Les Histoires de demain par TNP Où va la

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Les Histoires de demain par TNP Où va la
Les Histoires de demain par TNP
Où va la régulation dans le secteur financier ?
Résultats de l’enquête
Analyse
Regards
28 janvier 2016
AVANT-PROPOS
Alors même que de nombreux acteurs de la vie politique ou du monde médiatique continuent de réclamer une régulation du secteur financier renforcée et que des films comme « The big short » continuent d’insinuer que
les leçons de la crise de 2008 n’ont pas été tirées, des acteurs éclairés
connaissant bien le secteur financier sont conscients que la régulation s’est
au contraire « emballée » et pourrait même devenir contre-productive.
« Le durcissement des réglementations financières fait qu’en cas de stress
sur les marchés, les banques d’investissement sont obligées de se retirer
immédiatement et vous vous retrouvez sans cotation, sans acheteurs, donc
avec des actifs qui ne valent plus rien » - Charles GAVE.
Guillaume CAZAURAN
TNP, qui est au contact rapproché des banquiers et assureurs et intervient
dans ces secteurs aussi bien sur les réformes prudentielles que sur les
Partner
textes les plus récents qui encadrent tel ou tel pan de l’industrie financière,
a décidé de faire le point sur la régulation et de donner une tribune à ses
responsables. Un questionnaire a été adressé aux acteurs du monde bancaire pour capter leur ressenti à
l’égard de ce que l’on peut bien appeler une inflation réglementaire.
Les questions que nous nous sommes donc posées sont les suivantes :
Compte-tenu des textes déjà parus, des initiatives qui semblent se dessiner, peut-on dire que le secteur
financier est maintenant assez régulé ?
Quelles sont les conséquences pour le Secteur Financier et l’économie « dite réelle » de la mise en œuvre
du millefeuille réglementaire ?
Comment les établissements financiers réagissent-ils à cette situation ?
Plus iconoclaste et provocatrice, la régulation du secteur financier est-elle pilotée ? Les auteurs de cette
régulation se coordonnent-ils ? En voulant orienter, guider les acteurs économiques ne risque-t-on pas de
créer un paysage financier finalement plus instable, moins efficace voire moins juste ?
En donnant la responsabilité à des acteurs politiques, publics, administratifs le soin de définir des normes,
ne s’expose-t-on pas à la manifestation d’une concurrence contre-productive entre régulateurs ? L’asymétrie évidente entre les régulations financières des différentes régions du monde est-elle prise en compte ?
Qui garantit le secteur financier d’une recherche réellement neutre de l’intérêt du plus grand nombre dans
la régulation ? Autrement dit, la confrontation des idées des humains représentant les régulateurs peutelle être plus efficace que la confrontation des intérêts des acteurs économiques ?
Notre enquête, enrichie des points de vue de nos experts et des échanges avec d’importants établissements financiers, apporte des éclairages sur toutes ces questions.
Bonne lecture à tous.
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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REMERCIEMENTS
Ce document est l’aboutissement de 6 mois de travail. TNP tient à remercier l’ensemble des collaborateurs ayant contribué à sa rédaction et à la réussite de la deuxième édition des Histoires de Demain sur la
réglementation financière.
Merci à Jérémie BENISTI, Guillaume CAZAURAN, Mathilde COQUELIN, Antoine de VÉRICOURT, Gérald
VOITOT et Frédéric PICHARD, pour leur implication dans la conception de cet événement.
Merci à Ramzi BEN HASSINE, Junior BOULLEYS, Mathilde FOURRER, Shaden ITANI, Nicolas LAMON,
Lise LE GAL, Clément MAYER, François d’OLIVEIRA, Marie-Hélène TCHANGANG et Élisabeth SAUX pour
leur participation et leur contribution.
Et des remerciements tous particuliers à nos invités des tables rondes qui ont animé et nourri notre réflexion sur la régulation financière :
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
SOMMAIRE
RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE SUR LA RÉGULATION FINANCIÈRE.................................... 5
Profil des répondants
Questions générales
Impacts organisation
Impacts business
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OÙ VA LA RÉGULATION DANS LE SECTEUR FINANCIER :............................................ 22
par Gérald VOITOT, Associate Partner TNP Réglementaire
REGARDS DE TNP......................................................................................................... 28
AnaCredit : une surveillance renforcée des expositions de crédit
par Junior BOULLEYS - Senior Consultant
Le Qualified Intermediary : enjeux du nouvel agrément et de la réglementation FATCA
par Shaden ITANI - Consultante Confirmée
MIFID 2 : opportunité ou contrainte pour la banque privée en France ?
par Nicolas LAMON - Senior Consultant
La Vue Unique Client : contrainte réglementaire et opportunité commerciale
par Junior BOULLEYS - Senior Consultant
Loi bancaire, règle Volcker, Vickers… vers un démantèlement de la Banque universelle ? par Clément MAYER - Senior Consultant
Financement du terrorisme : Bilan 2015 et nouvelles perspectives de lutte
par Gérald VOITOT - Associate Partner
Section 871 (m) : vers un renforcement des taxes sur les transactions
par Élisabeth SAUX - Senior Consultante
Insurance Directive Distribution : nouveau cadre pour la vente de produits d’assurance
par Marie-Hélène TCHANGANG - Senior Consultante
L’AEOI : un renforcement des obligations KYC des institutions financières par François d’OLIVEIRA - Consultant
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RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE
SUR LA RÉGULATION FINANCIÈRE
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Cette enquête a été menée par TNP d’octobre à décembre 2015.
68 entreprises ont répondu à notre questionnaire en ligne : directions générales, directions financières,
directions des risques, directions de la conformité, directions métier, etc.
PROFIL DES RÉPONDANTS
2. Nombre de collaborateurs
1. Répartition par secteur d’activité
Banque universelle........................ 42,6 %
Plus de 3 000......................................52 %
Asset management et/ou
asset services ............................... 31,5 %
De 1 000 à 3 000 ................................21 %
Banque d’investissement .............. 20,4 %
De 500 à 1 000 .................................. 13 %
Banque de détail ........................... 18,5 %
Moins de 500..................................... 14 %
Banque d’affaire .............................. 13 %
Services financiers spécialisés ........13 %
Assurance vie, dommage, santé ..... 13 %
Services d’investissement .............. 9,3 %
Services de paiement ..................... 5,6 %
PARMI LES SOCIÉTÉS AYANT RÉPONDU AU
QUESTIONNAIRE :
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QUESTIONS GÉNÉRALES
NOMBRE DE RÉGLEMENTATIONS QUI ENCADRENT LE SECTEUR FINANCIER
Seulement 54 % des répondants ont conscience qu’il existe plus de 200 réglementations qui encadrent le secteur financier.
IMPACT DES RÉGLEMENTATIONS DANS CERTAINS DOMAINES
(part des répondants ayant choisi « impact fort » et « impact assez fort »)
Les réglementations des dernières années sont perçues comme impactant
l’ensemble de la chaîne de valeur et des structures financières des établissements : capital (79 %), reporting (68 %), protection des investisseurs (50 %).
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NIVEAU DE COHÉRENCE DES RÉGLEMENTATIONS ACTUELLES
ÉVALUATION DU NIVEAU DE COORDINATION ENTRE LES RÉGULATEURS
Les réglementations sont considérées comme faiblement cohérentes (60 %)
dans un environnement où le niveau de coordination entre les régulateurs
(78 %) et les pays (89 %) est considéré comme faible.
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RISQUES EFFICACEMENT RÉDUITS PAR LES RÉGLEMENTATIONS
(part des répondants ayant choisi « très efficace » et « assez efficace »)
Les initiatives du régulateur sont jugées efficaces pour les risques de liquidité
(78 %), de marché (66 %), de crédit (70 %) et moins efficaces pour la gestion des
risques opérationnels (32 %), de réputation (28 %) et systémiques (42 %).
ENJEUX ATTENDUS DE LA MISE EN CONFORMITÉ DES RÉGLEMENTATIONS
Classement du plus important au moins important
1. Ne pas être soumis à des sanctions
2. Protéger les investisseurs et les clients
3. Éviter les risques de réputation
4. Éviter les pertes financières
5. Renforcer l’efficience interne
6. Accroître ses parts de marché
La prise de conscience de l’importance du secteur financier dans la protection
des particuliers progresse.
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ÉVALUATION DE LA PERFORMANCE DE VOTRE MODÈLE DE MISE EN CONFORMITÉ
(plusieurs réponses possibles)
LES 3 RÉGLEMENTATIONS LES MIEUX MAÎTRISÉES DANS VOTRE ORGANISATION
1. Bâle III
2. LAB
3. MIFID 2
LES 3 RÉGLEMENTATIONS LES PLUS COMPLEXES À METTRE EN PLACE
1. MIFID 2
2. Bâle III
3. FATCA
LES 3 RÉGLEMENTATIONS LES PLUS COÛTEUSES
1. MIFID 2
2. Bâle III
3. EMIR
MIFID 2 apparaît comme la réglementation la moins maîtrisée, la plus complexe et la plus coûteuse.
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ÉVOLUTION DU NOMBRE DE RÉGLEMENTATIONS
Sans surprise, l’inflation réglementaire est confirmée.
IMPACT SUR LA RENTABILITÉ GÉNÉRALE DES BANQUES PAR RAPPORT À L’ÉVOLUTION ACTUELLE DES EXIGENCES RÉGLEMENTAIRES
100 % des répondants pensent que l’évolution actuelle des exigences réglementaires aura un impact fort ou assez fort sur la rentabilité des banques.
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LES RÉGLEMENTATIONS RÉDUISENT-ELLES DE FAÇON EFFICACE LE RISQUE DE CRISE ?
