Commission Nationale Indépendante des Droits de l`Homme

Transcription

Commission Nationale Indépendante des Droits de l`Homme
Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme (CNIDH)
RAPPORT ANNUEL D’ACTIVITES
ET
SUR LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME
Année 2012
 Honorable Président de l’Assemblée Nationale,
 Honorables membres du Bureau,
 Honorables membres de l’Assemblée Nationale,
La Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme est heureuse de se
retrouver encore une fois devant votre auguste assemblée après la présentation de
son premier rapport d’activités sur le deuxième semestre de l’année 2011
conformément aux articles 6,al.6 et 35 de la loi portant création de la CNIDH. Les
membres de la CNIDH se sont courageusement remis au travail pour s’acquitter des
missions pour lesquelles ils ont prêté serment dans ce haut lieu symbolique de la
nation le 7 Juin 2011.
Nous étions heureux que le budget de l’Etat pour l’année 2012 ait prévu un
montant de 863 571 671 BIF pour le fonctionnement de la Commission et
46 064 900 BIF pour l’investissement, soit un total de 909 636 571 BIF. Ce
montant à lui seul ne pouvait pas couvrir les besoins de la CNIDH en termes de
réalisation de ses missions. La CNIDH a bénéficié progressivement des appuis au
programme d'actions stratégiques octroyés par différents partenaires. C’est ainsi
que l’Ambassade de France a contribué à hauteur de 100.000 Euros pour la période
de décembre 2012 à décembre 2014, la Coopération suisse: 75.004 CHF pour
novembre 2011 à avril 2012 et 75.000 CHF pour Octobre 2012 à Décembre 2013, le
Royaume Uni: 20.000 livres Sterling pour avril à septembre 2012, les Pays Bas:
200.000 USD pour décembre 2011 à décembre 2012 et le PNUD 130.000.000 BIF
pour juillet 2012 à mars 2013. Mais il importe de rappeler que les partenaires ne
cessent de nous faire sentir que les frais de fonctionnement d’une INDH sont de la
responsabilité de l’Etat comme signe de l’importance accordée à la promotion du
respect et de la protection des droits de l’homme dans le pays.
1
Avec les moyens disponibles, la CNIDH a joué, au cours de l’année 2012, son triple
rôle de promouvoir ; de protéger les droits de l’homme sans oublier celui consultatif
auprès des institutions de l’Etat.
Les activités de promotion ont touché aussi bien, et à divers degrés, les droits de
l’homme de façon générale que les droits des groupes spécifiques comme les droits
de la femme, de l’enfant et des autres groupes vulnérables dont les personnes
handicapées, les rapatriés et les Batwa.
En marge des actions de promotion, la CNIDH s’est constamment souciée de la
protection et de la défense des droits de l’homme. Elle a ainsi régulièrement reçu
des saisines qui ont été traitées conformément à la loi et à son règlement d’ordre
intérieur. Les violations des droits de l’homme constatées à travers différentes
saisines sont signalées dans le rapport. En plus de la multiplicité des requêtes
traitées, la CNIDH a mené d’autres activités tendant à une meilleure protection des
droits de l’homme. C’est entre autres les actions ayant ciblé les conditions de
détention. Dans ce sens, des ateliers ont été organisés dans le but de trouver une
solution à la problématique de la surpopulation carcérale et des résultats
satisfaisants ont été relevés.
Quant au rôle consultatif, la CNIDH a constamment exercé son mandat que ce soit à
travers des avis formulés à l’endroit des institutions étatiques comme le Parlement,
le Gouvernement, le Ministère Public, l’Administration territoriale, etc. Les actions
menées dans ce cadre sont également contenues dans le présent rapport.
Il importe de signaler qu’en plus de ces activités de promotion, de protection et de
défense des droits de l’homme et d’exercice du rôle consultatif, la CNIDH était
appelée à continuer tout au long de l’année 2012 son implantation avec tout ce que
cela exige comme efforts pour une nouvelle institution : recrutement, formations,
équipement, adhésion aux réseaux, etc. Dans cette perspective, la CNIDH évolue en
se rapprochant de la population à travers l’implantation de trois antennes
provinciales dans les provinces de Gitega, Makamba et Ngozi. Ces antennes auront,
dans un premier temps, une couverture régionale respectivement au centre-est
(provinces de Gitega, Karuzi, Mwaro, Ruyigi et Cankuzo), au sud (province de
Bururi, Makamba, et Rutana) et au nord du pays (Kayanza, Ngozi, Muyinga et
Kirundo) en attendant l’ouverture d’autres antennes provinciales dans toutes les
2
provinces suivant les moyens mis à sa disposition par l’Etat. Le siège de la CNIDH
s’occupera de la région ouest où aucune antenne provinciale n’est encore ouverte.
Il sied également d’apprécier l’étape franchie par la jeune CNIDH dans la quête de sa
crédibilité tant au niveau national qu’au niveau international. Sa récente
accréditation, juste après une année et 6 mois de fonctionnement, par le Comité
International de Coordination des institutions nationales des droits de l’homme
(CIC) au statut A après une rigoureuse évaluation ayant montré que la Commission
des droits de l’homme du Burundi est conforme aux Principes de Paris en est la
preuve. La CNIDH est heureuse d’adresser ses remerciements à tous ceux qui ont
permis cette réalisation tant au niveau des institutions étatiques qu’à celui des
autres partenaires nationaux et internationaux.
Le présent rapport s’articule sur deux grandes parties :
 Les réalisations de la CNIDH de janvier à décembre 2012.
 La situation des droits de l’homme sur la période juin 2011 à décembre
2012.
Approche méthodologique
La CNIDH intervient dans un domaine sensible et délicat de prévention et de lutte
contre les violations des droits de l’homme.
Etant une institution nouvelle qui joue le rôle difficile et délicat d’interface entre les
institutions étatiques et les autres acteurs comme la société civile, les milieux
diplomatiques, les ONGs nationales et internationales, le système des Nations Unies,
elle a toujours privilégié un esprit de collaboration avec les uns et les autres. Pour ce
faire, elle a préparé des memoranda de collaboration avec quelques uns de ces
partenaires.
C’est ainsi que dans la réalisation des ses missions de protection et de promotion
des droits de l’homme et usant des pouvoirs que lui confère la loi, la CNIDH
collabore avec les corps et institutions étatiques comme la police, la justice, le
service national de renseignement et les partenaires nationaux et internationaux
tout en préservant son indépendance.
3
I. Première partie : Réalisations de la CNIDH
A. Protection et défense des droits de l’homme
Dans le domaine de la protection, les principales missions de la CNIDH énoncées
dans la loi N° 01/ 04 du 5 janvier 2011 portant création de la Commission Nationale
Indépendante des Droits de l’Homme au Burundi sont énoncées à l’article 4.
1) Recevoir des plaintes et enquêter sur les cas de violation des droits de
l’homme
Durant l'année 2012, la CNIDH a enregistré 431 requêtes y compris 106 cas
enregistrés en 2011 et ayant continué à faire objet de suivi en 2012. Les différentes
saisines proviennent des victimes, de leurs parents, amis ou connaissances, des
organisations de la société civile et de l’auto-saisine de la CNIDH. Elle a également
enregistré 29 copies pour information sur les cas de violations présumées.
Conformément à la loi instituant la CNIDH et à son règlement en matière de
traitement de saisines, 327 cas sur 431 ont fait objet de suivi tandis que le reste a
été jugé irrecevable.
