mieux vivrependant lecancer
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mieux vivrependant lecancer
rosemagazine . fr psycho GRATUIT • ROSEMAGAZINE.FR ANNONCER LA MALADIE À SES PROCHES lingerie Chic ! les dessous s’adaptent sain & bon LES RECETTES GOURMANDES dE DUCASSE N°1 AUTOMNE & HIVER 2O11/2O12 4O pages pour N°1 automne & hiver 2O11/2O12 Chouchouter sa peau pendant la chimio SOINS DE SUPPORT Onco-esthétique aides sociales MIEUX VIVRE PENDANT LE CANCER 1OOO MERCIS 4 ROSE MAGAZINE ÉDITO CÉLINE LIS-RAOUX Directrice de la rédaction C’est une histoire de naissances. écouter les femmes décrire l’annonce de « leur » cancer me fait toujours penser aux mères racontant « leur » accouchement. Pas une maman qui n’ait une anecdote sur les signes avantcoureurs, l’anesthésiste qui n’arrive pas, la délivrance… L’accouchement n’est pas qu’affaire de chairs. Le cancer n’est pas qu’affaire de mort. C’est aussi une histoire. Une histoire qui nous entraîne vers de douloureux territoires que l’on pensait ne jamais devoir traverser. Une histoire qu’on aimerait savoir lire, comprendre, accompagner. Mais tout nous manque, l’abécédaire, le dictionnaire, la simple force de tourner les pages aussi, parfois. Une histoire où nous devons, pied à pied, C’ comme compétentes. Pouvoir emprunter. Pouvoir se dire « guéries » quand la société nous définit, à vie, comme « femmes à risque ». Rose est une rédaction de femmes à risque qui ont décidé de prendre un risque supplémentaire : donner naissance à un magazine. Un magazine qui vous aidera à comprendre l’histoire. Connaître l’ennemi. Recevoir les conseils des médecins, d’autres femmes. Découvrir les traitements qui allégeront la douleur. Apprendre à vous maquiller, vous habiller, vous coiffer. Potasser vos droits. Le rose est une jolie couleur. Ce n’est pas celle de la douleur. Rose est la couleur de la féminité. Mais ne vous y trompez pas. D’abord, dans Rose, il y a Ose. défendre notre place de vivantes. Défendre le corps contre les métastases, notre féminité contre les coups de boutoir des traitements, notre séduction malgré les cheveux qui tombent. Défendre nos couples minés par la peur. Défendre nos enfants. Nous battre pour être reconnues Delphine Jouandeau Merci à Anne Méaux d’avoir été notre bonne fée, d’avoir tout.DE.suite.compris.notre.projet,.puis.de.l’avoir.soutenu tout au long de sa réalisation, avec enthousiasme et générosité. Merci à Françoise Laborde, amie fidèle et conseillère avisée. Merci au groupe Lagardère qui nous a gracieusement hébergéS, A mis à notre disposition le nec plus ultra du matériel informatique et nous a offert son expertise en matière DE CONSEIL ET d’internet. Merci à Julien Balkany pour sa disponibilité et son appui. Merci à Isabelle Ealet & Philippe Altuzarra pour leur précieux soutien personnel. Merci à Kate Barry d’avoir consacré un de ses week-ends à réaliser bénévolement notre photo de couverture. Merci à Yulan Oba, mannequin en rémission d’un cancer,venue du Portugal par amitié pour devenir notre visage de Une. Merci au Dr Louis Mauriac d’avoir relu avec minutie l’ensemble du journal, intervenant toujours avec une grande gentillesse. Merci à Claire Compagnon & Françoise Pinto pour leurs conseils. Merci au groupe Geodis Calberson qui a mis à notre disposition 6 semi-remorques pour nous distribuer dans les vingt centres d’Unicancer. Merci au groupe La poste de nous distribuer gracieusement dans les hôpitaux de la FHF. Merci AU Royal Monceau Raffles Paris D’avoir accueilli notre soirée de lancement et spécialement à Laurent André d’avoir pavoisé de Rose le menu du restaurant Il Carpaccio. Merci à Any d’Avray, qui a joué avec sérieux son rôle de « relookeuse ». Merci à Hélène Darroze, d’avoir réalisé notre déjeuner de presse. MERCI au champagne Roederer et ENFIN, Merci aux agences de RP Comm santé et la Vie en Rose. ROSE MAGAZINE 5 L’ÉQUIPE ROSE CLOTILDE VIDAL GRAPHISTE CÉLINE DUFRANC RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE SANTÉ BÉATRICE LORANT RÉDACTRICE EN CHEF YULAN OBA MODÈLE CÉLINE DUPRÉ DIRECTRICE DE LA COMMUNICATION ANNE-SOPHIE DOUET REPORTER MARIE-CLAIRE BENSAADA SECRÉTAIRE DE RÉDACTION FRANÇOIS GAULON ILLUSTRATEUR NATHALIE CROQUET STYLISTE CÉLINE LIS-RAOUX DIRECTRICE DE LA RÉDACTION Ari Rossner PIERRE LEIRITZ DIRECTEUR ARTISTIQUE MAGAZINE 6 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 7 343 manifeste DEs CANCÉREUSES Pourquoi ce manifeste ? Parce que, durant la rédaction de ce magazine, nous avons rencontré de nombreuses artistes, chefs d’entreprise, femmes publiques touchées par le cancer. Elles nous ont parlé, conseillé, certaines encouragées. Mais la majorité d’entre elles a refusé d’ap‑ paraître dans nos pages. Peur de ne plus être assurées et de devoir renoncer à un tour‑ nage pour les unes, crainte de perdre leur poste pour d’autres… 343, c’est le nombre de « salopes » signataires du manifeste lancé en 1971 par le Nouvel Observateur : des femmes libres y brisaient la loi du silence et déclaraient avoir eu recours, illégalement, à l’avortement. 343 (et plus), c’est le nombre des femmes, certaines encore combattantes, d’autres déjà victorieuses, qui se mobilisent pour demander que le cancer cesse d’être cette mala‑ die infamante, aussi handicapante socialement qu’elle est éprouvante physiquement. Qui réclament des réponses sociales à un problème qui dépasse aujourd’hui le seul aspect médical. Qui veulent, elles aussi aujourd’hui, briser la loi du silence. Merci aux femmes debout dont les noms suivent (p. 10) 8 ROSE MAGAZINE Nous sommes des millions de femmes malades, en rémission ou guéries. Nous sommes des millions à avoir connu la douleur de traitements épuisants, le découragement, la peur de la mort, la solitude et parfois l’abandon. Nous sommes des survivantes et avons le droit de ne pas être considérées comme des sous-citoyennes. Nous réclamons 1 2 3 4 5 6 7 8 le droit de mener une vie sociale normale, pendant et après la maladie ; la création d’un statut de malade chronique différent de celui d’adulte handicapé, qui ne nous concerne pas ; le droit d’assurer notre santé à des prix décents ; le droit de conserver dans nos entreprises les mêmes chances de promotion et d’évolution qu’avant la maladie ; le droit d’emprunter de l’argent à une banque autrement qu’à des taux prohibitifs ; des mesures rapides et significatives pour aider les mères isolées et en situation de fragilité professionnelle, ainsi que les femmes en situation de précarité. Pour elles, nous demandons un accompagnement approprié dans le parcours de soins, des aides à domicile durant les séances de chimiothérapie, des aides ménagères dans les semaines qui suivent les traitements ; la création d’un programme cohérent et efficace dédié aux femmes malades de cancer, un programme qui soit autre chose que ce bricolage fait d’aides approximatives et inégalement réparties selon les départements, la compétence et la disponibilité des professionnels de l’aide sociale. Enfin, nous réclamons que les malades hommes bénéficient des mêmes droits que nous. Il nous faut, à présent, des réponses politiques concrètes, une mobilisation autre que compassionnelle afin que chacun puisse vivre sa vie au-delà du cancer. ROSE MAGAZINE 9 MANIFESTE DES 343 CANCÉREUSES Régine Albert, 43.ans, agent administratif, Loriol-du-Comtat / Tasnime Alibay, 39 ans, Helen Jagers, 47 ans, bénévole d’association, Saint-Leu-la-Forêt / Maryse Khoriaty, 46 ans, directrice artis‑ admi nistratrice centrale d’achats, Malakoff / Jocelyne Alin, 54 ans, cadre fonction‑ tique, Paris / Estelle Lagarde, 38 ans, architecte et artiste photographe, Paris / Martine Lambert, 52 ans, infir‑ Annie Barrois, mière, Avranches / Dominique Lamilhau, 47 ans, Carcassonne / Marie-Dominique Larrebat, 47 ans, assistante Bars, 43 ans, psychologue scolaire, Cour‑ de direction, Le Bouscat / Patricia Laye, 52 ans, secrétaire, Marseille / Estelle Lecointe, 36 ans, présidente d’En‑ palay / Sabrina Baudoin, 31 ans, sans emploi, Mauguio / Jennifer Bentorcha, 55 ans, infirmière, Maisons-Al‑ semble contre le GIST, Liffré / Olivia Lemaire, 35 ans, assistante commerciale, Montpellier / Nathalie Leprince, fort / Morganne Bello, 40 ans, créatrice de bijoux, Paris / Françoise Bettevy, 62 ans, retraitée, Pleurtuit / Chris‑ 52 ans, responsable administration des ventes, Château-Thierry / Aurèle Letricot, 41 ans, assistante qualifiée tine Beyries, 54 ans, mère au foyer, Tartas / Beate Bartès, 55 ans, traductrice et fondatrice de vivresansthyroïde. de conservation, Penne / Cécile Le Ven, 39 ans, sans emploi, Biarritz / Céline Lis-Raoux, 40 ans, journaliste, net, Léguevin / Blanche Beer-Gabel, 58 ans, docteur en chirurgie dentaire, Paris / Hélène Bénardeau, 41 ans, Paris / Marie Lombard, 35 ans, infirmière-anesthésiste, Chaux-du-Dombief / Isabelle Loumeau, 40 ans, ingé‑ professeur d’espagnol, Le Fresne-sur-Loire / Ingrid Blavec, 42 ans, cadre, Montrouge / Viviane de Bouti‑ nieur en informatique, Lyon / Yvette de Luca, 56 ans, Marseille / Ester Lynne, 39 ans, auto gny, 63 ans, attachée de presse, Paris / Véronique Braud, 55 ans, employée de maison, Nantes / Anne- entrepreneur, Paris / Muriel Malandain, 49 ans, aide-soignante, Le Havre /Odile Mallet- Marie Brossard, 74 ans, Herrlisheim / Martine Carret, 46 ans, journaliste, Pontoise / Sandrine Casper, 43 ans, Warrin, consultante en communication, Paris / Catherine Malhouitre, 49 ans, directrice Créhange / Nathalie Catalano, 39 ans, enseignante, Toulouse / Catherine Cerisey, 48 ans, créatrice de blog, artistique, Poissy / Anne Matalon, 52 ans, créatrice d’association, Paris / Sylvie Mertz, Levallois-Perret / Nathalie Chabanne, 38 ans, Lyon / Céline Chambrier, 38 ans, aide-soignante, Bordeaux / 48 ans, directrice d’une école de musique et chanteuse, Metz naire, Créteil / ÉLODIe aTTIAS, CADRe, Paris / 63 ans, mère au foyer, Loudéac / Nathalie Christiane Chapel, 70 ans, chef d’entreprise, Paris / Julianne Charles, 19 ans, en arrêt maladie, Estrées-Saint-De‑ MOQUAY-KLEIN, ARTISTE, Phoenix / nis / Catherine Chavanne, 62 ans, retraitée, Blagnac / Françoise Collard, 58 ans, employée culinaire, Le Cannet / Laetitia Nicolas, 33 ans, sans emploi, Mortcerf / Elisabeth Noël, 41 ans, conserva‑ de banque, Saint-Nicolas-de-Port / Atika Comlar, 50 ans, res‑ ponsable administrative, trice de bibliothèques, Villeurbanne / Yulan Oba, 42 ans, mannequin, Paris / Jeanne Orient, 59 ans, auteur, Courbevoie / Frédérique Corre Montagu, 46 ans, auteur et tra‑ ductrice, Fontenilles / Cé‑ Paris / Martine Orlando, 45 ans, assistante de direction, Marseille / Fara Ovoarivelo, 40 ans, agent d’accueil, Mandres-les-Roses / Isa‑ cation, Nice / Soline Perrain Canto, 31 ans, attachée de presse, Paris / Véronique Perret, 46 ans, bibliothécaire, belle Dellu, 47 ans, architecte, Bordeaux / Jans Daniele, 55 ans, employée administrative, Liège / Sylvie Darri‑ Challex / Faby Perier, auteur-interprète, Clichy / Sylvie Pierre, 47 ans, responsable de magasin, Marseille / go, 52 ans, assistante de gestion, Annecy-le-Vieux / Colette Davarend, 49 ans, intendante bateaux de croisières, Nathalie Pierre-Jean, 41 ans, coordinatrice régulation des vols, Morsang-sur-Orge / Catherine Preljocaj, 51 ans, Dinard / Marie-Hélène Dihuidy, 64 ans, radiologue, Bordeaux / Nicole Dominique, auteur et consultante, Paris / Mireille Raboteau, 41 ans, assistante administrative, Petit-Mars / Elisabeth Rampon- 57 ans, adjointe administrative, Quimper / Noëlle Dorso, 47 ans, conseil‑ lère technique petite enfance, Vannes / Céline Dufranc, 43 ans, journaliste, Paris / Ber‑ nadette Dupré, 66 ans, retraitée, Bordeaux / Marie Duriot, 39 ans, consultante en ressources humaines, Laurence Delavet, 45 ans, assistante de direction, Bordeaux / Françoise Durrieu, 47 ans, médecin, Bordeaux/ ANNIE ERNAUX, écrivain, Paris / Heidi Favier, 38 ans, assistante judiciaire, Bordeaux / Martine Federbe, 57 ans, commerçante, Valenciennes / Sylvie Fradin, 41 ans, chargée de cours, Vaux-en-Bugey / Anne-Laurence Fitère, 45 ans, journaliste, Paris / Marie-Line Foucher, 37 ans, cadre hospitalier adjoint, Varennes-sur-Seine / Patricia Garrivier, 46 ans, gestionnaire santé, Valence / Delphine Germain, 40 ans, secrétaire médicale, Armentières / Isabelle Gillard, 48 ans, enseignante, Châtillon / Elisabeth Gonzales, 46 ans, hôtesse de caisse, Solesmes / Chris‑ tine Gosse, 62 ans, employée de santé, Sigy-en-Bray / Valérie Goyer de Sennecourt-Larrieu, 47 ans, secrétaire, Bordeaux / Doris Gullung, 50 ans, aide-soignante, Colmar / Valérie Hinaux-Delaplace, 43 ans, créatrice d’entreprise, Senlis / Christiane Hoogue, 67 ans, Lembras / Juliette Ibiame, 30 ans, mère au foyer, Paris / Guillemette Jacob, 37 ans, directrice marketing, Paris / Brigitte Jacob, 69 ans, retraitée, Saint-étienne, ROSE MAGAZINE John Foley/OPALE/Jennifer Stevens/JLPPA/Louis Monier/Rue des Archives/Villard/SIPA/DR Franconville / Annick Parent, 58 ans, psychologue clinicienne, Paris / Loredana Parsan, 32 ans, assistante d’édu‑ Paris / / Mireille Paule Neyrat, 67 ans, diététicienne et auteur Darc, actrice, cile Courrier, 45 ans, infirmière, Longjumeau 10 / ROTRAUT.. Montuclard, 46 ans, chercheuse, Région parisienne / Alicia Rebenaque, 49 ans, commerciale, Barcelone / Maïté Rheims, 61 ans, retraitée, Mulhouse / Fabienne Rubert, 56 ans, directrice de communication, Paris / Anne Savigny, 30 ans, assistante administrative, Paris / Monique Sauvanet, 59 ans, retraitée, Ploermel / Michèle Scalbert, 60 ans, psychologue, Lyon / Delphine Schon, 40 ans, en arrêt maladie, Maignelay / Anne Schweighofer, 45 ans, chef de mission, Saint-Rémy-de-Provence / Catherine Stéphant, 47 ans, professeur des écoles, Chartres / Vallée Stoffler, artiste pluridisciplinaire, 47 ans, Fontenay-sous-Bois / Danièle Tirabochi, 61 ans, retraitée, Bourg-les-Valence / Florence Tirault, consultante en ressources humaines, 48 ans, Nay / Delphine Toro, 34 ans, mère au foyer, Saint-Georges-sur-Moulon / Nadine Tretout, 55 ans, animatrice territoriale, Brest / Anne-Sophie Tuszynski, 40 ans, consul‑ tante en recrutement, Antony / MARYSE VAILLANT, & AUTEUR, AZANO / PSYCHOLOGUE Luana Vartic, 44 ans, juriste, Paris / Laurence Vallée, 46 ans, aide-soignante, Saint-Vincent-de-Tyrosse / Catherine Vergnolle, 55 ans, journaliste, Sèvres / Corinne Van Loey, 66 ans, psychologue, Paris / Juliette Villa, 51 ans, commerçante, Champigny-sur-Marne / ROSE MAGAZINE 11 SOMMAIRE 5. Édito 8 manifeste des 343 cancéreuses 47 Micro-trottoir à bordeaux 13. Sommaire 18 12 ROSE MAGAZINE 26. Rose News 3O ROSE POWER 33. Rose Buzz 35. Prévention 36 52 INTERVIEW MAUD FONTENOY de I à XVI LEXIQUE du cancer marseille, des MOTS CONTRE LE MAL 44. Guide du dépistage Delphine Jouandeau Malhouitre/Nathalie Kaïd/Fred Pierre-François/Nadia Ben Challal/Thierry David/Laurent Villeret/François Gaulon ROSE FAMILY ROSE MAGAZINE 13 SOMMAIRE FACE AUX AUTRES 60. Les mots pour le dire 66. Le bêtisier 70. Les aidants BEAUTÉ 98. L’onco-esthétique entre à l’hôpital 106 avant-après 114. Interview dermato 116. Soin & maquillage 118. Interview Morganne Bello 81 SOULAGER 90. Cultiver son corps 92. Interview Véronique Jannot 121 FOCUS SEIN 122. Mastectomie 126. Chirurgie mammaire 14 ROSE MAGAZINE Getty Images/Pierre-Emmanuel Rastoin/Louison Coulom/Ari Rossner/Plainpicture/DR 59 97 ROSE MAGAZINE 15 SOMMAIRE 130 Mode 131 138 167. La vie en Rose 168 ÉVASION automne-hiver foulards & chapeaux 149 SOCIAL 150. La reprise du travail 154. Connaître ses droits 158. 50 adresses 178. Lectures 186 cahier gourmand 198. Grenade défensive 201. Répertoire 202. La petite flamme 16 ROSE MAGAZINE Getty Images/DR/Marianne Maury-Kaufmann 141. Lingerie ROSE MAGAZINE 17 ROSEFAMILY “ LE JOUR OÙ j’ai appris que j’avais un cancer ” Le jour où la terre a tremblé, c’est lorsque le médecin m’a annoncé que la biopsie était positive. Positive ? Ça sonnait bien, non ? Mais, à sa mine défaite, j’ai compris que j’avais un cancer. Je me suis tournée vers mon mari et je lui ai pris la main. J’ai pensé à nos quatre enfants qui attendaient à la maison ; à ma sœur, à mon frère et surtout à mon papa. Mon pauvre papa... Maman nous avait quittés trois semaines plus tôt, emportée par un cancer, le quatrième. Aujourd’hui, après un an de traitement, je suis officiellement « en rémission ». Mais, moi, je sais que j’ai gagné. Heidi, 37 ans PHOTOS NATHALIE KAÏD 18 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 19 ROSEFAMILY ” La terre a tremblé le jour où ma mère a évoqué, pour la première fois, l’ablation de son sein. J’ai été frappé de stupeur, incapable de réagir ni d’accepter une telle injustice. Je ne me souviens pas de ce que j’ai pu lui répondre, les mots n’avaient aucun sens… Les seins, c’est à la fois la beauté des femmes, l’amour, l’enfant qu’ils nourrissent. Lorsque ma mère a subi cette amputation, j’étais si bouleversé que j’ai nié la réalité. Refusé de l’admettre. J’ai dû me faire aider par un psychiatre pour surmonter ce traumatisme. Loïc, 44 ans avec Bernadette, 66 ans Nathalie Kaïd “ LE JOUR OÙ ma mère a subi une ablation 20 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 21 ROSEFAMILY ” Le jour où la terre a tremblé, c’est quand maman a reçu une lettre du laboratoire. Elle nous a dit que ses « marqueurs » étaient négatifs. Elle a beaucoup pleuré. Papa aussi. Mais, cette fois, c’était de bonheur. Ça voulait dire qu’elle était guérie. Gabriel, 10 ans et Ulysse, 5 ans Nathalie Kaïd “ le jour où maman a dit qu’elle é tait guérie ! ROSE MAGAZINE 23 ROSEFAMILY ” La terre a tremblé deux fois. La première, c’était il y a treize ans, quand on m’a annoncé un cancer des ganglions lymphatiques. J’avais trente ans. Le sol s’est dérobé sous mes pieds : plus que la peur de mourir, j’ai craint de ne jamais devenir mère. Alors, quand, sept ans plus tard, j’ai appris que j’attendais un enfant, la terre entière a tremblé de joie ! Je me suis autorisée à vivre, et non plus à survivre. Mon « miracle » s’appelle Paul-Loup. à présent, je me sens vraiment guérie et, chaque jour qui passe, je savoure mon bonheur. Céline, 43 ans avec Paul-Loup, 5 ans Nathalie Kaïd “ LE JOUR OÙ J’AI su QUE J’ATTENDAIS UN ENFANT 24 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 25 ROSENEWS 0 800 027 639 Allô Martine ? La pionnière de la cosmétique verte répond en direct, les lundis matin*, à toutes les questions capillaires que vous vous posez : existe-t-il des produits qui empêchent la chute, des compléments alimentaires qui limitent les dégâts, des plantes qui accélèrent la repousse ? Martine a ouvert en 2007 un corner à l’institut Gustave-Roussy. On y trouve shampooing à la pêche pour les duvets de repousse, sérum au ginseng “boosteur” de bulbe et colorations douces 100 % végétales. Le Salon vert, 28, rue Vignon, Paris IXe. *Entre 10 h 30 et 12 h 30. Un étrange canoë à tête de dragon, un équipage de femmes touchées par le cancer du sein : voilà les Dragon Ladies, pagayant deux fois par semaine sur le canal de Reims. Popularisée par une émission de Thalassa, leur équipe fait des émules : une bande de dragonnes rouennaises vient de se lancer dans la course. [email protected] Bol d’air jardins thérapeutiques 10 euros sur lisy-k.fr 26 ROSE MAGAZINE Les petits carrés de verdure fleurissent dans les hôpitaux. Jardin potager ou atelier de jardinage à l’institut Curie à Paris sur une terrasse à ciel ouvert de 1 000 m2, jardin zen et pergola à l’institut Bergonié de Bordeaux pour « checker » ses mails au soleil, sans oublier la naissance d’Océan vert au centre François-Baclesse de Caen, un jardin thérapeutique parrainé par Jacques Perrin. 01 56 24 55 00 – curie.fr 05 56 33 33 33 – bergonie.org 02 31 45 50 50 – baclesse.fr beauté Un rouge sur un air rétro Fred Pierre-François / Dorling Kindersley / Getty Images / DR lisy k a créé ce bracelet pour rose. DRAGON LADIES séduction chevelure bluffante Vous gardez quelques cheveux clairsemés malgré la chimio ? C’est bien pour le moral – mais parfois pas suffisant pour vous sentir tout à fait à l’aise. Any d’Avray a conçu un additif capillaire à la fois léger à porter, indétectable et bluffant ; les cheveux implantés à la main sur un tulle invisible se mêlent à vos mèches naturelles, fixées et protégées grâce à des mini-peignes. Idéal pour attendre en beauté la repousse ou glamouriser vos coiffures d’hiver ! à partir de 790 €. Dans les centres Any d’Avray. Renseignements : 01 42 60 21 42. Pour sa collection automnehiver, Couleur Caramel, la marque de maquillage écoresponsable, propose des rouges clins d’œil aux années trente. Des ingrédients d’origine naturelle (huiles bio d’olive, de jojoba, de pépin de raisin…) qui assurent une couleur intense et des lèvres parfaitement hydratées. 13,90 €. Magasins bio ou sur le site couleur-caramel.com ROSE MAGAZINE 27 ROSENEWS CAVIAR ROSE Pour soutenir Rose Magazine, les caviars français Sturia commercialisent cet hiver, en édition limitée, une délicieuse petite boîte noire et rose. À l’intérieur, 20 grammes de ces grains subtils à la saveur noisettée qui ont fait la réputation gastronomique de la maison girondine. Un petit délice iodé pour les tables de Noël et un joli cadeau pour les femmes malades puisqu’une partie des bénéfices nous seront reversés. 44 € la verrine de caviar Sturia Rose Magazine. 05 57 34 45 43 ou caviar-sturia.com. Beauté un soin “cocoon” Sans parabènes, phénoxyéthanol ni phtalates, avec de la Vinolevure® hydratante et des beurres ultranourrissants d’origine naturelle, ce baume est celui que réclament les peaux desséchées, celui qui lisse les rugosités et laisse un voile délicatement parfumé. à savourer matin et soir. Caudalie, Baume Gourmand Corps 22,40 €. Des clichés pour la forme Rassurée par votre dernière mammographie ? C’est bien, mais ne la rangez pas tout de suite ! Grâce à l’initiative futée des centres de fitness Curves, ce cliché devient le laissez-passer pour une année de sport à prix doux. Il vous suffit de présenter une mammo récente dans l’un des cent quarante-cinq centres de remise en forme Curves pour vous voir offrir les frais d’adhésion au club, soit 149 € euros pour une année. Belle initiative qui donne à toutes les sportives une raison supplémentaire de ne pas oublier, tous les deux ans, leur rendez-vous de dépistage. curves.fr 28 ROSE MAGAZINE VAGUE DE PRÉVENTION BLACK DEKKERS Quand une créatrice de lingerie se mêle de créer un soutien-gorge adapté aux besoins des femmes « mastectomisées », cela donne un modèle confortable (housse intérieure pour glisser une prothèse, bonnet préformé sans armatures, dos arrondi pour un meilleur soutien) mais, surtout, pile dans la tendance. Gansé d’une bordure «ton sur ton » et agrémenté de quatre fins bandeaux croisés sur l’avant de la poitrine (la « signature » de la collection d’hiver), il est disponible en France dans la boutique parisienne de Marlies Dekkers, 10, rue du Cherche-Midi, dans le vie arrondissement, au Printemps Haussmann et en boutique de lingerie dans toute la France (liste disponible sur marliesdekkers.com). 79 €. Cancer et surf ? La Keep a Breast, association créée par une surfeuse star, intervient sur les spots de glisse afin de sensibiliser les jeunes aux risques de cancer avant trente-cinq ans. Moulages de seins de championnes, clips rigolos,T-shirts glamours réalisés par la marque de sportwear Obey (35 €, bénéfices reversés à l’association), tout est bon pour la prévention ! keep-a-breast.org Pierre Barthe / DR mammo Sport La musique adoucit l’attente : sur le plateau de consultations de l’institut Gustave-Roussy de villejuif trône un piano à queue. De quoi patienter sur un air de Chopin. Malin plaisir T-SHIRT PAS BÊTE De jolis T-shirts tout doux aux.coloris.classiques.ou plus.fashion.(framboise, parme,.turquoise).qui.recèlent un soutien-gorge intégré permettant de glisser votre.prothèse.mammaire en.toute.discrétion..Cette gamme maline et gaie imaginée par Amoena se décline en tops (45 €) et robes (à partir de 75 €). Liste des dépositaires sur amoena.fr ROSE MAGAZINE 29 ROSEPOWER anne-sophie douet et céline dufranc FRANÇOISE MONTENAY Si elle n’avait pas été présidente de Chanel, Françoise Montenay aurait aimé être jardinière ! à défaut de cultiver des roses, elle fait fleurir des sourires sur le visage des femmes malades. En 1990, Françoise Montenay s’engage au CEW, une association de managers des métiers de la beauté. Au cours d’un conseil d’administration, l’une des adhérentes, visiteuse à l’institut Gustave-Roussy, rapporte le dernier souhait d’une patiente : « Je voudrais mourir belle. » Un choc et une évidence pour toutes : c’est à l’hôpital qu’elles donneront du sens à leur métier, là où les femmes en ont le plus besoin. C’est ainsi qu’une esthéticienne fait son entrée à l’IGR. Vingt ans plus tard, elles sont vingt-cinq à adoucir la vie des patientes. Mais madame LES présidentes (ainsi l’appelle son mari) ne se repose pas sur ses lauriers. Ses projets pour 2012 ? Toujours plus. « Plus de centres. Plus de soins gratuits pour des patientes toujours plus nombreuses. » cew.asso.fr 30 ROSE MAGAZINE Anne-Laurence Fitère catherine MALHOUITRE Fred Pierre-François / DR Elles ont toutes eu une idée de génie. Et la volonté de la voir aboutir. Tous les jours, ces pionnières se préoccupent d’embellir le quotidien des malades. Anne-Laurence Fitère n’est pas de celles qui renoncent aisément : sa première confrontation avec la maladie date de 2004 quand, jeune journaliste, on lui diagnostique une tumeur dans le sein. Simple « accident de parcours ». Anne-Laurence se soigne. Et reprend le cours de sa vie. En 2008, récidive. « J’ai alors compris que le cancer allait accompagner le reste de mon existence. » Autant connaître l’ennemi. Avec Claire Aubé, une collègue touchée par le fléau, Anne-Laurence crée le site « La Maison du cancer » : dans « le bureau », on traite des problèmes sociaux. Dans « la cuisine », on parle de nutrition. Dans « la chambre », de sexualité. Au « salon », on « chatte ». « Nous voulions créer un site rigoureux et non anxiogène, apporter une information de qualité aux malades et à leurs proches. Mais surtout faire tomber les tabous. » Et ils sont nombreux : maladie « honteuse », discrimination à l’embauche, taux exorbitants des crédits, précarité financière. Pousser la porte de cette maison est un acte militant. Ne vous en privez pas. lamaisonducancer.com Une pièce de lingerie peut-elle devenir un manifeste politique ? Oui. Prenez souti1, le soutien-gorge imaginé par Catherine Malhouitre, femme volontaire que deux cancers successifs n’ont pas fait plier. Une reconstruction ? Elle n’en ressent guère le besoin. Mais Catherine expérimente vite l’inconfort de sa situation : « Après l’intervention, toute opérée contrôle ses mouvements. Quand elle se penche, elle dévoile soit sa cicatrice, soit sa prothèse. » Catherine se rapproche alors d’une des dernières corsetières parisiennes, Louise Feuillère, qui conçoit une pièce soutenant le sein unique tout en dissimulant les cicatrices sous une bande qui ne baille pas. Bien plus qu’un morceau de dentelle blanche ou noire, Souti1 exprime la liberté. Liberté de s’afficher comme amazone, de faire du sport, de jeter les prothèses aux orties. Liberté de définir sa féminité à son gré. 195 €. souti1.com ROSE MAGAZINE 31 ROSEBUZZ CATHERINE CERISEY appli E-LADY Jusqu’à 2 000 internautes par jour se connectent à son blog ! Pourtant, Catherine Cerisey, joli minois et tignasse rousse, n’est pas la dernière it-girl en vogue ! Rescapée de deux tumeurs, elle a créé, il y a deux ans, « Après mon cancer du sein », l’un des blogs les plus lus sur la maladie. Elle y raconte ses « dix-huit mois d’enfer » puis sa rechute et y consigne aussi « tout ce qui existe d’intéressant, de drôle et d’utile » sur le sujet. Précis, informé et parfois amusant, débordant de petites infos futées, ce cybermag est un excellent compromis entre le sérieux des infos et la convivialité des posts. Une application iPhone pour gérer les effets secondaires du traitement ; un best of des idées reçues sur les rapports entre santé et alimentation ; le compte-rendu d’un colloque sur les relations patientsmédecins... Rien ne lui échappe. catherinecerisey.wordpress.com Suzette Delaloge 32 ROSE MAGAZINE et d’un infirmier coordinateur, à mieux faire face à l’annonce. » En six ans, 9 000 femmes ont bénéficié de ce dispositif original. Depuis septembre 2010, une deuxième journée, le mardi, est dédiée aux cas plus spécifiques relevant d’une certaine urgence (tumeurs de grande taille ou inflammatoires, femmes enceintes). La prise en charge a fait des émules, puisque de nombreux établissements du groupe Unicancer (exclusivement consacré à la lutte contre le cancer et rassemblant vingt centres en France) proposent depuis des diagnostics rapides pour accélérer la prise en charge du patient. La généralisation de ce dispositif fait partie des objectifs principaux du groupe, à l’horizon 2012. Institut Gustave-Roussy : 01 42 11 64 33 unicancer.fr Fourmi futée Fred Pierre-François / DR à quarante-deux ans, le Dr Suzette Delaloge n’est pas seulement responsable du service clinique de pathologie mammaire à l’institut Gustave-Roussy de Villejuif. En 2004, elle a créé le premier dispositif de « diagnostic en un jour » des cancers du sein. Une immense avancée pour les malades. Car avec cette formule, inspirée du modèle anglais, fini les deux ou trois semaines d’angoisse et d’attente traversées chaque année par celles à qui une anomalie a été détectée sur mammographie. Chaque lundi matin, une quarantaine de femmes peuvent ainsi voir différents médecins (chirurgiens, radiologues, oncologues) et passer plusieurs examens (mammographie, échographie, cytoponction) en un seul lieu et en une seule journée. « Celles qui présentent une lésion bénigne seront rassurées dans la journée, tandis que celles à qui on détecte un cancer trouveront rapidement une réponse thérapeutique. Le choix du traitement suit l’analyse cytologique, ce qui aide les femmes, entourées de bénévoles des “ Blouses Roses ” « Fourmi Santé », le petit site qui monte, répond à vos questions budget. Tout sur votre « reste à charge » après remboursement, sur les tarifs des spécialistes, leur « secteur » et même leur géolocalisation. Un véritable GPS de la santé. fourmisante.com Miss Lolo vous parle Un petit sein tout rose vous parle ? Ne vous inquiétez pas, il ne s’agit pas d’une blague inspirée d’un film de Woody Allen, mais d’une application gratuite (et rigolote) pour iPhone. Créée par une association malaisienne, la Breast Cancer Welfare (BCWA) et baptisée « Check Me », cette « appli » vous permet de procéder vous-même à la palpation de vos seins. Chaque mois, Miss B, gentil avatar rose (en forme de sein, donc) se manifeste sur votre téléphone. Une voix – vous avez le choix entre la petite fille, I CHEMO Il arrive souvent que plusieurs semaines s’écoulent entre deux chimiothérapies et nous oublions de noter les effets secondaires des traitements. Pas simple, ensuite, pour notre oncologue, de nous proposer des solutions appropriées ! Le laboratoire MSD-Chibret vient de créer une appli pratique qui aide les femmes à tenir le « journal » de leur chimio : on entre le nom de la molécule ingérée, les médecines complémentaires éventuelles, on choisit jour par jour les effets secondaires subis… Et on peut, durant la visite, retracer précisément le vécu médical et les événements des semaines précédentes. iChemoDiary en téléchargement gratuit sur iTunes la grand-mère distinguée et la gentille maman – vous rappelle qu’il est temps et détaille les gestes simples qui permettent un auto-examen efficace. « So cute »… mais uniquement en anglais pour le moment. applicationiphone.com/appstore/ style-de-vie/ 400450713/checkme/ Olivier Moravik/DR ROSEPOWER ROSE MAGAZINE 33 36. des mots contre le mal Au cœur des quartiers Nord de Marseille, une cancérologue, une élue et des associations éduquent les femmes au dépistage. 44. les sept gestes qui sauvent Autopalpation, examen des grains de beauté... Sept gestes essentiels pour préserver sa santé. 47. MICRO-TROTTOIR à bordeaux Votre dernier rendez-vous pour une mammographie, un frottis, une radio, une échographie... c’était quand ? 52. « Le cancer ? Une vague à surmonter » Opérée d’un cancer de l’utérus deux jours avant son tour du monde, Maud Fontenoy ne badine plus avec sa santé. 