons sont serrés
ou comprimés
Je dois me concentrer ou faire un effort mental pour respirer
Je respire fort
d. Échelle QS - QUALIFICATEUR SENSORIEL
Je n’éprouve pas
ce sentiment
La plus forte intensité
imaginable
Je dois fournir un travail ou un effort musculaire pour respirer
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Je manque d’air ou j’étouffe ou je sens que j’ai besoin d’air
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
J’ai la sensation que ma poitrine et mes poumons sont serrés ou
comprimés
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Je dois me concentrer ou faire un travail mental pour respirer
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Je respire fort
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Figure 3. Multidimensionnal Dyspnea Profile (MDP).
Le MDP est constitué de trois échelles (A, B et D) et d’un questionnaire (C). L’échelle A permet de quantifier l’intensité du caractère
« désagréable » ou « déplaisant » de la dyspnée (composante affective immédiate). L’échelle B quantifie l’intensité des réponses
émotionnelles pouvant être induites par la sensation de dyspnée (composante émotionnelle). Le questionnaire C permet de caractériser la
sensation dyspnéique à l’aide de descripteurs, par exemple « effort excessif » ou « soif d’air », et l’échelle D de quantifier l’intensité de
ces sensation respiratoires (composante sensorielle).
On peut également tromper l’intégration centrale en
exerçant une compétition sensorielle et en mettant ainsi
en jeu un phénomène de gating. Ceci peut être obtenu
en disposant près du visage des patients un ventilateur à
ailettes à l’origine d’une stimulation du nerf trijumeau.
Ainsi, l’administration d’air frais au niveau du visage chez
le volontaire sain réduit l’intensité de la dyspnée induite
par une charge résistive [47]. Cet effet n’est pas retrouvé
lorsque l’air est appliqué sur le mollet. Chez des patients
de soins palliatifs souffrant de dyspnée réfractaire, l’administration d’air dirigé vers le visage à l’aide d’un ventilateur
07_ST01.indd 66
est associée à une diminution de 30 % de l’intensité de la
dyspnée [48].
On peut également agir directement au niveau du
traitement cognitif des informations respiratoires en
détournant l’attention et en réduisant, ainsi, l’intensité de
la composante affective de la dyspnée par l’écoute d’une
pièce musicale agréable [49] ou par la visualisation d’images
ou films à connotation positive [50]. Dans cette optique,
l’hypnose médicale est une voie thérapeutique extrêmement séduisante. Elle permettrait, en effet, de réduire les
composantes affectives et/ou sensorielles de la dyspnée en
08/03/2016 13:18:06
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
modulant l’activité cérébrale de l’insula, l’amygdale et du
cortex cingulaire antérieur [51]. Ces mécanismes d’action
expliquent, très probablement, l’efficacité démontrée de
l’hypnose sur la douleur [52,53].
67
[10]
[11]
Conclusions
[12]
Le souffle est omniprésent non seulement en médecine,
mais aussi dans la vie de tous les jours, et encore au plus
profond de nos consciences. La première peur de chaque
vie est que la respiration ne commence pas. Notre culture
est imprégnée de la symbolique du souffle, du premier cri
au dernier soupir, en passant par l’inspiration artistique
et l’ambiguïté sémantique qui unit le souffle et la pensée
(nishma’, psyché, pneuma, anima…) [54]. Le préserver est
une priorité de la pneumologie, au travers de son implication
dans les questions environnementales à l’échelle individuelle
(lutte contre le tabagisme, protection contre les expositions
professionnelles) et à l’échelle collective (épidémies « respiratoires », pollution atmosphérique). Le soigner (dyspnée)
doit être une priorité de chaque pneumologue, mais au-­delà
de chaque praticien.
[13]
[14]
[15]
[16]
[17]
[18]
Liens d’intérêts
[19]
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet
article.
