Les prescriptions de protection incendie unifiées et libéralisées

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Les prescriptions de protection incendie unifiées et libéralisées
Partie française
Priorité à la sécurité des personnes et des biens
Les prescriptions de
protection incendie unifiées
et libéralisées
Avec la publication d’une nouvelle ordonnance sur la prévention des
incendies, le Conseil d'Etat du canton de Zurich a intégré à la
législation cantonale la nouvelle Norme de protection incendie ainsi
que les 18 directives de protection incendie de l’Autorité intercantonale sur l’élimination des entraves techniques au commerce.
L’uniformisation des directives permet une libéralisation des
dispositions de protection incendie et, en élargissant les domaines
d’application du bois dans les édifices, favorise les constructions
écologiques. L’ordonnance est en vigueur depuis le début de l’année.
Les nouvelles prescriptions de protection
incendie applicables sur l’ensemble de la
Suisse visent en premier lieu la protection
des personnes, mais déploient également
leurs effets sur les prescriptions relatives
aux matériaux et aux constructions. L'industrie du bâtiment dispose ainsi d'une
plus grande liberté d’action alors que le
recueil des prescriptions voit son volume
diminuer par rapport aux textes précédents. Cette nouvelle donne suppose toutefois que tous les acteurs de ce domaine,
maîtres d’ouvrages et exploitants des
bâtiments, assument véritablement leurs
responsabilités propres. Les nouvelles
dispositions assurent en outre une promotion de la construction écologique en
élargissant les domaines d’application du
bois dans la construction puisqu'il est
dorénavant possible de recourir au bois
pour la construction d’immeubles de plusieurs étages. Dans le canton de Zurich,
les prescriptions sont intégrées à l’ordonnance sur la prévention des incendies.
L’ordonnance zurichoise donne en outre
une base légale qui permet à la police
cantonale du feu d'interdire les feux
ouverts sur la totalité du territoire cantonal durant les périodes de hautes températures et sécheresse prolongées –
comme ce fut le cas durant l’été 2003. A
défaut d'une telle base légale, l’interdiction des feux ouverts relevait de la compétence des communes pour leur territoire propre.
IZA Revue de santé et de sécurité au travail
Adaptation au droit européen
Les nouvelles prescriptions de protection
incendie applicables sur l’ensemble de la
Suisse doivent leur existence à la volonté de
la Confédération d'adapter le droit suisse de
la construction à la législation européenne.
Les cantons restent quant à eux compétents
pour les aspects techniques de la protection
incendie au niveau des matériaux de construction. Les 19 assurances immobilières
de droit civil réunies au sein de l’Association
des établissements cantonaux d’assurance
incendie ont élaboré ensemble les nouvelles
prescriptions de protection incendie pour en
faire une solution nationale dans le cadre de
l’Accord intercantonal sur l’élimination des
entraves techniques au commerce (AIETC).
Les établissements d’assurance incendie ont
ainsi fourni un exemple novateur de consensus intercantonal tout en créant une solution
conforme au droit européen.
Répartition des tâches entre
Confédération et cantons
George Ganz est le directeur exécutif de l’Autorité intercantonale pour l’élimination des
entraves techniques au commerce. Une conférence de presse de l’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie
lui a permis d’exposer la genèse des nouvelles prescriptions.
L'Accord intercantonal sur l’élimination des
entraves techniques au commerce AIETC
(RS 946.513) a été conclu le 23 octobre 1998.
Il est entré en vigueur le 4 février 2003. 26
cantons y ont adhéré. La base légale était
ainsi posée pour que les prescriptions de
protection incendie soient rendues obligatoires dans tous les cantons (harmonisation), ceux-ci étant compétents, en vertu de
la Constitution fédérale, en matière de prescriptions dans le domaine de la construction, et, simultanément, pour satisfaire aux
exigences internationales quant à l’élimination des obstacles techniques au commerce.
Par une décision du 10 juin 2004
(www.dtap.ch), l’Autorité intercantonale
pour l’élimination des entraves techniques
au commerce – institution responsable de la
mise en application de l’AIETC – a rendu
obligatoire dès le 1er janvier 2005 la Norme et
les 18 directives de protection incendie. Un
délai a été fixé au 30 juin 2005 pour que les
cantons intègrent formellement et de manière adéquate ces dispositions à leur législation, cela du moins dans les cantons où le
droit l’exige. Les nouvelles dispositions peuvent, et doivent, être appliquées dès le 1er janvier 2005.
