Traumatismes fermés du rein et de l`uretère
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Traumatismes fermés du rein et de l`uretère
18-159-A-10 Traumatismes fermés du rein et de l’uretère B. Peyronnet, R. Mathieu, J.-P. Couapel, G. Verhoest, K. Bensalah Les traumatismes rénaux sont fréquents, présents dans 10 % de l’ensemble des traumatismes abdominaux. Ils sont majoritairement fermés, en rapport avec un choc direct ou une décélération brutale. Les signes cliniques les plus fréquents sont l’hématurie et la lombalgie. Le meilleur examen diagnostique est le scanner abdomino-pelvien avec injection. La classification la plus utilisée est celle de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST). Elle distingue les traumatismes mineurs (grades 1, 2 et 3) dont la prise en charge consiste le plus souvent en une simple surveillance et les traumatismes majeurs (grades 4 et 5), qui peuvent nécessiter un traitement endoscopique ou radio-interventionnel. Le recours à l’exploration chirurgicale est exceptionnel. Les traumatismes urétéraux sont rares. La symptomatologie est généralement pauvre. Le scanner étant souvent pris en défaut, le diagnostic requiert fréquemment une urétéropyélographie rétrograde. Leur traitement consiste en un simple drainage endoscopique en cas d’atteinte mineure ou en une réparation chirurgicale en cas d’atteinte majeure. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : Traumatisme rénal ; Lésion urétérale ; Traitement conservateur ; Scanner ; Radiologie interventionnelle Plan ■ Introduction 1 ■ Traumatismes fermés du rein Épidémiologie Étiologies et mécanismes Présentation clinique Examens d’imagerie Classifications Prise en charge thérapeutique Complications Surveillance Cas de l’enfant Cas du traumatisme sur rein pathologique 1 1 1 2 2 2 4 5 6 6 6 Traumatismes de l’uretère (en dehors des traumatismes iatrogènes) Épidémiologie et mécanismes Présentation clinique Examens d’imagerie Classification Prise en charge thérapeutique Complications 7 7 7 7 7 7 8 Conclusion 8 ■ ■ Introduction Jusque dans les années 1970, la prise en charge des traumatismes rénaux s’appuyait volontiers sur une exploration chirurgicale, soit qu’ils soient diagnostiqués en peropératoire lors d’une laparotomie exploratrice en urgence, soit en cas d’anomalies à l’urographie intraveineuse (UIV) ou à l’artériographie. L’avènement du EMC - Urologie Volume 5 > n◦ 4 > octobre 2012 http://dx.doi.org/10.1016/S1762-0953(12)60344-6 scanner, le développement des techniques d’endoscopie et de radiologie interventionnelle, ainsi que les progrès de la réanimation ont permis de rendre la prise en charge beaucoup plus conservatrice. Aujourd’hui, les indications d’exploration chirurgicale sont devenues exceptionnelles. La prise en charge se résume le plus souvent à une simple surveillance clinicobiologique (la surveillance radiologique faisant plus débat). Plus que jamais, l’approche des traumatismes rénaux doit être pluridisciplinaire, associant les compétences des urologues, radiologues, et anesthésistes-réanimateurs. Traumatismes fermés du rein Épidémiologie Les traumatismes rénaux sont présents dans 10 % des traumatismes abdominaux. Les traumatismes fermés sont largement majoritaires (90 % versus 10 % de lésions pénétrantes dans les pays industrialisés) [1] . Les traumatismes mineurs (grade 1, 2 et 3 de la classification de l’AAST) représentent 72 à 91 % de l’ensemble des traumatismes fermés du rein. Les sujets atteints sont le plus souvent jeunes (âge médian entre 20 et 30 ans [1] ). En cas de traumatisme rénal, il existe une atteinte d’un autre organe dans 60 à 80 % des cas [2] , majoritairement la rate, puis le foie et le tube digestif [2] . Étiologies et mécanismes Les traumatismes fermés du rein résultent, par ordre de fréquence décroissante, d’accidents de la voie publique, de la pratique de sports de contact, de chutes, d’accidents professionnels ou encore de rixes [3] . 