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08/03/2016 13:18:06
Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2016) 8, 69-73
ISSN 1877-1203
Revue
des
Maladies
Respiratoires
Organe Officiel
de la Société
de Pneumologie
de Langue Française
Disponible en ligne sur
Actualités
Séminaire d’Approfondissement
et de Perfectionnement
en Pneumologie (SAPP)
édition 2016
Dyspnée : des concepts aux thérapeutiques
Coordination : B. Maître, F. Chabot
COMPARAISON
COMMANDE/AFFERENCES
INTÉGRATION
AFFECTIVO/COGNITIVE
Décharges corollaires
EFFORT
EXCESSIF
Cortex sensitif
Cortex moteur
Tronc
Cérébral
relais
motoneuronaux
SOIF
D’AIR
Afférences
respiratoires
Commande
motrice
Voies aériennes
supérieures
www.sciencedirect.com
Muscles
respiratoires
Poumons
Bronches
Plèvre
Vaisseaux
Parois
thracique
PaO2
PaCO2
86066
Numéro réalisé avec le soutien institutionnel des laboratoires
www.splf.org
mars
Vol 8 2016
n°
1
SYNTHÈSE N° 2
Syndrome d’hyperventilation inappropriée chronique
B. Chenuel
Service des examens de la fonction respiratoire et de l’aptitude à l’exercice – Médecine
du sport, CHU de Nancy-Brabois-Adultes, Vandœuvre-lès-Nancy, France.
S
i la dyspnée est un motif de consultation pneumologique fréquent, son diagnostic
étiologique est parfois difficile. Parmi les grandes causes de dyspnée, le syndrome
d’hyperventilation inappropriée chronique occupe une place à part en pratique pneumologique, tout d’abord en se basant principalement sur un diagnostic d’élimination,
ensuite en faisant reposer son traitement sur une rééducation ventilatoire qui implique
une étape essentielle d’éducation thérapeutique.
Définitions
D’un point de vue physiologique, l’hyperventilation repose sur une ventilation pulmonaire
effective (alvéolaire) supérieure à la ventilation nécessaire à l’organisme pour assurer les
besoins métaboliques. Elle aboutit de fait à une hypocapnie (pression partielle de CO2 dans
le sang artériel [PaCO2] < 35 mmHg ou 4,7 kPa), et son caractère chronique peut être mis
en évidence par l’existence d’une alcalose respiratoire compensée.
Le syndrome d’hyperventilation, quant à lui, est caractérisé par un cortège symptomatologique induit par une hyperventilation inappropriée et généralement reproduit par
l’hyperventilation volontaire [1,2]. Le caractère inapproprié de l’hyperventilation est un
élément majeur du diagnostic car il élimine toute hyperventilation d’origine secondaire
ou retournant d’une compensation physiologique (hypoxie d’altitude, par exemple).
Épidémiologie
La prévalence et l’incidence du syndrome d’hyperventilation n’ont jamais vraiment été
étudiées dans la population générale mais l’estimation d’une prévalence de l’ordre de
5 % est généralement acceptée [1] même si les études les plus récentes témoignent d’une
prévalence plus importante de 9,5 % [3]. Dans certains groupes (patients vus aux urgences,
Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Chenuel).
© 2016 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 69
08/03/2016 13:22:08
70
échantillons d’asthmatiques, par exemple) la prévalence de
l’hyperventilation est beaucoup plus importante, pouvant
atteindre jusqu’à 30 % [4‑6].
Il s’agit d’une pathologie de l’adulte jeune
(15‑55 ans) [7,8], même si la révélation peut se faire dans
l’enfance ou l’adolescence, nécessitant un traitement adapté
au plus tôt [9,10]. Il semble être plus fréquent chez la femme
que chez l’homme (sex ratio entre 1/1,1 à 1/6,5) [1].
Physiopathologie
Elle est encore mal connue mais la principale hypothèse
la fait reposer sur une dysrégulation ventilatoire d’origine
indéterminée qui augmente, en aigu ou en chronique, le
niveau ventilatoire, de façon inappropriée aux besoins
métaboliques et de façon exacerbée en réponse à des stimulations ventilatoires variées (effort, émotions, stress…) [1,2].
L’influence du contrôle cortical dans cette physiopathologie
est soulignée par l’absence de toute symptomatologie clinique durant le sommeil mais sans pouvoir plus précisément
la déterminer [2]. Cela va entraîner deux grands types de
conséquences à l’origine du tableau clinique :
1) l’élaboration d’une sensation dyspnéique interprétée par
le patient comme étant une soif d’air, dont la satisfaction est responsable de l’évolution spontanément défavorable de cette affection ;
2) la constitution d’une hypocapnie plus ou moins sévère à
l’origine de nombreuses manifestations extra-­respiratoires.
