Place du lambeau antéro-latéral de cuisse dans la reconstruction

Transcription

Place du lambeau antéro-latéral de cuisse dans la reconstruction
UNIVERSITE PARIS DESCARTES
(PARIS 5)
Faculté de Médecine PARIS DESCARTES
Année 2009
N°
THESE
Pour le
DOCTORAT en MEDECINE
DIPLOME D’ETAT
Par
KARSENTI Guillaume
Né le 02 Octobre 1979 à Montpellier
Présentée et soutenue publiquement le 12 Octobre 2009
PLACE DU LAMBEAU ANTEROLATERAL DE
CUISSE DANS LA RECONSTRUCTION
LINGUALE
Jury:
Président du Jury : Pr Marc REVOL
Directeur de thèse : Dr Frédéric KOLB
Membres du jury :
Pr Jean Paul MONTEIL
Pr Laurent LANTIERI
Dr François JANOT
UNIVERSITE PARIS DESCARTES
(PARIS 5)
Faculté de Médecine PARIS DESCARTES
Année 2009
N°
THESE
Pour le
DOCTORAT en MEDECINE
DIPLOME D’ETAT
Par
KARSENTI Guillaume
Né le 02 Octobre 1979 à Montpellier
Présentée et soutenue publiquement le 12 Octobre 2009
PLACE DU LAMBEAU ANTEROLATERAL DE
CUISSE DANS LA RECONSTRUCTION
LINGUALE
Jury:
Président du Jury : Pr Marc REVOL
Directeur de thèse : Dr Frédéric KOLB
Membres du jury :
Pr Jean Paul MONTEIL
Pr Laurent LANTIERI
Dr François JANOT
2
Aux membres du jury :
A monsieur le Professeur Marc REVOL
Vous m’avez fait l’honneur d’accepter de présider cette thèse et je vous en
remercie. Je suis profondémment respectueux de votre enseignement,
votre sagesse ainsi que votre dévouement pour la spécialité. Vous êtes un
modèle de rigueur et d’intégrité.
A monsieur le Professeur Jean Paul MONTEIL
Durant le temps d’un semestre, j’ai pu apprécier votre enseignement de la
chirurgie ORL mais aussi le plaisir de voir un opérateur ambidextre. Je
garde en mémoire ce que vous m’avez enseigné mais aussi l’adresse de
l’auberge Pyrénée-Cévennes !
A monsieur le Professeur Laurent LANTIERI :
Durant mon internat, j’ai pu apprécier votre travail en faveur du
rayonnement de la spécialité, du développement de nouvelles voies de
recherche ainsi que votre talent chirurgical : c’est un honneur de vous
avoir comme membre du jury.
A monsieur le Docteur François JANOT :
Votre enseignement, vos vastes connaissances en carcinologie et votre
bonne humeur n’ont d’égal que votre gentillesse. Vous nous avez accueillis
dans votre service avec bienveillance, veuillez trouver ici ma profonde
reconnaissance.
A monsieur le Docteur Frédéric KOLB :
Merci de m’avoir accompagné tout au long du chemin de cette thèse mais
aussi de mon internat. Tu m’as guidé et enseigné les réflexes du bon
chirurgien, appris à poser les bonnes questions et à y répondre avec
rigueur : ton écoute, ta disponibilité, ta patience, ton optimisme et ton
extraordinaire capacité de travail font de toi un exemple, dont j’espère
profiter longtemps.
3
Aux chirurgiens qui m’ont tout appris : pour leur patience, leurs conseils
et leurs encouragements. Certains sont devenus des amis, d’autres ont
été perdus de vue mais qu’ils trouvent ici toute ma profonde
reconnaissance pour leur compagnonage:
Drs Behm, Bennaceur, Berry, Bertolus, Bertrand, Blanchard, Bonvalot,
Boublil, Bouvier, Boyer, Brette, Burin des Roziers, Cartier, Cavalcanti,
Chaine, Charles, Chauvé, Divaris, Dumas, Elias, Ernenwein, Fournier,
Gallot, Guerre, Huten, Julieron, Laxenaire, Lazar, Leyder, Louafi, Mamelle,
Staub, Temam, Touré, Uzan, Van Der Vorst, Vincens.
Au Dr Barreau, Rimareix et Pachet qui ont fait preuve de patience et de
bienveillance lors de ma formation en sénologie.
Aux Drs Nathalie Rajaonarivelo et Thierry Guihard dont les thèses m’ont
beaucoup aidé : merci !
A mes compagnons d’internat qui sont devenus des amis et qui m’ont
accompagné durant ces 5 années : j’aimerai leur dire combien j’ai
apprécié leur présence à mes côtés, ces moments partagés, les
confidences, les doutes, les réussites, les rires, les encouragements et leur
support.
Alain, Alexandre, Anne, Bénédicte, Benjamin, Caroline, Chakib, Christelle,
David, Délia, Flaviano, Frank, Frédéric, Gouga, Gwladys, Harika, Heloïse,,
Jean Brice, Jean Nicolas, Jonathan Julien, Julien, Laurent, Manuel, Marc,
Marc-Antoine, Marc-David, Mélanie, Nicolas, Romain, Sébastien, Steffen,
Stéphanie.
A Nicolas et Romain, avec qui je suis très content de soutenir ma thèse !
A toute l’équipe de chirurgie cervico-faciale et générale de l’IGR : pour
leur professionnalisme et leurs conseils. J’ai hâte de travailler avec vous.
A Patricia, pour son efficacité et sa bienveillance.
Aux infirmièr(e)s et aides soignant(e)s qui m’ont appris que ce métier ne
se déroule pas seulement au bloc opératoire !
4
Enfin, je remercie tous ceux qui ont veillé sur moi depuis toujours, qui
m’ont fait confiance et m’ont soutenu sans faille dans tous mes projets.
A mon père, mon premier modèle : je ne serais pas où j’en suis
aujourd’hui sans lui, et je suis honoré à la pensée de prolonger son
héritage fait de partage, d’enthousiasme, d’affection et de détermination.
A ma mère dont la bienveillance et l’expérience me guident toujours, avec
amour, discrétion et subtilité.
A mon frère qui compte énormément pour moi, malgré la distance.
A Dorothée qui a toujours fait preuve de patience, d’amour et de
compréhension à mon égard.
