Matériaux composites à renforts fibres naturelles d`origine végétale

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Matériaux composites à renforts fibres naturelles d`origine végétale
VISIONS Fiche N7
18/11/04 16:38
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Technique
SUPPLÉMENT
TECHNIQUE N
°7
M AT É R I AU X
▼
Matériaux composites à renforts fibres
naturelles d’origine végétale
UN PROJET D’ACRO- Introduction
NYME " POLYMÈRES
Depuis les années 90, de nouveaux
NATURELS ", EN
matériaux composites ont émergé
COLLABORATION
le paysage industriel. Les
AVEC COMPOSITEC, dans
contraintes environnementales et
L’ARAMM, VISIOles nouvelles réglementations sur
PLASTURGIE ET
le recyclage des matériaux composites ont poussé les industriels à
DES INDUSTRIELS
développer de nouveaux matériaux
DE LA RÉGION
issus de ressources renouvelables.
RHÔNE-ALPES,
L’introduction de fibres naturelles
A DÉBUTÉ EN
dans des matrices polymères (bioOCTOBRE 2003,
dégradables ou non) peut apporter
POUR UNE DURÉE des avantages notoires par rapport
aux fibres traditionnellement utilisées
DE 3 ANS.
les composites (comme les
CE PROJET, SOUTE- dans
fibres de verres) : faibles densités,
NU PAR LA RÉGION bonnes propriétés mécaniques,
RHÔNE-ALPES ET
faibles coûts.
LA DRIRE RHÔNEALPES, A POUR
Des fibres
OBJECTIF DE MENER
végétales…
UNE ÉTUDE
EXHAUSTIVE SUR
La connaissance des propriétés et
LES MATÉRIAUX
caractéristiques des fibres natuISSUS DE
relles d’origine végétale est indisL’AGRICULTURE
pensable afin de relier la structure
de ces fibres à leurs propriétés
UTILISABLES EN
dans les matériaux. Les fibres végéPLASTURGIE.
tales sont constituées de cellulose,
lignines et hémicelluloses.
La notion de variabilité des fibres est
importante et doit être prise en compte dans le cas des fibres d’origine
CONTACT
Charlyse POUTEAU, Chef de projet
PÔLE EUROPÉEN DE
PLASTURGIE
2, rue Pierre et Marie
Curie
01100 BELLIGNAT
TEL : 04 74 81 92 60
FAX : 04 74 81 92 61
[email protected]
Docteur en chimie des
matériaux, elle a travaillé
trois ans sur la stabilisation
des polyoléfines par des
additifs d’origine végétale
(INRA de Reims).
Elle est actuellement en
charge au PEP du projet
“ polymères naturels “
végétale. L’origine botanique, la
maturité et le mode d’extraction
impliquent des variations de propriétés dimensionnelles et structurales des fibres (densité, diamètre,
longueur, taux de cellulose, angle
microfibrillaire, taux d’adsorption
d’humidité…). Ces caractéristiques
structurales et dimensionnelles différentes vont elle-même influencer les
propriétés mécaniques et thermiques des fibres. Par exemple, les
fortes propriétés mécaniques du
Lin sont attribuées à son taux de
cellulose élevé. De même, l’angle
micro-fibrillaire est inversement
proportionnel à la résistance et à la
dureté de la fibre. La dégradation
thermique des fibres (qui est une
caractéristique critique pour leur
application comme charge ou renfort) est diminuée pour un faible
taux d’hémicelluloses. Cependant,
ces corrélations directes avec les
propriétés des fibres sont un peu
simplistes et ne peuvent s’appliquer exactement dans le cas des
structures si complexes des fibres
végétales.
… aux composites
"fibres/thermoplastiques"…
Le nombre d’études concernant ces
nouveaux matériaux est en conti-
nuelle augmentation et leur développement représente un enjeu
important. Des travaux antérieurs
ont pu mettre en évidence les avantages et les limitations intrinsèques
à ces nouveaux matériaux. La nature
hydrophile des fibres végétales est
à l’origine du manque de compatibilité avec la matrice plus hydrophobe.
