Cette photo est celle d`Alice DUBOURG mon arrière-grand
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Cette photo est celle d`Alice DUBOURG mon arrière-grand
Cette photo est celle d’Alice DUBOURG mon arrière-grand-mère, mère de la mère de mon père. Elle était fille Gorce et Petite Fille Stern (la grande famille de bijoutiers internationaux). C’est un grand oncle qui nous a raconté l’histoire d’Anne du Bourg, notre ancêtre, car il avait la généalogie tenue depuis cette date. Ainsi les descendants de ce bon chrétien, martyr de la tolérance et liberté de penser se sont associés à des protestants et des juifs. Dans ma famille, nous avons toujours eu du respect pour les croyances des peuples, quelles que soient leur croyance dans la mesure où les droits de l’homme n’en ont rien à souffrir. Quel crime avait commis Anne DU BOURG, neveu du chancelier Antoine DUBOURG et magistrat, pour être supplicié et brûlé vif le 23 décembre 1959, place de grève ? Le même que six autres magistrats arrêtés en même temps, celui de laxisme envers les protestants, qu’ils répugnaient à faire condamner. Le 10 juin 1959, Anne Du BOURG et six autres magistrats avaient osé s’opposer à la politique répressive de l’état contre les protestants, protestant de l’enregistrement d’une nouvelle loi. Le roi venait de publier un édit d’Ecouan le 2 juin 1559, permettant une répression sanglante. Cet édit sommait d’abattre sans procès ni sommation tout protestant en fuite ou révolté (c’est-à-dire, refusant le catholicisme). Pour justifier cette stigmatisation des protestants, on leur fera porter le chapeau de terroristes… En effet, le roi Henri II, victime d’une tentative d’assassinat en septembre 1557 rue st Jacques, prétendra que le meurtrier était protestant, sans aucune preuve. Ce dernier, exécuté quasi immédiatement, n’aura jamais parlé. On peut dire, avec le recul, que cette période marque le début des guerres de religions. L’état, soucieux de bien se faire voir du Vatican, faisait du zèle dans la dénonciation et le châtiment des hérétiques déviants. Quand une chasse pareille se produit, c’est pour garder le pouvoir, pas pour protéger les citoyens. Aujourd’hui cela semble clair, l’église catholique romaine ne voulait pas voir échapper une partie de la population de son giron. Les pertes d’influence, d’argent et d’avenir auraient été considérables et finalement, les pertes ont quand même lieu. Quand on professe l’amour du prochain et qu’on tue en ce nom, à terme, cela se paye par un puissant rejet des populations ainsi manipulées pendant des siècles. Posez-vous la question, chaque fois que l’on dénonce des gens, qu’on leur fait porter de la honte : à qui profite le crime ? Quel crime a commis l’accusé, réellement ? En ce temps-là, il suffisait de dénoncer quelqu’un pour qu’une instruction uniquement à charge se déclenche. Une femme avait marché pieds nus dans la forêt ? Elle était peut être allée servir le diable. Une femme avait ramassé des herbes ! Misérable, seul Dieu guérit ! Quelle impudence ! 80% des victimes de l’inquisition étaient des femmes seules. On sait qu’à cette époque, une femme devait avoir un mari, sans quoi elle pouvait faire l’objet de propositions et pressions. Facile alors de dénoncer une dame qui se refusait, en inventant n’importe quoi. Quand les voisins étaient interrogés par l’inquisition, terrorisés d’être assimilés à cette dame et embastillés voire torturés avec, ils prenaient soin d’en rajouter, accusant plus lourdement cette dernière, afin d’être sûr d’avoir montré qu’ils étaient du bon côté. Ainsi les dossiers regorgeaient de témoignages crédibles et les tribunaux pouvaient être fiers d’obtenir un faisceau de faits concordants, composés de ragots. Il est bien sûr indécent de croire que ces pratiques moyenâgeuses perdurent toujours ; heureusement maintenant, les enquêtes se basent sur des faits et non une idéologie, n’est-ce-pas ? Dans la liste des crimes de mon ancêtre, figurait ce qu’expose ce site : il avait adhéré à la foi huguenote récemment ! http://www.regard.eu.org/Livres.14/Portraits-recits_huguenots/14.html « Ce fut enfin la veille du jour de Pâques 1559, que du Bourg fut admis à la sainte Cène dans l'Eglise réformée de Paris. Ce fut pour lui une grande joie, et il disait, quelques mois plus tard, à ses juges, « qu'il ne voudrait pas avoir longtemps été sans recevoir ce grand bien de Dieu, qui lui fut présenté dans ce sacrement. » Il leur disait aussi avec quelle simplicité auguste on célébrait la Cène dans ces assemblées où se réunissaient en cachette les protestants de Paris, comment, « après les prières et exhortations faites par la Parole de Dieu, le saint sacrement était administré par le ministre, à tous ceux qui s'y présentent non excommuniés, et sous les deux espèces du pain et du vin, avec actions de grâces. » Dans ce contexte ancien, il fallait beaucoup de courage à mon ancêtre pour oser braver le roi et sortir de sa réserve, dire en séance mercuriale (parlement) combien cela le tourmentait de voir brûler des chrétiens qui sur le bûcher, invoquaient le nom du Christ en mourant. « Ce n’est pas une petite affaire » aurait-il dit. Anne Du Bourg aurait assisté à plusieurs morts remarquables dans la dignité de protestants, dont Anne Audebert et Claude Thierry, lesquelles rendirent gloire à Dieu et son fils pendant leur supplice. Anne Du Bourg était un homme posé, de bonne réputation et d’un grand charisme. Il était éloquent et écouté. Ce réquisitoire fut tellement convainquant, tellement dérangeant que tout magistrat et conseiller du roi qu’il fut, on l’embastilla derechef. Il lui a d’autant moins été pardonné que justement, c’était un proche de la cour et un homme d’état. Homme mûr qu’il était, il avait femme et enfants qui ont dû assister à ce meurtre d’état un 23 décembre, veille de Noël. On continue de faire ceci de nos jours, quand on veut punir des gens plus que la loi ne le permet, en les mettant en garde à vue le jour d’un anniversaire, en donnant des verdicts infâmes le jour de leur fête, et ceci dans le monde entier. Imaginez comment, des générations durant, la famille DUBOURG a fêté Noël ? A trente-huit ans, âge respectable de l’époque, celui-ci avait eu le temps d’avoir de grands enfants qui ont dû s’en souvenir, un souvenir cuisant, sans jeu de mots… « Mes amis, je ne suis pas ici en tant que malfrat, mais au nom du Christ », aurait dit Anne du Bourg , en partant pour sa mort. La place de Grève est l’ancien nom de la place de l’Hôtel de Ville à Paris, c’est ici qu’Anne du Bourg a donné sa vie pour la tolérance. Pensez-y avec gratitude, lorsque vous marcherez sur ces pavés souillés du sang du juste. Ma proposition est de consacrer la date du 23 décembre en tant que journée de la tolérance, de la liberté de penser. Merci à tous ceux qui ont recueilli sur internet des traces de cette histoire en mémoire de ce juste. In memoriam, Alice CHERBONNEL