Compte Rendu

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Compte Rendu
CR de la table ronde
Table Ronde du 17 Novembre 2005
Cette table ronde, organisée par l’AITB a eu lieu le 17 Novembre à l’Hôtel Regina à Paris sur le
thème :
Convergence fixe-mobile ou créer de la valeur avec un business plan
profitable : Mythe ou réalité ?
Animé par Ariane Bach-Savouret (89), ce débat a réuni un panel de professionnels de haut niveau
ayant aimablement accepté d’échanger avec les anciens élèves de l’école sur ce sujet :
Cyril BOUCHET , Président , Colibri Solutions
Jean-Pierre OLIVA, Directeur Général, Jipo
Pierre-Yves LE BERRE , VP, Business Developpement, Netcentrex
Jean-Philippe GAY, Directeur Marketing Adjoint, Orange
David BITTON, Directeur Général, Wengo
Ariane Bach-Savouret : De nombreux journaux, aussi bien dans la presse spécialisée que dans la
presse généraliste se font écho du phénomène de la convergence. Je voudrai citer le Nouvel
Observateur (27/10/2005) qui faisait sa première de couverture il y a moins d’un mois sur les
nouvelles technologies : « Télévision, les télécoms attaquent ». On pouvait y lire : « La TV sur ADSL
n’est qu’un champs de bataille de cette guerre de la convergence qui abolit les frontières entre
télécoms, informatique et média » .
« La convergence a déjà fait de Nokia via ses téléphones mobiles le premier constructeur planétaire
d’appareils photos, ou d’Apple le leader de la distribution de musique en ligne ou de Skype le leader
de l’illimité sur le mobile. »
Alors : la convergence : est-ce la guerre ? la hache de guerre déterrée entre les opérateurs fixes et
mobiles.
Jean-Philippe GAY - Orange :
Rapide présentation de Orange – FT : CA = 45 Milliard , position dominante mais en situation de
concurrence.
La convergence est abordée par FT de 2 points de vue :
- Du point de vue client : l’objectif est de servir le client sans couture : que ce soit pour la voix,
le texte (SMS ; messagerie, chat), et la TV. Et ce n’est pas incompatible de servir un même
besoin avec 2 réseaux différents.
-
Du point de vue business modèle de la société : la question pour FT est de savoir comment
faire de la croissance sur des marchés mûrs ?
Le mobile est arrivé à maturité : les parts de marché se figent, l’ARPU ne croit plus.
Les relais de croissance géographiques ne sont plus d’actualité, car :
FT doit faire des économies de coûts ;
Il est difficile d’aborder les nouveaux marchés – tels que l’Asie , car pour
réussir, il faut d’emblée être N°1 ou 2 et donc investir énormément.
L’enjeu de la convergence pour FT est de trouver de nouveaux relais de croissance dans le
« footprint » européen et la convergence en constitue un.
Pour ce faire, FT a pour objectif de servir globalement l’ensemble des besoins de télécoms des
clients, d’affranchir le client des choix technologiques qui sous-tendent les usages qu’il a.
La convergence revêt une nouvelle orientation car elle devient la base du business modèle et des
besoins client
Confidentiel neuf cegetel –
ABS : et la guerre ?
Jean-Philippe GAY -Orange :
- Entre les différents opérateurs : oui , c’est la guerre , mais FT souhaite développer des services sur
lesquels ils ont les « assets » : les « assets », ce sont le réseau, la marque, le service client …
La marque est importante : en effet lorsqu’on laisse 150 /mois à un fournisseur (c’est à peu près le
montant de la facture consolidée fixe-mobile –ADSL d’un foyer aujourd’hui), il faut une marque forte
pour que le client accepte de donner autant …C’est pourquoi FT développe la marque Orange.
De plus, un opérateur doit savoir gérer les masses. Dans les débuts de Free : le service client : c’était
dur !
Etre opérateur, c’est traiter un marché de masses : c’est avoir les compétences, process, outils qui
sont souvent customizés pour les opérateurs.
- Entre différents domaines : il faut trouver un écosystème. Les opérateurs ne veulent pas être que
des fournisseurs de tuyaux dans lesquels on écoule du contenu ; les opérateurs veulent avoir leur
« fair share »
Cependant, FT n’a pas vocation à créer des contenus mais à capitaliser sur le contenu qui transite sur
son réseau. C’est notamment le cas dans la VOD sur l’ADSL, il y a un modèle de partage de revenu à
développer.