Très peu de liaisons existent entre
la phase “renfort” et la phase
“matrice”.
Cette “incompatibilité” provoque
une mauvaise dispersion des fibres
dans la matrice et la formation d’un
matériau hétérogène.
Les fonctions hydroxyles de la cellulose forment des liaisons hydrogènes entres les chaînes de cellulose.
Cela provoque l’agrégation des
fibres entre elles et la formation
d’un composite dans lequel les
fibres sont mal dispersées.
Une autre limitation à l’utilisation
de fibres naturelles dans les composites, est leur capacité à retenir
l’eau. L’eau se lie par liaisons intra
et inter avec les groupements
hydroxyles de la cellulose. L’eau
contenue dans les mélanges peut
alors altérer voir rendre impossible
la mise en forme du matériau. L’eau
peut également avoir un impact sur
le matériau final comme sa putrescibilité. Les utilisations en milieux
humides sont alors rendues impossibles.
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VISIONS/décembre 2004
VISIONS Fiche N7
18/11/04 16:38
La faible stabilité thermique des
fibres naturelles d’origine végétale
constitue également une limitation.
Celles-ci commencent à se dégrader à 200°C. Les bio-composites
doivent alors impérativement être
mis en œuvre aux températures les
plus faibles possibles, ce qui limite
les applications avec certains polymères techniques.
… plus performants
Afin de réduire ces problèmes liés
à la nature propre de la fibre (température de dégradation, nature
hydrophile…), différents traitements peuvent améliorer l’adhésion, la dispersion des fibres et la
stabilité thermique. Il s’agit de traitements thermiques (rectification),
physiques (modification des propriétés structurelles ou surfaciques)
ou chimiques (décristallisation de la
cellulose puis plastification de la
fibre par greffage, traitements alcalins
ou péroxydes, divers greffages…).
Problématique
Les applications et les modes de
transformation possibles sont :
l’extrusion de plaques et de profilés
pour des applications dans le bâtiment, la compression à chaud pour
la fabrication de garnitures de porte
ou de tablettes dans l’automobile.
Le développement de l’injection de
ces composites promet l’obtention
des pièces de formes complexes et
donc une diversification des applications.
Dans le cas des applications en
injection, la caractérisation et la
connaissance de ces matériaux
n’est, aujourd’hui, pas suffisante
pour définir facilement les composites à utiliser pour une application
technique donnée. D’autre part, les
comportements spécifiques des
fibres naturelles sont également à
maîtriser pour que le développement de ces solutions soit réellement possible au stade industriel et
pour que ces solutions arrivent
jusque dans les bureaux d’études.
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Démarche
L’élaboration, l’optimisation et le
développement industriel de tels
matériaux s’articulent autour de
plusieurs points clés :
◗ Le
choix de fibre : influencé par
leurs propriétés (mécaniques, thermiques, sensibilité à l’eau…), par
leur " processabilité " et par leur
coût (dépendant de la nature de la
fibre et du traitement subi).
◗ Le choix de la matrice : il s’agit soit
de polymères de grande diffusion,
soit de polymères biodégradables
(qui permettraient l’obtention de
matériaux complètement biodégradables)
◗ La formulation des mélanges
◗ Le procédé de compoundage : cela
implique l’optimisation des aspects
suivants : (i) le système d’alimentation adapté à la faible densité des
fibres, à leur sensibilité à la chaleur
(diminution du temps de présence
dans la vis, introduction retardée…) (ii) le choix du système de
compoundage, de profil de vis
adapté
◗ Le procédé de mise en forme par
injection
Influence du
taux de charge
Les propriétés mécaniques des
matériaux sont influencés par la
quantité de fibres introduites dans
la matrice. Des matériaux ont été
préparés avec trois taux de fibres :
10 %, 30 % et 50 % en masse dans
une base PEHD. Le taux de fibre
introduit est conditionné par la processabilité de la fibre. Les modules
de 7 matériaux différents, chargés
en fibres issues de 7 origines botaniques différentes, sont présentés
figure 2. Tout comme l’addition de
fibres de verre, l’augmentation du
taux de fibres naturelles a pour
effet d’augmenter le module du
matériau. Cependant, le taux d’augmentation de cette propriété est for-
Figure 3 : Module de traction et contrainte au seuil de traction
pour 7 matériaux chargés en fibres, à 30 % en masse.
