RIMBAUD : Villes II (Illuminations 1873)
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RIMBAUD : Villes II (Illuminations 1873)
RIMBAUD : Villes II (Illuminations 1873) Plan Introduction 1-L'énormité et la structuration des villes 2-Les villes des espaces théâtraux 3-la place de l'homme dans les villes modernes Le second poème "Villes" ou Villes II, dit aussi poème de l'Acropole ne suit pas immédiatement L'Acropole d'Athènes le premier poème Villes. Rimbaud a intercalé entre ses Villes deux poèmes L'acropole officielle outre les conceptions de la "Vagabonds" barbarie moderne les plus colossales. Impossible donnant plus de d'exprimer le jour mat produit par le ciel immuablement gris, l'éclat impérial des bâtisses, et relief à ses deux la neige éternelle du sol. On a reproduit dans un goût poèmes qui peuvent être lus d'énormité singulier toutes les merveilles classiques simultanément de l'architecture. J'assiste à des expositions de étant donné les peinture dans les locaux vingt fois plus vastes nombreux chiasmes qu'Hampton-Court. Quelle peinture ! Un entre les deux Nabuchodonosor norwégien a fait construire les escaliers des ministères ; les subalternes que j'ai pu textes. Le XIXème siècle est celui du voir sont déjà plus fiers que des Brahmas et j'ai tremblé à l'aspect de colosses des gardiens et officiers remodelage des de constructions. Par le groupement des bâtiments en grandes villes, du boulevard squares, cours et terrasses fermées, on a évincé les clochers. Les parcs représentent la nature primitive Haussmann, de l'expulsionà la travaillée par un art superbe. Le haut quartier a des parties inexplicables : un bras de mer, sans bateaux, périphérie des couches sociales les roule sa nappe de grésil bleu entre des quais chargés de candélabres géants. Un pont court conduit à une plus basses, le peuple du vieux poterne immédiatement sous le dôme de la SainteParis. Les villes ont Chapelle. Ce dôme est une armature d'acier connu depuis artistique de quinze mille pieds de diamètre environ. toujours un développement Sur quelques points des passerelles de cuivre, des plates-formes, des escaliers qui contournent les halles considérable et ont toujours fasciné les et les piliers, j'ai cru pouvoir juger la profondeur de êtres humains. Ce la ville ! C'est le prodige dont je n'ai pu me rendre poème est avant compte : quels sont les niveaux des autres quartiers tout une critique sur ou sous l'acropole ? Pour l'étranger de notre de la vision idéale temps la reconnaissance est impossible. Le quartier de la ville apparue Vocabulaire Villes visitées par Rimbaud en 1875 Londres, Stuttgart, Bruxelles, Paris. Chiasme du grec chiasma, croisement Figure de style disposant en ordre inverse les mots de deux propositions qui s'opposent ex Il est riche en défaut est en chiasme avec il est pauvre en qualités. Exemple de chiasme entre les deux poèmes : Villes I, une mer troublée chargée de flottes orphéoniques et dans ville II on inverse et ce sont des bras de mer sans bateaux aux quais, c'est la même chose puisque s'ils ne sont pas à quai, ils sont en mer, mais c'est inversé. Acropole Partie la plus élevée des cités grecques, comportant une citadelle et des lieux de culte (l'Acropole d'Athènes). Barbare Étranger chez les grecs et les romains, qui n'est pas de la cité, civilisé. Bâtisse Bâtiment sans commerçant est un circus d'un seul style, avec galeries à arcades. On ne voit pas de boutiques. Mais la neige de la chaussée est écrasée ; quelques nababs aussi rares que les promeneurs d'un matin de dimanche à Londres, se dirigent vers une diligence de diamants. Quelques divans de velours rouge : on sert des boissons polaires dont le prix varie de huit cents à huit mille roupies. A l'idée de chercher des théâtres sur ce circus, je me réponds que les boutiques doivent contenir