1 18-159-A-10 Traumatismes fermés du rein et de l’uretère Deux mécanismes sont responsables des lésions rénales : • la transmission au rein de forces générées par un impact lombaire ou abdominal. Le maximum des forces s’applique à la périphérie du rein (ce qui explique que le parenchyme soit lésé de la périphérie vers la profondeur). Les cavités excrétrices remplies de liquide renvoient une force de retour d’autant plus importante que la pression dans les cavités est élevée (ce qui explique la susceptibilité plus importante des patients porteurs d’uropathie obstructive aux traumatismes) [4] ; • des mouvements antéropostérieurs ou céphalocaudaux du rein au cours de brusques décélérations. Lors de décélérations brutales, les gros vaisseaux restent fixes tandis que le rein est mobilisé très rapidement, ce qui provoque des forces de cisaillement au niveau du pédicule. Il en résulte des lésions de l’intima (et une thrombose éventuelle), voire une avulsion complète du pédicule. La contusion directe du pédicule par compression ou écrasement sur le rachis ou le psoas gauche est beaucoup plus rare. Présentation clinique Le signe clinique au premier plan est l’hématurie, qu’elle soit macroscopique ou microscopique. Elle est présente dans plus de 95 % des cas [5] . Son importance n’est pas corrélée à la gravité de l’atteinte rénale [6] . L’autre signe clinique majeur est la lombalgie. D’autres éléments doivent faire suspecter une atteinte rénale : ecchymoses ou dermabrasions des fosses lombaires ou de l’hypochondre, fracture des onzième ou douzième côtes. Les atteintes du pédicule vasculaire sont fréquemment asymptomatiques, l’hématurie pouvant manquer dans près de 40 % des cas [7] . Il est donc important de systématiquement suspecter une atteinte rénale en cas de décélération brutale, même devant une symptomatologie pauvre. Devant tout traumatisme du rein, il est primordial de rechercher des lésions associées (abdominales, orthopédiques, neurologiques) et des signes de retentissement hémodynamique (pression artérielle systolique inférieure à 90 mmHg, tachycardie, marbrures, oligurie). Examens d’imagerie Scanner abdominal avec injection Le scanner est l’examen à pratiquer en première intention [8, 9] . C’est l’examen le plus sensible et le plus spécifique pour caractériser l’atteinte rénale [10, 11] , mais aussi pour détecter des lésions abdominales associées [12] . Il doit comprendre trois temps : des coupes sans injection, un temps angiographique précoce (pour apprécier les lésions vasculaires) et une phase tardive 10 minutes après l’injection de produit de contraste (qui étudie au mieux la voie excrétrice) [11] . En cas de traumatisme, il est recommandé de faire un scanner dans les situations suivantes [13–15] : • hématurie macroscopique ; • décélération importante ; • suspicion de lésions intra-abdominales associées (péritonite, rupture splénique) ; • hémodynamique instable (pression artérielle systolique [PAS] inférieure à 90 mmHg). Chez l’adulte, l’hématurie microscopique isolée ne justifie pas de bilan d’imagerie spécifique de l’appareil urinaire [1, 13, 14] . Chez l’enfant, alors que l’hématurie microscopique, même isolée, a longtemps été considérée comme une indication d’imagerie, des travaux récents incitent à considérer les mêmes indications du scanner que chez l’adulte [15] . Elle ne doit être réalisée qu’après stabilisation hémodynamique avec de fortes doses de produit de contraste (2 ml/kg), et uniquement en présence de signes faisant suspecter une atteinte rénale (hématurie, hématome rétropéritonéal) [16] . Imagerie par résonance magnétique L’imagerie par résonance magnétique (IRM) n’est utile qu’en cas de contre-indication au scanner (allergie aux produits de contraste, insuffisance rénale), car elle n’est pas plus performante, son accès est plus limité, son coût plus élevé et sa durée plus longue [17, 18] . Artériographie Autrefois très utilisée, elle s’est effacée devant le scanner qui permet maintenant de diagnostiquer une atteinte du pédicule dans la majorité des cas. En revanche, elle a un rôle de plus en plus important dans la prise en charge thérapeutique. “ Point important Place de la radiologie interventionnelle L’essor de la radiologie interventionnelle a permis de simplifier la prise en charge conservatrice des traumatismes du rein, notamment dans les situations suivantes : • embolisation d’un saignement actif artériel [19–22] sans instabilité hémodynamique. Pour certains, elle pourrait même être utilisée chez les patients instables hémodynamiquement [20, 23, 24] et en cas d’atteinte de l’artère rénale principale [24–26] . Elle permet également d’emboliser une