Symptomatologie clinique
La dyspnée domine incontestablement le tableau clinique
mais son association à des signes patents d’hypocapnie est
un argument diagnostic décisif qu’un interrogatoire rigoureux
doit rechercher [1].
Il s’agit le plus souvent de crises dyspnéiques paroxystiques non sifflantes retrouvées à l’effort, mais aussi au
repos et qui sont d’allure fluctuante (non systématiques
pour un même effort et souvent majorées par l’anxiété).
Le lien avec une période d’hyperventilation authentifiée
par le patient est souvent difficile à faire préciser. D’autres
signes liés à l’hyperventilation peuvent être retrouvés à
l’interrogatoire : oppression thoracique, palpitations cardiaques, vasoconstriction périphérique liée à la stimulation
du système nerveux sympathique. Un recours fréquent à des
soupirs est classiquement retrouvé en ventilation spontanée.
Les manifestations cliniques hypocapniques sont
nombreuses et variées, dominées par les conséquences
de la vasoconstriction dans les territoires cérébraux et
coronaires (céphalées, vertiges, sensation de malaise
pouvant aller jusqu’à la perte de connaissance, douleur
thoracique) [8,11,12]. La vasoconstriction périphérique
est quant à elle responsable de la froideur des extrémités.
Elles reposent aussi sur l’hyperexcitabilité neuromusculaire
induite par l’hypocapnie (hypertonie, paresthésies, crampes,
nausées, troubles du transit) [13]. À noter que des cas de
bronchoconstriction induite par l’hypocapnie sont décrits
dans la littérature [14,15].
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 70
B. Chenuel
Sur le plan général et psychologique, on note très fréquemment une sensation de fatigue et un niveau élevé d’anxiété [16]. La présence de ces manifestations hypocapniques
n’est pas indispensable au diagnostic mais en est fortement
évocatrice et est donc à rechercher systématiquement.
Un récapitulatif de la symptomatologie clinique, issu de la
littérature est donné en tableau 1 [1].
L’interrogatoire doit répertorier avec minutie les épisodes
de dyspnée qui ont pu aboutir à une sensation de malaise
ou de perte de connaissance, et ayant nécessité une prise
en charge médicale en urgence. Une attention particulière
doit être portée à la recherche d’antécédents personnels
de spasmophilie. Enfin, une étude récente réalisée dans un
service d’urgence souligne la fréquente répétition des crises
(plus de 30 % des patients déclarent avoir déjà présenté
une crise auparavant) et l’association à une comorbidité
psychiatrique (anxiété, dépression, attaques de panique…)
chez près de la moitié des patients [8].
La symptomatologie peut donc être riche et particulièrement anxiogène pour le patient. Elle est fréquemment
source d’une impotence fonctionnelle importante, pouvant
interférer avec la vie sociale ou professionnelle du patient
et à l’origine d’une incontestable altération de la qualité
de vie [17].
Diagnostic
L’étape diagnostique est essentielle mais souvent difficile.
Il n’existe pas de recommandations nationales ou internationales mais le diagnostic doit reposer sur trois éléments
majeurs [1] :
• une symptomatologie clinique compatible avec un syndrome d’hyperventilation ;
• la mise en évidence objective d’un épisode d’hyperventilation (valeur importante de l’hypocapnie) ;
• exclusion d’un autre diagnostic ou d’une cause secondaire de stimulation ventilatoire (cf. Tableau 2 : pathologie thoraco-­pulmonaire aiguë ou chronique, accident
vasculaire cérébral, tumeur cérébrale ou du tronc cérébral, hyperthermie…).
L’utilisation d’un questionnaire clinique spécifiquement
développé dans le syndrome d’hyperventilation (questionnaire de Nijmegen – Tableau 3) permet de quantifier la
symptomatologie évocatrice et peut orienter le diagnostic.
Seize signes cliniques doivent être côtés de 0 à 4 selon leur
niveau d’occurrence dans la vie quotidienne (0 = jamais à
4 = très souvent). Un score global > 23/64 est évocateur d’un
syndrome d’hyperventilation, avec une sensibilité de 91 %
et une spécificité de 95 % [18].
La mise en évidence d’une période d’hyperventilation
inappropriée peut se faire lors de la mesure et l’enregistrement de la ventilation spontanée d’un sujet assis au repos,
lors de la réalisation d’un test d’hyperventilation volontaire
ou d’effort maximal ou encore en réponse à l’inhalation d’un
mélange enrichi en CO2 [19].