Et à tous mes amis, ceux qui le sont devenus et ceux qui le sont restés …
5
1
2
Introduction ........................................................................... 10
La langue ............................................................................... 12
2.1 Anatomie descriptive ......................................................... 12
2.1.1
Morphologie extérieure .................................................. 12
2.1.2
Constitution anatomique ................................................ 13
2.2 Physiologie ........................................................................ 22
2.2.1
La phonation ................................................................ 22
2.2.2
La gustation ................................................................. 24
2.2.3
La mastication et la déglutition ....................................... 25
3 Le cancer de la langue ............................................................ 29
3.1 Généralités ........................................................................ 29
3.1.1
Epidémiologie ............................................................... 29
3.1.2
Etiologies ..................................................................... 29
3.1.3
Examen de la cavité orale .............................................. 33
3.1.4
Lésions précancéreuses épithéliales ou lésions épithéliales
précurseurs .............................................................................. 34
3.1.5
Les cancers de la langue ................................................ 35
3.2 Diagnostic clinique d’un cancer de la langue ..................... 39
3.2.1
Diagnostic clinique ........................................................ 39
3.2.2
Bilan pré thérapeutique ................................................. 40
3.2.3
Classification TNM ......................................................... 44
3.3 Place des traitements ........................................................ 45
3.3.1
Traitement chirurgical.................................................... 45
3.3.2
Radiothérapie ............................................................... 46
3.3.3
Chimiothérapie ............................................................. 47
3.3.4
Curiethérapie ............................................................... 48
3.3.5
Indications ................................................................... 48
4 Techniques chirurgicales ........................................................ 50
4.1 Glossectomies ................................................................... 50
4.2 Séquelles de la glossectomie ............................................. 51
4.2.1
Exérèse de la langue mobile ........................................... 51
4.2.2
Exérèse de la base de langue ......................................... 52
5 Techniques de reconstruction linguale ................................... 53
5.1 Buts de la reconstruction ................................................... 53
5.1.1
Assurer la survie du patient ............................................ 53
5.1.2
Restaurer la fonction ..................................................... 53
5.2 Principes de la reconstruction ........................................... 54
5.2.1
Préserver la fonction restante ......................................... 54
5.2.2
Motricité de la reconstruction.......................................... 55
5.2.3
Protéger les organes restants ......................................... 55
5.2.4
Sensibilité de la reconstruction ....................................... 56
5.3 Classification d’Urken ........................................................ 57
5.4 Techniques chirurgicales ................................................... 59
5.4.1
Lambeaux pédiculés locaux ............................................ 59
5.4.2
Lambeaux pédiculés cervicaux ........................................ 60
5.4.3
Lambeaux pédiculés loco-régionaux ................................ 61
5.4.4
Lambeaux libres ........................................................... 63
6
5.5 Indications classiques des lambeaux libres selon la perte de
substance.................................................................................. 70
5.5.1
Glossectomie marginale : groupe 1 (TM < ¼ et TB < ¼) ... 70
5.5.2
Hémiglossectomie : groupe 2 (TM ½) .............................. 70
5.5.3
Résection de la totalité de la langue mobile : groupe 3 (TM
nf)
72
5.5.4
Hémiglossectomie et glossectomie subtotale : groupe 4 (TB
½) et groupe 5 (TB ¾) .............................................................. 73
5.5.5
Glossectomies totales : groupe 6 (TG) ............................. 74
6 Le lambeau antéro-latéral de cuisse ....................................... 76
6.1 Evolution des lambeaux cutanés........................................ 76
6.1.1
Lambeaux fascio-cutanés ............................................... 76
6.1.2
Lambeaux neurocutanés ................................................ 79
6.1.3
Lambeaux perforants..................................................... 80
6.2 Rappels anatomiques sur le lambeau ALC.......................... 87
6.2.1
Muscles et fascias de la région antérolatérale de la cuisse .. 87
6.2.2
Nerfs de la région antérolatérale de la cuisse .................... 87
6.2.3
Anatomie vasculaire du lambeau ALC .............................. 90
6.3 Histoire du lambeau antéro-latéral de cuisse .................... 92
6.3.1
Absence d’artère cutanée utilisable ................................. 92
6.3.2
Variation de l’origine du pédicule vasculaire ..................... 93
6.3.3
Variations dans le type de vascularisation cutanée ............ 94
6.4 Sequelles du prélèvement ................................................. 95
6.5 Utilisations du lambeau ALC .............................................. 96
6.5.1
Lambeau aminci (thin flap)............................................. 96
6.5.2
Lambeau sensible ......................................................... 97
6.5.3
Autres variantes ........................................................... 97
6.6 Technique de prélèvement du lambeau ALC ...................... 98
6.6.1
Principes de prélèvement des lambeaux perforants ........... 98
6.6.2
Technique du muscle-sparring flap .................................. 99
6.6.3
Lambeau perforants « fins » et microdissection .............. 100
6.6.4
Technique du « free-style » free flap ............................. 103
6.6.5
Repérage des perforantes ............................................ 104
6.6.6
Préparation préopératoire ............................................ 106
6.6.7
Gestion péri-opératoire ................................................ 109
6.6.8
Suites postopératoires ................................................. 109
7 Présentation des reconstructions de langue par le lambeau
antérolatéral de cuisse .............................................................. 110
7.1 Materiel ........................................................................... 110
7.1.1
Cohorte de patients ..................................................... 110
7.1.2
Maladie carcinologique ................................................. 110
7.1.3
Technique opératoire ................................................... 112
7.2 Méthode........................................................................... 112
7.2.1
Reueil des résultats sur dossier ..................................... 112
7.2.2
Recueil de résultats en consultation ............................... 113
7.3 Résultats ......................................................................... 116
7.3.1
Cohorte de patients ..................................................... 116
7.3.2
Maladie carcinologique ................................................. 116
7
7.3.3
Technique opératoire ................................................... 119
7.3.4
Données peropératoires ............................................... 119
7.3.5
Complications postopératoires ...................................... 122
7.3.6
Alimentation ............................................................... 125
7.3.7
Evaluation du site donneur ........................................... 125
7.3.8
Résultats fonctionnels .................................................. 128
7.3.9
Qualité de vie ............................................................. 132
8 Discussion ............................................................................ 141
8.1 Etudes sur les résultats fonctionnels ............................... 141
8.2 Etudes sur la qualité de vie après glossectomie............... 144
8.2.1
Qualité de vie et chirurgie ............................................ 145
8.2.2
Qualité de vie et radiothérapie ...................................... 146
8.2.3
Qualité de vie et chimiothérapie .................................... 146
8.2.4
Qualité de vie et facteurs psychologiques ....................... 147
8.2.5
Qualité de vie et facteurs sociologiques et économiques... 147
8.3 Séquelles du site donneur ............................................... 148
8.4 Intérêts du lambeau anterolateral de cuisse ................... 149
8.5 Que faire en l’absence de perforante satisfaisante ? ....... 149
8.6 Choix de la méthode de reconstruction et place du lambeau
antérolatéral de cuisse ............................................................ 150
8.6.1
Glossectomies marginales : groupe 1 (TM < ¼ et TB < ¼)150
8.6.2
Groupe 2 (TM ½) ........................................................ 150
8.6.3
Glossectomies totales de langue mobile : groupe 3 (TM nf)
152
8.6.4
Hémiglossectomie et glossectomie subtotale : groupe 4 (TB
½) et groupe 5 (TB ¾) ............................................................ 152
8.6.5
Glossectomies totales : TG ........................................... 153
9 Conclusion ............................................................................ 154
10 Bibliographie ........................................................................ 156
11 Annexes ............................................................................... 164
11.1 Cas cliniques .................................................................... 164
11.1.1 Reconstruction du groupe 3 (TM nf) par un lambeau
antérolatéral de cuisse sensible, selon la technique du triptyque de
cathédrale .............................................................................. 164
11.1.2 Reconstruction groupe 4 (TM ½ + TB ½) par un lambeau
antérolatéral de cuisse sensible, selon la technique du lambeau bifolié
d’Urken 167
11.1.3 Reconstruction TB ¾ par un lambeau antérolatéral de cuisse
sensible 169
11.2 Questionnaire d’évaluation du site donneur .................... 172
11.2.1 Test de la sensibilité du lambeau .................................. 172
11.2.2 Test de la sensibilité de la cuisse controlatérale .............. 172
11.2.3 Evaluation du site donneur ........................................... 173
11.2.4 Questionnaire d’évaluation fonctionnelle ........................ 173
11.3 Questionnaire EORTC QLQ-C30 ........................................ 180
11.4 Questionnaire EORTCS QLQ-H&N35 ................................. 182
11.5 Questionnaire PSS ........................................................... 185
11.5.1 Manger en public ........................................................ 185
8
11.5.2
11.5.3
Intelligibilité de la parole .............................................. 185
Restrictions alimentaires .............................................. 185
9
1
Introduction
La langue est un organe complexe, unique et hautement spécialisé. On
distingue schématiquement deux parties, langue mobile et base de
langue, appartenant à 2 régions anatomiques différentes et qui participent
à des fonctions physiologiques fondamentales comme l’élocution, la
gustation ou la déglutition. Son fonctionnement est intimement lié aux
structures voisines, en particulier le voile du palais et le larynx: elle
constitue un élément clef au sein de plusieurs appareils fonctionnels. La
multiplicité de ses rôles se traduit par une constitution anatomique
complexe qui lui permet d’assurer ses fonctions motrices, sensitives et
sensorielles. Il s’agit probablement de l’organe le plus important de la
cavité buccale, première barrière entre le monde extérieur et l’organisme.