fistule artérioveineuse ou un pseudoanévrisme secondaires au traumatisme [19] . Les complications les plus fréquemment rapportées après radioembolisation sont un syndrome postembolisation (fièvre [9 %] et douleur [5 %]), et une migration des coïls (4 %) [20] ; • drainage percutané d’un urinome ou d’un abcès rénal ou périrénal [27] ; • revascularisation en cas d’occlusion de l’artère rénale. Elle a les mêmes résultats que la chirurgie conventionnelle (0 à 25 % de succès), mais elle est moins invasive [28, 29] . Classifications Classification anatomique D’un strict point de vue anatomique, on distingue : • les lésions du parenchyme : contusions, lacérations et fractures ; • les atteintes de la voie excrétrice : plaie, avulsion, fuite d’urine (urinome) ; • les atteintes vasculaires : plaie du pédicule, rupture pédiculaire, thrombose, dissection artérielle. Classification de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST) C’est la classification la plus utilisée depuis le début des années 2000. C’est une classification radioclinique établie en 1989 (Fig. 1 à 6) [30] . Elle a le mérite de la simplicité et a été promue par de nombreuses séries rétrospectives montrant une bonne corrélation avec le taux d’explorations chirurgicales [5, 31] , la survenue d’une néphrectomie [32] et la perte de fonction rénale [33] (Tableau 1). Urographie intraveineuse Aujourd’hui supplantée par le scanner, elle garde un intérêt uniquement en cas d’exploration chirurgicale sans imagerie préalable chez un patient hémodynamiquement instable (un cliché unique 10 minutes après avoir injecté du produit de contraste). 2 Classification de Chatelain Établie en 1981, elle a longtemps été la plus utilisée en France avant d’être délaissée au profit de la classification américaine [34] (Tableau 2). EMC - Urologie Traumatismes fermés du rein et de l’uretère 18-159-A-10 Grade I Grade II Figure 1. Grade III Grade IV Grade V Classification de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST). Figure 4. Contusion rénale avec petit hématome sous-capsulaire au temps injecté précoce en coupe transversale (traumatisme grade 1-AAST) Figure 2. Lacération corticale de moins de 1 cm de profondeur au temps angiographique après reformatage en coupe coronale (traumatisme grade 2-AAST). Figure 5. Extravasation de produit de contraste au temps injecté tardif (temps urinaire) témoignant d’une atteinte des voies excrétrices (traumatisme grade 4-AAST). Score global chez le polytraumatisé : l’« injury severity score » Figure 3. Lacération corticale profonde avec hématome périrénal au temps angiographique en coupe transversale (traumatisme grade 3-AAST si pas d’extravasation au temps tardif) EMC - Urologie L’injury severity score (ISS) a été élaboré en 1974 pour évaluer la sévérité globale des lésions chez un patient polytraumatisé. Chaque lésion se voit attribuer un abbreviated injury score (AIS) allant de 1 (mineure) à 6 (mettant en jeu le pronostic vital). Le 3 18-159-A-10 Traumatismes fermés du rein et de l’uretère Tableau 2. Classification de Chatelain. A Stade I Contusion légère intégrité de la capsule Ia : la voie excrétrice est ouverte Ib : la voie excrétrice est non ouverte Stade II La capsule est rompue IIa : la voie excrétrice est déchirée IIb : la voie excrétrice est intacte Stade III Capsule, parenchyme et voie excrétrice sont rompues, écarts fracturaires importants et séquestres parenchymateux, lésions de la voie excrétrice importantes, zones ischémiques Stade IV Lésions pédiculaires IVa : rupture artérielle complète IVb : rupture artérielle partielle (intima) IVc : rupture veineuse l’ISS. On obtient ainsi un score allant de 0 à 75. La présence d’une lésion grade 6 fait d’office attribuer un score global de 75 [35] . Cette classification comporte de nombreuses imperfections, mais elle a l’avantage de prendre en compte les lésions associées au traumatisme rénal qui sont fréquentes [2] et ont souvent un impact pronostique majeur. Aussi l’ISS est-il largement repris en association avec la classification de l’AAST dans les études cliniques, mais son utilisation en pratique clinique reste marginale. Prise en charge thérapeutique Une priorité : détecter et traiter toute menace vitale Cela passe par le dépistage d’un état de choc, le bilan des lésions associées