55. la recherche avance évaluation du risque de récidive d’un cancer du sein, vaccin thérapeutique contre le cancer du poumon... Plainpicture prévention ROSE MAGAZINE 3 reportage à marseille Des mots contre le mal Dans les quartiers Nord, l’éducation au dépistage se fait au plus près des femmes, dans les salons de beauté, les associations, les cercles d’amies... Avec la parole des unes pour, demain, sauver la vie des autres. texte céline lis-raoux. photos nadia ben challal. reportage à marseille Le temps d’un masque, d’une couleur... les femmes se confient. Sophie Kardous (à gauche), fondatrice d’Hygia. Cité du Malpassé Neuf heures du matin et l’air se poudre déjà de chaleur. Le Dr Carole Tarpin, oncologue au centre de cancérologie PaoliCalmettes de Marseille, rajuste ses lunettes noires et observe quelques instants le parking désert entre les barres pierreuses. Le silence est blanc. Le ciel est blanc. L’herbe fanée est blanche, les quelques voitures abandonnées sont blanches. Ce matin, tôt, a soufflé l’harmattan et les rues sont givrées de sable fin, un sucre amer venu du Sahara. C 38 ROSE MAGAZINE Carole se hâte ; ses bras nus craignent le soleil. Elle se faufile dans la cité, une envolée d’escaliers de guingois et, en haut, une terrasse, un arbre miraculeux enraciné entre les dalles, de l’ombre verte et, déjà, une cigale. Sous les frondaisons, Sophie Kardous papote avec Soraya, autour d’un café. Carole les rejoint et partage le breuvage très fort, très sucré. Au fond, une porte ouverte. Dans l’encadrement, une femme abandonne sa chevelure rougie de henné aux mains de la coiffeuse. L’air est saturé du parfum crémeux des pro- duits de beauté, un peu de musique jazzy, beaucoup de douceur… Nous sommes à Hygia, salon de beauté solidaire, un lieu réservé aux femmes au cœur d’une cité où les hommes font à ce point la loi que même les matamores de Marseille hésitent à s’y frotter, la nuit tombée. Une réputation qui n’a pas l’air d’inquiéter « Doc Carole » plus que cela. Le jeune médecin défie, chaque jour, un adversaire bien plus impres sionnant : le cancer. Elle le traque, le débusque, l’empoisonne. Elle le poursuit aussi ici, Nadia Ben Challal Le Dr Tarpin (à gauche) rencontre les habitantes du Malpassé autour d’un café. jusqu’au cœur des quartiers Nord, jusque dans les cabines de soins. Cancer et institut de beauté. Deux termes apparemment antinomiques. « Au contraire, le salon est le lieu rêvé pour faire de la prévention !, se défend Sophie Kardous. Dans le xive arrondissement de Marseille, les femmes se font très rarement dépister. Elles ne voient un médecin qu’au moment de leur grossesse ou quand elles sont déjà malades et qu’elles souffrent le martyre. Mais, là, c’est déjà trop tard. Les jeunes, en majorité mères célibataires, se débattent avec le quotidien, les enfants, le boulot. Leur santé devient vite le cadet de leurs soucis… Quant aux plus âgées, pour elles, le terme “gyné- cologue” est synonyme de vie sexuelle – et elles jugent que cela ne les concerne plus ! » Le salon est un lieu de répit, d’écoute et de discrétion dans la cité : une couleur, une manucure, un masque de beauté, ça laisse le temps de parler, baisser la garde, confier ses douleurs. « Nous parlons de santé dès que nous le pouvons. Pour Octobre Rose, nous organisons du covoiturage jusqu’au cabinet de radiologie. Mais nos clientes fantasment beaucoup : elles ont peur d’avoir mal, les plus jeunes craignent que leurs seins ne soient écrasés et ne tombent comme des gants de toilette ! Les plus âgées qui reçoivent le courrier du dépistage organisé le mettent direct à la poubelle tout simplement parce qu’elles tremblent qu’on leur trouve “quelque chose”. Elles préfèrent jouer les autruches. » « Mais il faut arrêter ces c... !, s’énerve Carole. On guérit un cancer sur deux et plus de 80 % des cancers du sein. Encore fautil les détecter à temps ! » élisabeth, qui a rendez-vous, s’est mêlée à la conversation, et acquiesce : « Oui, c’est vrai. Regardez Lynette, dans les Desperate Housewives, elle a eu un cancer et elle s’en est sortie ! Bon, c’est une série télé, mais je sais qu’il y a plein de copines que ça a fait réfléchir. » Carole s’est isolée pour parler avec Soraya. élisabeth et Sophie plaisantent, une autre cliente venue du ••• ROSE MAGAZINE 39 reportage à marseille Mme Zohra et mme Halima, des piliers de l’association Shebba. Sur le port de l’Estaque, durant une journée consacrée à la prévention. Cité de la Busserine Mais, déjà, Carole change de barre ; direction la Busserine et l’association Shebba. Shebba signifie « belle jeune fille » en arabe. Peu de jeunes filles dans le hall encombré de packs de lait (des colis de l’aide alimentaire), mais Fatima, une quadragénaire survoltée. Dans la salle des palabres, les femmes s’inquiètent de notre arri- vée, de la présence éventuelle d’un homme. Mais non, juste mademoiselle le « docteur du cancer ». Ça tombe bien, Leila, qui passait par hasard, s’inquiète. Sa fille de dix-neuf ans a trois grosses boules qui ont « poussé » sous le sein. « Mais il faut qu’elle coure me voir à l’hôpital, dès demain ! », insiste le médecin. « Elle doit y aller, la petite, c’est dangereux à son âge, ça va vite la maladie ! », renchérit madame Zohra, beau visage ridé sous des voiles multicolores. Ses deux amies, Mme Halima et Mme Yamina, acquiescent. « Moi, je file à la mammo chaque fois que je reçois le papier du dépistage. Je sais la chance qu’on a d’être suivies, en France ! », reprend Zohra. Une sonnerie de téléphone pétarade. La septuagénaire sort un iPhone dernière génération de sous ses voiles. Il est midi. Dehors, le ciel vire métallique. Port de l’Estaque Le Dr Tarpin reprend la voiture et se dirige vers l’Estaque. Ruelles équilibristes, vieilles maisons colorées, au-dessous, le port, la grande bleue et, au loin, la silhouette meringuée de Notre-Dame-de-laGarde. On trouve Marie-Hélène « Lynette, dans Desperate Housewives, 40 ROSE MAGAZINE Nadia Ben Challal quartier voisin les rejoint pour le café et rit à gorge déployée. à l’ombre de l’unique arbre du Malpassé, la cigale chantante a de la concurrence ! et Aliette sur une terrasse bleue accrochée à une maison décrépie. Un petit morceau de mer au loin. Des chaises en plastique, des gobelets avec du jus d’orange, une femme très voilée, une jeune beauté aux cheveux blonds Marilyn et à la silhouette de sirène… Tout le monde a sa place ici. Et le cancer, on en parle sans tabous. Farida, la secrétaire générale de l’association Solidarité féminine de Riaux, est morte d’un cancer du poumon. Alors promouvoir le dépistage, la nouvelle présidente prend cela comme une mission personnelle. « Ce n’est pas simple. Dans le quartier, les filles ont leur premier gamin à dix-huit ans et après elles ne voient plus un gynécologue avant quarante ans. On encourage les femmes, on organise des minibus pour la mammo, mais il y en a beaucoup qui ont telle- ment la trouille qu’elles préfèrent ne pas y aller », se désole MarieHélène. « Moi, j’en parlais beaucoup avec mes clientes parce qu’avant de prendre ma retraite j’avais une boutique de prêt-àporter, renchérit Aliette. Je me souviens d’une femme qui avait une grosseur au sein et qui ne voulait surtout pas “savoir” : la peur de se faire quitter par son mari, de traumatiser ses enfants, inquiéter sa famille… Ce sont les jeunes filles qu’il faut éduquer à la prévention. » Le lendemain, justement, c’est la grande journée autour de la prévention sur le port de l’Estaque. Marie-Hélène et Aliette installent leur stand entre la toile des pompiers et celle du club de ping-pong. Des adolescentes viennent se renseigner, inquiètes. La veille, elles ont entendu à la télévision que le vaccin contre le col de l’utérus avait provoqué de graves séquelles chez deux jeunes filles. Premières gouttes de pluie, épaisses et tièdes. Tout le monde court se réfugier au café au bord de l’eau : Azna, Sarah, Marjorie, Malou, Saliba, Marie-Hélène, Dominique, Pilar… Malou, amère, raconte son sein perdu et son mari parti dans la foulée. Dominique détaille sa semaine d’angoisses après la biopsie d’une « boule » – avérée bénigne. Les plus jeunes écoutent d’une oreille distraite. Une tumeur du sein leur paraît un risque bien lointain. En revanche, le papillomavirus les concerne, leurs médecins scolaires leur en ont parlé – Saliba s’est d’ailleurs fait vacciner l’été de ses seize ans. Maintenant, avec cette histoire de fille paralysée après le vaccin, elle « flippe à mort ». ••• a eu un cancer, et elle s’en est sortie » ROSE MAGAZINE 41 reportage à marseille « Le dépistage pour toutes » est le leitmotiv de Nora Preziosi, adjointe au maire. Le cancer du col de l’utérus et les modalités de son dépistage occupent, cet après-midi, les conversations des femmes à la cité du Vieux-Moulin. Dans un appartement prêté par l’association d’alphabétisation du quartier, un groupe de femmes se retrouve et grignote des biscuits en attendant « Nora ». Nora, c’est Mme Preziosi, l’adjointe au maire de Marseille déléguée à l’action familiale et aux droits des femmes. « Le dépistage pour toutes » est le leitmotiv de cette élue atypique, née dans les quartiers les plus durs de la ville. Un combat en hommage à sa sœur, emportée par un cancer à l’âge de trente-cinq ans. Une entreprise de longue haleine, car, si le dépistage du cancer du sein commence à entrer dans les mœurs, en revanche, le frottis, la visite chez le gynécologue génèrent encore bien des fantasmes, l’interdiction des maris, l’opprobre de la famille. « Moi, je me suis engueulée avec mon frère », rigole Amina, jeune membre de la vaste communauté comorienne de Marseille. « Je suis arrivée il n’y a pas très longtemps et j’ai voulu aller chez un gyné. Mon frère est venu me pourrir en me disant qu’il ne fallait pas que j’aille ouvrir les jambes devant je ne sais qui ! N’importe quoi. Vous savez quoi ? Les hommes sont jaloux ! Moi, dans le Coran, je n’ai lu nulle part que le prophète interdisait aux femmes d’aller faire un frottis gynécologique. Bref, je l’ai envoyé bouler, mon frère. On est en France, non ? » Nora Preziosi, arrivée pendant la conversation, claque la bise à toutes et renchérit : « T’as raison, ma chérie, on est en France. Et d’ailleurs, l’image de la France, ce n’est pas une belle femme avec un sein à l’air ? » éclat de rire généralisé. Nora « tient » son auditoire, raconte l’imam appelé en renfort à l’hôpital de la Timone (le plus grand hôpital de Marseille) pour expliquer aux femmes que, si c’est pour leur santé, elles ne doivent pas craindre de se dévoiler. Une préoccupation de chaque instant pour cette fille d’Algériens, mariée « L’image de la France, ce n’est pas 42 ROSE MAGAZINE Nadia Ben Challal Cité du Vieux-Moulin Les Comoriennes de Marseille, actives et engagées. avec un Corse et vivant à Marseille, « un résumé de la Méditerranée » ! La Méditerranée que défend Nora Presiozi, c’est celle de la diversité culturelle, comme du temps de son enfance ; « sur les parkings, dans les cages d’escalier, ça causait français, arabe, italien, espagnol… Il y avait aussi des Sénégalais, des Comoriens, c’était gai, mélangé, on n’était pas malheureux ». La Méditerranée, c’est surtout une société où la femme est au centre de la famille, une femme forte, présente, volubile. Pas une femme qui tremble devant l’homme tout- puissant. Madame l’adjointe au maire s’inquiète de l’arrivée dans les cités marseillaises, en provenance directe du bled, de toutes jeunes femmes effacées, presque transparentes. « Les hommes vont choisir des gamines voilées, dans la campagne la plus paumée. Ils les ramènent en France. Elles sont totalement soumises : exploitées par leurs maris, leurs belles-familles, elles n’ont aucun autre droit sinon de faire des enfants et de travailler d’arrache-pied. Comment les amener à s’occuper de leur santé, à respecter leur propre corps ? » Car l’enjeu du dépistage ici est politique autant que médical. Une femme qui s’inquiète de sa santé est une femme qui défend ses droits dont celui, inaliénable, à disposer de son corps. Une femme qui prend le temps de s’occuper d’elle. Une femme qui ne renonce pas devant l’accumulation des difficultés d’un quotidien souvent amer. Le dépistage, c’est, avant tout, comme le martèlent Nora Preziosi et le Dr Carole Tarpin, Sophie Kardous, Marie-Hélène et Aliette, « une affaire de respect de céline lis-raoux soi-même ». u ne belle femme avec un sein à l’air ? » ROSE MAGAZINE 43 GUIDE DU DÉPISTAGE Les sept gestes qui sau vent De l’autopalpation au frottis, en passant par l’échographie, les armes de détection massive sont nombreuses et indolores. Face au cancer, soyez agressive ! Dans le cadre du dépistage individuel, à partir de quarante ans, n’hésitez pas à faire pratiquer un examen radio tous les deux ans, couplé à une échographie dite « de référence » qui servira de base de comparaison pour la suivante. Dans le cadre du dépistage organisé, rendez-vous entre cinquante et soixante-quatorze ans, tous les deux ans également. En cas d’antécédent familial de premier degré (mère, fille, sœur ayant eu un cancer du sein), si une anomalie génétique est avérée (mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2), un dépistage annuel des seins et des ovaires est recommandé. Coût : dépistage organisé gratuit, dépistage individuel remboursé sur prescription. SEIN la santé au bout des doigts a Avec près de 50 000 nouveaux cas (+ 2 % par an), le cancer du sein touche, en France, une femme sur huit. Détecté à un stade précoce, il guérit dans plus de 80 % des cas. Une excellente raison pour ne pas négliger le dépistage, qu’il soit organisé ou individuel. Le premier geste préventif reste l’autopalpation, que l’on peut commencer dès l’âge de vingt-cinq ans, chaque mois, à la fin des règles 44 ROSE MAGAZINE (voir encadré). Mais cette bonne habitude ne doit en aucun cas se substituer à un examen régulier chez son gynécologue. L’arme absolue contre le cancer du sein demeure la mammographie, une radiographie spécialisée qui peut détecter des anomalies que l’on ne perçoit pas à l’autopalpation. Contrairement aux idées reçues, il n’existe pas d’âge minimal pour réaliser une première mammographie, et il est possible de déceler une tumeur aussi sur un sein jeune. Louison Coulom céline dufranc 1. Debout devant le miroir, les deux bras le long du corps ou les mains placées sur les hanches, observez vos seins de face puis de profil. Recommencez l’inspection en levant les bras au-dessus de la tête. Pressez doucement le mamelon et vérifiez qu’il n’y a pas d’écoulement de liquide. OVAIRE invisible péril La localisation même des ovaires rend difficile le dépistage précoce de ce cancer qui touche pas moins de 4 500 nouvelles femmes chaque année. De plus, les signes qu’il provoque sont souvent négligés ou mis trop rapidement sur le compte de l’âge : pesanteur dans le bas-ventre, gonflements, fréquentes envies d’uriner… Tous ces symptômes doivent vous inquiéter s’ils perdurent plus d’un mois et vous conduire à consulter. Votre médecin vous prescrira alors une échographie. Coût : entre 23 et 28 €, tarif d’une consultation chez votre gynécologue (sauf dépassement d’honoraires). “La mammographie peut aussi détecter des tumeurs sur un sein jeune” 2. Avec les trois doigts bien à plat, parcourez votre sein de la partie externe à la partie interne et vice versa, en sentant la glande rouler sous vos doigts. 3. Parcourez votre sein par des mouvements circulaires. 4. Parcourez votre sein de bas en haut et vice versa. Vérifiez également la zone entre le sein et l’aisselle. À la moindre anomalie, changement de consistance ou en cas de doute, n’hésitez pas à consulter votre médecin. ROSE MAGAZINE 45 GUIDE DU DÉPISTAGE FROTTIS RÉGULIERS Le cancer du col de l’utérus, causé par un virus appelé papillomavirus humain (ou HPV), le plus souvent transmis lors de rapports sexuels, touche 3 000 femmes chaque année. 90 % de ces cancers pourraient être évités grâce à un frottis régulier. Un geste simple, rapide et non douloureux : à l’aide d’une petite spatule, le gynécologue prélève des cellules à la surface du col de l’utérus, puis adresse ce prélèvement à un laboratoire pour lecture et interprétation. Mieux vaut débuter le dépistage jeune, à partir de vingt-cinq ans et jusqu’à soixante-cinq ans (le cancer du col se développe lentement, en environ douze ans). Les deux premiers frottis doivent être réalisés à un an d’intervalle, puis renouvelés tous les trois ans. Si le cancer du col de l’utérus se dépiste, il se prévient aussi, depuis quelques années : un vaccin protège contre le risque d’infection par le virus HPV. On le conseille aux jeunes filles qui n’ont pas eu de rapports sexuels ou, au plus tard, dans l’année suivant le début de leur vie sexuelle. Coût : 15,40 € pris en charge à 70 % par l’assurance maladie ; entre 23 et 28 €, dans le cadre d’une consultation chez votre gynécologue (sauf dépassement d’honoraire). POUMON NE PAS FUMER 85 % des cancers du poumon sont dus à la cigarette et ne pas fumer demeure la meilleure façon de s’en protéger. Une précaution d’autant 46 ROSE MAGAZINE plus nécessaire que le cancer du poumon, longtemps exempt de symptôme, reste difficile à diagnostiquer précocement. Si vous avez été exposée à l’amiante ou à d’autres agents chimiques cancérogènes ou si vous êtes fumeuse, en présence d’une toux persistante et anormale, votre médecin traitant pourra vous prescrire une radiographie ou un scanner thoracique. Coût : 23 € la consultation chez votre médecin traitant. PEAU SCRUTEZ VOS GRAINS DE BEAUTÉ Les cancers de la peau détiennent le triste record de la plus importante progression depuis vingt ans (+ 5 à 7 % par an). Pour limiter ce risque, évitez les expositions prolongées au soleil, scrutez vos grains de beauté et consultez régulièrement un dermatologue. L’auto-examen visuel de vos grains de beauté, essentiel à réaliser dès l’enfance et surtout si vous avez une peau claire, doit suivre la règle de « l’ABCDE ». Si l’un d’entre eux VOTRE DERNIER RENDEZ-VOUS dépistage, C’ÉTAIT QUAND ? présente une Asymétrie, des Bords irréguliers, une Couleur non homogène (un mélange de marron, noir, rouge ou blanc), un Diamètre en augmentation, une Évolution de forme de taille ou de couleur, il faut prendre un rendez-vous immédiat avec votre médecin spécialiste. Coût : entre 23 et 44 €, tarif d’une consultation chez un dermatologue (sauf dépassement d’honoraires). Un dépistage gratuit est organisé chaque année au mois de mai. Pour connaître la prochaine date, consultez le site www.syndicatdermatos.org PROPOS RECUEILLIS PAR SANDRINE DUCLOS PHOTOS THIERRY DAVID côlon TEST À RÉALISER CHEZ SOI Le cancer colorectal se développe lentement, le plus souvent à partir de petites lésions nommées « polypes » qui apparaissent sur la paroi de l’intestin. Le test Hemoccult, à réaliser simplement chez vous, permet de détecter des traces de sang dans les selles. Si une telle présence est identifiée, une coloscopie permettant de visualiser l’intérieur de l’intestin vous sera prescrite pour en déterminer l’origine. On peut ainsi déceler très tôt la présence de polypes et les retirer avant qu’ils n’évoluent en cancer. Coût : gratuit. Le test est à renouveler tous les deux ans, entre cinquante et soixante-quatorze ans. Votre caisse d’assurance maladie vous adressera une invitation à vous rendre chez votre médecin traitant qui vous remettra l’Hemoccult dans une enveloppe. Louison Coulom UTÉRUS MICRO-TROTTOIR BORDEAUX Sandrine, 40 ans, historienne de l’art « Il y a deux semaines, une mammographie. Je suis hyperattentive car, il y a un an, j’ai senti une boule dans le sein gauche. L’échographie a révélé un hamartome bénin. Une semaine plus tard, la mammo a confirmé le diagnostic. Je savais bien que je n’avais rien de grave, mais cette semaine a été la plus longue de ma vie ! Pendant l’examen, je suis tombée dans les pommes, tellement j’avais peur du résultat. Mais je m’améliore : ma dernière mammo, je l’ai faite sans m’évanouir ! La prochaine, ce sera dans deux ans, sans faute. » ROSE MAGAZINE 47 MICRO-TROTTOIR BORDEAUX 48 ROSE MAGAZINE Barbara, 34 ans, conseiller financier « Visite chez le dermatologue il y a six mois et une mammographie il y a un an. Je fais partie des groupes “à risque” : ma sœur aînée a eu un cancer du sein il y a trois ans, l’année de ses trente-six ans. Avant ça, je n’y pensais jamais, mais, depuis, je suis sérieuse, c’est frottis régulier et autopalpation attentive tous les mois. Je surveille aussi ma peau de blonde, criblée de grains de beauté. » Annick, 66 ans, sans profession « J’ai fait une mammographie il y a un an. Je suis très régulière dans les dépistages. Je n’oublie jamais les frottis : tous les deux ans, depuis que j’ai quarante-cinq ans. La première fois, c’est mon gynécologue qui m’en a parlé, mais j’y étais déjà sensibilisée par la lecture de la presse féminine. Je me dis que, s’il y a quelque chose, mieux vaut le détecter tôt et se donner le maximum de chances de guérir. J’ai beaucoup d’amies qui font l’autruche, et se disent que ça n’arrive qu’aux autres. Je trouve cela irresponsable. » Thierry David Evelyne, 57 ans, profession libérale « Mammographie, en janvier dernier. Ça fait longtemps que je me fais dépister. Précisément depuis qu’à trente ans, en vacances, j’ai palpé une boule dans mon sein. Sur le coup, pas de panique. à la fin de l’été, je suis allée voir mon gynécologue, qui m’a prescrit une mammographie avec un radiologue précis. Le radiologue n’était pas là, je suis allée chez un autre qui n’a rien trouvé. Retour chez le gynéco qui a insisté pour que j’aille me refaire un cliché avec son radiologue. Finalement, j’ai décroché un rendez-vous et bingo ! La boule se trouvait bien là. Rien de grave, mais la leçon est qu’il faut bien choisir son radiologue et ne pas hésiter à demander un deuxième avis. » Isabelle, 49 ans, hôtesse d’accueil « J’ai déjà réalisé plusieurs radios des poumons, non à cause d’une toux ou d’un râle particulier, mais par précaution. Je suis fumeuse. Et mon père, qui ne fumait pourtant que très occasionnellement, est mort du cancer du fumeur. Sinon, je fais du sport, je fais attention à ce que mange… Le dépistage des cancers fait, pour moi, partie de l’entretien général du corps. » ROSE MAGAZINE 49 MICRO-TROTTOIR BORDEAUX Valérie, 44 ans, professeur « Je suis la maman d’élisabeth. Au départ, j’avais des doutes sur ce vaccin, surtout après ces histoires d’effets secondaires. Mais quand notre généraliste a posé la question à ma fille, je ne suis pas intervenue. Je crois qu’elle a pris la bonne décision. En ce qui me concerne, mes derniers dépistages remontent à septembre 2010, un frottis et une mammographie. » 50 ROSE MAGAZINE Thierry David élisabeth, 15 ans, lycéenne « Le dépistage, pas encore, mais la prévention, à fond ! Dans quelques jours, je vais me faire vacciner contre le papillomavirus. J’en ai entendu parler dans les magazines, et à la télé. On en discute aussi avec les copines. Mon médecin m’a expliqué comment ça allait se passer ; mon angoisse principale était de savoir où on allait me vacciner, parce que je pensais que, comme elle évite le cancer du col de l’utérus, cette piqûre se faisait dans le ventre. Mais, en fait, non ! » MAUD FONTENOY “le cancer ? une vague à surmonter !” D Depuis qu’elle est maman, c’est à Marseille, au plus près de « son » élément, la mer, que Maud a choisi d’amarrer sa nouvelle vie. Celle qui traversa les océans en solitaire et sans assistance continue, contre vents et marées, à mener des combats essentiels. Préserver la planète, protéger les enfants et… la santé des femmes. Maud Fontenoy parle, sans tabou, d’un cancer qui aurait pu ruiner sa vie, ses aventures, ses espérances. Mais qu’elle a surmonté sans chavirer. « On m’a diagnostiqué un cancer du col de l’utérus en 2006. Trois 52 ROSE MAGAZINE jours avant le départ pour le tour du monde que je préparais depuis dix-huit mois. J’ai eu très peur. Depuis l’âge de quinze ans, je rêvais d’avoir un enfant ; j’allais devoir y renoncer juste parce que j’avais laissé passer un peu trop de temps depuis mon dernier frottis ? Impensable ! » à quelques jours de lever l’ancre pour une odyssée hypermédiatisée, Maud se fait opérer à La Réunion, dans le plus grand secret. « Impossible de renoncer, tout était prêt. Le bateau, l’équipe, les enfants des écoles qui devaient Pool AFP/SIPA Elle a traversé deux océans à la rame. Bouclé un tour du monde en solitaire. S’est battue contre les Quarantièmes rugissants. A vaincu un cancer à vingt-neuf ans. Et fait un enfant dans la foulée. La navigatrice ne craint ni les défis, ni les tempêtes... CÉLINE DUFRANC suivre mon périple. J’ai choisi de ne rien dire car les partenaires financiers m’auraient lâchée s’ils l’avaient appris. » À peine sortie de l’hôpital, encore sous le coup de l’anesthésie générale, la jeune femme se prête au jeu d’une séance photos sur le bateau. Et malgré les mises en garde du chirurgien sur le risque d’hémorragie, elle prend le départ. « Cela a été un peu difficile, les premiers jours, à cause des saignements. Mais j’ai pris ce cancer comme une étape de ma vie. Une vague à surmonter. Rien de plus. J’ai fait ce qu’il y avait à faire. “Renoncer à mes rêves parce que j’avais trop tardé entre deux frottis ? Impensable !” Pour ne pas subir, il faut agir. Se confronter aux choses. Prendre des risques. Faire barrage à la peur et aux émotions négatives. » Ce qui l’a aidée à tenir, seule sur son bateau cinq mois durant ? Une volonté farouche de boucler ce tour du monde, bien sûr, mais surtout l’espoir ! « Celui d’avoir un jour un enfant. Au plus fort des tempêtes, quand la peur de mourir me hantait, voilà ce qui m’a bien des fois reliée à la vie. » Le rêve, elle le réalisera deux ans plus tard. Mahé naît le 30 juin 2008. « Par césarienne, parce que mon col ••• ROSE MAGAZINE 53 MAUD FONTENOY LA RECHERCHE AVANCE DE l’espoir POUR les malades avait été raccourci par l’opération que j’avais subie. Mon fils est ma plus belle victoire. » Désormais, pour ne pas faillir à son rôle de mère, Maud ne badine plus avec sa santé. E Entre 10 et 25 % de femmes soignées pour un cancer du sein sont, aujourd’hui, victimes d’une récidive. Actuellement, deux indicateurs permettent de savoir si le traitement initial a été efficace. Le premier, dit « pathologique », consiste, après la chimiothérapie et avant la chirurgie, à prélever des cellules afin de dépister la présence de cellules tumorales et observer leur aspect. Le second indicateur s’intéresse au système immunitaire de la patiente. Ces deux éléments ne permettent pas, à eux seuls, de déterminer le risque de rechute. L’équipe du Dr Ghiringhelli, à Dijon, a eu l’idée de les combiner de façon rétrospective à partir de l’analyse d’archives de suivis de malades. Résultat : en « couplant » les scores « pathologique » et « immunologique », il serait possible d’obtenir un outil prédictif. Les patientes probablement guéries suivraient alors une surveillance minime ; celles à risque élevé bénéficieraient d’un suivi accru ; pour les patientes intermédiaires, une surveillance classique. « L’utilisation de ce score "PathImm" doit être évaluée chez des patientes en traitement afin d’être validée », précise Grégoire Mignot, de l’équipe du Dr Ghiringhelli (unité Inserm 866), et de permettre de vivre plus sereinement les suites de l’opération du sein. La peur ne doit pas être une excuse Impossible de zapper la case dépistage ! 54 ROSE MAGAZINE faisait la classe à son équipage de moussaillons, sur le pont du bateau. L’arrivée sur la terre ferme à seize ans, le temps de passer son bac et de ressentir, à nouveau, l’appel du grand large. L’abandon, sans regret, de son emploi dans une agence immobilière, pour devenir l’incroyable navigatrice que l’on sait. Convaincue que la mer fortifie l’âme et la santé, Maud pousse ces petits patients à « aller au bout de leurs rêves. à ne pas renoncer. Je leur répète de ne laisser personne leur dire que c’est impossible. En cela, la mer est un merveilleux défi, qui leur donne confiance en eux. Sur un bateau, on ne peut pas rester les bras croisés ! Tout le monde travaille ! Et après l’effort, le réconfort : le spectacle des dauphins et des baleines les passionne ! L’espace d’un moment, ils pensent à autre chose, et se sentent comme tous les enfants de leur âge. Juste des enfants ». écrite en lettres géantes sur la voile de son bateau, cette phrase inspirée de SaintExupéry : « Fais de ta vie un rêve et d’un rêve une réalité. » céline dufranc À lire : Mon Bébé écolo et Ma Maison écolo, éd. du Chêne, et Le Sel de la vie , J’ai Lu. Pour signer la charte pour la protection des océans: maudfontenoyfondation.com chimio pendant la grossesse Laurent Villeret/Picture Tank « Depuis cette expérience, impossible de “zapper” la case prévention et dépistage. La peur ou le manque de temps ne doivent pas être une excuse pour remettre son frottis à plus tard ! Nous avons l’immense chance en France de pouvoir éviter ce type de cancer, grâce au vaccin et à un examen régulier. Ce qui est loin d’être le cas dans tous les pays que j’ai pu traverser ! Alors ne négligeons pas cette opportunité et, surtout, cessons de nous plaindre. Il y a des maladies, hélas, pour lesquelles il n’existe ni vaccin, ni remède ! » Pour partager un peu de sa contagieuse soif de vie et de bonheur, Maud Fontenoy embarque régulièrement sur son monocoque des enfants malades de cancer. Elle leur raconte la planète, les océans. Et la navigatrice raconte bien ! Son enfance sur une goélette ; la famille qui traversait les mers ; elle, fillette, et ses deux frères, vivant nus toute l’année, se nourrissant de poulpes, poissons-perroquets ou langoustes… Sa maman qui Soutenus par l’ARC, des chercheurs travaillent à améliorer le quotidien et les chances de guérison des patients. sarah laîné Environ mille femmes enceintes sont touchées chaque année par un cancer. Pour augmenter leurs chances de guérison, le réseau Calg (Cancers associés à la grossesse) centralise les données sur l’efficacité et la relative innocuité pour le fœtus des thérapeutiques utilisées », explique Paul Berveiller, gynécologue et doctorant à l’Inserm. Certaines chimiothérapies ont prouvé leur efficacité et leur relative sécurité pour le bébé. En 2010, l’ARC a financé près de 450 projets pour un montant de 31 millions d’euros Ultrasons focalisés Actuellement, seuls 10 à 20 % des patients atteints de métastases au foie peuvent bénéficier d’un traitement chirurgical, les atteintes étant souvent trop nombreuses ou mal localisées. L’équipe du Pr Rivoire, chirurgien au centre Léon-Bérard de Lyon, a mis au point une nouvelle technique de destruction par ultrasons focalisés. Si elle est validée et étendue (probablement courant 2013), cette technique pourra doubler le nombre de patients opérables. Vaccin thérapeutique Afin de lutter contre le cancer du poumon, le plus meurtrier dans le monde, des chercheurs tentent de mettre au point un vaccin thérapeutique. « Comme les cellules tumorales déjouent les défenses naturelles de l’organisme, le but d’un tel vaccin est d’induire une réponse antitumorale spécifique », explique Fathia Mami-Chouaib, chercheuse à l’institut Gustave-Roussy. Son équipe, subventionnée par l’ARC depuis dix ans, a identifié des antigènes liés à certains cancers du poumon, justement reconnus par le système immunitaire. Des études précliniques prometteuses sont en cours et permettront peut-être de développer un vaccin curatif, en complément de la chimiothérapie. arc-cancer.net ROSE MAGAZINE 55 II. bien préparer son pARCOURS DE SOINS IV. QU’est-ce qu’un cancer ? VI. qu’est-ce que la RADIOTHéRAPIE ? VIII. qu’est-ce quE L’oncoCHIRURGIE ? X. qu’est-ce que la CHIMIOTHéRAPIE ? XII. Qu’est-ce qu’un eSSAI CLINIQUE ? XIV. qu’est-ce qu’une THéRAPIE CIBLée ? XVI. qu’est-ce quE L’hormonothérapie ? LEXI QUE céline dufranc dr louis mauriac ILLUSTRATIONS FRANÇOIS GAULON DU CANCER bien préparer SON Parcours de Soins une prise en charge de qualité Tout malade peut choisir où il désire être soigné : centre hospitalier universitaire, centre de lutte contre le cancer, hôpital privé… Le médecin qui a posé votre diagnostic a dû vous proposer un lieu ; cela ne vous empêche pas de vous informer sur l’établissement recommandé, en demandant notamment combien de patients sont traités pour la même pathologie que la vôtre. Tout comme vous choisirez votre centre de soins, vous pouvez également choisir votre chirurgien, votre radiothérapeute ou votre oncologue. Une relation de confiance avec l’équipe médicale est essentielle. Savoir quels sont LES établissements autorisés à TRAITER un cancer Actuellement, vous avez l’assurance d’être prise en charge dans un établissement autorisé à pratiquer la cancérologie. Un centre de soins doit justifier d’une activité minimale annuelle de 30 interventions pour la chirurgie des cancers du sein, digestifs, urologiques et thoraciques, et 20 interventions pour la chirurgie des cancers gynécologiques, ORL et maxillo-faciaux. En matière de radiothérapie, les centres devront traiter au moins 600 patients par an, tandis qu’en chimiothérapie le seuil minimal est fixé à 80 patients. Pour connaître la liste des 881 établissements : http://www.e-cancer.fr/soins/ offre-de-soins-hospitaliere-en-cancerologie/ cartographie II ROSE MAGAZINE On vous propose un traitement. Vous souhaitez y réfléchir et recueillir un second avis ? C’est légitime. Votre prise en charge a déjà été décidée durant une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP), mais, si vous en faites la demande, votre dossier pourra être transmis à la personne de votre choix. Assurez-vous, si vous désirez recevoir l’avis d’une autre équipe, que deux ou trois semaines de délai supplémentaire ne compromettront pas la qualité de votre prise en charge. L’organisation des soins en France promet une prise en charge optimale. Vous êtes en droit : x de bénéficier du dispositif d’annonce ; une « infirmière d’annonce » cernera vos besoins et vous proposera une palette de soins dans différents domaines (psychologique, physique, social) ; x de bénéficier d’une concertation pluridisciplinaire, qui garantit que le traitement proposé est bien le fruit d’une réflexion entre plusieurs professionnels de santé (oncologue, médecin spécialiste d’organe, chirurgien, radiothérapeute) ; COMPRENDRE CE QUE DIT MON MÉDECIN x de recevoir un programme personnalisé de soins (PPS), qui détaille les traitements proposés et leur calendrier. Il comporte également un volet social afin de repérer vos difficultés et proposer un accompagnement. Ce PPS sera relayé, une fois la phase des traitements terminée, par le « programme personnalisé de l’aprèscancer » ; Ne vous affolez pas si vous ne comprenez pas le jargon médical ! En cancéro, la « perf » n’a rien à voir avec une performance sportive. Le « protocole » ne fait pas référence aux bonnes manières mais à un document médical planifiant vos traitements. Être branchée ne signifie pas être à la mode mais sous « perf » (perfusion, donc). Les « marqueurs » ne sont pas des stylos, mais des substances produites par les cellules cancéreuses. Pour vous y retrouver dans le monde étrange de l’oncologie : Le Cancer pour les nuls, éd. First, Cancer, toutes vos questions, toutes les réponses, éd. Marabout, ainsi que les brochures de l’ARC et de la Ligue contre le cancer à télécharger sur arc-cancer.net et ligue-cancer.net. x d’être informée des référentiels de bonne pratique clinique, qui indiquent le meilleur traitement pour une maladie donnée, à un stade donné ; x d’avoir accès à des soins « de support » (c’est-à-dire la prise en charge de la douleur, le suivi nutritionnel, psychologique, l’accès aux services sociaux et à différents types d’activité, de la sophrologie à l’auriculothérapie en passant par le yoga) ; x d’avoir accès aux traitements innovants et aux essais cliniques, en fonction de votre situation. François Gaulon/DR Choisir l’endroit où je vais être soignée un double avis Pr Véronique Trillet-Lenoir Chef du service d’oncologie médicale aux Hospices civils de Lyon, présidente du Conseil national de cancérologie. Dr CHRISTINE BARA Directrice des soins et de la vie des malades à l’Institut national du cancer. ROSE MAGAZINE III QU’EST-CE QU’UN CANCER ? Comment cela arrive ? L’histoire de chaque cancer est différente. Il peut évoluer sur de nombreuses années et, à un moment donné, se développer rapidement. Pour commencer, la multiplication de la cellule à l’origine du cancer donne naissance à un amas de cellules qui comprime ses voisines, jusqu’à les détruire. Tant qu’elles restent confinées dans le tissu où elles sont nées, le cancer est dit in situ. Si de nouvelles mutations leur permettent d’envahir le tissu environnant, on parle de cancer infiltrant. Quand les cellules cancéreuses se glissent dans la circulation sanguine ou lymphatique, elles peuvent se disséminer dans d’autres parties de l’organisme, parfois très loin de la tumeur d’origine. On parle alors de métastases. Où la maladie trouve-t-elle son origine ? La maladie est due à plusieurs facteurs. C’est un « accident » causé par des anomalies qui naissent sous l’influence de facteurs cancérigènes, comme par exemple une irradiation, le soleil, les hormones, des substances chimiques présentes dans les aliments, dans l’air et la cigarette… Dans 5 à 8 % des cas, une prédisposition génétique IV ROSE MAGAZINE Est-ce que le cancer « s’attrape » ? altère la mécanique normale des cellules et les empêche de fonctionner harmonieusement (c’est notamment le cas du cancer du sein et des gènes BCRA1 et BCRA2). Non, les cancers ne « s’attrapent » pas, à l’exception de celui du col de l’utérus, causé par la transmission du virus HPV, et de certains cancers du foie, causés par les virus B et C de l’hépatite, ou de l’estomac, causés par une bactérie. Comment parvient-on au diagnostic ? Ce n’est jamais facile car de nombreux signes peuvent annoncer un cancer et, à l’inverse, il peut être totalement silencieux, sans aucun symptôme. Il est donc conseillé de consulter dès qu’une anomalie apparaît (boule dans un sein, grain de beauté qui change d’aspect, troubles digestifs, urinaires…). Le médecin dispose d’examens divers : analyses de sang ou d’urines pour rechercher des substances liées à la présence d’une tumeur, mammographie (radiographie des seins), échographie (examen par faisceau d’ultrasons), scanner (examen par émission d’un faisceau de rayons X), IRM (imagerie par résonance magnétique), endoscopie (pour explorer les cavités du corps à l’aide d’une sonde)… La seule certitude de diagnostic est la mise en évidence de cellules cancéreuses au microscope après prélèvement sur la lésion. Le stress peut-il provoquer un cancer ? Comment détermine-t-on la gravité du cancer ? Peut-on guérir d’un cancer ? Une fois le diagnostic posé, un système de gradation médicale permet d’évaluer le stade de la maladie en fonction de la taille de la tumeur, de l’extension ou pas aux ganglions et de la présence ou non de métastases. Actuellement, on étudie de plus en plus le comportement biologique de la tumeur, sa « carte d’identité », en regardant notamment si l’on est en présence de récepteurs (œstrogènes, progestérone, HER2 pour le cancer du sein) ou de néovaisseaux, ce qui permettra un traitement personnalisé. Non. Jusqu’à présent, les études scientifiques n’ont pas retrouvé de lien entre stress et survenue d’un cancer. En revanche, le stress n’améliore pas la combativité pour lutter contre la maladie ou gérer au mieux les traitements. à quoi sont dues les rechutes ? Parfois, les traitements ne parviennent pas à tuer la dernière cellule cancéreuse, restée « en sommeil » et qui va se réveiller. C’est totalement imprévisible. Une fois le traitement terminé, il faut se tenir à une surveillance très rigoureuse (examens cliniques, radios…) afin de dépister d’éventuelles rechutes : d’abord tous les trois mois, puis une fois par an, puis tous les deux ans... François Gaulon/DR Dr Orlane Clouet. C’est une maladie née d’une anomalie, un dysfonctionnement qui touche certaines cellules de notre organisme. Celles-ci se multiplient de manière anarchique et prolifèrent, d’abord localement, créant une tumeur, puis dans le tissu avoisinant et enfin, parfois, à distance. Presque tous les tissus de notre organisme peuvent être affectés par ce dérèglement dont les causes, les évolutions et les conséquences sont très diverses. On parle « des » cancers et non « du » cancer car il en existe plus d’une centaine, tous différents selon l’organe qui les abrite, le type de cellules impliquées, le degré d’évolution de la maladie et le profil de la personne qui en est atteinte. Le mot de guérison est employé avec prudence, on lui préfère la notion un peu barbare de « taux de survie relative à cinq ans ». Les statisticiens estiment en effet qu’un patient ayant eu un cancer a des chances élevées d’être « guéri » lorsque, cinq ans après le diagnostic, il retrouve la même espérance de vie que l’ensemble de la population d’âge et de sexe équivalents n’ayant pas eu de cancer. Mais prononcer le terme « guérison », pour certains cancers de bon pronostic, reste important car cela permet à la patiente de se reconstruire. Dr ORLANE CLOUET Oncologue à l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye, à Poissy. ROSE MAGAZINE V QU’EST-CE QUe la RADIOTHÉRAPIE ? Comment ça marche ? Vous êtes isolée dans une salle, la partie du corps à traiter est dénudée. Des rayons X, des électrons ou plus rarement des protons sont émis par un appareil à accélérateur de particules vers la zone à traiter. Les cellules cancéreuses, ne sachant pas réparer les lésions causées par la radiothérapie, meurent – alors que les cellules saines ont la capacité de se réparer. Est-ce douloureux ? Non. Le patient ne sent rien durant le traitement. La radiothérapie est-elle fréquente dans le traitement de cancers ? Oui, on y a recours dans 70 % des cas. C’est un traitement local soit exclusif, soit qui vient en complément de la chirurgie. L’usage de la radiothérapie fait baisser de 70 à 80 % le taux de récidive locale dans le cancer du sein, par exemple. À quel moment du traitement propose-t-on la radiothérapie ? C’est variable. Elle peut vous être prescrite comme traitement curatif (pour détruire la tumeur lorsque celle-ci n’est pas opérable), comme traitement adjuvant (pour détruire la maladie microscopique – non détectable), comme traitement palliatif (pour atténuer la douleur). VI ROSE MAGAZINE Ils sont variables selon les patients, le volume du tissu irradié, la localisation de la tumeur et la dose de rayons administrés. Ils peuvent être immédiats ou survenir tardivement. Certains ne ressentiront aucun effet secondaire alors que, chez d’autres, une rougeur plus ou moins intense de la peau traitée pourra apparaître au bout de trois ou quatre semaines. Les autres effets secondaires varient en fonction de la zone irradiée : maux de tête ou vomissements et perte de cheveux si l’on cible le crâne, difficultés à avaler pour la gorge et le cou, douleurs de l’œsophage s’il s’agit du thorax, nausées, diarrhées ou douleurs abdominales pour l’abdomen. Comment être sûr que les rayons ciblent le « bon endroit » ? Grâce au centrage, qui définit la zone à irradier. Une fois la patiente installée sur une table, le radiothérapeute délimite les faisceaux d’irradiation, c’est-à-dire les zones par lesquelles les rayons vont pénétrer, en dessinant des points de tatouage sur votre peau. Ensuite, on réalise des radiographies ainsi que des relevés de