Les dossiers rejetés ou jugés irrecevables sont ceux qui ne bénéficient pas de
l'assistance judiciaire soit parce qu'ils ne rencontrent pas les critères fixés par la
CNIDH ou soit pour des raisons financières ou tout simplement parce qu'ils ne sont
pas recevables conformément à l'article 44 de la loi portant création de la CNIDH. 1
Classification des requêtes par catégories
Le tableau des pages 19 et 20 du rapport donne les requêtes enregistrées par la
CNIDH au cours de la période de rapportage classées par catégories.
La Commission enregistre beaucoup de requérants qui sollicitent de la CNIDH
certains services comme l’assistance judiciaire (78) suivie des cas d'écoute,
1
« La Commission déclare irrecevable notamment les requêtes fondées uniquement sur
des rumeurs, des requêtes ne relevant pas de sa compétence, des affaires pendantes
devant les juridictions »
4
d'orientation ou d'assistance autre que judiciaire (74) ainsi que des demandes de
médiation (5).
Le nombre élevé de requêtes d'assistance judiciaire ou autres traduit le défi d’accès
à un procès juste et équitable et /ou l'ignorance totale ou partielle de la procédure
judiciaire. Les copies pour information (29) que la Commission a enregistrées lui
ont servi, dans certains cas, d'alerte sur d'éventuelles violations des droits de
l’homme tandis que dans d'autres cas, elles ont permis à la CNIDH de procéder à
l'auto-saisine.
Parmi les allégations de violations relatives aux droits civils et politiques,
celles portant atteinte au droit à la liberté et à la sécurité de sa personne sont
majoritaires (76) suivies par celles portant atteinte au droit de ne pas être détenu
arbitrairement (66). Viennent ensuite, dans cette catégorie, les allégations d'atteinte
au droit à la vie(27), au droit de ne pas être soumis à la torture (20), au droit à un
procès équitable(18), au droit à l'intégrité physique par viol et violences sexuelles
(7) , au droit à la liberté d'expression(1), au droit à la liberté de réunion et
d'association(1) et au droit de fonder des associations ou des organisations(1). Des
allégations de déni de justice ont été également enregistrées.
Concernant les allégations de violations des droits sociaux économiques et culturels,
les allégations d’atteinte au droit à la propriété (39) constituent la majorité des cas
enregistrés dans cette catégorie suivie respectivement par les allégations d’atteinte
au droit au travail (13) et au droit à l'éducation (2).
Après enquête et vérification des requêtes et auto-saisines, la Commission a trouvé
que sur un total de 274 allégations 37 cas sont déjà confirmés comme violation des
droits de l'homme. Ce chiffre exclut les services sollicités par les requérants, les
allégations en cours de suivi et vérifications ainsi que les requêtes rejetées
conformément à l'article 44 de la loi portant création de la CNIDH.
2) Effectuer des visites régulières, notifiées ou inopinées dans tous les lieux
de détention et formuler des recommandations à l’endroit des autorités
compétentes.
5
Au cours de l’année 2012, la CNIDH a, seule ou conjointement avec les parquets de
la République dans toutes les provinces du Burundi, effectué des visites dans les
cachots du pays.
Lors de chaque descente, il était question de contrôler le respect des dispositions
des codes pénal et de procédure pénale en matière de tenue des registres d’écrou,
de délais légaux de rétention, de garde à vue et de détention provisoire, ainsi que
les conditions générales de détention. Les détenus ont été entendus un à un par un
ou des officiers du ministère public, en présence d’un ou des Officiers de Police
Judiciaire (OPJ) qui donnaient des éclaircissements sur les faits à charge de chaque
détenu et les circonstances de son arrestation. (Cf. Tableau, p. 22-23).
En résumé, pour le cas des prisons et autres centres de détention, nous pourrions
évoquer les problèmes suivants comme les plus récurrents :
-
Surpopulation carcérale avec exiguïté des lieux de détention,
Rupture de stocks de vivres suite aux lenteurs des procédures
administratives,
Vétusté des infrastructures,
Problèmes d’approvisionnement en eau,
Grande fréquence des péremptions des ordonnances de mise en détention
préventive,
Détentions dépassant les délais légaux,
Beaucoup de cas qui pourraient bénéficier de la libération conditionnelle,
Eloignement des juridictions d’appel,
Les mineur(e)s détenus ensemble avec les adultes,
Difficultés d’accès aux soins de santé et à l’alimentation,
Longue distance entre la prison et les juridictions,
Absence de prison dans certaines provinces,
Manque de papier et de registres avec recours à des bénéficiaires aléatoires.
3) Prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants.
En vue de prévenir
la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants, la Commission a co-organisé avec l'organisation
« Initiative article 5 » basée en Afrique du Sud, deux ateliers qui avaient pour
objectif de développer, en coopération avec les institutions burundaises, des
outils pour faciliter la mise en œuvre effective de la Convention Internationale
6
contre la Torture par l'établissement des mesures accompagnatrices. Cet atelier
visait également la promotion d'une politique de prévention et de lutte contre la
torture en conformité avec la Convention et la Charte Africaine des Droits de
l'Homme et des Peuples.
La Commission a reçu des plaintes en provenance des victimes présumées de la
torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Concernant les allégations de torture, 20 cas ont été enregistrés et 8 dossiers ont
été clôturés tandis que 12 autres sont toujours objet de suivi dans les différentes
juridictions. 6 cas de torture ont été confirmés.
Il est à noter que la CNIDH accorde une assistance judiciaire aux victimes de la
torture.
La Commission a saisi le Ministère Public au sujet d'un cas de torture présumée
perpétré par des agents du SNR au mois de Mai 2012.
4) Lutter contre les viols et les violences basées sur le genre.
Au cours de l’année 2012, la CNIDH a été saisie sur 7 cas d'allégations de viols et
de violences basées sur le genre. Après enquête, la CNIDH fait toujours le suivi
de trois cas de viols qui semblent se confirmer auprès des Tribunaux de Grande
Instance de Bujumbura et de Bururi.
La Commission participe également dans des séances de travail de différents
partenaires impliqués dans la lutte contre les viols et les violences basées sur le
genre en vue de penser aux stratégies qui permettraient de réduire ces
violations.
5) Saisir le ministère public des cas de violation des droits de l’homme.
La CNIDH informe verbalement ou saisit par écrit et ce, sur base régulière le
ministère public des cas de violation des droits de l'homme. A titre d'exemples, la
Commission a déjà saisi, dans sa correspondance du 11 septembre 2012, le
parquet en Mairie de Bujumbura d'un cas de détention préventive depuis le 26
juin 2006. Elle a également saisi verbalement le parquet de la province
Bujumbura de deux cas de meurtre et d'un cas de viol. Une saisine a été
7
introduite au parquet de Kayanza pour deux cas de meurtre et de trois cas de
viols.
6) Apporter ou faciliter l’assistance judiciaire aux victimes des violations des
droits de l’homme, en particulier les femmes et les enfants et autres
personnes vulnérables.
La CNIDH reçoit régulièrement beaucoup de demandes d’assistance judiciaire
qui constituent d’ailleurs la majorité des saisines avec un taux de 18 % des
requêtes. Malheureusement, suite aux moyens limités dont elle dispose, la
Commission ne peut pas répondre positivement à toutes ces demandes. C’est
pour cette raison qu’elle a fixé des critères à remplir pour bénéficier d’une
assistance judiciaire. Ainsi, pendant la période de 2012, la CNIDH a octroyé des
Avocats dans 8 dossiers.
Dans le but de faciliter l'accès à la justice des justiciables, la Commission a
organisé des itinérances judiciaires, ce qui a contribué à l’amélioration de la
situation des droits de l’homme en milieu carcéral burundais.