et les manœuvres de réanimation pour préserver les fonctions cardiocirculatoire, respiratoire et neurologique. B Figure 6. A. Extravasation de produit de contraste ou « blush » ou « saignement actif » d’origine rénale en artériographie (aspect avant embolisation). B. Aspect après embolisation par coils. Tableau 1. Classification américaine : American Association for the Surgery of Trauma Renal Injury Scale [30] Grade 1 Contusion et/ou hématome sous-capsulaire Grade 2 Lacération du cortex de moins de 1 cm de profondeur et/ou hématome périrénal Grade 3 Lacération du cortex de plus de 1 cm de profondeur sans atteinte des voies excrétrices ni extravasation de produit de contraste Grade 4 Lacération corticomédullaire avec atteinte des voies excrétrices et extravasation de produit de contraste Lésion de l’artère et/ou de la veine principale avec hémorragie limitée Grade 5 Avulsion du hile dévascularisant complètement le rein Rein totalement détruit/lacérations multiples corps humain est divisé en six régions (tête et cou, face, thorax, abdomen, extrémités, surface). Seul l’AIS le plus élevé de chaque région est retenu. On additionne ensuite les carrés des AIS des trois régions les plus sévèrement atteintes pour obtenir 4 Connaître les rares indications d’exploration chirurgicale Trois situations nécessitent une exploration en urgence du rétropéritoine [1, 23, 36, 37] : • avulsion ou lacération du pédicule. Le traitement consiste en une réparation vasculaire, si celle-ci est possible, ou en une néphrectomie d’hémostase la plupart du temps [38–40] . Cependant, une série récente rapporte des résultats encourageants de la radioembolisation [24] ; • instabilité hémodynamique non expliquée par une autre lésion, extrarénale, et persistant malgré la réanimation [20, 36, 41] ; • présence de lésions associées requérant une exploration chirurgicale (perforation d’un organe creux, cholépéritoine, choc hémorragique en rapport avec un saignement splénique ou hépatique). Un abord du rétropéritoine est alors réalisé uniquement s’il existe un hématome rétropéritonéal pulsatile, si l’imagerie préopératoire ou l’urographie intraveineuse (UIV) peropératoire montrent une lésion de grade 5 ou vasculaire grade 4. Ensuite, une approche la plus conservatrice possible La prise en charge dépend directement du bilan lésionnel établi par le scanner. Traumatismes mineurs (grades 1, 2 et 3) La surveillance rapprochée est recommandée en première intention [37, 42, 43] . Le patient est hospitalisé quelques jours pour surveillance clinique (pression artérielle, pouls, température, douleur, hématurie) et biologique (hémoglobine, créatininémie). En cas de stabilité de ces paramètres, le patient regagne son domicile EMC - Urologie Traumatismes fermés du rein et de l’uretère 18-159-A-10 après 48-72 heures. Contrairement à ce qui a longtemps été préconisé, le décubitus strict ne serait pas nécessaire et le patient peut être levé dès les premiers jours (cf encadré « Point important »). “ Point important De la question du décubitus Longtemps préconisé, le décubitus strict dans les jours qui suivent un traumatisme abdominal avec lésion d’un organe solide est remis en cause par des travaux récents [44, 45] . Cette attitude était fondée de façon empirique sur le risque de reprise hémorragique potentiellement provoqué par la mobilisation précoce des malades. Il n’y a finalement aucune preuve justifiant cette façon de faire. Concernant les traumatismes du rein, la seule étude existante, bien que de faible niveau de preuve, ne rapporte aucune reprise hémorragique ayant nécessité une exploration chirurgicale ou une embolisation après mobilisation précoce (médiane 48 heures). Le seul facteur de risque est l’atteinte splénique associée. A contrario, les complications de décubitus (notamment thromboemboliques) sont bien connues [46] et l’immobilisation prolongée augmente probablement la durée d’hospitalisation (et par là même le coût du traitement) d’un bon nombre de patients porteurs d’un traumatisme rénal. Il apparaît donc raisonnable de mobiliser les patients dès les 24 premières heures. La place de l’imagerie de contrôle dans les jours qui suivent le traumatisme est largement remise en cause dans la littérature récente (cf encadré « Point important »). dévascularisés [57] . Néanmoins, l’indication doit rester exceptionnelle (urinome surinfecté avec évolution clinique défavorable) [56, 58] ; • en cas d’occlusion de l’artère rénale principale, les résultats de la revascularisation sont très décevants, ne permettant une récupération rénale que dans de rares cas [28, 38, 59, 60] . Elle peut être légitime en cas de traumatisme de moins de 6 heures, mais elle est associée à un risque d’hypertension élevé (jusqu’à 43 %). L’approche endovasculaire est également possible ; • en cas de saignement actif (blush des Anglo-Saxons) d’origine rénale, il faut faire une embolisation en urgence [21–23, 25, 26] , sauf s’il s’agit de l’artère rénale principale ou s’il existe une instabilité hémodynamique (dans ce cas, il faut discuter d’emblée une exploration chirurgicale). Principes de l’exploration chirurgicale La laparotomie médiane est recommandée [36] pour permettre l’exploration complète de la cavité abdominale et pour contrôler de prime abord le pédicule vasculaire par incision verticale du péritoine en regard de l’aorte au niveau de l’angle de Treitz [36, 61, 62] (Fig. 7, 8). Selon certains auteurs, le bénéfice du contrôle premier du pédicule n’est pas certain et concernerait uniquement les traumatismes pénétrants [61] . La conduite à tenir dépend ensuite des lésions constatées : • en cas de lacération ou d’avulsion complète de l’artère ou de la veine, les options sont la réparation vasculaire, la néphrectomie d’hémostase ou l’autotransplantation ; • en cas d’occlusion de l’artère rénale : il faut faire une thrombectomie puis réséquer la zone lésée (diminue le taux de rethromboses [36] ) ; • en cas de lacération avec urinome surinfecté ou saignement : néphrectomie partielle en cas de lésion polaire supérieure ou inférieure ou néphrorraphie en cas de lésion de la partie moyenne du rein [53] . Complications Hémorragie “ Point important De la question du scanner de réévaluation Tous les auteurs s’accordent sur la nécessité de répéter les examens d’imagerie dans certaines situations : fièvre, aggravation de la lombalgie, hématurie macroscopique persistante, déglobulisation [47] . En revanche, le scanner de contrôle systématique entre le 2e et le 7e jour qui suivent le traumatisme, anciennement recommandé [1, 48] , est largement remis en cause dans la littérature récente [49, 50] . Il pourrait garder un intérêt uniquement dans les traumatismes majeurs (grades 4 et 5) [51] pour déterminer la persistance ou non d’une extravasation d’urine permettant de discuter son drainage [52, 53] , mais l’échographie pourrait suffire [54] . C’est la complication principale à la phase aiguë. Une reprise hémorragique tardive, plusieurs jours à plusieurs semaines après le traumatisme initial, est également possible [63] . Elle est généralement le fait d’un pseudoanévrisme ou d’une fistule artérioveineuse [19, 64] . Extravasation d’urine. Urinome L’extravasation d’urine et l’urinome résultent d’une atteinte des voies excrétrices. Ils peuvent passer inaperçus sur le scanner initial [48] . Sepsis Le sepsis résulte le plus souvent de la surinfection d’un urinome ou d’un hématome. Le traitement repose sur le drainage et l’antibiothérapie [27] . Il peut aussi être lié à une atteinte digestive ou pancréatique passée inaperçue. Hypertension artérielle Traumatismes majeurs (grades 4 et 5) Comme dans les traumatismes mineurs, l’attitude initiale est conservatrice même en cas de rein multifracturé [41] ou d’extravasation d’urine [55] . En fonction de l’évolution, des gestes endoscopiques ou vasculaires interventionnels peuvent être nécessaires : • il est conseillé de drainer une fuite d’urine (par voie rétrograde ou percutanée) en cas de fièvre ou de persistance de l’extravasation sur le contrôle d’imagerie entre j3 et j7 [52, 56] . La situation évolue ainsi favorablement dans près de 90 % des cas [27, 52, 56] ; • l’exploration chirurgicale peut se justifier en cas d’urinome persistant, notamment en présence de volumineux fragments EMC - Urologie C’est la complication principale à rechercher à distance, au cours de la surveillance (5 % de l’ensemble des traumatismes rénaux) [65, 66] . Elle provient d’une hyperstimulation du système rénine-angiotensine en réponse à l’ischémie rénale [7, 67] . Dégradation de la fonction rénale C’est une complication rare en général secondaire à un traumatisme important [1, 33, 68] . Fistule artérioveineuse La fistule artérioveineuse se manifeste par une hématurie macroscopique, voire par une hypertension artérielle (HTA) ou une insuffisance cardiaque en cas de fistule à haut débit [69] , mais 5 18-159-A-10 Traumatismes fermés du rein et de l’uretère 1 2 3 4 5 6 7 8 8 1 2 3 4 9 5 10 6 11 7 12 Figure 7. A. Ligne d’incision du péritoine entre l’angle duodénojéjunal et l’artère mésentérique inférieure pour accéder au rétropéritoine et obtenir un contrôle vasculaire premier des pédicules rénaux. 