Yves Ouellet - Ville de Saguenay

Transcription

Yves Ouellet - Ville de Saguenay
et le transport en commun
par Yves Ouellet
Yves Ouellet est journaliste depuis plus de 30 ans, se déplaçant
constamment dans les régions du Québec ou dans le monde. Auteur de
25 ouvrages de prestige et guides de voyage, il collabore aux sections
tourisme de plusieurs journaux et magazines dans lesquels il a publié
plus de 2 000 reportages et 8 000 photos.
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Des moments
inoubliables
Au fil de mes voyages, j’ai surtout utilisé les transports en commun en
Europe où ils représentent sans conteste le mode de déplacement le
plus efficace, le plus sécuritaire et le moins coûteux. Il ne m’y est jamais
arrivé d’histoire abracadabrante mais j’ai quelques souvenirs qui me
font encore sourire quand je me les rappelle.
J’ai toujours été impressionné par la ponctualité maniaque du rail et
des bus à Genève où le train n’entre pas en gare à la minute annoncée
mais à la seconde près. Les voyageurs acquittent leur passage dans
des petites boites électroniques, ils «compostent leur ticket» et, sauf
exception, personne ne les surveille. En contrepartie, le transport
public à Rome est tout à fait anarchique et on dirait que personne ne
paye. Le métro de Londres, le plus ancien du monde, tient du musée
avec ces vieux wagons de bois qui craquent. Et que dire des fameux
bus rouges à deux étages qui font partie du folklore. À Paris, le
transport en commun fait partie des expériences à vivre. Le métro et le
RER nous conduisent partout et on peut même connecter avec le
bateau-bus sur la Seine.
DANS LE MÉTRO DE PARIS
Je me souviens être allé à Paris avec ma fille, il y a une quinzaine
d’années. Nous avons pris le métro pour nous rendre à la Tour Effel
mais, après avoir passé la barrière, ma fille a eu la très mauvaise idée
de jeter son ticket à la poubelle. Au bout d’un long corridor souterrain,
nous tombons sur une barrière contrôlée par des policiers armés. «Vos
tickets! Vos tickets! hurlent-ils. Ma fille panique… Et je deviens très
nerveux moi-même quand elle me dit qu’elle n’a plus le sien. « Vous
venez d’où ? » demande sèchement le policier quand ma fille lui dit
qu’elle n’a plus son ticket, les larmes aux yeux. «Des Champs Élysées
monsieur.» «Vous venez d’où?» répète-t-il plus fort. «Nous arrivons
de l’Arche de Triomphe…» «Non… Vous êtes d’où?» J’allume… «
Nous sommes Québécois!» Ahhh…! Son expression change subitement et un sourire bienveillant apparaît sur son visage. «Fallait le dire!
Mais passez donc. Et bienvenue à Parisles Québécois! Mais gardez
votre ticket sur vous la prochaine fois quand même…» Comme quoi le
fait d’être Québécois ouvre toutes les portes en France.
EN BUS SUR LA CÔTE AMALFITAINE
Quelques années plus tard, je me retrouve dans le plus beau coin de
l’Italie, sur la Côte Amalfitaine, le jour de Pâques. Mon épouse et moi
devons nous rendre à Capri mais, il n’y a qu’un seul bus qui passe ce
jour là et il y a foule à l’arrêt. Je ne suis pas du genre à pousser et à
jouer du coude pour entrer quelque part mais je ne peux pas me
permettre de manquer ce bus puisque nous avons une réservation sur
Capri. Le gens se ruent à l’intérieur dès que les portes ouvrent et ma
blonde fait son chemin jusqu’à un siège. Au moment où le chauffeur va
fermer la porte, je suis dehors, au pied de la première marche. Le bus
déborde littéralement. Mon épouse s’écrie alors : « C’est mon mari !
Nous sommes ensemble!» Le chauffeur me regarde et m’adresse un
signe impatient de la main pour que je monte. Il a toutes les misères du
monde à refermer dans mon dos la longue portière vitrée contre
laquelle je suis tapissé. Mais je ne suis pas au bout de mes peines
puisque la route de la Côte Amalfitaine est une corniche sinueuse
bordée d’un précipice vraiment vertigineux. Toutes les fois que le bus
prend une courbe, le coin avant passe au-dessus du vide et j’ai
l’impression d’être précipité à la mer, des centaines de mètres plus bas.
Pénible sensation quand on a le vertige. Très pénible. Mais j’ai survécu
à ce déplacement qui m’a semblé sans fin, tout en priant pour que la
porte ne cède pas sous la pression.
L’expérimentation du transport en commun durant un voyage demeure
une opportunité fascinante pour lever le voile sur le quotidien de ses
habitants et pour vivre des moments inoubliables.
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