Faire sauter les «bouchons» de Nantes
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Faire sauter les «bouchons» de Nantes
OT2697_P016_017_REGION_07-REGION 10/07/13 11:24 Page16 Faire sauter les «bouchons» de Nantes L e goulet d’étrangement de l’économie des Pays de la Loire ? Demandez à n’importe quel chef d’entreprise et la réponse fusera : « Le gros point noir, c’est Nantes ! La majeure partie du trafic interrégional transite par la métropole ligérienne dont le périphérique est de plus en plus saturé », fustige Alain Raguideau vice-président de la CCI de Nantes-SaintNazaire, chargé de l’aménagement du territoire. « On y passe du temps et on y laisse nos marges… », confirme Philippe Bourdeau, P-dg de la SNAT, transporteur installé à Saint-Nazaire. Construit au cours des années 1970 et 1980, le périphérique nantais est l’un des plus long de l’Hexagone avec 44 km. Sous la pression démographique et l’étalement urbain, il ne sert plus uniquement au transit routier, mais aussi aux habitants de l’agglomération. En moyenne, 60 000 à 85 000 véhicules l’empruntent chaque jour, générant REGARD SUR... DR LES PREMIERS PAS DU TRANSPORT COMBINÉ La plateforme multimodale railroute de ChâteauGontier, située entre Angers et Laval, est entrée en service fin avril. « Elle résulte d’une démarche Bréger envoie chaque jour 8 à 10 caisses pragmatique par voie ferrée vers Lyon et Marseille. d’opérateurs de proximité », se félicite Vincent Lesage, des Transports Bréger. De fait, la présence d’une infrastructure existante (350 m de quais) a grandement réduit le coût de la mise en œuvre. La ligne est exploitée par Combiwest, à l’origine de l’ouverture de la ligne Rennes-Lyon au début 2011. Les trains de Rennes et de Château-Gontier se rejoignent au Mans et poursuivent désormais leur route jusqu’à Marseille. Après un mois d’activité, le premier bilan est positif avec, en moyenne, une trentaine de caisses mobiles par départ quotidien. L’Officiel des Transporteurs − N° 2697 du 28 juin 2013 DR Construire de nouveaux franchissements de la Loire et réduire la saturation du périphérique nantais sont les enjeux majeurs des Pays de la Loire. D’autant que l’activité économique, malgré le dynamisme régional, pique du nez, causant des baisses de volumes chez les transporteurs. Le Pont de Cheviré en aval de Nantes est utilisé autant pour le transit que les déplacements urbains. Accueillant plus de 110 000 véhicules par jour, il est engorgé en permanence. des embouteillages quotidiens de plusieurs heures. À certains endroits, son état est tellement dégradé que la circulation est limitée à 70 km/h. De plus, ce périphérique souffre d’une continuité aléatoire. Par vent fort, le pont de Cheviré qui traverse la Loire à l’Ouest peut être fermé à la circulation. C’est arrivé six fois entre 2007 et 2011, alors que ce pont accueille en moyenne 110 000 véhicules par jour… Autre handicap : les débordements de la Loire lors de pluies importantes, qui inondent la partie Est du périphérique – huit épisodes de 2007 à 2011. Des événements rares mais qui marquent durablement ceux qui les vivent. Le contournement de l’agglomération nantaise est évoqué dans le second Schéma routier de Loire Atlantique, établi par le département en 2012. Pour mieux irriguer le territoire et servir les pôles économiques, la concertation porte sur l’aménagement d’un doublement du périphérique, à environ 25 km de l’actuel. Dite « Métropolitaine », cette liaison circulaire relierait Savenay, Nord-sur-Erdre, Ancenis, Clisson et Saint-Philbert de Grand-Lieu. Le projet conduirait au doublement du Pont d’Ancenis, déjà évoqué dans le 1er Schéma routier de 2006. Pour des raisons de coûts, le département devrait privilégier les 2x1 voie avec des créneaux de dépassements. Reste à trouver les financements… « Tous les projets d’infrastructures ont du plomb dans l’aile pour des raisons budgétaires », rappelle Philippe Bourdeau, également membre du Conseil économique, social et environnemental régional (CESER). Cet organisme consultatif prépare un rapport d’analyse sur les besoins de la région en matière d’infrastructures, mais aussi sur les moyens de les financer. Des efforts importants sont pourtant consentis en matière d’infrastructures La conjoncture se dégrade Le trafic du port de Nantes Saint-Nazaire a marqué le pas en 2012, reculant à 29,8 millions de tonnes. La baisse tombe même à – 6,8 % pour les flux non énergétiques. Porté par les importations, le trafic conteneurisé progresse en revanche de 3 %, à 184 000 EVP. Dans sa note de conjoncture de juin 2013, l’Observatoire régional des transports titre sur l’amplification du marasme du fret routier. Selon l’étude, tous les indicateurs sectoriels socioéconomiques sont désormais passés au rouge. routières. Débutée à la mi-2012, la construction du viaduc de contournement de Pont-Château doit supprimer le passage à niveau sur la RD126. Le pont de Saint-Nazaire fait l’objet d’un renforcement structurel depuis 2011 et jusqu’en 2014. Des gros travaux sont réalisés