Actualiser au besoin
Les nouvelles prescriptions de protection
incendie s’appliquent pour les nouvelles
constructions, ouvrages et installations, et
en cas de modifications importantes au
niveau de la construction ou de l’exploitation, ainsi que lors d’agrandissement ou de
changement d’affectation (sans effet rétroactif, les procédures d’autorisation en cours
peuvent continuer selon l’ancien droit). Seul
un petit nombre d’exceptions aux directives
de construction a été toléré; il s’agit par
exemple de certaines particularités régionales, dont notamment l’architecture traditionnelle des bâtiments historiques. Aucune
exception n’est en revanche tolérée quant
aux matériaux et produits de construction.
Les expériences faites jusqu’ici ont d’ailleurs
montré que les dispositions d’exception
n’étaient en partie jamais appliquées.
La décision du 10 novembre 2004
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Partie française
(www.dtap.ch) désigne l’Association des
établissements cantonaux d’assurance
incendie en tant que Commission technique
des prescriptions de protection incendie.
Elle doit veiller à ce que la Norme et les
directives de protection incendie soient
actualisées si nécessaire. Pour ce faire, elle
adresse chaque année un rapport écrit à
l’Autorité intercantonale pour l’élimination
des entraves techniques au commerce et lui
soumet d’éventuelles propositions motivées.
La Commission technique des prescriptions
de protection incendie est donc l’organe officiel de contact et de renseignement pour les
questions relatives à l’application de la
Norme et des directives de protection incendie.
Raisons de la refonte
W.Gächter,directeur de l’établissement d'assurance immobilière du canton de St Gall et
chef de projet de la révision des prescriptions de protection incendie, nous a expliqué
les raisons de la refonte de ces textes. Les
prescriptions de protection incendie harmonisées entre les cantons depuis 1993 étaient,
pour l’essentiel, d’excellentes bases pour
assurer la sécurité des personnes et des
biens en cas d'incendie. L’évolution et les
progrès de la technique ont toutefois amené
à revoir le contenu de la Norme et des directives. En outre, la nouvelle législation fédérale sur les produits de construction, liée aux
accords bilatéraux entre la Suisse et l’Europe, impliquait une telle refonte, au moins au
niveau formel.Dans le cadre d’une large consultation, l’AEAI a donc rédigé un nouveau
recueil cohérent de directives, mises depuis
lors en application contraignante dans tous
les cantons par l’intermédiaire de l’AIETC.
La nouvelle orientation
La législation fédérale sur l’élimination des
entraves au commerce et sur les produits de
construction impliquait que les prescriptions de protection incendie, qui relevaient
de la souveraineté cantonale, soient reprises
dans les prescriptions et interdictions souveraines requises à cet effet. La nouvelle
Norme de protection incendie, de portée
générale, et les 18 directives de protection
incendie spécifiques sont en conséquence
orientées sur des objectifs de protection. La
responsabilité de la protection relève encore
et toujours des autorités. Le renoncement à
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la définition des modes de mise en application et la référence à «l’état de la technique»
permettent avant tout de supprimer des
obstacles techniques au commerce.Les prescriptions laissent la formulation de l’état de
la technique aux soins de l’économie et des
organismes de normalisation. Cette nouveauté implique toutefois un important glissement de la responsabilité des autorités
vers celle de l’économie, des fabricants, des
concepteurs, ingénieurs, architectes et maîtres d'œuvre.
Conséquences
La restriction aux aspects nécessaires pour
l’autorité a rendu les prescriptions de protection incendie 2003 nettement plus concentrées, et plus brèves, que la version précédente qui datait de 1993.Elles sont marquées
par de plus grandes attentes, et une plus
grande confiance, quant à la responsabilité
propre.La légitimation politique de la validité et de la pertinence des directives de
l’AEAI pour l’ensemble de la Suisse est donnée par la décision du Concordat intercantonal qui les rend obligatoires pour tous les
cantons. La mise en application pratique
doit passer par des mesures transitoires,
dans la mesure où, du côté européen, l’harmonisation des normes relatives à la protection incendie n’est encore que très partiellement entrée en force de loi.