Pas de guerre : avec l’informatique ; c’est plutôt une relation client-fournisseur…
David BITTON - Wengo : 30 personnes ; filliale de NeufCegetel.
Les domaines d’activité de Wengo sont les suivants : voix sur Internet , communication sur Internet :
chat, visio, messages.
Pour comprendre si c’est la guerre, il faut déjà répondre à la question : Qui sont mes concurrents ?
Mes concurrents sont : Skype, MSN, Google, Yahoo ; é-bay.
Oui, c’est la guerre car c’est difficile face à des monstres comme çà …
En effet, Skype a montré que l’on pouvait vendre de la minute de téléphonie à des gens qui acceptent
de téléphoner avec un PC et qui prennent le temps de configurer leur PC. Ces acteurs commencent à
prendre des parts de marché significatives.
La démarche de Wengo face à ces acteurs est la suivante : privilégier le confort d’utilisation, la facilité
d’usage, l’accès au service client en prônant l’ouverture et l’interopérabilité – apanage du monde des
opérateurs traditionnels.
Pour ce faire, Wengo utilise SIP ainsi que des logiciels Opensource. Alors que ces grands
concurrents travaillent dans des mondes propriétaires et fermés.
La réponse de l’opérateur vis-à-vis de ces acteurs doit être le standard et l’interopérabilité; c’est aussi
le cœur de métier de l’opérateur qui doit être mis en avant : savoir facturer le client final, avoir un
selfcare optimisé : ça prendra un certain temps pour que les Google, Skype etc … y arrivent.
Cependant, il ne faut pas leur laisser le temps d’enfermer les gens dans des communautés en
fournissant la gratuité au sein de cette communauté ; il ne faut pas les laisser gagner avec le modèle
de la publicité. Il faut trouver rapidement un modèle Internet pour les « vrais » opérateurs
Jean-Pierre OLIVA - Jipo : 60 consultants
Jipo travaille sur la convergence depuis une dizaine d’année :
C’est un mot à la mode ; en 1990 on en parlait déjà : facture unique, puis N° unique routé soit sur le
mobile, sur le fixe, messagerie vocale unique
Tele Danmark , dès 1998 lançait l’offre « duet » : il y avait tous les services pré-cités. Ces services
n’ont pas rencontré de succès commercial, ils ont donc disparu.
Aujourd’hui, on revient vers un discours de convergence
Grâce à IP : on peut et on veut tout mettre sur IP ; le contenu, la voix, les données, mais on voit que
ce n’est pas sans poser quelques problèmes.
C’est un défi pour les opérateurs traditionnels : maintenir de la valeur tout en unifiant les réseaux, et
tout en faisant des économies sur la fourniture des services. Et on voit apparaître des petits
opérateurs comme Wengo qui viennent grignoter de la marge des grands ….
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Les clients n’attendent pas une pure convergence sur tous les domaines : ce qu’ils veulent en premier
c’est avoir les contacts disponibles synchronisés entre le fixe, le mobile et le PC. Et ce n’est pas aussi
simple que les constructeurs le disent …
Il faut une « user expérience » facile qui peut justifier de payer plus.
Pierre-Yves LE BERRE - Netcentrex : constructeur et éditeur logiciel voix sur IP + applicatif a valeur
ajoutée - Netcentrex a environ 50 clients opérateurs européens.
Netcentrex n’est pas très motivé par les Opensource, ni par Skype et Google talk , car en détruisant
de la valeur, ces gens-là détruisent toute la chaîne y compris les constructeurs.
La minute voix s’écroule, mais on voit des opportunités dans la convergence : synchronisation des
annuaires, N° unique, facture unique + applicatifs sophistiqués.
Tous les acteurs télécoms sont à la recherche de valeur car le modèle voix traditionnel est en train de
disparaître : dans le fixe, mais dans le mobile. On le voit déjà avec l’offre Skype sur des mobiles biband GSM – WIFI.
Comment aller chercher du revenu dans d’autres budgets ? La facture consolidée télécom est
aujourd’hui de 150 / mois /foyer : c’est déjà beaucoup. Mais il faut aller chercher du revenu dans
d’autres budgets : par exemple proposer des services de sécurité, ou de géolocalisation ( où sont mes
enfants ?). Il y a une vraie valeur à intégrer des services de ce type dans les logiciels et Netcentrex se
positionne là-dessus.