Ainsi, les magistrats des juridictions et parquets des provinces ne disposant pas
de prisons ont effectué l'itinérance judiciaire. Grace à cette activité, des
magistrats de certains tribunaux de grande instance et parquets des provinces
non dotées de prisons se sont rendus aux chefs-lieux des provinces pourvues de
prisons qui hébergent des prévenus justiciables près ces tribunaux.
Les magistrats sont aussi déplacés avec les prisonniers concernés jusqu’aux
collines d’origine de chacun d’eux ce qui a permis d’accéder facilement aux
témoins.
(Tableau des itinérances, Rapport, p.26-27)
Sur un total de 287 dossiers programmés, les quatre juridictions ayant
bénéficié de l’appui ont pu prendre en délibéré 116 dossiers (soit plus de 40%)
et ces dossiers concernent 168 prisonniers.
Ce rendement relativement faible s’explique par plusieurs facteurs qui sont
donnés dans le rapport (p.27-28).
8
B. Promotion des droits de l’homme
L’article 5 de la loi régissant la Commission donne les dispositions de la mission de
promotion.
En 2012, beaucoup d’activités rentrant dans l’exécution de cette mission de
promotion ont été réalisées.
1)
2)
Animation d’ateliers et de séminaires de sensibilisation
7 séminaires à thèmes variés ont permis de toucher différents catégories de
la population dans les provinces de Bujumbura-mairie, Gitega, Karuzi,
Kirundo, Makamba, Muyinga et Ngozi. (Cf. Rapport, p.31-32).
De la promotion des droits de la femme et de l’enfant
1. Une étude menée par la CNIDH intitulée "Etude d’évaluation de la mise en
application des recommandations par le conseil des droits de l’homme lors
de l’EPU 2008 et celles des Organes des traités au niveau de l’ONU et au
niveau africain en l’occurrence le Comité des Droits de l’Enfant, le Comité
pour l’Elimination de la Discrimination à l’égard des Femmes, le Comité
contre la Torture et la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des
Peuples" a montré l’état des lieux des recommandations issues des
organes de traités en l’occurrence la CEDEF (droit de la femme) en 2008
et la CDE (droit de l’enfant) en 2010. Elle a permis d’identifier les
avancées par rapport au suivi des recommandations formulées à l’endroit
du Burundi mais aussi elle formule des recommandations visant à relever
les défis y associés.
2. Commémoration des journées onusiennes
femme et à l’enfant par des émissions radio:
-
et africaines dédiées à la
Le 8 mars 2012: Journée internationale de la femme
Le 16 juin 2012 : La Journée de l’enfant Africain
3. Participation aux activités organisées par les partenaires (Rapport, p.3334).
9
3)
De l’organisation des campagnes d’information et de sensibilisation
sur les missions de la CNIDH
En 2012, la CNIDH a organisé des campagnes d’information et de sensibilisation sur
le rôle, le mandat et les missions de la CNIDH. (Cf. Rapport, p.34).
Pour mieux assurer la sensibilisation sur les questions des droits de l’homme, la
CNIDH a mis en place des cadres et des outils de sensibilisation :
1. Création, alimentation et gestion du site web de la CNIDH
Le site web de la CNIDH ayant comme URL www.cnidh.bi est fonctionnel.
2. Publication du bulletin « La voix de la CNIDH »
Il s’agit d’un bulletin bimestriel en Kirundi et en Français, « La Voix de la CNIDH » en
français et « Ijwi rya CNIDH » en kirundi. C’est un bulletin de 24 pages (50% couleur
et 50% noir et blanc), tiré en 8000 exemplaires dont 6000 en Kirundi et 2000 en
Français.
3. Production et diffusion de spots publicitaires
Les spots publicitaires que la CNIDH a produits et diffusés en 2012 sont de deux
ordres : ceux relatifs au contenu de la loi portant création de la CNIDH et son
adresse physique et ceux relatifs aux émissions que la CNIDH organisait sur
différents thèmes à l’endroit de la population.
4)
De la participation à l’élaboration et à la mise en œuvre des
programmes d’éducation aux droits de l’homme
Les programmes d’éducation aux droits de l’homme sont contenus dans le plan
d’action de mise en œuvre de la politique nationale des droits humains en cours
d’adoption par le Gouvernement. La CNIDH a participé à l’atelier de restitution du
projet de politique nationale des droits humains 2012-2017 et du plan d’action de
mise en œuvre de cette politique. Ce besoin d’éducation aux droits de l’homme
rentre dans l'ensemble des besoins au développement humain durable du Burundi
et dans la droite ligne des Objectifs du Millénaire pour le Développement, du Cadre
10
Stratégique de Lutte contre la Pauvreté, deuxième génération ainsi que de la Vision
Burundi 2025.
5)
De la contribution à la promotion des principes d’égalité et de non
discrimination tels que garantis par la Constitution
Dans le cadre de la contribution à la promotion des principes d’égalité et de non
discrimination, la CNIDH a organisé ou participé à des activités ayant ciblé les
catégories vulnérables telles que les personnes handicapées, les albinos, les
rapatriés, les Batwa.
6)
De la réalisation d’études et des recherches sur les droits de l’homme
Au cours de l’année 2012, la CNIDH a mené deux études et des recherches
bibliographiques dont certaines ont alimenté le bulletin "La voix de la CNIDH".
Les deux études portaient, l’un sur l’évaluation de la mise en application des
recommandations par le conseil des droits de l’homme lors de l’EPU 2008 et celles
des Organes des traités au niveau de l’ONU et au niveau africain comme déjà évoqué
ci-haut.
Cette étude a servi de référence à la contribution de la CNIDH à l’EPU 2013.
L’autre étude portait sur la cartographie des intervenants dans la promotion et la
protection des droits de l'homme au Burundi et leurs activités.
Cette étude a été réalisée dans le but de connaitre les différents intervenants dans
les domaines de la promotion et de la protection des droits de l’homme. Ceci permet
à la CNIDH non seulement de connaitre les actions déjà réalisées, en cours de
réalisation ou envisagées par les autres intervenants mais aussi d’explorer les
possibilités de nouer des partenariats stratégiques avec d'autres intervenants dans
les domaines de promotion et de protection des droits humains.
D’autres recherches bibliographiques sont menées et sont partagées avec les
partenaires. C’est le cas de l’état des lieux des ratifications et de rapportage du
Burundi que la CNIDH a présenté à l’occasion de l’atelier de formation sur la
rédaction des rapports initiaux et périodiques à l’endroit des membres du comité
interministériel de rédaction des rapports tenu du 26 au 28 Novembre 2012.
11
C. Rôle consultatif de la commission
La CNIDH est entrain de voir comment affiner ce rôle qui demande des études
pointues avec des indicateurs adéquats permettant de donner et recommandations
avisés.
Dans l’entre-temps, des avis ont été adressés à l’Assemblée Nationale en octobre
2012 sur le projet de loi sur la presse attirant l’attention sur la conformité de ce
projet aux instruments nationaux - comme la Constitution - et internationaux comme le Pacte International relatif aux droits civils et politiques - obligeant le
Burundi à garantir la liberté de la presse.
D'autres recommandations ont été adressées au Gouvernement sur la
problématique de la vie chère le 27 mars 2012 à la suite d'un conflit qui opposait le
Gouvernement aux syndicalistes et leaders de la société civile. La CNIDH
recommandait notamment la mise sur pied d'un cadre spécifique de dialogue social
représentatif des principales forces sociales et économiques où toutes les questions
en rapport avec la vie chère seraient abordées. Une autre recommandation portait
sur la redynamisation du Conseil économique et social dont le mandat consultatif
couvre tous les aspects du développement économique et social qui constitue un
enjeu important particulièrement en ces moments de mauvaise conjoncture
économique.