contour sur une feuille de papier (radiothérapie 2D) ou par coupes avec le scanner (radiothérapie 3D). Comment détermine-t-on la dose de rayons ? Y a-t-il des solutions efficaces contre ces effets secondaires ? Grâce à la dosimétrie, les médecins radiothérapeutes et les physiciens déterminent exactement la dose totale qui est nécessaire dans la région à traiter. L’administration des rayons est effectuée à une dose fractionnée et identique, chaque jour, pour laisser le temps aux cellules saines de se réparer entre deux séances. Avant tout, il ne faut rien appliquer sans avis médical. Pour protéger la peau, évitez le soleil ou le port de tissu synthétique sur la zone traitée ainsi que parfums, déodorants ou cosmétiques. En cas d’irradiation de la bouche, votre dentiste vous conseillera le port de gouttières fluorées et des bains de bouche fluorés. En fonction des symptômes, on pourra adapter votre régime alimentaire (éviter les mets acides, épicés ainsi que l’alcool et le tabac, faire des repas légers et fractionnés) et vous prescrire des antiacides, des médicaments pour éviter de vomir ou des antidiarrhéiques. Combien faut-il de séances pour un traitement complet ? En règle générale, le traitement dure de cinq à sept semaines à raison de quatre à cinq séances par semaine (de deux à trois minutes chacune). Le nombre de séances peut être beaucoup plus restreint si la radiothérapie est condensée (de fortes doses en une semaine). La date précise de fin de traitement ne peut être donnée à l’avance : elle dépend de la réaction de chacune. Ce traitement ne rend-il pas le patient « radioactif » ? Non ! La radiothérapie ne rend pas radioactif. Seule la zone malade est irradiée, les rayons traversent le corps mais ne restent pas à l’intérieur. Il n’y a donc pas de danger pour l’entourage. Qu’est-ce que la curiethérapie ? François Gaulon/DR Dr Céline Bourgier. C’est un traitement locorégional du cancer qui vise à détruire les cellules malades en envoyant des rayonnements ionisants sur la tumeur, tout en préservant les cellules saines. Quels sont les effets secondaires de la radiothérapie ? C’est une radiothérapie par voie interne consistant à implanter, durant trois à cinq jours, une source radioactive (sous forme de billes, de grains ou de fils) directement dans la zone à traiter (utérus, bouche, lèvre, sein). Pendant la période de traitement, le patient est isolé dans une chambre protégée par des parois de plomb. La source étant retirée lorsque l’on quitte l’hôpital, plus aucune radioactivité n’est libérée. Dr CÉLINE BOURGIER Chef du service de radiothérapie à l’institut Gustave-Roussy de Villejuif. ROSE MAGAZINE VII qu’est-ce que L’oncochirurgie ? Quel intérêt pour le patient ? La chirurgie permet d’enlever la tumeur et de reconstruire en même temps, par exemple pour la chirurgie du sein, mais aussi de préserver les fonctions d’un organe, comme dans le cancer colorectal en reconnectant l’intestin avec l’anus, ce qui est évite aux patients d’avoir une poche sur le ventre. Une opération suffit-elle à nous guérir ? Oui pour certains cancers diagnostiqués précocement ou pour des lésions précancéreuses comme un polype du côlon, une tumeur de la peau, un cancer débutant du sein… Pourquoi associe-t-on parfois la chirurgie à d’autres traitements ? En cas de tumeur trop volumineuse, on prescrit d’abord une chimiothérapie, pour réduire la taille de la tumeur et permettre une ablation moins agressive, voire la conservation de l’organe. On peut également associer la chirurgie VIII ROSE MAGAZINE La radiothérapie peropératoire à de la radiothérapie, pour détruire les foyers cancéreux disséminés dans l’organe, ou à une chimiothérapie, pour éviter le risque de récidive et de métastases. Quels ont été les progrès récents ? Aujourd’hui, on essaie au maximum de conserver l’organe ; la chirurgie devient un geste intégré dans la dynamique des soins. Jadis, la mastectomie totale (ablation du sein) était courante ; aujourd’hui, dans 70 % des cas, on se contente d’extraire la tumeur (tumorectomie). Pour certains cancers, on bénéficie de la technique du ganglion sentinelle (premier relais ganglionnaire qui draine la tumeur), repéré par coloration et radioactivité puis retiré au début de l’opération. S’il est sain, ce qui reste le cas le plus fréquent pour des cancers précoces, on conserve les ganglions et on évite le curage axillaire (ablation des ganglions sous les aisselles) qui entraîne un risque de « gros bras » et de limitation des mouvements de l’épaule. Autre progrès, la cœlioscopie, une chirurgie mini-invasive qui permet d’opérer par de petits orifices guidés par une caméra. Enfin, la radiothérapie peropératoire offre la possibilité d’installer tout de suite, dans la cavité ménagée par la tumorectomie, un appareil délivrant des rayons (voir encadré), ce qui épargne au patient des séances de radiothérapie postopératoire. Dr Françoise Soffray Chirurgien gynécologueobstétricienne à la clinique Saint-Martin de Pessac. François Gaulon/DR Dr Françoise Soffray. Quatre personnes sur cinq atteintes de cancer ont recours à la chirurgie, l’option la plus simple pour retirer la tumeur ou l’organe atteint et les ganglions lymphatiques voisins. On enlève également, le plus souvent, une marge de tissu sain autour de la tumeur (de quelques millimètres à quelques centimètres), pour ne laisser localement aucune cellule cancéreuse et diminuer le risque de récidive. Dans certains cas, l’organe ou le curage sont immédiatement analysés au microscope pour savoir si les limites de l’échantillon ou les ganglions sont sains. Si ce n’est pas le cas, l’opération devra être étendue. Dr Hubert Crouet Chirurgien gynécologue au centre François-Baclesse de Caen. Proposée depuis 2009, cette nouvelle approche thérapeutique contre le risque de récidive du cancer du sein permet d’effectuer chez certaines patientes un traitement de radiothérapie en une seule fois, en même temps que la chirurgie. Plutôt que d’irradier l’ensemble du sein pendant plusieurs semaines, la radiothérapie peropératoire consiste à cibler le site de la tumeur juste après son ablation. Dans la pratique, les chirurgiens ôtent la tumeur puis irradient la cavité laissée par celle-ci, grâce à un accélérateur d’électrons. Une seule séance est nécessaire. Dispensée dans quatre centres en France, cette radiothérapie peropératoire n’est aujourd’hui réservée qu’à certaines patientes, âgées de plus de 60 ans et ayant un cancer du sein de «bon pronostic». Problème : la technique aujourd’hui employée ne permet d’avoir accès qu’à une zone limitée à quelques centimètres de profondeur. Pour accéder à des profondeurs plus impor tantes, les machines actuelles deviendraient trop encombrantes au regard des dimensions des salles d’opération. « En collaboration avec des collègues italiens et ceux du plateau de Saclay, nous avons montré qu’il est possible de produire une source d’électrons par laser ayant des caractéristiques très semblables, mais permettant d’utiliser de plus hautes énergies avec un encombrement réduit », explique Sandrine Dobosz Dufrénoy, chercheuse au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Des recherches prometteuses, financées par l’Association pour la Recherche sur le Cancer (ARC) et qui pourraient aboutir à une alternative potentiellement plus compacte et moins onéreuse que les machines traditionnelles. sarah lainé ROSE MAGAZINE IX QU’EST-CE QUe la CHIMIOTHÉRAPIE ? Quand y a-t-on recours ? Elle est proposée soit avant une chirurgie – chimiothérapie néo-adjuvante – afin de diminuer la taille de la tumeur et faciliter l’opération, soit après une chirurgie – chimiothérapie adjuvante – pour diminuer les risques que le cancer ne revienne localement ou à distance, soit pour traiter des métastases. Est-ce un traitement sur mesure ? Oui, car les médicaments utilisés sont choisis en fonction de votre type de tumeur, de sa localisation, du stade de développement des cellules cancéreuses et de votre état général. Votre proto cole de chimiothérapie pourra comporter un ou plusieurs médicaments, ayant des actions différentes sur le cycle cellulaire. Ces médicaments sont issus de végétaux ou produits par synthèse. Quand plusieurs protocoles sont possibles, ils vous sont expliqués, et le choix est fait avec vous. Combien de temps cela dure-t-il ? La durée de la cure est très variable. Le rythme des administrations dépend du protocole proposé et de la raison pour laquelle elle est administrée. En prévention du risque de récidive métastatique, un traitement dure en moyenne quatre à six mois (une cure toutes les trois semaines pour laisser le temps à l’organisme de récupérer). Dans certains protocoles, les chimiothérapies peuvent s’administrer toutes les semaines. La durée n’est pas proportionnelle à la gravité de la maladie. X ROSE MAGAZINE Quelles précautions sont à prendre avant le traitement ? Comment lutter contre ces effets indésirables ? Une prise de sang vous renseignera sur le taux de globules blancs, rouges et de plaquettes mais aussi sur le fonctionnement d’organes essentiels pour le métabolisme, comme le foie et le rein. Parfois, une échographie, une radiographie des poumons, une échographie ou une scintigraphie cardiaque sera réalisée avant votre première cure. Il est important d’agir de manière préventive et d’aborder le sujet avec votre équipe, qui propo sera une prise en charge spécifique. D’abord, pensez à consulter un dentiste. Il établira un bilan global et il vous prescrira des bains de bouche afin d’éviter les aphtes et les mucites. Pour limiter la chute des cheveux, qui n’est pas systématique, le casque réfrigérant est efficace à condition qu’il soit changé régulièrement (environ toutes les vingt minutes). Pour se préparer à la chute, sachez qu’elle survient une quinzaine de jours après le début du traitement et qu’elle peut concerner les cils, les sourcils et les poils. Contre les nausées et les vomissements, on dispose de médicaments prescrits avant la perfusion, voire d’anxiolytiques si vous êtes angoissée. On parvient ainsi à soulager 80 % des patients. On peut prévenir la constipation et la diarrhée grâce à des règles diététiques et à des médicaments. Contre la fatigue et les modifications de la formule sanguine, il existe des facteurs de croissance, sortes d’hormones de la moelle osseuse qui l’aident à se reproduire plus vite. Comment sont administrés les médicaments de chimiothérapie ? La plupart des médicaments se présentent sous forme liquide injectée dans les veines. La perfusion peut durer de trente minutes à trois heures, durant lesquelles vous serez installée dans un fauteuil ou dans un lit. Pour préserver vos veines, on pourra vous implanter sous anesthésie locale, dans une veine du cou ou du haut du thorax, un cathéter, ou chambre d’injection implantable. 75 % des chimiothérapies sont administrées en hôpital de jour, ce qui permet de rentrer ensuite chez soi. Selon les médicaments, elles peuvent aussi être prises sous forme de comprimés, à domicile, sous la surveillance d’une infirmière, ou, plus rarement, par injection intramusculaire. Les médecines complémentaires aident-elles à mieux supporter ce traitement ? Pourquoi ce traitement provoquet-il des effets secondaires ? Parce qu’il ne sait pas faire la différence entre une « bonne » et une « mauvaise» cellule. Les produits, très actifs, agissent sur les cellules cancéreuses mais également sur celles, normales, de la peau, des cheveux, de la moelle osseuse. D’où la perte des cheveux, les nausées… Ces effets secondaires existent, mais ne sont pas systématiques (tout dépend du médicament et de la tolérance de chacune), et surtout restent temporaires. François Gaulon/DR Dr Florian Scotté. C’est un traitement médicamenteux dont l’objectif est de détruire les cellules cancéreuses. Selon les molécules utilisées, elle peut empêcher la division cellulaire ou bloquer la croissance des cellules. Oui, mais en aucun cas elles ne remplacent les traitements conventionnels. L’acupuncture, l’auriculothérapie, l’homéopathie, la sophrologie, l’hypnose, la réflexologie plantaire agissent efficacement contre les nausées, certains types de douleurs, l’anxiété, la fatigue... Ces thérapies existent dans de nombreux services pour vous aider à mieux supporter les symptômes de la maladie et les effets secondaires des traitements. Dr FLORIAN SCOTTé Oncologue à l’Hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris. ROSE MAGAZINE XI QU’EST-CE QU’un ESSAI CLINIQUE ? si elle est supportée chez l’homme. On administre de toutes petites doses, que l’on augmente progressivement selon les réactions des patients. Ces essais de phase « une » s’adressent à des malades auxquels on n’a pas d’autre traitement actif à proposer. Tout le monde peut-il participer à un essai ? En phase 2, une fois la dose optimale déter minée, les médecins évaluent l’efficacité du traitement et observent les bons et les mauvais effets de cette molécule. L’équipe délimite les cas de cancers où le traitement « répond » : pour pérenniser un essai, il faut que 50 % des malades répondent bien et que l’on observe une régression de la maladie d’au moins 50 %. Le nombre de malades nécessaires pour que l’essai soit probant est calculé au préalable par des statisticiens. En participant à un essai, a-t-on un meilleur traitement ? Un médecin que l’on appelle « investigateur de l’essai ». Il propose au patient de participer à l’essai, lui fournit les explications nécessaires et le suit durant toute la durée de l’étude. Au cours de l’essai, le patient sera entouré d’une équipe disponible pour l’informer, l’écouter, répondre à ses questions. En phase 3, lorsqu’un traitement a apporté des bénéfices confirmés, on détermine s’il est plus efficace, mieux toléré que les traitements standard. Cette comparaison s’effectue lors d’un essai randomisé, c’est-à-dire que les patients sont tirés au sort par ordinateur. On constitue deux groupes auxquels on administre soit le traitement de référence, soit la nouvelle molécule, et l’on observe les résultats. Ces essais nécessitent l’inclusion d’un grand nombre de malades (plusieurs milliers) pour vérifier qu’il existe une différence réelle entre les traitements. Comment se déroule un essai ? Que se passe-t-il ensuite ? En France, tout participant à un essai clinique est protégé par la loi Huriet-Sérusclat de 1998, qui assure au maximum les droits des patients. Par exemple, l’obligation de recueillir un consentement libre, écrit et éclairé du patient, l’existence d’un délai de réflexion avant qu’il ne soit inclus dans l’essai, la possibilité de pouvoir s’en retirer à tout moment, d’être indemnisé en cas de dommage, d’être informé des résultats. La Ligue contre le cancer a, en 1998, mis en place un comité de patients pour la recherche clinique : il s’agit d’un groupe d’une cinquantaine de patients ou proches ayant vécu l’expérience d’un cancer. Ils relisent, critiquent et commentent les essais cliniques de cancérologie. à quoi servent-ils ? Encadrés par des règles scientifiques, éthiques et réglementaires, ils permettent d’évaluer de nouveaux médicaments ou associations de médicaments, de nouvelles façons de les administrer, ainsi que des techniques novatrices de traitement (chirurgie, radiothérapie…) ou de diagnostic (test biologique). Qui est à l’initiative d’un essai clinique ? C’est le « promoteur » de la recherche, le plus souvent un laboratoire pharmaceutique, mais il peut s’agir aussi d’une personne morale, comme une université, une institution de recherche, privée ou publique, la fédération des centres de lutte contre le cancer, l’Inserm... Qui mène l’essai clinique ? En trois phases. Il faut trois à dix ans avant que les résultats ne soient publiés et qu’une molécule n’obtienne l’autorisation de mise sur le marché. x En phase 1, on en évalue la tolérance. Les chercheurs ont déjà prouvé l’efficience d’une molécule sur un animal, il faut donc observer XII ROSE MAGAZINE Non. Chaque essai répond à un objectif précis, c’est pourquoi on proposera à certains malades de participer, en fonction, par exemple, du type ou de la taille de leur tumeur. x Cela permet d’avoir accès aux traitements les plus innovants et ne constitue jamais une perte de chance par rapport au standard. Si vous refusez de participer à l’essai clinique qui vous est proposé, cette décision sera sans conséquences sur la prise en charge de votre maladie, ni sur la qualité des soins qui vous seront prodigués. Qu’est-ce qui garantit que l’on ne servira pas de « cobaye » ? x Si les résultats de ces essais sont en faveur du nouveau traitement, on constitue un dossier d’enregistrement qui sera soumis aux autorités de santé afin qu’elles délivrent l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Ensuite, on étudie la pharmacovigilance, c’est-à-dire les effets secondaires du traitement qui n’auraient pas été mis en évidence. C’est l’essai de phase « quatre ». François Gaulon/DR Dr Françoise May-Lévin. C’est une étude scientifique destinée à évaluer l’innocuité et l’efficacité d’une méthode diagnostique ou d’un traitement. POUR EN SAVOIR PLUS notre-recherche-clinique.fr, site du Centre national de gestion des essais de produits de santé. Dr FRANçOISE MAY-LéVIN Cancérologue, conseiller médical à la Ligue contre le cancer, ancien chef de service à l’institut Gustave-Roussy. ROSE MAGAZINE XIII QU’EST-CE QU’UNE THÉRAPIE CIBLÉE ? Dr Joseph Gligorov. Une thérapie ciblée est un médicament « sélectif » qui s’attaque aux cellules cancéreuses en repérant chez elles une cible précise (récepteur, gène ou protéine) et en épargnant au maximum les cellules saines. Quels sont les mécanismes d’action ? Ils sont divers, mais on peut distinguer deux approches. L’une consiste à « cibler » la cellule cancéreuse, l’autre tout ce qui aide la cellule à survivre et assure son « ravitaillement ». Ainsi, on distingue des cibles cellulaires cancéreuses qui sont soit des récepteurs (à la surface ou non des cellules), soit des constituants de la cellule impliqués dans les mécanismes de prolifération ou de résistance aux défenses de l’organisme contre ces cellules. On distingue également des cibles de l’environnement des cellules cancéreuses, visant à modifier « l’écologie » de la tumeur et entraîner sa destruction en rendant le milieu où elle prolifère impropre à sa survie. Au gré des découvertes, de nouvelles cibles sont identifiées et des thérapies développées. Quelles sont les thérapies ciblées utilisées actuellement ? Il y a deux grandes familles de médicaments. La première famille regroupe des anticorps spécifiques, dits « anticorps monoclonaux », dirigés contre une « cible » qui peut être un récepteur à la surface des cellules. L’anticorps monoclonal va se fixer sur le récepteur et freiner la multiplication des cellules tumorales. Ainsi, le trastuzumab (Herceptin®) est un anticorps monoclonal anti-récepteur HER2 utilisé avec une grande efficacité dans certaines formes de cancers du sein plus agressifs. Il s’adresse à environ 20 % des patientes, qui présentent une surexpression de ces récepteurs (HER2) sur leurs cellules cancéreuses. XIV ROSE MAGAZINE Sont-elles moins toxiques que les chimiothérapies classiques ? Chez les femmes opérées, il permet de réduire de moitié le risque de rechute, et pour celles qui ont des métastases, il prolonge et améliore la vie. D’autre cancers (digestifs, ORL ou lymphomes) bénéficient également des avancées des anticorps monoclonaux. La cible peut être aussi une molécule qui se fixe sur certains récepteurs, empêchant ainsi leur stimulation. Cette approche est utilisée pour « asphyxier » les tumeurs en empêchant la formation des vaisseaux tumoraux qui alimentent les cellules cancéreuses en oxygène, sucre... Le bevacizumab (Avastin®) est un traitement de ce type dit « antiangiogénique » dont la cible est commune à différents cancers (colon, poumon, sein, ovaire ou rein) puisqu’il vise l’environnement tumoral. La seconde famille est constituée de petites molécules « inhibitrices » qui entrent dans la cellule et agissent comme un « grain de sable » empêchant un rouage de tourner. Elles ont des propriétés inhibitrices vis-à-vis des « tyrosines kinases » (enzymes), ce qui a révolutionné la prise en charge de certains cancers. Ainsi, depuis la fin des années 1990, grâce à l’imatinib (Glivec®), de nombreux patients atteints de leucémie myéloïde peuvent vivre avec une maladie devenue chronique alors qu’auparavant cette affection était presque toujours mortelle. Ces petites molécules peuvent également cibler d’autres récepteurs, expliquant que l’on ait aussi des médicaments anti-HER2 (lapatinib ou Tyverb®) ou antiangiogéniques qui ciblent les récepteurs sur les vaisseaux tumoraux. Dr Joseph gligorov Oncologue à l’Hôpital Tenon à Paris. Elles exposent moins au risque de nausée, vomissement, alopécie, mais elles ne sont pas dénuées de toxicité. Si les cibles sont présentes dans la tumeur, elle peuvent également l’être dans des organes sains et ceci explique que les toxicités sont variables d’un médicament à l’autre (éruptions cutanées, diarrhées, effets secondaires cardiaques, neurologiques imposant une surveillance). Les effets positifs sont bien supérieurs aux négatifs. Les traitements permettent de contrôler la maladie et améliorent durée et qualité de vie. On peut les administrer plus longtemps que les chimiothérapies et adapter leur rythme en fonction des toxicités. A-t-on bien accès à ces thérapies ? Oui lorsque les médicaments ont reçu une autorisation de mise sur le marché. Vingt-huit plateformes hospitalières de génétique moléculaire du cancer ont été créées par l’Inca pour réaliser des tests molléculaires et permettre aux malades d’accéder à un traitement personnalisé. De nombreuses thérapies ciblées sont en cours de développement clinique et des équipes proposent à leurs patients de participer à des essais pour bénéficier bien avant l’AMM d’une véritable innovation thérapeutique. Demain, existera-t-il une thérapie capable de cibler chaque tumeur ? Les thérapies ciblées modifient nos concepts de traitement avec l’accès à une médecine personnalisée. La liste des médicaments ne cesse de s’accroître, avec une dizaine de molécules prescrites et des centaines en cours de développement, qui permettront de traiter un plus grand nombre de cancers. Dans quelques années, chaque patient aura son traitement « sur mesure », décidé en fonction de la carte d’identité génétique de sa tumeur. Ces traitements permettront à de plus en plus de personnes de mieux vivre avec la maladie et ouvriront, dans certains cas, de nouvelles perspectives de guérison. ROSE MAGAZINE XV QU’EST-CE QUe l’hormonothérapie ? Dr Louis Mauriac. C’est un traitement médi camenteux du cancer du sein prescrit dans le cas de tumeurs hormonodépendantes (70 % des cas) afin de bloquer l’action des œstrogènes sti mulant les cellules cancéreuses. Le médicament se fixe sur les récepteurs hormonaux, prend la place des hormones et les empêche d’agir. (hormonothérapie palliative), pour contrôler la maladie et prolonger la durée de vie, jusqu’à une dizaine d’années chez certaines. En dernier lieu, à titre préventif (une étude américaine montre qu’en prescrivant une molécule de la famille des antiaromatases à des femmes saines, on rédui sait le risque de cancer du sein de 65 %).* Comment sait-on que l’on souffre d’un cancer « hormono-sensible » ? Quels sont les effets secondaires ? Quels sont les divers traitements ? Il existe trois formes d’hormonothérapie, qui ont des mécanismes d’action différents. La pre mière vise à supprimer l’activité ovarienne chez des femmes non ménopausées, soit en bloquant cette activité par des injections d’agonistes de la LH/RH (hormone du cerveau), comme le Decapeptyl®, le Zoladex®... soit en enlevant ou irradiant les ovaires. La seconde va bloquer le récepteur aux œstrogènes par voie orale (tamo xifène) ou par voie intramusculaire (fulvestrant) avec des anti-œstrogènes. La troisième vise à bloquer l’enzyme (aromatase) qui maintient, chez les femmes ménopausées, une faible sécré tion d’œstrogènes (Arimidex®, Femara®...). 60. les mots pour le dire Le terme « cancer » est certes difficile à entendre. Mais aussi à lancer. Que dire à ses proches, ses enfants ? Que taire ? Témoignages et conseils. 66. Le bêtisier du cancer Florilège des petites phrases bêtes et marrantes comme autant de perles (d’humour) noires. Parce que mieux vaut en rire... 70. Avec la malade, une relation à double sens Mari, enfants, proches sont tous chamboulés par la maladie. Mais prompts à aider, soutenir, rassurer. Quel rôle jouent ces « aidants » ? Quelle « bonne distance » instaurer avec eux ? Enquête. 20 à 30 % de femmes refusent ou interrompent leur traitement Il faut bien peser le ratio bénéfice/risque : s’il y a risque métastatique, l’hormonothérapie offre une chance de guérison supplémentaire. Dans des cas moins graves, on peut transiger sur la durée : passer de cinq à trois ans, même si cela représente une perte de chances de 1 à 2 %. face aux AUTRES *Asco juin 2011 : MAP 3 (Mammary Prevention Trial). On a recours à l’hormonothérapie pour faire diminuer la taille de la tumeur et faciliter la chirurgie (hormonothérapie néo-adjuvante). On utilise également le tamoxifène et les antiaromatases dans le cas de cancers métastasés 2 ROSE MAGAZINE Dr LOUIS MAURIAC Oncologue médical à l’Institut Bergonié, centre de lutte contre le cancer de Bordeaux. DR Quand utiliser l’hormonothérapie ? Getty Images Lors du diagnostic initial, on recherche la pré sence de ces récepteurs au cœur de la cellule tumorale. Lorsque le résultat est positif, on peut proposer un traitement hormonal pour diminuer les risques de récidive locale dans le sein opéré, d’atteinte de l’autre sein, ainsi que de métastase. Sous tamoxifène, outre parfois des bouffées de chaleur et une prise de poids, il existe un risque d’épaississement de l’intérieur de l’utérus pouvant provoquer des saignements, une faible augmentation des cancers de l’endomètre et des troubles du cycle chez les patientes jeunes. Sous antiaromatases, on peut avoir des douleurs articulaires et musculaires, ainsi qu’un risque accru d’ostéoporose. Avant le début du traite ment, une ostéodensitométrie osseuse est effec tuée pour évaluer la densité osseuse, le risque de fracture et proposer un traitement si besoin. ROSE MAGAZINE 3 ANNONCER LA MALADIE Après le choc de l’annonce par le médecin vient le moment d’aborder la maladie avec l’entourage. Avec qui en parler ? Comment ? Analyse et conseils. nathalie ferron LES MOTS POUR LE DIRE 60 ROSE MAGAZINE ses états d’âme. » Peur de blesser ses proches, de les inquiéter, d’avoir à supporter leurs réactions et leur anxiété. Mais aussi crainte d’être abandonné, de ne plus être aimé et accepté... Quantité d’émotions et de sentiments, parfois ambivalents, compliquent une situation déjà très difficile à vivre pour le malade. Certains, du coup, préfèrent se taire. « Ce qui était important pour moi, c’était d’éviter le pathos et les réactions de type “Qu’est-ce que ça va être difficile pour vous…” », raconte Caroline, atteinte d’une récidive de cancer du sein. Pour Isabelle Moley-Massol, psychanalyste et psycho-onco- Un sentiment de libération logue, il n’y a pas de façon idéale d’annoncer sa maladie : « On ne peut pas généraliser, dire ce qui est bien ou pas. La décision d’en parler est fonction de la nature des relations amicales et familiales du patient. » Vis-à-vis de l’entourage amical, par exemple, Getty Images B Bénédicte n’a pas attendu d’être rentrée chez elle pour appeler sa sœur, au courant des examens qu’elle devait passer dans la matinée. « écoute, je sors tout juste de chez le médecin. Voilà : j’ai un cancer du col de l’utérus. » Quelques mots lancés à la volée. Sans ménagement. Avec sa sœur, Bénédicte savait qu’elle ne serait pas obligée de prendre des gants. Mais avec les autres, son père, son mari, ses deux enfants, elle a eu plus de mal. « C’est très compliqué de savoir s’il faut le dire ou non. J’ai mis du temps à en parler à mon père, par exemple, parce que c’est quelqu’un de très négatif. Je ne voulais pas avoir à gérer de toute façon impliqués dans la maladie. Ils ont donc besoin d’une information adaptée pour pouvoir “faire avec”. » Au lieu de protéger, le silence risque donc bien souvent d’abîmer la relation. Il peut même s’avérer ravageur. Dans un couple, par exemple, ne pas évoquer sa maladie sera forcément source de lourds malentendus. Et, d’une manière plus générale, le mensonge ou le silence pourront être interprétés comme une forme de trahison. Même un employeur, tenu à l’écart de l’information, aura tendance à vivre ce mensonge par omission comme une perte de confiance. on n’est pas obligé de tout dire. « Le malade peut avoir envie de garder le silence pour se protéger, du moins dans un premier temps », souligne le Dr Moley-Massol. En fait, c’est surtout envers les plus proches que le problème se pose. « Ne rien dire relève-t-il du men- songe ? », s’interrogent certains malades. « L’annonce de la maladie peut-elle altérer la relation ? » La vraie question, pour la thérapeute, est la suivante : « Comment rester dans un lien authentique en taisant un événement de vie aussi important ? Car les proches sont Autre conséquence douloureuse du silence : il prive le malade d’une aide potentielle. « Ce qui est compliqué, c’est qu’on veut préserver son entourage, n’inquiéter personne, mais, en même temps, on a besoin de soutien », reconnaît Caroline. Avec le recul, toutefois, elle ne regrette pas de s’être livrée à sa famille et à ses amis : « Cela a été un énorme sentiment de libération. Après, tout le monde m’a soutenue et motivée. » Rien d’étonnant, au fond, car dans l’adversité il arrive que les proches sachent faire preuve de ••• ROSE MAGAZINE 61 ANNONCER LA MALADIE Laisser passer le choc En revanche, là où l’hésitation n’est pas de mise, c’est à l’égard des enfants. « Ils ont besoin que le parent souffrant leur adresse une parole vraie car ils ressentent toutes les émotions et perturbations engendrées par la maladie », rappelle lsabelle Moley-Massol. Leur cacher la maladie pourrait avoir des effets dévastateurs sur leur construction psychique et leur avenir (voir interview). Pourtant, on s’en doute, prononcer le mot « cancer » devant ses enfants est extrêmement compliqué. « Je leur ai dit que j’avais un bobo au sein et que je devrais faire quelques dodos à l’hôpital. Je leur ai mon62 ROSE MAGAZINE La psychanalyste Nicole Landry-Dattée anime des groupes de soutien aux enfants de parents malades à l’institut Gustave-Roussy, à Villejuif. Entretien. propos recueillis par nathalie ferron Rose Magazine. Pourquoi est-ce si important de parler de sa maladie aux enfants ? Nicole Landry-Dattée. Il faut toujours tré le pansement mais je n’ai pas voulu leur en révéler davantage pour ne pas les angoisser », raconte Caroline. « Je ne leur ai pas dit la vérité, c’était au-dessus de mes forces, explique Bénédicte. Mais je ne voulais pas qu’ils sentent que je leur cachais quelque chose. Comme j’avais des problèmes de dos, je leur ai dit : “Le docteur a trouvé la maladie de maman. On va bien me soigner, mais ce sera peut-être long”. » Étape clef, le discours du médecin influencera lui aussi la manière dont le malade évoquera à son tour la maladie. « Des études ont montré que le patient avait tendance à reproduire avec ses proches le mode d’annonce que lui-même avait reçu de son médecin », souligne Isabelle Moley-Massol. Un conseil peut tout de même être donné au malade : attendre que le choc de l’annonce se soit annoncer le diagnostic à ses enfants, même à un bébé de trois jours ou d’un an car l’angoisse circule et les enfants la ressentent toujours. Ils se rendent compte qu’il se passe quelque chose : les parents ne travaillent plus, ils sont moins disponibles, se sentent tristes ou fatigués… Bien souvent, les parents croient protéger leur enfant en se taisant mais c’est un leurre ! Le silence est au contraire très violent pour l’enfant. Quand elle est verbalisée, l’angoisse s’atténue. Par ailleurs, l’enfant se sentira autorisé à parler de ce qu’il ressent et à poser des questions. un peu dissipé avant de parler à sa famille. Il convient de préparer l’entourage en donnant une information progressive, pas à pas, qui ouvre sur un espoir réaliste. Dans cette perspective, insister sur la qualité des soins est essentiel. Les proches se sentiront davantage rassurés si le malade s’estime pris en charge par une équipe médicale compétente. nathalie ferron Quelles conséquences le silence peut-il avoir sur l’enfant ? Les enfants se construisent sur la confiance. Si l’enfant découvre qu’on lui a menti, la confiance qu’il investit dans les adultes va s’écrouler. Or, un enfant a besoin de gens forts pour s’appuyer sur eux. Il a besoin de cette illusion-là pour se construire. Si on n’en parle pas ou s’il découvre que ses parents lui ont menti, il perdra confiance dans les adultes, dans la vie et en lui-même. Il pourra se sentir tellement abusé qu’il ne croira plus en rien. Cela peut entraîner un état de dépression infantile avec des troubles du sommeil et du comportement, par exemple. Getty Images générosité, de solidarité et aussi d’empathie ! D’autres éléments influencent aussi la manière dont la personne malade va informer son entourage. Un avis de récidive, par exemple, sera certainement plus difficile à dire et à recevoir qu’une annonce de premier épisode. Le type de cancer entre également en ligne de compte : « Cela aurait sans doute été plus difficile pour moi si j’avais été touchée par un cancer du poumon, du cerveau ou du pancréas », reconnaît Bénédicte. Enfin, la trajectoire personnelle du patient, les circonstances dans lesquelles la maladie se déclare, mais aussi sa personnalité, sociable et spontanée ou au contraire indépendante et introvertie, influenceront de manière significative sa décision de parler ou de se taire. “Le silence est très violent pour l’enfant” à quel moment en parler aux enfants ? Quand le parent malade a lui-même un peu assimilé la nouvelle. Si les parents en parlent avant, ce sera une onde de choc pour l’enfant. S’il y a plusieurs enfants, le mieux est de choisir un moment où tous sont réunis pour que l’un d’eux ne soit pas le seul à ne pas savoir. Après, on peut adapter son discours à l’âge des enfants et en discuter différemment avec chacun. Comment parler du cancer aux enfants ? On peut partir de ce que l’enfant sait : « Tu sais que maman est à l’hôpital... » et lui dire les choses progressivement. Voici une manière d’aborder les choses : « J’avais une boule au sein. On pense qu’il y a des cellules qui ne sont pas très bonnes. On craint fort que cela soit un cancer. On attend les résultats. Tout le monde fait tout ce qu’il peut pour me soigner. » On peut aussi se servir d’un livre adapté aux enfants qui aborde ce sujet. Parfois, cela peut aussi aider d’amener l’enfant à l’hôpital. Le fait de voir qu’on soigne son papa ou sa maman va le rassurer. Ce qui est violent pour lui, c’est que les choses ne lui soient pas expliquées ouvertement. Quels sont les pièges à éviter ? Ne pas aller au-delà des questions que pose l’enfant et trop en dire. Il est inutile d’entrer dans le détail, dans les résultats d’analyse, les marqueurs, par exemple. Etre authentique, ce n’est pas tout dire, mais ne rien cacher de ce qui concerne l’enfant. Et bien sûr, bannir toute forme de chantage avec des phrases telles que : « Si tu travailles bien à l’école ou si tu pries très fort, maman va guérir. » ROSE MAGAZINE 63 ANNONCER LA MALADIE À Lire en famille Les parents ont parfois du mal à parler du cancer avec leurs enfants. Quelques livres peuvent les aider. Anatole l’a dit Nicole Landry-Dattée & Marie-France Delaigue-Cosset. éd. K’noé www.k-noe.fr. Distribué dans les hôpitaux. Ma maman est malade Bénou. éd. Du Mouton cerise www.moutoncerise.net Qui mange salade jamais malade Cécile Faÿsse. Disponible gratuitement sur simple demande par mail chez Any d’Avray : [email protected] Maman a une maladie grave Hélène Juvigny & Brigitte Labbé. éd. Milan Jeunesse www.editionsmilan.com Ces enfants qui vivent le cancer d’un parent Marie-France Delaigue-Cosset & Nicole Landry-Dattée. éd. Vuibert vuibert.com Grand-Arbre est malade DR Nathalie Slosse & Rocio del Moral. éd. Abimo. [email protected] 64 ROSE MAGAZINE LE Bêtisier du cancer “La première chose que m’a dite mon mari lorsqu’il a appris que j’avais un carcinome infiltrant, ça a été : « Merde, notre dossier de prêt pour la maison secondaire ne va jamais passer ! » Sur le moment, je n’ai rien dit, mais dès que je suis sortie de la chimio, je l’ai quitté.” “ Un cancer des ovaires ? Si tu m’avais écoutée à seize ans et que tu n’étais pas sortie avec ce type aux cheveux longs qui jouait de la batterie… Quand on couche avec la terre entière, un jour, ma fille, on paie les pots cassés.” La mère de Valérie, responsable d’un pressing à Lille. L’oncologue de Jocelyne, retraitée, qui s’était permis de pleurer le jour du diagnostic. Un oncologue à Roselyne, elle-même docteur… en philo, à Toulouse. “ Bon… Madame, vous avez un cancer du sein… À votre âge, c’est probablement hormonodépendant. Je vous prends dans deux semaines au bloc pour la mastectomie. Vous ne voulez pas que j’en profite pour vous enlever les ovaires, pendant qu’on y est ?” Un chirurgien à Céline, journaliste parisienne de trente-sept ans, lors de leur premier rendez-vous. Isabelle, chef d’entreprise à Paris. “ Ah ! Non, Madame, vous n’allez pas pleurer ! Franchement, à votre âge ! Je vois tous les jours des femmes malades qui ont moins de trente ans. Vous, vous avez soixante-quatre ans, quand même !” “Quoi ? Vous détailleR les produits de votre protocole de chimio ? Pour quoi faire ? vous n’êtes pas médecin,vous ne comprendrIez pas !” “ T’as le cancer ? Du coup, tes problèmes de poids, c’est fini,tu vas en perdre, des kilos, grâce à la chimio ! ” Une collègue de Mathilde, professeure des écoles à Villeurbanne. “Allez... faut pas vous laisser aller ! Le plus important, c’est la volonté !” Une aide-soignante à Dominique, en soins palliatifs. « Ma cousine était comme vous, elle a eu un cancer du sein métastasé au cerveau ; elle est morte en quatre mois, la pauvre. » La femme de ménage de Sophie, avocate à Paris. Que se passe-t-il quand Marisa Acocella Marchetto, illustratrice new-yorkaise, amatrice de bons vins et de pâtes fraîches, fashion victim, célibataire à la vie de rêve, se découvre… une grosseur au sein ? Découvrez-le dans Cancer and the city (22,90 €, Ed. L’Iconoclaste) ! 