18 août 2014, 24Heures, La photo se cherche de nouveaux cadres
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18 août 2014, 24Heures, La photo se cherche de nouveaux cadres
24 24 heures | Lundi 18 août 2014 25 24 heures | Lundi 18 août 2014 Culture&Société Culture Société Gastro Ciné Conso Sortir Les gens Anniversaire Le Festival de Locarno sacre le Philippin Lav Diaz, un cinéaste de la durée La photo se cherche de nouveaux cadres «I Sophie Grecuccio l y a certainement plus de photographies produites en 2014 qu’il n’y en a eu en cent septante-cinq ans», s’enthousiasme Stefano Stoll, directeur du Festival Images de Vevey. Du daguerréotype au smartphone, le petit clic d’un appareil photo a, depuis le 19 août 1839, bouleversé la façon d’interagir et créé une société basée sur la communication visuelle. Que ce soit au niveau optique, intellectuel, émotionnel ou physique, la photo hypnotise, raconte une réalité parfois mieux que la réalité ellemême, aide à construire un regard sur le monde. Si, au début, elle n’avait qu’une fonction documentaire et journalistique, aujourd’hui, les transformations technologiques ont profondément changé les moyens de production et de jouissance de l’image. La photo s’est imposée comme une conversation sans parole depuis l’émergence de nouveaux modes de consommation et de communication: réseaux sociaux, applications sur smartphones et plates-formes de partage communautaire. Une petite révolution qui a estompé les frontières entre les genres photographiques et, surtout, entre les professionnels et les amateurs. Une invention française Depuis sa création, la photographie a bouleversé la façon d’interagir et a créé une société basée sur la communication visuelle. CORBIS photographe, de l’autre le succès du langage des images. «Créer des images de qualité n’est plus suffisant. N’importe qui peut avoir un bel appareil digital et faire de beaux clichés. Pour se démarquer, un professionnel doit utiliser sa propre qualité de raconter des histoires qui arrivent à capturer l’attention du public. Du moment qu’une image offre une expérience, elle reste gravée dans notre mémoire», raconte Régis Colombo, photographe. Mais, avec les milliers de photos dématérialisées et chargées tous les jours sur Facebook et autres réseaux sociaux, comment faire la différence? On peut désormais partager des instants éphémères, des émotions passagères qu’hier on aurait gardées pour soi. Difficile de mesurer les conséquences de cette révolution dans la communication. «La photographie est en train de vivre une période certainement complexe mais aussi un moment extrêmement fertile et créatif, tout est encore à explorer! se réjouit Jean-Marc Bonnard Yersin, directeur du Musée de l’appareil photographique de Vevey. Le photographe d’aujourd’hui doit aussi être un communicateur, un entrepreneur, un expérimentateur des nouvelles technologies et de ses possibilités infinies.» La photo comme langage Dès son invention, l’image était prédestinée à être un mode de représentation du monde, pouvant se passer de mots. Mais, lance Stefano Stoll, «jamais on n’aurait pu imaginer qu’elle puisse jouer un tel rôle dans la transition d’informations à l’intérieur de la «Un noble artisan de la chanson» s’est éteint Hommage Interprète du célèbre titre Qui c’est celui-là?, Pierre Vassiliu est décédé hier matin à l’âge de 76 ans Il faisait partie du petit cercle de chanteurs qui ont marqué les esprits avec un titre. Emporté dans son sommeil hier matin à l’âge de 76 ans, Pierre Vassiliu était celui de Qui c’est celui-là? LE titre de 1973 vendu à 300 000 exemplaires en à peine quatre mois. Adaptée de Partido Alto, du Brésilien Chico Buarque, «Qu’est-ce qu’il fait? Qu’est-ce qu’il a? Qui c’est celui-là? Complètement toqué ce mec-là…», la chanson l’a non seuVC1 Contrôle qualité Dans un palmarès assez homogène pour cette édition suivie par 166 000 spectateurs, Mula Sa Kung Ano Ang Noon, un long, très long métrage, décroche la récompense suprême L’invention de Daguerre aura 175 ans demain. L’irruption des nouvelles technologies a considérablement changé son rôle dans la société, et le photographe doit lui aussi modifier son regard. Bienvenue dans l’ère de l’ubiquité de l’image «Le métier n’est pas mort» «Contrairement à une idée préconçue, la photo n’est pas un message universel mais un code culturel. Nous sommes en train de vivre le résultat des transformations des années 1990», affirme Daniel Girardin. Pour le conservateur du Musée de l’Elysée à Lausanne, «l’arrivée