La CNIDH a rendu publique une autre déclaration en date du 30 juin 2012 suite à
une médiation menée entre
des responsables du Service National de
Renseignement (SNR) et des représentants des organes de presse en conflit au sujet
de l'arrestation et condamnation à perpétuité du journaliste Hassan Ruvakuki par le
Tribunal de Grande Instance de Cankuzo le 20 juin 2012. Il était demandé aux
magistrats d'administrer le procès en toute indépendance et sérénité et aux
journalistes de faire preuve de retenue dans leur campagne en faveur de la
libération de leur confrère Hassan Ruvakuki en se gardant de toute action
susceptible de vouer au mépris public les autorités, les magistrats et leurs
collaborateurs de la police.
Dans le cadre de sa contribution à l'Examen Périodique Universel 2013, la CNIDH a
formulé une recommandation appelant le Gouvernement à accorder la priorité à la
12
ratification des conventions et protocoles relatifs aux droits de l’homme émanant de
différents organes de traités des Nations Unies comme la Convention contre les
disparitions forcées, la Convention relative aux droits des personnes handicapées
ainsi que les Protocoles additionnels à la Convention contre toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes, à la Convention contre la torture et au Pacte
international relatif aux droits civils et politiques.
Concernant l’entretien des relations de coopération avec les organisations et
réseaux régionaux et internationaux s’intéressant à la promotion et à la protection
des droits de l’homme, la CNIDH a établi des relations avec un bon nombre de
réseaux et organisations tant au niveau régional et international (cf. 41-42).
II. Ressources matérielles, financières et humaines.
1) Ressources financières
J’en ai déjà parlé.
2) Ressources matérielles
En plus de l’immeuble abritant le siège de la Commission, le Gouvernement du
Burundi a mis à la disposition de la CNIDH trois bureaux qui serviront de siège des
antennes provinciales à Gitega, Makamba et Ngozi.
En vue d'équiper le centre de documentation en perspective, la CNIDH continue de
bénéficier des livres sur les droits de l’homme de la part des organisations
internationales et nationales intéressées par les questions des droits de l’homme.
Certains des financements ci-haut mentionnés ont permis à la CNIDH d'acquérir des
équipements pour les antennes bien que des besoins se fassent toujours sentir.
3) Ressources humaines
En plus du personnel que la CNIDH avait déjà recruté en 2011 comprenant le
Secrétaire Général, un comptable, quatre chauffeurs et deux agents de propreté, le
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processus de recrutement a continué en 2012. Il a été recruté deux chargés
d’études, un chargé de communication, deux secrétaires de direction et trois chefs
d'antennes provinciales. Nous demandons instamment aux instances habilitées de
continuer à accroître l’efficience de la CNIDH en la dotant la CNIDH d’un personnel
compétent supplémentaire.
III. Renforcement des capacités des commissaires et du personnel.
Comme l'indique le tableau en annexe III 2 du rapport, les commissaires et les cadres
permanents de la CNIDH ont participé à plusieurs ateliers, séminaires de formation
ou autres activités de promotion et de sensibilisation sur les droits de l'homme soit
34 au niveau national, 8 au niveau de la Communauté Est-Africaine, 8 au niveau
régional et 4 au niveau international.
2
Annexe III : Tableau récapitulatif des activités de renforcement des capacités des
commissaires et du personnel
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PARTIE II : SITUATION DES DROITS DE L'HOMME
Juin 2011 - Décembre 2012
C’est pour la première fois que la CNIDH se prête à cet exercice. La section du
rapport sur la situation des droits de l’homme est introduite par le cadre législatif
et institutionnel de la protection et la promotion des droits de l’homme. Ensuite,
des éléments constitutifs du contexte politique, judiciaire et socio-économiques y
sont évoqués avant d’aborder la situation spécifique des droits civils et politiques
proprement dits ainsi que la situation des droits économiques et sociaux.
Il convient cependant de signaler que toutes les catégories des droits de l’homme
n’ont pas été profondément abordés suite à différentes contraintes et difficultés.
Ainsi par exemple, la situation des droits économiques et socioculturels n’a pas été
approfondie mais ces droits restent une préoccupation réelle de la CNDIH qui ne
manquera pas d’y réserver une attention particulière dans ses activités
ultérieures.
Puis, dans le souci de rappeler les engagements de l’Etat par rapport aux faits
relatés, des dispositions de la constitution et de différents instruments nationaux,
régionaux et internationaux de protection et de promotion des droits de l’homme
ont été évoqués. Cela a été fait dans le but pédagogique d’habituer différentes
autorités et les citoyens de façon générale à tenir compte du prescrit de la loi et
d’autres instruments dans leurs décisions ou revendications en matière des droits
de l’homme. Enfin, des recommandations ont été formulées en vue de
l’amélioration de la situation des droits de l’homme au Burundi.
I. Cadre juridique et institutionnel
A. Cadre législatif
Le Burundi a ratifié un certain nombre d’instruments juridiques régionaux et
internationaux des Droits de l’Homme.
Ces instruments font partie intégrante de la Constitution burundaise du 18 mars
2005 à travers l’article 19.
15
B. Cadre institutionnel
En avril 1992, le Centre des Droits de l’Homme (CDH) a été créé pour la première
fois et placé sous la tutelle du Ministère de la Justice et Garde des Sceaux. C’est
l’actuel Centre de Promotion des Droits de la Personne Humaine et de Prévention
du Génocide (CPDPHPG) du Ministère ayant en charge les Droits de l’Homme.
Après les élections de juin 1993, il y a eu création du Ministère de l’Action Sociale,
des droits de l’Homme et de la Promotion de la Femme.
De 2000 à 2011, il y avait une Commission Gouvernementale des Droits de
l’Homme placée sous la tutelle du ministère ayant les droits de l’homme dans ses
attributions.
Depuis le 7 juin 2011, la Commission Nationale Indépendante des Droits l’homme au
Burundi est fonctionnelle et elle est régie par la loi N°1/04 du 5 janvier 2011.
Il existe aussi un cadre associatif comprenant les confessions religieuses où 5186
associations3 étaient enregistrées au Ministère de l’Intérieur au 31 décembre 2012,
certaines étant impliquées dans la protection et la promotion des droits de l’homme
et la Bonne Gouvernance.
II. Contexte politique, sécuritaire, judiciaire et socio-économique
A. Situation politique
L’année 2012 a été marquée par les séquelles du contentieux électoral de 2010 se
manifestant par un climat de méfiance et de suspicion entre le Gouvernement et les
partis politiques de l’opposition regroupés au sein de l’ADC Ikibiri sur des questions
essentielles comme la préparation des élections de 2015 et la mise en place des
mécanismes de justice transitionnelle.
Le forum permanent de dialogue entre les partis politiques a été mis sur pied mais il
est resté contesté par l’opposition, l’ADC IKIBIRI notamment.
Les rares occasions ayant rassemblé diverses tendances des partis politiques
comme c’était le cas à Caux en Suisse en Septembre 2012 ont nourri le débat sur le
rétrécissement de l’espace démocratique, l’absence de dialogue entre acteurs
3
Information recueillie auprès du cabinet du Ministre de l’Intérieur
16
politiques, la requête de la libération des prisonniers politiques, le retour d’exil des
leaders politiques et l’urgente nécessité d’inclusion dans la préparation des
élections de 2015.