66 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 67 LE Bêtisier du cancer “Ah ! vous avez un cancer ? Bon, ben, soignez-vous bien ! parce que quand la santé va, tout va !” “T’es sûre que tu veux pas – Tu sais, ce cancer, mettre ta perruque pour finalement, sortir dîner ? Non ? Allez, c’est peut-être chérie ! franchement, avec une chance. ta boule à zéro… tu fais Ce qui ne tue vraiment homosexuelle en goguette.” pas rend plus fort ! Son mari à Lisa, trente-huit ans. – Oui, mais si j’en “ Tu vois, c’est à cause de gens meurs ? comme toi que nos enfants – Euh… n’auront pas la sécu ! ” Un voisin d’Ester, dans l’escalier de son immeuble. “Comment ça, vous voulez un diep plutôt qu’un tram ? Vous ne croyez tout de même pas que vous allez décider de votre technique de reconstruction mammaire ? On n’est pas aux Galeries Lafayette !” Des « amis » de Catherine, quarante-huit ans, en arrêt maladie pendant sa radiothérapie. Un chirurgien à Ester, après sa mastectomie. Allez, ma grande, il faut sortir ! Marcher un peu. “Rassurez-vous… ce n’est Pas se laisser aller. Madame pas possible que vous ayez Dugenou, elle un cancer, parce que allait en vélo le kyste est tellement gros à ses séances que si c’était le cas… de chimio, elle ! Des amis de cette paresseuse de Catherine, cinquante-cinq ans, deux jours après une chimio. 68 ROSE MAGAZINE vous seriez déjà morte !” Un technicien de laboratoire à Anne, après une IRM confirmant finalement un cancer du sein, opéré depuis. « Chérie, on est invités à dîner chez les Dupont. J’irai seul, hein, histoire de ne pas plomber l’ambiance avec tes histoires de cancer. » Pierre à sa femme Léa, quarante-deux ans. “ La scintigraphie me détecte une atteinte métastasique. Je demande au médecin ce qu’il convient de faire dans ce cas-là. Il me recommande d’aller voir madame Soleil ! ” “Pas d’enfant dans les mois à venir… à moins que vous ne souhaitiez en faire un orphelin !” Corinne, soixante-six ans, Paris. Son oncologue à Marie-Line, trente-six ans. ROSE MAGAZINE 69 LES “AIDANTS” AVEC LA MALADE une relation à double sens Le cancer ne bouleverse pas seulement la vie du patient. Il bouscule aussi celle de son entourage. Comment les proches vivent-ils l’épreuve ? éléments de réponse. TEXTE lisane vic. PHOTOs Myriam E. Eux non plus n’y étaient pas préparés. Un jour, sans crier gare, le cancer s’est immiscé dans leur quotidien. Le choc passé, ils ont fait face, se sont lancés à corps perdu dans la bataille et s’y sont parfois égarés : épuisement, sentiment d’impuissance, anxiété exacerbée, dépression… Impossible de ne pas être meurtri. Pourtant, dans cette histoire, ils sont toujours considérés comme les bien-portants, ceux qui sont « à côté ». « En fait, toute la famille est “touchée” par la maladie d’un proche », rappelle la psycho-oncologue Delphine de Susbielle. « Car il est extrêmement douloureux de voir souffrir ceux que l’on aime. Il faut se dire 70 ROSE MAGAZINE E “ Delphine & son mari MICHAËL Mon mari est militaire. Lorsqu’on m’a découvert cette maladie, il devait se rendre en Afghanistan pour une mission de six mois. Il a choisi de rester à mes côtés. Même dans les pires moments. Durant ma sixième et dernière cure de chimio, par exemple, j’ai voulu tout arrêter.Trop de fatigue, de vomissements, de douleurs, de pleurs. Je voulais qu’on me débranche, qu’on me laisse enfin repartir chez moi. Michaël a su, avec ses mots, me redonner la force d’aller jusqu’au bout du traitement. Sans lui, sans sa persévérance, j’aurais abandonné et je ne serais plus là aujourd’hui. ” qu’aucune place n’est enviable. » Pas évident, effectivement, de trouver les mots justes, de répondre aux attentes du malade, de le soutenir jour après nuit, sans être parfois soi-même dépassé par les événements. « On imagine que c’est naturel d’aider parce que le code civil nous dit que c’est une obligation. Or en fait, cela ne va pas de soi », assure Florence Leduc, présidente de l’Association française des aidants. « Malheureusement, ce rôle du proche est invisible », confirme la psychanalyste, médecin et psychooncologue Isabelle Moley-Massol. « Il fait partie du quotidien. Mais il est important qu’il soit reconnu et remercié pour les efforts ••• ROSE MAGAZINE 71 LES “AIDANTS” “ Laetitia & sa sœur aurélie Ma petite sœur a été très affectée par l’annonce de mon cancer du sein. Mais elle a toujours essayé de me faire rire, elle m’a soutenue d’une manière incroyable. Aurélie habite à cent kilomètres de chez moi, alors on s’écrivait un peu et on se parlait beaucoup au téléphone. Je lui demandais de me raconter ses petits tracas de tous les jours. Je ne voulais pas me sentir à part, exclue de la vie des autres. Peut-être que l’éloignement géographique, le fait de ne pas partager un même quotidien nous a permis d’être à la bonne distance l’une de l’autre… fournis. Le vrai problème, c’est que les proches estiment ne pas avoir le droit d’être fatigués car ils ne sont pas malades. De l’autre côté, les malades n’osent pas demander clairement les choses, car ils ont déjà suffisamment l’impression d’être un poids. Tout le monde est pris dans les mailles de la culpabilité. Cela engendre beaucoup de malentendus dommageables à la relation. » Myriam E Laetitia, jeune trentenaire tout juste sortie d’un cancer du sein, en a fait l’expérience. 72 ROSE MAGAZINE Lorsque sa maladie s’est déclarée, son compagnon l’a quittée et elle est retournée vivre chez ses parents avec ses deux garçons. « Durant la chimio, j’avais de soudaines et grosses fatigues. Je n’avais qu’une envie : que l’entourage prenne le relais pour s’occuper des enfants. Mais je n’ai jamais osé le demander. J’imaginais, d’une certaine manière, que c’était évident, que les autres savaient ce que j’avais en tête. » Sauf qu’en proie eux-mêmes ” à la souffrance, les proches ont bien souvent du mal à décrypter les besoins du malade. Ils tâtonnent. Ne comprennent rien. Ont eux aussi des désirs. Parfois inverses de ceux du malade. Au moment du retour à la vie ordinaire, par exemple, une fois les traitements achevés. « Les proches veulent tourner la page le plus vite possible, constate Isabelle Moley-Massol. Mais les malades n’en sont pas encore là et se sentent même particulièrement vulnérables. » Autre décalage fréquent : croyant bien faire, certains aidants en font trop. Au risque d’agacer les malades qui se sentent étouffés, infantilisés. Comme Marguerite, atteinte d’un cancer du sein il y a huit ans, que son mari surprotège continuellement. « L’été dernier, par exemple, je me suis inscrite à des cours de surf. J’en rêvais depuis longtemps. Mais François a tout annulé, sous prétexte que c’était dangereux. C’est énervant quand l’autre vous perçoit toujours ••• ROSE MAGAZINE 73 LES “AIDANTS” “ Laurence & son chirurgien plasticien Arnaud Il y a quelques années, je me suis fait poser des prothèses mammaires. Lorsqu’on m’a diagnostiqué un cancer du sein, j’ai tout de suite pensé à mon chirurgien plasticien car j’allais devoir subir une mastectomie. Je lui ai envoyé un mail pour lui exposer ma situation. Très gentiment, il m’a réconfortée en m’incitant à garder espoir. La perte d’un sein a été pour moi un profond traumatisme, mais l’idée de passer un jour à la phase de reconstruction m’a fait tenir. Durant les longs mois de traitement, je n’ai pensé qu’à ce moment, qu’à cette opération. 74 ROSE MAGAZINE ” que l’on est soudainement mortel n’arrange pas les choses. C’est compliqué, dans ces conditions, de s’envisager comme une femme désirable. Il y a des patientes qui ne veulent plus être touchées ou qui font chambre à part. » « à chacun d’être respectueux de l’autre et de son rythme, de ne pas mettre de pression mais de s’accorder des moments de tendresse. » En somme, réinventer une relation où chacun est à la bonne place, à l’écoute de l’autre mais aussi de soi. « Il est important pour l’entourage de s’autoriser à souffler, de continuer à cultiver une vie sociale. Personne ne demande de mourir d’aider, martèle Florence Leduc. Les proches ne doivent se transformer ni en saints, ni en martyrs. » En clair, la responsabilité de l’aidant, pour soutenir longtemps et efficacement, c’est déjà d’apprendre à se ménager. Quitte, si le besoin s’en fait sentir, à se faire luilisane vic même aider… Myriam E comme une petite chose fragile qu’il faut mettre sous cloche. » Parfois, aussi, un conjoint trop à l’écoute « crée malgré lui une augmentation du niveau de plainte du patient, qui s’installe alors dans des processus mortifères », remarque Delphine de Susbielle. « Le danger, surtout, c’est qu’à vouloir occuper toutes les places on finisse par tomber dans la confusion des rôles », met en garde Florence Leduc. « Cumulant les fonctions de médecin, d’auxiliaire de vie, de père, le conjoint, notamment, oublie qu’il est avant tout un mari. Forcément, le désir en prend un coup. De toute façon, pendant les traitements, sur le plan sexuel, c’était ceinture », se souvient Camille, quarante-deux ans, en rémission d’un cancer du sein. « Le patient est tellement centré sur lui que plus rien n’existe », explique Yo lande Arnault, psychologue clinicienne à l’institut marseillais Paoli-Calmettes. « Avec la fatigue, la douleur, les vomissements, l’inquiétude, la sexualité n’est vraiment pas d’actualité. Et puis l’idée ROSE MAGAZINE 75 LES “AIDANTS” “Chacun doit fixer ses limites” Tristesse, souffrance ou peur perturbent la relation entre proches et malade. Pourtant, convenir d’une « bonne distance » est essentiel à chacun. Témoignage d’Isabelle Moley-Massol. propos recueillis par lisane vic Rose Magazine. Les malades en demandent-ils trop à leurs proches ? Isabelle Moley-Massol. Cela peut arriver. Certains, en proie à une très forte anxiété, sont dans une demande insatiable mais souvent involontaire. Le malade ne se rend pas toujours compte de la fatigue du proche. Par ailleurs, et dans des cas extrêmes, la maladie peut aussi être le moyen de garder l’emprise sur l’autre. “ Mais au fond, le malade ne peut-il pas tout exiger de son aidant ? Non. Nous avons tous nos limites physiques et psychiques. Il est important de les identifier et de les respecter. Un proche peut se sentir tyrannisé, parfois à juste titre, par la maladie, la situation, le malade, et poursuivre en silence jusqu’à l’épuisement. Tout proche a besoin lui aussi d’être aidé, épaulé. Ses personnes-ressources – un membre de la famille, un ami – sont essentielles. Si, un jour, il ne peut se rendre à l’hôpital, s’il a besoin de faire une pause, l’entourage pourra prendre le relais sans qu’il culpabilise. De nombreux proches vivent dans la hantise que le malade se sente abandonné à la moindre défaillance de leur part. Quand la situation lui paraît trop difficile, le proche ne doit pas hésiter à consulter un spécialiste, psychiatre ou psychologue. Je n’ai pas d’enfant, mais ma nièce, Aurélie, est très proche de moi. Nous travaillons ensemble. Comme je ne me suis jamais arrêtée, nous nous voyions tous les jours et elle a été très présente, physiquement et psychologiquement. Et puis j’ai eu un autre soutien aussi : mon teckel Douglas, dit « Doudou ». Un vrai clown dont il fallait beaucoup s’occuper et qui m’a obligée à ne pas être trop centrée sur moi. Même lorsque j’avais le moral par terre, j’attrapais des fous rires à le regarder sauter partout dans la maison comme un chat. C’est incroyable comme son énergie a été communicative. 76 ROSE MAGAZINE ” Myriam E Marie-Caroline, sa nièce aurélie & son chien Est-ce si difficile d’aider ? Oui. Certains s’engagent massivement auprès d’un malade parce qu’ils y trouvent un sens supplémentaire à leur vie. D’autres ont envie de fuir, sont inhibés par l’angoisse, la crainte de ne pas être à la hauteur avec parfois un sentiment d’être trahi par la vie, la maladie, la personne aimée. Les sentiments sont toujours complexes, ambivalents et fluctuants au fil de l’histoire de la maladie. Ils désorientent le proche et sont fréquemment source de culpabilité quand il ressent colère, révolte, affects négatifs qu’il pense inavouables, qui se mêlent aux sentiments d’amour et de tendresse, au désir éperdu de « sortir l’autre de la maladie ». La culpabilité de ne jamais « en faire assez » peut s’avérer tenace. La souffrance du proche est d’autant plus grande qu’il se refuse à la reconnaître, comme s’il n’avait aucun droit de se plaindre. Elle est aussi très liée à la reconnaissance que le malade et l’entourage vont ou non lui renvoyer de son rôle. Le malade, de son côté, est-il tenu de ménager ses proches ? Personne n’est tenu à quoi que ce soit. Les besoins et la résistance de chacun sont différents et dépendent des moments. Le malade a besoin de la présence bienveillante de ses proches, de leur affection, de leur amour. Mais il y a une « bonne » distance à trouver, propre à chaque relation, soutenante et supportable pour tous. Proches et malade doivent se parler pour éviter les malentendus de type « projections mutuelles », où chacun pense à la place de l’autre et s’imagine, souvent à tort, ce qui est bon pour lui. Le malade doit s’autoriser à dire, demander. Au proche ensuite d’y répondre dans la mesure de ses possibilités, en osant poser sa propre limite. L’essentiel est de rester dans un échange vivant, vibrant, qui ne cherche pas à nier les à-coups émotionnels, rythmés par les événements médicaux, les espoirs, les découragements. Malade et proches ont besoin, plus que jamais, de s’ancrer dans un lien qui les renforce, une relation où aucun ne s’épuise ni ne se dévitalise. ROSE MAGAZINE 77 Soulager 82. Vers un hôpital cocon ? Acupuncture, sophrologie, naturopathie, phytothérapie investissent les services d’oncologie et adoucissent la vie des patients. 90. cultiver son corps La pratique régulière d’une activité physique stimule le système immunitaire et diminue les risques de cancer. à vos baskets ! Opérée des ovaires et de l’utérus à vingt ans, Véronique Jannot s’est tue et tournée vers la méditation, l’acupuncture, le yoga. Témoignage. Getty Images 92. la double vie de Véronique ROSE MAGAZINE 3 VIVRE MIEUX Méditation au CHU de Marseille, auriculothérapie à l’institut GustaveRoussy, karaté à l’hôpital Avicenne… Certains établissements « osent » les pratiques complémentaires. Mais pas tous... texte céline dufranc. photos pierre-emmanuel rastoin. « Quand j’ai demandé à mon oncologue si l’acupuncture pourrait soulager mes douleurs, il m’a répondu que cela ne servait à rien, que c’était du placebo », raconte Françoise, soixante ans. Quant à Catherine, quarante-neuf ans, elle n’a jamais entendu parler de médecines complémentaires, ni même de soins de support. « Mon seul support, c’était mon fils, qui s’est mis à cuisiner pour que je puisse avaler quelque chose ! » Pourtant, les « soins de support », qui ont pour objectif de diminuer les conséquences de la maladie et des traitements, existent bel et bien. Ils s’inscrivent même dans le programme personnalisé de soins proposé par le Plan cancer. reconnaît « Malheureusement, le Pr Ivan Krakowski, président de l’Afsos (Association francophone pour les soins oncologiques de support), l’organisation de cette prise en charge globale, qui va du dispositif d’annonce à l’accompagnement psycho-social, en passant par la prise en charge de la douleur, de la fatigue, des nausées… est variable d’un lieu de soins à un autre. » Souvent, ce sont les grosses structures, Vers un hôpital cocon ? Q 82 ROSE MAGAZINE comme les centres de lutte contre le cancer, qui sont le mieux loties. Essentiellement parce qu’elles connaissent moins de problèmes d’organisation et de financement. « Entre un poste de psychologue et un manipulateur de radiothérapie, il est évident que l’on privilégiera ce dernier », indique le Pr Krakowski. Les patients se débrouillent seuls Mais d’autres raisons, indépendantes cette fois des arbitrages budgétaires, expliquent parfois la faiblesse des soins complémentaires dans certains établisse- ments : « les opinions préconçues », reconnaît le Pr Laurent Zelek, chef du service d’oncologie à l’hôpital Avicenne, à Bobigny. Car en dehors de ce qui a été sanctionné par des études scientifiques – comme l’effet positif de l’activité physique sur la survie et la diminution du risque de récidive de certains cancers –, point de salut. Et encore, quand ces études ellesmêmes sont connues, ce qui n’est pas toujours le cas... Preuve de la grande réserve du corps médical : quand l’AP-HP a tenté de réunir des médecins pour évaluer l’intérêt d’intégrer à l’hôpital ces « pratiques non conventionnelles » – selon la définition désormais consacrée –, le tollé a été général. Comment s’étonner ensuite que les patients se débrouillent seuls pour trouver des solutions à leurs maux ? Le plus souvent, ils n’en parlent pas à leur cancérologue. Et parfois sont dans un tel désarroi qu’ils sont prêts à payer très cher des extraits de cartilage de requin ou de gui (voir encadré ci-contre). Au terme d’une étude menée en 2010, le Dr Manuel Rodriguès, président de l’Association d’enseignement et de recherche des internes en oncologie, a estimé que 60 % des patients avaient recours aux médecines complémentaires. En tête arrivait l’homéopathie, utilisée par 33 % des malades, suivie de près par la prise d’omégas 3, d’acides gras et de probiotiques, ainsi que les régimes alimentaires alternatifs et le sport. Mais à ces pratiques il faut encore en ajouter d’autres, celles qu’on s’échange sous le manteau comme autant de « bons tuyaux ». Témoin Corinne, soixante-six ans, malade d’un cancer du sein, qui a fait appel à un « barreur de feu » pour éviter les brûlures de la radiothérapie. Ou encore Laurence, quarantedeux ans, qui s’est tournée vers le reiki, le magnétisme et les huiles essentielles. Pour que les malades ne jouent pas une équipe contre une autre, le Dr Isabelle Sarfati, chirurgien à l’Institut du sein, à Paris, n’hésite pas à donner une « bonne » adresse d’acupuncteur, tandis qu’à la clinique SainteCatherine, à Avignon, il arrive au Dr Daniel Serin de recommander Attention aux traitements “miracles” ! « Les malades doivent savoir que toute approche prônée à la place des traitements conventionnels sera délétère, voire catastrophique », prévient le Pr Ivan Krakowski, responsable des soins de support au centre lorrain de lutte contre le cancer. De plus, si vous prenez autre chose que le traitement prescrit par votre médecin, parlez-lui en car il y va, là encore, de votre santé. L’une des raisons du danger : les médecines « douces » ne sont pas toujours aussi douces qu’elles en ont l’air ; certains produits « naturels » peuvent être toxiques pour le foie ou diminuer l’efficacité d’une chimio ou d’un traitement hormonal, comme le millepertuis, la sauge, le soja ou le jus de pamplemousse. Quant au cartilage de requin, aux extraits de gui ou de noyau d’abricot, et aux produits Beljanski, Carzodelan… en vente sur Internet, ils n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité et peuvent même s’avérer dangereux. Dernièrement, Georges Fenech, président de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), a rappelé qu’une jeune femme de trente-sept ans, atteinte d’un cancer du sein, était décédée après avoir arrêté sa chimiothérapie au profit de cataplasmes et d’un jeûne de vingt et un jours ! Alerte à la « charlatanerie », si le praticien : – vous dit qu’il a un don et qu’il va vous guérir, – vous demande d’abandonner tout contact avec votre médecin ou tout traitement, – vous réclame des sommes astronomiques ou au contraire pas un centime. Que faire ? Si des pratiques ou des méthodes vous semblent douteuses, écrivez à : [email protected] ou téléphonez à « Cancer info » : 0 810 810 821. À lire : Médecines douces, alternatives ou parallèles, brochure de la Ligue contre le cancer, gratuite et disponible dans les comités de la Ligue. un « barreur de feu » à ses patientes. à Strasbourg aussi, le Dr Jean-Philippe Wagner, oncologue, a créé une consultation d’homéopathie dans un centre de radiothérapie et s’est lui-même formé à cette médecine. Sophro et piano à l’hosto ! Mieux encore : en 2005, à l’Hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris, le Dr Florian Scotté, oncologue et secrétaire de l’Afsos, a créé les ateliers « Prendre soin ». « à force d’entendre mes patientes me dire : “c’est l’acupuncture qui a soulagé mes nausées, mes douleurs, pas vos médicaments”, j’ai dû me rendre à l’évidence : il fallait les accompagner dans cette voie et faire en sorte que l’hôpital ressemble plus à un cocon qu’à une ambulance. » Soutenu par la direction, il a monté l’association Artic (Association pour la recherche de thérapeutiques innovantes en cancérologie), destinée à financer des ateliers de sophrologie, ostéopathie, réflexologie, qi gong et socio- ••• ROSE MAGAZINE 83 VIVRE MIEUX Améliorer le moral et diminuer le risque de récidive Si la médecine dite « intégrative », très développée aux états-Unis, en Suisse et en Belgique, reste encore bien timide en France, les perspectives changent donc. 84 ROSE MAGAZINE En septembre dernier, le centre Ressource, un espace de 900 m2 proposant gratuitement des soins complémentaires à la carte, a ouvert ses portes à Aix-en-Provence. Objectif de cette association pilote, unique en France ? « Rendre le patient acteur de sa santé, grâce à un programme thérapeutique mixant approches corporelles, alimentation, sport... qui, à défaut d’être validées par l’Académie de médecine, ne sont pas dangereuses, explique son président, le Dr Mouysset, oncologue. Des études montrent que cette dynamique contribue à rendre le système immunitaire plus efficace, à améliorer le moral et à diminuer le risque de récidive de cancer du sein, comme l’a montré l’étude de Barbara Andersen »(2). Pour le Dr Thierry Janssen, auteur de La Solution intérieure : vers une nouvelle médecine du corps et de l’esprit, cela permet « d’aborder le processus de la guérison en jouant sur tous les tableaux, en entrant par toutes les portes de l’être. Et l’on est souvent plus efficace en entrant par la porte la plus grande ouverte ». Afin de vous accompagner dans cette voie, nous avons entrebâillé pour vous quatre portes, celles de la naturopathie, de la sophrologie, du qi gong et de la phytothérapie. céline dufranc (1) Cami (Cancer arts martiaux informations). (2) Barbara Andersen, nov. 2008. « Psychologicol Intervention Improve Survival for Breast Cancer Patients ». L’AS de PIQUEs Pierre-Emmanuel Rastoin esthétique. Même désir d’apporter confort et réconfort chez le Dr Sarah Dauchy, responsable du Département interdisciplinaire de soins de support à l’institut GustaveRoussy (IGR) de Villejuif, qui a fait entrer un piano à l’hôpital ! Son projet, « Mieux vivre à l’IGR », vise à « assortir l’introduction de diverses techniques (auriculothérapie, sophrologie, relaxation, mais aussi musique, poésie, karaté avec la Cami(1)…) d’une évaluation, même basique, pouvant faire avancer les connaissances dans ces domaines ». Chef du département des soins de support à l’institut Curie, le Dr Sylvie Dolbeault évalue actuellement l’efficacité de l’hypnose et de la sophrologie sur les douleurs chroniques, les nausées et les bouffées de chaleur, en liaison avec l’équipe de biostatistique. « C’est le seul moyen pour légitimer ces approches complémentaires, qui améliorent indéniablement la qualité de vie des patients. » En attendant, pas besoin de preuves pour les patientes : les séances d’hypnose et de sophrologie à l’institut Curie, « ont augmenté de 30 % depuis janvier 2005 », indique Françoise Sebestik, directrice des soins. PHILIPPE JEANNIN Acupuncteur Petit garçon, il se voyait déjà médecin avec un très chic nœud papillon ! Adolescent, ses parents le confient au Dr Pierre Regard, médecin acupuncteur de génie, afin de traiter son stress. Philippe vient de trouver sa vocation. Des années plus tard, un cancérologue lui adresse un jeune patient atteint d’un ostéosarcome du tibia. « J’ai tout inventé à ce momentlà, en 1987, raconte Philippe Jeannin. Il existait alors très peu de publications. En m’adaptant aux traitements oncologiques de chaque patient, j’ai mis au point mes premiers protocoles “acupuncturaux”, qui se sont affinés au fil des années. Si, pour guérir, rien ne pourra remplacer la médecine conventionnelle, l’acupuncture est un outil extraordinaire. » Son champ d’action est immense : « Elle peut atténuer, voire éliminer la plupart des effets secondaires des traitements : nausées, vomissements, douleurs, aphtes… Elle est aussi capable d’agir sur la baisse de l’immunité et de normaliser un bilan hépatique. » Enfin, elle se montre incroyablement efficace face au syndrome mainsEn faisant disparaître pieds. « ces picotements violents et ces brûlures intenses des extrémités, l’acupuncture permet aux patients de poursuivre leur traitement à la dose maximale le plus longtemps possible, et donc de ne pas compromettre leurs chances de guéric.d. son. » EFA-ASMAF (école française d’acupuncture). www.meridiens.org ROSE MAGAZINE 85 VIVRE MIEUX marieandrée AUQUIER Sophrologue Frédéric boukobza La panseuse positive Naturopathe L’homme du terrain 86 ROSE MAGAZINE à l’image de la plante, a besoin d’un terrain de qualité pour se maintenir en santé ou pour la retrouver. Je peux accompagner les malades en tentant de renforcer leur vitalité et en les aidant à mieux supporter les traitements lourds. » Pour comprendre l’état du terrain, Frédéric Boukobza réalise un bilan de vitalité : il s’agit de mesurer la capacité de retour à l’équilibre de l’organisme en faisant un inventaire précis des forces et faiblesses de nos différentes fonctions, en mettant en évidence la nature des surcharges et leurs voies d’élimination les plus appropriées. Adaptée à chacun, la naturopathie repose sur de simples règles de bon sens : mieux manger et mieux digérer, mieux gérer son mental et son stress, mieux éliminer les déchets métaboliques par une activité physique régulière et adaptée… Un nouvel art de c.d. vivre, en somme ! Frédéric Boukobza est naturopathe et directeur de l’Institut supérieur de naturopathie (Isupnat). isupnat.fr Pierre-Emmanuel Rastoin Lorsqu’on entre dans son cabinet ultra zen, inutile de lui cacher le paquet de chips régulièrement avalé ou la barre chocolatée cachée dans un tiroir du bureau. Il voit tout. Ou, du moins, le devine. à la suite d’un « pépin de santé » il y a longtemps, un ami lui avait conseillé de rencontrer un naturopathe. « Ce qu’il m’a dit sur moi, aucun médecin ne me l’avait dit en quarante ans. » Bluffé, Frédéric Boukobza étudie la naturopathie, abandonnant sans regret sa vie de conseiller fiscal international stressé. « L’homme, Il y a vingt-quatre ans, MarieAndrée, enceinte, se fabrique une cassette de relaxation qu’elle fait régulièrement écouter à son bébé. Lorsqu’il développe une leucémie, elle lui fait réécouter la cassette. Et lui crée un univers : les draps sont la mer, le goutte-à-goutte fait le bruit des vagues ; le petit garçon devient le capitaine du navire. Matthieu guérit. Et sa maman est aujourd’hui médecin, homéopathe, acupuncteur. Et sophrologue... Assis, les yeux fermés, les patients se laissent guider par sa voix. « Dites-vous : “Ok, j’ai un cancer. Allons voir ce qu’il a à nous dire” ». Et aussi : « Face à ce corps et à cet esprit en souffrance, on va chercher ce qui reste agréable. » Pour ne plus voir la chimio comme un traitement redoutable, le médecin incite à imaginer une armée de pompiers au travail. « Ici, on déploie des bâches pour protéger cheveux, foie... Là, on pose des balises pour que la chimio se fraye le bon chemin et atteigne sa cible... » En clair, Marie-Andrée c.d. aide à broyer le noir. academie-sophrologie.fr 01 45 57 27 20 federation-sophrologie.org ROSE MAGAZINE 87 VIVRE MIEUX Martine depondtgadet Qi gong La souFfleuse de vie Fédération des enseignants de qi gong federationqigong.com 04 42 93 34 31. Institut européen de qi gong & yang sheng - ieqg.com 88 ROSE MAGAZINE bérengère ARNAL Phytothérapeute La fée verte Pierre-Emmanuel Rastoin Médecin-acupuncteur, spécialiste de médecine traditionnelle chinoise, Martine Depondt-Gadet a accueilli des réfugiés chinois en 1989, après les événements de Tian’anmen. Ça a été le déclic. Avec eux, elle a appris à s’enraciner dans la terre, « à être dans l’instant présent, à ressentir ». Ressentir, telle est l’essence du qi gong, qui vise à connaître et à maîtriser l’énergie vitale pour pouvoir la capter et la faire circuler dans le corps, le long des méridiens. « Beaucoup plus qu’une gymnastique chinoise basée sur les points d’acupuncture, c’est un véritable art de vivre. Lorsque la circulation du qi est bonne, la santé l’est également. Inversement, lorsqu’il stagne, les maladies apparaissent. » Ainsi, chacun de ses patients sort de son cabinet avec une prescription « classique » et quelques exercices de qi gong à faire à la maison ! « Dès que vous êtes qi gong, vous êtes relaxée. Vous déposez votre corps, ici et maintenant. Votre cœur bat lentement, vos soucis s’allègent et vous c.d. vous rechargez en énergie. » Sa grand-mère est morte d’un cancer du sein quelques mois avant sa naissance. Voilà peut-être la raison pour laquelle cette gynécologue bordelaise a fait de la maladie le combat de sa vie… Aujourd’hui responsable du DU de phytothérapie de l’université de Paris XIII, au sein du département « médecines naturelles » du Pr Zelek, Bérangère Arnal rappelle que « la phytothérapie est la mère de toutes les médecines ». à ses patientes et en accord avec leur cancérologue, elle propose par exemple du desmodium adscendens pour adoucir les effets toxiques des chimiothérapies sur le foie. Elle suggère aussi de grignoter du gingembre confit débarrassé de son sucre, ou de respirer des huiles essentielles de citron et de menthe poivrée pour réduire les nausées. Et encore de se procurer de l’échinacée, de la griffe-de-chat ou du ginseng pour stimuler l’immunité, du niaouli et de la lavande contre les brûlures de la radiothérapie. Le Dr Arnal explique : « la période post-cancer est le moment ou jamais de faire attention à ce que l’on mange, de pratiquer une activité physique régulière, de s’occuper c.d. de soi... » Association médicale pour la promotion de la phytothérapie, ampphy.com à lire : Cancer du sein, prévention et accompagnement par les médecines complémentaires, de Bérengère Arnal et Martine Laganier, éd. FémininBio. ROSE MAGAZINE 89 SPORT cultiver son corps 90 ROSE MAGAZINE Stimulation du système immunitaire, facilitation du transit intestinal : une demi-heure d’activité physique quotidienne « booste » l’organisme et réduit le risque de tumeurs, particulièrement du sein et du côlon. Ces données médicales avérées ne poussent pourtant que rarement les médecins à recommander l’exercice d’un sport durant les traitements. Peur de fatiguer les patients pendant des chimiothérapies ou des radiothérapies souvent éreintantes ? Pour un Thierry Bouillet – chef du service de cancérologie à l’hôpital américain de Paris et ceinture noire de karaté qui, depuis 1998, préconise le karaté à ses patients afin d’améliorer leur qualité de vie* –, combien de médecins conseillent l’arrêt de toute activité ? Ainsi, Cécile, jeune marathonienne, s’est vu interdire la course dès sa première visite chez l’oncologue. « Arrêter ? Mais c’était impensable pour moi qui cours au moins une heure et demie par jour ! Autant me demander de cesser de m’alimenter. Bien sûr, je ne l’ai pas écouté. Le lendemain de la chimio, je suis partie pour deux heures de jogging. Le surlendemain, j’étais aux cathy BISSON urgences. évidemment, ce n’était pas malin. J’ai ensuite découvert le yoga, la barre au sol, et j’ai compris que je pouvais continuer à cultiver mon corps en douceur. » L’exercice d’un sport oui, mais pas n’importe lequel : les activités d’endurance risquent de peser sur un organisme déjà ébranlé, la piscine est souvent un nid à microbes… Et même s’il n’y a pas d’interdits, le sport doit, avant tout, rester un plaisir, une manière de ne pas se « déconnecter » de son corps. Continuer ou découvrir une gym « douce » permet de se placer déjà dans l’après-cancer, de ne pas se « démuscler », bien sûr, mais aussi de garder une activité sociale normale, en compagnie de bien-portants. Yoga, Pilates, judo, tai chi, danse, barre au sol, ou, tout simplement, marche à pied, le choix est vaste et chaque patient devient son propre prescripteur. Il c.l.r. suffit d’écouter ses envies. *sportetcancer.com Professeur de barre au sol la Princesse aux petits pas Getty Images/Pierre-Emmanuel Rastoin L’exercice physique régulier diminue de 38 % le risque de cancer du sein, et de 50 % celui du côlon. Reste à trouver le sport qui vous correspond ! « Avec moi, la “barre au sol” commence debout ! Et les exercices se réalisent sans barre ! » Voilà pour le contre-pied. Cathy Bisson, crinière rousse et dynamisme contagieux, enseigne la danse aux étudiants du Conservatoire mais ici, au studio Amana, elle privilégie le bien-être à la performance. « La barre au sol, ce sont les exercices d’échauffement des danseuses, un mélange d’étirements, de mouvements basés sur la respiration qui musclent à la fois en profondeur et en douceur. On travaille l’élan, la souplesse, en musique et dans la globalité. Il y a des jeunes, des plus âgées, des malades, des bien-portantes : chacune laisse ses problèmes à la porte du studio et avance à son rythme. Hors de question de se fatiguer avec des “à-coups” ou des challenges impossibles ! Les blocages se défont tout seuls. Le corps est à ce point désinhibé qu’à la fin du cours, les filles me disent souvent qu’elles planent ! » Et les résultats sont rapides : une série de mouvements difficiles cinq séances plus tôt – comme toucher le sol du bout de ses doigts ou tenir un équilibre – se réalisent sans tension. De petits pas, certes. Mais pour des femmes malades, autant de victoires, la preuve qu’elles gardent la maîtrise c.l.r. de leur corps. Cathy enseigne au studio Amana, 21, rue Froideveaux, 75014 Paris. ROSE MAGAZINE 91 VéRONIQUE JANNOT la double vie de véronique Côté face, une jeune première adulée. Côté pile, une femme ravagée, à vingt-deux ans, par une ablation des ovaires et de l’utérus. Véronique Jannot s’est reconstruite, dans le plus grand secret : auriculothérapie, maîtrise des énergies, méditation... Témoignage. « Mon premier c’est désir... » De Véronique Jannot, nous connaissons tous la voix veloutée, ce minuscule tremblement en fin de phrase comme si un carillon d’enfance ponctuait toujours et encore la mélodie. Le sourire restera sans doute dans nos souvenirs celui de Joëlle Mazart, l’assistante sociale de Pause Café, série qui, en 1981, propulsa la jeune actrice au panthéon des saintes télévisuelles. Et puis, aussi, indémodables, les mélodies amoureuses avec Laurent Voulzy. Mon second ? « Du plaisir », assure la chanson. « Mon troisième, c’est souffrir. » à vingt-deux ans, Véronique Jannot subit une ablation de l’utérus et des ovaires. Une épreuve « qui change le regard sur la vie, 92 ROSE MAGAZINE M sur les autres, sur la souffrance humaine ». Au début, des maux de ventre, violents, certes, mais parfaitement expliqués par un gynécologue se piquant de psychologie : « douleurs psychosomatiques, nerveuses ». C’est normal, on le sait bien, toutes ces actrices sont un peu dérangées de la tête, capricieuses, douillettes ! Les semaines passent. Puis les mois, jusqu’à ce Noël 1978 où, terrassée par une énorme fièvre, l’actrice consulte d’urgence à l’hôpital Tenon. Une cœlioscopie révèle des dizaines de minuscules tumeurs dans l’abdomen. On élimine les indésirables. Véronique se relève. Mais le refrain de la douleur continue. Trois mois plus tard, les crises reprennent de plus belle. Pierre Terrasson/JLPPA/CIT’images/Visual céline lis-raoux Cette fois, elle se rend directement auprès du Pr Salat-Baroux, à Paris. Re-cœlioscopie. Au réveil, le verdict tombe : ablation nécessaire d’un ovaire. « C’était violent, mais ma mère avait subi la même opération et cela ne l’avait pas empêchée de me donner naissance, après. » La jeune femme réclame quelques jours de répit pour se préparer à l’épreuve. « La veille de mon admission, maman tournait et virait dans la chambre. Excédée, je l’interroge. C’est alors qu’elle me révèle l’impensable : ce n’était pas un ovaire, qu’on allait m’enlever, mais probablement les deux, plus l’utérus. » “Les médecines dites douces ne sont pas des gadgets. Grâce à elles, chacun devient responsable de sa santé.” Quand la vie vacille, quand le sol se dérobe, la colère devient une protection. « J’ai hurlé contre ma mère, je lui ai demandé de sortir de ma chambre. Aujourd’hui, je mesure quelle a été sa douleur de m’apprendre ce qui allait me dévaster. » Au début, Véronique diffère l’intervention. Cherche des solutions alternatives. Mais, face à l’envahissement des cellules « frontières », c’est-à-dire à haut risque, les solutions autres que l’ablation n’existent pas. Alors, ce sera la vie sans ovaires, ni utérus. Une vie sans enfant. Une vie sans mari, « parce que les maris veulent faire des enfants ». ••• ROSE MAGAZINE 93 VéRONIQUE JANNOT Une vie très différente de celle dont elle rêvait. Commence ensuite le parcours des soins… La chimiothérapie, la douleur têtue, la fatigue, les forces qui s’amenuisent. « Ma mère m’a beaucoup aidée : très en avance sur son temps, elle était adepte de l’acupuncture. J’ai, bien sûr, suivi tout le protocole de la chimio. Mais en plus de cela, à Lyon, le Pr Nogier, père de l’auriculothérapie, m’a soignée en réharmonisant mes énergies. Ces médecines-là ne sont pas des gadgets : on ne soigne pas une pathologie, on respecte le “terrain” de chacun. Le patient devient responsable de sa santé. C’est à cette époque que j’ai pris conscience de la responsabilité que nous avons de nous-même, de notre vie. » La jeune malade se remet de l’opération lorsqu’un coup de téléphone va à la fois lui sauver la vie et la placer face à un dilemme. Pierre Granier-Deferre la réclame pour les essais du Toubib, un film où Alain Delon tient le rôle-titre. Que faire ? Dire sa maladie et risquer de se voir éconduire ? Ne plus travailler ? L’actrice se tait. Passe les essais avec succès. Débute alors un éprouvant tour- “Cette épreuve a aussi marqué le départ d’une merveilleuse aventure intérieure.” 