1. Angle de Treitz ; 2. veine mésentérique inférieure ; 3. ligne d’incision péritonéale ; 4. aorte ; 5. veine cave inférieure ; 6. artère mésentérique inférieure ; 7. intestin grêle ; 8. côlon. B. Anatomie des pédicules vasculaires rénaux à l’issue du contrôle vasculaire. 1. Artère mésentérique supérieure ; 2. veines rénales droites et gauches ; 3. rein droit ; 4. artères rénales droites et gauches ; 5. veine cave inférieure ; 6. veine gonadique droite ; 7. artères gonadiques ; 8. rein gauche ; 9. veine gonadique gauche ; 10. aorte ; 11. repli péritonéal ; 12. artère mésentérique inférieure. peut rester totalement asymptomatique. Elle survient quelques jours à plusieurs semaines après le traumatisme. Le traitement repose sur la radioembolisation [19, 69] . Pseudoanévrisme Le pseudoanévrisme se manifeste le plus souvent par une hématurie macroscopique et une lombalgie, mais peut rester totalement asymptomatique. Il est lui aussi traité par radioembolisation [19, 70] . Dilatation des cavités pyélocalicielles La dilatation des cavités pyélocalicielles est rare, retrouvée dans environ 1 % des cas de traumatismes rénaux [65] . Elle survient en cas de lésion du bassinet en raison de la fibrose cicatricielle. Surveillance La surveillance est clinique (pression artérielle), biologique (fonction rénale), et radiologique (pour les traumatismes majeurs). Les traumatismes mineurs (1, 2 et 3) sont revus à 1 mois avec un dosage de la créatinine. Dans le cadre d’un traumatisme majeur (grades 4 et 5), il faut faire un scanner injecté de contrôle à 1 mois pour dépister une complication vasculaire (pseudoanévrisme, fistule artérioveineuse) et vérifier la régression de l’hématome et/ou de l’urinome. Le suivi ultérieur est assuré par le médecin traitant, car la probabilité de la survenue d’une complication relevant d’un traitement chirurgical (pseudoanévrisme, cicatrice compressive, fistule artérioveineuse) est minime. Dans tous les cas, il faut dépister de façon précoce une éventuelle HTA. 6 Cas de l’enfant Les enfants sont plus sujets aux traumatismes rénaux, car leurs reins sont moins bien protégés anatomiquement : plus bas situés dans l’abdomen, moins recouverts par les dernières côtes, plus mobiles, plus larges proportionnellement avec une couche de graisse périrénale moins épaisse [71] . La principale particularité clinique est la moindre fréquence de l’hypotension artérielle, même en cas de traumatisme majeur avec hémorragie massive, en raison de l’importance de la réponse catécholaminergique [72] . La prise en charge ne diffère pas de celle de l’adulte et doit être majoritairement conservatrice [73] . Cas du traumatisme sur rein pathologique Les greffons rénaux sont plus sujets aux traumatismes directs de par leur positionnement en fosse iliaque. En revanche, les lésions liées à des décélérations brutales sont beaucoup plus rares que sur les reins natifs, car les greffons sont moins mobiles en raison du développement d’une coque fibreuse [74] . Les uropathies obstructives, les reins kystiques, et les reins tumoraux sont plus à risque de lésion traumatique, car la présence d’une structure liquidienne dans le parenchyme ou d’une pression augmentée dans les cavités excrétrices augmente la force de retour en réponse au choc direct [4, 75] . La prise en charge dépend de l’anomalie découverte : • s’il s’agit d’une tumeur ou d’un rein détruit, on réalise une néphrectomie ; • s’il s’agit d’un kyste Bosniak I ou II ou d’une uropathie obstructive non compliquée, les principes de la prise en charge sont les mêmes que pour un rein sain. EMC - Urologie Traumatismes fermés du rein et de l’uretère 18-159-A-10 Traumatisme abdominal Hématurie macroscopique et/ou