Nouveautés importantes
Les prescriptions suisses de protection
incendie 2003 reprennent la nouvelle classification européenne des parties et des matériaux de construction. Les compétences
fédérales en matière de mise sur le marché
de produits de construction et les compétences qui restent réservées aux cantons pour ce
qui est des diverses utilisations pratiques et
conformes aux exigences de sécurité dans le
bâtiment se rejoignent ainsi, avec toutes les
procédures et attestations de contrôle sousjacentes.
La refonte des conditions cadres a en outre
permis de rendre standard des solutions qui,
dans l’ancienne mouture, relevaient de l’exception.Sur le plan général,il est maintenant
possible de compenser les exigences posées
pour les systèmes porteurs par des installations techniques de protection contre l’incendie (sprinkler). Dans les locaux industriels et administratifs principalement, il est
maintenant possible de créer des compartiments coupe-feu de plus grande surface
qu’auparavant. Les possibilités de recourir
au bois dans la construction ont été considérablement étendues,toutefois avec l’exigence
d’attestations ad hoc fournies par des ingénieurs responsables des contrôles. Enfin, la
construction de bâtiments à étages est définie logiquement selon les points de vue de la
technique de protection contre l’incendie,
des voies d’évacuation et de l’intervention
des sapeurs-pompiers. Sur un plan général,
les nouvelles prescriptions offrent, par rapport aux anciennes, plus de facilité et de flexibilité. Le seul renforcement important des
exigences est dû à l’adaptation aux standards européens en matière de nouvelle construction ou de transformation importante
d’hôtels, qui doivent impérativement être
équipés d’installations de détection d’incendie.
L’AEAI (Association des établissements
cantonaux d’assurance incendie) en tant
qu’organisme spécialisé
Jürg P. Marty, directeur de l’Association
des établissements cantonaux d'assurance
incendie, décrit l’AEAI comme étant l’organisme spécialisé pour la protection incendie
en Suisse. Afin d’assurer que l’on dispose
pour l’ensemble de la Suisse d’une prévention contre l’incendie qui soit unifiée et
adaptée aux dispositions de l’UE, et parce
que les cantons sont en Suisse compétents
en matière législative pour ce qui touche aux
bâtiments et à la protection contre l'incendie, les autorités cantonales chargées de la
mise en application ont mandaté l’AEAI dès
les années cinquante pour élaborer une protection préventive contre l’incendie en Suisse. Ils ont alors repris ces dispositions, avec
les adaptations voulues, dans leurs législations cantonales respectives.
En 1993 l’AEAI publia pour la première fois
des prescriptions de protection incendie
unifiées pour l’ensemble du pays, prescriptions qui furent intégrées à la législation de
chacun des cantons. L’AEAI fut également
chargée d'adapter continuellement ces
modèles de prescriptions, d'une part en
assurant leur harmonisation entre la Suisse
et l’Europe, d’autre part en assurant leur correspondance à l’état de la technique. En
outre, sur mandat des cantons, l’AEAI fut
chargée de l’homologation et de la certifica-
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Partie française
tion des produits de protection incendie utilisés en Suisse.
La révision globale des prescriptions de protection incendie AEAI, achevée en 2003, a
permis d’y intégrer les plus récentes données suisses et européennes sur le plan juridique, mais aussi sur le plan technique. Sur
la base de la nouvelle loi sur les produits de
construction et des décisions du concordat
intercantonal AIETC, l’AEAI fut désignée en
2004 comme «Commission technique des
prescriptions de protection incendie», et les
nouvelles prescriptions, par l’intermédiaire
du droit du concordat, furent déclarées obligatoires dans toute la Suisse.
Tâches de l'AEAI
1. Norme et directives:
L’AEAI élabore en collaboration avec les
cantons des prescriptions de protection
incendie unifiées et applicables dans
toute la Suisse, consistant en une Norme
de protection incendie, des directives de
protection incendie et des règlements
d'essai. Si nécessaire, ces dispositions
seront adaptées par l’AEAI aux nouveaux
besoins de sécurité, à l’état de la technique et à la normalisation européenne, et
approuvées par le concordat AIETC.
