Les comportements pré et post- copulatoires d`évitement de la

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Les comportements pré et post- copulatoires d`évitement de la
Université de Bourgogne – Master S.T.S. – E.T.E.
Spécialité Biologie des Organismes et des Populations
Ecologie Comportementale et Conservation
Rapport bibliographique de Master deuxième année, année universitaire 2009-2010
Les comportements pré et postcopulatoires d’évitement de la
consanguinité
Par Anna Chuine
Réalisé sous la direction de Xavier Fauvergue, Chargé de Recherche INRA
Et Emmanuel Desouhant, Maître de Conférences
Laboratoire d’accueil :
Equipe Biologie des Population en Interaction
UMR INRA-CNRS-UNSA 1301 Interaction Biotique en Santé Végétale
400 Route des Chappes, BP167, 06903 Sophia-Antipolis Cedex
INTRODUCTION
2
I- COMPORTEMENTS PRE-COPULATOIRES D’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE
4
1) Comportements pré-copulatoires
4
a) Choix de partenaire
b) Suppression de reproduction
c) Copulation hors couple
d) Dispersion
4
4
6
7
2) La reconnaissance de parenté : Mécanismes pré-copulatoires d’évitement de la
consanguinité
8
a) Qu’est ce que la reconnaissance de parenté ?
b) Apprentissage par association primaire
c) Comparaison phénotypique
d) Allèles de reconnaissance
8
9
10
11
12
II- COMPORTEMENTS POST-COPULATOIRES D’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE
1) Comportements post-copulatoires
12
a) Les accouplements multiples chez les femelles
12
b) Réduction de l’investissement spermatique dans les accouplements multiples: une stratégie
mâle et femelle
13
2) Sélection du sperme par les femelles : Mécanisme post-copulatoire d’évitement de la
consanguinité
13
a) Choix cryptique du sperme juste après copulation
b) Choix cryptique du sperme avant fécondation
13
14
III- L’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE EN TANT QUE STRATEGIE : ASPECTS
ADAPTATIFS
15
1) Les coûts de l’évitement de la consanguinité
15
a)Des coûts associés à l’évitement de la consanguinité à sa tolérance
b) Une balance idéale des coûts : L’hybridation optimale
15
17
2) L’évitement de la consanguinité : Dans quel cas peut-on parler d’adaptation ?
18
a) Evitement de la consanguinité et sélectivité des femelles.
b) Evitement de la consanguinité et dispersion
18
19
IV- CONCLUSION ET PERSPECTIVES
21
REFERENCES
22
1
INTRODUCTION
La perte de variabilité génétique diminue la capacité d’adaptation des individus et la
probabilité de persistance des populations naturelles dont ils sont issus (Keller et Waller,
2002). La consanguinité, soit la reproduction entre individus apparentés (ayant un ou des
ancêtres communs) représente un des facteurs déterminant cette variabilité. En effet
l’accouplement entre apparentés provoque une augmentation du nombre d’individus
homozygotes au sein d’une population et permet donc l’expression d’allèles récessifs délétères
(Keller et Waller, 2002 ;Frankham, 2005). Parallèlement, la perte de l’hétérozygotie à un locus
constitue un coût d’autant plus important que cette perte s’effectue au locus qui confère aux
hétérozygotes un avantage sélectif par rapport aux homozygotes (superdominance ou
overdominance en anglais) (Charlesworth et Charlesworth, 1987 ; Allendorf et Luikart, 2007).
Ces modifications de fréquences génotypiques, engendrent une dépression de consanguinité
qui se traduit par une réduction de la viabilité et la fécondité des individus, et donc affecte leur
valeur sélective. Cette dépression aura alors des conséquences fortes sur la démographie de la
population (Charlesworth et Charlesworth, 1987; Lande et al., 1988; Laikre et al., 1997;
Keller et Waller, 2002; Frankham, 2005).
Suite à la perte de variabilité génétique, de la population due à la consanguinité, et à la
baisse de l’aptitude phénotypique des individus, liée à la dépression de consanguinité, la
population se trouve fragilisée et sensible aux fluctuations environnementales aussi nommée
stochasticité environnementales et aux fluctuations des paramètres démographiques telle que
la fécondité (i.e. la stochasticité démographique). La probabilité d’extinction de la population
augmente alors (Lande et al., 1988 ; Keller et Waller, 2002).
La consanguinité est notamment présente chez les populations passant par de forts
goulots d’étranglements (où le nombre d’individus est réduit). Même lorsque le choix de
partenaires sexuels se fait au hasard, parmi un ensemble d’individus de la population, la
probabilité de s’apparier avec un partenaire apparenté est forte. Si ce goulot d’étranglement est
récent, l’action de la sélection naturelle diminue la dépression de consanguinité en purgeant la
population des allèles récessifs délétères, du fait de la valeur adaptative moindre des individus
les portant (Bijlsma et al., 2000). Lorsque le passage par un goulot d’étranglement est
récurrent, la purge a déjà eu lieu auparavant et la dépression de consanguinité ne peut être
davantage minimisée. De plus, la purge ne s’effectue pas pour les allèles récessifs délétères
non létaux (non soumis à la sélection naturelle) qui se fixent dans la population (Keller et
Waller, 2002 ; Frankham, 2005). On observe la même situation pour les espèces structurées en
2
groupes sociaux (et se reproduisant à l’intérieur) où chaque groupe peut être comparé à une
population de petite taille.
Dans ces populations où la consanguinité est fréquente, des individus qui sauraient
éviter les coûts liés à la dépression de consanguinité seraient favorisés par la sélection
naturelle. On s’attend à ce que la dépression de consanguinité agisse comme une force
sélective modelant les stratégies comportementales d’évitement de la consanguinité (Pusey et
Wolf, 1996). Ces stratégies comportementales sont identifiées dans de nombreux taxons du
règne animal : chez les mammifères (Manson et Perry, 1993 ; Pillay, 2002), les oiseaux
(Brooker et al., 1990 ; Hatchwell et al., 2000), les reptiles (Bull et Cooper, 1999 ; Stow et
Sunnucks, 2004), et chez les insectes (Waldbauer et Sternburg, 1979). L’intensité et la
tolérance à la consanguinité étant variables entre espèces, on s’attend à ce que différents
comportements aient été sélectionnés en fonction des coûts endurés par les individus d’une
population (Pusey et Wolf, 1996). On peut également supposer que de tels comportements
seront produits par le sexe qui souffrira le plus de cette dépression. Comme les femelles
investissent beaucoup plus d’énergie que les mâles dans la reproduction on peut prédire
qu’elles éviteront davantage les accouplements consanguins car il serait trop coûteux
d’investir dans une progéniture « à risques » (Lehmann et Perrin, 2003). En effet les femelles
ont un nombre restreint de gamètes riches en énergie (ovocytes) et donc coûteux à produire.