des nouvelles technologies a accéléré le processus de renouveau du langage photographique mais les résultats de ce changement ne sont pas encore tout à fait clairs dans l’œuvre des artistes. Chaque photo, poursuit-il, doit tenir compte de la possible hybridation avec la vidéo, de la relation avec des langages non visuels et de leur mutuelle coexistence sur des plates-formes informatisées. Le métier de photographe professionnel n’est pas du tout mort! Il vit une période de transition.» Les experts parlent d’une ère schizophrène: d’un côté il y a la «crise» du métier de Cinéma Pierre Vassiliu, sur un plateau de télévision en 1989. AFP lement rendu célèbre, elle lui a aussi permis, comme il l’affirmait sans tabou, de «vivre une quinzaine d’années avec le fric de cette chanson». Et pourtant… Pierre Vassiliu s’était abonné au succès dès ses premiers pas dans la chanson. Sorti en 1962, Armand, son premier album, lui avait immédiatement ouvert les portes de la cour des grands: l’Olympia, la première partie des Beatles, les tournées avec Françoise Hardy ou avec Johnny Hallyday. Né le 23 octobre 1937 près de Paris, le chanteur à la célèbre moustache était un homme de partage. «La musique était, avec lui, un peu un repas improvisé», soulignait hier Yves Duteil. C’était un «noble artisan du métier de la chanson» et non un de ces «artistes fabriqués en deux mois», commente Laurent Petitgirard, ancien président de la Société des auteurs compositeurs. «Avec Qui c’est celui-là? poursuit-il, il a eu un grand coup de bol. Mais, même si, sur un plan médiatique, il n’a plus vécu une telle heure de gloire, il n’en a pas été frustré puisqu’il n’a jamais cherché à se placer.» Homme de plusieurs métiers – jockey et restaurateur –, Pierre Vassiliu était aussi passionné par les voyages. Il avait ses habitudes en Suisse, notamment à Lutry, à l’Esprit Frappeur, où «l’épicurien, poète et musicien» chantait encore en 2007. F.M.H./AFP société». L’image sait dire ce qui échappe aux mots et, sur les réseaux sociaux, ce n’est plus sa qualité qui prime mais ce qu’on va lui faire dire. On a basculé dans un univers fictionnel où on ne documente plus: on raconte des histoires. «Aujourd’hui, analyse le directeur du Festival Images, la photographie est devenue un langage universel comme l’espéranto! Une langue visuelle qui s’invente tous les jours et qui permet aux gens du monde entier de communiquer entre eux.» Repéré pour vous L’art de bien nouer sa cravate La différence entre un nœud simple, Windsor ou à l’envers? Les tutoriels de la nouvelle application gratuite lancée par Hermès expliquent les gestes pour nouer sa cravate avec classe et dans les règles de l’art. Tie Break, spécialement imaginée pour Monsieur, propose aussi une incursion dans l’univers de la célèbre marque française de luxe. Une fois la cravate ou l’écharpe bien mise en place, il est possible de tester le motif de plusieurs modèles de la nouvelle collection en le posant à côté de sa chemise. La section «savoir-faire» offre une visite virtuelle dans les ateliers de la maison, qui détaille quelques étapes de fabrication, de la dépose de la couleur aux tables d’impression en passant par les pièces de soie découpées dans une mise en scène très élégante. Le tout est complété de petits jeux, messages ou vidéos ludiques et décalées. Rebecca Mosimann Tie Break gratuite sur l’App Store et Google Play U Eclairage C’est en mai 1816 que l’inventeur français Nicéphore Niépce parvient à fixer des images qui s’étaient formées sur du papier enduit de chlorure d’argent. En modifiant les supports et en améliorant l’obtention des images à diaphragme variable, c’est avec une plaque de bitume de Judée qu’il obtient la première photographie. Auparavant, Niépce n’avait réussi que des images floues, confuses. En 1826, il s’associe avec le peintre et décorateur de théâtre Louis Jacques Daguerre pour exploiter son invention. Ensemble, ils essaieront de raccourcir le temps de pose et de commercialiser les fruits de cette découverte. Mais, ironie du sort, ce n’est qu’après la mort de Niépce, en 1833, que son rêve deviendra réalité avec l’invention d’un procédé qui réduit le temps de pose à quelques heures, donnant ainsi naissance au fameux procédé qui porte le nom de son confrère, le daguerréotype. L’invention fut achetée par le gouvernement français et c’est le 19 août 1839 que le physicien et astronome François Arago présente l’invention à l’Académie des sciences, à Paris. Vevey en fête Le Musée suisse de l’appareil