Les observateurs avisés du secteur financier sont partagés sur l’impact de la
régulation sur le risque systémique.
IMPACT DE LA MISE EN CONFORMITÉ SUR L’ÉVOLUTION DE VOTRE ORGANISATION
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IMPACTS ORGANISATION
ÉVOLUTION DE VOTRE ORGANISATION
(plusieurs réponses possibles)
La régulation a un impact réel sur l’organisation des établissement financiers
au travers d’équipes dédiées au reporting, au suivi des réglementations et des
risques et enfin à la mise en conformité.
LA RÉGULATION EST-ELLE COHÉRENTE ENTRE LES PAYS ?
La prise de conscience de l’absence de cohérence internationale est réelle.
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LE MANQUE DE COHÉRENCE GÉNÈRE-T-IL DES COÛTS SUPPLÉMENTAIRES DANS VOS ORGANISATIONS ?
L’absence de cohérence internationale induit une couche supplémentaire de
mise en conformité.
VOTRE VEILLE RÉGLEMENTAIRE
Il n’y a quasiment plus d’établissement financier qui échappe à la mise en
œuvre d’une équipe dédiée à la veille réglementaire.
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VOTRE ORGANISATION DE VEILLE EST-ELLE CENTRALISÉE ?
EFFICACITÉ DE VOTRE ORGANISATION DE VEILLE
Les établissements financiers jugent positivement la création de ces cellules
de veille réglementaire centralisées.
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IMPACT DES RÉGLEMENTATIONS SUR LES EFFECTIFS
LA FORMATION DES ÉQUIPES POUR FAIRE FACE À L’INFLATION RÉGLEMENTAIRE
Sans surprise, les banques ont été obligées de renforcer les fonctions Conformité et Risque et de développer des programmes de formation dédiés.
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FAUT-IL RENFORCER LE POUVOIR HIÉRARCHIQUE DE LA FONCTION CONFORMITÉ ?
FAUT-IL RENFORCER LES MOYENS D’ACTION DE LA FONCTION CONFORMITÉ ?
Le besoin de renforcer les moyens d’action de la fonction conformité ne va pas
jusqu’à l’attribution de pouvoirs hiérarchiques supplémentaires.
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ÉVALUATION DU RISQUE DE NON-CONFORMITÉ DANS VOTRE ORGANISATION
L’auto-évaluation de la non-conformité est devenue un réflexe dans les établissements financiers.
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IMPACTS BUSINESS
L’IMPACT DES RÉGLEMENTATIONS SUR VOTRE « BUSINESS MODEL » ?
(part des répondants ayant choisi « modification forte » et « modification assez forte »)
Les réglementations ont un impact business fort ou assez fort pour Bâle III
(65 %), MiFID 2 (48 %) et IFRS 9 (39 %), alors qu’il semble plus limité pour
FATCA / AEOI, Volcker, DFA/EMIR.
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L’IMPACT DES RÉGLEMENTATIONS BANCAIRES SUR L’OFFRE DE SERVICES
Il se confirme que la réglementation prudentielle et certaines réglementations
métier conduisent bien à une contraction de l’offre de services.
L’IMPACT DES RÉGLEMENTATIONS BANCAIRES SUR LA SEGMENTATION CLIENTÈLE
L’évaluation de l’impact sur la segmentation clientèle est partagée.
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
PENSEZ-VOUS QU’IL EXISTE DES ACTEURS NON RÉGULÉS QUI MENACENT LE BUSINESS
MODEL DES INSTITUTIONS FINANCIÈRES ?
IMPACT DE L’INFLATION RÉGLEMENTAIRE SUR VOS MARGES COMMERCIALES
Les établissements financiers s’inquiètent de la réduction de leurs marges et
de leurs offres et de la concurrence d’acteurs non régulés.
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OÙ VA LA RÉGULATION
DANS LE SECTEUR FINANCIER :
ANALYSE
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INTRODUCTION
Le 15 septembre 2008, la banque Lehman Brothers se déclare en faillite à la suite
de la crise financière mondiale née des « subprimes », faisant chuter toutes les
places boursières mondiales.
Le 14 novembre 2008, le premier sommet du G20 de Washington adopte un plan
d’action en 6 points pour lutter contre la crise financière internationale.
Le 2 avril 2009, le G20 de Londres renforce la coordination entre les États. Il décide l’assainissement du secteur bancaire, le renforcement des réglementations
financières et la réparation du système financier pour restaurer les flux de crédit.
Gérald VOITOT
Associate Partner
Le 22 avril 2009, le Parlement européen adopte la directive Solvabilité II qui décourage, par sa pondération des risques, les compagnies d’assurances européennes
de financer en fonds propres les entreprises.
Le 16 décembre 2010, le Comité de Bâle adopte les accords de Bâle III qui
contraignent les banques internationales d’augmenter la quantité et la qualité de
leurs fonds propres et de mieux gérer leur risque de liquidité.
Nombre de nouvelles régulations ont vu le jour depuis lors.
Mais tout cela était-il bien réfléchi ?
UN BILAN GLOBAL PLUTÔT POSITIF
Une réforme de la régulation et de la supervision était nécessaire pour améliorer
la stabilité financière. Depuis la crise de 2008, des progrès ont été réalisés pour
que le secteur financier soit mieux organisé et mieux régulé.
Les ratios prudentiels décidés en matière de fonds propres et de liquidité ont
conduit les banques à diminuer leurs risques et à simplifier leurs activités. Ainsi,
les réformes prudentielles mises en place dans le cadre de Bâle III ont eu pour
effet d’améliorer la qualité des établissements financiers.
À l’avenir, les banques seront sans doute moins rentables mais plus simples à
gérer, dans un contexte réglementaire plus dur mais plus protecteur.
UN BILAN DÉTAILLÉ PLUS NUANCÉ
En octobre 2015, TNP a réalisé une enquête auprès d’une soixantaine de responsables bancaires représentant une quinzaine d’établissements, couvrant l’ensemble des activités des services financiers.
Quels sont les principaux enseignements de cette enquête ?
Les répondants ont conscience qu’il existe plus de 200 réglementations qui encadrent le secteur financier (54 %).
Une majorité de répondants considère que les réglementations sont peu cohérentes (60 %) dans un environnement où le niveau de coordination entre les régulateurs (78 %) et les pays (89 %) est jugé faible.
Les nouvelles réglementations sont perçues comme impactant l’ensemble de la
chaîne de valeur et des structures financières des établissements : capital (78 %),
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reporting (68 %), protection des investisseurs (50 %).
100 % des répondants pensent que l’évolution actuelle des exigences réglementaires aura un impact fort ou assez
fort sur la rentabilité des banques.
Et 65 % des répondants observent une diminution des marges commerciales résultant de l’application des réglementations.
Les initiatives du régulateur sont jugées efficaces pour les risques de liquidité (78 %), les risques de crédit (70 %) et
les risques de marché (66 %).
En revanche, les nouvelles réglementations sont jugées moins efficaces pour la gestion des risques systémiques
(42 %), des risques opérationnels (32 %) et des risques de réputation (28 %).
Enfin, 50 % des répondants considèrent les nouvelles réglementations comme peu ou pas efficaces pour éviter le
risque de crise financière.
LES DANGERS D’UNE INFLATION RÉGLEMENTAIRE
Le système financier doit faire face au défi de l’inflation réglementaire.
Certes, chacune des mesures adoptées peut se justifier. Mais l’accumulation incessante de nouvelles règles pose
problème : renforcement des ratios de fonds propres ; création des ratios de liquidité ; nouvelles règles concernant
les risques de marché…
En outre, plusieurs dangers subsistent, en particulier le risque que les réglementations ne soient pas appliquées
partout de la même manière, ainsi que le développement d’acteurs moins règlementés et donc potentiellement plus
compétitifs.
Enfin, certaines modalités de la régulation financière pénaliseront durablement la croissance économique, sans que
leur contribution à la stabilité financière soit clairement établie.
C’est pourquoi il serait souhaitable que la réglementation bancaire trouve un juste équilibre entre la recherche de la
stabilité financière et la nécessité de financer le développement de l’économie.
Quelles sont les principales conséquences observées à la suite de cette inflation réglementaire ?
UN CONSTAT D’INCOHÉRENCES D’abord, les nouvelles réglementations financières ont été décidées sans concertation entre les différents pays et
régulateurs, ce qui a été le point de départ des incohérences entre les règles dans la mesure où elles doivent s’appliquer dans des pays qui n’ont pas les mêmes caractéristiques économiques.
Ensuite, les réglementations se contredisent entre elles et peuvent empêcher la mise en place de certaines politiques économiques et monétaires.
Les normes Bâle III représentent un frein au financement de long terme. Pour respecter ces exigences, les banques
vont devoir être plus sélectives dans la distribution des crédits et réduire leur offre, ce qui va impacter le financement
de l’économie.
La directive Solvabilité II pénalise la détention d’actions par les compagnies d’assurances et réduit les capacités de
financement de long terme de l’économie.
La conséquence de ces nouvelles règles est de retirer à la banque-assurance européenne sa puissance de financement de l’économie. Comme ces dispositifs se mettent en place dans un contexte de faible demande de crédit, on
n’en perçoit pas encore les effets. Mais il est probable que l’offre de crédit se révélera contrainte dès que les conditions d’une reprise de la croissance seront réunies dans la zone euro.
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UNE MUTATION DU MODÈLE DE FINANCEMENT DE L’ÉCONOMIE EUROPÉENNE
L’évolution de la régulation financière contraint l’Europe continentale à une profonde mutation de son modèle de
financement de l’économie.
Le modèle européen de financement de l’économie par le crédit bancaire évolue vers le modèle américain de financement de l’économie par le marché. Les économies européennes vont devoir faire davantage appel au marché.