94 ROSE MAGAZINE nage où elle serre les dents, prend sur elle durant les prises qui s’éternisent, se refarde sans cesse car le maquillage « vire » au cours de la journée. Finalement, elle révèle sa maladie à Delon. Qui, délicat, gardera le secret. Un silence qui perdurera trente ans Pourquoi ne rien dire ? Parce que Véronique Jannot est l’image même de la santé, de la beauté, de la fraîcheur ? Parce qu’on fait moins confiance à une « malade » – futelle guérie – pour un rôle-titre ? Parce que le mot « cancer » vous transforme en pestiférée ? « Je me suis construite autour de ce non-dit. Parfois, la douleur morale était à la limite du supportable. Les journalistes me posaient la question du bébé. Que dire ? Que cela me déchirait de ne pouvoir porter d’enfant, jamais ? Je me suis tue. Trente ans de silence. » Trente années pour apprendre à vivre avec sa souffrance. Pour la transformer. « L’épreuve nous offre une clairvoyance, elle nous ramène à l’essentiel. La vie est fragile. Beaucoup l’ignorent. Nous, les malades, le savons. Cela nous donne le courage de faire des choix de vie que nous n’aurions peutêtre pas osés. Nous ne perdons pas de temps avec des choses superficielles. Pour ma part, j’ai compris la brûlante nécessité d’établir une harmonie entre mon mode de vie et mon être profond. » Le coming out est venu en 2006 avec la parution de Trouver le chemin, témoignage de l’actrice sur sa rencontre avec le boud dhisme. « C’était pour moi le moment. Ce livre n’avait pas vocation à parler de cancer, mais je ne pouvais expliquer honnêtement mon cheminement spirituel en éludant cette épreuve qui a aussi marqué le départ d’une merveilleuse aventure intérieure. Lorsque j’ai rendu ce livre révélant ma blessure intime, je me suis sentie au bord d’un gouffre. Mais j’y suis allée. » Le livre a été une déflagration. 300 000 exemplaires vendus. Des milliers de malades ont trouvé dans ce récit un écho à leurs peurs, leurs maux et, surtout, leurs espérances. Beaucoup ont découvert derrière le ravissant visage une femme entière. Entière, avec ou sans ovaires. Une très belle femme. c.l.-r. à lire : Trouver le chemin, par Véronique Jannot, éditions Michel Lafon. 18,50 €. BEAUTÉ 98. Du blush à l’âme Un peu partout dans les hôpitaux, infirmières et esthéticiennes spécialisées redonnent des couleurs aux patientes. Reportage. 106. Objectif relooking Encore malades, Isabelle et Delphine ont confié leur visage à nos spécialistes beauté. Transformation. 114. de l’eau pour la peau Les conseils du Dr Coquard-Schmidt, dermatologue. 116. mine anti-crise Crèmes, laits et masques... Tous les produits qui sauvent la peau. 117. arsenal beauté Plainpicture Fond de teint, blush, mascara... Se maquiller sans maltraiter, c’est possible. ROSE MAGAZINE 3 Onco-esthétique Du blush à l’âme Un soupçon de rouge ici, une touche de poudre là, quelques massages... Partout en France, esthéticiennes et infirmières spécialisées redonnent des couleurs aux patientes hospitalisées. Et, pour un temps, la maladie s’éloigne... Frédérique Jouval texte anne-sophie douet. photos frédérique jouval. 98 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 99 Onco-esthétique Frédérique Jouval Perruque tendance ou foulard parme ? Marie-Christine écoute attentivement les conseils d’Yveline Barbault, coiffeuse au centre Léon-Bérard de Lyon. ROSE MAGAZINE 101 Onco-esthétique Frédérique Jouval Le temps d’une séance de maquillage ou d’un soin du visage, Marie-Pierre Chapelle (ci-dessous) et Pascale Marchal (à droite), esthéticiennes du CEW, ont rendu le sourire à Sylvie et Christine, en traitement à l’institut Curie de Paris. ROSE MAGAZINE 103 Onco-esthétique Petite femme tout en rondeurs de soixante-trois ans, Janine connaît bien les couloirs de l’institut Curie. C’est dans ce centre parisien de traitement des cancers qu’elle a été soignée pour la première fois en 2002. Aujourd’hui, elle souffre d’une récidive, doit reprendre les séances de chimiothérapie. Et recomposer avec la chute de ses cheveux, de ses cils et de ses sourcils. Pourtant, en neuf ans, « quelque chose a changé ». Si les lieux restent les mêmes – une vaste salle pouvant accueillir une dizaine de malades –, si l’angoisse affleure toujours, Janine vit mieux ces séances. Car, une fois par mois, pendant que le traitement combat la maladie, elle confie son visage ou ses mains à P une esthéticienne de Cosmetic Executive Women (CEW). L’association, dont la branche française est née en 1992, réunit vingt-cinq esthéticiennes réparties dans autant de centres de beauté (dont six en province), tous installés en milieu hospitalier. Comme l’association « La Vie, de plus belle », CEW dispense des soins esthétiques gratuits aux patientes qui le souhaitent. Aujourd’hui, la bonne fée de Janine s’appelle Marie-Pierre Chapelle. Socio-esthéticienne formée au Codes (Cours d’esthétique à option humanitaire et sociale), cette jolie femme élancée intervient depuis 2003 au centre de cancérologie. Beauté des mains ou des pieds, modelage, soin du visage, ma- Moment complice entre Yveline Barbault et Lucia-Helena, jeune patiente. 104 ROSE MAGAZINE rendez-vous enseignent les bons gestes, ceux qui permettent de se regarder de nouveau. » Janine, Odile et les autres ne sont pas les seules à reconnaître les bienfaits de ce service. Le corps médical, d’abord méfiant, a lui aussi fini par se laisser convaincre. Même si, comme le rappelle Françoise Montenay, la présidente de CEW, il a fallu vaincre de nombreuses réticences : « A nos débuts, on nous reprochait de pénétrer un univers qui n’était pas le nôtre. Chez les kinés et les médecins, on se demandait bien à quoi pouvaient servir nos “papouilles”… » Le Dr Didier Mayeur, cancérologue au centre hospitalier de Versailles (Yvelines), confirme. Quand l’onco-esthétique a fait son entrée à l’hôpital, il reconnaît avoir été « étonné ». Pour les disciples d’Esculape, la priorité est ailleurs : dans la recherche du traitement le plus efficace possible. quillage… Son agenda ne désemplit pas. « Ici, la demande est très forte, explique-t-elle. Pour ces femmes, le soin esthétique, c’est aussi une bulle de détente, un moment suspendu qui leur fait oublier la maladie. » De fait, les patientes ont immédiatement plébiscité cette parenthèse beauté. Odile, soixante et un ans, soignée pour un cancer du sein, est une habituée. Quand MariePierre lui ôte sa perruque blonde pour masser son cuir chevelu, cette Parisienne l’avoue : elle est « en confiance ». Elle qui s’offrait régulièrement un soin en institut reconnaît qu’« à présent (elle n’oserait) plus y mettre les pieds ». La fin de la séance approche. Pendant que l’esthéticienne redonne des couleurs à son visage, Odile, à nouveau coiffée, poursuit : « Quand vous êtes bien-portante, vous savez ce qui vous va. Mais une fois malade, vous devez vous habituer à un nouveau visage. Et apprendre à vous maquiller différemment. Ces Oublier la maladie le temps d’un soin Frédérique Jouval “la première victoire sur la maladie, c’est de ne pas faire malade” Aujourd’hui, ce médecin reconnaît volontiers « combien ces soins sont importants pour les femmes. D’abord, parce qu’il arrive encore que des patientes refusent un traitement par peur d’une dégradation de leur image, ensuite, parce qu’une image de soi restaurée apporte un vrai plus dans l’acceptation des contraintes du traitement ». Françoise Montenay insiste : « La beauté n’a rien de futile. Des femmes sans cils ni sourcils, qui ont des cernes sous les yeux et une image d’elle-même épouvantable, peuvent être transformées en une seule séance. » à l’institut Curie aussi, les soignants croient aux bienfaits de l’oncoesthétique. Au point, confie Marie-Pierre Chapelle, que des médecins la sollicitent parfois en urgence pour intervenir auprès d’une patiente en détresse. Renouer avec ce corps malade à sept cents kilomètres de là, Nathalie Molines, psychosocioesthéticienne, travaille elle aussi sur la reconstruction de l’estime de soi. Au Centre azuréen de cancérologie de Mougins (Alpes-Maritimes), elle tisse des « liens intimes » avec des patientes parfois « traumatisées par leur nouvelle image ». En les familiarisant avec les prothèses capillaires, en leur montrant comment le maquillage peut compenser la perte d’éclat du visage, bref, en masquant ces signes qui leur rappellent sans cesse la gravité de leur maladie, elle « arrive petit à petit à leur redonner l’envie de renouer avec ce corps malade, dont elles pensent qu’il les a trahies ». Avec, parfois, des résultats mesurables : « Une patiente refusait tout contact physique avec son mari. Elle m’a confié qu’après un soin, elle avait eu envie de se retrouver à nouveau dans ses bras… » Retour à Paris. à l’Hôpital européen Georges-Pompidou, une infirmière en oncologie a réussi à concilier les approches médicale et esthétique. Formée en conseil à l’image, fondatrice de l’association Apima (Apprivoiser son image dans la maladie), MarieLaure Allouis laisse, une journée par semaine, sa blouse blanche au vestiaire. Sur le chariot qu’elle pousse alors dans les couloirs de son service, ni seringues ni cathéters mais perruques, turbans et rouges à lèvres. Dans le local mis à sa disposition en cancérologie, ou dans les chambres, si les patientes ne peuvent se déplacer, la jeune femme propose d’essayer chapeaux et foulards, dispense des conseils pour ménager sa peau et ses ongles, distribue des échantillons de produits de beauté… Chaque mardi, quatre à sept patientes bénéficient de son savoir-faire. Et sortent avec le sourire. Car Marie-Laure les en a persuadées : « La première victoire sur la maladie, c’est de ne pas “faire malade”. » anne-sophie douet Adresses utiles APIMA 5, avenue du Général-Leclerc BAL 15 - 92340 Bourg-la-Reine apima.fr CEW 01 72 92 06 39 cew.asso.fr Elite Hair International 10 ter, rue Bessières 75017 Paris - tél. : 01 49 70 86 60 elite-hair.com Embellie embellieboutique.net (rubrique Association). Etincelle 27 bis, avenue Victor-Cresson 92130 Issy-les-Moulineaux tél. : 01 44 30 03 03 etincelle.asso.fr La Vie, de plus belle 20, rue Surcouf - 75007 Paris tél. : 01 45 51 20 14 laviedeplusbelle.org ROSE MAGAZINE 105 AVANT-APRÈS OBJECTIF RELOOKING 9h ISABELLE Responsable d’une galerie d’art à Lyon, Isabelle est arrivée la veille à Paris pour ne pas rater son rendezvous avec Rose Mag ! Très en forme malgré ses dernières séances de chimio, la jeune femme a décidé de jouer à fond la carte de la transformation. 106 ROSE MAGAZINE Deux lectrices en fin de traitements ont confié leur visage à une équipe de professionnelles de la beauté. Résultat bluffant. réalisation nathalie croquet photos ari rossner 14h Delphine à peine descendue du TGV en provenance de Lille, Delphine découvre le studio. à la fois ravie et inquiète, cette secrétaire médicale de quarante ans, maman de trois enfants, s’est laissée tenter par l’aventure du relooking pour « renouer avec sa féminité ». ROSE MAGAZINE 107 AVANT-APRÈS Café matinal pour Any d’Avray. Attentive et patiente, la pionnière des chevelures d’appoint a pris très à cœur sa mission de conseil. 9h10 Première étape : la chevelure. Isabelle opte d’emblée pour une perruque aux tons naturels. Any d’Avray l’encourage à oser des cheveux flamboyants, plus en accord avec sa personnalité. 108 ROSE MAGAZINE 9h45 10h30 Le rouge est adopté ! Ravie de sa nouvelle aura, Isabelle s’essaie à quelques grimaces dans le miroir. La jeune femme adore « le côté décoiffé et lumineux, un peu voyou » de sa tête new look. Valérie, la maquilleuse, pose des faux cils à Isabelle. Un geste essentiel car l’absence de cils « éteint » le regard. Un point de colle, une frangette, et déjà une prunelle hollywoodienne ! DELPHINE 14h15 Fred Pierre-François / DR ISABELLE Valérie a choisi le maquillage pour les peaux sensibilisées par les traitements de la marque bio Couleur Caramel. Quelques essais de tons et de textures, et Delphine est conquise ! 14h40 Any discute avec Delphine de la couleur idéale de sa perruque. « Retrouver l’originale ? », s’interroge la jeune femme. Any lui conseille plutôt un blond moins clair qui met en valeur ses yeux bleu-vert. ROSE MAGAZINE 109 AVANT-APRÈS DELPHINE 11h Valérie farde les yeux de son modèle. Puis arrive un moment essentiel : la maquilleuse dessine avec précision la ligne des sourcils, dont l’absence déstructure le visage. 15h La coupe, la couleur, tout lui plaît. Pour le maquillage, Valérie s’est contentée de souligner la ligne des sourcils de Delphine et d’unifier son teint de blonde. Puis, un rien de fard, du blush, un soupçon de rimmel... ISABELLE Un léger gloss sur la bouche, un dernier « décoiffage » artistique d’Any d’Avray, un nuage de poudre matifiant et la Lyonnaise interroge son reflet. « Miroir, mon beau miroir ? » 110 ROSE MAGAZINE Fred Pierre-François / DR 11h20 15h15 En dessinant la bouche, Valérie renouvelle ses conseils : choisir un fond de teint traitant mais ne jamais surcharger pour éviter l’aspect « plâtré ». Et hydrater plusieurs fois dans la journée. Retrouvez nos conseils maquillage sur notre site rosemagazine.fr ROSE MAGAZINE 111 AVANT-APRÈS « Jamais, seule, je n’aurais osé ce rouge ni ce maquillage ! Mais le résultat me ressemble : punchy, rigolo et un rien décalé. » « Mon mari, mes fils Baptiste et Théo, et même ma petite Valentine de quatre ans vont être soufflés de me voir si sophistiquée ! » Combinaison pantalon jean délavé, Acoté/Cotélac, 195 €. Ceinture, Cotélac 75 €. Robe jersey larges rayures Sinéquanone 79,90 €. 12h 17h à trente-cinq ans, la jolie galeriste vient de se découvrir un talent de modèle. Très à l’aise, elle sourit et virevolte devant le photographe, qui en reste bluffé. Une star est née ! 112 ROSE MAGAZINE Delphine Fred Pierre-François / DR ISABELLE Douceur, grâce, réserve... La maman « chti » a remporté son pari. La voilà transformée en une femme mystérieuse et un brin inaccessible : quasi-fatale, quoi ! ROSE MAGAZINE 113 DERMATO Rose Magazine. Quelles réactions provoque la radiothérapie ? Dr Barbara Coquard-Schmidt. Parfois aucune. Parfois, des rougeurs au niveau de la zone traitée, plus rarement une ulcération. Dans les trois à quatre semaines suivant le début du traitement, la peau peut devenir sèche et peler comme après un coup de soleil, ou prendre une teinte marron. Et pour les chimiothérapies ? La chimio ne « sait » pas cibler les seules cellules malades. Elle entraîne donc souvent des effets indésirables comme la chute des cheveux et des poils, mais aussi une sécheresse cutanée, voire un syndrome « mains-pieds » – une peau desséchée qui pèle et se fissure. Quelques rares patientes subissent des éruptions au niveau du visage et du tronc (qu’on pourrait prendre pour de l’acné), parfois une rougeur diffuse sur l’ensemble du corps. Les ongles peuvent-ils aussi être affectés ? Oui, ils peuvent noircir, présenter des stries, parfois se décoller. Tous ces effets sont-ils réversibles ? Oui, en quelques semaines, quelques mois au pire, ils disparaissent. Peut-on les prévenir ? Pour préserver sa peau pendant les traitements, les conseils du Dr Barbara Coquard-Schmidt*. DE L’EAU POUR LA PEAU ! 114 ROSE MAGAZINE Getty images propos recueillis par anne-sophie douet Les masques hydratants sont-ils indiqués ? Oui, ils sont même bénéfiques ! Sauf pour les personnes victimes d’une réaction acnéiforme à la chimio, qui devront consulter un dermatologue. Mieux vaut choisir son masque chez les spécialistes des peaux atopiques ou appliquer une couche épaisse de cold cream pendant une dizaine de minutes (en pharmacie), avant de retirer le surplus à l’aide d’une solution de type Créaline H2O. Terminer par une brumisation d’eau thermale. Y a-t-il des comportements à éviter ? Oui, pas de produits agressifs ni d’exposition au soleil, afin de ne pas fragiliser une peau déjà malmenée. Pour le syndrome mains-pieds, éviter la vaisselle, la lessive à la main et la course à pied. En cas de perte des cheveux, doit-on continuer les shampooings ? Oui, on peut laver son crâne tous les deux jours avec un shampooing doux ou un nettoyant de type syndet. Pour les démangeaisons du cuir chevelu, appliquer un produit émollient, voire un dermocorticoïde léger pour son effet anti-inflammatoire (sur ordonnance). Pour les boutons et les cernes, existe-t-il des produits de camouflage ? Oui, différents correcteurs de teint et anticernes camouflent cernes et boutons sans effet masque. Pour contrer la chute des cheveux, il existe un casque réfrigérant qui réduit l’afflux sanguin dans le cuir chevelu et donc la quantité de produit « toxique ». Sur les ongles, on conseille d’appliquer plusieurs couches de vernis foncé - sorte de barrière contre la lumière du jour - avant le début de la chimio. Régulièrement, on enlève le vernis à l’aide d’un dissolvant sans acétone, et on applique à nouveau deux couches. Comment venir à bout des cicatrices d’ablation ou d’exérèse ? Pendant le traitement, quelles règles d’hygiène générales observer ? Doit-on fuir le soleil ? Couper ses ongles court et les vernir, faire sa toilette avec un savon doux (de type syndet, un « savon sans savon » bien toléré par les peaux fragilisées), appliquer une crème hydratante sans parfum ni parabène dès que le besoin s’en fait sentir, plusieurs fois par jour s’il le faut. Une cicatrice évolue pendant dix-huit mois. Pour éviter qu’elle n’adhère, on peut la masser avec une crème hydratante, ou voir un kiné, qui l’assouplira et la décollera. Ces séances (qu’un oncologue ou un médecin de famille peut prescrire) préparent aussi une éventuelle chirurgie réparatrice. Oui, dès le début du traitement et jusqu’à un an après la fin des cures. Sinon, des précautions de base s’imposent : porter vêtements couvrants et lunettes noires, et appliquer une crème indice 50+ sur les zones découvertes. *Dermatologue aux thermes du Connétable, à La Roche-Posay. ROSE MAGAZINE 115 SOIN MAQUILLAGE arsenal BEAUTÉ mine anti-crise 1 NETTOYER Des produits haute tolérance pour un fini impeccable. 2 MARIONNAUD DÉMAQUILLANT YEUX bi-phase Elimine tous les maquillages sans agresser le contour de l’œil, testé ophtalmologiquement. 7,90 €. 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ROSE MAGAZINE 117 LA TROUSSE BEAUTÉ DE… MOrGANne BELLO Créatrice de bijoux “ Je n’ai jamais abandonné l’idée d’être belle… ... même au plus fort des traitements. Lorsque j’ai perdu mes cheveux, j’ai tout de suite acheté une première perruque, puis une nouvelle : aujourd’hui, j’en ai dix, une noir corbeau frangée à la Crazy Horse, une blond miel dégradée, une brune à longues mèches… Je fais l’effort, quel que soit mon état de fatigue, de me maquiller. Ma peau étant devenue plus exigeante durant la chimiothérapie, j’ai choisi l’eau d’Uriage pour le démaquillage et le peeling quotidien de Kanebo, qui éclaire le teint. Pour les peaux fragilisées, j’ai aussi découvert la gamme L’Or de Vie, de Dior : le sérum, la crème hydratante, le contour des yeux… tout est extraordinairement efficace. Côté maquillage, j’utilise la poudre Starless Night de M.A.C, la poudre Soleil Tan et le gloss Lèvres scintillantes de Chanel. Enfin, pour booster la repousse des cils, Revitalash.” Biafine, Baume hydratant corporel Cicabiafine, 200 ml, 10,40 € Chanel, Soleil Tan, 50 € Dior, Crème l’Or de Vie, 50 ml, 350,56 € Kanebo, Sensai peeling poudre de soie, 100 ml, 72 € M.A.C, Poudre éclat Starless night, 20 € Revitalash, Soin revitalisant pour Cils, 2 ml, 70 € Uriage, Eau démaquillante micellaire, 500 ml, 9,70 € 118 ROSE MAGAZINE ROSE MAGAZINE 119 « Ce bout de mon corps, jamais ne Ester, 42 ans reviendra, je suis passée par la co- “la reconstruction est ma revanche” lère, la peur. (…) Et puis plusieurs années ont passé (…). Si je n’avais “Si le chirurgien ne m’avait pas immédiatement parlé de reconstruction mam- pas fait cette mastectomie il y a maire, je n’aurais jamais accepté l’ablation. A 33 ans, je ne me voyais pas avec dix ans, je ne serais pas en train un seul sein. Mais je ne voulais pas non plus d’un corps étranger, donc d’une d’écrire sur le clavier ce matin. » prothèse, surtout avec la perspective de devoir la changer dans dix ans. Pour C’est un message, signé Clara, moi, cela signifiait que je n’en finirais jamais avec ce cancer ! posté sur un site d’information En surfant sur des sites américains, j’ai découvert la technique du DIEP. Les destiné aux femmes. témoignages étaient enthousiastes, j’ai demandé la même chose. Mais le chirur- En France, chaque année, elles gien m’a proposé, lui, la technique du TRAM. Impensable. Je ne voulais pas sont 12 000 à subir l’ablation d’un qu’on me prenne un muscle du ventre après m’avoir enlevé un sein. D’autant sein, parfois seule solution pour que j’espérais bien, un jour, avoir des enfants. J’ai donc insisté pour bénéficier du lutter contre un cancer qui les DIEP et le médecin m’a orienté vers le professeur Lantieri, célèbre pour avoir menace. Une épreuve de plus à réalisé des greffes de visages. C’est lui qui m’a opérée. affronter, après l’annonce de la Après l’intervention, j’ai été soulagée d’être débarrassée de ce sein malade maladie elle-même puis l’éventuel traitement. FOCUS SEIN 122. se reconstruire après l’ablation Après une mastectomie, certaines rêvent de chirurgie comme d’une revanche. D’autres pas. 126. à quel sein se vouer ? Prothèses, TRAM, DIEP, les techniques de reconstruction évoluent... Ce qu’il faut savoir avant de se lancer. 129. Dépassements d’honoraires... Plus de quatre médecins spécialistes sur dix sont aujourd’hui installés en secteur 2. Plainpicture C MASTECTOMIE C marie-pierre garrabos 122 ROSE MAGAZINE Plainpicture Se reconstruire après l’ablation Toutes les femmes opérées ne rêvent pas d’un nouveau sein rebondi. Certaines, même, n’en veulent plus aucun. En revanche, toutes doivent faire le deuil du disparu. « Ce bout de mon corps, jamais ne reviendra, j’ai ressenti la colère, la peur. (…) Et puis plusieurs années ont passé (…). Si je n’avais pas fait cette mastectomie il y a dix ans, je ne serais pas en train d’écrire sur le clavier ce matin. » C’est un message, signé Clara, posté sur un site d’information destiné aux femmes. En France, chaque année, elles sont 12 000 à subir l’ablation d’un sein, parfois seule solution pour lutter contre un cancer qui les menace. Une épreuve de plus à affronter, après l’annonce de la maladie elle-même puis l’éventuel traitement. « Une ablation est, pour chaque femme, une effraction corporelle, une mutilation », confirme Lydia Taïeb, psychologue et coauteur avec élise Ricadat de Après le cancer du sein, un féminin à reconstruire (éditions AlbinMichel). « Mais chacune la vit de façon singulière. » Certaines patientes se montrent soulagées d’être débarrassées de cet organe douloureux. D’autres appréhendent une perte de leur féminité, une atteinte à leur identité de mère, d’amante. Atteinte d’autant plus difficile à supporter que la poitrine subit, comme nulle autre partie du corps, les diktats esthétiques de la société. « Mais aucune femme n’échappe au sentiment de vide intérieur, poursuit Lydia Taïeb. Et toutes devront faire le deuil de cette transformation corporelle. Il faut accepter d’être triste, en colère, de ressentir de l’injustice et un sentiment d’impuissance. » Ester, 42 ans “la reconstruction est ma revanche” « Si le chirurgien ne m’avait pas immédiatement parlé de reconstruction mammaire, je n’aurais jamais accepté l’ablation. A 33 ans, je ne me voyais pas avec un seul sein. Mais je ne voulais pas non plus d’un corps étranger, donc d’une prothèse, surtout avec la perspective de devoir la changer dans dix ans. Pour moi, cela signifiait que je n’en finirais jamais avec ce cancer ! En surfant sur des sites américains, j’ai découvert la technique du DIEP. Les témoignages étaient enthousiastes, j’ai demandé la même chose. Mais le chirurgien m’a proposé, lui, la technique du TRAM. Impensable. Je ne voulais pas qu’on me prenne un muscle du ventre après m’avoir enlevé un sein. D’autant que j’espérais bien, un jour, avoir des enfants. J’ai donc insisté pour bénéficier du DIEP et le médecin m’a orientée vers le professeur Lantieri, célèbre pour avoir réalisé des greffes de visage. C’est lui qui m’a opérée. Après l’intervention, j’ai été soulagée d’être débarrassée de ce sein malade et, six mois après, je suis revenue pour la reconstruction du mamelon et de l’aréole. J’en ai profité pour demander une augmentation mammaire, ce qui m’a bien motivée pour retourner sur la table d’opération ! Aujourd’hui, même si les petites cicatrices me rappellent tous les jours l’intervention, la reconstruction est pour moi une revanche sur la maladie. Du coup, j’ai créé l’association R.S. Diep (www.diep-asso.fr) pour que d’autres femmes puissent retrouver leur poitrine sans être forcées de subir une technique qui ne leur convient pas. » à lire. Au sein… du cancer. Guide pour gagner contre la maladie, d’Ester Lynne, Dangles éditions. Un long parcours, jalonné de questions : à quoi vais-je ressembler ? Serai-je encore une femme ? Comment susciter le désir ? Aurai-je encore une vie sexuelle ? « Une femme fragile, qui aura investi toute sa féminité dans l’apparence, peut s’effondrer avec la perte de son sein, prévient Lydia Taïeb. En revanche, plus une femme s’est construite avec une image solide de sa féminité, mieux ce deuil s’accomplira et plus solidement elle se reconstruira. » Cette bonne estime de soi en tant que femme est forgée dès l’enfance. C’est la mère qui transmet à sa petite fille une image positive de la féminité. Et c’est le père ensuite qui pose sur elle un regard bienveillant. « Après le temps du deuil, la femme "solide sur ses bases" pourra renouer avec cette féminité qui n’aura évidemment pas disparu avec le sein », assure Lydia Taïeb. Le compagnon, sa présence pendant la maladie, la façon dont lui-même accepte ce corps modifié peuvent s’avérer de précieux alliés pour aider une femme à s’apprivoiser à son tour. Mais d’autres renforts sont aussi à solliciter : une association, d’autres femmes, proches ou anonymes, ayant vécu la même chose. ••• ROSE MAGAZINE 123 MASTECTOMIE Un sein, oui, mais pas le décolleté de Pamela Anderson Au cours ou au terme de ce cheminement, 60 % des femmes ayant subi une ablation diront non à une reconstruction mammaire. « Certaines ne veulent plus revivre un autre parcours du combattant, explique Lydia Taïeb. Elles ont assez souffert, passé assez de temps à l’hôpital, basta ! Elles se réapproprieront leur corps différemment. » Pour d’autres, le corps amazone est aussi une preuve du combat mené, des souffrances traversées. Le sein perdu est vécu comme un tribut payé à la maladie, et un leurre n’aurait aucune valeur. Cette décision, qui heurte le modèle de perfection physique vanté par notre société, est souvent mal acceptée. Certains la comprennent d’autant moins que la chirurgie fournit des réponses. Même l’institut Curie, à Paris, 124 ROSE MAGAZINE Laurence, 42 ans « Aujourd’hui, je n’ai plus de seins du tout et je l’accepte. J’ai même décidé de me faire tatouer sur le torse une guirlande fleurie. Mes grandes cicatrices rappellent trop la maladie et j’ai envie de les cacher par quelque chose de gai, qui me plaît. C’est l’an dernier que l’on m’a annoncé un cancer du sein droit, alors que j’avais déjà été traitée à gauche deux ans auparavant. On m’a prescrit l’ablation et j’ai demandé que le gauche soit lui aussi retiré. On m’a parlé de reconstruction immédiate. Mais j’hésitais et j’ai cherché des informations sur les différentes techniques. Je ne voulais ni d’une prothèse, ni qu’on m’enlève un morceau de muscle. Sur Internet, je suis tombée sur Les Amazones s’exposent. Et là, j’ai vu la photo d’une femme tatouée sur le buste. J’ai trouvé ça très beau. Ensuite, sur le site d’une autre association, Europa Donna, j’ai trouvé le témoignage d’une femme tatouée. Deux dermatologues contactés m’ont juste conseillé d’attendre que la cicatrice soit stabilisée et de veiller aux conditions d’hygiène et de stérilité. Restait à trouver le tatoueur. J’ai choisi une femme, dont le trait me séduisait. à l’hôpital, après la double mastectomie, J’étais heureuse de ne plus avoir ces seins, symboles de la maladie. Quand je me suis vue dans la glace pour la première fois avec l’infirmière, j’ai trouvé ça bizarre, évidemment, mais pas horrible. C’était pire de ne plus avoir de cheveux ! Aujourd’hui, je ne me sens pas moins femme pour autant. La féminité ne dépend pas des seins, ils n’en sont qu’un détail. De toute façon, je n’aurais pas retrouvé les mêmes qu’avant. Je n’ai pas de difficulté à montrer mes cicatrices, mais avec le tatouage, ce sera quand même plus simple, j’ose dire plus séduisant. Déjà, j’ai donné tous mes soutiens-gorge à ma sœur. » « docteur » affirme : « Vous êtes jeune, vous n’allez pas vivre sans sein ! » Et surtout, poursuit la psy, le praticien doit expliquer à sa patiente qu’elle n’aura ni le même sein qu’avant, ni le décolleté de Pamela Anderson ! « Il est impératif que la femme intègre cela, martèle Sylvie Dolbeault. Le jour où elle réalisera qu’elle n’est plus 100 % comme avant, elle risque sinon de connaître une grande détresse. Il lui sera plus difficile de s’adapter à son nouveau physique. » Car même parfaitement réussie, la reconstruction n’efface pas le cancer. La maladie reste inscrite dans la chair et dans la mémoire. Et le nouveau sein doit lui aussi être accepté. « Faire son deuil, c’est prendre conscience que le sein reconstruit n’a rien à Bref, on n’est pas obligée d’acquiescer quand le “Je suis heureuse de ne plus avoir ces seins” Getty Images Ou une infirmière. C’est même souvent elle qui accompagne les patientes dans la première redécouverte d’elles-mêmes. Une étape essentielle. Enfin, la qualité du dialogue avec les médecins et les chirurgiens est cruciale. Obtenir des informations et des réponses précises à ses questions est le meilleur moyen d’éviter les angoisses. Quand on ignore à quoi ressemblera son corps, on peut imaginer le pire… a décidé de lancer une enquête auprès de ses « refuzniks » pour comprendre leurs motivations et adapter ses réponses. Reste que 40 % des malades ayant subi une mastectomie optent pour la reconstruction. Pour elles, le passage est obligé. Il marque l’ultime revanche. « Mais attention, prévient Sylvie Dolbeault, psychiatre, chef du département de soins de supports de l’institut Curie, il faut que la personne fasse ce choix pour elle. Pas pour son conjoint, même s’il a joué un rôle important. Ni pour obéir à l’injonction d’un chirurgien. Le médecin doit être à l’écoute du ressenti de sa patiente et non de ses propres représentations. » à lire . la brochure Cancer du sein, éditée par l'Arc. Toutes les brochures sont téléchargeables et peuvent être commandées gratuitement sur : arc-cancer.net/nos-brochures/ article/nos-brochures.html voir avec l’ancien », insiste Lydia Taïeb. Certaines femmes le comprennent dès l’annonce de l’ablation. Pour d’autres, ce travail s’effectue après la reconstruction. « C’est normal, rassure Lydia Taïeb. Pendant le traitement, on est dans un tunnel. On ne pense qu’à sauver sa peau. » C’est après, quand les visites à l’hôpital s’espacent, qu’on a soudain le temps de penser aux épreuves traversées. Voilà pourquoi, malgré leur poitrine parfaite, certaines plongent alors dans une tristesse qu’ellesmêmes et leurs proches ne parviennent pas à expliquer. Là encore, la spécialiste calme les inquiétudes : « Le sein reconstruit n’a pas d’histoire, il n’a pas nourri d’enfant, par exemple. Il faut donc l’investir psychiquement : c’est lui qui me permet de porter ce décolleté, d’avoir davantage confiance dans ma féminité. » Il n’est pas rare que certaines femmes patientent longtemps avant d’affronter le miroir, avant de montrer leur nouvelle poitrine à leur amoureux. Pourtant, c’est en portant sur ce sein un regard pacifié, en le massant, en apprenant à l’aimer que la reconstruction sera accomplie. Un long chemin parfois. « Mais il n’est jamais trop tard pour effectuer ce travail, accepter le changement et se réconcilier avec soimême, conclut Sylvie Dolbeault. Reconstruction ou pas, l’objectif est de cohabiter avec l’idée que cette maladie nous a changée. » Pour pouvoir envisager de s’aimer à nouveau, avec ce corps différent mais victorieux. marie-pierre garrabos ROSE MAGAZINE 125 CHIRURGIE MAMMAIRE En silicone, issu d’un muscle, d’un morceau de peau ou de cellules graisseuses prélevés sur la patiente elle-même… marie-pierre garrabos à QUEL SEIN SE VOUER ? Celles qui souhaitent une reconstruction mammaire après ablation et dont l’état de santé autorise plusieurs interventions ont le choix. En fonction de leur morphologie, des traitements qu’elles ont subis, de leur style de vie… elles se verront proposer plusieurs techniques. Parfois, la reconstruction sera immé diate, réalisée dans la foulée de l’ablation. Mais, selon les traitements (radiothérapie notamment) et en cas de haut risque de métastase, elle sera effectuée environ un an après la fin des cures. Ce qu’il faut savoir avant de se lancer Quelle que soit la technique choisie, deux ou trois interventions sont à prévoir, réalisées chacune à trois mois d’intervalle : reconstruction du galbe, éventuelle symétrisation de l’autre sein avec retouches sur le sein reconstruit et, enfin, reconstruction du mamelon et de l’aréole. Avant l’opération, il faut avoir arrêté de fumer (au moins un mois 126 ROSE MAGAZINE plus tôt). En ralentissant la circulation sanguine, le tabac augmente en effet le risque de nécrose. Après l’opération, les mouvements sont pénibles et ralentis pendant un mois. Difficile aussi de porter des charges de plus de dix kilos, de conduire… Mais une ex-patiente a confié être allée à un mariage quinze jours après une reconstruction (par DIEP) sans qu’on remarque quoi que ce soit. Des séances de kiné, adaptées à la technique choisie, sont prescrites après tout type d’intervention et pas seulement après une pose de prothèse. La pratique d’un sport n’est possible qu’au bout de deux mois et le retour au travail intervient en général trois semaines après une pose de prothèse, un mois et demi après les autres opérations. Dernier point enfin, un sein reconstruit, par l’une ou l’autre méthode, n’a plus, ou quasiment plus, de sensibilité. Le choix de la prothèse Le principe. On place une poche remplie de gel de silicone sous le muscle pectoral. L’opération dure une heure trente à deux heures et ne nécessite pas plus de sept jours d’hospitalisation. De plus, elle ne laisse aucune cicatrice supplémentaire puisque le chirurgien réincise la peau au même endroit que pour l’ablation. Pour qui ? Les femmes aux seins petits ou moyens qui présentent une qualité de peau souple. Cette méthode est donc préconisée en l’absence de radiothérapie. Attention ! Outre que la prothèse procure un résultat un peu figé, elle peut former des vagues ou des plis et provoquer la formation d’une coque dure et parfois douloureuse autour d’elle. Dans ce cas, il faut absolument la retirer. Enfin, s’il est rare que les prothèses se rompent, elles doivent en général être changées après une dizaine d’années. La reconstruction par grand droit abdominal ou TRAM Le principe. Un morceau de ce muscle, situé au niveau de l’abdomen, est prélevé avec de la peau et de la graisse du ventre, puis implanté à la place du sein. Une plaque de Goretex est posée pour renforcer la paroi abdominale fragilisée par la perte d’une partie du muscle. L’opération dure trois à quatre heures et offre un résultat très naturel. Elle permet en plus d’obtenir un ventre plus plat. Pour qui ? Les patientes présentant un excès de graisse et de peau au niveau de l’abdomen, peu sportives et qui ne veulent pas envisager de grossesse. Attention ! L’intervention, délicate, laisse sur le ventre deux cicatrices : l’une allant d’une hanche à l’autre et l’autre au niveau du nombril, qu’il faut aussi reconstituer. L’hospitalisation est d’une dizaine de jours. Des pertes sanguines importantes, ainsi qu’une nécrose partielle du lambeau, sont possibles. Les suites opératoires sont douloureuses et nécessitent le port d’une gaine, nuit et jour, pendant plusieurs semaines. La paroi abdominale est fragilisée, ce qui peut gêner temporairement ou durablement les mouvements qui la sollicitent (se lever, par exemple) et empêcher la pratique de certains sports. “En 2007, 5% des femmes avaient renoncé à la reconstruction, parce que c’était trop cher pour elles” La reconstruction par lambeau de grand dorsal Le principe. Le chirurgien prélève une partie de ce muscle situé au bas du dos. Il le fait pivoter vers l’avant, en passant sous la peau de l’aisselle, puis le modèle afin de reconstituer le volume du sein. Une bande de peau du dos peut aussi être utilisée pour remplacer la peau qui a pu être enlevée sur la poitrine lors de l’ablation du sein. Si le volume à reconstituer est important, une prothèse peut être glissée sous le muscle, ou des cellules graisseuses peuvent être prélevées par liposuccion et injectées pour se greffer dans le muscle. L’opération dure deux heures environ et nécessite une hospitalisation d’une dizaine de jours. Le sein ainsi reconstitué présente un aspect plus naturel que par pose de prothèse, et est stable dans le temps. Pour qui ? Les jeunes femmes ayant été traitées par radiothérapie. La technique permet également de poursuivre une grossesse, au minimum trois mois après l’intervention, le temps que les cicatrices soient solides. Attention ! L’opération laisse une nouvelle cicatrice dans le dos, longue d’environ vingt centimètres. Les suites opératoires, notamment au niveau du dos, sont douloureuses. Il existe un risque d’hématome et d’accumulation de lymphe (de liquide) dans le dos à l’endroit où le muscle a été prélevé. Enfin, la gène, pour dormir et conduire, perdure plusieurs semaines. La reprise d’un sport n’est possible qu’un à deux mois après. ROSE MAGAZINE 127 CHIRURGIE MAMMAIRE La technique du DIEP (pour Deep Inferior Episgatric Perforator Flap) Le principe. On prélève la graisse et la peau du bas du ventre, ou plus rarement de la fesse, avec une artère et une veine qu’on « rebranchera » au niveau du thorax. Ensuite, le lambeau est façonné pour ressembler au sein restant. L’opération dure quatre à huit heures et le résultat est très naturel. Le sein « évolue ». Il grossit ou maigrit avec la patiente. Autre intérêt : les douleurs postopératoires sont peu importantes et le muscle abdominal est conservé. Pour qui ? Les femmes présentant suffisamment de graisse autour du ventre. Contrairement au cas de la technique du TRAM, la pratique du sport est plus facile et il est possible d’être enceinte, une fois les cicatrices stabilisées. Attention ! Cette technique recourt à la microchirurgie. Délicate, elle doit être pratiquée par un chirurgien spécialement formé, et n’est donc pas accessible partout. Par ailleurs, elle laisse une longue cicatrice sur le ventre et une autre autour du nombril. Enfin, cet acte n’est pas encore nomenclaturé par l’Assurance maladie. Les établissements qui le pratiquent lui appliquent la nomenclature d’une opération par TRAM. La reconstruction de l’aréole et du mamelon Le principe. Pour l’aréole, plusieurs solutions : le prélèvement d’une partie de l’aréole de l’autre sein, si elle est large. Ou le prélèvement d’un fragment de peau près de l’aine ou dans la région génitale (la peau est à cet endroit naturellement pigmentée). Enfin, l’introduction dans le derme d’un pigment stérile ou tatouage. L’intervention se déroule sous anesthésie locale ou générale. Elle dure une heure environ et les suites opératoires sont très peu douloureuses. Pour le mamelon, si celui de l’autre sein est important, on peut en prélever une partie. Autre technique : surélever la peau du sein reconstruit et former un petit relief. Enfin, on peut également se faire greffer un petit bout d’oreille ou d’orteil. Pour qui ? Toutes les patientes. Attention ! Certaines patientes peuvent être allergiques au produit utilisé pour la pigmentation du derme de la nouvelle aréole. La lipostructure, technique d’avenir ? En complément d’une reconstruction (plus rarement pour reconstruire totalement le sein), le chirurgien peut recourir à la lipostructure. Il s’agit de transférer de la graisse des hanches ou des cuisses vers le sein reconstruit (par prothèse ou autre). Cette graisse est aspirée puis réinjectée par de fines canules. L’intervention corrige les défauts de la reconstruction et se déroule en général lors d’une seconde opération, parfois en même temps que la reconstruction de l’aréole et du mamelon. à Paris, à l’institut Curie notamment, on juge cette technique prometteuse, mais les praticiens manquent encore de recul pour évaluer l’évolution de cette graisse transposée. Néanmoins, la technique est pratiquée aux états-Unis et en Italie, en association notamment avec le système Brava. Là encore, il s’agit d’un procédé nouveau. Inventé aux états-Unis, disponible en France depuis l’hiver 2010, il a pour but d’optimiser et de faciliter l’implantation des cellules graisseuses greffées. Quatre semaines avant l’opération et trois semaines après, la patiente doit porter toutes les nuits un appareillage constitué d’un dôme souple qui, appliqué à l’emplacement du sein ôté, opère une succion continue et provoque ainsi une expansion des tissus. Les cellules greffées ont plus de place pour se développer, le volume créé serait plus satisfaisant et l’aspect plus naturel. 