Les cancers de la cavité buccale, qu’ils soient d’origine linguale ou dont
l’extension s’étend à la langue, constituent la principale étiologie des
mutilations de cet organe. Ce sont les cancers les plus fréquents de la
cavité buccale, et ils constituent environ 20% de la totalité des cancers
des voies aéro-digestives supérieures. L’importance de l’exérèse linguale,
associée aux mutilations des organes de voisinages, conditionne le
pronostic fonctionnel et parfois vital. Les résections marginales de la
langue n’entrainent que peu de séquelles et peuvent se passer de
chirurgie réparatrice ou utilisent des procédés de reconstruction simples.
Inversement, les résections dépassant la ligne médiane compromettent la
survie et la qualité de vie du patient, et requièrent des procédés de
reconstruction complexes, faisant appel le plus souvent aux lambeaux
libres. Schématiquement, l’objectif de la chirurgie réparatrice est
d’apporter un bon volume dans la reconstruction de la base de langue et
de permettre la mobilité de la néo langue mobile.
Compte tenu de la complexité anatomique de la langue, il est à l’heure
actuelle illusoire de vouloir la reconstruire ad integrum. L’entrecroisement
des fibres musculaires permettant son extrême mobilité ainsi que sa
richesse sensorielle et sensitive n’ont pas d’équivalent dans le corps
humain. Le chirurgien plasticien doit donc assurer la préservation des
fonctions vitales, en évitant les troubles de la déglutition, et reconstruire
un organe fonctionnel sensible permettant d’assurer une élocution et une
déglutition satisfaisantes. Les lambeaux libres trouvent donc une place de
choix dans les résections importantes de langues, systématisées dans la
classification d’Urken, car ils permettent l’apport d’une grande quantité de
tissus (cutané, graisseux, musculaire ou fascia). Le lambeau le plus utilisé
est un lambeau fascio-cutané, le lambeau antebrachial, pour ses
propriétés plastiques, sa fiabilité vasculaire et la possibilité de le rendre
sensible. Au contraire, les lambeaux musculaires sont moins utilisés car
10
leur volume diminue considérablement en cas de radiothérapie adjuvante.
Cependant, après résection importante de la langue, le lambeau
antebrachial radial ne permet pas d’apporter un volume tissulaire
suffisant, élément clef de la reconstruction linguale, ce qui a poussé à la
recherche d’autres lambeaux libres.
Le lambeau antérolatéral de cuisse a été décrit en 1984 par Song
comme un lambeau septo-cutané, vascularisé par une artère septocutanée directe, issue de la branche descendante de l’artère circonflexe
fémorale latérale. Cependant, il s’est avéré qu’il présentait en réalité une
grande variabilité anatomique vasculaire qui le fît classer comme un
lambeau perforant et fut responsable de son impopularité initiale:
prédominance des perforantes musculo-cutanées, variations de l’origine
de la branche descendante et même absence totale de perforante
vascularisant le lambeau. D’autre part, la plupart des publications initiales
étaient d’origine asiatique, et sa diffusion en occident fût retardée par
plusieurs facteurs. D’une part, par la barrière de la langue et des écoles.
D’autre part et principalement, par la variation du morphotype des
caucasiens, chez qui la dépose d’une surcharge adipeuse sur la face
latérale de la cuisse est plus fréquente que chez les sujets asiatique et
annulait ainsi les avantages décris dans les publications asiatiques en
compliquant la technique de prélèvement. Enfin ce retard à l’adoption de
ce lambeau par les chirurgiens occidentaux s’explique également dans la
différence de morphotype du sujet caucasien par rapport à l’asiatique. La
surcharge cutanéo-adipeuse de la face latérale de la cuisse chez les
premiers ne permit pas de le considérer comme un équivalent du lambeau
antébrachial (alors que les asiatiques le présentaient comme tel) et
compliquait notablement le prélèvement. C’est pourquoi il fallût atteindre
les années 2000 pour que ce lambeau soit accepté par la communauté
scientifique internationale et trouve sa place dans la chirurgie
reconstructrice cervico-faciale. Si son adoption demanda beaucoup de
temps, il bénéficie depuis d’un véritable effet de mode dont l’ampleur est
tout aussi excessive que les réactions de rejet qu’il connu lors de sa
première description. Il n’en demeure pas moins que ce lambeau apporte
des solutions nouvelles au chirurgien reconstructeur et que sa composante
adipeuse, rencontrée chez le sujet caucasien, demande une réflexion au
plasticien occidental afin de déterminer sa place idéale et l’étendue de ses
indications.
C’est ainsi que dans le domaine de la chirurgie reconstructrice de la
langue, notre expérience nous a conduits à conclure que ce lambeau
possède des atouts supplémentaires par rapport au lambeau antebrachial
radial. Il n’est pas question ici d’opposer ces deux lambeaux mais plutôt
de définir la place du lambeau antérolatéral de cuisse dans l’arsenal
thérapeutique du chirurgien plasticien, et d’évaluer les résultats
fonctionnels et la qualité de vie des patients après une reconstruction de
langue.
11
2
La langue
2.1 Anatomie descriptive
L’entrecroisement des fibres musculaires et leur origine ubiquitaire ne
constitue pas une barrière anatomique à la propagation d’une tumeur. Des
fusées néoplasiques peuvent se propager vers le bas (os hyoïde et
larynx), l’avant (apophyses géni mandibulaires) ou l’arrière (apophyse
styloïde).
2.1.1 Morphologie extérieure
Elle est située entre les arcades gingivo-dentaires en avant, la région
palatine au dessus, le pharynx en arrière dont elle forme une partie de la
paroi antérieure et au dessus du plancher de la bouche, de la région sus
hyoïdienne et de l’os hyoïde sur lequel elle s’insère.
Elle est schématiquement divisée en 2 parties : une partie fixe, ou base de
langue, située à la partie postéro-inférieure de l’organe, profondément
enfoncée dans le plancher buccal, attachée à l’os hyoïde en bas, à la
mandibule en avant et aux piliers du voile du palais en arrière. Une partie
mobile, plus étendue, qui constitue le segment antérieur de l’organe : elle
est la seule visible à l’examen et possède 2 faces, 2 bords latéraux, une
pointe et une base.
La face supérieure présente un sillon médian avec de part et d’autre de ce
sillon des papilles d’importance croissante. A l’union des 2/3 antérieur et
du 1/3 postérieur elles deviennent caliciformes et dessinent le V lingual.
Celui-ci sépare le segment buccal, situé en avant, du segment pharyngien.
La face inférieure est revêtue d’une muqueuse plus lisse et plus fine qu’à
la face supérieure. Elle présente elle aussi un sillon médian qui se
prolonge en arrière par le frein muqueux. Celui-ci va se recourber en bas
et en avant et se poursuit à la partie médiane du plancher buccal.
Latéralement, sous la muqueuse, il est possible de visualiser les muscles
génioglosses et les veines ranines.
Les bords latéraux sont arrondis et répondent aux arcades dentaires.
La base de langue, entièrement pharyngée, poursuit la face supérieure à
partir de l’arrière du sommet du V lingual. Sa muqueuse est soulevée par
de nombreux follicules lymphoïdes qui constituent l’amygdale linguale. Elle
constitue ensuite la paroi antérieure de l’oropharynx. Elle répond ensuite à
la face antérieure de l’épiglotte. A sa partie toute inférieure, la base de
langue est rattachée à l’épiglotte par les 3 replis glosso-épiglottiques
médian et latéraux qui soulèvent la muqueuse en formant de part et
12
d’autre de la ligne médiane les 2 fossettes glosso-épiglottiques ou
vallécules.
Figure 1: coupe sagittale de l'extrémité céphalique
1 : Cornet inférieur
2 : Maxillaire
3 : Pilier antérieur du voile du
palais
4 : Muscle génio-glosse
5 : Mandibule
6 : Muscle génio-hyoïdien
7 : Os hyoïde
8 : Epiglotte
16 : pharynx
17 : parois postérieure du
voile
18 : Paroi pharyngée
19 : Axis
20 : Voile du palais
22 : Amygdale pharyngée
23 : Sphénoïde
2.1.2 Constitution anatomique
Il s’agit d’un organe essentiellement musculaire, avec un squelette ostéofibreux, une muqueuse, des vaisseaux et des nerfs.