tement dépendant du type de fibre
introduit.
Influence selon
le type de fibre
Les modules et les contraintes au
seuil de traction d’un PEHD chargés
à 30 % en fibres (pour 7 fibres différentes) sont présentés sur la figure
n°3. Pour un taux d’incorporation
égal et un procédé de mise en
forme identique, les propriétés
mécaniques des matériaux peuvent
varier du simple au double selon le
type de fibre utilisé. Ces variations
sont représentatives des interactions entre la fibre et la matrice.
L’origine de la différence de propriétés peut être attribuée à plusieurs facteurs : des facteurs “physiques” intrinsèques aux fibres,
comme une variation dans la longueur, une variation dans la géométrie (rapport de forme), une variation de la microstructure et/ou des
facteurs “chimiques” tels que, la
présence présence d’agents de couplages ou de compatibilisants, la
variabilité de composition de la
fibre, ou la nature chimique de la
matrice. Dans le cas des matériaux
présentés, la nature de la matrice
est identique et aucun agent de
couplage ou compatibilisant n’a été
ajouté. Les variations de propriétés
des fibres sont attribuées dans le
cas de nos exemples à des facteurs
physiques, morphologiques et de
microstructure des fibres.
Perspectives
Figure 2 : Modules de traction de 7 matériaux chargés à 10 %, 30 %
et 50 % avec 7 fibres différentes.
L’optimisation des propriétés des
matériaux chargés en fibres naturelles ne se réduit pas à l’ajout classique d’agents de couplage. Certes,
l’amélioration des propriétés par
voie de compatibilisation est une
voie importante en développement, à prendre en compte.
Cependant, d’autres voies d’optimisation, encore peu exploitées, sont
primordiales telles que (i) la prise
en compte de la variabilité et de la
source initiale en fibres végétales,
(ii) le développement d’un procédé
adapté et optimum de transformation.
Le couplage de ces trois aspects
permettra de mieux optimiser ces
matériaux en plein essor.
Applications
potentielles
La diversité de propriétés des
matériaux à fibres végétales promet
une large gamme d’applications en
injection, dans le secteur automobile, mais également dans les secteurs de l’emballage, le flaconnage,
l’ameublement, la décoration, et
d’autres secteurs de niches.
De plus, l’optimisation des propriétés
et la résolution de verrous technologiques devraient permettre
d’élargir cette technologie à des
pièces de structure avec un gain de
masse, de meilleures propriétés
acoustiques ou autres par rapport à
des composites à fibres de verre.
Enfin, le passage à des matériaux à
matrices biodégradables permettra
de répondre à une demande dans
de nombreux domaines. Jusqu’ici le
coût de ces biopolymères écologiques était le principal frein à leur
utilisation.
◗ Le projet " Polymères Naturels, volet
thermoplastique " est co-financé par
la Région Rhône-Alpes, la DRIRE
Rhône-Alpes et le Pôle Européen de
Plasturgie.
◗ Dans le cadre du projet global,
Compositec est en charge de la partie
" Polymères Naturels, volet thermodurcissable ", qui traite de façon
parallèle l’étude de l’incorporation de
fibres végétales dans des matrices
thermodurcissables.
VISIONS/décembre 2004

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