des drames assez sombres. Je pense qu'il y a une police, mais la loi doit être tellement étrange, que je renonce à me faire une idée des aventuriers d'ici. Le faubourg aussi élégant qu'une belle rue de Paris est favorisé d'un air de lumière. L'élément démocratique compte quelque cent âmes. Là encore les maisons ne se suivent pas ; le faubourg se perd bizarrement dans la campagne, le "Comté" qui remplit l'occident éternel des forêts et des plantations prodigieuses où les gentilshommes sauvages chassent leurs chroniques sous la lumière qu'on a créée. Rimbaud, Illuminations, 1875 avec "Ce sont des villes" exprimant par cette exclamation, un idéal, une harmonie et qui dans ce second poème devient source d'angoisse par le gigantisme de ses édifices. 1-L'énormité et la structuration des villes "L'acropole officielle outre les conceptions de la barbarie moderne les plus colossales" qui ouvre le débat met l'accent sur le gigantisme des villes, Acropole (cité haute), métropole (mère de la cité) mégalopole (grande ville) autant de termes qui attestent de la ville comme d'un miroir à la hauteur du génie humain, d'où parfois la démesure. Dans le premier texte des "villes", les métropoles apparaissaient comme de gigantesques carrefours spatiotemporels, harmonieux, rayonnants, idylliques. Les "Alléganys" des Etats-Unis côtoyaient les "Libans de rêve" et les boulevards de Bagdad dans la plus caractère Faubourg du latin foris dehors et burgus bourg, quartier situé en dehors de l'enceinte fortifiée d'une ville. Hampton court Château, résidence royale d'Henri VIII au sud-ouest de Londres. Henri VIII roi d'Angleterre, 1509-1547, un des princes de la Renaissance, créateur de la religion anglicane car le pape refusait d'annuler son mariage avec Catherine d'Aragon. Il épousa 6 femmes dont Anne Boleyn, Jane Seymour. Nabuchodonosor Roi de Babylone 605-562 av. JC, détruisit Jérusalem. Subalterne Dont la position est inférieure, subordonnée. Brahmanisme Système socioreligieux indien, apparu avant l'hindouisme, caractérisé par une division de la société en castes. Square Jardin public de petite dimension généralement entouré d'une grille. Cours grande harmonie. Dans ce texte les villes apparaissent comme des espaces structurés, des lieux d'immigration mais aussi d'exclusion, des carrefours où se rencontre dans le plus complet désordre des espaces et des temps différents. Les barbares de la Grèce, ces étrangers qui ne sont pas de la ville, qui ne sont pas civilisés, se perdent dans ces espaces qui ne sont pas à dimension humaine où qui ne leur sont pas accessibles. Les villes modernes reproduisent en les grandissant les merveilles classiques, ajoute ça et là quelques espaces verts, des parcs, des squares plus petits, des cours plantés d'arbres. Toutes les dimensions sont outrées, les espaces réservés aux expositions sont gigantesques car rien n'est assez grand lorsqu'il s'agit de montrer sa réussite, et le spectateur habituel des expositions dans les musées est ici un spectateur perdu. Carrefour de peuples, la ville Avenue plantée d'arbres Grésil Pluie de petits granules formés de glace et de neige. Candélabres Appareil d'éclairage, colonne supportant plusieurs lampes. Sainte Chapelle Chapelle gothique située dans l'enceinte du Palais de justice de Paris construite par StLouis pour abriter les reliques de la passion du Christ. Nababs Titre donné dans l'Inde musulmane aux gouverneurs, aux officiers de la cour des sultans, homme très riche qui fait étalage de sa fortune. Roupie Unité monétaire de l'Inde, du Sri Lanka, Népal, Maldives, Seychelles et Pakistan. L'amplification par l'utilisation des pluriels (ponts, ciels, masures, dômes, mats) donne au texte une fonction messianique et au poète le rôle du porte parole libérateur de est aussi un l'humanité. carrefour d'influences, c'est