Le squelette ostéo-fibreux : il est constitué par l’os hyoïde, la membrane
hyo-glossienne et le septum lingual.
L’os hyoïde : il est situé dans la concavité de l’arc mandibulaire, à hauteur
de la 4ème vertèbre cervicale. Il est formé d’un corps antérieur médian,
prolongé à ses 2 extrémités postérieures par 2 apophyses (ou grandes
13
cornes). En dedans de leur base, naissent les petites cornes, presque
verticales, obliques en haut et en arrière.
La membrane hyo-glossienne : il s’agit d’une lame fibreuse qui s’insère en
bas sur l’os hyoïde (entre les 2 petites cornes) et qui se perd
progressivement en haut dans l’épaisseur des masses musculaires de la
langue.
Le septum lingual : lame fibreuse sagittale, elle s’implante en arrière à la
face antérieure de la membrane hyo-glossienne et se termine au niveau
de la pointe de la langue.
2.1.2.1
Les muscles de la langue
Il en existe 17 : 8 muscles pairs et 1 seul impair, le muscle lingual
supérieur. Ils sont tous innervés par le nerf grand hypoglosse (XII) à
l’exception des muscles palato-glosse et stylo-glosse, innervés par le nerf
facial (VII) et du muscle pharyngo-glosse par le nerf glosso-pharyngien
(IX).
Figure 2 : vue sagittale des muscles de la langue
1: Apophyse styloïde
2: Faisceau du muscle constricteur
sup
2’: Muscle constricteur sup
3: Muscle stylo-glosse
4: Muscle lingual supérieur
5 : Muscle hyo-glosse
6 : Muscle génio-hyoïdien
7 : Muscle génio-glosse
8 : Muscle lingual inférieur
9 : Muscle transverse de
langue
10 : Muscle palato-glosse
la
14
4: Nerf palatin postérieur
5: Aponévrose du voile
6: crochet apophyse ptérigoïde
7: Muscle pharyngo-staphylin
8: Muscle palate-glosse
9: Muscle constricteur sup
pharynx
10: Azygos luette
11: Nerf glosso-pharyngien
12: Muscle stylo-glosse
13: Amygdale palatine
14: Face dorsale langue
1 : Muqueuse linguale
2 : Muscle palato-glosse
3 : Muscle lingual supérieur
4 : Fx sup. muscle stylo-glosse
5 : Muscle pharyngo-glosse
6 : Septum lingual
7 : Muscle hyo-glosse (fx sup)
8 : Muscle stylo-glosse
9 : Mandibule
10 : Muscle mylo-hyoïdien
10’ : Muscle génio-glosse
11 : Nerf lingual inférieur
12 : Muscle hyo-glosse (fx inf)
13 : os hyoïde
Figure 3 : vue antérieure des muscles du voile et de la langue
Figure 4 : coupe frontale de la langue
15
Nom
Génioglosse
Lingual
inférieur
Hyo-glosse
Amygdaloglosse
Palatoglosse
Pharyngoglosse
Styloglosse
transverse
Lingual
supérieur
Origine
Apophyse
supérieure
Trajet
géni En éventail
Terminaison
Os hyoïde, muqueuse
dorsale et pointe de
langue
Petite corne de l’os En dehors du génio- Muqueuse de la pointe
hyoïde
glosse
de langue
Os hyoïde
Oblique en haut, en avant Septum lingual
et en dedans. Croise le
génio-glosse
Capsule amygdalienne
Oblique en bas et en Epaisseur de la base
avant
de langue
Pilier antérieur du voile Vertical
Face dorsolatérale de
la langue
Faisceau
du
muscle Oblique en bas et en Bord latéral de la
constricteur
supérieur avant
langue
du larynx
Apophyse styloïde
Oblique en bas et en Bord latéral de la
avant
langue
Septum
Transversal
Base de l’épiglotte et Antéro-postérieur
petites cornes de l’os
hyoïde
Action
Abaisse
la
langue
contre
le
plancher,
ascension du larynx
Abaisseur et rétracteur
Abaisseur et rétracteur
Elévateur de la base de
langue
Elève
et
attire
la
langue en arrière
Attire la langue en
arrière et en haut
Elargit la base et élève
la langue en haut et en
arrière
Muqueuse latérale
Muqueuse dorsale de Abaisse et raccourcit la
la pointe
langue
Tableau 1 : les muscles de la langue
16
2.1.2.2
La muqueuse linguale
Au niveau de la face dorsale de la langue, elle est épaisse et adhérente
aux muscles sous jacents. Au niveau de la base de langue, elle s’amincit
et est séparée du plan musculaire par une couche celluleuse tandis qu’au
niveau de la face inférieure elle devient très mince et transparente par
endroits. Elle est constituée d’un épithélium pavimenteux stratifié et
contient des papilles gustatives à la face dorsale et aux bords de la
langue. Elle contient également de petites glandes linguales de type
salivaire.
2.1.2.3
Vascularisation artérielle
Elle provient de l’artère palatine ascendante, de l’artère pharyngienne et
surtout de l’artère linguale.
Artère palatine ascendante : branche collatérale de l’artère faciale, elle
nait au niveau de la loge sous amygdalienne et remonte vers le voile du
palais entre le stylo-glosse et le stylo-pharyngien. Elle vascularise la partie
latérale de la base de langue.
Artère pharyngienne ascendante : branche de l’artère carotide
externe, elle est plaquée à la paroi pharyngée et donne quelques
collatérales pour la base de la langue.
Artère linguale : elle assure la majeure partie de la vascularisation de la
langue. Elle nait de l’artère carotide externe dans le triangle de Faraboeuf
et se porte en avant et en dedans, à la face externe du constricteur
moyen du pharynx, un peu au dessus de la grande corne de l’os hyoïde.
Elle chemine ensuite avec le nerf hypoglosse (XII), croise le muscle lingual
inférieur et se divise en 2 branches terminales : l’artère sublinguale (qui
vascularise la glande et le frein de la langue) et la ranine (qui s’enfonce
dans l’épaisseur de la langue et vascularise la langue mobile). Elle donne
également une collatérale : l’artère dorsale de la langue qui vascularise la
base de langue, le pilier antérieur du voile et l’épiglotte.
17
Figure 5 : artère linguale et nerfs de la langue
1 : Muscle stylo-pharyngien
2 : Artère dorsale de la langue
3 : Constricteur moyen du pharynx
4 : Nerf hypoglosse (XII)
5 : Artère carotide interne
6 : Artère carotide externe
8 : Artère thyroïdienne supérieure
9 : Artère linguale
10 : Muscle hyo-glosse
11 : Petite corne os hyoïde
12 : Muscle hyo-glosse
2.1.2.4
13 : Rameau hyoïdien artère
linguale
14 : Anastomose lingual /
hypoglosse
15 : Artère sublinguale
16 : Ventre antérieur digastrique
17 : Rameau mentonnier du VII
18 : Rameau génien
19 : Artère du frein de langue
20 : Muscle génio-glosse
21 : artère ranine
23 : Rameau dorso-lingual
Vascularisation veineuse
Elle est constituée par les veines linguales profondes (satellites de
l’artère linguale), les veines ranines (qui se jettent dans le tronc
veineux thyro-linguo-facial) et les veines dorsales.
18
2.1.2.5
Vascularisation lymphatique
Il existe un réseau sous muqueux musculaire qui se draine d’autant
plus haut que le territoire lingual est postérieur. Le territoire médian
se draine aussi bien des 2 côtés. La pointe de langue est drainée
dans le territoire sous mental (groupe Ia), le corps de langue dans
les territoires sous-mandibulaire (groupe Ib) puis jugulo-carotidiens
(groupe IIa).
Figure 6 : vascularisation lymphatique de la langue
1 : Ganglions sous digastriques
(Küttner)
2, 3, 4: Ganglions jugulo-carotidiens
5,6 : Ganglions sous mendibulaires
7 : Ganglions du plancher buccal
8 : Ganglion sous mental
9 : Réseau lymphatique de la pointe
10 : Réseau marginal moyen
11 : Réseau marginal postérieur
12 : Ganglion relais intermédiaire
19
2.1.2.6
Innervation linguale
Elle est motrice, sensitive et sensorielle.