Pour la même quantité d’énergie, les mâles produiront bien plus de gamètes, les
spermatozoïdes. Le nombre de zygotes susceptibles d’être engendrés est par conséquent limité
par la disponibilité en gamètes femelles (Anderson, 1994). De plus les femelles dépensent plus
d’énergie dans les soins aux jeunes (lactation …). Celles-ci entreront alors en compétition pour
l’accès aux ressources énergétiques nécessaires à la reproduction. Les mâles à l’inverse,
entrent en compétition pour l’accès aux femelles. Ils sont alors peu sélectifs et tentent de
s’accoupler avec chaque femelle rencontrée (Trivers, 1972). La sélection sexuelle, via le choix
du partenaire sexuel, devrait jouer un rôle important dans l’évolution de comportements
d’évitement de la consanguinité et que ceux –ci soient en majorité produits par ou en faveur
des femelles.
L’objectif du rapport est de comprendre les différents comportements d’évitements de
la consanguinité, et les mécanismes proximaux sous-jacents, mis en place avant ou après
accouplements et de déterminer quel sexe exprime ces comportements. Dans un second temps,
nous discuterons des aspects adaptatifs (fonctions ultimes) des stratégies d’évitement de la
consanguinité. Seules les stratégies comportementales, visant à limiter la consanguinité,
réalisées avant fécondation, seront abordées dans ce rapport. Il existe en effet deux types de
3
comportements réalisés avant la fécondation, les comportements pré-copulatoires et les
comportements post-copulatoire (juste avant la fusion des gamètes). De ce fait les stratégies
post-fécondation qui agissent directement sur le zygote (avortement…) ne seront pas étudiées.
Bien que certains mécanismes d’évitement de la consanguinité soient bien connus chez les
plantes, nos exemples seront empruntés au règne animal.
I- COMPORTEMENTS PRE-COPULATOIRES D’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE
1) Comportements pré-copulatoires
a) Choix de partenaire
Le choix d’un partenaire, en fonction de son degré d’apparentement partagé, permet
d’éviter les accouplements consanguins et d’échapper ainsi à la dépression de consanguinité.
(Blouin et Blouin, 1988). Ce choix peut être direct. Il s’agit alors d’attirer un partenaire non
apparenté ou d’éviter les individus les plus apparentés. Quand le choix est indirect, un individu
peut céder aux comportements de cour d’un partenaire ou au contraire lui résister. Chez le
macaque rhésus, Macaca mulatta, les femelles en chaleur résistent aux sollicitations de leurs
frères en adoptant une position non favorable à l’accouplement (Manson et Perry, 1993).
Le plus souvent, le choix de partenaire appartient aux femelles puisqu’elles investissent
plus d’énergie que les mâles dans la reproduction. Le mâle prendra soins de choisir sa femelle
que si son accès est risqué comme par exemple chez les éléphants d’Afrique (Loxodonta
africana) où les mâles peuvent mener un combat à mort pour l’accès aux femelles (Archie et
al., 2007).
Cependant le choix du partenaire peut s’avérer sub-optimal. Dans ce cas un individu
peut divorcer de son partenaire et en choisir un autre, souvent hors du groupe. La séparation du
couple peut aussi s’effectuer suite à des épisodes répétés de reproduction infructueuse (e.g.
non viabilité des descendants) (Hatchwell et al., 2000).
b) Suppression de reproduction
Dans les petites populations ou groupes sociaux, le choix du partenaire est souvent plus
limité puisque le nombre d’individus non apparentés est réduit. En 1996 Tainaka et Itoh
introduisent la notion d’effet glass pour caractériser le refus des individus à se reproduire s’ils
ne trouvent pas de partenaires non apparentés dans leur habitat.
La suppression de reproduction survient dès lors qu’un individu sexuellement mature
est empêché de se reproduire suite à la présence d’un congénère apparenté de sexe opposé. Ce
phénomène est surtout illustré chez les mammifères vivant en groupes sociaux tels que les
4
marmottes, les chiens de prairie, etc. Cette suppression peut venir de soi (refus de se
reproduire) ou peut être induite par le congénère (Bull et Cooper, 1999 ; Stiver et al., 2008 ).
Dans ce dernier cas, la reproduction est réprimée par des interférences directes (agressions)
pour empêcher l’individu de s’accoupler (Tableau 1). Ceci a notamment été observé chez les
suricates (Suricatta suricatta) ; les subordonnés 1 qui tentent de se reproduire sont violemment
agressés voire même rejetés du groupe (O’Riain et al., 2000). Le stress induit par ces
interactions agonistiques peut également conduire à l’inhibition de la fertilité comme par
exemple chez le rat-taupe du Damaraland Cryptomys damarensis (Cooney et Bennett, 2000).
Des signaux chimiques, souvent induits par les parents, peuvent être responsables de la
suppression du développement des fonctions reproductives de leur progéniture (Tai et al.,
2000). L’induction de cette suppression se fait au niveau de la glande pituitaire ; la réponse de
cette glande est inhibée et la sensibilité aux hormones est diminuée (O’Riain et al., 2000). Ce
phénomène provoque généralement une réduction de taille des testicules chez les mâles et un
dérèglement des cycles ou l’avortement des embryons chez les femelles (Blouin et Blouin,
1998).
Si la suppression est induite par un apparenté, l’inhibition disparaîtra lorsque cet
individu quittera la population (Bull et Cooper, 1999 ; Lehmann et Perrin, 2003). Si au
contraire, elle est induite par soi, la venue d’un individu non apparenté, et des stimuli sexuels
qu’il procurera, lèvera cette inhibition (O’Riain et al., 2000). Cependant l’arrêt provoqué de la
reproduction minimise fortement le succès reproducteur futur de l’individu qui aurait plus
intérêt à se reproduire hors du groupe.
Tableau 1- Exemple de suppression de reproduction chez trois espèces différentes, pour des individus
en présence du parent de sexe opposé. D’après Pusey et Wolf, 1996
Individus se reproduisant à leur première
saison de reproduction
Individus ne se reproduisant pas à leur
première saison de reproduction
Présence du parent de sexe opposé
2
26
Absence du parent de sexe opposé
13
37
Présence du parent de sexe opposé
1
9
Absence du parent de sexe opposé
19
26
Présence du parent de sexe opposé
1
39
Absence du parent de sexe opposé
8
2
Chiens de prairies
Marmottes à ventre jaunes
Pic glandivore
1
Les subordonnés sont tous issus du couple dominant. Ils sont donc tous apparentés.
5
c) Copulation hors couple
Les accouplements sont considérés comme hors couple (aussi appelée EPC pour ExtraPair Copulation) lorsqu’un individu socialement monogame se reproduit avec un autre
individu qui n’est pas son partenaire social (Danchin et al., 2005)
Les petites populations ou petits groupes sociaux, dans lesquels le taux
d’apparentement entre individus est souvent élevé, n’offre que peu d’opportunités de
reproduction avec un partenaire non consanguin. La reproduction hors couple serait donc
avantageuse pour les individus appariés à un partenaire apparenté (Sillero-Zubiri et al.,1996).