En effet, avec Bâle III, le régulateur a repris le dispositif américain.
En Europe, avant la crise de 2008, l’économie était financée à 75 % par les banques et à 25 % par le marché.
Aux États-Unis, l’économie est financée à 20 % par les banques et à 80 % par le marché.
Cette mutation ne pose pas de problème aux grandes entreprises, rompues aux rouages des marchés financiers. Il
en va tout autrement pour les PME et les TPE.
Le principe de cette bascule est de transférer les actifs risqués vers les fonds d’investissements, les fonds de pension
et autre assureurs, afin qu’ils pèsent moins sur les bilans des banques. Or, l’Europe ne dispose ni de grands fonds
de pension ni de grands fonds d’investissements privés. Ainsi, nous voulons le modèle américain sans les outils
américains.
Les accords de Bâle III accélèrent la désintermédiation. Or, pour satisfaire les ratios de solvabilité, les institutions
financières ont deux possibilités : soit diminuer leurs actifs risqués, soit augmenter leurs fonds propres.
La tendance montre que les banques choisissent de diminuer leurs actifs risqués. Pour limiter la consommation de
fonds propres, les banques ne conservent plus les crédits qu’elles octroient dans leur bilan. Elles structurent leurs
actifs par le mécanisme de la titrisation pour les sortir de leurs bilans et ne plus supporter le risque de crédit.
Au lieu d’assurer les opérations de financement d’un bout à l’autre de la chaîne, les banques initient les crédits auprès de leurs clients puis les cèdent à des acteurs financiers non soumis à Bâle III grâce à la titrisation.
En vendant les actifs risqués à ces investisseurs institutionnels, les banques contournent la contrainte du ratio de
fonds propres en les retirant de leur bilan et en laissant les investisseurs assumer tout le risque du crédit. Le système bancaire devient donc distributeur au lieu de conserver son rôle de prêteur, tout en demeurant concepteur du
crédit.
UNE BAISSE DE RENTABILITÉ DES BANQUES
L’évolution du business model des banques s’accélère.
D’une part, les banques disposaient d’un revenu récurrent assuré par les intérêts des crédits accordés. Or, si elles ne
sont plus porteuses des crédits, elles ne percevront plus d’intérêts réguliers mais seulement des commissions sur
les crédits cédés aux investisseurs institutionnels.
D’autre part, le durcissement des réglementations a grevé la rentabilité des banques européennes en renchérissant
le coût des ressources et en provoquant la constitution de larges réserves d’actifs liquides à faible rendement. La
rentabilité des BFI aurait été divisée par plus de deux en moyenne par rapport à la période d’avant-crise.
Enfin, les banques d’investissement auraient réduit la taille de leur bilan de 20 % depuis 2010, en se débarrassant
de leurs activités les moins rentables et de leurs produits les plus risqués afin de se conformer aux nouvelles réglementations.
Ainsi, les nouvelles règles contraignent les groupes bancaires dans leur activité et les conduisent à renoncer à
des activités utiles mais gourmandes en fonds propres : plus ils prêtent, plus leurs actifs présents à leur bilan sont
risqués, et plus ils doivent détenir de fonds propres.
À défaut d’empêcher les banques d’être “too big to fail” (trop grosses pour faire faillite), les pouvoirs publics pourraient bien les rendre “too big to be profitable” (trop grosses pour faire du profit).
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DES DISTORSIONS DE CONCURRENCE
Sept ans après la faillite de Lehman Brothers, les banques américaines évoluent dans un cadre réglementaire stabilisé et profitent de bilans assainis. Restructurées et recapitalisées, dégagées des séquelles des crises passées avec
des provisions divisées par cinq, elles dominent leur secteur.
Ainsi, une poignée de banques universelles américaines gagnent des parts de marché à l’étranger, en même temps
qu’elles renforcent leurs positions sur leur marché domestique. En 2014, les cinq plus grandes banques américaines
ont capté 59 % des grandes opérations financières contre 48 % en 2009. Dans le même temps, les cinq plus grandes
banques d’investissement européennes ont vu leur part chuter de 35 à 31 %.
À l’inverse, les banques européennes se trouvent en position difficile. Les régulateurs du Vieux Continent sont
engagés dans une surenchère réglementaire destinée à les rendre plus solides. Plusieurs pistes menacent des
pans entiers de leur activité et sont explorées séparément par des instances qui n’ont pas de vision concertée : à
Strasbourg avec le Parlement européen, à Bâle avec le comité du même nom, à Londres avec l’EBA, à Bruxelles avec
la Commission européenne.
Les plus grands établissements financiers européens sont contraints à des révisions stratégiques profondes, accompagnées de plans massifs d’économies. Crédit Suisse, Barclays, Deutsche Bank ont révisé leurs ambitions à la
baisse ou ont abandonné certains métiers. Car ces banques ne font plus suffisamment de profit dans des activités où
la régulation impose des niveaux de capital de plus en plus importants.
Par ailleurs, le 19 juin 2015, l’Ecofin a donné son feu vert au projet européen de réforme structurelle des banques,
initié par Michel Barnier. Ce projet BSR prévoit de donner une dérogation aux banques britanniques qui pourront
continuer leurs activités de marché alors que les banques européennes seront soumises à des ratios de solvabilité
durs et coûteux.
En parallèle, le Parlement européen discute d’une loi qui obligerait les grands établissements bancaires à se couper
en deux, entre banque de détail et banque d’investissement, tout en exemptant les établissements britanniques.
Enfin, onze pays seraient prêts à imposer une taxe Tobin européenne qui risquerait de faire fuir une partie des transactions vers la City dans la mesure où les banques britanniques en seraient exemptées.
UNE DISPARITION DES « TENEURS DE MARCHÉ »
La question de la liquidité des marchés est une préoccupation centrale pour les régulateurs et les superviseurs.
Cette préoccupation est accentuée par le rôle croissant du marché dans le financement de l’économie, la gestion des
risques et l’allocation de l’épargne.
Les banques jouent de moins en moins le rôle de “teneur de marché” qui consiste à toujours offrir à leurs clients un
prix à la vente ou à l’achat sur des titres. Or, la liquidité est apportée par les “teneurs de marché”.
À première vue, ce phénomène paraît surprenant en raison de l’action volontariste des banques centrales qui ont
inondé le marché de ressources financières. Mais il ne faut pas confondre la liquidité monétaire, effectivement abondante, et la liquidité de marché. Un marché liquide permet d’effectuer des opérations de toute taille, à un juste prix,
et dans un délai raisonnable. Or, ces dernières années, il est devenu moins facile de vendre ou d’acheter des titres de
façon fluide, notamment sur le marché des obligations d’entreprise.
Sans liquidité stable et durable des marchés, le processus de détermination des prix se trouve affaibli, ainsi que la
capacité des agents économiques à lever des financements ou à couvrir leur risque au meilleur coût.
Le risque est alors d’enclencher la même spirale que celle qui a entraîné les économies occidentales dans la crise
de 2008. En effet, la crise des “subprimes” a été déclenchée par le constat que la liquidité de ces produits était quasi-inexistante, d’où un risque majeur sur la représentativité des prix auxquels s’échangeaient ces produits.
Depuis 2008, l’objectif des régulateurs a été de renforcer la résilience du système financier, notamment via le durcissement des exigences prudentielles auxquelles les établissements doivent faire face.
Toutefois, des crises de liquidité qui avaient jusqu’ici des effets passagers pourraient se transformer en crises majeures, faute d’apporteurs de liquidité pouvant répondre à la demande des investisseurs.
La liquidité de marché apparaît donc comme la source potentielle d’un risque accru, situation d’autant plus pa-
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radoxale qu’elle résulterait pour partie des régulations adoptées en réponse à la crise de 2008. En augmentant
les exigences de solidité des bilans des banques, la réglementation rend leurs interventions sur le marché plus
coûteuses.
L’ESSOR DU « SHADOW BANKING »
L’inflation réglementaire profite au développement de la finance de l’ombre. En effet, une partie seulement du système financier a été régulée.
Le nouveau cadre réglementaire ouvre le champ à des modes de financement non bancaires ou qui ne sont pas portés par le bilan des banques. La plupart des difficultés qui relevaient des banques ont été traitées mais la finance
de l’ombre n’a pas été inquiétée. Certains opérateurs ont même été poussés en dehors du champ couvert par les
régulateurs.
Dès lors que les banques sont plus fortement régulées, le crédit intermédié par des non-banques, dit “shadow
banking”, se développe. Il s’agit, par exemple, de l’essor du financement par les sociétés de gestion d’actifs au sens
large – gestion collective, fonds de pension…
Ce problème d’incohérence de périmètre des réglementations est d’autant plus préoccupant que le “shadow banking”
représente plus de la moitié du volume des échanges mondiaux sur les marchés financiers : soit entre 60 000 et
75 000 milliards de dollars en 2015.
Pourtant, le transfert des crédits hors du système bancaire régulé ne signifie pas une disparition du risque. Celui-ci
est simplement dispersé auprès des investisseurs, c’est-à-dire, in fine, des épargnants et des fonds de pension et
assimilés.
Ainsi, l’avalanche réglementaire accroît le risque systémique avec le développement du “shadow banking”, ce
qui est paradoxal avec l’objectif des réglementations qui est d’offrir un environnement financier stable, durable et
favorable à la croissance.
CONCLUSION
Certes, la finance doit être régulée, avec des exigences en capital fortes pour les activités les plus risquées, des
rémunérations mieux encadrées, une supervision renforcée. Mais chacun doit comprendre qu’une place financière
forte est indispensable pour nourrir la croissance des grandes entreprises comme des PME, qu’elle crée des emplois
à valeur ajoutée, qu’elle est un enjeu de souveraineté économique.