sur le pont d’Ancenis depuis la fin 2012. Durant la durée des travaux (de deux ans), la circulation en double sens est maintenue grâce à la construction d’un pont provisoire. Et les études prospectives portant sur le futur pont de Thouaré-sur-Loire vont bon train. La Loire, qui traverse la région d’est en ouest, constitue un handicap certain pour le transport routier local. Seulement quatre ponts l’enjambent. Un cinquième est prévu au centre de Nantes, et les acteurs économiques appellent de leur vœu la construction d’un sixième équipement. « Celui de Cheviré est saturé tandis que celui de Saint-Nazaire est limité aux camions de moins de 40 tonnes », déplore Pierre Baudouin, délégué régional des Pays de la Loire de la FNTR. COUP DE FREIN ÉCONOMIQUE La concrétisation des projets d’amélioration des infrastructures routières est primordiale pour soutenir le développement du territoire. « Il faut fluidifier l’accès à l’hinterland, qui passe par Nantes si l’on prétend augmenter l’activité du port de Nantes St-Nazaire », prévient Anne-Cécile Bernard, chargée de mission Aménagement à la CCI. Quel intérêt d’avoir mis en place des « autoroutes de la mer » en 2010, avec trois bateaux par semaine entre Gijón en Espagne et Montoir-deBretagne (Saint-Nazaire) avec des centaines de camions à bord si c’est pour les coincer sur les axes ligériens ? ». À l’heure où la conjoncture économique se dégrade, ces entraves risquent de peser dans les bilans des sociétés de TRM. La diversification et le dynamisme de l’économie régionale ont longtemps amoindri les effets de la récession. Mais l’attente de 18 mois des chantiers navals STX avant de recevoir une nouvelle commande de paquebot, comme la défaillance du volailler Doux et la fermeture attendu de l’usine de Candia à Lude (au sud de la Sarthe), montre que la crise est désormais bien là… La preuve, la si- tuation des transporteurs n’a jamais été aussi dramatique. Au quatrième trimestre 2012, le nombre de défaillances d’entreprises du secteur était en hausse, tandis que celui des liquidations a progressé de 20 % entre 2011 et 2012. Plus grave, le nombre d’immatriculations de poids lourds a littéralement plongé de plus de 30 % au mois de mai der- nier. « Du jamais vu, s’exclame Denis Douillard, chargé des études transports à la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du transport (Dréal). Ce chiffre indique que les sociétés de transport ne renouvellent plus leur part et témoignent de la situation dramatique de leur trésorerie. » u THIERRY BUTZBACH PIERRE BAUDOUIN, DÉLÉGUÉ RÉGIONAL DES PAYS DE LA LOIRE DE LA FNTR « Le coût de l’éco-taxe sera élevé pour les échanges interrégionaux » d’un barreau routier au nord de Nantes. Il faut souligner que le besoin existe également au sud pour contourner la métropole et son périphérique saturé. D.R. ➔ PAYS DE LA LOIRE –2,7% 3 QUESTIONS À... 16 ➜ L’Officiel des transporteurs : Quel sera l’impact de l’éventuelle construction du futur aéroport du Grand Ouest à Notre-Dame-desLandes ? PIERRE BAUDOIN : La construction de cet équipement aura bien évidemment un impact sur l’activité du secteur, en matière d’aménagement des espaces et infrastructures pour les activités de transports liées aux travaux publics, puis lors des approvisionnements de marchandises nécessaires à sa construction. Enfin, les activités induites par le nouvel aéroport auront évidemment un impact économique positif sur l’ensemble de la région. Son implantation devrait accélérer l’édification ➜ Avez-vous déjà mesuré les conséquences de l’application prochaine de l’écotaxe ? P.L.: Le coût de la taxe poids lourds sera particulièrement élevé au niveau du grand ouest, et notamment pour les échanges entre notre région et la Bretagne, qui représentent la majorité de nos flux régionaux. Comme nos voisins, nous intervenons beaucoup dans le secteur agroalimentaire, gros consommateur de transport. Par exemple, l’éleveur de poulets va payer cette taxe à plusieurs reprises : pour acheminer les poussins, faire venir le grain et l’envoi à l’abattoir. Il y a là un vrai risque de déplacement de sites de production… Comme les principaux axes d’échange seront taxés, cela représente un réel danger d’aggravation de la compétitivité de notre territoire déjà excentré. Même si l’économie régionale est plus diversifiée qu’en Bretagne, avec une activité forte dans les domaines de l’énergie et de l’aéronautique. ➜ Le ferroutage se développe dans l’Ouest. Bientôt aussi sur Nantes ? P.L.: Après Rennes, Combiwest opère désormais depuis ChâteauGontier, Le Mans, à destination de Lyon et bientôt Marseille. On parle depuis 20 ans du transfert de la gare de transport qui se trouve sur l’Île de Nantes… Mais l’aménagement d’une plateforme multimodale sur la zone du Grand Blottereau, telle qu’on l’évoque, ne serait pas forcément opportun. Ce positionnement à l’intérieur du périphérique nantais ne résoudrait pas les difficultés d’accès à la métropole. Propos recueillis par T. B. L’Officiel des Transporteurs − N° 2697 du 28 juin 2013 17