hémodynamique instable (PAS < 90 mmHg mais sans état de choc hémorragique) et/ou notion de décélération importante et/ou suspicion de lésions intra-abdominales associées (péritonite, etc.) Choc hémorragique (PAS < 90 mmHg ne répondant pas au remplissage) Hématurie microscopique isolée Bilan lésionnel rapide : échographie abdominale Pas d’imagerie Pas de prise en charge spécifique Laparotomie exploratrice Scanner Suspicion de traumatisme rénal (hématome rétropéritonéal et/ou hématurie) Oui UIV ± exploration chirurgicale du rétropéritoine Saignement actif ? Oui Pas d’abord chirurgical du rétropéritoine Non Radioembolisation Instabilité hémodynamique attribuable à un saignement d’origine rénal et/ou lésion intra-abdominale associée nécessitant une exploration chirurgicale (ex : péritonite) et/ou avulsion ou lacération du pédicule Oui Exploration chirurgicale Figure 8. Non Non Traitement conservateur Arbre décisionnel. Prise en charge des traumatismes fermés du rein. PAS : pression artérielle systolique ; UIV : urographie intraveineuse. Traumatismes de l’uretère (en dehors des traumatismes iatrogènes) Épidémiologie et mécanismes Du fait de son caractère mobile, de son faible diamètre et de sa position anatomique, l’uretère est rarement atteint lors de traumatismes (2,5 % des traumatismes du tractus urinaire) [76] . Les traumatismes de l’uretère concernent essentiellement des hommes (plus de 80 %) jeunes [76, 77] . Ils résultent majoritairement de plaies pénétrantes ou de traumatismes fermés violents [76, 77] . Les plaies pénétrantes atteignent, dans des proportions égales, l’uretère lombaire, iliaque ou pelvien. Les traumatismes fermés concernent la jonction pyélo-urétérale dans plus de 90 % des cas [77] . Les mécanismes en cause dans les traumatismes fermés sont soit une atteinte directe par un fragment osseux (fracture du rachis ou du bassin), soit une décélération brutale qui entraîne facilement une avulsion de la jonction pyélo-urétérale [76] . 45 à 50 % des cas [65, 77] . Les signes cliniques qui doivent faire suspecter un traumatisme urétéral sont : la lombalgie (notamment fébrile), l’écoulement d’urine par le vagin (fistule urétérovaginale) ou par un drain mis en place lors de la prise en charge d’un organe lésé associé. Examens d’imagerie Le scanner a une mauvaise sensibilité pour détecter l’extravasation d’urine à la phase initiale [78] . Le diagnostic est au mieux confirmé par une urétéropyélographie rétrograde [79] . Classification Comme pour les traumatismes rénaux, c’est la classification de l’American Association for the Surgery of Trauma (AAST), établie en 1992, qui fait référence [80] (Tableau 3). Elle a été validée par une série récente montrant une association entre le grade lésionnel, le nombre de lésions associées, la complexité de la réparation et la mortalité [81] . Présentation clinique Prise en charge thérapeutique Le diagnostic est souvent différé, car la symptomatologie est pauvre et non spécifique. L’hématurie n’est retrouvée que dans Les traumatismes mineurs (grade I et II) sont traités par un simple drainage par endoprothèse urétérale. EMC - Urologie 7 18-159-A-10 Traumatismes fermés du rein et de l’uretère Tableau 3. Classification américaine : American Association for the Surgery of Trauma Ureter Injury Scale [80] . Grade 1 Hématome pariétal seul Grade 2 Lacération de moins de 50 % de la circonférence Grade 3 Lacération de plus de 50 % de la circonférence Grade 4 Rupture complète avec moins de 2 cm de dévascularisation Grade 5 Rupture complète avec plus de 2 cm de dévascularisation Les traumatismes majeurs (grade III, IV et V) nécessitent une reconstruction chirurgicale précoce ou différée. Le geste dépend du site et de l’étendue de la lésion : • tiers supérieur : anastomose calico-urétérale, anastomose pyélourétérale en cas de plaie pyélique associée à un syndrome de la jonction pyélo-urétérale ; • deux tiers supérieurs : anastomose urétéro-urétérale terminoterminale, anastomose urétéro-urétérale terminolatérale sur l’uretère controlatéral, lambeau de Boari ; • tiers inférieur : réimplantation directe ou dans une vessie psoïque. En cas de lésion multiétagée ou étendue, on peut avoir recours à l’interposition d’une anse iléale ou à une autotransplantation [77] . Complications Ce sont celles de la fistule