128 ROSE MAGAZINE Dépassements d’honoraires: une augmentation inquiétante… Indignée, cette patiente a transmis à la Ligue contre le cancer le devis que le chirurgien venait de lui remettre. Pour une reconstruction par grand dorsal, il lui demandait 600 €, auxquels s’ajoutaient 100 € pour la reconstruction de l’aréole et 350 € pour la symétrisation de l’autre sein, soit 1 050 €. La Caisse d’assurance maladie rembourse sur la base de 224,56 € pour une reconstruction par pose d’implant, 567,73 € ou 720,70 € (selon la technique) pour une reconstruction par muscle grand droit de l’abdomen et 503,42 € pour une reconstruction par lambeau de grand dorsal. La base de remboursement pour l’anesthésie s’échelonne, elle, de 101,54 € à 229,90 € selon l’opération. En soi, pourtant, rien d’illégal. Les praticiens conventionnés en secteur 2 et les praticiens non conventionnés sont libres de fixer leurs tarifs « dans le respect du tact et de la mesure », selon l’article R.412753 du Code de la santé publique. De plus, certains médecins exerçant dans des hôpitaux publics sont autorisés à recevoir une clientèle privée au sein même de l’établissement, donc à pratiquer des dépassements. Un système conçu pour éviter la fuite des praticiens du public vers le privé. L’avantage pour le malade « privé » dans le public : une prise en charge souvent plus rapide et l’assurance de bénéficier du plateau technique d’un centre hospitalier. Seul impératif pour les praticiens : informer le patient des conséquences de son choix et lui remettre un devis détaillant les frais. La raison : les dépassements ne sont pas pris en charge par l’Assurance maladie. Ni par certains contrats de mutuelles… En 2008, déjà, une enquête de la Ligue avait révélé que les dépassements d’honoraires représentaient environ 38 % des frais non remboursés lors du parcours de soin pour un cancer du sein. i Le problème, souligne aujourd’hui la Ligue, c’est que les patients ont de moins en moins le choix. Plus de quatre médecins spécialistes sur dix sont installés en secteur 2(1). Notamment 85 % des chirurgiens libéraux et 34 % des anesthésistes. Résultat : pour certains actes comme la chirurgie, les patients n’ont pas d’autre option que de se tourner vers un praticien conventionné en secteur 2, voire non conventionné. Parfois, les délais d’attente dans le public sont tels que, là encore, les patients sont quasi contraints de recourir au privé. Certains comités départementaux de la Ligue prennent en charge des dépassements d’honoraires à certaines conditions. D’autres encore interviennent auprès des médecins pour qu’ils baissent le montant de leurs dépassements. Pour sortir de la politique du coup par coup, la Ligue réfléchit à une solution de compromis. L’Assurance maladie envisage de mettre en place un protocole d’accord avec les médecins. Ceux qui y souscriraient s’engageraient à réaliser au moins 30 % de leurs actes au tarif opposable et à facturer des compléments d’honoraires inférieurs ou égaux à 50 %. En attendant, pour être soigné, il faudra continuer de payer. Ou se rendre dans un Centre de lutte contre le cancer. Ou encore faire jouer la concurrence et comparer les devis. Mais tout le monde ne sait pas le faire, encore moins quand son propre corps est en jeu... Les plus démunis seront donc, comme souvent, les plus pénalisés. En 2007 déjà, 5 % des femmes avaient renoncé à la reconstruction, parce que « c’était trop cher pour elles »(2). m.-p. g. (1) Enquête (2) de l’Assurance maladie, 2010. étude menée par la Ligue contre le cancer auprès de femmes ayant subi l’ablation d’un sein. ROSE MAGAZINE 129 MODE 133. chaleurs NOMADES Cet hiver, on opte pour un style cosaque ou tatar tout en s’enveloppant dans des manteaux ou des pulls moelleux et gracieux. 140. coiffes d’hiver... Des écharpes et des carrés à nouer, des capelines qui finissent la silhouette... Les détails de la saison. En dentelle, en soie ou en satin, une lingerie douce pour les seins opérés. Getty Images 143. fidèles soutiens AUTOMNE HIVER Vent d’est chalEURS NOMADES Quel plaisir de s’emmitoufler dans des matières élégantes et douillettes, alpaga, cachemire, soie, fourrure... réalisation nathalie croquet ROSE MAGAZINE 3 AUTOMNE HIVER cosaque Manteau trench laine épaulettes, Burberry, 2 995 €. Gilet sans manches, mouton, Week-end by Max Mara, 589 €. Caleçon laine, Kenzo, 175 €. Carré jersey de soie, Hermès, 1 100 €. Toque mouton, Sonia Rykiel, 115 €. Écharpe étamine de laine, Pennyblack, 47 €. mongole Manteau long laine, Missoni, 2 550 €. Toque raton laveur & agneau, Hermès, 1 450 €. Carré de soie, Hermès, 292 €. Étole gaze de laine, Faliero Sarti, 340 €. Ceinture python, Burberry, 595 €. AUTOMNE HIVER lapone Manteau bouclette de laine, Yessica, 119 €. Toque lapin, Hartford, 234 €. Étole étamine de laine, Esprit, 19,95 €. Écharpe frangée cachemire, Monoprix, 50 €. balte Veste bourrette de soie, réversible, intérieur twill de soie imprimé, 8 800 €. Pull à capuche alpaga, 890 €. Chapeau feutre, gansé, cuir tressé, 1 100 €. Hermès. AUTOMNE HIVER tatar Duffle-coat laine chiné à capuche, Blancs Manteaux, 448 €. Gilet sans manches, mouton, Week-end by Max Mara, 589 €. Foulard vintage, soie imprimée, Abraham Will Le 66 Champs-élysées, 25 €. tsigane Veste fausse fourrure, Miss Sixty, 259 €. Combinaison pantalon, col claudine, coulissée taille, Orla Kiely, 340 €. Foulard laine, lettres, Miss Sixty, 39 €. Chapeau feutre, Margaret Howell, 165 €. lingerie Parure Wolford. Bustier dentelles noires fond chair à armatures, 155 €. Culotte haute mi-dentelle mi-résille, 99 €. Veste laine sèche beige, col rond, manches trois-quarts, Max Mara, 345 €. Atout. Dos bien maintenu avec large bande cinq agrafes. fidèles soutiens Les plus belles marques de lingerie proposent aux femmes des dessous délicats adaptés aux seins opérés. Chic ! réalisation nathalie croquet, photos christian kettiger ROSE MAGAZINE 3 lingerie Soutien-gorge résille et dentelle violine à armatures, bonnet drapé sur le côté, Rosy, 58 €. Cardigan sans manches en cachemire noisette, Not Shy, 110 €. Atout. Maintien parfait de la prothèse dans la demi-coque. 142 ROSE MAGAZINE Christian Kettiger Parure Aubade, dentelle et tulle polyamide élasthanne noir. Soutien-gorge triangle, forme obus, 71 €. Culotte haute galbante, 66 €. Veste en laine et angora, col châle, Paul & Joe Sister, 260 €. Atout. Légèreté de la dentelle, bien emboîtant et sans armatures. ROSE MAGAZINE 143 lingerie Christian Kettiger Parure Triumph Vintage. Soutien-gorge satin noir matelassé sans armatures, forme conique, bretelles et dos large, 100 €. Culotte ultra-haute matelassée, détails lacets élastiques, extensible en largeur, 76 €. Atout. Le rétro au service du confort. 144 ROSE MAGAZINE Parure Amoena, dentelles de roses noires sur tulle polyamide. Soutien-gorge à armatures, bretelles réglables, 85 €. Culotte haute à incrustation dentelle, 50 €. Atout. Sexy jusqu’au bonnet F. ROSE MAGAZINE 145 lingerie Soutien-gorge polyamide et dentelle prince-de-galles et pois, armatures, bonnet trois parties et finitions dentelle, référence Carlton, Bestform, 26 €. Cardigan laine marron beige à losanges, ’S Max Mara, 265 €. Atout. Un bonnet bien couvrant pour installer un tricheur, une bonne corseterie à petits prix. 146 ROSE MAGAZINE Christian Kettiger Parure Eres. Soutien-gorge triangle gansé, vert gazon, 150 €. Culotte haute et volants, 135 €. Chemise col rond en soie imprimée, Max Mara, 239 €. Atout. Tout doux pour les petites poitrines. ROSE MAGAZINE 147 SOCIAL 152. Le cancer, et après ? Retrouver l’entreprise après des mois d’absence peut être difficile. Quelques clefs pour réussir son come-back. 156. connaître ses droits & se défendre Quels recours en cas de discrimination ? 160. guide pratique des aides Getty Images Obtenir une allocation, une aide ménagère, une écoute psy : plus de 50 contacts pour vous aider au quotidien. REPRENDRE LE TRAVAIL Le cancer, Et aPRÈS ? marie-pierre garrabos Grâce à l’évolution des thérapeutiques, on peut – on doit même – envisager un avenir après la maladie. Et, dans cette perspective, le travail joue un rôle majeur. « L’enjeu du travail est fondamental car avoir une place, c’est être quelqu’un », confirme Monique Sevellec, psychosociologue à l’institut Curie, à Paris. Pourtant, 43 % des Français considèrent la réinsertion professionnelle comme la principale difficulté des personnes ayant été traitées pour un cancer(1), rejoignant en cela les malades euxmêmes. Certes, 27 % d’entre eux ont continué de travailler pendant leur traitement et 79 % (92 % même pour les malades atteintes de cancer du sein) ont repris leur activité dans les deux ans qui ont suivi la maladie(2). Mais « tous font état de difficultés quand le moment, 150 ROSE MAGAZINE G Psychosociologue à l’institut Curie, Monique Sevellec a mené une enquête sur la reprise du travail auprès de personnes malades de cancer. Elle intervient aussi à la Maison des patients*, à Saint-Cloud. souvent très attendu, est arrivé, précise Monique Sevellec, codirectrice de l’enquête. Logique : ils n’ont pas été préparés par l’hôpital, ne reçoivent pas ou peu de soutien de leur entreprise et demeurent souvent incompris de leurs proches, qui n’ont aucune idée des bouleversements qu’ils traversent ». Suivant la durée de leur absence, les complications ne seront toutefois pas les mêmes. Ceux qui se seront arrêtés quelques mois retrouveront leur poste sans difficulté. Mais ceux qui se seront éloignés plus d’un an rencontreront plus de problèmes. Même chose en ce qui concerne les séquelles : moins on en a, plus le retour au travail est facile. Au premier rang des difficultés personnelles, la peur de la récidive sape la confiance en soi. Mais, surtout, ces ex-patients se découvrent plus « fatigables » qu’avant. Sans parler des tâches physiques que certains ne peuvent plus momentanément ou définitivement effectuer. Tous pointent Plainpicture Aujourd’hui, en France, huit salariés sur dix retravaillent après un cancer. Plutôt une bonne nouvelle ! Mais mieux vaut préparer son retour. “Retrouver sa place, c’est être vivant” notamment des problèmes de concentration, un temps plus long pour réaliser certaines activités. « Dans la journée, je lutte. Mais le soir je m’écroule avant 21 heures », confie une jeune femme qui a repris ses fonctions de secrétaire il y a six mois. Cette fragilité peut ajouter de l’anxiété, engendrer une « peur de ne pas y arriver ». D’autant que les salariés ne peuvent compter que sur eux. « Les collègues pensent que, si vous êtes de retour, c’est que tout va bien », rapporte Monique Sevellec. Certains, même, refusent de voir que la personne a changé. Et continuent de lui demander le même rendement qu’avant, sans prendre en compte ses coups ••• Rose Magazine. Quel sentiment prédomine chez les salariés qui reprennent le travail ? Monique Sevellec. La conscience que leur corps n’est plus le même, qu’il ne répond plus de la même façon. Ils perdent alors leurs repères. Physiquement et psychiquement, ils ne sont plus la personne d’avant la maladie et doivent découvrir celle qu’ils sont en train de devenir. Après l’annonce du cancer et la sidération qu’elle a provoquée, certains malades se sont mis à réfléchir sur leur vie, le sens qu’ils lui donnaient. Certains s’accordent enfin du temps. Une femme qui devait retourner à son travail le lendemain m’a ainsi dit un jour : « Je n’aurai plus le temps de m’occuper de moi. » Finalement, ils se sentent différents, non pas parce qu’ils ont eu un cancer mais parce qu’ils ont réfléchi. Que représente le travail dans ce cheminement ? Le retour au travail marque d’abord la frontière entre cet avant et cet après. Ensuite, le travail est toujours vécu comme une place à reprendre. Retrouver sa place, c’est la preuve qu’on est vivant car ces personnes ont vécu la peur de perdre leur place sur terre. Quelles seront alors leurs stratégies ? Pour certains, le cancer n’aura été qu’un incident de parcours. Ils veulent reprendre leur vie là où elle a été interrompue. Ceux-là attendent que leur entourage professionnel ait la même attitude qu’eux et ne leur renvoie pas l’image d’un malade. Ceux qui en revanche disent « la maladie m’a fait réfléchir » attendent d’autrui une reconnaissance de leur souffrance et du changement qui est survenu en eux. Ils aimeraient qu’on prenne en compte leurs difficultés physiques et psychologiques. Sans toutefois en faire trop. La maladie peut-elle engendrer des changements de vie radicaux ? Oui. Certains vont avoir envie d’évoluer vers une activité à laquelle ils aspiraient, ou qui leur ressemble désormais davantage. On peut sortir d’un cancer plus fort, dans le sens où l’on peut mieux comprendre les autres. propos recueillis par m.-p. g. * Lieu d’accueil et d’écoute du centre René-Huguenin, à Saint-Cloud (92), dédié aux malades et à leurs proches. Tél : 01 47 11 23 40. ROSE MAGAZINE 151 REPRENDRE LE TRAVAIL 152 ROSE MAGAZINE même touché par un cancer, cela se passe toujours mieux pour ses subordonnés, constatent unanimement les observateurs, malades et scientifiques. Mais plus largement c’est le système même du salariat “J’échange ton pleintemps contre ma maladie !” “J’ai repris le travail pour des raisons financières” Alice, 49 ans, téléconseillère « Quand vous êtes malade, vous êtes un petit pot de terre et vous allez vous heurter à des pots de fer. C’est la morale que je tire de mon expérience. Quand j’ai été en arrêt de travail la première fois, en 2005, je n’avais pas trois ans d’ancienneté dans mon entreprise. Résultat, j’ai touché mon salaire pendant six mois. Ensuite, je n’ai eu droit qu’aux indemnités de la Sécurité sociale. Vingt euros par jour, c’est dur ! J’ai donc repris le travail pour des raisons financières. Et ça me faisait peur : à mon poste de téléconseillère, on demande du rendement, et je me sentais très fatiguée par la chimio. Mon chef d’équipe de l’époque, qui était très compréhensif et très humain, m’a conseillé de voir le médecin du travail. On m’a prescrit un mi-temps thérapeutique, mais cela a suscité des jalousies. Mon chef, toujours lui, me conseillait de répondre : “J’échange ton plein-temps contre ma maladie !” En 2008, j’ai été convoquée par le médecin de l’Assurance maladie. J’ai expliqué que ce serait trop dur de reprendre le travail à temps plein, j’étais trop faible. Du coup, j’ai été déclarée en invalidité de première catégorie, ce qui me permet de travailler vingt-deux heures, payées trente-cinq. Et puis, un nouveau chef est arrivé. Très différent du précédent. Comme nos horaires changent toutes les semaines, le médecin du travail a demandé pour moi ceux du matin. Réponse de la hiérarchie : “Ce n’est pas le médecin qui va déterminer le planning du service.” Les réflexions désagréables sont quotidiennes. J’ai même entendu un “estime-toi heureuse d’être en vie”. Au début, j’ai tenté d’expliquer les raisons de mon épuisement, le traitement, les douleurs qu’il provoque… Les gens écoutent et puis oublient. Pour eux, je n’ai pas le droit de me plaindre car je bénéficie d’un temps aménagé. Pourtant, je lutte toute la journée contre la fatigue et, le soir, je suis éreintée. Productivité et maladie ne sont pas compatibles… Heureusement, j’ose davantage m’exprimer qu’avant ma maladie, même si je suis plus sensible, plus fragile. Et puis, tous les jours, j’ouvre mes volets, je vois le ciel et je me dis que je peux le faire. C’est ça le plus important. » Copyright de fatigue. D’autres, au contraire, ont peur de ce « survivant » qui a approché les frontières de la mort et les renvoie à leur propre peur. Ceux-là pourront alors avoir recours à des stratégies d’évitement, dénoncées dans une récente campagne de l’Inca(3) : on n’approche plus le « malade », on ne lui demande surtout pas comment il va et on évite de déjeuner face à lui. Une attitude, des petits gestes qui peuvent être source d’une grande solitude. Plus grave, selon l’étude « Répercussions du cancer sur la vie professionnelle », 20 % des salariés considèrent avoir été pénalisés par leur maladie. Parmi les faits les plus couramment dénoncés : moins de responsabilités (16 % des réponses), refus de promotion (9 %), rétrogradation (9 %) et le sentiment de devoir davantage faire ses preuves qu’avant (8 %). C’est donc bien au niveau du management des entreprises que la réflexion sur l’accueil des personnes atteintes de maladie chronique doit être menée. Certaines grandes entreprises ont mis en place une politique spécifique. Les autres agissent au coup par coup. Le plus souvent, on trouve des arrangements, les collègues prennent une partie du boulot pour eux, celui ou celle qui revient s’adapte tant bien que mal. Il est fréquent que les bénéficiaires d’un mi-temps thérapeutique se retrouvent malgré tout avec la même charge qu’avant. Une nuance tout de même : quand un membre de la hiérarchie, quel que soit son niveau, a été lui- qui ne convient plus aux personnes ayant connu le cancer ou souffrant de toute autre maladie chronique. Anne-Marie Waser, sociologue et coanimatrice du Club maladies chroniques et activité, à la Cité des métiers, à Paris, aide justement les personnes atteintes de pathologie chronique à se maintenir dans leur emploi, à en trouver ou à réorienter leur activité professionnelle. « Après un cancer, obéir à des ordres, se plier à des contraintes devient parfois insupportable… C’est encore plus vrai avec le management par objectif individualisé, qui ne convient pas à un malade chronique car il ne permet pas l’entraide. » Alors, que faire pour aider ces 100 000 actifs touchés chaque année en France par un cancer ? « La reprise de l’activité professionnelle étant liée à un grand nombre de facteurs, je ne crois pas à la réussite d’un dispositif “retour au travail” général, précise Monique Sevellec. Il ne peut y avoir que des accompagnements sur mesure. » Le Plan cancer 2009-2013 comporte pourtant un volet « pour mieux accompagner les personnes dans la vie pendant et après le cancer ». Dès 2012, une généralisation des consultations de l’après-cancer devraient ainsi aider les patients en fin de traitement à aborder cette nouvelle étape de leur vie. Pour l’instant, trente-cinq établis sements spécialisés ont mis en place une expérimentation autour de la reprise de l’emploi. à l’institut Bergonié de Bordeaux, par exemple, les patientes qui le souhaitent peuvent être accompagnées tout au long de leur traitement par une infirmière, une assistante sociale, une psychologue. Un médecin du travail intervient auprès des assistantes sociales pour qu’elles informent les malades sur leur retour dans l’entreprise. Interrogées, les patientes suivies s’avouent très contentes d’être ainsi soutenues. Ne plus se sentir seule facilite la reprise de confiance en soi. Car ce « soi », justement, n’est plus le même. Sandrine, victime d’un cancer du sein il y a quelques années : « On a changé, profondément, physiologiquement. On sait qu’on dispose de forces limitées. Il faut apprendre à les utiliser au mieux. On n’est pas moins compétent, moins créatif, moins productif. On gère ses ressources différemment. » marie-pierre garrabos Sondage Viavoice, « Gérer l’après cancer », réalisé en mars et avril 2011 pour l’institut Curie. (2) « Répercussions du cancer sur la vie professionnelle », étude menée sous l’égide de l’Inca auprès de 402 salariés d’île-de-France ayant eu un cancer, en collaboration avec 82 médecins du travail. (3) « La recherche sur le cancer avance, changeons de regard », Institut national du cancer. (1) ROSE MAGAZINE 153 REPRENDRE LE TRAVAIL En 2010, 10 % des demandes adressées à la permanence juridique de la Ligue nationale contre le cancer concernaient la reprise du travail. Preuve que le retour à l’emploi ne va pas de soi pour les salariés malades. Une réinsertion sera réussie si la personne elle-même, son médecin traitant, l’oncologue, le médecin du travail ainsi que l’entreprise coordonnent leurs efforts. Encore faut-il connaître et comprendre le rôle de chacun. Explications. 2) Solliciter le médecin du travail ANTICIPER 1) Garder le contact avec les collègues marie-pierre garrabos Plainpicture CONNAÎTRE SES DROITS & SE DÉFENDRE 154 ROSE MAGAZINE Appels téléphoniques, visites… Pendant l’arrêt maladie, s’intéresser à ce que vivent les collègues est essentiel. C’est le meilleur moyen de récolter des informations sur l’ambiance dans le service ou dans l’entreprise, sur les changements survenus ou attendus. Autant d’éléments concrets qui s’avéreront utiles au moment de retrouver son poste. Tous les professionnels (psychologues, médecins du travail, sociologues…) sont en effet unanimes : le retour à la vie professionnelle s’envisage deux à trois mois avant la fin des traitements. Comment reprendre sa place au sein du service, avec les collègues ? C’est le moment de faire le point sur ce qu’on aimerait faire et l’occasion de se demander si ce souhait est compatible avec le poste occupé. En théorie, c’est très bien. En pratique, toutefois, tout le monde n’a pas le loisir de se poser ce genre de questions. Certains salariés, notamment, doivent reprendre leur activité pour des raisons purement financières. « Dans ce cas, on aide les personnes à s’armer pour faire face à la situation », explique Anne-Marie Waser, sociologue et animatrice du Club des maladies chroniques, à la Cité des métiers, à Paris. « On réfléchit avec elles à la meilleure manière d’évoquer la maladie au travail, en parlant clairement, sans se réfugier dans la plainte. On leur apprend à fixer leurs propres limites, par exemple en matière d’horaires. » Au cours de cette étape, il est utile de se faire aider par une assistante sociale (soit attachée à l’établissement de santé, soit à la Caisse d’assurance maladie) car elle informe sur les droits et les démarches utiles. Toujours dans ce souci de préparation, les experts recommandent d’effectuer une visite de préreprise auprès du médecin du travail. Elle n’a rien à voir avec la visite de reprise, qui, elle, se fait à la demande de l’employeur, en général dans les huit jours suivant le retour au bureau. La visite de préreprise n’est pas obligatoire et se fait à la demande du salarié. Mais elle permet souvent au médecin d’accorder plus de temps au patient que lors de la visite traditionnelle annuelle. Comme le rappelle Catherine Dalm, médecin inspecteur du travail en Aquitaine, qui participe au programme individualisé de l’après-cancer à l’institut Bergonié, à Bordeaux : « C’est le cancérologue qui fixe la date de reprise du travail. Mais, contrairement au médecin du travail, il ne connaît pas l’entreprise. Il ne mesure pas forcément les adaptations recommandées. » Le médecin du travail commencera donc par vérifier que l’état du salarié est bien compatible avec le poste qu’il occupe. Et si ce n’est pas le cas, il pourra préconiser un reclassement, examiner la (ou les) proposition(s) éventuellement faite(s) au salarié et vérifier qu’elle est adaptée à son état de santé. Au besoin, il pourra également appuyer une prescription de temps partiel thérapeutique. En effet, c’est le médecin traitant qui prescrit cet aménagement du temps de travail, avant d’en fixer la durée avec le médecin-conseil de la Caisse d’assurance maladie. « Qu’il s’agisse d’une reprise à temps complet au même poste qu’avant la maladie, d’une reprise à temps partiel ou d’un reclassement, le médecin du travail a un rôle d’aidant et de conseiller, aussi bien auprès du malade que de l’employeur, poursuit Catherine Dalm. Il peut ainsi expliquer à l’employeur l’utilité et les modalités d’un temps partiel, tout en étant tenu au secret médical. » Selon l’étude « Répercussions du cancer sur la vie professionnelle », 88 % des salariés ayant effectué une visite de préreprise ont bénéficié d’un aménagement, contre 50 % n’en n’ayant pas bénéficié. ••• ROSE MAGAZINE 155 REPRENDRE LE TRAVAIL Licencier quelqu’un parce qu’il est malade est interdit. En revanche, l’employeur peut refuser une reprise du travail à temps partiel ou ne pas pouvoir proposer de reclassement. Il peut procéder à un licenciement en justifiant que l’inaptitude au poste de travail, les absences répétées ou une absence de longue durée perturbent la marche réelle de l’entreprise. Il doit évidemment prouver ce motif, ce qui sera plus aisé dans une PME de cinq personnes que dans un grand groupe, et plus facile aussi si ces perturbations entraînent la nécessité de remplacer définitivement le salarié. Si le licenciement est l’issue qui se profile, il faut contacter les délégués du personnel, notamment pour vérifier qu’on ne bénéficie pas d’une convention collective qui empêche, pendant une durée variable, un licenciement pour absence prolongée liée à la maladie. Il est également utile d’évoquer son cas avec un avocat. Les permanences juridiques de la Ligue sont gratuites. Les avocats qui les tiennent conseillent, orientent, mais ne peuvent devenir votre défenseur. Si le licenciement s’avère abusif, car non réellement justifié, il faudra alors se tourner vers le tribunal de prud’hommes. 2) en cas de mise au placard ou de harcèlement Réflexions désagréables et quotidiennes ou indifférence totale et mise à l’écart… Il arrive que le retour au travail se transforme en enfer. Dans ce cas, il est conseillé de prévenir les représentants syndicaux s’il y en a dans l’entreprise. Ou encore, si ces faits relèvent de collègues mais non de la hiérarchie, de prévenir celle-ci par écrit. Parallèlement, il est utile de noter et de dater tous les faits, les brimades, les paroles prononcées, de garder les mails. Ou au contraire, pour quelqu’un qui serait systématiquement écarté de réunions et de prises de décisions, de noter les informations qui ne lui ont pas été transmises. Tous ces éléments, si la situation n’évolue pas, permettront d’alimenter un dossier porté devant un tribunal. Le harcèlement est en effet passible de sanctions pénales. Mais, dans ce cas encore, il faut l’aide d’un avocat. 156 ROSE MAGAZINE PROUVER LA DISCRIMINATION Si, en retrouvant votre emploi, vous n’avez plus accès aux promotions, aux augmentations, ou si l’entreprise vous licencie sans motif valable, vous pouvez saisir la « Mission Lutte contre les discriminations et promotion de l’égalité du Défenseur des droits », la nouvelle appellation de la Halde depuis mai 2011. Son intervention, si la discrimination est avérée, peut parfois éviter d’aller jusqu’au tribunal. Mais il est précisément difficile de prouver la discrimination et de réunir des pièces dans ce but... L’autorité va commencer par collecter un maximum d’informations sur la situation du salarié, comme les modalités de reprise (temps partiel, demande de reclassement), les préconisations du médecin du travail, les conditions de travail. Dans le cas d’un licenciement, elle va vérifier si le remplacement du salarié a été nécessaire, comment, pour combien de temps, etc. Dans le cas d’une mise au placard, l’enquête va consister à établir des comparaisons avec la situation antérieure et/ou avec celle d’autres salariés. La Mission prend contact avec l’entreprise mise en cause et lui demande notamment des éléments de comparaison (grilles de salaires, promotions…). La loi oblige les employeurs à répondre. Autre solution : procéder à des auditions dans l’entreprise. Au terme de cette enquête, la Mission évalue la réalité de la discrimination. Si elle est avérée, elle notifie à l’employeur les griefs révélés par l’enquête. Il dispose d’un délai pour répondre, fournir de nouvelles pièces ou demander à être entendu. La mission peut également proposer une médiation menée par une personne indépendante. La formule, qui rencontre un succès satisfaisant, est utile notamment pour les salariés qui seraient particulièrement fragilisés par une action devant un tribunal et qui ont tout intérêt à garder leur emploi. Enfin, l’autorité propose des recommandations à l’entreprise et peut même obtenir une indemnisation pour la victime. Si l’employeur ne répond pas ou ne reconnaît pas la discrimination, l’enquête de la Mission vient en appui d’une action devant les prud’hommes. La Mission ne représente pas le plaignant, mais son analyse du dossier pèse souvent favorablement en sa faveur. marie-pierre garrabos “Mon projet professionnel m’a portée” Maryline, 54 ans, infirmière libérale « Aujourd’hui, je suis heureuse d’aller travailler. Parce que j’aime mon métier, bien sûr, mais aussi parce que ce projet m’a portée pendant toute la durée de mon traitement. Et c’est à mon associée, Aurélie, que je le dois. Quand j’ai appris que j’avais une tumeur, en juillet 2010, je travaillais au sein d’un gros cabinet. Le rythme de travail était éprouvant : j’avais parfois plus de quarante patients par jour ! Quand j’ai prévenu l’une des associées que j’étais en arrêt maladie pour un mois car je venais de me faire retirer une tumeur au sein, elle m’a répondu : “Je suis désolée pour toi, mais tu nous mets dans la merde pour l’été.” De rage, j’ai immédiatement écrit une lettre de démission. C’est alors qu’Aurélie est intervenue “C’est l’occasion de tourner une page dans ta vie, m’at-elle dit. Viens ouvrir un cabinet avec moi.” Ce n’était pas une décision simple car cela impliquait de quitter ma région et ma famille. Mais, d’un autre côté, je vivais une période difficile : cancer, rupture amoureuse, manque de soutien de mes collègues… Ma mère, qui a pourtant quatre-vingt deux ans, m’a poussée à accepter la proposition d’Aurélie : “Tu fonces ! Même si ça va t’éloigner de moi.” Alors j’ai accepté. Ensuite, j’ai subi une ablation puis une reconstruction. Mais quand on a un projet on ne peut pas mourir. Et Aurélie s’est occupée de tout : elle a créé l’entreprise, trouvé les locaux, elle m’a même déniché un appartement ! Nous avons commencé en mai dernier. Nous travaillons à un rythme qui nous permet de prendre du temps auprès des patients. Je suis encore plus à l’écoute, je comprends mieux la douleur physique et psychologique. Et je peux profiter de ma nouvelle vie, notamment de ma famille. Ma mère, ma fille, mes frères et leurs enfants, tous m’ont beaucoup soutenue. J’ai découvert en eux une qualité d’amour que je ne soupçonnais pas. Aujourd’hui, je peux le dire, je renais. » Où trouver de l’aide ? Corbis SE DÉFENDRE 1) en cas de licenciement • Permanence juridique et sociale de la Ligue contre le cancer : 0810 111 101. • Club maladies chroniques et activités. Ateliers en petits groupes pour surmonter les difficultés liées au travail. Cité des métiers, à Paris : 01 40 05 35 18. • Informations, conseils sur le net : e-cancer.fr • Pour saisir la Mission lutte contre les discriminations : 08 1000 5000, ou halde.fr ROSE MAGAZINE 157 guide pratique aides sociales 5O les adresses Pallier la perte de revenus, payer son loyer, faire garder ses enfants, prendre soin de soi... Les aides, en fait, sont nombreuses. Encore faut-il savoir sous quelles conditions et par quel guichet elles sont accordées. Mode d’emploi. sabine germain Remboursement des prothèses AIDES LÉGALES Prestation de compensation du handicap (PCH) 17 462,64 € pour un couple pour en bénéficier. Code de la sécurité sociale : articles L821-1 à L821-11 Allocation aux adultes handicapés (AAH) (1) Aide versée par la Caisse d’allocations familiales (CAF) pour garantir un niveau minimum de ressources aux personnes handicapées dont le taux d’incapacité est d’au moins 80 %. Il faut avoir des revenus inférieurs à 8 731,32 € par an pour une personne seule, 158 ROSE MAGAZINE ameli.fr (rubrique Assuré, puis Soins et remboursements) Complément de ressources Prothèses et appareillages Cette allocation de 179,31 € par mois s’ajoute à l’AAH pour compenser l’absence durable de revenus d’activité et garantit un minima de 906,92 € par mois. Les perruques, prothèses, fauteuil roulant, canules et tout autre équipement prescrit par un médecin peuvent être pris en charge par l’Assurance maladie dans le cadre de la liste des produits et prestations remboursables. Vous pouvez également demander une participation complémentaire à votre mutuelle. Code de la sécurité sociale : articles L821-1-1 à L821-9 Majoration pour vie autonome Cette majoration de 104,77 € par mois est versée par la CAF aux personnes qui perçoivent l’AAH à taux normal et bénéficient d’une aide au logement. Non cumulable avec le « complément de ressources ». Code de la sécurité sociale : articles L821-1 à L-821-5 Remboursement des frais de transport Sur prescription médicale et justificatifs, l’Assurance maladie rembourse les déplacements en voiture personnelle, transports en commun, transport assis ameli.fr (rubrique Assuré, puis Soins et remboursements) Marianne Maury Kaufmann Aide financière versée par le Conseil général pour compenser la perte d’autonomie du malade, évaluée par une équipe pluridisciplinaire de la Maison départementale des personnes handicapées (PDPH). Elle couvre les aides humaines, techniques (prothèses), l’aménagement du logement. Son montant dépend à la fois des revenus et du degré de perte d’autonomie. Code de l’action sociale et des familles : articles R245-45 à R245-49 professionnalisé ou ambulance pour se rendre à une consultation, à des examens ou à une opération. Le code du travail, le code de la sécurité sociale et le code de l’action sociale et des familles sont consultables sur le site legifrance.gouv.fr (rubrique Droit français, puis Codes en vigueur). Prothèse capillaire : l’Assurance maladie rembourse 125 € une à deux fois par an. Les mutuelles assurent en général un remboursement complémentaire, de 50 € jusqu’au solde restant à la charge du patient. Prothèse mammaire : l’Assurance maladie rembourse 69,75 € par an pour une prise en charge à 100 %, sachant qu’une prothèse coûte entre 70 et 220 €. Un complément peut être assuré par votre mutuelle : en général, deux à trois fois le montant pris en charge par la Sécurité sociale (soit 139,50 à 209,25 €). à noter : la prothèse Amoena Contact, qui a fait l’objet d’études cliniques démontrant l’amélioration de la qualité de la vie, est remboursée intégralement (160 €). ROSE MAGAZINE 159 guide pratique aides sociales PAYER SON LOYER Aide personnalisée au logement (APL) Elle est versée par la CAF aux locataires d’un logement conventionné. Son montant dépend de la situation familiale, du prix du loyer et du niveau des ressources. Allocation logement familiale (ALF) Versée par la CAF et destinée aux personnes bénéficiant de prestations familiales (allocations familiales, complément familial...) ou de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH). Allocation de logement sociale (ALS) Essentiellement destinée aux jeunes, étudiants, ménages sans enfants et personnes âgées ou handicapées. Attention ! Ces aides ne sont naturellement pas cumulables. Les ressources prises en compte lors de leur attribution sont celles de l’avant-dernière année précédant la demande. La baisse de revenus liée à la maladie n’est donc prise en compte qu’avec retard. En attendant, il est possible de bénéficier de différents secours financiers. Dans ce domaine, les conseils d’un assistant social sont particulièrement précieux. Assurer un emprunt La convention Aeras (s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé) vise à élargir l’accès à l’assurance et aux crédits professionnels, immobiliers ou personnels aux malades représentant ce que l’on appelle un « risque aggravé » pour les assureurs. aeras-infos.fr Aidea (Accompagnement et information pour le droit à l’emprunt et l’assurabilité) La Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) Des cancérologues experts vous aident à constituer votre dossier médical pour assurer votre crédit immobilier. Un service gratuit, anonyme et confidentiel créé par la Ligue nationale contre le cancer. Elle gère notamment les fonds départementaux de compensation du handicap, qui lui permettent d’attribuer des aides financières. Institutions de retraite et de prévoyance 0810 111 101 (prix d’un appel local à partir d’un poste fixe) service accessible du lundi au vendredi de 9 h à 19 h ou par courriel : [email protected] L’assurance emprunteur, obligatoire lors de la souscription d’un prêt immobilier, couvre le décès et la perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA). En cas d’acquisition d’une résidence principale, elle doit également couvrir l’incapacité temporaire totale (ITT) et l’invalidité permanente totale (IPT). En revanche, les garanties invalidité permanente partielle (IPP) et perte d’emploi sont optionnelles. Consultez votre contrat avant de voir si vous pouvez suspendre les remboursements de votre crédit immobilier. 