En effet pour les espèces philopatriques ou pour celles pour qui la dispersion serait une
solution trop coûteuse (abandon du territoire, risque de prédation, ressources limitées), les
EPCs assurent le succès reproducteur sans devoir chercher un nouvel habitat ou perdre la
sécurité de la vie en groupe (Brooker et al., 1990). Chez pratiquement toutes les espèces
d’oiseaux, les femelles choisissent d’abord un mâle pour établir un nid. En fonction de leur
apparentement avec ce mâle dit social, celles-ci se reproduiront à l’extérieur du nid avec un
mâle dit génétique (père biologique) pour ensuite revenir au nid et élever les jeunes avec le
mâle social (Blouin et Blouin, 1998 ; Wheelwright et al., 2006).
Les accouplements peuvent aussi être hors groupe social, on parle alors de transfère
inter-groupe. Chez l’oreillard commun Plecotus auritus, une chauve-souris, les mâles se
reproduisent systématiquement hors du groupe tandis que les femelles sont philopatriques
(Kerth et al., 2002).
On considère qu’une EPC ou un transfère inter-groupe sont des stratégies d’évitement
de la consanguinité si le nombre de copulations avec les groupes voisins est supérieur à celui
observé au sein du groupe même 2 (Sillero-Zubiri et al.,1996). De même, contrairement aux
EPCs ou aux transfère inter-goupe observés dans des populations non consanguines, le choix
des femelles se base principalement sur le degré d’apparentement qu’elles partagent avec les
mâles plutôt que sur d’autres critères d’attractivité. Chez le loup d’Abyssinie, Canis simiensis,
par exemple, les femelles qui se reproduisent hors de la meute, choisissent les mâles avec
lesquels elles sont le moins apparentées. Leur choix n’est aucunement basé sur le statut social
du mâle, (les mâles dominants étant reconnus à leur posture ; Sillero-Zubiri et al.,1996).
Ici l’évitement de la consanguinité assure deux avantages : premièrement la femelle
s’assure de ne pas engendrer une descendance consanguine et deuxièmement si ses filles se
reproduisent avec leur père social l’accouplement ne sera pas consanguin.
2
Des hypothèses alternatives tel que le choix d’un partenaire en fonction de ses « bons gènes » ont été
proposées, pour expliquer l’évolution des EPCs, en plus de celle de l’évitement de la consanguinité. Nous
aborderons davantage ce point dans le chapitre III.
6
d) Dispersion
La dispersion se définit comme l’éloignement d’un individu de son d’habitat de
naissance (dispersion de naissance) ou du précédent habitat de reproduction (dispersion de
reproduction) dans le but de s’établir ailleurs et s’y reproduire (Danchin et al., 2005). Dans les
petites populations résultant d’une fragmentation de leur habitat, la dispersion peut être une
stratégie pour éviter la consanguinité dans chacune des sous-populations 3 . La dispersion doit
alors répondre à deux conditions : (1) un seul des deux sexes est dispersant, (2) la direction de
dispersion doit être aléatoire (Perrin et Mazalov, 1999 ; Gros et al., 2008 ; Szulkin et al.,
2009). Plus le taux de consanguinité augmente au sein d’une population et plus on observe un
biais de dispersion en faveur d’un sexe ou l’autre (Gros et al., 2008 ; Bull et Cooper, 1999).
Chez les mammifères, les femelles sont majoritairement le sexe philopatrique. Elles établissent
un nid ou un territoire pour se reproduire et élever leurs jeunes. Les mâles deviennent alors le
sexe qui disperse et qui se dirige là où les femelles se trouvent. Pour la plupart des espèces
d’oiseaux en revanche les mâles sont plus territoriaux et défendent les nids qu’ils construisent.
Les femelles sont alors le sexe dispersant (Moore et Ali, 1984). Pour les autres espèces c’est le
sexe qui souffre le plus de la dépression de consanguinité qui dispersera.
Dans le cas de la dispersion de naissance, celle-ci est effectuée par les juvéniles avant
leur maturité sexuelle. Ce phénomène est associé au concept d’émergence où le sexe qui
émerge le premier dispersera et se reproduira ailleurs. Ainsi les frères évitent de s’accoupler
avec leurs sœurs puisqu’ils auront déjà quitté le nid avant qu’elles ne naissent (concept
d’émergence) ou n’atteignent la maturité sexuelle (maturation asynchrone) (Bukowski et
Avilés, 2002 ; Bourdais et Hance, 2009). Chez la saturnie cécropia Hyalophora cecropia, un
lépidoptère diurne, l’éclosion des œufs se fait le matin. A la tombée de la nuit les mâles
quittent le cocon et dispersent tandis que les femelles restent à proximité du cocon. Une fois
tous les mâles dispersés, les femelles larguent des phéromones sexuelles pour attirer d’autres
mâles, évitant en principe leurs frères. (Waldbauer et Sternburg, 1979).
Pour la dispersion de reproduction, un des sexes se disperse de son habitat avant une
saison de reproduction pour trouver un partenaire. Dans le cas des populations consanguines,
on s’attend ici à ce que les femelles dispersent puisqu’elles souffriront davantage de la
dépression de consanguinité en investissant plus dans la reproduction. Cependant, on observe
le contraire. En effet puisqu’une femelle perd plus à se reproduire avec un mâle apparenté,
3
Des hypothèses alternatives telle que la compétition entre individus pour l’accès aux ressources, ont été
proposées pour expliquer l’évolution de la dispersion. Nous verrons plus tard dans le chapitre III dans quel cas
on peut parler de dispersion pour éviter la compétition entre individus et dans quels cas plus précisément on
parle d’évitement de la consanguinité.
7
celle-ci préférera se reproduire avec les mâles immigrants qui arrivent dans le groupe plutôt
que les résidants. Cette affirmation est d’autant plus vraie pour les petites populations où le
taux d’individus apparentés est grand. Comme les mâles résidants ne trouveront pas de
partenaires (car ils ne sont pas choisis par les femelles) ceux-ci se disperseront (dispersion
frustrée) (Stow et Sunnucks, 2004). Dans le modèle développé par Lehmann et Perrin (2003),
même une discrimination faible, des mâles par les femelles, exerce une pression de sélection
qui favorise la dispersion des mâles 4 . Plus la dépression de consanguinité sera forte plus la
femelle sera discriminante et poussera les mâles à disperser (Sherborne et al., 2007).
2) La reconnaissance de parenté : Mécanismes pré-copulatoires d’évitement de
la consanguinité
a) Qu’est ce que la reconnaissance de parenté ?