photographique va célébrer les 175 ans de la naissance de la photo ainsi que ses 35 ans, les 30 et 31 août prochains. Bertrand Tappy et Vincent Held, de la Compagnie du Cachot, inviteront le public à suivre une «visite guidée décadrée», un retour aux origines de la photographie sera proposé ainsi que la possibilité de réaliser, seul ou en famille, un cliché avec une réplique d’un appareil de Nicéphore Niépce. Pour clôturer ce week-end , Bernard Dubuis présentera dimanche son exposition «Tant et temps de passages». Vevey, Musée suisse de l’appareil photographique Sa 30 et di 31 août (11 h à 17 h) Rens.: 021 925 34 80 www.cameramuseum.ch C’est le Léopard d’or le plus long de l’histoire de Locarno. Cinq heures trente-huit. Presque six heures! Autant dire que caser une séance d’une telle durée dans un festival tenait de la gymnastique. Pourtant, dès les premiers plans de Mula Sa Kung Ano Ang Noon de Lav Diaz, lauréat, samedi au Tessin, de la récompense suprême, on sentait bien qu’on se trouvait face à un film différent, hors norme dans tous les sens du terme. Dès le début, à travers de somptueux plans-séquences noir et blanc minutieusement composés, le cinéaste philippin décrit le quotidien d’un village où, entre danses tribales et quête de la nourriture, se déroulent de curieux événements. Des vaches sont massacrées, d’étranges cris proviennent de la forêt avoisinante. Petit à petit – c’est-à-dire durant environ trois heures –, une réalité prend forme sous nos yeux. Nous sommes en 1972 et un coup d’Etat militaire est en train d’ensanglanter la région, via des milices qui rôdent dans les campagnes. La seconde partie du film bascule dans la description de cette violence, montrant l’ingérence des militaires et du pouvoir sur des humains qui n’en ont pas conscience. «Pour Lav Diaz, ce film est presque un court-métrage», nous avouait, il y a quelques jours, Carlo Chatrian, directeur du festival. En effet, un coup d’œil sur la filmographie du réalisateur philippin, né en 1958, nous rappelle que quelques-uns de ses précédents opus duraient près de neuf ou treize heures. Voilà un cinéaste qui travaille sur la durée, à l’instar du Hongrois Béla Tarr, pour ne citer que cet exemple. Sauf que Lav Diaz possède une écriture complètement personnelle, comme si chaque plan servait d’introduction, esthétique et sémantique, au suivant. Formellement, le résultat est à tomber par terre. Primé dans d’autres festivals, mais dans des sections parallèles, Lav Diaz est donc enfin reconnu pour son œuvre dans une manifestation de grande envergure. Le reste du palmarès est assez homogène, sauf peut-être le Léopard de la meilleure interprète féminine, décerné à la Française Ariane Labed pour Fidelio, l’odyssée d’Alice de Lucie Borleteau, qui nous laisse dubitatif. L’Alice en question officie comme mécanicienne et unique femme d’un équipage sur un vieux cargo. Et vit par procuration à travers le journal intime de son prédécesseur, mystérieusement retrouvé mort. Ni très convaincant ni vraiment séduisant. En revanche, l’adhésion ne peut être que totale au Léopard du meilleur interprète masculin, puisqu’il revient au héros Samedi, le cinéaste philippin Lav Diaz présentait fièrement son Léopard d’or sur la Piazza Grande de Locarno. URS FLUEELER/KEYSTONE «Pour Lav Diaz, ce film de 5 h 38 est presque un court-métrage» Carlo Chatrian, directeur du festival de Durak, du Russe Yuri Bykov, le comédien Artem Bystrov. Qui est l’un des éléments clés d’un film formidable et puissant qui aurait amplement mérité de remporter le Léopard d’or. Le Prix de la meilleure mise en scène est revenu sans réelle surprise au Portugais Pedro Costa, pour Cavalo Dinheiro, film totalement dans la lignée de ses précédents opus. Soit une ode aux créoles du Cap-Vert et un filmage radical à l’extrême. Un prix qui semble avant tout couronner une œuvre. Enfin, Listen Up Philip, de l’Américain Alex Ross Perry, plutôt abouti, a remporté le Prix du jury. Là encore, rien de scandaleux. Pascal Gavillet «Une édition très forte» U Eclairage Carlo Chatrian est un homme soulagé. L’Italien a subi deux galères d’importance au cours de sa deuxième édition à la direction artistique du Festival de Locarno: un temps exceptionnellement pluvieux (six jours sur onze) et la défection de dernière heure de Roman Polanski, jeudi, suite à une polémique tessinoise sur l’opportunité d’inviter un cinéaste poursuivi aux Etats-Unis pour une affaire de mœurs vieille de bientôt quarante ans. Sur le premier point, la pluie n’a pas empêché