un "Nabuchodonosor norvégien qui a construit les escaliers des ministères", une alliance de mots pour traduire ces villes de ce XIXème siècle, alliance de colonisateurs et de colonisés, riche de L'Orient antique avec ses traditions et l'Europe nordique moderne. Tous ces peuples se retrouvent dans une même alliance de pensée, d'influence pour la réalisation d'une gloire commune. "Les boissons polaires se payent en monnaie indienne" met en évidence le caractère incohérent des villes modernes coloniales ou colonialistes. Dans ce gigantisme, le visiteur ne peut s'y retrouver, "mesurer la profondeur de la ville", toute reconnaissance est impossible. 2-Les villes, des espaces théâtraux Alors que le promeneur de la cité grecque découvrait des temples, des théâtres, des lieux de spectacle, le promeneur de la ville moderne découvre des commerces, des cafés ou l'on sert des "boissons polaires". Dans cette ville, le visiteur, spectateur assiste à une autre forme de théâtre, les boutiques, les cafés, assimilés à des circus, sont devenus les nouveaux espaces scéniques où se jouent des représentations. La ville est, comme un théâtre, éclairée artificiellement par des candélabres géants, de "la lumière qu'on a crée", car avec la hauteur des immeubles et le ciel immuablement gris, la clarté est faible et le jour mat. Mais "les boutiques doivent contenir des drames assez sombre" ajoute à l'angoisse des villes et donne l'impression que c'est un spectacle de mort qui semble s'y jouer. Toujours hanté et traumatisé par son arrestation et son séjour en prison, Rimbaud se pose la question de sa sécurité, de la police et des aventuriers. 3-La place de l'homme dans les villes modernes Dans toutes les villes modernes, on assiste à une stratification de la population par couches, par zones, selon son niveau social. Rimbaud nous décrit ces stratégies d'exclusion mise en place dans les cités modernes avec ses "hauts quartiers", l'Acropole au sommet, réservés aux plus riches, des espaces impénétrables pour la plupart , ses bas quartiers comprenant l'espace des boutiques avec des galeries à Arcades, puis il revient sur les faubourgs en périphérie des villes. Notre poème ne manque pas d'ironie pour dénoncer le prix très variable des boissons polaires. La description de la ville qu'il nous fait est une critique de la fragmentation du tissu social. Exclu de la cité moderne, notre poète vagabond n'a pas sa place. La ville décrite par Rimbaud est significative de leur évolution et de la place de l'homme dans la cité moderne, hiérarchisée. Le faubourg, qui était traditionnellement l'endroit réservé aux immigrants en dehors de l'enceinte fortifiée du bourg est devenu le lieu de résidence de quelques rares personnes privilégiées, des gentilshommes fortunés. Ces faubourgs, "aussi élégants qu'une belle rue de Paris", sont composés de maisons individuelles espacées entourées de nature et se perdent "bizarrement dans la campagne, ironie de notre poète pour traduire le paradoxe de trop nombreux citadins qui ont fuit la campagne pour la ville et qui essaie de reconstituer l'habitat dispersé des campagnes qu'ils ont quittées. Conclusion Rimbaud est un observateur avisé du remodelage des grandes villes et de l'expulsion à la périphérie des couches sociales les plus basses, on éloigne les clochers représentatifs de la campagne et on laisse quelques squares. Il a remarqué le remplacement des ruelles du vieux Paris par les avenues haussmanniennes et vu la place grandissante des expositions universelles pour célébrer les merveilles technologiques d'un pays. Toutes ces modifications structurelles de notre environnement ne sont pas plus aujourd'hui les bienvenues qu'elle ne l'étaient pour Rimbaud. Et pourtant toutes les villes rêve encore aujourd'hui d'organiser les jeux olympiques. RIMBAUD : Ville (Illuminations 1873) Plan Introduction 1-La vie à Londres 2-Une vie d'errance et de réclusion 3-Double langage Londres Big Ben Big Ben est avec Hyde Park à proximité du 8 gt collège street où habitait Rimbaud à Londres. Big Ben indique quand le Parlemnet est en séance. Ville Je suis un éphémère et point trop mécontent citoyen d'une métropole crue moderne parce que tout goût connu a été éludé dans les ameublements et l'extérieur des maisons aussi bien que dans le plan de la ville. Ici vous ne signaleriez les traces d'aucun monument de superstition. La morale et la langue sont réduites à leur plus simple expression, enfin ! Ces millions de gens qui n'ont pas besoin de se connaître amènent si pareillement l'éducation, le métier et la vieillesse, que ce cours de vie doit être plusieurs fois moins long que ce qu'une statistique folle trouve pour les peuples du continent. Aussi "Ville" au singulier, du recueil des Illuminations, fait partie du cycle des villes avec deux autres poèmes "villes" au pluriel". Ces trois poèmes qui sont séparés de "Ornières» et de "Vagabonds" constituent l'élément central du recueil 'Illuminations". Le premier de ces textes constitue une introduction et avec les deux autres constitue un cycle. Ils ont en commun d'être des poèmes de l'ambivalence ou Rimbaud qui nous annonçait à la fin de l'adieu d'une saison en Enfer que "nous entrerons aux splendides villes" se montre ici moins enthousiaste et optimiste sur un monde urbain étranger mais monotone et triste. 1-La vie à Londres L'éphémère et point trop mécontent citoyen de la métropole crue moderne n'est autre que notre jeune poète Rimbaud qui séjourna à Londres en compagnie de son ami Verlaine, une sorte d'exil littéraire et sentimental partagé avec de nombreux exilés de la Commune de Paris. Ce séjour qui s'est fait en deux étapes de septembre à décembre 1872 dans le quartier de Soho puis en juillet 1873 autour de Big Ben ne lui a pas laissé que de bons souvenirs . Autobiographique, le texte semble l'être assurément, il est écrit à la première personne avec un "Je" en attaque de poème et une multiplication des adjectifs possessifs, "ma" ou "notre" car cela ressemble à une multipossession avec Verlaine. La métropole où il réside est crue et moderne, pas de fioritures de l'ancien, de copies tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'héritage classique, nul monument à la gloire, aux superstitions d'un passé révolu . Rien que du moderne, une modernité à la Baudelaire, un regard vers l'avenir, une innovation technique comme un miracle, la recherche d'une prose poétique assez souple et heurtée pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'âme, aux ondulations de la rêverie et aux soubresauts de l'âme. Cette ville de Londres n'a-t-elle pas cette modernité Vocabulaire Villes visitées par Rimbaud en 1875 Londres, Stuttgart, Bruxelles, Paris. Les 2 séjours de Rimbaud à Londres Septembre 1872, il quitte Ostende pour Londres avec Verlaine. Arrivés, il prennent contact avec les communards exilés qui les aident à s'installer près de Soho 34 Howland Street. Rimbaud rentre à Charleville en décembre 1872. Juillet 1873, il retourne à Londres où est resté Verlaine, et loge 8 Greet College Street (à proximité de Big Ben). Mais leur liaison étrange commence à être connue du milieu communard londonien qui l'exclut avec Verlaine. Cette liaison étrange est mentionnée dans les rapports de police qui infiltre les exilés. Le couple se met alors à boire, et ils se battent. Verlaine quitte Rimbaud qui menace de se suicider. Big Ben C'est la tour de l'horloge de Wesminster Palace, la maison du parlement. A coté du parlement se dresse la tour St.