Aucun pays ne peut prospérer sans des banques puissantes. Le triste sort de la Grèce, dont les banques s’affaiblissent et dont l’avenir est désormais entre les mains des créanciers internationaux, devrait accélérer cette prise de
conscience.
Affaiblir nos établissements financiers, c’est accepter que demain, la France soit contrainte de passer en priorité
par Goldman Sachs ou Morgan Stanley pour lever de la dette sur les marchés. C’est accepter que Peugeot ou Airbus
fasse appel à ces mêmes banques pour financer leurs grands projets. Voulons-nous vraiment cela ?
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REGARDS DE TNP
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ANACREDIT : UNE SURVEILLANCE RENFORCÉE
DES EXPOSITIONS DE CRÉDIT
Junior BOULLEYS - Senior Consultant
Les établissements de crédit seront tenus prochainement de remonter à la Banque
Centrale Européenne (BCE) leurs expositions de crédit à un niveau très détaillé.
Cette collecte est considérée comme indispensable à la bonne réalisation des analyses menées dans le cadre du Système Européen des Banques Centrales (ESCB)
et au bon fonctionnement du Mécanisme de Supervision Unique (MSU).
La BCE a demandé en juin 2014 à ce que les établissements bancaires accélèrent leurs
travaux d’alimentation du Système Européen des Banques Centrales. Il s’agit notamment de collecter des données
granulaires (contrat / emprunteur) sur les expositions aux risques de crédit. C’est le projet Analytical Credit Dataset
(AnaCredit). Cette alimentation rentre dans le cadre d’une démarche générale d’harmonisation des reportings prudentiels. En effet, il s’agit de remédier :
- aux incohérences dans l’application des seuils, dans l’interprétation de la réglementation et dans la granularité de la donnée à reporter ;
- aux difficultés à trouver des caractéristiques communes pour identifier et qualifier correctement les emprunteurs ;
- aux hétérogénéités entre pays en termes de capacité (registres centraux ou non, enquêtes systématiques ou
non, données agrégées ou détaillées, etc.)
Dans ce contexte, AnaCredit permettra à la BCE de bénéficier d’informations détaillées pour répondre à ses besoins
d’analyses statistiques et de surveillance des établissements de crédit à l’échelle européenne. Les établissements
de crédit assujettis seront tenus dès 2017 de déclarer l’ensemble des prêts consentis aux établissements de crédit
mais aussi les titres de créances et certaines expositions hors-bilan. La collecte s’étendra ensuite aux personnes
physiques, aux autres établissements financiers et aux dérivés en 2018 / 2019.
Répondre aux exigences émanant d’AnaCredit (couvrir environ 95 % du montant total de l’exposition de crédit des
établissements suivis par la BCE) constituera un défi important pour les établissements concernés. Bien que les
contours précis ne soient pas encore connus, il convienAdapter les processus et les organisadra notamment de repenser les politiques de Data Management, de renforcer la qualité des données et de
tions pour accroître leur résilience
compléter les systèmes d’information existants.
et leur capacité
Par ailleurs, il sera nécessaire d’adapter les processus et les organisations pour accroître leur résilience et leur
capacité, tout en absorbant l’impact financier lié à la mise en œuvre de ces transformations. Face à ces nouvelles
exigences, le principal enjeu en 2016 pour les établissements financiers sera d’identifier précisément la roadmap
mais surtout le dispositif à mettre en œuvre pour être au rendez-vous en temps et en heure. Quelles solutions mettre
en œuvre ? Par où faut-il commencer ? Les réunions de place et les consultations en cours devraient permettre sur
le premier semestre de cette année de fournir des premiers éléments de réponse.
Comme en attestent les échanges entre la Direction des statistiques monétaires et financières de la BCE et la FBF,
AnaCredit constitue à ce stade un changement majeur dans les relations entre les établissements de crédit et les
autorités de régulation. Pour la première fois, il est demandé aux établissements de crédit de fournir des centaines
de données à un niveau contrat / tiers ; marquant ainsi la volonté manifeste de la BCE de suivre au plus près les expositions des établissements de crédit. ■
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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LE QUALIFIED INTERMEDIARY : ENJEUX DU NOUVEL AGRÉMENT ET DE LA RÈGLEMENTATION FATCA
Shaden ITANI - Consultante Confirmée
L’introduction du régime Qualified Intermediary (QI) en 2000 par l’autorité fiscale américaine (Internal Revenue Service – IRS) marque un premier temps fort de la lutte contre
l’évasion fiscale.
Le statut QI permet aux institutions financières non américaines d’acheter et de vendre
des titres américains pour des investisseurs étrangers sans transmettre leurs informations
détaillées à l’IRS et en leur faisant bénéficier des conventions de double imposition signées
avec les Etats Unis. En échange, elles doivent procéder elles-mêmes aux retenues exigées
par l’IRS et l’informer de tous les revenus crédités sur les comptes des clients qui sont des
contribuables américains.
En 2010, suite à plusieurs scandales fiscaux et la crise financière, le gouvernement d’Obama renforce sa lutte contre
la fraude fiscale en promulguant la loi Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA).
LE RÉGIME FATCA NE SE SUBSTITUE PAS AU RÉGIME QI
Le champ d’application de FATCA est plus étendu que celui du QI. Alors que le QI se focalise sur les titres américains
de tous les clients, FATCA vise toutes les informations des comptes détenus par des clients américains. Or, le régime
FATCA ne se substitue pas pour autant au régime QI. Au contraire, il vient le compléter. D’ailleurs, avant l’entrée en
vigueur de FATCA en juillet 2014, l’IRS a publié, en juin 2014, une mise à jour de l’agrément QI (Revenue Procedure
2014-39) afin d’harmoniser les obligations QI et FATCA.
ENJEUX OPÉRATIONNELS : LA NON CONFORMITÉ AVEC LE QI PEUT COMPROMETTRE LE STATUT FATCA
Désormais, une institution financière qui signe un agrément QI avec l’IRS doit être conforme avec les obligations
FATCA même si ce sont deux réglementations différentes, notamment afin de maintenir ou obtenir le statut QI
puisqu’il faut avoir un statut et un numéro d’identification FATCA (Global Intermediary Identification Number – GIIN).
Par ailleurs, une cohérence entre FATCA et le QI en termes de documentation et qualité du reporting doit être assurée. Des nouvelles versions pour la documentation (W8-BEN, W8-BEN-E, W8-IMY et W9) et le reporting (1042 et
1042-S) ont été publiées par l’IRS. Ces versions sont légèrement plus complexes que les anciennes car elles incluent
les informations relatives à FATCA.
Moins de la moitié de la documentation
Sous l’ancien régime QI, la navigation entre les diffécollectée était correctement remplie
rents formulaires et instructions associées était déjà un
défi. À titre d’exemple, moins de la moitié de la documentation collectée était correctement remplie. Sous le nouveau
régime QI, le défi est donc double : en plus de s’assurer que les formulaires sont correctement remplis, le QI doit
aussi vérifier la cohérence avec les informations remontées auprès des équipes opérationnelles et dans les systèmes
d’information FATCA.
Toutefois, l’IRS accepte les formulaires de substitution. Afin d’optimiser le processus de documentation, un formulaire de substitution commun à FATCA et le QI peut être crée. Cependant, certaines institutions financières ont
préféré développer un formulaire commun aux réglementations FATCA et AEOI puisque l’OCDE n’a pas prévu des
formulaires spécifiques AEOI. L’intégration du QI pourrait alourdir ce formulaire, le rendre moins facile à remplir par
les clients et nécessiterait une sensibilisation plus importante des équipes opérationnelles.
ENJEUX SUR LES SYSTÈMES D’INFORMATION : UN COÛT NON NÉGLIGEABLE POUR LA MISE
EN CONFORMITÉ
Que ce soit pour la documentation, le reporting ou le withholding, le QI doit renforcer les contrôles afin d’assurer la
qualité des données et la cohérence avec celles de FATCA. Idéalement, une centralisation des données FATCA et QI
permettra une unique source d’information fiable.
Quelques exemples de développement clés à implémenter et/ou à renforcer dans les systèmes d’information sont :
- Un flag permettant l’identification des comptes avec titres américains
- Le contrôle des statuts et GIIN FATCA
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
- Des contrôles en cas de changement de circonstances
Ces vérifications sont d’autant plus importantes que sous le nouvel agrément QI, l’IRS exige la soumission électronique du reporting QI.
Par ailleurs, le coût de ces développements est plus élevé pour la partie withholding. En effet, la retenue à la source
ne peut s’appliquer qu’une seule fois sous FATCA et le QI. Les QI doivent donc mettre en place les algorithmes et
contrôles permettant entre autres de :
- Identifier les clients impactés
- Classifier les revenues par type (intérêts, dividendes...) en identifiant ceux de source américaine
- Appliquer la bonne retenue à la source selon le tableau ci dessous :
Principaux groupements de taux de retenue à la source
0 %
Clients américains documentés
Taux de convention (ex. 15 %)
Clients non américains documentés
28 %
Clients américains non documentés
30 %
Clients non américains non documentés
ENJEUX ORGANISATIONNELS : UNE GOUVERNANCE QI DÉDIÉE, MAIS EN LIEN AVEC CELLE
DE FATCA
Sous le nouvel agrément QI, le QI doit nominer un Responsible Officer (RO) en charge de la conformité (avec l’agrément QI). En particulier, sous sa gouvernance un Internal Compliance Program (ICP) doit être implémenté afin de
s’assurer que les procédures, les processus, les contrôles, les formations et les systèmes sont en place pour soutenir
les obligations QI. Par ailleurs, il doit certifier tous les 3 ans la conformité du QI auprès de l’IRS. La première certification est attendue le 1er juillet 2018 et couvre la période de mi-2014 à fin 2017. Cette certification doit être appuyée par
un rapport d’audit. Le choix du type d’audit, interne ou externe, pour effectuer une revue de conformité périodique
est laissé libre au QI.