De nombreuses espèces animales ont la capacité de reconnaître leurs conspécifiques,
qu’ils soient apparentés ou non. En effet, les interactions sociales qui existent entre individus
ne sont généralement pas distribuées au hasard. La fréquence et les caractéristiques des
interactions varient en fonction du degré de parenté entre protagonistes : ils s’attirent ou
s’évitent (Ligout et Porter, 2006). Dans le cas des populations consanguines, les
comportements pré-copulatoires d’évitement de la consanguinité ne sont envisageables que si
les individus ont la capacité de reconnaître les conspécifiques qui leur sont apparentés. Seule
la dispersion de naissance ne nécessite pas de mécanisme de reconnaissance des individus
apparentés. Pour ces populations consanguines les individus apparentés auront tendance à
s’éviter tandis que les non-apparentés s’attireront (Ligout et Porter, 2006). Chez certaines
espèces (comme par exemple pour les espèces à forte dépression de consanguinité) où le choix
de partenaire doit être méticuleux, plusieurs mécanismes de discrimination peuvent être
utilisés de façon synergique pour affiner la reconnaissance (Tai et al., 2000). On connaît
aujourd’hui trois grands mécanismes qui permettent la reconnaissance d’apparentés pour les
comportements d’évitement de la consanguinité : l’apprentissage par association primaire, la
comparaison de phénotypes, et la reconnaissance allélique. Bien que les mécanismes basés sur
l’apprentissage soient les plus courants dans le règne animal, ceux basés sur la reconnaissance
allélique sont les plus précis, puisqu’ils induisent moins d’erreur de discrimination (Lihoreau
et Rivault, 2007 ; Bull et Cooper, 1999).
4
Voir aussi la Figure 6 du chapitre III, partie 2
8
b) Apprentissage par association primaire
L’apprentissage par association primaire ou familiarisation, suppose que chaque
individu apprend à reconnaître chaque phénotype des conspécifiques familiers (parents, frères
et sœurs) pour ensuite les discriminer des non-familiers (Figure 1) (Lihoreau et Rivault, 2007).
Ce mécanisme est surtout observé chez les rongeurs et les primates (Moore et Ali, 1984). Cet
apprentissage se faisant au début de la vie, les individus apprennent les phénotypes des
conspécifiques avec qui ils ont été élevés (Tai et al., 2000). Les juvéniles apprennent à
reconnaître leur frères et sœurs ainsi que leur mère, puis leur père si celui-ci contribue aux
soins parentaux (Pillay, 2002). La période de sevrage est donc une période importante pour
mémoriser les odeurs et autres caractères physiques ou comportementaux (Tai et al., 2000).
Figure 1- Mécanisme de reconnaissance social basé sur l’apprentissage par association
primaire. D’après Ligout et Porter, 2006
L’étude réalisée par Pillay en 2002 abonde en ce sens. Chez la souris rayée Rhabdomys
pumilio des femelles juvéniles (dites biologiques) issues d’un couple reproducteur sont mises
en présence de femelles juvéniles (dites adoptives) issues d’une autre litière. Toutes les
femelles sont par la suite élevées par le couple reproducteur (des femelles biologiques). Une
fois l’âge de la maturité sexuelle atteint, les femelles adoptives comme les femelles
biologiques ne se reproduisent pas tant que le père n’a pas quitté le nid.
Par cette association, les individus, une fois aptes à se reproduire, gardent une certaine
aversion pour leur frère et sœur ou tout autre conspécifique avec qui ils auraient été élevés. On
appelle ce phénomène l’effet Westermarck (Schneider et Hendrix, 2000). Ce mécanisme est
néanmoins peu efficace pour la reconnaissance entre mère et fils ou entre frère et sœur. En
effet, en grandissant un mâle acquiert des caractères sexuels secondaires et donc changera de
phénotype. Ce changement d’un phénotype juvénile à une phénotype adulte peut induire sa
mère ou sa sœur en erreur (Wheelwright et al., 2006).
9
c) Comparaison phénotypique
La comparaison phénotypique est, elle aussi, un mécanisme d’apprentissage. Un
individu
(receveur)
mémorise
son
propre
phénotype
(odeur,
aspects,
empreinte
comportementale…) ou celui d’un relatif proche (individus avec qui il a été élevé) pour
ensuite le comparer aux autres conspécifiques (émetteur). La reconnaissance d’un apparenté
peut donc se faire par simple comparaison de phénotypes, sans qu’il y ait eu lieu par avance de
contacts entre les deux protagonistes (Tai et al., 2000; Pillay, 2002; Lihoreau et Rivault, 2007 ;
Paterson et Hurst, 2009) (Figure 2). Les signatures phénotypiques sont d’autant plus fiables
que celles-ci sont l’expression directe du génome (Halpin, 1991). Par un processus de
généralisation n’importe quel individu se présentant face au receveur pourra être reconnu
comme apparenté ou non. Par exemple chez les rats Rattus rattus, les individus sont même
capables de discriminer différents degrés d’apparentement. En effet dans l’étude menée par
Hepper en 1987, différents rats ont été présentés à un individu focal avec lequel ils
partageaient des degrés d’apparentement différents (frères, cousins et non apparentés).
L’individu focal a passé plus de temps à flairer les individus qui lui semblaient les moins
familiers, révélant alors une proportionnalité entre le temps d’exploration olfactive et leur
degré de parenté (et donc une discrimination entre individus apparentés). Plus récemment
Charpentier et coll. ont montré en 2008 que chez le lémur catta Lemur catta pendant la saison
de reproduction le profil sémiochimique des mâles peut informer la femelle de la distance
génétique qui les sépare. Plus le signal olfactif est dissimilaire de celle de sa partenaire plus la
distance génétique avec la femelle est éloignée.
Figure 2- Mécanisme de reconnaissance social basé sur la comparaison phénotypique. D’après
Ligout et Porter, 2006
10
d) Allèles de reconnaissance
Les mécanismes liés aux allèles de reconnaissance sont indépendants de
l’apprentissage de phénotypes (Gerlach et Lysiak, 2006 ; Lihoreau et Rivault, 2007). Dans le
cas des allèles de reconnaissance, le même gène ou le même groupe de gènes coderont d’abord
pour un signal phénotypique ou marqueur. Ces gènes coderont ensuite pour la reconnaissance
du même signal phénotypique. Ce mécanisme est par conséquent considéré comme un
mécanisme de reconnaissance directe, au sens strict, de la proximité génétique (TangMartinez, 2001). Plus un individu est apparenté à un autre, plus il partagera des signaux
phénotypiques communs, et mieux il sera à même de le reconnaître (Paterson et Hurst, 2009)
(Figure 3). Dawkins en 1976 appelle ce phénomène « l’effet barbe verte ». Dans les petites
populations ou groupes sociaux sensibles à la dépression de consanguinité, une femelle peut
donc directement ajuster son comportement en fonction de l’apparentement du partenaire
qu’elle a en face d’elle (l’attirer ou l’éviter). De même la fiabilité de ce mécanisme basé sur le
partage d’allèles en communs avec le génotype maternel permet à un individu de faire la
distinction entre ses frères ses demi-frères venant de la même mère (Paterson et Hurst, 2009).