Des faits marquant des dissensions assez importantes ont été notées : un rapport
d’experts des Nations Unies (S/2011/738) impliquant certains leaders de
l’opposition comme Agathon Rwasa, Alexis Sinduhije et Léonard Nyangoma dans la
déstabilisation du pays à partir de l’Est de la RDC, a été réfuté et dénoncé par ces
derniers le qualifiant d’allégations mensongères4, l’arrestation de Alexis Sinduhije à
Dar-es-Salaam le 11 janvier 2012 sur demande d’extradition par le Burundi, libéré
le 24 janvier 2012 ; interdiction des activités de la coalition ADC Ikibiri le 4
novembre 2012 à Rumonge et le 18 novembre 2012 à Gatumba : des dommages
humains, économiques et des violences envers les membres de la coalition ont été
enregistrés.
En outre, les membres des partis de l’opposition ont, à maintes reprises, dénoncé les
actes d’intimidation à l’endroit de la population et des membres de l’opposition
imputables à certains membres de la jeunesse affiliée au parti au pouvoir CNDDFDD « Imbonerakure ». Celle-ci est accusée de se comporter comme des agents de
sécurité dans plusieurs coins du pays sous l’œil complaisant de certaines autorités
administratives et politiques.
B. Situation sécuritaire
La situation sécuritaire en 2012 a été notamment caractérisée par des incidents qui
ont emporté des vies humaines. Le Commissariat central chargé des statistiques de
la police nationale du Burundi (PNB) a enregistré 15657 cas d’infractions
différentes (contre 17023 en 2011), dont 338 cas d’homicide (229 cas d’assassinat
et 109 cas de meurtre) contre 349 cas d’homicide (dont 267 cas d’assassinat et 82
cas de meurtres) en 2011.
C. Infractions récurrentes
Infractions
2011
2012
4
Dans un nouveau rapport des Nations Unies (S/2013) publié le 18 janvier 2013, le Groupe d’experts a réitéré ses
accusations contre Alexis Sinduhije tout en précisant qu’Aghaton Rwasa ne participait plus directement aux activités
du FNL
17
Année
Homicides
Vols Qualifiés
Coups et Blessures
Volontaires Graves
Viols
Source : PNB
349
4266
338
4246
499
1082
455
1014
Au moment de la rédaction de ce rapport, le Parquet Général de la République n’avait
pas encore élaboré son rapport annuel d’activités de l’année 2012 d’où la difficulté de
connaître l’état de répression de ces infractions au niveau des juridictions.
Des attaques armées ont été observées surtout dans la région ouest frontalière avec
la République Démocratique du Congo (RDC). Des déclarations de guerre envers le
pouvoir ont été enregistrées au grand jour.
Des affrontements ont opposé des militaires burundais à quelques petits groupes
armés.
Une controverse plane encore sur le sort des combattants capturés au cours des
opérations militaires.
Au regard des entretiens menés avec différentes autorités administratives,
militaires et policières sur le sort jusque maintenant inconnu des combattants
capturés en juin 2012, il ressort que les principes de droit de la guerre ou
humanitaire échappent encore à la préoccupation de certains responsables des
commandements des FDN et groupes armés, d’où l’importance de rappeler ici le
prescrit des article 3 et 12 commun aux quatre Conventions de Genève ainsi que
l’article 4 du Protocole additionnel II aux Conventions de Genève qui prohibe les “
atteintes portées à la vie des personnes qui ne participent pas directement ou ne
participent plus aux hostilités non internationales, en particulier le meurtre...”.
Au sujet des rapports faisant état d’exécutions extrajudiciaires et de torture en
2011, le Procureur Général de la République a mis sur pied, en date du 13 juin 2012
une commission de cinq magistrats chargée d’enquêter sur ces faits à partir de
18
différents rapports produits par les Nations unies et les organisations de défense
des droits de l’homme.
Le rapport de cette commission a été rendu public par le Procureur Général de la
République le 23 août 2012. Le fait marquant aura été la divergence de vue sur la
notion d’exécution extrajudiciaire. Le Procureur Général de la République tenait à
rappeler que cette infraction n’est pas définie dans le code pénal burundais.
L’existence d’exécutions extrajudiciaires sera explicitement reconnue dans la
stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption 201120155 publiée par le Gouvernement au cours de l’année 2012.
D. Situation judiciaire
En vue de faire face à la montée de la criminalité, le Gouvernement a initié de
nouvelles procédures pour ne pas traîner en longueur les procès, notamment la
procédure de flagrance et de permanence pénale même en dehors des heures de
service. Bien que l’initiative soit louable car traduisant la volonté politique de venir
à bout de la criminalité galopante, des préoccupations persistent quant à la garantie
du droit à la défense car le temps matériel ne permet pas souvent aux prévenus de
pouvoir se faire assister par un Avocat.
Par ailleurs, la CNIDH se réjouit que certains cas emblématiques de criminalité
soient traités rapidement par la Justice parfois avec des résultats satisfaisants.
Autant la CNIDH apprécie l’effort de la Justice dans la répression du genre de crimes
illustrés dans le rapport, autant elle reste préoccupée par des cas qui n’ont pas fait
objet d’enquêtes judiciaires et d’autres dont les enquêtes ne progressent pas.
Dans la pratique, les justiciables ont difficilement accès au procès équitable, à la
défense, à un juge indépendant en partie pour des raisons liées aux moyens
matériels limités, à la gestion de la carrière du magistrat réservée à l’Exécutif, au
manque d’aide légale et à l’ignorance de la procédure par la population.
La CNIDH a salué le projet de code de procédure pénale adopté par le Parlement.
5
Stratégie Nationale de Bonne Gouvernance et de Lutte contre la Corruption, page 35
19
E. Justice transitionnelle
Vous connaissez bien l’historique de ce processus. La CNIDH trouve qu’il est
nécessaire que ces mécanismes qui viendront permettre le passage d’une période
d’impunité à une ère d’un Etat de droit soient régis par un cadre légal conforme aux
normes internationales. Ces mécanismes sont délicats mais indispensables pour que
le Burundi rompe avec la culture de l’impunité qui a marqué ces dernières
décennies depuis l’indépendance du Burundi le 1er juillet 1962.
F. Situation socio-économique
Sur le plan économique, du fait de la longue crise, la situation se caractérise par des
faiblesses conjoncturelles et structurelles. La croissance n’a pas été à la hauteur des
résultats attendus, en particulier à cause de la faible mobilisation des ressources.
Malgré cette problématique interne liée aux conditions de vie difficiles, il est
important de souligner que le Gouvernement a adopté le Cadre Stratégique de lutte
Contre la Pauvreté, deuxième génération (CSLP II) au mois de janvier 2012 et a
mobilisé avec succès des bailleurs potentiels en octobre 2012 à Genève.
III. Droits civils et politiques
A. Violation du droit à la vie :
En dépit de toutes les normes en vigueur au Burundi et qui garantissent le droit à la
vie, la CNIDH a enregistré en 2012 dix sept cas d’allégations d’atteinte au droit à la
vie. Faute de moyens pour assurer la vérification systématique de toutes ces
allégations, seuls certains cas emblématiques ont fait l’objet de descentes de
vérification au niveau des faits et de l’état de répression judiciaire.
B. Torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants :
En dépit des engagements de l’Etat du Burundi en vertu des normes nationales et
internationales, des actes de torture existent.
Comme déjà mentionné dans la partie narrative du présent rapport, la CNIDH a
enregistré 12 allégations de cas de torture en 2012 mais huit parmi ceux-là ont
20
retenu l’attention de la CNIDH au regard de la définition de la torture et des faits
déjà constatés lors des descentes d’investigations et des entretiens avec certaines
autorités policières. Toutefois, la procédure de vérification continue conformément
aux articles 47 et 48 de la loi N° 1/04/du 5 Janvier 2011 qui imposent la procédure
contradictoire avant de confirmer la violation.