L’IRS n’exige pas que le RO QI soit le même que celui de FATCA. Néanmoins, il doit être identifié sur le portail de
l’IRS. Par ailleurs, la certification auprès de l’IRS inclut également la conformité du QI avec les obligations FATCA.
D’ailleurs, la première certification tombe en même temps que celle de FATCA. Ceci requière donc une forte synchronisation et concertation entre les équipes opérationnelles FATCA et QI, mais surtout entre le RO QI et le RO FATCA,
ainsi qu’une lourde mise à jour des procédures QI.
D’autre part, tandis que la certification FATCA ne couvre que les juridictions ayant signé un modèle Final Regulations
ou un modèle InterGovernmental Agreement (IGA) 2, la certification QI couvre toutes les juridictions, y compris celles
ayant signé un modèle IGA 1 (environ une centaine de pays). La mise en œuvre de la certification QI sera d’autant
plus compliquée qu’elle devra couvrir les obligations FATCA dans des pays qui ne sont même pas concernés par la
certification FATCA. A ce jour, des directives additionnelles de l’IRS sont attendues, néanmoins un travail préparatoire
peut être initié par les QI afin d’identifier le nombre de pays impactés et réfléchir à d’éventuelles certifications FATCA
internes, par exemple via l’audit interne, permettant de soutenir celle du QI.
L’IMPORTANCE DE METTRE EN ŒUVRE DES SOLUTIONS PRAGMATIQUES
Les institutions financières qui sont QI ont un avantage sur les autres dans l’implémentation de FATCA car elles
disposent déjà d’une certaine compréhension des mécanismes fiscaux américains. Néanmoins, FATCA et le nouvel
agrément QI apportent des changements conséquents sur l’organisation, les processus et les systèmes d’informations de ces institutions.
Les solutions qu’elles seront amenées à choisir doivent être les plus pragmatiques possibles et susceptibles d’être
adaptées à d’éventuelles nouvelles directives et réglementations. Ainsi, la récente publication de l’IRS, en octobre
2015, de la réglementation 871m laisse à penser que le périmètre du QI pourrait être impacté, des directives additionnelles publiés par l’IRS sont attendues dans ce sens. ■
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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MIFID 2 : OPPORTUNITÉ OU CONTRAINTE POUR LA
BANQUE PRIVÉE EN FRANCE ?
Nicolas LAMON - Senior Consultant
prévu pour janvier 2017.
L’enfer n’est-il pas pavé de bonnes intentions ?
Les excès ayant abouti à la crise financière de 2008 ont amené le régulateur à vouloir renforcer sa supervision et ceci de façon homogène au niveau européen, tel est le but premier
de la directive MiFID 2. Cependant, les disparités des différents acteurs de la sphère financière et la complexité qui en découle ont été largement sous-estimées ; ajoutez à cela
des retards persistants des instances européennes dans la publication des textes et de
leurs déclinaisons techniques et vous comprendrez pourquoi le régulateur est actuellement
contraint de revoir sa position au sujet du calendrier de mise en application initialement
L’IDÉAL D’UN CONSEIL INDÉPENDANT, UN VŒU QUI S’ANNONCE D’ORES ET DÉJÀ CHIMÉRIQUE
Le statut de conseil indépendant
mort-né.
Au-delà de l’harmonisation réglementaire, deux principes directeurs ont été retenus pour définir le périmètre de la nouvelle directive :
- Accroître la transparence des marchés : élargissement du périmètre d’instruments couverts, davantage d’information pré et post-Trade, encadrement du trading haute fréquence et limitation des Dark Pools…
- Renforcer la protection des investisseurs, notamment par la mise en place de règles de préventions des
conflits d’intérêts : interdiction des rétro-commissions sur les activités de conseil indépendant et la gestion
sous mandat, encadrement des politiques de rémunérations du personnel des prestataires de services d’investissement etc.
Néanmoins, l’attachement des acteurs de la banque privée à l’une de leurs principales sources de revenus (rétrocessions) semble consacrer mort-né le statut de conseil indépendant, car plus contraignant dans sa déclinaison
opérationnelle.
LA BANQUE PRIVÉE : DES ORGANISATIONS, MAIS AUSSI DES BUSINESS MODEL À ADAPTER
Le nombre de HNWI1 dépasse dorénavant celui d’avant crise, laissant présager des jours heureux pour les banquiers
privés. Cependant, se conformer aux nouvelles dispositions réglementaires a un impact considérable sur le PNB et,
afin de conserver ses marges, deux leviers s’offrent à la Banque Privée :
Faire évoluer son Business Model - Adapter son offre produits et services et définir une nouvelle tarification prenant en compte la perte des rétro-commissions (inducements)
- Améliorer la profondeur de sa gamme (fonds maison) afin de conserver les marges générées en interne
- Redéfinir sa relation avec les acteurs de la chaine, qu’ils soient internes ou externes (mise à jour des conventions de distribution, etc.)
Adapter sa structure opérationnelle et de coûts
- Mettre en place de nouveaux outils de pilotage de son activité (piste d’audit des prestations de conseil, transparence sur les coûts, alerte automatisée au client, etc.)
- Initier des chantiers d’adaptation de ses processus (opérationnel & SI)
- Revoir son organisation et sa gouvernance
Actuellement, un rapide état des lieux permet de scinder les acteurs de la banque privée en deux groupes :
- Les établissements adossés à des grands groupes bancaires qui ont déjà initié les réflexions et lancé les chantiers de travaux de mise en conformité à marche soutenue (malgré la perspective de report de la réglementation)
- Les structures indépendantes et plus petites, qui apparaissent quant à elles moins bien préparées à faire face
aux enjeux qui s’annoncent
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High Net Worth Individuals (patrimoine >1 million USD)
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
Initier les réflexions, évaluer les impacts sur leurs organisations et les processus mais aussi définir les scenarii possibles pour leur business model cible, sont les actions prioritaires à entamer pour ces derniers.
ET APRÈS MIFID II ?
La transformation des Banques Privées est en marche et différents scenarii semblent se démarquer parmi lesquels :
- La persistance du modèle producteur/distributeur associé à une refonte des modes de rémunération et une
recherche d’optimisation permettant de réduire leur base de coûts via des projets Lean et/ou de BPO ;
- Un mouvement de concentration des acteurs n’ayant pas la taille critique avec un possible glissement de
certaines fonctions (conseils, reporting client…) vers les producteurs voire même les prestataires de service
BPOs.
Alors que certains acteurs qui n’ont pas encore engagé leurs efforts de mise en conformité MIFID II voient comme
salvateur le report d’une année de son application (de 2017 à 2018), une autre réglementation toute aussi impactante pour le modèle de la Banque Privée fait son apparition à l’horizon. Effectivement, IDD n’est rien d’autre que la
directive clone de MIFID II, adaptée au monde de l’assurance, et risque d’avoir un calendrier de mise en application
concomitant avec celui de MIFID II, augmentant significativement la pression réglementaire sur l’année 2018. ■
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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LA VUE UNIQUE CLIENT : CONTRAINTE RÉGLEMENTAIRE ET OPPORTUNITÉ COMMERCIALE
Junior BOULLEYS - Senior Consultant
En 2010, le Fonds de Garantie des Dépôts et Résolution (FGDR) a piloté un projet visant à accélérer l’indemnisation des déposants en cas de défaillance de leur établissement bancaire.
Baptisé « Vue Unique Client » (VUC) ou Single Customer View (SCV) au niveau européen, ce
reporting réglementaire consiste à renforcer la protection des épargnants en obligeant les
établissements bancaires adhérents au FGDR à restituer des informations sur l’ensemble
de leur clientèle et de ses produits.
Le calendrier s’est établi initialement en deux phases :
1. Début 2014, les établissements bancaires ont transmis au FGDR un fichier VUC « partiel» contenant un échantillon représentatif de la clientèle et de ses produits.
2. En 2015 une simulation de faillite a obligé les banques dans un délai de 5 jours, à restituer au FGDR le fichier
VUC exhaustif de l’ensemble de la clientèle.
Pour répondre à ces exigences réglementaires dans un environnement marqué par un volume de transactions toujours plus important, plus hétérogène et à traiter toujours plus vite, les établissements bancaires ont été amenés à
déployer des solutions logicielles qui avaient également pour objectif de gérer au mieux l’information disponible, un
capital souvent sous-exploité dans les banques et les assurances.
Cependant, la réalité est tout autre : le planning de déploiement a pris du retard compte tenu des nombreuses difficultés rencontrées par les établissements bancaires. En effet, en observant les solutions proposées qui ont été
mises en place (solutions internes ou solutions du marché), ce qui s’avère compliqué à maîtriser outre le volume de
données c’est la capacité :
- à calculer les agios et intérêts à une date donnée,
- à produire l’éditique des clients dans les délais impartis,
- à intégrer les opérations en cours dans les systèmes d’information,
- à obtenir une qualité de donnée suffisante.
Par ailleurs, la volonté de l’Union Européenne qui envisage de réduire le délai de restitution du fichier VUC de 5 à 2
jours n’est pas de nature à réduire les enjeux opérationnels rencontrés.
La VUC participe à un mouvement qui a pour effet au sein des banques de revoir de fond en comble la politique de
Master Data Management afin de mieux gérer l’information. De ce fait, il s’agit principalement :
- d’unifier les données de référence transverses aux activités de l’entreprise (tiers, produits, valeurs, notation,
organisation, etc.),
- d’organiser et sécuriser les processus visant à certifier la qualité des données,
- et enfin, à rendre les données accessibles à toutes les activités qui en ont besoin dans l’entreprise.