Nerf grand hypoglosse (XII) : il est exclusivement moteur. Dans le
cou, il traverse la région carotidienne en passant entre artère et veine
carotide interne puis chemine avec le bord inférieur du ventre postérieur
du muscle digastrique. Il délimite alors la partie supérieure du triangle de
Faraboeuf. Il pénètre ensuite la région sus hyoïdienne au dessus de la
grande corne de l’os hyoïde, passe au dessus du muscle mylo-hyoïdien et
donne ses branches motrices pour la langue.
Nerf lingual : branche terminale du nerf mandibulaire (V3). Il naît dans
la région ptérygo-maxillaire immédiatement au dessous de la base du
crâne. Il passe ensuite sous l’arcade du muscle constricteur supérieur et
pénètre dans la cavité buccale avec le muscle stylo-hyoïdien. Il décrit
alors une courbe à concavité supérieure, effleure le pôle supérieur de la
glande sous maxillaire, sous croise le canal de Wharton et pénètre dans la
langue dont il innerve la muqueuse située en avant du V lingual. Il reçoit
en cours de route une branche anastomotique du nerf hypoglosse ainsi
qu’une collatérale du nerf facial, la corde du tympan, qui constitue la
racine sensorielle du nerf lingual.
Nerf glosso-pharyngien (IX) : il traverse la base du crane au niveau du
foramen déchiré puis se porte dans l’espace retrostylien, contre la paroi
pharyngée. Il pénètre ensuite la base de langue où il innerve en arrière du
V lingual. Il donne également une anastomose au facial, l’hanse de Haller,
avec des rameaux destinés au muscles stylo et palato-glosse.
Nerf facial : il participe à l’innervation de la langue d’une part par la
corde du tympan (racine sensorielle du nerf lingual) et d’autre part via le
rameau lingual (innervation des muscles stylo et palato-glosse).
Nerf laryngé supérieur : il est purement sensitif et assure l’innervation
de la partie la plus reculée et la plus inférieure de la base de langue, au
niveau des replis glosso-épiglottiques.
20
Figure 7: région du plancher buccal
1 : Langue
2 : Nerf lingual
3 : Nerf alvéolaire inférieur
4 : Muscle mylo-hyoïdien
5 : Artère linguale
6 : Nerf hypoglosse
7 : Canal de Wharton
8 : Muscle génio-glosse
9 : Rameau mentonnier du VII
10 : Ostium
11 : Muqueuse vestibulaire
21
2.2 Physiologie
2.2.1 La phonation
La phonation décrit non seulement l’apparition d’une vibration sonore au
niveau des cordes vocales, mais aussi ses modifications par les cavités
aériennes sus jacentes (ou résonateurs anatomiques), la langue et les
lèvres. Elle comprend donc la transformation de la voix en éléments de la
parole par le biais de plusieurs structures anatomiques, ce qui explique sa
grande variabilité non seulement entre les individus, mais aussi chez un
même individu selon les circonstances physiologiques ou pathologiques.
La phonation est précédée d’une inspiration profonde. Initialement, les
cordes vocales sont accolées l’une à l’autre, ce qui augmente la résistance
à l’écoulement de l’air expiratoire. L’expiration est tout d’abord liée à une
simple mise en jeu des forces élastiques de rappel thoracique, sans
relâchement du diaphragme. Celui-ci se relâche à mesure que les forces
élastiques diminuent. La deuxième phase correspond à la mise en route
des muscles intercostaux internes qui rétrécissent la cage thoracique et
augmentent la pression expiratoire. Enfin, au cours de la troisième phase,
les
muscles
abdominaux
augmentent
encore
cette
pression,
éventuellement associés aux muscles dorsaux qui rigidifient la cage
thoracique.
Les théories sur la vibration vocale dérivent de la théorie myoélastiqueaérodynamique de Van Den Berg. Les cordes vocales sont en position préphonatoire de part et d’autre de la ligne médiane et opposent ainsi une
résistance à l’écoulement de l’air. Le flux expiratoire augmente d’abord la
pression sous glottique puis entraine une vibration des cordes vocales
lorsque la pression de l’air dépasse le seuil de résistance des cordes
vocales (ou pression de fermeture). La fuite d’air vers le haut entraine une
chute de la pression sous glottique et l’élasticité des cordes vocales leur
permet de s’accoler à nouveau sur la ligne médiane. C’est la répétition de
ces cycles qui entraine leur vibration et la production du son. Le réglage
de la hauteur de la voix s’effectue par ajustement de la fréquence de la
vibration, probablement par mise en jeu des muscle crico-thyroïdien (mise
en tension du ligament vocal) et thyro-arythénoïdien (action sur la masse
musculaire de la corde vocale).
Ce son émis par l’organe glottique est ensuite filtré par le tractus vocal qui
sélectionne certaines fréquences.
C’est la forme de ce tractus qui
détermine l’apparition des sons du langage (phonèmes). Ces sons peuvent
22
être modifiés par des manœuvres qui modifient le tractus vocal :
abaissement du larynx, abaissement de la mandibule, obturation légère de
la bouche en arrondissant les lèvres ou position de la langue dans la cavité
buccale.
Ainsi, dans la phonétique articulatoire classique, les voyelles sont décrites
en fonction de la position haute ou basse de la langue, ainsi que de sa
position reculée ou avancée. Pour le /a/, la langue est basse et reculée,
pour le /i/, elle est haute et avancée et pour le /u/, elle est haute et
reculée.
Figure 8 : Positions de la langue lors de la phonation
1 : Phonèmes labiaux P, B, F, V, M
2 : Phonèmes dento-palatins T, D, Z, Z, I, E
3 : Phonèmes vélaires K, G, CH, J, O, OU, AN,
ON, IN, UN
Les ajustements articulatoires sont effectués en pré-phonatoire et lors de
l’émission sonore. L’ajustement pré-phonatoire est indépendant du
contrôle audio-phonatoire : il est d’origine corticale et dépend d’arcs
réflexes proprioceptifs, en particulier d’origine laryngée mais aussi
abdominale, thoracique, cervicale et linguale.
Il existe plusieurs techniques pour analyser la parole : l’analyse
subjective, qui sera réalisée dans ce travail, peut se faire de manière
globale, par analyse de l’intelligibilité de la parole, ou de manière plus
précise par analyse de l’intelligibilité des phonèmes.
23
2.2.2 La gustation
Le goût est une sensation permettant d’apprécier la sapidité d’une
substance alimentaire. Il existe classiquement 4 types de saveurs
élémentaires (sucré, salé, amer, acide) auxquelles on rajoute l’umami
(terminologie japonaise) qui caractérise la saveur du glutamate. La
sapidité d’une saveur ne peut être perçue qu’à l’état liquide, c'est-à-dire
dissoute dans un liquide ou dans la salive : c’est la condition indispensable
pour que les molécules soient véhiculées vers les récepteurs gustatifs.
Les récepteurs gustatifs sont situés en majorité sur la langue (80%). La
quasi totalité de ces récepteurs sont situés dans l’épithélium des papilles
gustatives fongiformes (face dorsale et pointe de la langue), circumvallées
(zone de jonction linguale) et foliées (bord de la langue, au niveau du V
lingual). Leur répartition est inégale : les 2/3 antérieur de la langue sont
constitués majoritairement de récepteurs sucré / salé, tandis que le 1/3
postérieur est riche en récepteurs amer. La réception acide est
préférentiellement extra-linguale, vélaire.
1
2
3
4
5
:
:
:
:
:
Zone amère
Zone salée
Sillon lingual médian
Zone sucrée
Zone acide
Figure 9 : Zones de perception des saveurs
24
A ces informations gustatives, s’ajoutent des informations somesthésiques
(importance de la somesthésie linguopalatine lors de la mastication et du
temps buccal de la déglutition) et olfactives (voie nasale et rétronasale
par reflux choanal des molécules odoriférantes).