160 ROSE MAGAZINE obtenir un coup de pouce financier Pour trouver une solution (rééchelonnement des remboursements, accords avec les créanciers...) quand la baisse de revenus consécutive à la maladie ne permet plus de rembourser ses emprunts. En cas de grandes difficultés, il est possible d’obtenir, en plus des aides légales, un soutien financier ponctuel de différentes associations et institutions. Mieux vaut toutefois se faire aider d’un assistant social pour constituer son dossier médical et social. banque-france.fr (rubrique Protection du consommateur, puis Surendettement). Santé Info Droits Ligne d’information créée par le Collectif interassociatif sur la santé (CISS). Des avocats répondent à toutes vos questions relatives aux droits des malades. leciss.org ou 0810 004 333 (n° azur) ou 01 53 62 40 30, les lundis, mercredis et vendredis de 14 h à 18 h et les mardis et jeudis de 14 h à 20 h. Marianne Maury Kaufmann Négocier avec son banquier et son assureur Suspendre son emprunt immobilier Service de surendettement de la Banque de France Le Centre communal d’action sociale En cas de difficultés, le CCAS de votre commune peut apporter un soutien sous forme de contribution économique, d’avance remboursable, d’aide en nature (bons alimentaires ou de transport)… Elles ont toutes un budget consacré à l’action sociale, et peuvent financer des projets, mais aussi de verser des aides financières. N’hésitez pas à contacter celle dont vous dépendez. ctip.asso.fr (rubrique Action sociale) La Ligue contre le cancer Les comités départementaux peuvent attribuer une somme d’argent dont le montant et le motif sont variables (aide alimentaire, financement d’une prothèse, loyer). Une subvention pour le paiement du loyer (de un à trois mois) peut aussi être attribuée. ligue-cancer.net (rubrique Comité près de chez vous) Horizon cancer Cette association peut débloquer des actions (aide alimentaire, au loyer). horizon-cancer.org ROSE MAGAZINE 161 guide pratique aides sociales Sécuriser ses revenus professionnels Congé de longue maladie Il est accordé par période de trois à six mois pour une durée maximale de trente-six mois. Pour en bénéficier, il faut avoir travaillé pendant au moins huit cents heures au cours des douze mois précédant l’arrêt de travail, dont deux cents heures au moins durant les trois derniers mois. Le montant de l’indemnité journalière (IJ) est égal à 50 % du salaire journalier de base des trois mois précédant l’arrêt, dans la limite maximale de 49,10 € par jour, majorée à 65,47 € par jour pour les parents d’au moins trois enfants à charge, à partir du trente-et-unième jour d’arrêt. Invalidité Au-delà de trois ans d’arrêt, le salarié obtiendra, jusqu’à l’âge de la retraite, le régime de l’invalidité si sa capacité de travail est réduite des deux tiers. Sa pension d’invalidité représente 30 % de son salaire annuel moyen des dix meilleures années en cas d’incapacité partielle, et de 50 % en cas d’incapacité totale. De nombreuses conventions collectives ou accords de branche prévoient un complément d’indemnisation versé par l’employeur. Si ce n’est pas le cas, un contrat de prévoyance (collectif ou individuel) peut permettre de percevoir une rente ou une indemnité. SE FAIRE AIDER AU QUOTIDIEN Ces interventions peuvent être partiellement financées par différentes institutions. Il est généralement nécessaire de constituer un dossier avec un assistant social. Une part du coût reste à la charge de l’usager. La maladie et la fatigue rendent tous les actes de la vie quotidienne difficiles. Différentes interventions sont possibles… Aides ménagères : ménage, courses, préparation des repas (à l’exclusion des soins). Auxiliaire de vie : aide à la vie quotidienne d’une personne dépendante (toilette, repas, change). La Caisse d’allocations familiales (CAF) Quand l’un des parents est malade ou hospitalisé, la CAF peut participer à l’emploi d’une aide à domicile. Cette participation dépend du niveau des revenus. Technicien de l’intervention sociale et familiale : tâches domestiques, soins des enfants, soutien scolaire. Des prestations telles que les portage des repas ou la téléassistance, assurées L’Assurance maladie Tous les soins relevant de l’hospitalisation à domicile (HAS) sont pris en charge à 80 % par l’Assurance maladie. par des sociétés spécialisées. Des soins à domicile, assurés par un infirmier ou un médecin. Les Centres communaux d’action sociale Pour en savoir plus : servicealapersonne.gouv.fr, le site de Le CCAS de votre commune peut assurer certains services (le portage de repas à domicile, par exemple) ou en cofinancer d’autres. l’Agence nationale des services à la personne présente la palette des services. Les conseils généraux En charge de l’aide sociale légale, les départements financent l’Allocation personnalisée à l’autonomie (APA) et la Prestation de compensation du handicap (PCH). 162 ROSE MAGAZINE Ce dispositif, destiné aux personnes de soixante ans et plus, permet – sous conditions de ressources – la prise en charge par l’Assurance maladie de nombreuses aides humaines (ménage, repas), techniques (transport, téléalarme) ou matérielles (liées à l’équipement du logement). Le Plan d’actions personnalisé Cette aide financière de l’Assurance maladie est destinée aux personnes de plus de cinquante-cinq ans. Elle est essentiellement destinée à financer des aides quotidiennes (ménage, téléalarme, portage de repas, accompagnement). Plafonnée annuellement, elle est liée aux ressources du foyer. L’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) Aide financière destinée aux personnes de plus de soixante ans en perte d’autonomie. Cette allocation, attribuée par le Conseil général, n’est pas soumise à des conditions de ressources. Elle peut couvrir une part importantes des services à domicile. La Ligue contre le cancer Ses comités départementaux peuvent financer des aides au cas par cas. Complément de salaire Cesu préfinancés Les Chèques emploi service universels (Cesu) permettent de régler les services à domicile sans établir de bulletin de salaire. Ils peuvent être cofinancés par un employeur, un comité d’entreprise, une commune, une mutuelle, une caisse de retraite… Marianne Maury Kaufmann Il est versé par l’employeur à compter du huitième jour d’arrêt, en complément des indemnités journalières (IJ). Il permet au salarié ayant au moins un an d’ancienneté de percevoir 90 % de son salaire (IJ comprises) pendant trente jours, puis 66 % pendant les trente jours suivants (quarante jours s’il a six ans d’ancienneté et jusqu’à quatre-vingt dix jours au-delà de trente années). Il s’agit là du minimum légal : certaines conventions collectives prévoient une indemnisation plus avantageuse. L’Aide au retour à domicile après hospitalisation (ARDH) Institutions de retraite ou de prévoyance Dans le cadre de leur action sociale, elles peuvent participer au financement de services à la personne. Les meilleurs financements s’inscrivent dans le cadre des dis- CONSULTER UN ASSISTANT SOCIAL Dans votre établissement de soins. Auprès de votre Caisse primaire d’assurance maladie ou de votre Caisse d’allocations familiales. Dans votre entreprise, votre caisse de retraite, votre institution de prévoyance ou votre mutuelle santé. Auprès du Centre communal d’action sociale de votre ville ou du conseil général de votre département. Auprès de votre Maison départementale des personnes handicapées, destinée à toutes les personnes atteintes d’une maladie invalidante, de manière permanente ou temporaire. positifs destinés aux personnes âgées de plus de cinquante-cinq ou soixante ans. ROSE MAGAZINE 163 guide pratique aides sociales PARLER, DOMPTER SES ANGOISSES Tribu cancer L’association du « soutien à distance » propose « Mail de nuit », un service pilote de soutien psychologique par mail. Réponse assurée sous 24 heures. tribucancer.org Il en existe trente-six, au cœur des établissements de soins. Lieux d’accueil et d’information, les ERI proposent également des réunions et débats thématiques sur le traitement, l’accès aux soins, l’alimentation, etc. Kiosques d’information et d’accueil sur les cancers (KIC et KAC) Implantés en centre-ville, ces espaces accueillent les malades et leurs proches. Ils sont animés par des réseaux de partenaires : commune, conseil général, CPAM, professionnels de santé, réseaux de cancérologie, associations. Il en existe une quinzaine, dont quatre à Paris. e-cancer.fr (rubrique Cancer Info) Accueil cancer de la Ville de Paris (ACVP) Structures d’accueil de proximité pour les malades et leur entourage. Accueil sans rendez-vous du lundi au vendredi de 9 h à 18 h, entretiens sur rendez-vous avec l’assistant social ou les psychologues. paris.fr (rubrique Paris pratique, puis Santé) Cancer info service Association Ressources Elle apporte un soutien psychosocial aux malades, au cas par cas. Permanence les vendredis, de 9 h à 12 h. association-ressource.org Europa Donna Coalition européenne contre le cancer du sein, l’association informe et organise de nombreuses manifestations (colloques, rassemblements sportifs…). europadonna.fr Les Impatientes www.lesimpatientes.com Jeunes Solidarité Cancer Accompagner un proche Allocation journalière de présence parentale (AJPP) Cette association, destinée aux adolescents et jeunes adultes touchés par le cancer, leur propose des séances d’information, d’échange ou d’activités sportives. Elle est versée par la Caisse d’allocations familiales aux parents d’un enfant de moins de vingt ans atteint d’une maladie rendant une présence et des soins indispensables. Son montant : 41,79 € à 49,65 € par jour de congé, dans la limite de vingt-deux jours par mois et de trois années. Un complément pour frais non remboursés par la Sécurité sociale de 106,88 € peut également être accordé. jeunes-solidarite-cancer.org Psychisme et cancer Cette association dispose d’un lieu d’accueil thérapeutique pour les malades et leurs proches (Paris XIIIe). psychisme-et-cancer.org Vivre comme avant Mouvement d’aide morale de femmes ayant subi une intervention à la suite d’un cancer du sein. Ligne téléphonique et site d’informations médicales et pratiques de l’Institut national du cancer et de la Ligue nationale contre le cancer. vivrecommeavant.fr e-cancer.fr ou 0810 810 821 (du lundi au samedi, 9 h-19 h) Cette association propose des programmes d’artthérapie adaptés aux personnes malades. Code de la sécurité sociale : articles D-544-1 à D544-10 Médecins de l’imaginaire Tous les sites d’information médicale (doctissimo, e-sante, sante-médecine) ont des forums thématiques. ROSE MAGAZINE “Nous ne sommes pas toutes égales face au cancer” Site d’information, forum consacré au cancer du sein. medecinsdelimaginaire.wordpress.com 164 solange de nazelle assistante sociale à l’institut curie Marianne Maury Kaufmann S’INFORMER, ÉCHANGER Espace de rencontres et d’information (ERI) “Mieux vaut être malade dans un département riche, qui a les moyens d’avoir une véritable action sociale !” Socialement, nous ne sommes pas toutes égales face au cancer. De nombreuses assistances, financières ou matérielles, sont possibles : encore faut-il les connaître et savoir à qui s’adresser pour les obtenir. La plupart de ces aides sont attribuées au cas par cas, en fonction de critères hétérogènes d’une ville ou d’un département à l’autre. Il faut le savoir : mieux vaut être malade dans un département riche, qui a les moyens d’avoir une véritable action sociale ! Il est temps de créer un véritable statut pour les malades : un statut qui leur ouvre des droits clairement identifiés et accessibles dans toute la France. En attendant, je conseille toujours aux malades ou à leur(s) proche(s) de prendre le temps de consulter un assistant social pour faire un tour d’horizon des subventions et soutiens auxquels ils peuvent prétendre. On l’oublie trop souvent : de nombreux services sont inclus dans les contrats d’assurance. Il peut s’agir de services à domicile (ménage, garde d’enfants), de conseils juridiques ou sociaux, de prestations d’assistance… Par ailleurs, certaines institutions de retraite et de prévoyance versent une rente ou une indemnité en cas d’invalidité. Enfin, la plupart des contrats d’assurance prévoient la suspension du remboursement d’un emprunt immobilier en cas d’invalidité. Il est essentiel de lire attentivement toutes les clauses des différents contrats d’assurance, de prévoyance et de retraite. Il serait tout de même dommage de ne pas bénéficier de prestations pour lesquels l’assuré a cotisé pendant des années ! ROSE MAGAZINE 165 170. Inspirez, soufflez... 12 propositions « bien-être », en France ou à peine plus loin. 178. 5 livres pour aimer Amours fous ou contrariés : le transport dans tous ses états. 180. 5 polars pour frémir Meurtres, braquages, suspense... Nos serial thrillers. 182. 4 livres pour comprendre Le cancer par ceux qui l’ont vécu et ceux qui le traitent. 186. Sain & Bon Alain Ducasse et son équipe nous livrent leurs recettes plaisir. 198. la grenade défensive Riche en antioxydants, la pomme d’ève se laisse volontiers presser. Nos meilleurs jus. Plainpicture LA VIE En ROSE ROSE MAGAZINE 3 éVASION Inspirez, soufflez... Les traitements terminés ou suspendus, il est temps de vous offrir une pause réconfort. En France ou à peine plus loin, douze escales bien-être pour se ressourcer. LE crotoy résidence de la plage jean-pierre chanial, céline dufranc et ulysse gaby Évian-les-bains Envie d’une parenthèse verte et bleue ? De réunir sa famille au grand complet sans se priver de souffler ? Direction évian, où le domaine des hôtels Royal et Ermitage enchâsse ses 19 hectares de parc et roseraie entre lac Léman et aiguilles enneigées. Est-ce l’harmonie des éléments, l’air pur ? En tout cas, on respire, intérieurement. Le Royal reste l’un des plus beaux palaces du monde. Quant à l’Ermitage, il cache sous des airs de chalet cossu des chambres rénovées dans un esprit « cocon » : du bois, des galets, des ardoises… Les deux hôtels proposent des piscines chauffées ainsi que deux spas exceptionnels. Celui du Royal, grand luxe, axé sur les bienfaits de l’eau d’évian, complète à merveille le Spa Quatre Terres de l’Ermitage, plus attentif aux énergies des cristaux ou des pierres. Et pour les enfants, « kids club » royal pour tous ! 168 ROSE MAGAZINE plus d’infos à partir de 1 500 € la semaine pour 2 personnes, à l’hôtel Ermitage. 04 50 26 85 00 evianroyalresort.com Evian Resort/Onlyfrance.fr/Roméo Ballancourt HÔTELS royal & l’Ermitage Un air de bout du monde, de troubles lumières lagunaires, une plage de sable blanc qui s’efface dans l’immensité brune du parc du Marquenterre, l’envol des oies cendrées accompagnées de cigognes ou de hérons pourpres. Sur terre, des balades à cheval ou à pied, le long de la grève, dans l’espoir d’entrevoir un phoque alangui sur la vase… Pour qui aime la nature, la baie de Somme est une escale magique à deux heures de voiture de Paris. Au bout de la route, au Crotoy, s’élève une vaste demeure normande, murs blancs et toits d’ardoise : La résidence Pierre & Vacances, remarquablement aménagée avec ses vastes baies vitrées ou ses balcons avec vue, ses chambres toutes de bois vêtues et ses cabines biscornues pour les moussaillons, allie l’élégance et le confort. Au rez-de-chaussée, une piscine chauffée et, à la demande, des repas livrés en appartement, des massages, le prêt de vélos, des initiations au char à voile… plus d’infos à partir 390 € la semaine pour un appartement de 4 personnes. 0 892 350 680 – pierreetvacances.com perros-guirec L’AGAPA spa Mer, paix et gourmandise. Ce sont les mots qui viennent à l’esprit lorsqu’on découvre, posé au bord de la Côte de Granit Rose, L’Agapa. La mer est là, plein cadre, qui vient s’abîmer au pied de l’hôtel breton. La paix, ensuite, qui imprègne chaque pièce : vastes espaces dénudés, baies vitrées sur la mer, matières brutes et belles. La gourmandise, enfin, celle de la peau, grâce aux soins du spa Nuxe, mais aussi celle des saveurs : le restaurant Belouga (1 étoile Michelin) décline chaque jour avec brio les produits de la mer. plus d’infos à partir de 75 € la nuit. 02 96 49 01 10 – lagapa.com ROSE MAGAZINE 169 éVASION La Roche-Posay Centre thermal 170 ROSE MAGAZINE avoriaz L’Amara plus d’infos Cure prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale dans le cadre d’une ALD. Billet de train remboursé et forfait hébergement de 150 € pour trois semaines. 05 49 19 49 49 thermes-larocheposay.fr Avoriaz, station sans voitures ni pots d’échappement qui viendraient noircir la carte postale, diversifie cet hiver son offre locative (jusqu’ici seulement des résidences trois et quatre « soleils ») avec l’ouverture d’une nouvelle résidence de grand standing agrémentée d’un spa, au cœur du village 1800. Aux incontournables - promenades en traîneau à cheval, piste de luge éclairée la nuit, sans oublier l’exceptionnelle école de ski pour les tout-petits, dirigée par la championne Annie Famose -, viennent désormais s’ajouter d’autres atouts : vastes appartements au style à la fois chic et épuré, piscine intérieure chauffée dans la résidence l’Amara, salle de fitness, wifi gratuit, garderie pour les enfants à partir de 6 ans et Spa Algotherm. plus d’infos à partir de 840 € la semaine pour 4 personnes. 0 891 70 1000 – pierreetvacances.com Onlyfrance.fr/Pierre et Vacances L’histoire de La Roche-Posay est liée à la découverte, dès l’Antiquité, des bienfaits de sa source « miraculeuse ». Aujourd’hui, on peut venir y adoucir les séquelles d’un cancer grâce aux vertus anti-inflammatoires d’une eau riche en silice, sélénium et calcium. « La cure de trois semaines concerne les patientes qui souffrent d’une cicatrice adhérente, des effets secondaires de la radiothérapie ou de la chimiothérapie », précise le Dr Orlane Clouet, cancérologue. Les résultats sont patents : une amélioration de 92 % sur la sécheresse de la peau, de 78 % sur l’état de la cicatrice. Un dermatologue définit un programme quotidien : les douches filiformes accélèrent la circulation, les pulvérisations calment les démangeaisons, les massages sous affusion assouplissent les cicatrices. Le protocole propose aussi des bains hydratants, des cours de maquillage. « On aide les femmes à retrouver une belle image d’elles-mêmes », résume Rachid Ainouche, directeur des thermes. Cette cure constitue un sas entre l’hôpital et le retour à la maison. « On me chouchoute comme jamais ! Avec ou sans sein, je me sens à l’aise », confie Cécile, quadra « mastectomisée » l’an dernier. La jeune femme n’a pas souhaité rencontrer la psychologue du centre, mais elle a couru suivre l’atelier de maquillage. Prochaine étape ? « Le coach sportif. Dans une semaine, promis ! » Savoie Valmorel Vue directe sur le Mont-Blanc. Valmorel, le tout nouveau village du Club Med, ouvre sur la station de la Tarentaise du même nom et ses 150 km de pistes. Le Club propose ici un village 4-tridents, ainsi que 26 suites avec balcon privatif classées 5-tridents et bénéficiant d’un service aux petits soins : conciergerie, ski-room et lounge... Toutes les manières de skier sont au programme, en cours comme en pratique. Une patinoire et une piscine intérieure chauffée complètent les équipements. Noter aussi que les enfants (de 4 mois à 17 ans) bénéficient d’un encadrement spécialisé. Enfin, le Spa signé Carita est à la disposition de celles qui veulent être dorlotées dans un décor tout blanc. plus d’infos à partir de 1 824 € la semaine, tout compris avec transport. 0 810 810 810 – clubmed.fr ROSE MAGAZINE 171 éVASION égypte SéNéGAL Le dernier-né des villages du Club Med, Sinai Bay, est une réussite. Posé au bord d’une immense plage en arc de cercle (plus de 500 mètres), adossé aux premières élévations du massif du Sinaï, il offre la sérénité d’un cocon de 27 hectares. Fleurs, ciel clair, architecture contemporaine et grand chic en prime. Car, ici, le Club est en démonstration. De son savoir-faire et de ses nouvelles manières : élégante convivialité, confort haut de gamme, activités sportives pour toutes et tous avec quatre écoles dédiées à la plongée, au golf, à la voile et au tennis, accueil des enfants à partir de 4 mois par des GO spécialisés, table tenue par de vrais chefs… Sans oublier un Spa Cinq Mondes de 1 000 m² dont les lignes, les couleurs et les jeux d’eau sont féeriques. Le reste semble presque normal, et pourtant… 5 piscines, 7 courts de tennis, 6 restaurants, 3 bars, et un programme complet d’excursions : promenades en bateau à fond de verre, raid dans le désert du Wadi Rum (en Jordanie, voisine), balade en chameau ou en quad. 172 ROSE MAGAZINE lamantin beach plus d’infos à partir de 2 270 € la semaine, tout compris au départ de Paris (gratuit pour les moins de 2 ans). Forfait Spa à partir de 135 € les 6 soins sur deux jours. 0 810 810 810 clubmed.fr DR/Hemis sinai BAY Une fois passé Dakar, la route qui file vers la Petite Côte, 80 km plus au sud, s’ouvre progressivement sur la savane, ses acacias et ses baobabs. On respire mieux, l’océan est tout proche. à l’entrée de Saly, une ruelle bifurque vers le Lamantin Beach Hotel, posé face à la mer au milieu des bougainvilliers, des cocotiers et des filaos. La tradition de la Teranga, l’accueil en wolof, est ici respectée. Douceur et gentillesse encadrent les résidents dans une ambiance familiale. L’hôtel compte 145 chambres réparties dans le jardin ; une grande piscine borde le restaurant et donne sur la marina, son restaurant de plein air, son bar lounge et sa plage. Des spectacles sont organisés chaque soir, Khadija supervise le Spa, on appelle les enfants tous les jours pour le goûter… Un peu comme à la maison, chaleur et soleil en plus. plus d’infos à partir de 1 467 € vol compris en demi-pension par personne. Soin visage offert sur présentation de Rose Magazine. look-voyage.fr Golfe persique costa Naviguer au pays des princes d’Orient. Voilà ce que propose cette croisière signée Costa, entre Dubayy, Abu Dhabi, Bahreïn, Mascate, Fudjayra… Architecture futuriste, plages sans fin, souks aux bonnes affaires, tours vertigineuses… Rien ne manque au répertoire des vacances réussies. D’autant que cellesci se déroulent à bord du Costa Favolosa, paquebot dernière génération : déco flamboyante, 5 restaurants, 13 bars, spectacle chaque soir, casino, piscine géante et, surtout, Spa Samsara de 6 000 m². Il est du reste possible de réserver une suite avec accès direct au centre de soins, où les thérapeutes proposent une gamme à la carte, de même qu’un traitement personnalisé complet. On peut aussi s’offrir une excursion à chaque escale (le bateau navigue de nuit et reste au port de l’aube jusqu’à l’heure des cocktails) : escapade en 4 x 4 dans le désert, visite du souk, golf… plus d’infos à partir de 1 450 € la semaine par personne en cabine avec balcon, vols depuis Paris inclus. En agences de voyages et sur costacroisieres.fr. ROSE MAGAZINE 173 éVASION Djerba Palm Beach MAJORQUE Hospes Maricel 174 ROSE MAGAZINE ST NICOLAS BAY plus d’infos à partir de 350 € la nuit, par chambre double. hospes.com Hospes Maricel /DR/Hemis Sur la plus grande des îles Baléares, à seulement quatre kilomètres de la capitale, Palma, mais parfaitement isolé face à la mer, l’Hospes Maricel combine l’architecture seigneuriale du xive siècle majorquin à un style minimaliste contemporain fait de matériaux bruts. La richesse des marbres au sol, des pierres de Marés au mur et des salles de bain Art déco contrastent avec les espaces dénudés, qui laissent toute sa place à la lumière méditerranéenne. Les chambres du bâtiment le plus récent ouvrent sur la mer, tout comme les cabines du Bondyna, l’incroyable Spa troglodyte où l’on vous dispensera des massages balinais ou orientaux à l’intérieur de grottes ménagées dans la falaise ! Restaurant gastronomique, soirées jazzy au bar lounge et petitdéjeuner d’anthologie (jugé par un journal madrilène « meilleur petit déjeuner du monde ») sont aussi au menu de votre semaine de détente. CRèTE En vraie fille de Méditerranée, la plus grande des îles grecques aime les décors en bleu et blanc. Pousser les portes, c’est entrer dans un monde de lumière. Au menu du séjour, plages intimistes, villages miniatures pressés autour de chapelles aux murs jamais bien droits, chemins tracés à l’ombre des oliviers. Dans ces paysages inchangés (ou presque) depuis l’Antiquité, un superbe hôtel est posé en surplomb de la baie d’Aghios Nikolaos, qui propose des suites avec piscine privée. Plage en contrebas, restaurant de référence et service sans faille. Simplicité et authenticité sont ici les maîtres mots. Y compris lorsque sonne l’heure de passer à table. Le régime… crétois ne fait-il pas des merveilles ? plus d’infos à partir de 2 200 € la semaine au départ de Paris en demi-pension. 01 45 62 62 62 – directours.com Chaque membre de la famille trouve ici son plaisir : la plage pour qui veut paresser face à la Méditerranée, le Spa quand on a envie de se faire chouchouter, les courts de tennis ou la base nautique si on préfère l’activité, les excursions dans les ruelles de la petite île tunisienne lorsqu’on veut découvrir l’artisanat local… Bienvenue au Palm Beach, un 4-étoiles pieds dans l’eau, épatant pour les vacances en famille. L’hôtel dispose en effet de chambres accueillant toute la tribu et offre des activités spécialement dédiées à ses jeunes résidents : miniclub (3 à 7 ans), junior club (8-11 ans) et club ado (1215 ans). Enfin, le Palm Beach applique la formule « tout inclus », qui comprend donc tous les repas et évite ainsi les budgets à rallonge. plus d’infos 499 € la semaine tout compris au départ de Paris. 0 825 000 825 – nouvelles-frontieres.fr ROSE MAGAZINE 175 éVASION Turquoise Paradise L’océan Indien, ses plages de sable blanc, son eau translucide, ses cocotiers... Clichés ? Même pas. Le (cher) rêve existe. Sans décalage horaire. maldives ILE MAURICE TROU AUX BICHES jean-pierre chanial et ulysse gaby seychelles Sur cet archipel de l’océan Indien, le temps est arrêté. Plages immaculées, brise tiède dans les ramures des cocotiers… Depuis toujours, les Seychelles développent un tourisme mesuré qui n’altère pas le capital nature du pays. La preuve par l’hôtel Ephelia, installé sur l’île principale de Mahé et parfaitement intégré au paysage local. L’établissement propose plusieurs plages divines, des piscines, toutes les installations sportives souhaitées. Il compte 308 chambres. Certaines suites avec vue sur le large sont exceptionnelles. En outre, il mise aussi – et c’est une première ici – sur l’accueil des familles, dans des villas à deux niveaux qui comprennent une chambre pour les enfants distincte de celle des parents, une piscine privée et un jardinet. Ce qui n’empêchera pas de fréquenter la merveille d’Ephelia : son Spa Shiseido de 7 000 m² ! 176 ROSE MAGAZINE plus d’infos à partir de 3 000 € la semaine, vol et petit-déjeuner compris. 0 825 16 15 02 tourinter.com Beachcomber Hotels/DR Constance Ephelia Les beaux hôtels ne manquent pas à Maurice. Celui-ci présente l’idéale particularité de se trouver sur l’une des plages les plus agréables de la côte ouest de l’île, protégée du vent, et d’être un vrai 5-étoiles (il vient d’achever sa rénovation), conçu pour chouchouter parents et enfants. Si vous êtes seule ou en couple, les salles de gym (400 m2 d’équipements exceptionnels), cours de tennis, yoga, tai-chi, plus tous les sports nautiques occuperont vos journées. à moins que l’usage intensif du Spa Clarins ne suffise à votre bonheur… Pour les parents, le plus compliqué reste de récupérer les enfants, le soir : dès le petit-déjeuner, des hôtesses du mini-club viennent présenter aux jeunes le menu de la journée. Dès lors, difficile de résister à l’appel de la chasse au trésor, du ski nautique adapté au moins de six ans ou du cours de séga. Le soir, pas moins de six restaurants thématiques régaleront vos papilles et vos yeux grâce à un effort notable sur la décoration. Mention spéciale au Mahiya et à son décor de palais indien. plus d’infos à partir de 2 485 € la semaine en suite junior demi-pension, vols compris. 0 820 223 223 – kuoni.fr Taj Exotica Place au rêve ! La carte postale est posée au bout des pistes de l’aéroport de Malé, capitale miniature des Maldives. Dix minutes de bateau plus loin, bienvenue sur l’atoll d’Emboodhu Finolhu (700 m de long et 30 m de large), baigné d’un lagon de cristal qui joue sur toute la palette des bleus et des verts. Désormais, c’est plage, paréo et paresse sur la terrasse d’une des 62 villas sur pilotis de l’hôtel Taj Exotica. Grand chic en prime. L’établissement est en effet membre des très élégants Leading Hotels of the World. Au programme : plongée dans cet aquarium grandeur nature (un masque et un tuba suffisent à voir des merveilles), croisière au crépuscule pour observer les dauphins une coupe de champagne à la main, dîner romantique sur le sable… Sans oublier le Spa, où sont cultivées les traditions indiennes du massage (soins ayurvédiques), de la relaxation (yoga) et de la méditation. plus d’infos à partir de 3 200 € la semaine, vol et petit-déjeuner compris. 01 44 41 50 10 – asia.fr ROSE MAGAZINE 177 LECTURES 5 romans pour aimer liaison fatale Véronique Ovaldé :“J’aime les histoires qui finissent bien.” J’aime les histoires qui finissent bien. Je donne à mes personnages des possibilités de rédemption, le loisir de refaire leur vie, de se libérer. La fin est ouverte, comme si je les laissais à l’orée de la forêt avec mes encouragements et que je leur soufflais : « Allez-y ! » Pourquoi ce recours à une géographie imaginaire ? La raison est que je m’y sens absolument libre. Je crois qu’une proximité trop grande avec le réel me paralyserait. J’aime me placer dans une sorte de cousinage exotique avec le monde. Une seule condition, toutefois : il faut que tout soit vraisemblable. 178 ROSE MAGAZINE Vous êtes écrivain et également éditeur. Comment passez-vous d’un rôle à l’autre ? Essentiellement en organisant au mieux mon temps. Je me lève très tôt, vers cinq heures du matin, et j’écris tout de suite, avant de m’occuper de mes enfants. Cela me laisse une petite « enclave personnelle », un temps d’écriture quotidien de deux heures. Le reste, ensuite, me paraît plus facile. Dans l’édition, où je travaille depuis maintenant vingt ans, j’ai exercé différents métiers. Aujourd’hui, je recherche des auteurs et je les accompagne dans l’élaboration de leurs manuscrits. Lire et écrire : c’est toute ma vie. propos recueillis par laure bastien Benjamin Chelly roze magazine . Des vies d’oiseaux s’approche du conte… Une petite république inventée d’Amérique latine, en bord de mer. Le temps s’est figé pour l a b e l l e Vi d a Izarra. Jadis, son mari l’arracha à la misère pour faire d’elle une « femme trophée ». « Il me semble bien être vivante dans ma tombe », se lamente Vida dans sa luxueuse villa. La fille unique du couple, Paloma, a quitté le mausolée familial des mois plus tôt en claquant la porte. Dans ce désert de l’amour apparaît soudain le lieutenant Taïbo. Son enquête sur un couple de jeunes squatteurs le mène jusqu’à la maison de Vida Izarra. Si l’action débute comme dans un roman policier, le suspense s’engage vite ailleurs, sur des chemins amoureux – tout aussi aventureux. Plusieurs histoires se mêlent et s’entrelacent dans ce conte où la géographie imaginaire, signature de l’auteur, enlumine la carte du tendre. l.b. des vies d ’ oiseaux , véronique ovaldé . l ’ olivier . Au siècle dernier, dans la campagne américaine, une fille de fermier belle et brillante s’éprend avec violence d’un artiste, projette sur lui ses fantasmes et sombre dans la névrose. Ce roman décortique avec brio et fièvre l’obsession amoureuse. l.b. folie d ’ une femme séduite , susan fromberg schaeffer . belfond . Sens interdits John Synge, important dramaturge irlandais (1871-1909), eut pour unique amour l’actrice Molly Allgood, de vingt ans sa cadette. Joseph O’Connor retrace ici leurs sentiments empêchés par la société d’alors, corsetée de principes. Le monologue de Molly, devenue une vieille femme, artiste oubliée, pauvre, dans un Londres indifférent, vous hante bien après le mot l.b. « fin ». muse , joseph o ’ connor . phébus . un homme, une femme Ses mots donnent le frisson. Baroques, fiévreux, tissés en des phrases somptueuses, ils transportent le lecteur au cœur même de la passion charnelle – objet de ce récit. Qui, mieux que Marie Billetdoux – plus connue sous le prénom de Raphaëlle, qu’elle a changé pour celui de Marie – pour narrer la puissance du choc amoureux ? On se jette sur ce récit, prix Renaudot 1985, enfin réédité ! l.b. mes nuits sont plus belles que vos jours , marie billetdoux . stock . Un cœur à nu Le narrateur remonte le fil des moments forts avec ceux qu’il a aimés, qu’il aime encore : son grand-père, sa grand-mère, ses parents, une inconnue rencontrée dans un cimetière, Louise, la femme dont il tombe un jour amoureux fou et qui devient son épouse. On savoure cette mise à nu toute en simplicité lumil.b. neuse. les souvenirs , david foenkinos . gallimard . ROSE MAGAZINE 179 LECTURES 5 polars pour frémir la caravane passe... Lignes de faille Tokyo, 1984. Aomame (« petit pois », en japonais) est une tueuse à gages d’un genre un peu particulier. Sa cible de prédilection : les auteurs de violence conjugale. Les hasards de la vie, et un contrat portant sur le leader d’une secte, vont lui permettre de retrouver Tengo, le garçon qui l’aimait quand elle avait dix ans. Intitulée 1Q84, en référence au 1984 de George Orwell, cette trilogie romanesque nous fait suivre les destins parallèles d’Aomame et de Tengo. Mêlant comme à son habitude réalisme et fantastique, Murakami nous plonge dans le Japon d’avant 1995, année du séisme de Kobe et de l’attentat au gaz sarin par la secte Aum. En 1984, les signes avant-coureurs sont là, les lignes de faille déjà visibles. Le sectarisme, mal insidieux qui menace chacun, se nourrit du désarroi collectif. Les personnages de 1Q84 naviguent à vue dans un monde qui se dérobe. Murakami déploie ses immenses talents de conteur et suggère, en filigrane, cette sagesse qui figure dans son Autoportrait de l’auteur en coureur de fond : « Le fait que je sois “moi” et personne d’autre est l’un de mes plus grands atouts. Les blessures émotionnelles cédric bellot représentent le prix à payer pour être soi-même. » 1q84, haruki murakami (traduit du japonais par hélène morita). belfond . livre 1 et 2. livre 3 à paraître en mars 2012. 