Ces informations triées et collectées, doivent permettre :
1. de calculer les positions des clients et de les indemniser en cas de défaillance,
2. de mieux connaître les clients et d’identifier de nouveaux leviers de croissance. ■
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
LOI BANCAIRE, RÈGLE VOLCKER, VICKERS… VERS UN
DÉMANTÈLEMENT DE LA BANQUE UNIVERSELLE ?
Clément MAYER - Senior Consultant
Si les marchés financiers observent des cycles de croissance et de crises, il en va de même
pour la réglementation. Mis en place aux États-Unis en 1933 à la suite de la crise de 1929,
le Glass-Steagall Act, visant à séparer les banques de dépôts des banques d’investissement
fut aboli en 1999. Aujourd’hui, la question de la séparation des activités bancaires est remise au goût du jour avec la crise boursière de 2008. Mais qu’en est-il concrètement ?
CONTEXTE & OBJECTIFS
La prise de conscience des risques systémiques révélée lors de la crise bancaire de 2008 a conduit les régulateurs
internationaux à s’interroger sur la séparation des activités de banques de détail et de banques d’investissement et
de financement (BFI), dans le but de protéger les dépôts épargnants contre les activités spéculatives pour compte
propre des banques.
S’appuyant sur la règle Volcker aux États-Unis et la commission Vickers aux Royaume-Uni, l’Union Européenne a
mandaté la commission Liikanen afin d’aboutir à un ensemble de recommandations. C’est sur la base de ce rapport
que le parlement français, après de nombreuses négociations, a voté en juillet 2013 la loi bancaire française.
Séparer les activités dites utiles des
purement spéculatives
Fort de la résistance de son modèle bancaire universel durant la crise financière, le gouvernement français n’a pas
souhaité cloisonner la banque de détail de la BFI, mais s’est attaché à séparer les activités dites « utiles » pour le
financement de l’économie, des activités purement spéculatives, c’est-à-dire le trading des banques pour compte
propre.
CONSÉQUENCES DE LA SÉPARATION DES ACTIVITÉS
In fine, seuls BNPP et Société Générale ont créé une filiale dédiée au trading pour compte propre, mais les impacts
sur le business model des banques universelles devraient être très limités, même si les impacts opérationnels de la
création de ces filiales ne sont pas neutres :
- nécessité d’obtenir un agrément avant le 1er juillet 2015 auprès de l’ACPR,
- fonds propres spécifiques avec impossibilité de recapitalisation de la maison mère,
- renégociation nécessaire des contrats de netting, impossibilité d’utiliser les modèles internes du groupe sans
nouvel agrément,
- production de reportings spécifiques (COREP, Large Exposures, etc.),
- cloisonnement des desks de trading pour compte propre…
PROJET DE LOI
Les deux banques françaises concernées se sont mises en ordre de bataille et sont opérationnelles depuis le 1er juillet, l’ACPR ayant prévu des contrôles de mise en application dès 2015. Pour autant, le sujet ne sera pas clos : un projet
de loi est toujours en cours de préparation au niveau du Parlement Européen, mais selon sa dernière mouture, les
contraintes pour les établissements bancaires français devraient être limitées.
LE SYSTEME BANCAIRE ET L’OPINION PUBLIQUE
La chute de Lehman Brothers, pure Banque d’Investissement, ainsi que la faiblesse de nombreuses banques régionales ayant fait faillite en raison de leur taille insuffisante ont renforcé le régulateur français dans sa croyance en
la force du modèle universel et d’une taille critique suffisante. Pour autant, l’opinion publique, méfiante, continue
à penser qu’une séparation engendrerait moins de risque pour sa propre épargne. Cela pourrait résulter tout simplement d’une incompréhension du fonctionnement du système bancaire, renforcée par une trop forte opacité de
celui-ci. La transparence, serait-elle la clé d’une reprise de confiance des Français envers leurs banques ? ■
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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FINANCEMENT DU TERRORISME : BILAN 2015 ET
NOUVELLES PERSPECTIVES DE LUTTE
Gérald VOITOT - Associate Partner
La France a dressé un bilan depuis l’adoption du plan d’action national en mars 2015 pour
lutter contre le financement du terrorisme :
- depuis le 1er septembre 2015, le plafond de paiement en espèces a été abaissé de
3 000 à 1 000 euros,
- depuis le 1er janvier 2016,
> tout dépôt ou retrait d’espèce supérieur à 10 000 euros doit être signalé à Tracfin,
> toute opération de change supérieure à 1 000 euros nécessite une prise d’identité,
> les comptes de types Nickel sont désormais rattachés au registre national FICOBA.
Frappée par les attentats de novembre 2015, la France a décidé d’accélérer la transposition du paquet anti-blanchiment initialement prévu pour mi-2017. Suite aux évènements, le Ministère des Finances a rappelé aux acteurs
financiers leur obligation de vigilance et de déclaration pour les opérations dont ils «savent, soupçonnent ou ont
de bonnes raisons de soupçonner qu’elles proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté
supérieure à un an ou participent au financement du terrorisme». Les types d’opérations réalisées, ainsi que la destination et la provenance de fonds au regard de la matrice Risques/Pays Sensibles en matière de terrorisme ou de
financement de terrorisme doivent être considérées.
Sur le plan international, c’est avec l’adoption, le 17 décembre 2015, d’une résolution de l’ONU spécifique à la menace Daech et donnant les moyens légaux pour cibler les sources de revenus de l’État Islamique (le commerce au
noir de pétrole, des antiquités et œuvres d’art…). La France continue de pousser l’adoption de nouveaux actes législatifs permettant d’assurer des actions de lutte contre le financement du terrorisme avec un impact plus effectif et
opérationnel. Ainsi, 7 axes de travail sont actuellement à l’étude.
1. Le renforcement des prérogatives des Cellules de Renseignements Financiers (CRF) pour une meilleure coopération entre elles
Certains CRF des États Membres de l’UE dont la mission est de recueillir, d’analyser, d’enrichir et d’exploiter les signalements d’opérations financières atypiques manquent d’indépendance et d’autonomie opérationnelle concernant
les modalités d’exercice du droit à l’obtention d’informations additionnelles sur des opérations/personnes suspectes.
L’harmonisation des pratiques européennes en matière de droit d’informations additionnelles des CRF en renforçant
la coopération internationale est primordiale. La législation européenne permettra aux CRF d’exercer ce droit envers
tout professionnel assujetti de manière directe (sans passer par une autorité intermédiaire), indifféremment du fait
qu’il soit l’entité déclarante ou pas de la déclaration de soupçon, et y compris aux CRF étrangères.
2. L’amélioration de l’efficacité du dispositif européen de gel des avoirs terroristes à l’échelle européenne
Le dispositif actuel de gel des avoirs présentent quelques insuffisances : la personne désignée doit déjà faire l’objet
par une autorité compétente d’une ouverture d’enquête ou d’une condamnation. L’amélioration du dispositif demande :
- une accélération des délais d’adoption de mesures de gel (moins de 72h) et la surveillance systématique et accrue des personnes visées par les entités assujetties aux obligations de LCB-FT pendant la période précédant
l’entrée en vigueur,
- la possibilité d’étendre une mesure nationale de gel à l’ensemble de l’UE et de bloquer les avoirs de présumés
terroristes même sans lien direct établi avec des organisations extérieures à l’UE mais dont l’action peut être
une menace pour l’ensemble de l’UE,
- un meilleur partage des décisions nationales de gel, avec la mise en place d’une plateforme européenne
informative des gels nationaux mis en œuvre par chaque État Membre afin d’éviter toute tentative de contournement du dispositif de gel des avoirs.
3. La généralisation des registres centraux bancaires
La 4ème Directive Anti-Blanchiment n’impose pas la mise en place de registres des comptes bancaires et de paiements. Pour identifier plus facilement les comptes qu’il convient de geler, il est nécessaire de :
- généraliser la mise en place d’un registre centralisé des comptes bancaires et des paiements,
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
- autoriser l’accès à ce registre aux CRF et autorités compétentes tout en respectant la confidentialité des données personnelles.
4. Le renforcement des contrôles et de la réglementation européenne des moyens de paiement hors
circuits bancarisés pour lutter contre l’anonymat des transactions
La réglementation européenne est insuffisante en matière de conditions d’utilisation de monnaie électronique. Les
seules dispositions prises ne concernent que les seuils et les caractéristiques telles que la possibilité de recharger
une carte ou pas, son utilisabilité dans un ou plusieurs États Membres, la capacité maximale du support, etc. La
France propose de :
- rendre systématique, lors de l’achat ou du rechargement de la monnaie électronique, quel que soit le montant,
(i) la prise d’identité, (ii) la conservation de la copie des documents fournis, et (iii) l’alimentation d’un registre
centralisé de conservation de ces éléments mis en place à cet effet,
- limiter les moyens de paiements non traçables (espèces, bons de rechargement, etc.) pour l’alimentation des
supports de monnaie électronique,
- limiter les capacités d’emport des supports de monnaie électronique,
- tracer, depuis son émission jusqu’à son épuisement (ou son renflouement), les opérations réalisées avec le
support de monnaie électronique. Cette traçabilité serait réalisée par les opérateurs émetteurs, les gestionnaires et distributeurs de monnaie électronique,
- soumettre les plateformes d’échangeurs de monnaies virtuelles en monnaies ayant cours légal aux règles de
LCB-FT découlant des standards du GAFI,
- plafonner les montants d’utilisation des monnaies virtuelles comme moyen de paiement ainsi que les flux de
conversion des monnaies virtuelles en espèces,
- étendre les obligations déclaratives en douanes et applicables aux personnes physiques aux mouvements d’or
et de métaux précieux ainsi qu’aux cartes prépayées et aux transferts physiques de capitaux par voie de fret.