Le test d’hyperventilation volontaire sur 1 à 3 minutes,
selon le protocole choisi, doit permettre la reproduction et
la reconnaissance, par le patient, de sa symptomatologie
(en totalité ou en partie, et en particulier hypocapnique)
08/03/2016 13:22:08
Syndrome d’hyperventilation inappropriée chronique
71
Tableau 1. Symptômes cliniques associés au syndrome
d’hyperventilation, d’après [1].
Tableau 2. Principales causes d’hyperventilation
secondaire.
Appareils
Symptômes
Hypoxémie
Respiratoire
Dyspnée
28‑93
Altitude
Pathologies bronchopulmonaires
Cardiopathies cyanogènes
Anémie
Oppression thoracique
51‑90
Tachypnée
43‑88
Pathologies
bronchopulmonaires
Manque d’air
28‑81
Sensation étouffer
32‑55
Paresthésies
24‑95
Hypertonie (mains)
19‑74
Pneumopathie
Asthme
Pathologie pulmonaire
interstitielle
Embolie pulmonaire,
hypertension artérielle
pulmonaire
Pneumothorax
Tremblements
39‑72
Pathologies
cardiovasculaires
Crampes musculaires
03‑45
Œdème pulmonaire, insuffisance
cardiaque, shunts cardiaques
Angor
Hypotension artérielle
Céphalées
37‑86
Vertiges
58‑81
Pathologies
métaboliques
Sensation de malaise
01‑37
Acidose (diabète, insuffisance
rénale, acidose lactique)
Hyperthyroïdie
Cirrhose hépatique
Confusion
35‑71
Précordialgies
18‑85
Pathologies
neurologiques et
psychiatriques
Palpitations
39‑81
Arythmie
06‑46
Tumeur, infection cérébrale/
tronc cérébral
Accident vasculaire cérébral
Anxiété (attaques de panique),
dépression
Mains ou pieds froids
21‑69
Intoxication-­
iatrogénie
Nausées
35‑83
Douleurs abdominales
12‑50
Intoxication acide
acétylsalicylique
Dérivés Méthylxanthines
Agonistes ß-­adrénergiques
Abus caféine
Fatigue
54‑88
Autres
Insomnie
19‑86
Hypersudation
45‑80
Anxiété
30‑98
Hyperthermie, sepsis
Douleur
Sevrage alcoolique
Grossesse, imprégnation
progestérone
Agitation, irritabilité
52‑100
Neuro­
musculaire
Cérébral
Cardio­
vasculaire
Digestif
Général
Psychologie
Occurrence
relative (%)
comme étant habituelle [1,20,21]. Il a une valeur pédagogique importante en permettant au patient de prendre
conscience que l’hyperventilation peut être à l’origine de
ses troubles et en cela il facilite le travail thérapeutique de
rééducation ventilatoire à venir. Les profils de retour aux
valeurs basales, après l’arrêt de l’hyperventilation volontaire
de la ventilation et de la pression partielle de fin d’expiration
de dioxyde de carbone (PETCO2), peuvent être en faveur d’un
syndrome d’hyperventilation lorsqu’ils montrent un retard à
la normalisation de PETCO2 au-­delà de 3 à 5 minutes et/ou
un épisode d’hyperventilation inappropriée manifeste [1,2].
Le test d’effort maximal permet quant à lui de rechercher,
en situation réaliste, un ou des épisodes d’hyperventilation à
RMRA_SAPP_2016_COMPLET.indb 71
l’origine d’une gêne respiratoire à l’exercice. La limitation
ventilatoire (épuisement des réserves ventilatoires sans
désaturation associée, équivalents ventilatoires élevés) des
performances maximales, en l’absence d’atteinte fonctionnelle respiratoire ou cardiaque, est souvent retrouvée. La
récupération est lente et souvent marquée par des épisodes
d’hyperventilation inappropriée.