La transduction du signal sensoriel est modulée par certains facteurs (âge,
durée du stimulus, composante olfactive,…). L’innervation gustative est
assurée par les fibres gustatives du nerf intermédiaire VII bis et du nerf
glossopharyngien (IX) et vague (X). La composante somesthésique est
véhiculée par les fibres du V, IX et X.
La gustation permet l’appréciation combinée goût / arôme / caractères
physiques.
La palatabilité caractérise la sensation induite par l’ingestion d’un
aliment : plaisir / indifférence / déplaisir.
2.2.3 La mastication et la déglutition
Elle est constituée par l’ensemble des mécanismes qui permet la
progression des aliments de la cavité buccale vers l’estomac(99, 105,
126). Elle comprend donc la préhension des aliments, leur préparation
dans la bouche puis leur propulsion de l’oropharynx et de l’hypopharynx
vers l’œsophage et l’estomac. La déglutition est associée à la protection
des voies respiratoires. Elle met en jeu des mécanismes volontaires et
réflexes.
2.2.3.1
Phase anticipatoire
Les stimuli olfactifs et visuels agissent sur le cortex qui stimule la
salivation et initialise la digestion.
2.2.3.2
Phase labio-buccale
Il s’agit d’un temps préparatoire qui permet la formation d’un bolus
alimentaire homogène. Elle comprend la préhension, l’indentation, la
section et la mastication des solides, l’insalivation et le rassemblement des
aliments dans la cavité buccale. C’est durant cette période que sont
stimulées les glandes salivaires de la cavité buccale, mais aussi le
péristaltisme intestinal et les sécrétions pancréatiques et biliaires. La
salive débute alors la digestion des glucides via l’amylase salivaire.
2.2.3.3
Phase orale
Elle comporte le transport du bolus alimentaire de la cavité buccale vers le
pharynx, grâce à la propulsion linguale. Celui-ci est plaqué contre le palais
dur par la face dorsale de la langue et est ensuite propulsé à travers
25
l’isthme du gosier. La pression linguale est maximale au niveau de la
partie antéro-médiane du palais dur puis elle se déplace à sa partie
antéro-latérale, médiane et enfin postéro-médiane. Cette force est
développée par les 2/3 antérieurs de la langue et non par la base de la
langue. Elle est accrue avec la viscosité du bol alimentaire, mais pas avec
son volume.
La fin de cette phase orale est marquée par la fermeture du voile du palais
(sous contrôle du muscle élévateur du palais).
2.2.3.4
Phase pharyngo-laryngo-oesophagienne
Il s’agit du temps réflexe pharyngé de la déglutition. Elle dure environ 1
seconde et comprend des mécanismes de propulsion du bol alimentaire et
de protection des voies aériennes supérieures.
La propulsion du bolus alimentaire est assurée par la contraction
pharyngée : la contraction du muscle stylo-pharyngien entraine un
raccourcissement longitudinal du pharynx et une ascension du sphincter
inférieur de l’œsophage vers la base de langue, tandis que la mise en jeu
des muscles constricteurs du pharynx entraine une contraction horizontale
du pharynx. Ils se contractent l’un après l’autre (constricteur supérieur
puis moyen et enfin inférieur) ce qui entraine une onde péristaltique qui
achemine le bolus alimentaire hors du pharynx. La contraction du pharynx
associée à la pression exercée par la base de langue et l’ascension du
larynx exerce une pression sur le bolus alimentaire qui est chassé dans les
gouttières pharyngo-laryngées puis vers la bouche oesophagienne. Le
péristaltisme pharyngé est coordonné au péristaltisme oesophagien.
Cette propulsion est associée à des mécanismes de protection qui
permettent d’acheminer le bol alimentaire vers l’œsophage et d’éviter les
fausses routes et les réflux naso-pharyngés :
Fermeture velo-pharyngée qui isole le rhinopharynx et obturation du
cavum par élévation du voile vers l’arrière, au devant de la paroi pharyngé
postérieure, sous l’action des muscles péristaphylins internes, pharyngostaphylins et des constricteurs supérieurs du pharynx.
Occlusion du larynx par fermeture glottique (constriction des muscles
adducteurs, en particulier les muscles thyro-arythénoïdiens), mise en
tension des bandes ventriculaires et élargissement des sinus piriformes
(sous l’action de la bascule de l’épiglotte et de la mise en tension des
replis ary-épiglottiques).
Ascension du larynx par la contraction des muscles sus hyoïdiens (ce qui
ascensionne l’os hyoïde), thyro-hyoïdiens et pharyngo-staphylins
(ascension du cartilage thyroïde). Cette ascension du larynx sous la base
de langue favorise le passage du bol alimentaire dans l’entonnoir
hypopharyngé puis vers la bouche œsophagienne. Elle intervient
également dans le relâchement du sphincter supérieur de l’œsophage.
26
Positionnement de l’épiglotte sur le vestibule laryngé, secondaire à
l’ascension du larynx, le mouvement de la base de langue vers l’arrière, la
contraction des muscles ary-épiglottique et la pression du bol alimentaire.
Cette bascule permet l’écoulement de la salive et la vidange de la stase
valléculaire. Lorsque la viscosité du bolus augmente, le contact entre la
base de langue et la paroi pharyngée postérieure s’accroit.
Enfin, le bolus alimentaire passe à travers le SSO : son relâchement est
secondaire à l’ascension laryngée (qui isole le cartilage cricoïde de la paroi
pharyngée postérieure), la relaxation de ses fibres musculaires et la
pression du bolus.
La déglutition se poursuit par la phase œsophagienne qui ne sera pas
traitée ici.
Il existe plusieurs techniques pour explorer la déglutition :
- Questionnaires : ils permettent d’évaluer la qualité de la déglutition
et le retentissement des troubles sur la qualité de vie des patients.
- Examen clinique : il évalue la posture du patient, la qualité du temps
volontaire oro-buccal, l’ouverture buccale, la continence labiale, la
mastication et le temps pharyngé (ascension laryngée en avant).
- Fibroscopie de la déglutition : lorsque le fibroscope est placé au
niveau du carrefour, elle permet l’étude directe du déclenchement du
temps réflexe, de la propulsion, de la clairance pharyngée, de la
fermeture laryngée, de la coordination de la déglutition et évalue de
façon indirecte la motricité du SSO. Elle peut être couplée à un
enregistrement vidéo de façon a réaliser un examen comparatif
évolutif ou pour étude de la déglutition par d’autres spécialistes. Celleci est réalisée sans anesthésie locale, et au mieux après retrait d’une
sonde nasogastrique ou d’une canule de trachéotomie. La fibroscopie
est réalisée lors d’une déglutition sèche puis avec des aliments de
consistance variable (crème, eau colorée, aliments solides,
chamalows).
- Radiocinéma pharyngo-oesophagien (ou vidéo fluoroscopie) : il
s’agit de l’exploration fonctionnelle de référence. Des clichés de la
déglutition sont réalisés (face, profil +/- oblique antérieur) en cadence
rapide (4 à 10/sec) chez un patient debout qui déglutit des volumes de
plus en plus importants de baryte haute densité (5, 10, 20mL). Cet
examen permet de fournir des données très visuelles des différents
temps de la déglutition, des mécanismes protecteurs, de la
27
coordination de la déglutition et de la fonction du SSO. Elle permet
également de visualiser l’existence et le type de fausses routes. Les
clichés tardifs permettent d’évaluer le volume de stase, et une
radiographie du thorax l’importance de la bronchographie.
D’autres méthodes d’évaluation existent, mais sont moins adaptées à
l’étude de la déglutition après reconstruction de la langue : manométrie
pharyngo-oesophagienne,
radiomanométrie,
transit
pharyngooesophagien, electromyographie du larynx et du pharynx et cinéscintigraphie.
Certaines méthodes peuvent apporter des informations supplémentaires,
mais leur intérêt est encore en cours d’évaluation : ciné-IRM(44) ou
l’enregistrement des bruits de la déglutition.