Étienne dite Big-Ben du nom de sa cloche. comme, de ma fenêtre, je vois des spectres nouveaux roulant à travers l'épaisse et éternelle fumée de charbon, - notre ombre des bois, notre nuit d'été ! - des Erinnyes nouvelles, devant mon cottage qui est ma patrie et tout mon cœur puisque tout ici ressemble à ceci, - la Mort sans pleurs, notre active fille et servante, et un Amour désespéré, et un joli Crime piaulant dans la boue de la rue. Rimbaud, Illuminations, 1875 de s'adapter aux soubresauts de l'histoire, aux ondulations de l'âme, c'est le modèle dont il faut s'inspirer. C'est encore un peu brut, un peu crû, un peu violent mais quelques retouches et l'idéal est atteint, c'est l'illumination, la superposition des idées à cette ville à la géométrie trop rectiligne. 2-Une vie d'errance et de réclusion L'Angleterre est devenu le refuge des communards, des opposants au régime politique qui ont choisi l'exil ainsi que des opposants de toute nature. Londres nous apparaît ici comme un eldorado de tolérance, une morale réduite à sa simple expression, une fraternité d'opposants. La morale y apparaît donc moins stricte qu'en France, réduite à sa plus simple expression et les liaisons homosexuelles y paraissent tolérées, "enfin". La langue est réduite à sa plus simple expression, lorsqu'on ne connaît pas la langue d'un pays et que l'on ne fait aucun effort pour l'apprendre. C'est la ville avec son anonymat, chacun se perd dans la foule, l'ouvrier comme le bourgeois, une foule cosmopolite, "des millions", des gens qui travaillent comme partout, des professeurs qui enseignent, des personnes âgées, rien d'exceptionnel dans cette description qui s'appliquerait à n'importe quelle ville. Notre Rimbaud semble cependant y vivre reclus, il reste à sa fenêtre et ne voient que des spectres, des ombres menaçantes car ces nouveaux habitants bannis de leur pays et qui retrouvent ici une nouvelle patrie, "un cottage" sont toujours poursuivis par de nouveaux ennemis, par des Erinnyes nouvelles. 3-Double langage Mais cette nouvelle patrie, moderne parce que tolérante n'est pas l'Eldorado qu'il espérait. Si cette ville est tolérante, elle est aussi bien monotone, sans relief, aucun sentiment ne s'en dégage, aucune personnalité dans les agencements intérieurs et extérieurs. Citoyen pas trop mécontent doit plutôt se lire citoyen très mécontent, mécontent parce que les communards le rejettent et parce que la morale y est plus insidieuse. Rimbaud, Verlaine et les opposants de toute sorte sont en fait très surveillés, infiltrés discrètement par une police omniprésente malgré son C'est l'entrepreneur Benjamin Hall corpulent qui a donné le nom à cette cloche de 14 tonnes qui sonne tous les 1/4 d'heure. Soho Quartier du centre de Londres, célèbre pour son pittoresque et son cosmopolitisme. Cottage Maison de campagne, coquette et rustique. La commune de Paris Gouvernement révolutionnaire du 18 mars 1871, après la chute de Napoléon III, les parisiens occupés et partisans de la guerre accusent Thiers de pactiser avec l'ennemi. Le 18 mars 1871, les communards s'opposent aux Versaillais venus les désarmer. Les communards résistent mais sont finalement écrasés lors de la semaine sanglante. Beaucoup de communards furent déportés, d'autres se réfugièrent en Angleterre. Éphémère Qui dure peu Cru Se dit de quelque chose que rien n'atténue, violent. Métropole du grec meter, mère et polis, ville, capitale invisibilité. La liaison scandaleuse qu'il entretient avec Verlaine figure dans de nombreux rapports de police, notre poète qui croyait se fondre dans cette foule anonyme ne parlant pas sa langue est en réalité surveillé, écouté. Des tensions sont aussi vite apparues dans le couple Verlaine-Rimbaud, les coups pleuvent, les disputes sont permanentes, le "cottage" charmante maison de campagne, coquette est devenue un enfer, dans lequel la mort sans pleurs, le suicide est une menace bien réelle. Verlaine, le saturnien, le maudit a déteint sur