Chez les vertébrés les allèles de reconnaissance les plus connus sont ceux du CMH
(Complexe Majeur d’Histocompatibilité). Le CMH forme un « cluster » de gènes appelé
haplotype. Cet haplotype est hautement polymorphe. Selon l’haplotype d’un individu, ce
dernier dégage une odeur caractéristique qui permettra sa reconnaissance. Comme le CMH est
extrêmement variable il code pour une grande variabilité d’odeurs (Tregenza et Wedell, 2000).
L’évitement des individus, partageant de nombreux allèles en commun, promeut donc
l’hétérozygotie du CMH (Sherborne et al., 2007). Chez les rongeurs, les marqueurs les plus
utilisés sont ceux du MUP (Major Urinary Protein) qui induit un signal olfactif plus fort et
donc plus facilement reconnaissable en milieux naturels (Sherborne et al., 2007).
Figure 3- Mécanisme de reconnaissance social basé sur la reconnaissance d’allèles.
11
II- COMPORTEMENTS POST-COPULATOIRES D’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE
1) Comportements post-copulatoires
Les comportements d’évitement de la consanguinité peuvent également intervenir
après accouplement (Tregenza et Wedell, 2000). On s’attardera donc ici sur les comportements
d’évitement de la consanguinité post-copulatoires mais pré-fécondation c'est-à-dire après
l’accouplement mais avant la fusion des gamètes mâles et femelles.
a) Les accouplements multiples chez les femelles
Les femelles ne peuvent parfois empêcher les mâles apparentés de s’accoupler avec
elles. Il est en effet moins coûteux pour les femelles de laisser les mâles se reproduire avec
elles plutôt que de subir leur harcèlement (Bretman et al., 2009). D’autres fois les individus ne
peuvent différencier les apparentés des autres conspécifiques. Dans ce cas les accouplements
multiples permettent de diminuer le risque d’engendrer une descendance consanguine si la
reproduction entre apparentés ne peut être évitée (Hosken et Banckenhorn, 1998). En effet, on
observe souvent une baisse de viabilité des embryons lorsqu’une femelle ne s’accouple
qu’avec des individus apparentés 5 . Lorsqu’au contraire elle se reproduise avec des mâles aux
degrés d’apparentement différents, la viabilité des embryons tend à augmenter (Tregenza et
Wedell, 2002).
Plus précisément, seuls les œufs fécondés par les mâles non apparentés vont éclorent.
Les accouplements multiples entraînent donc une dilution de l’impact de la dépression de
consanguinité (Bull et Cooper, 1999). Pour aller plus loin, chez le criquet Gryllus
bimaculatuson on considère qu’une femelle accouplée avec un seul mâle non apparenté a
autant de chance de produire des descendants viables qu’une femelle accouplée avec deux
relatifs et un non apparenté, peu importe l’ordre des mâles. Dans cette étude expérimentale, il
n’y a donc pas d’effet de la précédence spermatique dans les cas d’accouplement multiple dans
le but d’éviter la consanguinité (Tregenza et Wedell, 2002).
Il existe alors un réel biais de paternité en faveur des non apparentés (Tregenza et
Wedell, 2000 ; Bretman et al., 2009). Ce biais peut être davantage marqué si les mâles
choisissent de réduire leur investissement spermatique face aux femelles qui leur sont
apparentées.
5
Nous verrons plus tard dans la partie 2 de ce chapitre quels mécanismes sont à l’origine de ce phénomène.
12
b) Réduction de l’investissement spermatique dans les accouplements multiples: une
stratégie mâle et femelle
S’il a la possibilité de reconnaître les femelles qui lui sont apparentées, un mâle peut
choisir d’investir moins de sperme lors des accouplements avec celles-ci. En effet, chez
certaines espèces, pour les mâles, après chaque éjaculat un certain temps de latence est
nécessaire avant un nouvel accouplement. Ceux-ci doivent donc allouer leur sperme de façon
stratégique pour augmenter leur succès reproducteur. Plus un mâle augmentera le temps de
copulation avec une femelles, plus il transfèrera de sperme (Tregenza et Wedell, 2002). Chez
la teigne des fruits secs Plodia interpunctella, un lépidoptère de la famille des pyralidées, les
sœurs accouplées avec leur frère reçoivent jusqu’à 54% de sperme en moins que les autres
femelles (Lewis et Wedell, 2009).
Les femelles ont aussi un avantage adaptatif à diminuer le stockage de sperme des
mâles apparentés afin de maximiser leur succès reproducteur. Celles-ci réduisent la quantité de
sperme en diminuant le temps de copulation. Chez l’argiope lobée (Argiope lobata) une
araignée, les femelles interrompent d’autant plus la copulation avec un mâle que celui-ci lui
est apparenté (Welke et Schneider, 2009).
Les femelles peuvent aussi décider de stocker moins de sperme des mâles apparentés
dans leur spermathèque, ce qui biaise encore la paternité en faveur des mâles non apparentés
(Tregenza et Wedell, 2002 ; Denk et al., 2005; Bretman et al., 2009 ; Welke et Schneider,
2009). Ici le rang d’accouplement pour un mâle apparenté a diverses conséquences. Si une
femelle stocke déjà le sperme des mâles non apparentés, celle-ci refusera un sperme
incompatible, (i.e. issu d’un mâle apparenté). En revanche si un partenaire apparenté est le
premier à s’accoupler avec la femelle, celle-ci stocke son sperme (Welke et Schneider, 2009).
Elle choisira de garder ou non le sperme de ce mâle selon les partenaires qui se présenteront
par la suite.
2) Sélection du sperme par les femelles : Mécanisme post-copulatoire
d’évitement de la consanguinité
a) Choix cryptique du sperme juste après copulation
Après l’accouplement, une femelle peut choisir de transférer le sperme jusqu’à son
tractus génital ou de l’éjecter (en fonction de l’apparentement du mâle avec celle-ci). Dans ce
cas la femelle sélectionne directement le mâle qui fécondera ses ovules (Bretman et al., 2009).
Ce phénomène est surtout courant chez certaines espèces d’oiseaux comme par exemple chez
la cane (Denk et al., 2005).
13
D’autres mécanismes sont plus courants dans le reste du règne animal. Chez l’argiope
lobée, les femelles sont même capables de digérer le sperme des mâles non désirés dans leurs
spermathèques (Welke et Schneider, 2009). Chez le criquet Gryllus bimaculatus, la femelle
diminue le nombre d’œufs pondus quand elle n’aura pas l’opportunité de s’accoupler avec un
mâle non apparenté (Bretman et al., 2009).