le festival de réaliser un meilleur score de fréquentation que l’an passé, avec 166 000 spectateurs. La Piazza Grande a même frôlé des records avec le film de Luc Besson en ouverture et 8400 sièges occupés. A relever que le film lausannois Pause, jeudi, a établi un excellent score de 6200 entrées. «Je suis très heureux pour ce film, précisait hier Chatrian au téléphone. On a reproché à la Piazza des choix trop commerciaux. Le succès de Pause démontre qu’elle apprécie les «petits» films qui collent à l’esprit de Locarno.» La seconde galère n’a pas empêché le festival de se poursuivre normalement, malgré un communiqué colérique du directeur envers un certain jeu politico-médiatique qui, finalement, a indirectement atteint la manifestation dans son intégrité artistique. «La page est tournée», dit Carlo Chatrian. Qui préfère évoquer une édition «très forte d’un point de vue émotionnel et personnel, grâce à des invités comme Jean-Pierre Léaud, Agnès Varda, Juliette Binoche ou le chef opérateur Garrett Brown. Je me suis rendu compte à quel point la Piazza Grande est réactive et organique. L’hommage de Connie Nielsen à Robin Williams y fut bouleversant.» François Barras Rock Oz’ a davantage valu par la qualité que la quantité En diagonale Une militante s’est tue Festival Avec une soirée de plus - le désopilant Gad Elmaleh hier soir –, cette 23e édition a attiré le même nombre de spectateurs qu’en 2013 Le plus difficile, c’est toujours de confirmer. L’an dernier, Rock Oz’Arènes avait vécu ce qu’il convient d’appeler une édition idéale: record de participation avec quatre soirées sold out sur quatre, une météo estivale pour une programmation qui avait tenu toutes ses promesses. Cette année, le bilan est moins rutilant que la basse de Lemmy Kilmister, mercredi soir. VC1 Contrôle qualité Patti Smith, l’incontestable must de Rock Oz’. J. CARLUCCI A l’heure des comptes, et avant que Gad Elmaleh ne ravisse les 5200 spectateurs autorisés à assister à son one-man-show, la directrice, Charlotte Carrel, ne s’en est pas cachée. Celle qui a dû composer avec deux soirées qui ont peiné à attirer du monde (mercredi et samedi) a aussi dû faire face au désistement de dernière minute (à 16 h 30 alors que les musiciens étaient arrivés à Genève et que le sound check était réglé) de Jessie J, une des têtes d’affiche de samedi. «En vingt-trois ans de Rock Oz’, ce n’est que la deuxième annulation (ndlr: la précédente étant à mettre sur le compte d’un habitué de la chose, Pete Doherty). Après, on peut toujours émettre un doute sur la véracité de la maladie, mais on m’a clairement parlé d’une infection virale, cas qui se déclare en quelques heures…» Toujours est-il que, en cinq soirées, cette 23e édition a attiré 32 000 spectateurs (le même résultat qu’en 2013, mais avec un soir de plus), soit 3000 de moins qu’espéré. «Nous avions un mois de retard dans l’annonce de notre affiche, début mai, alors que les autres festivals romands et alémaniques avaient déjà révélé la leur», concède la directrice. Mais, qualitativement, Charlotte Carrel a fort logiquement mis en avant la qualité du spectacle de Patti Smith, «qui restera gravé dans les mémoires. Elle a offert le concert le plus vibrant et le plus généreux de cette 23e édition.» La directrice a aussi souligné le show de IAM. Samedi, les Marseillais ont fait tout ce qu’il fallait pour que le public oublie la défection de Jessie J. Les Marseillais «ont foutu le bordel» dans des arènes qui ont rappé de plaisir bien avant qu’Akhenaton et Cie ne dansent leur Mia légendaire. Il faut dire qu’en puisant largement dans L’école du micro d’argent, son chef-d’œuvre sorti en 1997 (Nés sous la même étoile, L’empire du côté obscur et, évidemment, Petit frère), IAM avait mis tous les atouts de son côté pour convaincre l’arène. Frédéric Ravussin Radio Allô Ménie ne répond plus! Pionnière de la confidence sur les ondes et militante, Ménie Grégoire est décédée dans la nuit de vendredi à samedi. Elle venait de célébrer ses 95 ans. Grande voix de RTL dans les années 1960-1970, cette journaliste diplômée en lettres et en architecture a non seulement recueilli mais aussi libéré la parole des femmes, les incitant à oser parler sexualité. «A l’époque où je faisais mon émission, disait-elle, l’homme était souvent un peu… une brute, et la femme pas du tout informée.» La ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, a rendu hommage à «cette féministe de la première heure, qui pratiquait la douceur au lieu de la confrontation.» F.M.H./AFP