5. La lutte contre le commerce illicite de biens culturels
La contrebande de biens culturels (trafic d’œuvre d’arts, d’antiquités, etc.) constitue une source de revenus pour les
organisations terroristes. Il convient de définir un cadre législatif permettant de:
- mettre en œuvre un contrôle à l’importation des biens culturels entrant sur le territoire de l’UE, et
- pour les pays d’exportation, d’imposer la fourniture d’autorisation et d’une documentation claire sur l’origine
des biens.
6. Le lancement de travaux sur la mise en place d’un système européen d’exploitation des données
interbancaires SWIFT
Aujourd’hui, seuls les États-Unis ont, via le « Terrorist financing Tracking Program » (TFTP), accès aux données interbancaires SWIFT hébergées sur les serveurs respectivement américains et européens de la société SWIFT contrairement aux états européens même s’ils peuvent en faire la demande aux États-Unis. Dans la pratique les réponses
américaines aux requêtes européennes sont longues et les conditions très restrictives. La France propose de :
- mettre en place un système européen exploitant directement les données des communications SWIFT hébergées en Europe,
- faire collaborer le système européen avec le TFTP pour exploiter les données stockées aux États-Unis.
7.L’intensification de la collaboration avec le GAFI dans la détection, la prévention et la répression du
terrorisme
La résolution de l’ONU adoptée à l’égard de Daech le 17 décembre insiste sur les moyens qui doivent être mis à
mettre en œuvre par les Etats Membres des Nations Unies dans leur lutte contre le financement du terrorisme et,
notamment la mise en œuvre des recommandations du GAFI (Groupe d’Action Financière). En novembre 2015, le
GAFI a rendu ses conclusions sur étude de l’évaluation des dispositifs de lutte contre le financement du terrorisme
dans 194 pays. Une nouvelle analyse sur les mesures prises par les pays identifiés comme défaillants devrait paraître
au G20 Finances. Aujourd’hui La France souhaite :
- mettre la pression sur les pays ne se conformant pas ou partiellement aux recommandations établies par le
GAFI. ,
- réformer la gouvernance des organismes régionaux de type GAFI dans les pays les plus défaillants via un renforcement du rôle de secrétariat du GAFI dans ces organisations. ■
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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SECTION 871 (M) : VERS UN RENFORCEMENT DES
TAXES SUR LES TRANSACTIONS
Élisabeth SAUX - Senior Consultante
Depuis l’entrée en vigueur de HIRE Act (Hiring Incentives to Restore Employment) en 2010,
dont la Réglementation FATCA fait partie, les décrets de renforcement de la conformité
bancaire ne cessent de se multiplier comme le durcissement des taxations qui amènent
à la complexification du paysage bancaire et laisse de moins en moins de place aux vides
juridiques.
Dans ce contexte, on est en droit de se demander si les organismes de régulation bancaire
ne sont pas en train de fermer définitivement l’accès aux particuliers aux montages financiers complexes en OTC ?
En effet, l’IRS, (Internal Revenue Source) a inséré une nouvelle section, celle nommée 871 (m) qui nous met face à
une taxation supplémentaire des produits financiers.
Puisque l’application de FATCA par les institutions financières depuis le 1er juillet 2014 ne permet pas d’imputer une
retenue à la source sur certains paiements relatifs aux dividendes issus de titres US versés à des non américains, la
section 871 (m) permet de remédier à cette impossibilité.
Taxer à hauteur de 30 % tout dividende
implicite ou explicite
MODALITÉS DU 871 (M)
La section 871 (m) vise à appliquer une retenue à la source sur les dividendes équivalents, (dividendes estimés dans
le prix du produit, mais non clairement identifiés comme une tombée de coupon), dividendes générés par des sousjacents américains de produits dérivés, détenus par des non américains.
L’application du 871 (m) vise à taxer à hauteur de 30 % (ou moins selon l’accord du pays) tout dividende implicite ou
explicite couvrant un grand nombre de familles de produits tels que :
- les NPC - Notional Principal Contracts : Interest rate swaps, currency swaps, basis swaps, interest rate caps,
interest rate floors, commodity swaps, equity swaps, …
- les ELI - Equity Linked Instruments : Futures, Forward, options,
- les Warrants, Corporate Bonds, Repos, Securities Lending (cash loan et deposit sont hors scope).
Initialement prévue le 1er janvier 2016, la mise en application de la section (871m) a été repoussée au 1er janvier 2017.
APERÇU DU DÉCRET FINAL
La publication du décret final devrait permettre d’apporter des réponses sur :
- l’exemption des Qualified Indicia (indices publics tels que le SNP500),
- le scope d’application du delta d’éligibilité (tous produits confondus ou seulement les produits dont le delta est
supérieur à 0,8 afin de viser prioritairement les options dans la monnaie et donc les gains potentiels),
- le statut d’un Qualified Dealer (broker), d’un Qualified Securities Lending (Custodian, Broker prêtant et empruntant des titres domestiques).
Quant à l’évaluation du Dividend Equivalent, la problématique reste entière, notamment en ce qui concerne la compétitivité. L’estimation du dividende équivalent pouvant se révéler compliquée, l’évaluation anticipée de ce Dividend
Equivalent Payment diminuerait d’autant le prix du produit dérivé et, en l’absence d’alignement des établissements
financiers, des différentiels de prix pourraient être constatés. Pour autant, ce procédé pourrait simplifier le processus de pricing.
Ainsi, l’application du 871 (m) va engendrer de nombreux développements des systèmes d’information, notamment
en ce qui concerne la conservation des données liées au delta spot et à l’homogénéisation des règles de calcul.
Si l’AEOI est une déclinaison de FATCA au niveau des pays de l’OCDE, tous les deux ayant pour objectif le reporting
des comptes et avoirs offshores des contribuables, le 871(m) est pour sa part similaire à l’IFTT (Italian Financial
Transaction Tax), voire demain la FTTE, la TTF européenne avec cette fois-ci en ligne de mire la taxation des revenus
de dérivés (dividendes). ■
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Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
INSURANCE DIRECTIVE DISTRIBUTION : NOUVEAU
CADRE POUR LA VENTE DE PRODUITS D’ASSURANCE
Marie-Hélène TCHANGANG - Senior Consultante
La nouvelle directive européenne (IDD), votée le 25 novembre 2015, apporte un point final à
la révision du cadre réglementaire de la distribution d’assurances dans l’Union Européenne.
Elle vient renforcer les exigences en matière d’information et de protection des consommateurs. Si le modèle de distribution français préserve certains de ses acquis, un certain
nombre d’obligations seront en revanche renforcées.
APPLICATION DE LA DIRECTIVE À L’ENSEMBLE DES ACTEURS DE LA DISTRIBUTION D’ASSURANCE
Cette évolution du champ d’application de la directive lui a valu un changement de nom. En effet, initialement dénommée DIA pour « Directive de l’Intermédiation d’Assurance », la nouvelle directive vise désormais l’ensemble des
acteurs de la vente d’assurance. Outre les intermédiaires indépendants, seront également concernés les réseaux salariés, les comparateurs d’assurances ainsi que les vendeurs d’assurances à titre accessoire, dès lors que la prime
annuelle s’élève à plus de 600 €.
ÉLARGISSEMENT DU PÉRIMÈTRE AUX PRODUITS D’ASSURANCE VIE ET NON VIE
Selon les estimations, 98 % des produits d’assurance sont visés par la nouvelle directive, contre 48 % des produits
d’assurance distribués en Europe visés par la directive précédente, du fait des différents cas dérogatoires et des
exclusions.
Le devoir de transparence : pierre angulaire du dispositif de protection du consommateur.
- Rémunération des intermédiaires
Le législateur ne remet pas en cause le commissionnement de l’intermédiaire. C’est en revanche l’information sur la
nature de la rémunération de ce dernier qui est visée par la directive, et non le montant et le mode de calcul finalement écartés. L’objectif du texte est donc de s’assurer que le consommateur disposera d’une proposition adaptée à
ses besoins et de prévenir la vente de solutions qui seraient contraires à son intérêt, mais favorables à l’intermédiaire
en termes de rémunération.
- Immatriculation des intermédiaires
Dans un souci de transparence, cette disposition vise à ce que le consommateur puisse identifier correctement
son intermédiaire désormais contraint de s’enregistrer auprès d’une autorité compétente dans son État membre
d’origine (à l’exception des salariés des entreprises d’assurance). Cette obligation étant d’ores et déjà en vigueur en
France, via le Registre unique des Intermédiaires, banque, assurance, finance, posé par l’article L. 546-1 du Code
monétaire et financier et tenu par l’ORIAS, cette obligation est donc sans réel effet pour l’hexagone.
- Gouvernance produit
Le texte vise l’obligation de surveillance et de gouvernance des produits d’assurance. Le producteur du produit d’assurance devra s’assurer que son produit est adapté à un marché cible et que sa stratégie de distribution est appropriée, lors du lancement du produit, mais également tout au long de sa durée de vie.
- Information sur le produit
Le législateur prévoit que soit mis à disposition du consommateur un document d’information pré-contractuel, destiné à l’informer des caractéristiques principales des assurances non-vie, à l’instar des assurances vie d’ores et déjà
encadrées dans le cadre du règlement européen sur les produits d’investissement de détail packagés.
FORMATION RENFORCÉE DES DISTRIBUTEURS POUR PROTÉGER LE CONSOMMATEUR ET
PROFESSIONNALISER L’ACTE DE VENTE.