urinaire et de la sténose urétérale : sepsis, urinome, hydronéphrose, perte de fonction rénale, fistule urétérovaginale, fistule urétérodigestive [77] . Conclusion Les progrès techniques de ces dernières années ont transformé la prise en charge des traumatismes rénaux et urétéraux en la rendant plus conservatrice. Les principes de prise en charge restent les mêmes, mais les dernières publications montrent une tendance à la diminution des durées d’immobilisation et d’hospitalisation et à une moindre utilisation des imageries de contrôle. Les résultats décevants de la chirurgie en urgence et les progrès attendus de la radiologie interventionnelle réduiront sans doute encore, à l’avenir, la place de l’exploration chirurgicale. Références [1] [2] “ Points essentiels • L’examen diagnostique de référence dans l’exploration des traumatismes du rein est le scanner abdominal avec injection. Il doit être réalisé en cas d’hématurie macroscopique, de PAS inférieure à 90 mmHg, de suspicion de lésion intra-abdominale et de trauma avec décélération importante. • L’hématurie microscopique isolée ne nécessite pas de scanner. • La classification de référence est la classification de l’American Association for the Surgery of Trauma qui divise les traumatismes rénaux en cinq grades de gravité croissante. • Le traitement des traumatismes rénaux est, dans la majorité des cas, conservateur. • Il y a trois indications absolues à une exploration chirurgicale d’emblée : ◦ avulsion ou lacération du pédicule ; ◦ instabilité hémodynamique en rapport avec un saignement rénal ; ◦ présence de lésions associées requérant une exploration chirurgicale (perforation d’un organe creux, etc.). • La place de la radiologie interventionnelle est de plus en plus importante. • Le décubitus strict n’est pas impératif en l’absence de lésion splénique. • La place du scanner de réévaluation est discutée. Il n’est à envisager qu’en cas de complication ou pour contrôler l’évolution d’une extravasation d’urine. • Les traumatismes externes de l’uretère (fermés ou pénétrants) sont rares. • La symptomatologie d’un traumatisme urétéral est souvent fruste (l’hématurie n’est retrouvée que dans 45 % à 50 % des cas) chez des patients généralement polytraumatisés. Le scanner est souvent pris en défaut et le meilleur examen est l’urétéro-pyélographie rétrograde (UPR). 8 [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10] [11] [12] [13] [14] [15] [16] [17] [18] [19] [20] Santucci RA, Wessells H, Bartsch G, Descotes J, Heyns CF, McAninch JW, et al. Evaluation and management of renal injuries: consensus statement of the renal trauma subcommittee. BJU Int 2004;93:937–54. Noor MA, Ather MH. Difference in the outcome of patients managed with isolated renal injury and co-existent abdominal organ injury. J Ayub Med Coll Abbottabad 2003;15:29–32. Paparel P, N’Diaye A, Laumon B. 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Disponibles sur www.em-consulte.com Arbres décisionnels 10 Iconographies supplémentaires Vidéos/ Animations Documents légaux Information au patient Informations supplémentaires Autoévaluations Cas clinique EMC - Urologie Cet article comporte également le contenu multimédia suivant, accessible en ligne sur em-consulte.com et em-premium.com : 1 autoévaluation Cliquez ici 5 cas clinique Clinique 1 Épidémiologie et imagerie des traumatismes fermés du rein. Cliquez ici Clinique 2 Traitements endoscopiques et radiologiques des traumatismes fermés du rein. Cliquez ici Clinique 3 Traitement chirurgical des traumatismes fermés du rein. Cliquez ici Clinique 4 Traitement conservateur des traumatismes fermés du rein. Cliquez ici Clinique 5 Traumatismes fermés de l'uretère. Cliquez ici 1 iconographie supplémentaire Iconosup 9 a. Lacération profonde et hématome périrénal au temps injecté veineux en coupe axialle, (traumatisme grade 3 ou 4-AAST). b. Lacération profonde après reformatage en coupe coronale. c. Visualisation d'une extravasation d'urine, au temps tardif après reformatage en mode « PIM », témoignant d'une plaie du bassinet (permettant de classer la lésion grade 4-AAST). Cliquez ici Cliquez ici pour télécharger le PDF des iconographies supplémentaires © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 15/09/2014 par CENTRE HOSPITALIER VALENCIENNES - (25612)