C. Libertés publiques
A travers les différentes préoccupations exprimées, la CNIDH dégage le constat
suivant :
a) Problématique de mise à jour des textes régissant les libertés
publiques
Les textes régissant les manifestations publiques ne sont pas adaptés à l’évolution
de la société burundaise depuis les années 90 d’ouverture démocratique. Ainsi par
exemple, les manifestations et les réunions publiques sont régies par le décret n°
100/ 187/ 91 du 31 décembre 1991 portant réglementation des manifestations sur
la voie publique
antérieur à la constitution pluraliste de 1992. Quant aux
associations sans but lucratif, elles sont régies par une loi datant de l’année 1992 où
le mouvement associatif n’était pas encore aussi développé que pendant la période
actuelle.
Les différents problèmes relevés pourraient trouver des solutions à travers la
révision de ces lois, en se référant aux instruments internationaux et régionaux
ratifiés par le Burundi en matière de libertés publiques et cela dans un cadre
concerté avec les bénéficiaires pour éviter des conflits et/ou le climat de méfiance
qui pourraient prévaloir pendant le processus de révision de ces textes.
b) Mise en application effective des textes de loi par l’autorité et les
acteurs concernés
Le décret n° 100/ 187/ 91 du 31 décembre 1991 régissant les manifestations
publiques nécessite une harmonisation à la Constitution et aux textes
internationaux garantissant les libertés publiques.
21
Il est notamment à l’origine des controverses et confusions autour des notions de
déclaration préalable de tous cortèges, défilés ou rassemblements de personnes et,
d’une façon générale, toute manifestation sur la voie publique (article premier) et
celle de trouble de l’ordre public (article 2) comme motif d’interdiction de ces
manifestations publiques.
C’est dans ce contexte que la plupart des réunions et manifestation des partis
politiques ou associations de la société civile sont empêchées par la police usant
parfois de gaz lacrymogène comme ce fut le cas le 18 Novembre 2012 à Kajaga où
les membres du FRODEBU accompagnés de ceux de l’ADC-IKIBIRI se sont vus
interdire de tenir leur réunion à Gatumba. Les membres de ces partis politiques,
dont certains anciens dignitaires ont été malmenés par la police. Un incident
similaire s’est produit également à Minago en date du 4 novembre 2012.
D. Droit à la liberté et à la sécurité
Bien que la CNIDH ne connaisse pas la situation générale sur la détention préventive
pour n’avoir pas eu le temps de mener des investigations dans toutes les prisons, le
constat est que le nombre de prévenus reste plus élevé par rapport à celui des
condamnés.
Tableau IX : Evolution de la population pénitentiaire de 2010 à 2012
Population
Pénitentiaire Prévenus
Fin décembre
2010
9823
Fin décembre
2011
10432
Fin décembre
2012
6369
Condamnés
5847
3976
5336
5096
3976
2393
22
La CNIDH a enregistré des cas de détentions irrégulières imputables aux parquets
ou juridictions. Il reste néanmoins vrai que des mesures positives ont été prises par
le Chef de l’Etat et le gouvernement pour réduire la population carcérale
Au cours des activités réalisées au cours de l’année 2012, tels que les ateliers de
sensibilisation, les séminaires de formation, les descentes dans des maisons d’arrêt
et des juridictions dans le cadre d’appui aux itinérances des magistrats, la CNDH a
pu se rendre compte des cas d’atteintes au droit à la sécurité et à la liberté bien que
des avancées aient été également observées dans le respect des procédures ainsi
que dans la collaboration des polices et parquets avec les organisations de défense
des droits de l’homme tant nationales qu’internationales.
La CNIDH en a retenu les préoccupations suivantes :
-
Atteinte au droit de toute personne détenue à l'information du motif de
l'arrestation et des accusations portées contre elle.
Absence de procès-verbaux d’arrestation.
La détention des enfants n’ayant pas encore atteint la majorité pénale.
Des détentions pour des affaires civiles.
Des détentions pour des faits qui ne sont pas érigés en infraction.
Des détentions pour des infractions passibles seulement d’une peine
d’amende.
Des détentions dans des lieux de détention dépourvus d’OPJ.
Des détentions décidées par des autorités non compétentes.
Dépassement du délai légal de rétention de sûreté.
Dépassement du délai légal de garde à vue.
Non séparation des personnes mineures d’avec les adultes en violation de
l’article 10.2, b) du PIDCP.
La plupart des cachots n’ont pas de cellules réservées aux détenues femmes
et filles.
Mauvaise tenue du registre d’écrou.
E. Droit à la propriété
Le droit à la propriété est, aux termes de l’article 14 du Code civil burundais, livre
deuxième, le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive, sauf
23
les restrictions qui résultent de la loi et des droits réels appartenant à autrui. C’est la
même définition consacrée par l’article 16 de la Loi n°1/13 du 9 août 2011 portant
révision du code foncier du Burundi en ce qui concerne la propriété foncière. Ce
droit est également consacré par l’article 14 de la CADHP et l’article 36 de la
Constitution burundaise qui prescrit que « Toute personne a droit à la propriété. Nul
ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, dans les cas et de
la manière établis par la loi, moyennant une juste et préalable indemnité ou en
exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée ».
En dépit de cette disposition constitutionnelle, la CNIDH a enregistré un cas
d’atteinte au droit de/à la propriété.
IV. DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
Faute de moyens humains et financiers suffisants, la CNIDH n’a pas été en mesure de
mener des enquêtes approfondies sur les droits économiques, sociaux et culturels.
Face à cette contrainte, la CNIDH a pris l’option de traiter progressivement ces
droits en donnant la priorité pour le compte du rapport de l’année 2012 au droit à
l’éducation.
1. Enseignement primaire,
enseignement des métiers.
secondaire
général
et
pédagogique
et
Cf. Rapport, p. 83-86).
L’enseignement primaire et secondaire au Burundi est en train de connaître de
profonds changements dus à l’introduction d’une très grande réforme, l’école
fondamentale qui s’accompagne du même coup des réformes au niveau des
‘’curricula’’ (programmes d’enseignement). La construction des écoles à grande
échelle et l’engouement vers l’école, toutes catégories confondues, s’inscrit dans la
logique de poursuivre la réalisation du deuxième Objectif du Millénaire pour le
Développement (OMD) qui vise à assurer l’enseignement primaire pour tous.
Dans les écoles d’enseignement primaire et secondaire, tant publiques que privées,
y compris les écoles consulaires, un certain nombre de difficultés ont émaillé le
système, dont les plus saillantes ont trait :
- Aux effectifs d’élèves très élevés ;
24
-
Au nombre de classes et aux effectifs d’enseignants qui restent insuffisants ou
ne remplissent pas les normes ;
Au matériel didactique insuffisant ou non adapté.
Avec l’introduction de l’école fondamentale, le nombre d’enseignants qualifiés
risque de faire ombrage à la réforme. (Les défis sont donnés à la page 86 du
rapport).
2. Enseignement supérieur public et privé:
Le grand chantier de la réforme de l’enseignement supérieur tant public que privé
repose sur la loi no 1/22 du 30 décembre 2011 portant réorganisation de
l’enseignement supérieur au Burundi ainsi que les textes d’application. ‘’En vue de
mettre en application cette loi, différents décrets et ordonnances ministérielles ont
été déjà élaborés et signés. C’est ainsi que six (06) décrets et dix neuf (19)
ordonnances ministérielles ont été déjà signés’’ 6. Le point fort de cette réforme est
l’introduction du système Baccalauréat- Maitrise- Doctorat(BMD).