Plus indirectement, dans le cas des accouplements multiples, une femelle peut se
débarrasser du sperme d’un premier mâle non compatible en favorisant l’accouplement avec
un autre partenaire. D’abord perçu comme de la compétition spermatique, le retrait du sperme
du partenaire précédent par le mâle suivant, peut s’avérer avantageux pour la femelle afin de
sélectionner et stocker le sperme des meilleurs mâles. Córdoba-Aguilar en 2006 montre chez
les Odonates que l’évacuation du sperme d’un précédent mâle, par le sexe en forme de
goupillon du mâle suivant, serait un mécanisme possible de la crypticité du choix des femelles.
Après un certain temps de latence après l’accouplement d’autres mécanismes vont agir
pour permettre aux femelles de choisir le sperme avant la fécondation du zygote.
b) Choix cryptique du sperme avant fécondation
Le choix du sperme par la femelle peut également s’effectuer à l’intérieur du tractus
génital. Une femelle peut directement choisir le sperme de quel mâle elle va pouvoir transférer
jusqu'à ses oviductes pour ensuite féconder ses ovules. Chez les araignées par exemple, les
femelles possèdent deux spermathèques, chacune reliée aux oviductes. Chaque spermathèque
stocke le sperme d’un mâle différent. La femelle peut donc choisir d’ouvrir l’une ou l’autre
des spermathèques et de transférer le sperme du mâle choisit jusqu’aux oviductes (Welke and
Schneider, 2009).
De même, pour la plupart des mammifères, les spermatozoïdes d’un éjaculat provenant
d’un mâle de moindre qualité ne passent pas le col de l’utérus. De nombreuses substances
chimiques produites par la femelle appelées anti-spermes détruisent les spermatozoïdes
(Danchin et al. 2005). Seuls les mâles non compatible avec la femelle verront leur sperme
détruit par ces anti-spermes. Cette réponse anti-spermatique des femelles leur assure donc
d’être fertilisée par le mâle le plus compatible (Birkead et al., 1993). Ce mécanisme dépend à
la fois du génotype de la femelle et du mâle (Zeh et Zeh, 1997). Ce phénomène a notamment
été mis en évidence chez la souris, Mus musculus où certains génotypes de spermatozoïdes
sont favorisés selon l’haplotype CMH de la femelle. Le génotype de la femelle peut donc
influencer le transport de spermatozoïdes.
14
III- L’EVITEMENT DE LA CONSANGUINITE EN TANT QUE STRATEGIE : ASPECTS ADAPTATIFS
1) Les coûts de l’évitement de la consanguinité
a)Des coûts associés à l’évitement de la consanguinité à sa tolérance
Les coûts liés aux comportements d’évitement de la consanguinité peuvent s’avérer
extrêmement élevés et surpasser ceux encourus par la dépression de consanguinité. En se
dispersant par exemple les individus sont exposés au risque de prédation. Ils endurent aussi le
coût (en temps et en énergie) de recherche pour trouver un nouvel habitat favorable où
s’établir et se reproduire (Wheelwright et al., 2006). Ces coûts affectent également leur succès
reproducteur. Chez le pic glandivore Melanerpes formicivorus, l’évitement des accouplements
incestueux diminue fortement les opportunités pour un individu de se reproduire. La baisse du
succès reproducteur des individus diminue fortement le taux d’accroissement de la population
qui se voit alors décliner (Koenig et al., 1999). La recherche de partenaires non apparentés est
aussi coûteuse en temps, puisque bien souvent ceux-ci ne sont pas à proximité, et en énergie
s’il faut entrer en compétition avec d’autres protagonistes (Lehmann et Perrin, 2003). Le
risque de se tromper en choisissant un partenaire induit également des coûts en termes de
succès reproducteur futur. Si un individu ne peut discriminer clairement le degré
d’apparentement d’un conspécifique, il risque de l’écarter des partenaires potentiels ou on
contraire le choisir (alors que son apparentement avec celui-ci est fort) (Szulkin et al., 2009).
Le risque s’accroît davantage quand l’espèce concernée possède une période de reproduction
courte. Chez les éléphants d’Afrique, les femelles n’entrent en oestrus que tous les quatre ans
et les mâles ont une fécondité optimale vers 45 ans (Archie et al., 2007).
A l’inverse du cas précédent, si les stratégies d’évitement de la consanguinité sont
« trop efficaces » et que les individus ne s’apparient qu’avec des partenaires trop éloignés
génétiquement, la progéniture engendrée risque d’avoir une viabilité limitée. En effet, quand
un habitat est fragmenté en plusieurs petites populations, ces petites populations, au fur et à
mesures du temps, se différencie génétiquement et chacune s’adapte localement à son habitat.
Si un individu se disperse à une distance relativement grande de son point de départ
pour éviter les partenaires qui lui sont apparentés, il risque de s’apparier avec un partenaire
génétiquement dissemblable et non adapté aux même milieux. Bateson donne en 1983
l’exemple suivant : Si pour une population seuls les individus de petite taille sont
naturellement sélectionnés et que dans la population voisine il est plus adaptatif d’être de
grande taille, le croisement des deux populations donnera des descendants de taille moyenne
qui ne pourront survivre dans aucune des deux populations. Ainsi, si deux individus,
15
provenant de deux endroits différents où les pressions de sélection sont différentes,
s’accouplent, leur progéniture, en rompant les complexes de gènes coadaptés, ne pourra
s’adapter à aucun des deux milieux (Pusey et Wolf, 1996). Ce phénomène est connu sous le
terme de dépression d’hybridation (Outbreeding depression en anglais ; Bateson, 1983).
Les comportements d’évitement de la consanguinité ne peuvent, par conséquent, évoluer et
être maintenu que si leurs coûts n’excèdent pas ceux de la dépression de consanguinité (Pusey
et Wolf, 1996).
Les individus apparentés ne sont pas systématiquement évités. Ils peuvent même être
préférés et recherchés par les femelles. Par exemple les femelles de l’hémiptère Umbonia
crassicornis, en s’accouplant avec leur plein frère augmentent le succès reproducteur de leur
frère (qui s’assure un partenaire sans les coûts de recherche) et augmentent leur propre fitness
inclusive parce que ses gènes seront assurément transmis si la descendance est viable (De Luca
et Cocroft, 2008). Il n’est donc pas rare d’observer des espèces qui malgré le coût lié à la
dépression de consanguinité ne développent aucune stratégie pour pallier à cette dépression.
Dans ce cas, les individus qui pourront tolérer ce coût seront donc les plus adaptés. Dans le
modèle développé par Kokko et Ots en 2006, quelque soit le scénario modélisé (choix de
partenaire séquentiel : avec temps de latence avant un nouvel épisode de reproduction ou choix
de partenaire simultané : avec enchaînement des épisodes de reproduction), selon un taux de
dépression de consanguinité semblable à ceux trouvés dans la nature, les individus semblent,
dans la majorité des cas, tolérer cette dépression.