La convergence vue par Netcentrex : c’est le quadruple play : TV, VOD, network PVR à diffuser sur sa
TV, son PC, son mobile.
Netcentrex croit aussi en la verticalisation : services pour les séniors, sécurité, santé etc …
De manière pragmatique : oui, il y a une vraie guerre :
- les ISP font la course à la bande passante en ne sachant pas quoi mettre dedans ; ils veulent des
accords MVNO en pensant que ça résoudra le problème de contenu…Certes, il est intéressant d’avoir
un MVNO lorsqu’il y a de la valeur : exemple NRJ Mobile, dans ce cas-là, il y a une vraie dynamique
de recherche de la valeur entre l’opérateur mobile et le MVNO
- les opérateurs mobiles – notamment dans les pays nordiques cherchent à reconstituer des
ISP surtout sur le marché entreprises : 40 à 70% des appels mobiles en entreprise sont fait près du
poste fixe : il y a un vrai danger pour les opérateurs mobiles de la part des ISP à récupérer les appels
sortants sur WIFI.
C’est donc la guerre entre les opérateurs mobiles et les ISP : il s’agit de vendre des packages fixemobiles notamment pour les entreprises et occuper le marché face à des ISP avec ou sans licence
MVNO
Pour les opérateurs intégrés : c’est un peu différent : il s’agit d’avoir des packages verticaux.
Cyril BOUCHET - Colibri Solutions :
20 personnes. Colibri s’adresse au PME ; il s’agit pour Colibri de fournir l’intégralité des services :
informatique, téléphonie fixe et téléphonie mobile.
Il y a beaucoup d’opportunités et de changements, mais les chefs d’entreprise sont perdus, surtout au
niveau de la PME. Ils ont bien compris l’intérêt d’utiliser Skype ou Wengo chez eux mais comment
tout mettre en musique : en effet, il y a une multitude de prestataires et c’est difficile d’avoir une
prestation globale.
Les clients PME bénéficient de la guerre des opérateurs : en effet , les prix sont de plus en plus bas,
les débits mis à disposition des clients sont de plus en plus élevés et le haut débit est de moins en
moins cher.
Colibri se positionne de manière à faire bénéficier aux clients des synergies :
- Synergie entre informatique et télécoms : augmenter sa productivité : messagerie unifiée ,
annuaire unifié : ça marche aujourd’hui grâce à l’avènement de IP et du haut débit.
- Un seul terminal qui fait plusieurs choses : PC et Pocket PC qui est aussi un terminal mobile.
Il faut simplifier, décentraliser la complexité, la mettre sur les plateformes de l’opérateur : c’est le rôle
de Colibri d’amener des services unifiés avec des liens haut débit vers les clients.
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La Convergence fixe – mobile : oui, mais on croit surtout à la convergence avec l’informatique
Ariane Bach-Savouret :Certains analystes disent que : « la France est la pépinière de la
convergence fixe-mobile ». On voit tout de même des expériences significatives dans d’autres pays :
BT, Telecom Italia, Freenet, Arcor, KT etc …
Est-ce que la France est moteur sur la convergence fixe-mobile ? Est-ce que les acteurs français sont
suffisamment dynamiques?
Jean-Pierre OLIVA - Jipo : C’est vrai que la France est un leader incontestable du triple play avec
des acteurs tels que Free, Wanadoo, Neuf Cegetel : le pourcentage d’utilisation de la VoIP est le plus
élevé d’Europe.
En matière de mobile : c’est le pays le moins pénétré en Europe , en effet il y a peu de concurrent en
mobilité : et donc potentiellement , il y a des opportunités à saisir pour faire de la convergence.
Pourtant ce n’est pas en France que l’on voit apparaître la convergence fixe-mobile.
En France : il ne se passe rien … ou plutôt, il y a certainement des choses dans les cartons qui se
préparent en UMA et / ou en IMS.
Aujourd’hui ça se passe à l’étranger. BT avec BT Fusion ; Freenet en Allemagne …
Jean-Philippe GAY - Orange : il n’y a encore rien en France : BT a fait beaucoup d’annonces , mais
BT Fusion ce n’est encore qu’ un test. Il y a aussi Scarnet en Belgique et en Hollande, mais ils n’ont
pas beaucoup de clients. Cependant, le besoin latent est là : certains clients cherchent à réduire leur
facture, d’autres cherchent à optimiser l’ergonomie des services (1 seul outil, 1 seul carnet d’adresse).