Sur le plan des droits de l’homme, nous pouvons considérer que les conditions
légales et réglementaires sont globalement bonnes et ne violent donc pas l’accès à
l’éducation de la part des concernés, étant donné qu’ils constituent un gage de
garantie d’un enseignement de qualité à l’enseignement supérieur aussi bien public
que privé. Néanmoins, le gouvernement devrait tenir compte de la situation des
candidats à besoins spécifiques, en l’occurrence les handicapés physiques et
sensoriels en créant des conditions matérielles et didactiques appropriées en vue de
les motiver à accéder à l’enseignement supérieur. (Voir les défis à la p.87 du
rapport).
Secrétariat Permanent au Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche
Scientifique
6
25
3. Droit à l’éducation pour les groupes vulnérables :
En matière de respect du droit à l’éducation, l’un des événements majeurs ayant
marqué l’année 2012 pour cette catégorie de la population a été l’implication de
la CNIDH dans la résolution des problèmes que rencontrent les enfants, les
élèves et les étudiants rapatriés en matière d’éducation et d’enseignement.
C’est dans ce cadre que la CNIDH a joué le rôle d’arbitrage entre le Ministère en
charge des questions l’éducation et une association des rapatriés de Tanzanie,
dénommée « RECONFORT» en vue de trouver des solutions adéquates.
A la suite de cette facilitation, une convention entre les deux parties sous les
auspices de la CNIDH a été signée. Aussi, des actions visant à faire respecter le
droit à l’éducation des enfants rapatriés, notamment l’identification de tous les
cas y relatifs et la mise en place des structures pédagogiques adéquates pour
cette catégorie de personnes, ont été initiés.
Il sied cependant de noter que d’autres groupes vulnérables, en l’occurrence les
enfants albinos, les handicapés, les orphelins ainsi que les populations
autochtones (batwa) éprouvent toujours des difficultés énormes en matière
d’éducation et d’enseignement. Le gouvernement devrait donc trouver des
solutions inclusives pour toutes ces catégories afin qu’elles puissent jouir
pleinement de leur droit à l’éducation et de la même manière que les autres
groupes de la population burundaise.
4. Enseignement et genre :
Des mesures irréversibles visant à pérenniser la question d’équité en matière de
scolarisation et d’éducation des filles devraient être prises ou renforcées par le
gouvernement en vue de diminuer les écarts dans l’accès par tous au droit à
l’éducation et à l’enseignement et faire l’objet d’une attention particulière par les
pouvoirs publics.
26
V. Droits catégoriels
A. Droit de la femme
Aperçu de la situation de la femme sur le plan national
Au Burundi, les femmes représentent plus de 50% de la population burundaise. En
plus d’être les plus pauvres, les femmes, surtout rurales, sont les plus touchées par
l’analphabétisme et l’ignorance de leurs droits fondamentaux. Au nom de la
coutume, la femme burundaise subit encore des discriminations aux niveaux
politique, juridique, et socio-économique. Ainsi, les barrières socioculturelles
contribuent encore largement à la marginalisation de la femme burundaise.
Cependant, malgré ces difficultés qui subsistent, des efforts ont été consentis pour
protéger et promouvoir les droits de la femme. Sur le plan des politiques des
institutions et des mécanismes institutionnels. Sur le plan normatif, des instruments
existent, mais il subsiste encore des textes de lois et des pratiques discriminatoires
(Rapport, p. 90-95).
Concernant le niveau de participation de la femme dans les postes de décision,
malgré les engagements du Burundi sur le plan politique et normatif, les avancées
ne se remarquent qu’au niveau de la représentation des femmes au Parlement
(32,1% à l’Assemblée Nationale et 46,3% au Sénat) et au Gouvernement (33,3%).
Les femmes restent sous-représentées dans plusieurs postes techniques de prise de
décisions (taux inférieur à 20%).
Préoccupation au sujet des violences contre les femmes
Le nouveau code pénal de 2009 réprime plus sévèrement le viol 7 par rapport à
l’ancien texte et érige en infraction les violences domestiques. 8 Il y a aussi lieu de
signaler l’adoption de la stratégie nationale de lutte contre les violences basées sur
le genre.
7
8
Code pénal (art 556)
Code Pénal (art 535 à 537)
27
Toutefois, beaucoup reste à faire dans la définition des normes juridiques qui
garantissent le principe d’égalité de tous devant la loi. En effet, la femme fait
toujours face aux pratiques discriminatoires en absence de textes régissant la
succession, les régimes matrimoniaux et libéralités qui sont encore régis par le droit
coutumier.
B. Droits de l’enfant
Certes, en ratifiant plusieurs conventions protégeant les droits des enfants, le
Burundi a manifesté sa volonté de promouvoir et de protéger les droits des enfants
sous sa juridiction.
Toutefois, le cadre juridique international doit être renforcé par l’adoption et la
mise en œuvre de lois spécifiques plus protectrices des droits de l’enfant. Des efforts
ont déjà été faits dans ce domaine. Ainsi par exemple, la CNIDH propose de prendre
en mains les questions suivantes :
- Le droit de l’enfant à la survie et au développement ;
- Le droit à la non-discrimination ;
- La Justice pour les mineurs en conflit avec la loi pénale ;
- Le droit pour l’enfant d’exprimer librement son opinion ;
- Le droit de l’enfant à l’éducation ;
- La protection contre l’exploitation, que celle-ci soit sexuelle ou autre.
D’autres préoccupations demeurent. Les différents instruments et mécanismes
nationaux et internationaux ne sont pas bien connus à cause de leur multitude et
dispersion dans divers textes. D’où la nécessité d’adopter un code spécial complet
de protection de l’enfant.
Le gouvernement du Burundi a déjà mis en place un certain nombre de mécanismes
institutionnels chargés de veiller au développement et à la protection des enfants. A
ces institutions publiques s’ajoutent beaucoup d’organisations de la société civile
qui travaillent dans le domaine de la promotion et à la défense des droits de l’enfant.
La CNIDH se réjouit du fait que le Burundi a honoré ses engagements en décrétant
l’accès universel à l’école primaire pour tous les enfants en âge de scolarité. En outre
beaucoup d’infrastructures scolaires ont été construites.
28
De plus, la CNIDH se réjouit du fait que le Président de la République a annoncé la
gratuité des soins de santé pour les femmes qui accouchent et pour les enfants de
moins de cinq ans. C’est une mesure importante pour améliorer la protection
maternelle et infantile. Toutefois, des établissements sanitaires ne sont pas encore
dotés de moyens matériels et humains suffisants pour répondre aux demandes
croissantes et assurer la pérennité des services en améliorant la disponibilité,
l’accessibilité, l’acceptabilité et la qualité des soins de santé.
CONCLUSION GENERALE
 Honorable Président de l’Assemblée Nationale,
 Honorables membres du Bureau de l’Assemblée Nationale,
 Honorables membres de l’Assemblée Nationale,
Les activités réalisées par la CNIDH au cours de l’année 2012 viennent d’être
passées en revue ainsi qu’une présentation de certains aspects de la situation des
droits de l’homme sur la même période. La CNIDH a accompli ses missions lui
conférées par la loi mais beaucoup reste à faire au regard des sollicitations qui
augmentent au jour le jour.
La création des antennes provinciales qui vient d’être amorcée contribue au
processus de rapprochement des structures de la CNIDH aux victimes potentielles
des violations des droits de l’homme. Ces antennes interviendront efficacement
dans le monitoring des violations des droits de l’homme et agiront rapidement
auprès des autorités locales pour mettre fin à ces violations. Des activités de
promotion seront poursuivies de manière décentralisée dans la perspective
d’asseoir à moyen et long terme une culture de respect des droits de l’homme
auprès des décideurs politiques, administratifs, sécuritaires et judiciaires. La
population sera outillée pour protéger ses droits et défendre ses libertés grâce à la
connaissance des instruments nationaux, régionaux et internationaux de promotion
et de protection des droits de l’homme.