Tolérer la dépression de consanguinité peut être une stratégie avantageuse d’un point
de vue adaptatif pour les petites populations qui ne peuvent éviter les rencontres fréquentes
avec les apparentés et où la dispersion est problématique (barrière physique donc flux de gènes
limités). C’est d’ailleurs au sein de ces petites populations que les tolérances de la
consanguinité les plus spectaculaires sont observées (Kokko et Ots, 2006).
De plus, dans les populations consanguines le taux d’apparentés étant plus grand, on
observe une hausse des comportements altruistes dans la population. (Wade, 1979; Smith,
1979; Moore et Ali, 1984). Selon la théorie de sélection de parentèle (Maynard Smith, 1964),
les individus auraient tendance à être davantage coopératifs envers les conspécifiques avec qui
ils partagent le plus de gènes en commun (leurs apparentés), ce qui abaisserait le niveau de
compétition au sein des populations (Smith, 1979).
N’existe-t-il pas cependant, pour les espèces les sensible qui n’ont pas la capacité de
tolérer la consanguinité, des stratégies et pour lesquelles les coûts de la dépression de
consanguinité ou d’hybridation peuvent être tous deux tamponnés ?
16
b) Une balance idéale des coûts : L’hybridation optimale
Un individu qui saurait minimiser les coûts associés à la dépression de consanguinité et
ceux de la dépression d’hybridation serait davantage favorisé par la sélection naturelle (Moore
et Ali, 1984). C’est le concept de d’hybridation optimale (Optimal outbreeding en anglais)
proposé par Bateson (1983). Ainsi la meilleure stratégie pour pallier à ces deux types de
dépressions serait d’équilibrer les coûts qui y sont associés, c'est-à-dire pour un individu de
choisir un partenaire apparenté qui soit génétiquement dissimilaire (Figure 4). En d’autres
termes, seuls les cousins sont choisis tandis que les frères, les sœurs, les parents ainsi que tout
autre individu n’appartenant pas aux catégories citées sont évités (Bateson, 1983). Chez la
caille du Japon, les juvéniles d’une même fratrie sont élevés ensemble. A maturité sexuelle,
lors de la recherche de partenaires, les individus choisissent préférentiellement des partenaires
appartenant à la même population que la leur (souvent leurs cousins), mais évitent leurs frères
ou sœurs (Bateson, 1983).
Figure 4- Hypothèses de coûts de la consanguinité et de l’hybridation en fonction du degré
d’apparentement entre partenaires. L’appariement optimal est celui pour lequel les coûts de
consanguinité et d’hybridation sont minimaux. Cet optimum n’est pas nécessairement à
l’intersection des courbes. D’après Bateson, 1983
La mise place de cette stratégie dépend de deux conditions. Premièrement, la
dispersion doit être sexe-biaisée et les individus dispersants ne doivent pas trop s’éloigner de
leur habitat de naissance ou de reproduction (Bateson, 1983 ; Pusey et Wolf, 1996). Ainsi le
taux de rencontre d’un cousin est plus probable si la distance de dispersion est courte (tout en
évitant en même temps les apparentés proches ou les individus génétiquement trop
dissimilaires). Deuxièmement, le mécanisme de reconnaissance doit être suffisamment
efficace pour discriminer le degré d’apparentement qu’un individu partage avec un
conspécifique (Bateson, 1983). Les mécanismes, qui ne nécessitent pas l’apprentissage de
phénotype distinct tels que les allèles de reconnaissance, devraient être sélectionnés. Par
17
exemple, il a été montré chez les souris que pour les allèles du CMH, les individus avaient
tendance à choisir des partenaires qui ne partageaient ni le même haplotype que le leur ni un
haplotype trop dissimilaire (Penn et Pots, 1999).
2) L’évitement de la consanguinité : Dans quel cas peut-on parler d’adaptation ?
D’autres hypothèses alternatives, autres que celle d’éviter la consanguinité, ont souvent
été énoncées pour expliquer l’évolution des comportements déjà cités. Cette partie a donc pour
but d’expliquer dans quels cas les comportements d’évitement de la consanguinité ont bien été
sélectionnés pour leur faculté à échapper à la dépression de consanguinité.
a) Evitement de la consanguinité et sélectivité des femelles.
Qu’il s’agisse de la suppression de reproduction, des EPCs, des accouplements
multiples, ou du choix de partenaire en lui-même, tous ces comportements ont pour point
commun de s’attarder sur la sélectivité des femelles pour s’apparier avec un mâle. On donne
généralement comme explication principale de cette sélectivité celle de l’hypothèse des « bons
gènes ». Les femelles préfèreront les mâles pour leurs traits héritables qui leur confèrent une
meilleure vigueur. Les femelles font ainsi passer à leurs descendances les gènes codant pour
ces traits, et devraient produire une progéniture de qualité et ainsi recevoir des bénéfices
directs (Anderson, 1994). Un bon gène est donc un allèle qui augmente la valeur sélective d’un
individu indépendamment du reste de son génome (Neff et Pitcher, 2005). Les femelles
devraient alors toutes préférer le même type de mâles (Figure 5).
Cependant des comportements d’évitement de la consanguinité, basés sur la préférence
des femelles pour les bons gènes, ne pourraient pas avoir évoluer. En effet si le choix de la
femelle ne se fait pas sur le degré apparentement partagé avec le mâle, mais sur sa qualité, le
risque de produire une descendance consanguine non viable est toujours présent. Le choix de
la femelle doit donc s’ajuster à la fois en fonction du génome du mâle mais aussi de son propre
génome (Trengenza et Wedell, 2000). Une femelle ne produira une descendance viable que si
ses gènes s’accordent avec un haplotype paternel spécifique (Puurtinen et al., 2005). Son choix
est donc porté sur la compatibilité génétique qu’elle partage avec les mâles de la population.
Dans le cas de l’évitement de la consanguinité, on parlera d’évitement d’incompatibilité
génétique (Neff et Pitcher, 2005). Ici les femelles devraient préférer les mâle avec qui leur
génome s’accorde le mieux (Figure 5), soit dans le cadre de l’évitement de la consanguinité,
les non apparentés.