L’AEAI met les prescriptions de protection incendie à disposition des autorités
et des utilisateurs sur l’internet.
2. Homologation et certification:
Sur mandat des cantons, l’AEAI accorde
des homologations de protection incendie pour des produits et des entreprises
de protection incendie.
3. Certificats:
L’AEAI est accréditée par la Confédération pour être l’office de certification, et
elle établit des certificats pour les produits de protection incendie et pour le personnel spécialisé.
4. Répertoire de la protection incendie:
L’AEAI est l’éditrice du Répertoire suisse
de la protection incendie (RPI). Pour
assurer la gestion de ce Répertoire de la
protection incendie et des tâches afférentes, l’AEAI recourt à une solution informatique moderne basée sur une banque
de données, et met ce produit à disposition sur l’internet.
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5. Formation et séminaires:
L’AEAI offre aux autorités cantonales de
protection incendie une formation spécifique à ce domaine, et contribue ainsi à
assurer l’unification de la mise en application des prescriptions dans toute la
Suisse.
6. Coordination:
L’AEAI coordonne les exigences de la
protection incendie avec celles d’autres
domaines comme la protection de l’environnement, la sécurité au travail, les économies d’énergie, etc. Elle collabore avec
les autorités fédérales, les associations
suisses, les offices de contrôle et autres
organisations en Suisse et à l’étranger, et
assume de ce fait le rôle de négociateur
pour toutes questions relatives à la protection contre l’incendie en Suisse.
Dans les profils des fenêtres coupe-feu se
trouvent des matières qui moussent en cas de
températures très élevées, créant ainsi une
forte isolation thermique.
Image: Hydro Building Systems AG, Mägenwil
L’AEAI en tant qu’instance spécialisée
pour les prescriptions de protection
incendie
La nouvelle désignation de l’AEAI en tant
que «Commission technique des prescriptions de protection incendie» formulée par
le Concordat intercantonal AIETC règle le
statut juridique de l’AEAI en tant qu'organe
spécialisé pour les prescriptions de protection incendie. L’AEAI constitue un instrument des cantons organisé au niveau
fédéral.
AEAI – au service de la sécurité-incendie depuis 100 ans
M. Fischer, président de l’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie
L’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie (AEAI) est l’organisation faîtière des 19 assurances immobilières cantonales. Depuis l’entrée en vigueur des
nouvelles prescriptions de protection incendie, l’AEAI est également l’organisme technique de la protection incendie pour toute la Suisse.
Les assurances immobilières cantonales ou établissements cantonaux d’assurance
incendie sont des institutions indépendantes de droit public, soumises au droit cantonal.
Elles assurent plus de 80% du parc immobilier suisse, dont la valeur est estimée à environ 1500 milliards de francs.D’une part,les assurances immobilières sont contraintes,de
par leur position monopolistique et l’obligation d’être assuré, d’assurer tous les risques à
la valeur à neuf (obligation d’accepter) D’autre part, elles assument l’autorité des tâches
de prévention des sinistres (prévention). Une telle liaison entre la prévention des incendies et également, en partie, des risques naturels, la conduite et la participation au financement des services du feu et l’assurance à la valeur à neuf, le tout sous la direction unifiée de l’assurance immobilière, permet d'assurer une gestion des risques judicieuse et
optimale quant aux coûts. Cette gestion globale des risques se traduit par des coûts économiques globaux particulièrement bas, et ainsi par des primes très avantageuses pour
les propriétaires immobiliers.
Depuis plus d’un siècle, l’AEAI est le centre de compétences des assurances immobilières
cantonales en matière de protection contre l'incendie. La désignation de l’AEAI comme
«Commission technique des prescriptions de protection incendie» par l’Autorité intercantonale de l’AIETC étend logiquement cette compétence à la totalité du domaine d'application des prescriptions de protection incendie. L’AEAI est ainsi l’organisme officiel
pour les questions relatives à l’application de la Norme et des prescriptions de protection
incendie pour l’ensemble de la Suisse et de la Principauté du Liechtenstein.
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