Petit traité de la Rencontre

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Petit traité de la Rencontre
Petit traité de la Rencontre
"Nous sommes en très grande difficulté. Pourquoi ? Parce que le point de départ de nos
rencontres (islamo-chrétiennes) était ce qui était appelé les bases communes avec les
musulmans. Voyons, nous croyons en Dieu, ils croient en Dieu ; nous avons un Dieu qui s’est
révélé, ils ont un Dieu qui s’est révélé, un Dieu qui est tout puissant, nous disons Dieu est tout
puissant, etc ; etc. Tous les concepts étaient alignés les uns et les autres. Nous disons : «
Voyez, nous avons des bases communes. » C’est FAUX. Complètement faux ! Chacun met
autre chose derrière ces mots. Nous étions en plein équivoque. Alors quand les chrétiens
disaient : « Oui, oui, pour nous Dieu est unique, pour nous aussi, d’accord. – Ah, mais il y a la
Trinité …. vous vous moquez de nous ! Il faudrait savoir ce que vous voulez dire. » Alors les
chrétiens n’osaient plus introduire la Trinité parce qu’ils se disaient : Si nous disons cela, il n’y a
plus de dialogue. Non ! Partons de la différence. Je suis ainsi, tu es ainsi, essayons de le
découvrir et de nous approcher l’un de l’autre. Pour que les bases soient vraiment communes, il
faut sortir de l’illusion que les mots recouvrent les mêmes réalités. Je préfère me dire, a priori,
que l’autre est l’autre. D’ailleurs, s’il est autre, c’est une différence ! je prends acte de cette
différence avant d’esquisser une rencontre. Je ne serai jamais l’autre, ni à la place de l’autre,
malgré tout mon désir de communiquer avec lui, de le connaître, de l’aimer, c’est possible !
Il n’y aura rencontre, dialogue, amitié que sur la base d’une différence reconnue, acceptée.
Aimer l’autre dans sa différence est la seule possibilité de l’aimer. Autrement, nous nous
mangerons l’un l’autre".
Pierre Claverie, Petit Traité de la Rencontre et du Dialogue, Paris, Cerf, 2004, p. 35-36.
"Le dialogue de « vérité dans la charité » ne consiste pas à adopter la foi de l’autre, mais à
chercher à comprendre mutuellement le point de vue de l’autre tout en sachant que nos
dogmes sont profondément différents".
Benoit XVI, Encyclique "Caritas"
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