180 ROSE MAGAZINE T Nadine Monfils, romancière belge qui vit à Montmartre, n’a pas son pareil pour rendre ses personnages attachants. Elle le prouve une nouvelle fois avec la famille Destrooper, partie en vacances à la mer du Nord et confrontée à un serial killer. Chemise à fleurs et short kaki, le père Fonske a bien du mal à tenir sa smala : l’aîné, Steven, et sa sœur Lourdes (maman Josette aime la presse people) ainsi que leur mémé qu’ils traînent dans une caravane Wa-Wa. Situations cocasses et dialogues pleins de c.b. verve. les vacances d ’ un serial killer , nadine monfils . belfond . Swing à l’irlandaise Âgées d’un an à peine, les éditions Asphalte sont développées avec brio par deux jeunes éditrices qui adorent bourlinguer au fil des pages. Leur dernière découverte : Breakfast on Pluto, de Patrick McCabe (adapté au cinéma par Neil Jordan). Le romancier irlandais vous embarque dans le swinging London des années 70 et vous attendrira à coup sûr avec Pussy, prostitué travelo, né dans un village au nom de conte de fées, Tyreelin (inutile de chercher sur une carte). Au menu : coiffures en bubble cut, garde-robe vintage, poseurs de bombes et grain de folie à chaque c.b. coin de rue. breakfast on pluto , patrick mccabe . asphalte . Cauchemar en altitude Mobilité professionnelle Dortmunder est l’un des héros fétiches de Donald Westlake, le génial auteur du Couperet (Rivages/ Noir). « J’ai quoi à y gagner ? » est la devise du braqueur le plus malchanceux de la profession. Mais quand il entend parler d’un gros coup, ses yeux brillent et les lecteurs ne risquent pas de s’ennuyer. Justement, un ex-agent du FBI, viré parce qu’il voulait instaurer une poignée de main secrète « afin que les agents puissent se reconnaître dans les soirées et tout », a une idée : une banque vient d’être transférée dans un mobil-home pendant la réfection du bâtiment qui l’abrite. Pourquoi ne pas l’accrocher à un camion et partir avec ? Le FBI devrait prendre garde à la fuite de c.b. ses cerveaux... comment voler une banque, donald westlake. rivages/noir. Isolé en compagnie de sa femme Margot dans une ferme perchée à 636 mètres d’altitude, l’écrivain de best-sellers Ramon Hill tente de renouer avec l’inspiration. Mais Margot, elle, veut profiter du séjour pour tenter de sauver son couple. Lorsque Ramon s’électrocute, la tension monte à 220 volts et le huis clos tourne vite au cauchemar. Joseph Incardona mêle savamment thriller et humour noir dans un récit survolté qui se lit d’une c.b. seule traite. volts , joseph 220 incardona . fayard . ROSE MAGAZINE 181 LECTURES 4 livres pour comprendre à la vie, à l’amour Attention, livre bouleversant ! Auteur du remarqué L’équilibre des requins, l’Italienne Caterina Bonvicini raconte dans son nouveau roman poignant l’histoire de Lisa. Une bande d’amis, le bonheur, les noces de la jeune femme : « Nous étions si heureux à son mariage (…) Nous chantions, nous dansions pieds nus. » Et puis soudain, une tumeur au cerveau, la vie confinée entre les quatre murs d’une chambre d’hôpital, le quotidien qui oscille entre la souffrance pour Lisa et la terreur de la perdre pour ses amis. La bande trentenaire, légère et gaie, doute, interroge la vie et ses inextricables chemins de douleur : à quoi bon travailler, se marier, faire des enfants ? Entre crises de larmes et souvenirs heureux, ce roman brillant et plein de vie brise le tabou de l.b. la marche vers la mort. le lent sourire, caterina bonvicini. gallimard. E Estelle Lagarde commence son voyage au pays du cancer un 8 mars. Difficile d’oublier la date. En cette journée de la femme, la jeune photographe apprend qu’une tumeur de la taille d’un « noyau de cerise » s’est nichée dans son sein. Durant ce sale printemps où le temps des cerises n’est plus celui de l’insouciance, elle fait son entrée « dans le monde des malades » et à l’institut Curie de Paris. L’artiste entame alors une singulière entreprise : se photographier tout au long de son combat, « comme un carnet de voyage », une odyssée avec ses (petits) hauts et ses (très) grands fonds. Images et textes, le journal de bord n’élude rien de la traversée : la boule à zéro, les jours de petite forme, la « gueule de bois » après la 182 ROSE MAGAZINE chimio, les « yeux de lapin malade », la sexualité qu’il faut réinventer. Aujourd’hui, Estelle a regagné la terre des bien-portants et laisse un livre de photographies oniriques et étranges, décalées, souvent dérangeantes pour qui n’a pas traversé les mêmes terres ardentes. Des images qui éclairent d’une lueur crue et vraie la douleur, la solitude, la peur, ces maux que l’on a tant de mal à expliquer, à faire partager. C’est normal, « Estelle », cela signifie « étoile ».anne-sophie douet la traversée imprévue , estelle lagarde . la cause des livres , exposition jusqu ’ au 25 octobre à l ’ institut curie . Estelle Lagarde L’odyssée d’Estelle réponses à tout plongée en eaux profondes Reporter, sportive accomplie, plongeuse passionnée, Martine Carret traverse la vie comme une tornade. Mais, à quarante-quatre ans, son passé familial la rattrape soudain. Un cancer. Un cancer tout comme celui qui emporta sa grand-mère à trente-neuf ans, puis sa maman encore jeune. Un cancer que, malgré ces antécédents, personne n’a vu venir, ni guetté. Commence alors une course contre la montre pour décapiter l’« hydre », mais aussi pour ne pas polluer la vie de sa famille, ne pas oblitérer un amour renaissant. Et puis il y a la plongée sous-marine, les grands fonds où, malgré l’épuisement, Martine va se réfugier, se ressourcer. Le livre d’une femme en vie, c.l-r. passionnée. cancer ? même pas peur !, martine carret. archipel. Un format réduit, un livre souple et cent soixante pages de questions simples auxquelles des réponses claires et pédagogiques sont apportées. « J’ai eu un cancer et je suis encore fatiguée deux ans après », « Pourquoi les chimiothérapies sontelles mauvaises pour le cœur ? », « Faut-il changer son alimentation après un cancer ? ». Aucun interdit dans la liste des interrogations qui abordent aussi la vie sexuelle, les problèmes esthétiques et psychologiques. Un vade-mecum utile, pour vivre avec moins d’angoisses c.l.-r. « l’après ». l’après-cancer, marina carrère d’encausse et michel cymes. collection bonjour-docteur, hachette pratique. ROSE MAGAZINE 183 Alain Ducasse et les chefs de Châteaux & Hôtels Collection ont conçu neuf recettes exclusives pour les lectrices de « Rose ». CAHIER GOURMAND Roberto Frankenberg SAIN & BON SAIN & BON ma) présentent des propriétés potentiellement intéressantes, précise le Pr Irène Margaritis, chef de l’unité d’évaluation des risques nutritionnels à l’Anses, les effets n’ont été observés qu’expérimentalement chez l’animal ou sur des cellules isolées. En l’état actuel des connaissances, on ne peut pas affirmer que la consommation de ce type d’aliment présente un intérêt spécifique dans la prévention des cancers chez l’homme. » Huile d’olive, gingembre et fantaisie Ce qui fonctionne ? La synergie. Mieux vaut manger de tout, avec un apport calorique adapté à nos dépenses énergétiques. Sans oublier, bien évidemment, de saupoudrer ses ingrédients d’une bonne dose de gourmandise et de plaisir ! Un programme qui sied à merveille à Alain Ducasse, Landais d’origine mais Méditerranéen de cœur. Le chef multi-étoilé signe avec la diététicienne Paule Neyrat – créatrice des stages Escoffier – un livre de 190 recettes abordables, Nature, simple, sain et bon. à l’image du « régime méditerranéen », c’est « simple, explique Paule Neyrat, car réalisé avec des produits faciles à trouver et abordables. Sain, parce que l’on revient à l’essentiel grâce à des fruits et des légumes de saison, des céréales et des légumineuses, sans oublier le poisson et un peu de viande. Et bon, grâce au petit détail qui change tout : le ketchup maison préparé à partir de belles tomates bien mûres ; le "light pistou", inratable avec une bonne ; la petite huile d’olive vierge touche de gingembre, parfaite pour donner du peps à de simples poires au vin. Le vin, d’ailleurs, apporte à lui seul une multitude de molécules protectrices pour le système cardio-vasculaire… ». Alain Ducasse et six chefs du réseau Châteaux & Hôtels Collection ont concocté pour les lectrices de Rose Magazine des recettes parfumées, colorées, gaies, propres à ouvrir l’appétit, faciles à réaliser et enfin équilibrées, pleines de vitamines, de fibres, d’antioxydants… Avec, de la part des chefs, une pincée d’amour supplémentaire pour toutes les femmes touchées par la maladie. Régalez-vous ! céline dufranc ROSE MAGAZINE “Se faire plaisir” Rose Magazine. Le titre de votre livre est un programme de santé. Alain Ducasse. Un message de bonheur ! Je montre qu’on peut se régaler en faisant aussi du bien à son corps. Je n’ai jamais éloigné santé et plaisir, j’ai grandi dans une ferme avec la culture de la simplicité et du goût. à l’heure de préparer le repas, ma grand-mère m’envoyait dans le potager cueillir les légumes juste mûrs. C’était la nature qui fixait le menu ! Plus tard, j’ai découvert la cuisine méditerranéenne, proche du produit. Enfin, pour mon épouse qui aime les fruits, les légumes, les céréales, je cuisine sainement au quotidien. Vos astuces pour manger équilibré sans se ruiner ? D’abord, prendre le temps de choisir de beaux produits. Mon conseil : se promener dans les marchés, parler avec les producteurs. Et ensuite, prendre le temps de les cuisiner simplement. À lire : Nature, simple, sain et bon, éd. Alain Ducasse, 24,90 €. “Pas de régime anticancer mais une alimentation équilibrée” 188 Alain Ducasse Pierre Monetta à à la sempiternelle question « existe-t-il des aliments anticancer ? », l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) donne une réponse très claire. Non. Il n’existe pas d’aliment avéré anticancer, conclut la très scientifique institution, au terme d’une étude où ont été analysées plus de 445 substances différentes dans 20 000 produits alimentaires. Conclusion : l’unique recette pour protéger efficacement sa santé reste une alimentation variée et équilibrée, moins d’alcool, un surcroît d’activité physique. Cette étude démonte les arguments pseudo-scientifiques de la pléthore de régimes labélisés « anticancer » qui se développent depuis une dizaine d’années et promettent tout et n’importe quoi. Une vie plus saine donc moins de risques, pour les plus sérieux. La guérison totale de cancers installés, pour les plus dangereux. Que l’on soit malade ou bien portant, difficile, en effet, de savoir à quel aliment se vouer : faut-il se « booster » à la grenade, au brocoli, au thé vert, manger bio, saupoudrer généreusement ses plats de curcuma, avaler des compléments alimentaires ? « S’il est vrai que certains microconstituants des plantes aromatiques et épices (comme les flavones du thym et du persil, les catéchines du thé, les polyphénols du curcu- Quels conseils donnez-vous aux femmes malades dont l’appétit fluctue ? Je ne suis ni médecin ni diététicien. Mais j’ai moi-même connu une période difficile sur le plan médical. Je sais qu’il faut se faire plaisir. Même si ça demande un petit effort, il faut explorer le monde du goût en se disant qu’il existe toujours une saveur dont on aura envie. ROSE MAGAZINE 189 CARNET DE RECETTES Crevettes, menu idéald’Alain d’AlainDucasse Ducasse Crevettes,daurade, daurade,poire poireetetchocolat. chocolat. LeLe menu santé stylisme marie-caroline malbec. PHOTOS ALAIN BENOiT. L’entrée BOUILLON DE CREVETTES BOUILLON DE CREVETTES L’entrée Pour 4 personnes Pour le bouillon : 600 g de petites crevettes bouquet 1 piment oiseau 1 tomate fraîche 3 cm de gingembre 1 bâton de citronnelle 2 blancs d’œufs Pour la garniture : 2 cébettes 1 poignée de pois gourmands 1 piment rouge 1/4 de citron Piment d’Espelette Sel, poivre moulin 190 ROSE MAGAZINE Préparez le bouillon. Décortiquez le tiers (200 g environ) des petites crevettes bouquets, mettez-les au frais mais ne jetez ni lesletêtes ni les carcasses. Préparez bouillon. Décortiquez le tiers (200 g environ) Coupez le piment oiseau et la tomate en morceaux. Épludes petites crevettes bouquet, mettez-les au frais, mais ne chez ni le gingembre, réservez-en jetez les têtes ni les carcasses. le tiers et coupez le reste en morceaux. Cassez le bâton de citronnelle. Coupez le piment oiseau et la tomate en morceaux. ÉpluDanslelegingembre, mixeur, rassemblez le reste des crevettes chez réservez-en le tiers et coupezentières, le reste les morceaux. têtes et carcasses, lesbâton morceaux de gingembre, la toen Cassez le de citronnelle. mate et piment. Mixez deux minutes en ajoutant 50 cl Dans le le mixeur, rassemblez le reste des crevettes entières, d’eau et versez dans une casserole pas trop grandelapour les têtes et carcasses, les morceaux de gingembre, toque laetpréparation soit surdeux une minutes bonne épaisseur. Ajoutez mate le piment. Mixez en ajoutant 50 cl alors laetcitronnelle. d’eau versez dans une casserole pas trop grande pour Faites bouillir, versez les bonne blancs épaisseur. d’œufs etAjoutez remuez alors bien que la préparation ait une avec le fouet. Baissez feu au versez minimum et laissez mijoter la citronnelle. Faites le bouillir, les blancs d’œufs et dix minutes. remuez bien avec le fouet. Baissez le feu au minimum et Tapissez une passoire d’un torchon humide et posez-la laissez mijoter dix minutes. sur un saladier. Avec une l’ensemble de Tapissez une passoire d’unlouche, torchonversez humide et posez-la la préparation afin deversez ne pasdélicatement troubler le sur un saladier.délicatement Avec une louche, bouillon. de la préparation afin de ne pas troubler le l’ensemble Ensuite, refermez le torchon en rassemblant ses bords bouillon. Ensuite, refermez le torchon en rassemblant ses vers levers centre et pressez pourpour récupérer la totalité du bords le centre et pressez récupérer la totalité liquide. Rectifiez son assaisonnement : ce bouillon doit être très clair et parfumé. Gardez-le au chaud. du liquide.laRectifiez sonLavez, assaisonnement Préparez garniture. épluchez : les cébettes. ce bouillon Lavez, les pois gourmands, taillez-les en fins filadoit êtreeffilez très clair et parfumé. Gardez-le au chaud. ments. Préparez la garniture. Lavez, épluchez les cébettes. Taillez de même le piment rouge doux et leen gingembre Lavez, effilez les pois gourmands, taillez-les fins filaréservé et rassemblez ceslelégumes unetsaladier. ments. Taillez de même pimentdans rouge le gingembre Pour terminer, coupezces grossièrement lesun crevettes réservé, et rassemblez légumes dans saladier.décortiquées réservées (400 ggrossièrement Pour terminer, coupez les crevettes décorenviron) et assaisonnez-les du jus tiquées du quartréservées de citron(400 et de gpiment d’Espelette. environ), et assaisonnez-les du Mélangez bien et répartissez ce hachis au fond Mélangez de quatre jus du quart de citron et de piment d’Espelette. bols. par-dessus, la julienne de légumes, puis bien etAjoutez, répartissez ce hachis au fond de quatre bols. Ajoupour le bouillon. tez la finir, julienne de légumes puis, pour finir, le bouillon. ROSE MAGAZINE 191 CARNET DE RECETTES Des idées gourmandes faciles à réaliser Le plat DauRADE ROYALE Pour 4 personnes Daurade : 1 daurade de 1,5 kg 1 citron 1 bouquet d’aneth 2 branches de fenouil sec 1 kg de gros sel gris de Guérande 200 g d’algues multicolores 3 blancs d’œufs Sauce à l’aneth : 1 échalote 6 cuil. à soupe de vinaigre 60 g de beurre froid 1 cuil. à soupe de crème fraîche 200 g de fromage blanc à 0 % Sel, poivre Faites préparer la daurade par votre poissonnier en lui demandant de la vider par les ouïes et d’ébarber les nageoires du dos ; et surtout de ne pas l’écailler. Coupez le citron en tranches. Détachez les pluches du bouquet d’aneth et réservez-les pour la sauce. Par la tête, fourrez la daurade avec les queues d’aneth, les tranches de citron et les branches de fenouil. Dans un saladier, rassemblez le gros sel, les algues et les blancs d’œufs. Mélanger. Puis étalez cette préparation et enveloppez-en la daurade. Enfournez trente minutes, four à 180° C. Préparez la sauce à l’aneth. Pelez et ciselez l’échalote. Jetez-la dans une casserole, avec six cuillerées à soupe d’eau et autant de vinaigre. Faites réduire des deux tiers. Incorporez le beurre froid. Ajoutez la crème fraîche puis l’aneth haché. Laissez tiédir et incorporez le fromage blanc. à la sortie du four, laissez reposer la daurade vingt minutes. Cassez la croûte et éliminez le sel, retirez la peau et levez les filets. Disposez-les sur un plat, nappezles de la sauce à l’aneth et servez tout de suite. Nicolas Masse « les Sources de Caudalie » à Bordeaux-Martillac Salade DU POTAGER Vous pouvez servir la daurade dans sa croûte et la casser à table. Dans ce cas, mettez la sauce dans une saucière. Le dessert Pour 4 personnes Sorbet poire : 4 poires bien mûres 50 g de sucre semoule Poires pochées : 4 poires Williams bien mûres 90 g de sucre semoule 1/2 citron 1 gousse de vanille Sauce chocolat : 125 g de chocolat noir à 70 % 2 cuil. à soupe de crème liquide 192 ROSE MAGAZINE Préparez le sorbet. épluchez les poires en retirant leur cœur. Coupez-les en petits morceaux. Mixez-les avec le sucre semoule, versez dans la sorbetière et turbinez. Préparez ensuite les poires pochées. Lavez les fruits, épluchez-les en gardant leur queue, réservez les épluchures. Dans une casserole, versez 75 cl d’eau, ajoutez le sucre semoule, le jus du demi-citron, la gousse de vanille ouverte et grattée, et les épluchures des poires. Faites bouillir. Plongez alors les poires, debout, dans ce sirop et cuisez-les pendant quinze minutes. Laissez refroidir. Préparez la sauce chocolat. Cassez le chocolat noir en morceaux et faites-le fondre au bain-marie ou au microondes. Ajoutez-lui la crème liquide et deux à trois cuillerées à soupe du sirop de cuisson des poires. Mélangez. Pour terminer, dans chaque coupe, déposez d’abord une boule de sorbet, puis une poire, et nappez cette dernière de sauce chocolat. Servez tout de suite. Alain Benoit POIRE POCHée Pour 4 personnes Pour la salade mesclun : 8 feuilles de pourpier 4 feuilles de tatsoi 4 feuilles de bette à carde rouge 4 feuilles de Rossa Italia Pour les légumes : 11 asperges vertes 4 carottes fanes Pour les copeaux : 2 radis 2 carottes fanes 2 mini-betteraves Pour la finition : 6 mini-concombres 3 fleurs de thym 6 pensées 6 fleurs de bourrache Huile d’olive Vinaigre balsamique Fleur de sel Poivre du moulin Rincez, séchez et réservez la salade de mesclun. Préparez les asperges. Lavez et épluchez-les. Sur huit d’entre elles, coupez les pointes sur cinq centimètres de longueur. Liez-les en bottes et plongez-les cinq minutes dans de l’eau bouillante bien salée. Rafraîchissez-les dans de l’eau glacée, égouttez-les et réservez-les. Sur les trois autres, coupez les pointes sur sept centimètres de longueur. Taillez-les en rubans dans leur longueur avec une mandoline japonaise. Réservez. Préparez les carottes. Épluchez et lavez les carottes fanes. Cuisez-les dix minutes, dans de l’eau bouillante salée (vérifiez la cuisson avec la pointe d’un couteau). Rafraîchissez-les dans de l’eau glacée, égouttez-les et réservez-les. Préparez les copeaux de légumes. Épluchez et lavez les radis, les carottes fanes et les mini-betteraves. Séchezles et taillez-les en copeaux d’un millimètre d’épaisseur. Réservez-les dans une jatte remplie d’eau et de glaçons. Taillez les mini-concombres en deux et les carottes cuites dans leur longueur. Déposez asperges et carottes dans des assiettes. Égouttez et séchez les copeaux de légumes et répartissez-les. Ajoutez les mini-concombres et les fleurs. Arrosez d’un filet d’huile d’olive, de quelques gouttes de vinaigre balsamique, d’une pincée de fleur de sel et d’un tour de poivre du moulin. Servez frais. ROSE MAGAZINE 193 CARNET DE RECETTES Restaurant « Emmanuel Hodencq » à Clermont-Ferrand SaintJacques aux endives Stéphane Tournier « Les Jardins de l’Opéra » à Toulouse Fricassée de légumes 194 ROSE MAGAZINE Préparez les légumes. Pelez et lavez les asperges vertes. Coupez les têtes sur dix centimètres de longueur (gardez les tiges pour un potage). Liez-les en botte. Grattez les carottes fanes et les petits navets, lavez et épluchez les petits oignons blancs en gardant deux à trois centimètres de tige. Cuisez la botte d’asperges d’abord, puis le reste des légumes dans de l’eau bouillante salée pendant cinq minutes. Nettoyez les trompettes de la mort. Pelez et ciselez l’échalote. Rincez, séchez, effeuillez et ciselez le persil plat. Réservez tous ces légumes. Préparez l’émulsion de carottes. Épluchez et lavez les carottes, coupez-les en morceaux et mettez-les dans la centrifugeuse. Versez le jus dans une casserole. Ajoutez les graines de coriandre. Cuisez-le jusqu’à ce qu’il soit bien réduit, et qu’il ait presque l’aspect d’un sirop. Retirez la casserole du feu et versez doucement l’huile d’olive en fouettant sans arrêt. Ajustez l’assaisonnement en sel et poivre. Gardez l’émulsion de carottes au chaud. Préparez les œufs mollets. Sortez les œufs de votre réfrigérateur une heure avant de les cuire pour les remettre à température ambiante. Faites bouillir de l’eau dans une casserole, plongez-y les œufs et laissez-les cuire juste pendant cinq minutes. Puis sortez- les, refroidissez-les et écalez-les. Chauffez un bon filet d’huile d’olive dans un sautoir. Faites-y fondre l’échalote ciselée sans la colorer. Mettez les carottes, les navets et les oignons et faites-les sauter pendant cinq minutes. Ajoutez les asperges et les champignons, remuez délicatement et cuisez encore pendant cinq minutes. Salez et poivrez. Vérifiez la cuisson des légumes avec la pointe d’un couteau. Ajoutez le persil ciselé et mélangez doucement. Pour terminer, répartissez la fricassée de légumes dans des assiettes creuses. Posez un œuf mollet au milieu. Nappez-le d’émulsion de carottes et servez. Adaptez les légumes en fonction des saisons avec par exemple des petits pois au printemps, des petites courgettes en été. Vous pouvez aussi fort bien augmenter les quantités de ces légumes. Alain Benoit Pour 2 personnes Pour la fricassée de légumes : 12 asperges vertes 4 carottes fanes 4 petits navets 4 petits oignons blancs 80 g de trompettes de la mort 1 échalote 1/4 de botte de persil plat Pour l’émulsion de carottes : 1 kg de carottes 1 cuil. à café de graines de coriandre 20 cl d’huile d’olive Pour les œufs mollets : 4 œufs Sel, poivre du moulin Pour 4 personnes 16 belles noix de Saint-Jacques 4 oranges non traitées 4 à 6 endives 60 g de beurre 20 cl de bouillon de poule Huile d’olive Sel, poivre du moulin Préparez les Saint-Jacques. Débarrassez-les de leurs filaments et rincez-les sous le robinet. Réservez-les sur un linge propre au frais. Préparez la poudre d’oranges. Prélevez les zestes d’orange, étalez-les sur une plaque. Glissez-la au four à 120° C (thermostat 4), et laissez sécher les zestes. Puis broyez-les dans le mixeur jusqu’à obtenir une poudre fine. Réservez-la. Préparez l’effilochée d’endives. Lavez les endives, séchez-les. Taillez-les en tronçons d’un centimètre et demi d’épaisseur, en éliminant le pied. Faites fondre vingt grammes de beurre dans un sautoir. Mettez les endives et cuisez-les, en les remuant, pendant une dizaine de minutes, et sans les colorer. Salez, poivrez. Ajoutez éventuellement une pincée de sucre en poudre. Gardez-les au chaud. Préparez les sucs d’orange. Pressez le jus des oranges. Versez-le dans une casserole et faites-le réduire jusqu’à obtenir la consistance d’un sirop très épais. Versez le bouillon de poule et cuisez jusqu’à ce qu’il soit réduit des trois quarts. Coupez quarante grammes de beurre en morceaux et ajoutez-les en fouettant bien. Puis mixez cette préparation jusqu’à ce qu’elle soit onctueuse et moussante. Enfin, cuisez les Saint-Jacques. Assaisonnez chaque noix de Saint-Jacques avec du sel et de la poudre d’agrumes. Chauffez une poêle avec une goutte d’huile d’olive et cuisez-les trente secondes à une minute de chaque côté (selon leur épaisseur). Pour terminer, dressez les Saint-Jacques sur les assiettes. Disposez l’effilochée d’endives autour. Nappez les noix de suc d’oranges et servez tout de suite. Préparez la poudre d’oranges à l’avance. Il va vous en rester certainement, que vous pourrez utiliser pour d’autres préparations, au gré de votre imagination. ROSE MAGAZINE 195 CARNET DE RECETTES Christophe Dufossé « La Citadelle » à Metz Légumes & agrumes Pour 2 personnes 2 gousses d’ail 1 pamplemousse 1 citron 1 orange 10 g de grains de poivre noir Pour les légumes : 1 belle tomate 50 g de brocoli 50 g de chou-fleur 50 g de petits pois écossés 150 g de champignons de Paris 1/2 botte de ciboulette Fleur de sel Préparez le jus d’agrumes. Pelez et écrasez les gousses d’ail, puis pressez le jus du pamplemousse, du citron et de l’orange. Versez-les dans une casserole. Ajoutez l’ail écrasé et le poivre. Cuisez à feu doux jusqu’à ce que le jus ait la consistance d’un sirop. Filtrez-le dans une passoire. Versez-le dans un petit bol et réservez-le au frais. Préparez les légumes. Mondez la tomate : avec un couteau, incisez la peau, trempez-la dix secondes dans de l’eau bouillante et rafraîchissez-la dans l’eau glacée. Retirez la peau et les pépins. Coupez la chair en quartiers réguliers. Réservez. Ensuite, rincez les brocolis et le chou-fleur. Faites chauffer de l’eau légèrement salée dans une casserole. Quand elle bout, plongez-y le brocoli deux minutes. Égouttez-le avec une écumoire. Cuisez de même le chou-fleur puis les petits pois. Épluchez et rincez les champignons de Paris. Séchez-les et émincez-les. Rincez, séchez et ciselez la ciboulette. Dressez le brocoli, le chou-fleur et les petits pois au milieu des assiettes ou d’un plat. Ajoutez les champignons de Paris et les quartiers de tomate autour. Parsemez de ciboulette. Assaisonnez avec quelques grains de fleur de sel. Versez dessus le jus d’agrumes. Servez frais. En dehors de leur saison, remplacez les petits pois par des asperges vertes : pelez-les, coupez les têtes sur dix centimètres de hauteur et cuisez-les dans de l’eau bouillante. Christian & Thomas Millo « Auberge de la Madone » à Peillon Mousse au chocolat Jean-Marie Amat « Château du Prince noir » à Lormont Pour 8 personnes 16 petites carottes 8 petits navets 16 oignons grelots 400 g de haricots verts extra-fins 250 g de girolles ou de cèpes 2 foies gras de canard crus dénervés de 600 g 1 boîte de 50 g de jus de truffe 40 g de beurre Sel, poivre du moulin 196 ROSE MAGAZINE Préparez les légumes. épluchez et lavez les carottes et les navets. Coupez-les en deux ou trois morceaux. Pelez les oignons. Effilez et lavez les haricots verts. Nettoyez les girolles. Faites bouillir de l’eau légèrement salée et plongez-y les carottes, laissez cuire quinze minutes puis égouttez-les. Dans cette même eau, cuisez séparément les navets pendant dix minutes, les oignons pendant trois minutes et les haricots verts pendant cinq minutes. Préparez une jatte avec de l’eau et des glaçons. Plongez-y au fur et à mesure les légumes cuits. Égouttez-les et réservez-les sur un plat. Préparez les foies gras. Faites bouillir de l’eau dans un couscoussier. Retirez les traces de sang sur les chairs, puis étalez une feuille de papier film. Posez un foie au milieu, salez-le et arrosez-le de deux cuillerées à café de jus de truffe. Repliez les bords du papier film de façon à bien enfermer le foie. Préparez le second de la même façon. Déposez les deux foies gras sur la grille du couscoussier et laissez-les cuire pendant vingt-cinq minutes. Faites fondre une noix de beurre dans une poêle. Mettez les girolles, salez-les et faites-les sauter à feu moyen pendant trois à quatre minutes. Gardez-les sur une assiette au chaud. Réservez leur jus de cuisson. Pour terminer, retirez les foies gras du couscoussier et déposez-les dans un plat creux. à leur place, mettez tous les légumes pour les réchauffer. Retirez le papier film des foies gras. Déposez ceux-ci sur le plat de service chaud. Récupérez le jus de cuisson des foies gras et ajoutez-le au jus de girolles réservé et au reste du jus de truffe. Dressez les légumes autour des foies gras. Chauffez les jus, puis versez-les sur les foies. Servez tout de suite. Alain Benoit Pot-au-feu de foie gras RECETTES RÉDIGÉES PAR PAULE NEYRAT Pour 8 personnes 8 barres de chocolat pâtissier 4 œufs entiers 50 g de beurre 2 cuil. à soupe de rhum ou de café très fort 1 pincée de sel Préparez les œufs. Séparez les jaunes des blancs, en déposant les jaunes dans un bol et les blancs dans un saladier. Ajoutez une pincée de sel aux blancs d’œufs. Puis montez-les en neige. Préparez la mousse au chocolat. Coupez le beurre en petits morceaux dans une assiette. Réservez. Cassez le chocolat en morceaux. Mettez-les dans une jatte et ajoutez-leur trois cuillerées à soupe d’eau. Posez la jatte sur une casserole d’eau frémissante et faites fondre le chocolat sur ce bain-marie en tournant de temps en temps avec une spatule pour qu’il fonde bien régulièrement. Lorsque le chocolat est complètement fondu, retirez la jatte du bain-marie. Ajoutez les jaunes d’œufs en remuant bien. Puis incorporez les morceaux de beurre en tournant vivement. Ajoutez ensuite le rhum ou le café. Remuez jusqu’à ce que le mélange soit bien homogène. Incorporez alors les blancs en neige, cuillère par cuillère, en soulevant délicatement cette pâte et en tournant toujours doucement, avec précaution, dans le même sens. Ne fouettez surtout pas. Pout terminer, versez la mousse dans une coupe. Mettez-la au réfrigérateur pour au moins quatre heures. Cette mousse est légère car il y a beaucoup de blancs d’œufs et pas de sucre. Elle est du coup riche en protéines. On la sert aussi bien en dessert qu’au goûter. ROSE MAGAZINE 197 JUS DE D’ESSAI FRUIT BANc GRENADE Défensive La pomme d’amour mythique regorge d’antioxydants, de tanins et aussi de gourmandise... À boire sans modération ! Organic Bloom Yablok Pom Wonderful Une boisson issue de grenades fraîches, pressées entières avec leurs pépins et leur membrane, puis flash-pasteurisée, sans additif ni conservateur. Toutes les garanties du politiquement « bio » sont respectées pour ce jus à la fois léger et très parfumé, sans sucre ajouté mais sans amertume, pourvu d’une belle structure. Notre préféré. 6,90 € les 75 cl. Vendu en magasin bio et chez Daily Monop’. Le Plus : la brique Tetra Pak, légère, et la contenance idéale pour la consommation hebdomadaire d’un(e) célibataire. Le pionnier du jus de grenade ! Le liquide parfumé, extrait des fruits pressés et pasteurisés, est présenté dans une bouteille de verre qui lui garantit une période de garde optimale d’un an. Très corsé au goût, avec une vraie amertume et une longueur en bouche, il est à réserver aux inconditionnels, qui y reconnaîtront un « grand cru ». 8 € le litre. Vendu chez Petrossian et également sur le site www.petrossian.fr Le Plus : les packs de six ou vingt-quatre litres peuvent être livrés chez vous, à la demande. Cette jolie bouteille, à la taille bien marquée, contient un jus 100 % issu des vergers californiens de la marque éponyme – qui plante les grenadiers, les cultive, cueille les fruits et en extrait l’essence. La grenade est pressée avec la peau, ce qui garantit un maximum d’antioxydants. Le goût acidulé est très délicatement sucré. 3,99 € la bouteille de 71 cl. Vendu en grande distribution (Casino, Monoprix). Le Plus : un jus facile à boire, au goût moins marqué que ses concurrents et qui plaira aux enfants. corsé acidulé Les choix de Marie-Caroline Malbec, rédactrice en chef du site culinaire cookissime.fr 198 ROSE MAGAZINE DR léger UNE PUBLICATION DE L’ASSOCIATION ROSANNA 29, RUE DE TIVOLI 33OOO BORDEAUX directrices de la publication CÉLINE DUPRÉ/CÉLINE LIS-RAOUX directrice de la rédaction CÉLINE LIS-RAOUX [email protected] rédactrice en chef BÉATRICE LORANT [email protected] rédactrice en chef adjointe santé CÉLINE DUFRANC [email protected] directeur artistique PIERRE LEIRITZ [email protected] rédaction LAURE BASTIEN CÉDRIC BELLOT ANNE-SOPHIE DOUET SANDRINE DUCLOS NATHALIE FERRON MARIE-PIERRE GARRABOS SABINE GERMAIN SARAH LAINÉ LISANE VIC maquette CLOTILDE VIDAL VÉRONIQUE BONIOL icono Albert Zugmeyer secrétariat de rédaction MARIE CLAIRE BENSAADA révision VIRGINIE GAZON conseillers de la rédaction Pr IVAN KRAKOWSKI Oncologue médical. Centre Alexis-Vautrin, Nancy. Président de l’Association francophone pour les soins oncologiques de support. GILBERT LENOIR Président. Ligue nationale contre le cancer. Dr LOUIS MAURIAC Oncologue médical. Institut Bergonié, Bordeaux. Pr JOSY REIFFERS Président du Groupe Unicancer et de la Fédération française des Centres de lutte contre le cancer. Directeur de l’Institut Bergonié, Bordeaux. Dr FRANÇOISE SOFFRAY Chirurgienne. Hôpital privé Saint-Martin, Pessac. FABRICATION photogravure ASTO-PCS impression GROUPE SEGO COMMUNICATION/PUBLICITÉ directrice de la communication et des partenariats CÉLINE DUPRÉ [email protected] directrice de la publicité KATHERINE BULLY [email protected] ADMINISTRATION/FINANCE NATHALIE MALICET Rose Magazine est un journal semestriel gratuit qui s’adresse aux femmes concernées par le cancer et à leur entourage. Il s’agit d’une revue indépendante qui travaille avec un comité de rédaction, des journalistes professionnels et des conseillers de la rédaction. Des experts se sont exprimés dans le journal, mais en aucun cas les lectrices ne doivent prendre de décision médicale sur la base de ce qui est écrit dans le journal et sans consulter une équipe médicale. © Copyright 2011 Rosanna. Tous droits réservés. Rose Magazine est une marque déposée. Yulan porte un foulard Bellerose et un chandail Uniqlo. Photographe Kate Barry. Stylisme Nathalie Croquet. Coiffeuse Marion Anée @ Airport Agency. Maquilleuse Brigitte Hymans @ Marie France Thavonekham. Studio Daylight. NOS ADRESSES mode BLANCS MANTEAUX 0 142 717 000 BURBERRY 0 140 077 777 burberry.com C&A c-et-a.com ESPRIT 0 140 285 000 FALIERO SARTI HYPERLINK falierosarti.com HARTFORD 0 158 393 990 HERMÈS hermes.com KENZO 0 140 397 203 LE 66 CHAMPS ÉLYSÉES 0 153 533 380 MARGARET HOWELL 0 142 619 000 MAX MARA 0 149 521 600 maxmara.com MISS SIXTY misssixty.com MISSONI 0 144 519 696 ORLA KIELY 0 142 542 808 PENNY BLACK pennyblack.com lingerie AMOENA amoena.fr AUBADE 0 170 992 000 aubade.com BESTFORM bestform.fr ERES 0 155 905 290 eresparis.com MAX MARA 0 149 521 600 maxmara.com MONOPRIX monoprix.fr NOT SHY notshy.fr PAUL & JOE SISTER paulandjoe.com ROSY 0 390 292 900 rosy.fr SONIA RYKIEL 0 149 546 060 TRIUMPH 0 388 951 000 triumph.com VARIANCE variance.com WOLFORD 0 825 850 005 wolford.com foulards & chapeaux 3 Suisses 3suisses.fr Barbara Agnès barbaraagnes.com COMPTOIR DES COTONNIERS 0 143 120 400 comptoirdescotonniers.com GALERIES LAFAYETTE 0 142 823 456 KOOKAI 0 142 525 252 Monoprix monoprix.fr SinEquanone 0 142 778 080 sinequanone.com avant/après COTÉLAC cotelac.fr Ont collaboré à ce numéro : mode lingerie - Coiffeur, Martyn Fosscalder @ airport. Maquilleuse, Lisa Legrand @ airport. Mannequin, margarita @ wm agency. Mannequin, Ayele Folly. Numérique, Arnaud Delrue. Mode hiver - Maquilleuse, Brigitte Hymans @ mariefrancethavonekham. Coiffeuse, Sonia Duchaussoy @ airport. Mannequin, viktorya @ wm agency. Cuisine - Styliste culinaire, Marie-Caroline Malbec. ROSE MAGAZINE 203 LA PETITE FLAMME Pour tenir, elles se sont accrochées à un petit plaisir, une envie, un espoir, un rêve. Aujourd’hui tirées d’affaire, elles témoignent. bague « Une de Cartier. Je me disais que si je pulvérisais cette saloperie de crabe, je la méritais bien, la trilogie ! » Anne-Lyse « J’ai passé six semaines hospitalisée et j’ai dû confier ma fille de huit mois à mes parents, qui vivent à cinquante kilomètres. Tous les soirs, après faisait la route juste pour le travail, que je puisse embrasser Amber. La pensée de cette visite m’a fait tenir chaque seconde. » Jessica maman « Walk on the Wild Side. Je l’écoutais à fond, tout le temps. Ça me donnait ! » la pêche. Tina Merci Lou « Je ne parlais plus à mon frère depuis quinze ans. Une bêtise à propos d’un héritage. Je me suis jurée d’aller le voir si je guérissais. On a passé Noël . » dernier Maryse « Aller à New York ! » « J’ai dit à mes petits-enfants que, quand je serais guérie, je leur offrirais à tous – et ils sont neuf - un week-end à Disneyland. J’ai cassé ma tirelire le mois dernier et je suis montée dans le avec ma tribu d’apaches au grand complet ! » Blanche Aline ensemble fête Space Mountain de guérison que je me promettais « La de faire avec tous les gens que j’aime. à l’hôpital, pendant les injections, je fermais les yeux et je pensais à la salle, au traiteur, aux potes que j’inviterais, à la musique sur laquelle on danserait… » Marie mon mari « Le matin, caressait mon crâne nu et me disait qu’il m’aimait. Une petite lumière qui n’a cessé de briller. » Nathalie « Je suis née en France, mais mes parents sont burkinabés. Pendant la maladie, l’idée de visiter le Burkina Faso, la de mes ancêtres, ne m’a pas quittée. » Madeleine terre « Voir repousser mes cheveux et les teindre en . » Fazia blond platine Seychelles 202 ROSE MAGAZINE enfant foulards « Je suis née dans une famille athée. Pendant la maladie, je me suis beaucoup interrogée. Je me suis dit que si je guérissais, j’irais à Lourdes, pas pour attendre un mais juste pour essayer de prier. » Mylène miracle Visual Press Agency/Getty Images/DR « Tous les matins, je regardais la photo de notre voyage de noces aux . Je me disais que je ne mourrais pas sans avoir emmené mon fils de deux ans se baigner à La Digue. Le soir où j’ai fini la radiothérapie, on a pris l’avion en famille. » Céline « L’envie d’avoir un . » Laure « Les Hermès. Ma famille, mon chéri, mes copines se sont cotisés et m’ont offert, avant la première chimio, sept « carrés », un pour chaque jour de la semaine. C’était moi la plus chic de l’hosto ! » Charlotte « Emballer George Clooney. Bon, c’est toujours pas fait, mais je suis vivante, j’ai à nouveau ma crinière et un sein tout neuf. Gare à toi, George ! grrrrr ! » Garance « Ce qui m’a fait tenir ? L’idée de guérir, d’avoir à nouveau des cheveux et de dire à Robert que je l’aimais en secret depuis six ans ! » Martine ROSE MAGAZINE 203