Concernant la situation des droits de l’homme, elle s’est améliorée au cours de
l’année 2012 comparativement à l’année 2011 car les allégations d’assassinats
politiques ont sensiblement diminué.
29
Concernant la question des atteintes au droit à la vie en 2011 qui a défrayé la
chronique au cours de l’année 2012, la volonté de mettre la lumière sur les
allégations d’exécutions extrajudiciaires par le Procureur Général de la République
en créant une commission ad hoc composée de magistrats pour enquêter sur ces
dernières est fort appréciable malgré la controverse qui a prévalu sur la notion
d’exécution extrajudiciaire.
A ce propos, la CNIDH est consciente de la nécessité d’approfondir le débat sur cette
notion inconnue du code pénal burundais mais en usage fréquent aux Nations Unies
notamment à travers le mandat du Rapporteur spécial sur les exécutions
extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires. Toutefois, cela ne devrait distraire
personne sur l’urgence de poursuite de ceux qui se sont rendus coupables
directement ou indirectement de ces crimes commis. Certes, quelques autorités
policières et administratives citées ont été arrêtées et attendent leur jugement mais
les enquêtes judiciaires n’ont pas encore abouti à des résultats palpables sur tous les
cas d’assassinats y compris ceux des membres des partis politiques d’opposition.
Concernant le droit à la liberté et à la sécurité, des réformes sont en cours à la
Justice notamment le nouveau projet de code de procédure pénale déjà adopté par
le Parlement ainsi que l’existence d’un avant-projet de loi portant prévention,
répression, réparation des violences basées sur le genre.
L’autre préoccupation majeure reste l’exercice des libertés publiques marquées par
le processus de révision de la loi sur la presse, de la loi sur les associations sans but
lucratif, de la loi sur les confessions religieuses et celle portant sur les
manifestations publiques. Il y a lieu d’apprécier les cadres de dialogue qui ont eu
lieu sur l’élaboration ou l’adoption des projets de loi sur les ASBL et sur la presse.
Toutefois, les bénéficiaires souhaitent que cette dynamique de concertation prévale
jusqu’à la fin du processus d’amendement ou d’élaboration de ces textes garants de
l’avenir démocratique du pays. Il importe également d’évoquer la controverse entre
le Gouvernement et les partis de l’opposition regroupés au sein de l’ADC-IKIBIRI au
sujet de la loi sur l’opposition politique qui reste préoccupante.
Néanmoins, ces défis pourraient être relevés si les Burundais capitalisaient les
leçons apprises dans la résolution des conflits à l’instar du cadre de dialogue lancé
en 2008 par le Chef de l’Etat, impliquant les élus nationaux et locaux, le
Gouvernement, les partis politiques et les différentes ONGs, le secteur privé, les
confessions religieuses, les syndicats et les médias. Le but recherché était celui de
30
promouvoir une culture démocratique et restaurer la confiance entre les
partenaires nationaux par le recours à un dialogue permanent et inclusif.
La rencontre de Caux en Suisse en juin 2012 entre différents partenaires politiques
y compris les leaders des partis politiques qui avaient fui le pays au lendemain des
élections de 2010, constituait un signe que le climat de tension qui a caractérisé les
relations entre le Gouvernement et l’ADC-IKIBIRI pouvait être apaisé. La relance du
débat politique par le BNUB couronnée de succès lors de l’atelier organisé en mars
2013 à l’endroit de la classe politique sur les leçons tirées des élections de 2010
pour préparer dans un climat apaisé celles de 2015 s’annonce être prometteur.
Le récent succès des assises de Genève, les 29 et 30 octobre 2012, lors de la
première conférence des partenaires au développement pour le financement du
CSLP II, avec la participation de la société civile critique à l’endroit des actions du
Gouvernement, est un autre signe évident que le dialogue et la concertation sont un
atout à privilégier dans la promotion du développement et de la bonne
Gouvernance.
C’est dans la même dynamique de dialogue franc et constructif que le processus de
mise en place des mécanismes de Justice transitionnelle devrait se poursuivre pour
un avenir prometteur de la nation.
V. Recommandations
Tenant compte des observations faites dans le présent rapport, la CNIDH présente au
Gouvernement les recommandations suivantes :

9
Mettre en œuvre les recommandations de la Commission mise en place
par le Procureur Général de la République dans sa lettre
N/Réf .552/10/426/BV/2012 du 12 juin 2012 demandant au Parquet de
faire poursuivre et clôturer l’instruction des dossiers en cours surtout
ceux qui ont été ouverts par la commission.9
Voir annexe VII
31
 Définir un délai limite de traitement des dossiers dans les cours et
tribunaux afin de se conformer au prescrit de la Constitution en son article
38 qui stipule que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire
ou administrative, à ce que sa cause soit entendue équitablement et à être
jugée dans un délai raisonnable sans préjudice de la complexité des
affaires et des enjeux des litiges, du droit à la défense.
 Continuer à scruter les voies et moyens de doter le Burundi d’un cadre
juridique et d’autres mécanismes de protection physique des victimes ou
témoins de violations des droits de l’homme susceptibles de subir des
représailles de la part des auteurs présumés ou de leurs complices ;
 Lutter contre les actes récurrents, au sein des corps de police
pénitentiaire, d’élimination physique des prisonniers pris en flagrant délit
de tentative d’évasion d’autant plus que la peine de mort est abolie au
Burundi ;
 Améliorer les performances de la Justice par l’octroi des moyens matériels
et logistiques aux personnels magistrats et non magistrats.
 Garantir l’indépendance de la magistrature en procédant notamment à
l’amendement de la Constitution en ce qui concerne les attributions du
Conseil Supérieur de la Magistrature et sa composition en vue de se
conformer au principe de séparation des pouvoirs et de mettre en place un
système de recrutement transparent susceptible d’assurer la stabilité de la
carrière des magistrats.
 Dispenser des formations spéciales et adaptées aux acteurs intervenant en
Justice leur permettant la célérité des affaires impliquant des enfants
mineurs et leur doter des moyens matériels et financiers ;
 Mettre en place des maisons de rééducation et de resocialisation des
enfants délinquants ;
 Renforcer la brigade des mineurs en la dotant de moyens suffisants et en
renforçant ses capacités ;
 Respecter les délais de rapportage auprès des mécanismes africains et
onusiens de promotion et de protection des droits de l’homme ;
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 Mettre en œuvre les recommandations émises par mécanismes des
Nations Unies et de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des
Peuples
 Procéder à l’inventaire des lois discriminatoires à l’égard de la femme afin
de les amender en conformité avec la constitution et les instruments
ratifiés par le Burundi spécialement les recommandations émises par le
Comité CEDEF ;
Promulguer la loi portant prévention, répression et réparation de la
violence basée sur le genre.
 Mettre en œuvre des stratégies participatives permettant le déblocage des
entraves à la scolarisation de la fille au primaire, secondaire et
universitaire pour son autonomie et épanouissement moral et intellectuel
qui l’affranchirait dans l’avenir de toute discrimination liée à l’ignorance.
 Promouvoir la participation active de la femme par le renforcement de ses
capacités managériales et professionnelles ;
 Harmoniser les politiques sectorielles au niveau de tous les ministères
avec la politique nationale Genre
 Doter les Centres de Développement Familial de moyens suffisants pour
leur permettre d’encadrer efficacement les femmes du monde rural qui
connaissent toujours de nombreux défis.
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