Rimbaud, les déesses de la vengeance s'acharnent maintenant sur lui. Cette ville est non seulement une ville triste mais on y meurt dans la plus totale indifférence. Nous sommes très loin d'entrer dans les splendides villes qui devaient fournir l'inspiration au poète en lui servant de modèle mais on arrive à la mort, à l'antre de l'Enfer. Conclusion Ville est la description d'une ville bien ordinaire, croisement d'innombrablesêtres humains, une des nombreuses métropoles du monde entier, aux rues quelconques dans la grisaille avec sa foule cosmopolite et anonyme. On est loin des villes splendides annoncées à la fin d'une saison en Enfer et nous restons encore dans la désillusion. Cette entrée dans la ville se métamorphose peu à peu en arrivée dans l'antre de l'Enfer. d'un pays. Allégorie Description, récit qui pour exprimer une idée générale recourt à une suite de métaphore. Erinnyes Dans la mythologie grecque, déesses de la Vengeance, les romains les assimilèrent aux Furies. L'amplification par l'utilisation des pluriels (ponts, ciels, masures, dômes, mats) donne au texte une fonction messianique et au poète le rôle du porte parole libérateur de l'humanité. RIMBAUD : Villes I (Illuminations 1873) Plan Introduction 1-A la recherche d'un idéal 2-Une vision imaginaire 3-Chefs-d'oeuvre en périls Québec Ce sont des villes ! C'est un peuple pour qui se sont montés ces Alleghanys et ces Libans de rêve ! Des chalets de cristal et de bois qui se meuvent sur des rails et des poulies invisibles. Les vieux cratères ceints de colosses et de palmiers de cuivre rugissent mélodieusement dans les feux. Des fêtes amoureuses sonnent sur les canaux pendus derrière les chalets. La chasse des carillons crie dans les gorges. Des corporations de chanteurs géants accourent dans des vêtements et des oriflammes éclatants comme la lumière des cimes. Sur les platesformes au milieu des gouffres les Rolands sonnent leur bravoure. Sur les passerelles de l'abîme et les toits des auberges l'ardeur du ciel pavoise les mâts. L'écroulement des "Villes" au pluriel, du recueil " Illuminations", est précédé de "Ornières» et suivi de "Vagabonds" qui précède le second poème sur "villes". Ce premier des deux poèmes intitulé "villes" peut être lu à priori comme l'expression d'un âge d'or de l'urbanisation couronné par l'assomption de Vénus anadyomène, la Vénus sortant des eaux, métaphore de la beauté de la ville moderne, construction humaine à partir de la nature. 1 A la recherche d'un idéal, On se pose souvent la question des motivations des êtres humains à se rassembler de plus en plus nombreux dans des espaces de plus en plus étroits, les villes. "Ce sont des villes", cette simple exclamation montre l'admiration de notre poète pour les villes en général, carrefours d'influences culturelles, élégance des rues, des édifices, multiplicité des expositions culturelles. Culture, civilisation, tel sont les maîtres mots de cet idéal, de cette recherche d'élévation qui structure le texte. La verticalité des cratères, la grandeur des colosses, les cimes, les platesformes, le toit, le ciel, le mat sont autant d'éléments qui participent à cette ascension. L'omniprésence d'éléments naturels, les cratères, les gorges, les gouffres associés à des musiques douces, le mugissement mélodieux, le carillon, donne à la ville une apparence harmonieuse entre l'art, la technique et la nature. Les villes donnent une impression de bonheur, on y donne des fêtes amoureuses, on pavoise les mats, on décore les auberges avec ardeur. On a de la ville une impression de vie, Vocabulaire Villes visitées par Rimbaud en 1875 Londres, Stuttgart, Bruxelles, Paris. Jouons un peu Quel est le monument payant le plus visité au Monde ? vous répondez La Tour Effel, c'est la bonne réponse. Entièrement métallique, 320 m de hauteur et 7175 t, c'est le symbole de la France. 