Une parenthèse cependant : n’oublions pas que le montant des dépenses télécom est inférieur à 3%
des dépenses globales d’un foyer et évolue vers 2 ,5 % : cela représente 4 X moins que la dépense
allouée aux loisirs et pourtant les clients ont en matière de télécoms beaucoup plus que ce qu’ils
avaient avant. On constate malgré tout que les clients continuent à se battre pour payer moins de 1
par jour.
Les clients sont accrochés à ce discours de moindre prix car les nouveaux entrants ont induit un
comportement client sur le prix et ils y ont réussi. Tout le monde est formatté comme çà dans le
monde des télécoms. Mais n’oublions pas qu’il y a un potentiel « up-selling ».
En Europe : le triple play est un mouvement encourageant, mais il faut être prêt au niveau système
d’information. Pour FT, s’ajoute aussi le problème réglementaire, car FT étant en position dominante
sur le fixe et l’@, il faut que FT puisse répliquer ces services pour les autres opérateurs, tout en ne
voulant pas armer les concurrents pour réduire encore de la valeur….
David BITTON - Wengo : de quelle convergence fixe – mobile on parle ?
Parle-t-on on d’un N° unique ?de la convergence de facture ?ou de la convergence professionnelle /
privée ?
Quellle que soit la convergence dont on parle, le terminal est l’acteur majeur de la convergence fixemobile : petit, pas trop cher, avec une box WIFI à la maison pour téléphoner sur le réseau WIFI.
Il y a des constructeurs asiatiques qui fabriquent des terminaux avec une licence Microsoft. Ces
terminaux peuvent gérer du WIFI / GSM, ils ont suffisamment de capacité CPU pour compression,
décodage, annulation d’écho …
Tous les ingrédients sont là … Ces offres vont arriver. La convergence fixe-mobile passera par le
terminal et la France est très bien préparée
Pierre-Yves LE BERRE - Netcentrex :
Que l’on soit en convergence ou en triple play, le plus gros point bloquant aujourd’hui : c’est le
terminal avec un facteur forme et des consommations de batterie compatibles avec ce que l’on
connaît.
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Aujourd’hui : les terminaux ne sont pas encore finalisés ou ils sont encore chers. Nous pensons que
les terminaux vont plutôt apparaître vers mi ou fin 2006.
Dernier point relatif à la convergence TV – Télécoms : concernant l’IP TV il y a aujourd’hui 89
opérateurs en Europe (sur 220) qui ont des projets de déploiement d’IP TV et d’expérimentation de
TV sur DVBH. Ca donne un ordre d’idée de la maturité.
Quel futur pour la convergence ?
David BITTON : il y a des annonces qui font rêver : Wimax , meshed network … ce pourra être la
base des réseaux alternatifs : ne pourra-t-on pas avoir une alternative aux réseaux mobiles actuels ?
Pierre-Yves LE BERRE : si on prend Free, Intel qui n’ont rien sur le mobile , oui, le WIMAX peut être
leur futur … Intel a annonce vouloir mettre le paquet sur le Wimax.
Jean-Pierre OLIVA : le WIMAX fait rêver, mais il y a des difficultés techniques : chacun est opérateur,
chacun inter-opère avec les réseaux de son voisin ; mais le métier d’opérateur ce n’est pas si simple :
devenir opérateur dans sa rue, faire du support client avec ses voisins : ce n’est pas simple ! Entre
passionnés de techniques : c’est bien, mais pour madame Michu ce n’est pas encore là….
Sur ces paroles, nous concluons cette table ronde, en remerciant le panel pour la qualité de leurs
interventions et les participants qui sont venus nombreux à cette soirée.
Biographie
Diplômée de l’ENST Bretagne – Promo 89, Ariane BACH-SAVOURET a été successivement
ingénieur technico-commercial chez IBM, puis chef de produit chez BT Europe. Elle part ensuite dans
le groupe Cegetel où elle est responsable marketing de la ligne de produit Data Entreprises ( VPN IP ,
GigaEthernet), puis chef de produit dans le département Innovation de la Division Grand Public. Lors
de la fusion Neuf Cegetel, elle rejoint la Direction Innovation où elle s’occupe du projet BeautifulPhone
– projet de convergence fixe-mobile.
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