Outre la mesure directe du débit ventilé pour repérer un
épisode d’hyperventilation, l’analyse des gaz du sang artériels, par l’objectivation d’une hypocapnie, est un élément
important à prendre en compte. La gazométrie artérielle est
à la base du diagnostic d’une hyperventilation chronique,
lorsqu’il existe de façon concomitante, une diminution de
la concentration plasmatique de bicarbonates (ou un excès
de base négatif), témoin de la compensation rénale d’une
alcalose respiratoire chronique. Bien sûr, sa normalité ne
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72
B. Chenuel
Tableau 3. Questionnaire de Nijmegen (positif si score > 23/64)
Signes
Jamais
(0)
Rarement
(1)
Quelquefois
(2)
Souvent
(3)
Très souvent
(4)
Douleur thoracique
Tension nerveuse
Vision floue
Vertiges
Confusion ou perte de contact avec la réalité
Respiration profonde ou rapide
Essoufflement
Poitrine serrée
Ballonnement abdominal
Fourmillements dans les doigts
Difficulté à respirer profondément
Raideur ou crampes dans mains et/ou doigts
Fourmillements péribuccaux
Mains ou pieds froids
Palpitations
Anxiété
Total
peut exclure un syndrome d’hyperventilation évoluant par
crises paroxystiques itératives. Enfin, il peut exister des
formes associées à d’authentiques pathologies respiratoires
dont le diagnostic peut alors apparaître plus délicat, par
difficulté de discernement du caractère effectivement
inapproprié ou exagéré de l’hyperventilation [3,22].
Traitement
Il est basé sur l’action volontaire du patient sur sa ventilation afin de maîtriser les épisodes aigus d’hyperventilation.
D’autres mesures complémentaires peuvent être utiles selon
la sévérité du tableau : kinésithérapie respiratoire, suivi
psychologique/psychiatrique, prescription médicamenteuse
(anxiolytiques en particulier).
La première étape d’éducation thérapeutique est essentielle. Elle doit obligatoirement passer par une phase préalable d’explications sur les mécanismes impliqués dans ce
syndrome d’hyperventilation (grandes lignes de l’affection,
pronostic souvent bénin même si le traitement est, dans la
plupart des cas, long et difficile…). Elle doit permettre au
patient de se « réapproprier » la symptomatologie clinique
rattachée à une entité clairement définie : le syndrome
d’hyperventilation, après avoir très souvent imaginé d’autres
diagnostics de pronostic beaucoup plus défavorables [1].
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La rééducation ventilatoire est basée sur des conseils
simples pour permettre au patient de volontairement diminuer sa ventilation-­minute (compter les cycles respiratoires
et les espacer, diminuer l’amplitude de son volume courant,
réaliser une apnée sans soupir récupérateur en cas de crise
importante, voire réinspiration de son expiration au travers
d’un sac plastique) en cas de gêne respiratoire [23].
On conseillera si possible la réalisation d’une activité
physique régulière en endurance (au moins 30 minutes,
3 fois par semaine). Dans certains cas, une prise en charge
avec kinésithérapie respiratoire et/ou réentraînement
à l’effort pourra être nécessaire afin d’aider le patient
à adapter sa ventilation au niveau d’effort soutenu. La
relaxation et le yoga ont dans cette pathologie été testés
avec des résultats encourageants [24]. Une récente revue
Cochrane sur l’intérêt de la rééducation ventilatoire dans
le syndrome d’hyperventilation n’a pas permis de tirer
de conclusions formelles mais il est souligné le manque
cruel d’études exploitables, basées sur une méthodologie
irréprochable [5].
La prescription de ß-­bloquants (visant à réduire l’activité
sympathique associée à l’hyperventilation), d’anxiolytiques
(benzodiazépines en particulier) ou même d’antidépresseurs
peut se discuter pour limiter la fréquence des crises mais ne
peut qu’être complémentaire de l’indispensable rééducation
ventilatoire.
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Syndrome d’hyperventilation inappropriée chronique
Un avis psychiatrique doit être proposé au patient en cas
de comorbidité psychiatrique, en particulier pour instaurer
le suivi d’un état anxieux ou dépressif sous-­jacent.
Conclusion
Le syndrome d’hyperventilation représente une entité clinique quelque peu atypique en pneumologie. La discordance
entre un handicap important dans la vie quotidienne, mise
sur le compte d’une limitation respiratoire dyspnéique, et
l’absence d’anomalie fonctionnelle ou organique respiratoire
sont souvent évocatrices. Le pronostic souvent bénin de cette
affection lorsqu’elle est primitive, accessible à un traitement
par rééducation respiratoire, doit inciter le pneumologue
à en faire le diagnostic avec certitude et à la prendre en
charge rapidement.
Liens d’intérêts
L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article.
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