7 millions de visiteurs par an. Légende Récit populaire qui a pour sujet des événements ou des êtres imaginaires ou des faits réels déformés et parfois mêlés de merveilleux (La légende des siècles de Victor Hugo) Alleghanys Chaîne de Montagne à l'Est des Etats-Unis, rebord du plateau appalachien de La Pennsylvanieà la Virginie mais aussi rivière affluent de l'Ohio. Liban État d'Asie, ancienne Phénicie. 4 millions d'habitants sur 10.000 km2. C'est le pays le plus urbanisé (85%). Le Liban est un carrefour entre l'Occident et l'Orient Chalet de cristal, de bois construction en verre ou en bois, fragiles. Carillon Ensemble de cloches ou sonnerie d'une horloge, d'une pendule qui se déclenche à intervalle régulier. Du latin quaternio, groupe de quatre cloches de différents tons. Oriflamme Historiquement, la bannière des rois de France (drapeau apothéoses rejoint les champs des hauteurs où les centauresses séraphiques évoluent parmi les avalanches. Au-dessus du niveau des plus hautes crêtes une mer troublée par la naissance éternelle de Vénus, chargée de flottes orphéoniques et de la rumeur des perles et des conques précieuses, - la mer s'assombrit parfois avec des éclats mortels. Sur les versants des moissons de fleurs grandes comme nos armes et nos coupes, mugissent. Des cortèges de Mabs en robes rousses, opalines, montent des ravines. Làhaut, les pieds dans la cascade et les ronces, les cerfs tettent Diane. Les Bacchantes des banlieues sanglotent et la lune brûle et hurle. Vénus entre dans les cavernes des forgerons et des ermites. Des groupes de beffrois chantent les idées des peuples. Des châteaux bâtis en os sort la musique inconnue. Toutes les légendes évoluent et les élans se ruent dans les bourgs. Le paradis des orages s'effondre. Les sauvages dansent sans cesse la fête de la nuit. Et une heure je suis descendu dans le mouvement d'un boulevard de Bagdad où des compagnies ont chanté la joie du travail d'ardeur harmonieuse. 2- Une vision imaginaire Ces villes, ce sont les "Alléganys", des montagnes des Etats-Unis, l'Occident ou des Libans de rêve, l'Orient, un brassage de cultures, un mélange de modernité des Etats-Unis, de reliefs, de parfums avec l'exotisme oriental du Liban. Rimbaud est l'architecte de ses féeries, il construit en les parcourant des viles éphémères et fragiles, faites de bois, de verre dans une sorte d'errance surréaliste. Ce sont des villes qui bougent, mues par un mécanisme invisible pour les êtres ordinaires, mais que lui Rimbaud, le voyant peut découvrir. Pour bien monter qu'il s'agit de villes imaginaires, sans existence réelle pour un non voyant. Rimbaud brasse les sons, les couleurs, les mots, joue sur le ton rouge avec le cuivre et le feu, sur les mots, rougissent et rugissent, mélange la douceur des palmiers et la terreur des palmiers dans une sorte d'apothéose de son spectacle urbain. Il reprend les légendes, des textes imaginaires qui ajoutent du merveilleux à des faits réels déformés. Notre Roland, modeste comte devient neveu de Charlemagne dans la légende. Il refait les légendes, donne vie aux statues, aux divinités, Diane, déesse de la chasse donne le sein à un cerf, Vénus marche et rend visite à Vulcain, le dieu des forgerons, laid et boiteux pour l'épouser. Rimbaud recours à la mythologie, à la puissance émotionnelle d'un passé légendaire, imaginaire et magnifié pour appuyer sa féerie des villes et donner du merveilleux à ses "Brooklyn" et ses "incroyables Florides". La littérature romantique avait suivi avant lui les délices de ces voyages imaginaires, de ces rêves d'exotisme. On doit donc lire ce poème avant tout comme une création poétique, fruit d'une autour duquel se rassemblait les vassaux lors du ban) . Bannière d'apparat, de décoration Roland et la légende Neveu de