28
3
Le cancer de la langue
3.1 Généralités
3.1.1 Epidémiologie
Il n’existe pas de registre national colligeant le nombre et le type de
cancer en France. Les données épidémiologiques sont extrapolées à partir
des données nationales de mortalité par cancer (fiches établies par le
médecin constatant le décès, qui n’est pas forcément le médecin référent
du patient, d’où la possibilité d’imprécision dans le remplissage de cette
fiche), des registres départementaux des cas de cancers diagnostiqués
dans 12 départements français, soit 11,5% de la population (réseau
Francim) et du chiffre des patients reconnus en maladie longue durée dont
le cancer. Des extrapolations sont ensuite réalisées à l’échelle nationale.
Les chiffres publiés en 2002, évaluent l’incidence des cancers en France à
134 729 chez l’homme et 105 058 chez la femme. Parmi ceux-ci, 14 926
sont des cancers des VADS chez l’homme (soit 32,2/100 000), et 2001
chez la femme (soit 4,7/100 000). Ils ont été responsables de 6 671 décès
chez l’homme et 857 chez la femme.
Les cancers de la langue représentent chez l’homme 1 725 nouveaux cas,
pour 837 décès et chez la femme 259 nouveaux cas pour 151 décès.
L’incidence de ces cancers est en nette baisse chez l’homme, mais elle a
progressé chez la femme. Les chiffres de la mortalité sont stables chez la
femme et en baisse chez l’homme.
En Europe, la France a le deuxième taux d’incidence des cancers des
VADS, avec 37 nouveaux cas pour 100000 habitants, derrière la Hongrie
(50/100 000hbts).
Dans le monde, les comparaisons sont difficiles du fait de la difficulté du
recueil des données épidémiologiques. La publication Cancer Incidence in
Five Continents(104) qui recense 184 populations retrouve une plus forte
incidence des cancers de la langue, de l’oropharynx et de l’hypopharynx
en France.
3.1.2 Etiologies
Les agents étiologiques sont nombreux dans les cancers des VADS,
certains plus spécifiques à certaines localisations.
29
3.1.2.1
Tabac
Le rôle carcinogène du tabac dans les VADS est établit depuis plus de 50
ans de façon statistiquement significative.
Il existe plusieurs variétés de feuilles de tabac. Les tabacs à fumer sont
constitués de plusieurs espèces auxquelles on rajoute des additifs leur
conférant alors un arome spécifique. La toxicité du tabac est donc
variable. C’est la combustion incomplète du tabac qui crée la fumée de
cigarette : celle-ci contient de nombreuses substances, que l’on peut
schématiquement séparer en 4 groupes :
- La nicotine, responsable du phénomène d’accoutumance.
- Le monoxyde de carbone.
- Les irritants : phénols, aldéhydes, acroléine.
- Les hydrocarbures aromatiques polycycliques, en particulier le 3-4
benzopyrène. Cette substance cancérigène se retrouve en proportion
variable dans les mélanges de tabac, allant d’un facteur 1 à 10.
Le tabagisme actif porte le risque à 1,52 pour une consommation
journalière de 20 cigarettes/jour et à 2,43 au dela de 40 cigarettes/jour.
La poursuite de l’intoxication tabagique après guérison d’un premier
cancer des VADS accroit le risque d’apparition d’un second cancer des
VADS : le risque est de 18% après sevrage, contre 30% en cas de
poursuite(119).
Le tabagisme passif est également incriminé : le risque carcinogène pour
un conjoint non fumeur est de 3 par rapport à un sujet témoin.
Dans toutes les études épidémiologiques, le risque est accrut par la durée
et la quantité de l’intoxication tabagique : le seuil critique se situe environ
à 20 paquets/année. D’autres facteurs entrent en jeu : l’inhalation de la
fumée de cigarette, le type de tabac (le brun est plus toxique), le filtre
(dont le rôle est controversé) et la longueur du mégot.
La cigarette est plus toxique que la pipe et le cigare (présence de papier à
rouler, température de combustion plus élevée). La cigarette roulée à la
main entraine un risque double par rapport aux cigarettes industrielles. Le
tabac à chiquer, ou à priser, est moins toxique pour les VADS, mais
entraine des cancers des lèvres et de la face interne des joues, en
particulier lorsqu’il est associé à de la noix de bétel (Inde et Sud Est
asiatique).
30
Au total, chez les patients présentant un cancer des VADS :
- La durée du tabagisme est supérieure à 20 ans dans 95% des cas.
- Le pourcentage des non fumeurs est inférieur à 5%.
- Alors qu’il était classiquement innocenté dans la survenue d’un cancer
du naso-pharynx ou des structures sinusiennes, le rapport de l’IARC de
2004 confirme son implication.
Les politiques de prévention gouvernementales, en particulier aux EtatsUnis, ont permis de réduire la proportion des usagers chez les 18-75 ans,
en particulier après 45 ans. Les hommes restent plus souvent fumeurs
que les femmes, bien que l’incidence du tabagisme chez celles-ci soit en
légère augmentation.
3.1.2.2
Alcool
Le risque de cancer de l’oropharynx est 6 fois plus élevé chez les buveurs
excessifs que chez les patients abstinents. L’alcool seul n’induit pas de
cancer : il possède un rôle de cocarcinogène, en synergie avec le tabac.
- Il est solvant des produits cancérigènes du tabac et favorise la
pénétration de ces produits.
- Il peut être associé à des produits carcinogènes,
nitrosamines dans la bière.
comme
les
- Il perturbe les systèmes enzymatiques, comme les cytochromes P450.
- Il irrite les muqueuses des VADS ce qui diminue une diminution de leur
protection par la salive.
- Il induit des déficiences nutritionnelles dont l’impact sera étudié par la
suite.
Toutes les boissons alcoolisées sont néfastes lorsqu’elles sont
consommées de façon importante. Les alcools blancs (vodka, gin) seraient
moins nocifs que les alcools bruns (whisky, rhum, cognac) car moins
riches en esters et acétaldéhyde. Les régions viticoles (Bordelais,
Bourgogne, Languedoc, Côtes-du-rhône) sont des régions ou la fréquence
des cancers des VADS est moins importante.
Les actions de santé publique (loi Evin) ont permis de diminuer la
consommation d’alcool en France (passant de 26litres d’alcool par an en
1962 à 10litres par an en 2004).
31
3.1.2.3
Facteurs nutritionnels
- Déficit en fer : des modifications histologiques de la muqueuse de la
cavité buccale ont été rapportées secondairement à une carence
martiale, qui favoriserait l’action des facteurs carcinogènes.
- Carences vitaminiques : qu’elles soient spontanées ou secondaires à
la consommation d’alcool, elles favorisent la survenue des cancers, en
particulier le déficit en vitamine C et en vitamine A.
- Facteurs viraux : le papillomavirus.
Son rôle carcinogène dans la survenue du cancer du col utérin est déjà
établit, justifiant une vaccination préventive chez les jeunes filles.
Son implication dans les cancers des VADS (cavité orale et amygdale
palatine) est plus récente et concerne l’HPV-18 et surtout l’HPV-16. Ils
agiraient en entrainant une mutation du gène de PRb et de P53 par
action de l’oncoprotéine E6 etE7(145). Ce tropisme pour l’amygdale
serait expliqué par sa richesse en tissu lymphoïde et sa grande surface
muqueuse, avec de nombreuses cryptes(75).
En pratique, il est indispensable de faire des recherches virales
lorsqu’il existe un cancer de la cavité buccale ou de l’amygdale de type
épidermoïde chez un patient sans facteur de risque (banque
systématique à l’IGR). Le pronostic des cancers liés au papillomavirus
est meilleur.
3.1.2.4
Autres facteurs associés
La consommation de marijuana favoriserait les cancers de la langue
mobile. On retrouve dans sa fumée certains facteurs carcinogènes de la
fumée du tabac, mais en quantités plus importantes.
Les traitements immunosuppresseurs chez les patients greffés.
Les syndromes de déficits immunitaires congénitaux ou acquis. Les
cancers oro-pharyngés surviennent plus fréquemment chez les patients
infectés par le VIH que dans la population générale. Elle serait expliqué
par l’association de l’infection VIH et HPV, en particulier HPV-16.