Les travaux théoriques montrent que les comportements d’évitement de la
consanguinité basés sur le choix des mâles par les femelles ont évolué dans des conditions où
18
le choix se fait selon l’hypothèse de compatibilité génétique (Neff et Pitcher, 2005 ; Kawano,
2009). D’autres travaux où la sélectivité des femelles serait corrélée au taux de dépression de
consanguinité seraient souhaitables pour renforcer cette prédiction. Bien que l’hypothèse du
choix de partenaire comme comportement d’évitement de la consanguinité soit souvent
énoncée dans la littérature scientifique, peu d’expériences prennent en compte l’influence de la
dépression de consanguinité sur le choix de la femelle. Cette quasi absence d’études pourrait
être due au fait que si l’évitement de la consanguinité est efficace il n’y a pas de raison
d’observer une dépression de consanguinité dans la population (Pusey et Wolf 1996)
Figure 5- La préférence pour un mâle peut se en faire en fonction de ses « bons gènes » ou de
sa compatibilité génétique. Pour (a), quand l’allèle A est un bon gène, toutes les femelles
maximiseront la valeur sélective de leurs descendances en s’appariant avec un mâle AA. Pour
(b), quand les allèles A et B représentent des gènes compatibles, chaque femelles maximisera
la valeur sélective de leurs descendances en s’accouplant avec un mâle différent. Les femelles
AB peuvent s’accoupler avec n’importe quel mâle (lignes rouges). D’après Neff et Pitcher,
2005
b) Evitement de la consanguinité et dispersion
On associe souvent l’évolution de la dispersion à la variation d’un environnement
social qui pousse les individus à disperser pour éviter d’entrer en compétition pour l’accès aux
ressources (Gandon, 1999 mais voir Ronce, 2007). Cette hypothèse est vérifiée lorsque que les
deux sexes dispersent, soit à la même distance, soit à des distances différentes. En effet, Moore
et Ali (1984) prédisent que la dispersion à des distances différentes pour les deux sexes ne
s’avérait pas très efficace pour éviter les apparentés. Ce genre de dispersion ne peut alors être
observée qu’en cas d’évitement de la compétition. De même, dans le modèle développé par
Gandon (1999), en absence de dépression de consanguinité, la dispersion est évolutivement
stable lorsque les mâles ont un taux de dispersion semblable aux femelles. En revanche dès
que la population est soumise à de la dépression de consanguinité, la stratégie où les deux
sexes dispersent devient instable. Deux nouvelles stratégies, à l’inverse, sont perçues comme
évolutivement stables : la dispersion strictement mâles ou strictement femelles (même si le
proportion d’individus apparentés dans la population est nulle ; Figure 6). Gros et coll. (2008)
19
retrouvent le même schéma pour leur modèle développé. Ils concluent qu’un certains taux de
dépression de consanguinité est nécessaire pour générer une dispersion sexe-biaisée. La
décision de dispersion est donc contexte-dépendante. Ainsi lorsqu’on trouve une population
souffrant de la dépression de consanguinité, si les coûts de dispersion sont inférieurs à ceux de
la dépression de consanguinité, on peut s’attendre à l’évolution d’une dispersion sexe-biaisée
(Moore et Ali, 1984 ; Ronce, 2007 ; Gros et al, 2008).
Figure 6- Evolution des taux de dispersion. La ligne en gras indique le taux de
dispersion évolutivement stable des mâles en fonction du taux de dispersion des femelles. La
ligne pointillée indique le taux de dispersion évolutivement stable des femelles en fonction du
taux de dispersion des mâles. Les flèches indiquent la direction de la sélection de la dispersion
des mâles et des femelles. Pour (a), d= dépression de consanguinité = 0 ; R= degré
d’apparentement= 0,4 ; c= coûts de la dispersion = 0,2. Ici il n’y a qu’une stratégie
évolutivement stable représentée par le point noir où les mâles et les femelles ont le même
taux de dispersion. Pour (b) d=0,4 ; R=0 ; c=0,2. Ici il y a deux stratégies évolutivement stable
représentées par les points noirs où l’un des sexes disperse et l’autre est philopatrique. Il y a
également une autre stratégie à un point d’équilibre instable représentée par le point blanc.
D’après Gandon, 1999
Cependant les arguments expérimentaux manquent encore pour justifier cette théorie.
Bien que dans de nombreuses espèces on trouve des populations fragmentées qui souffrent de
cette dépression de consanguinité (l’exemple le plus connu est celui de Saccheri et coll. en
1998 chez la fritillaire, Melitaea cinxia, un lépidoptère), peu d’études sur des comportements
de dispersion en fonction de cette dépression sont répertoriées. En effet, si la population
souffre depuis trop récemment de la consanguinité, les comportements d’évitement de la
consanguinité n’ont peut être pas encore été sélectionnés.
20
IV- CONCLUSION ET PERSPECTIVES
Alors que peu d’études ont été réalisées afin de comprendre l’évolution des
comportements d’évitement de la consanguinité, celles concernant la description de ces
stratégies comportementales dans les populations souffrant de la dépression de consanguinité
fleurissent dans la littérature scientifique. Ces études s’attardent plus particulièrement sur les
petites populations ou sur les groupes sociaux où la dépression consanguinité sévit et affectent
la persistance de ces populations.
Les populations d’hyménoptères parasitoïdes sont aussi connues pour souffrir
sévèrement de la consanguinité due à leur système de déterminisme du sexe. En effet chez les
hyménoptères haplo-diploïdes la détermination du sexe dépend de la complémentarité des
allèles à un locus du gène responsable du déterminisme sexuel (sl-CSD, Single locus
Complementary Sex Determination) (Cook, 1993). Les œufs non fécondés se développent en
individus mâles haploïdes hémizygotes (ils ne portent qu’une copie de l’allèle du sl-CSD). Les
œufs fécondés, donnent naissance à des femelles diploïdes hétérozygotes au locus du sl-CSD
ou à des mâles diploïdes homozygotes à ce même locus. Cependant dans la plupart des cas les
mâles diploïdes meurent au cours de leur développement ou restent stériles (Heimpel et De
Boer, 2008). Dans le cas des accouplements entre frère et sœur, la probabilité de s’apparier
avec un partenaire porteur du même allèle est d’une chance sur deux. Par conséquent les
accouplements consanguins (ici entre frères et sœurs) conduisent à une perte de 25% des œufs
fécondés via la non viabilité des mâles diploïdes (Henter, 2003). Les conséquences en terme
de dynamique des populations sont donc très sévères (Zayed et Packer, 2005 ; Hein et al.,
2009). Les comportements d’évitement des individus apparentés devraient être sélectionnés
chez les espèces haplo-diploïdes avec sl-CSD. On retrouve d’ailleurs ces comportements chez
Bracon hebetor, une guêpe parasitoïde, où les individus ne se reproduisent pas tant qu’ils
n’ont pas quitté leur lieu de naissance. De même les femelles sont capables de reconnaître
leurs frères pour ensuite les éviter (Ode et al., 1995).
Cependant un autre problème survient lorsque les mâles diploïdes survivent et tentent
de s’accoupler. L’accouplement ne peut alors donner naissance à des descendants. Une autre
stratégie visant alors à réduire les effets de la dépression de consanguinité serait d’éviter la
reproduction avec ces mâles diploïdes. L’évitement de ces derniers par les femelles n’a pour
l’instant été que peu étudié. L’objectif de mon stage sera donc d’étudier le comportement de
choix des femelles envers les mâles diploïdes chez Venturia canescens, un autre hyménoptère
parasitoïde de la famille des Ichneumonidae. La survie et le comportement de reproduction de
ces mâles seront également analysés.
21
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