La directive vise également la formation continue de tous les distributeurs de produits d’assurance, intermédiaires
et personnels des organismes porteurs de risques, permettant de garantir sur la durée un niveau satisfaisant de
connaissances et d’aptitudes pour la distribution de contrats. Ainsi, un minimum de 15 heures de formation certi-
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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fiante par an leur est imposé. Les obligations en termes de formation initiale seront elles laissées au libre choix des
états membres.
POINT SUR LE CALENDRIER RÉGLEMENTAIRE ET LES PERSPECTIVES DE LA DIRECTIVE
La directive a été publiée en décembre 2015 au Journal Officiel de l’Union Européenne. À partir de cette date, les
Etats membres ont en principe un délai de 24 mois pour transposer la directive dans leurs droits nationaux, fixant
une deadline en décembre 2017.
Le texte prévoit que certaines dispositions puissent être durcies. La transparence de la rémunération ainsi que le devoir de conseil sont des sujets sur lesquels la directive laisse aux États membres la possibilité de fixer un cadre plus
contraignant, et de limiter, voire d’interdire, certaines pratiques. Les différentes familles de l’assurance en France
suivront avec attention la phase de transposition : assureurs, intermédiaires et autres distributeurs auront en effet
des chantiers de mise en conformité plus ou moins lourds à mener.
POINTS CLÉS À RETENIR SUR LA DIRECTIVE IDD EN FRANCE
- Acteurs de la distribution d’assurance : une réglementation appliquée à l’ensemble des acteurs de la distribution d’assurance, jusqu’aux comparateurs ou acteurs du monde affinitaire.
- Produit concernés : élargissement à la quasi-totalité des produits : 98% des produits d’assurance concernés
(contre 48 % aujourd’hui).
- Une volonté de transparence accrue : identification de tous les distributeurs, présentation claire de la nature
de la rémunération de l’intermédiaire et normalisation de la présentation du produit d’assurance proposé.
- Formation des intermédiaires : professionnalisation de l’acte de vente avec un minimum 15 heures de formation certifiante annuelle.
- Une mise en œuvre pour décembre 2017 au plus tard. ■
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L’AEOI : UN RENFORCEMENT DES OBLIGATIONS KYC
DES INSTITUTIONS FINANCIÈRES
François d’OLIVEIRA - Consultant
L’AEOI (Automatic Exchange of Information) est une initiative de l’OCDE visant à échanger
des informations afin de lutter contre l’évasion fiscale à l’échelle internationale.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
Fin octobre 2014, une centaine de pays se sont engagés à participer à l’AEOI, dont l’ensemble des pays de l’Union Européenne. Les pays de l’Union Européenne, le Liechtenstein,
l’Inde, les Îles Cayman, Jersey et Guernesey font partie de la soixantaine de pays où l’AEOI
est entrée en vigueur le 1er Janvier 2016. D’autres juridictions telles qu’Andorre, Monaco,
Hong Kong ou la Suisse se sont engagées à rejoindre l’AEOI début 2017.
Dans chacun de ces pays, les institutions financières doivent identifier leurs clients résidents fiscaux dans un autre
pays AEOI. Cette identification nécessite de renforcer les processus KYC1 existants et de mettre en place de nouveaux
processus KYC spécifiques à l’AEOI.
Les institutions financières seront aussi amenées à mettre en place des processus de contrôle interne pour s’assurer de leur conformité vis-à-vis de l’AEOI. Le précédant FATCA donne une bonne idée des pénalités qui pourront être
infligées aux établissements non conformes… (i.e. environ 200$ par erreur).
NOUVELLES OBLIGATIONS DE CLASSIFICATION ET DE DOCUMENTATION
Selon les estimations, 98 % des produits d’assurance sont visés par la nouvelle directive, contre 48 % des produits
d’assurance distribués en Europe visés par la directive précédente, du fait des différents cas dérogatoires et des
exclusions.
Identification et documentation des clients à l’ouverture de compte
À partir de l’entrée en vigueur de l’AEOI, lorsqu’un client souhaite ouvrir un compte auprès d’une institution financière, il devra remplir une auto-certification. Ce document permet de récolter les informations permettant de déterminer le statut AEOI du client (institution financière, entité non-financière active ou entité non-financière passive)
et de collecter les informations devant être déclarées aux autorités fiscales (nom, adresse, résidence(s) fiscale(s),
Numéro d’Identification Fiscal (NIF) …). En France, certaines de ces informations (en particulier le NIF) n’étaient pas
collectées avant l’entrée en vigueur de l’AEOI.
Dans la très grande majorité des cas la collecte de cette auto-certification est obligatoire. De plus, les institutions
financières doivent effectuer des tests de validité (renseignements complets et cohérents) et de vraisemblance (absence de contradiction entre l’auto-certification et les informations à la disposition du chargé de relation) sur les
informations renseignées dans l’auto-certification. Bien que l’auto-certification AEOI puisse être mutualisée avec
les documents KYC existants (formulaires FATCA, déclarations de bénéficiaires effectifs…), ce document et les tests
associés représentent une obligation supplémentaire, à la fois pour les chargés de relation, pour les clients et pour
les systèmes d’informations.
Identification des clients existants
Les clients titulaires d’un compte ouvert avant l’entrée en vigueur de l‘AEOI ne sont pas documentés avec une auto-certification. Les institutions financières auront entre 1 et 2 ans pour les classifier en se basant sur leur KYC. De
plus, les clients déclarables identifiés à partir des données KYC auront ensuite la possibilité de corriger leur statut
en soumettant une auto-certification AEOI.
La qualité des données KYC est clé pour cette étape. En effet, l’incapacité de classifier un client à partir des données
KYC (adresse erronée, mauvais code industrie…) ou l’absence d’une donnée déclarable (numéro d’identification fiscal, nom d’un bénéficiaire effectif…) obligera à contacter ce client pour obtenir une auto-certification de sa part. Cela
nécessitera de mettre en place un système d’identification des informations manquantes et de relance des clients
pour les obtenir.
1
KYC (Know Your Customer): ensemble de procédures et d’outils permettant aux institutions financières de vérifier
l’identité de leurs clients et d’assurer la conformité de l’institution financière avec certains réglementations (anti-blanchiment,
FATCA…)
Les Histoires de Demain par TNP - Régulation Financière - janvier 2016
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L’identification des clients existants dans le cadre de l’AEOI représente donc une charge de travail non négligeable
pour les équipes KYC, en particulier en fin d’année, période durant laquelle les clients recontacteront les institutions
financières pour confirmer ou corriger leur statut déclarable avant le 31 décembre (date à laquelle les comptes déclarables sont identifiés).
SUIVI DU KYC CLIENT ET IDENTIFICATION DES CHANGEMENTS DE CIRCONSTANCES
En parallèle de l’identification des nouveaux clients et de la revue des clients existants, les équipes KYC devront traquer les changements des données KYC des clients. Tout d’abord, les textes de l’AEOI fournissent une liste d’indices
à suivre pour détecter tout changement de résidence fiscale (adresse, numéro de téléphone…). De plus, pour certains
clients, les chargés de relation devront confirmer chaque année que, à leur connaissance, le statut AEOI du client est
toujours valide.
Les équipes KYC seront aussi parfois amenées à mettre à jour la classification des clients quand un nouveau pays
rejoindra l’AEOI. En effet, les résidents fiscaux de ce pays deviendront déclarables et leur NIF devra être collecté. De
plus, certaines entités d‘investissements de ce pays verront leur statut AEOI passer d’Entité Non-Financière Passive
à Institution Financière.
CONSOLIDATION D’INFORMATIONS A PARTIR DE PLUSIEURS SYSTÈMES D’INFORMATIONS
Les processus de classification évoqués précédemment nécessitent d’importants développements informatiques
des institutions financières (collecte des informations contenues dans les auto-certifications, détections d’indices de
résidence fiscale,…).
Ces développements sont d’autant plus complexes pour les institutions financières gérant les différents types de
compte d’un même client dans plusieurs systèmes d’informations distincts. En effet, plusieurs processus imposent
aux institutions financières d’agréger les soldes de tous les comptes de chaque client (seuils d’exemption De Minimis, identification des comptes de valeur élevée…). De manière similaire, la constitution de la déclaration AEOI
nécessitera de réunir de nombreuses informations provenant potentiellement de plusieurs systèmes d’information : informations personnelles sur le client, soldes de chaque compte, dividendes perçus, ventes d’actions… Cette
consolidation d’informations à partir de nombreux systèmes d’informations peut s’avérer complexe et générer des
coûts importants pour les institutions financières.
CONTRÔLES DE LA CONFORMITÉ À L’AEOI
Les pays participants sont en train de choisir les contrôles qu’ils mettront en place pour s’assurer de la conformité
des institutions financières opérant sur leur sol. Chaque pays a la possibilité d’opter pour les audits de son choix (par
l’autorité fiscale, par le régulateur, par un cabinet externe ou en internes). Chacun de ces audits pourra entrainer le
paiement de pénalités en cas de non-conformité avérée d’une institution financière.
En prévision de ces audits et pour limiter les risques de non-conformité, les institutions financières seront amenées à mettre en place des contrôles internes. Ces contrôles consisteront avant tout à vérifier l’exhaustivité de la
documentation KYC collectée dans le cadre de l’AEOI des clients et à comparer cette documentation au statut AEOI
(classification, statut déclarable…) du client pour identifier toute erreur de classification.
Il conviendra donc de mettre en place des processus et systèmes permettant d’accéder facilement aux données
KYC pertinentes pour la classification AEOI. L’OCDE a d‘ailleurs d’ores et déjà publié une liste d’une centaine de métriques pouvant être demandés lors d’un audit AEOI... ■
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