Charlemagne (selon la légende car fils de Gisèle frère du roi, et Ganelon, son beau-père car second mari de Gisèle. En réalité Roland était un obscur comte de Bretagne), il commandait l'arrière garde de Charlemagne. Il fut tué à Ronceveaux. Il sonna le cor pour appeler Charlemagne à son secours, l'inverse de la bravoure, mais Charlemagne fit semblant de ne rien entendre. http://romantis.free.fr/vigny Orphée Il descendit aux enfers pour ramener son épouse Eurydice mais ne devait la regarder qu'au dehors, ce qu'il ne fit pas et Eurydice mourut une seconde fois. Conque Coquille mais aussi trompe des tritons faite d'une de ces coquilles spiralées Mab Personnage de Roméo et Juliette de Shakespeare Bacchante Femme participant au culte de Bacchus, dieu du vin chez les Romains Diane Déesse de la chasse et de la nature sauvage correspondant à l'Artémis grecque. Centaure Être fabuleux représenté comme un monstre, moitié homme et moitié cheval. Vénus et Vulcain Déesse de la beauté et de l'amour. Vulcain dieu du feu nouveau, sous une brise épaisse, circulant sans pouvoir éluder les fabuleux fantômes des monts où l'on a dû se retrouver. Quels bons bras, quelle belle heure me rendront cette région d'où viennent mes sommeils et mes moindres mouvements ? Rimbaud, Illuminations, 1875 imagination dans laquelle Rimbaud se saisit de quelques éléments du réel et refait l'histoire des êtres, en compose sa vision imaginaire, en refait "la légende" à partir le l'existant, la fait évoluer pour donner à son poème un plus grand pouvoir émotionnel. 3 Chefs-d'œuvre en périls Quelques éléments situés dans le second mouvement du poème viennent troubler cette vision idéale, les châteaux sont bâtis en os et les "fabuleux fantômes" rappellent la présence de la mort. Toutes ces architectures, ces "Alléganys", ces "Libans de rêve" sont autant de chefs- d'œuvre en périls, il apparaissent ici dans leur fragilité, à la merci du langage qui les construit et les déconstruit dans un même mouvement. Rimbaud qui sait trop bien que la grâce n'est donnée qu'à celui qui ne cesse de partir, de marcher, de "passer" fait défiler dans les mots, ses rêves et ses fantasmes sans se retourner sur ce qui s'effondre derrière lui, "l'écroulement des apothéoses", une sorte de vide sémantique ou le silence. Il souhaite vite revenir à la réalité et conclue "quels bons bras, quelle belle heure me rendront cette région d'où viennent mes sommeils". Pour Rimbaud, l'homme aux semelles de vent, l'accession à la ville doit rester une accession précaire comme à celle d'un univers où les mots et la syntaxe servent de jalons et de lignes de fuite à l'errance de notre bohémien, à notre vagabond de la poésie. Conclusion Dans ce poème "Villes" Rimbaud semble osciller entre un illuminisme prophétique et un romantisme critique. Romantisme critique dans son admiration des villes, espaces structurés contre les espaces naturels, même si dans le second mouvement cette admiration est modérée. Illuminisme prophétique des villes à et des forgerons était laid et boiteux. Il épousa Vénus qui le trompa avec Mars. Orphée Beffroi Tour de guet élevée dans l'enceinte d'une vile puis tour, clocher d'une église. Bagdad Capitale de l'Irak sur le Tigre. La ville connut en 762 une splendeur dont il ne reste que divers bâtiments tardifs. Au VIIIème siècle, la ville réunissait les plus grands savants arabes et non arabes. L'amplification par l'utilisation des pluriels (villes, chalets, fêtes, poulies, mats, canaux, vêtements, toits, auberges, Rolands, centauresses, conques, versants, moissons, cratères, rails, colosses, feux....) donne au texte une fonction messianique et au poète le rôle du porte parole de l'humanité. l'architecture complexe, mélange d'enfermement et d'évasion. Ce poème "Villes", en prose, est l'une des plus belles visions de Rimbaud