Radiations ionisantes : l’histologie est alors un sarcome conjonctif, 15 à
20 ans après l’irradiation.
32
Facteurs génétiques :
Tous les consommateurs assidus de tabac ne développent pas de cancer
des VADS. De façon plus générale, il existe des prédispositions génétiques
aux cancers qui expliquent la pénétrance variable dans les populations à
risque, voire l’apparition d’un cancer en l’absence de facteur de risque.
- Les prédispositions génétiques majeures au cancer : syndromes
héréditaires et formes familiales.
- Les prédispositions génétiques mineures au cancer : elles mettent en
jeu des gènes avec faible pénétrance qui expliquent l’absence de
tableau familial évident. Ces facteurs mineurs modulent probablement
l’influence de l’environnement sur l’organisme. Certaines anomalies
génétiques sont connues dans les cancers des VADS : gène PRAD1,
gène suppresseur de tumeurs RB ou de P53, oncogène MDM2, RAS ou
c-Myc.
3.1.3 Examen de la cavité orale
La cavité orale et l’oropharynx sont facilement accessibles à l’examen
visuel et au palper digital. Il s’effectue à l’aide d’un bon éclairage frontal,
d’abaisse langue en bois ou en métal et est éventuellement facilité par
une anesthésie locale à la xylocaïne en cas d’hyper réflexivité glosso-velopharyngée. Le retrait de toute prothèse amovible ou dentier est
indispensable.
L’examen se déroule de façon systématique, région par région, des lèvres
à la paroi pharyngée postérieure, en déplissant la muqueuse, de façon à
pouvoir examiner les nombreux replis muqueux.
L’aspect de la muqueuse linguale, la mobilité de la langue dans tous les
plans, sa consistance à la palpation, la présence d’une éventuelle
ulcération, tuméfaction ou lésion exophytique doit être notée. La base de
langue et les papilles sont également examinées, la partie postérieure de
la base de langue, les vallécules, et l’amygdale linguale sont analysées au
miroir. L’examen de la langue est complété par un examen du plancher
buccal, du sillon pelvilingual et des orifices du canal de Wharton et des
glandes sublinguales.
Cet examen clinique est complété par l’étude des lèvres, de la face interne
des joues, du palais dur et du voile du palais, des dents, de la région des
amygdales palatines, l’étude des nerfs hypoglosse (étude de la protaction
linguale et son axe), la présence du réflexe nauséeux et l’émission de
phonèmes nasonnées (/an/, /a/).
33
Il est complété par la palpation des aires ganglionnaires régionales et
éventuellement par un examen clinique général à la recherche de
métastases.
Cet examen clinique sera suivi par une étude au nasofibroscope (étude
morphologique des fosses nasales, du cavum, du pharynx et du larynx,
étude de la mobilité de la paroi postérieure du pharynx, de la base de
langue, de l’épiglotte, des cordes vocales et des cartilages arythénoïdes)
et une palpation des aires ganglionnaires cervicales.
Les résultats seront notés sur un schéma daté.
L’examen clinique se termine par des biopsies sur les zones suspectes, ce
qui est le plus souvent réalisable sous anesthésie locale dans les cancers
de la langue.
3.1.4 Lésions
précancéreuses épithéliales ou
lésions
épithéliales
précurseurs
Ce sont des altérations épithéliales qui peuvent ou non évoluer vers un
carcinome épidermoïde. Elles sont observées principalement chez les
hommes de plus de 50 ans et sont associées à la consommation alcoolotabagique. Le rôle de la pollution et de l’HPV sont encore discutés. Elles
sont principalement représentées par les leucoplasies et les dysplasies.
L’aspect macroscopique est variable : épithélium d’aspect normal, plaques
blanches plus ou moins surélevées (leucoplasies), tâches rouges saignant
au contact (erythroplasies), zones irrégulières liées à l’épaisseur inégale
de l’épithélium, aspect aminci ou verruqueux. Seule l’analyse histologique
par réalisation d’une biopsie permet de classer ces lésions.
3.1.4.1
Classification OMS des lésions pré-néoplasiques
Hyperplasie épithéliale malpighienne : prolifération épithéliale située
au niveau de la membrane basale (hyperplasie basale) ou des couches
épithéliales supérieures (acanthose). L’architecture est préservée, sans
atypie.
Dysplasie légère : perturbation architecturale limitée au tiers inférieur
de l’épithélium, sans atypie cellulaire.
34
Dysplasie modérée : perturbation de l’architecture cellulaire étendue à
ses 2/3, sans atypie cellulaire.
Dysplasie sévère : présence d’atypies cellulaires, associées à un degré
variable de perturbation de l’architecture.
Carcinome in situ : transformation cellulaire maligne sans invasion de la
membrane basale. Il existe des atypies cellulaires et des mitoses
anormales.
Leucoplasie proliférative verruqueuse (ou leucoplasie orale floride) :
Elle se développe initialement sous la forme d’une leucoplasie puis devient
multifocale et exophytique : elle est à haut risque de transformation
maligne et atteint le plus souvent les femmes au-delà de 60 ans.
Lichen plan oral : le risque de transformation est variable selon les
auteurs, compris entre 0 et 5,6%.
Fibrose orale sous muqueuse : elle est associée à la mastication de
noix de bétel.
Lorsque les lésions dysplasiques sont étendues à une grande partie des
VADS, on parle alors de maladie muqueuse diffuse (ou « field
cancerization »).
Selon la littérature, 1 à 5% des kératoses simples évolueront vers un
carcinome, contre 11 à 18% des hyperplasies avec dysplasies. Le risque
évolue entre 5,7% pour les dysplasies légères et 28,4% pour les
dysplasies sévères.
3.1.5 Les cancers de la langue
3.1.5.1
Carcinome épidermoïde
3.1.5.1.1
Histologie
L’étude histologique simple à l’aide d’une coloration par l’HES (Hématéineéosine-safran) est le plus souvent suffisante.
35
Il s’agit de carcinomes épithéliaux invasifs, avec des degrés de
différenciation variables. Celle-ci est définie par le polymorphisme
nucléaire, l’activité mitotique et le nombre de mitoses anormales. Les
tumeurs indifférenciées présentent des cellules immatures avec mitoses
nombreuses et atypiques.
Leur degré de kératinisation ce ces tumeurs est variable, mais ne
représente pas un caractère pronostic.
Ces tumeurs évoluent sur un mode végétant, infiltrant, voire parfois les
deux. Lorsque les îlots tumoraux sont bien limités, le pronostic est
meilleur. Par contre, le mode infiltrant est caractérisé par des cellules
tumorales isolées ou de petits cordons irréguliers et dispersés sans limite
bien définie. Elles sont alors plus agressives.
Ces lésions sont associées avec une réaction stromale (prolifération de
myofibroblastes et dépôts de matrice extra-cellulaire) et une
néovascularisation.
L’étude histologique recherche des facteurs de mauvais pronostic : embols
néoplasiques, engainements périnerveux, index mitotique élevé,
différenciation cellulaire pauvre, berges chirurgicales envahies.
3.1.5.1.2
Immunohistochimie
Le carcinome épidermoïde exprime des cytokératines, variables selon le
grade histologique et le degré de différenciation. Les carcinomes de bas
grade expriment les medium-high molecular weight cytokératines, ce qui
n’est pas le cas des carcinomes de haut grade qui expriment plutôt la
vimentine.
3.1.5.1.3
Remaniements chromosomiques
Ils sont nombreux, avec des gains en 3q, 5p, 7p, 8q, 11q13 et 20q et des
pertes en 3p, 5q, 8p, 13q, 18q et 21q. Ces altérations n’ont pas été
corrélées avec la présence ou non de métastases, ni avec le profil de
progression tumorale.
L’analyse des mutations et de l’altération de l’expression de gènes isolés
(perte de la région chromosomique 9p21-22 et p16/p14ARF, altération
des anti-oncogènes, activation de proto-oncogènes) a tenté de mettre en
36
évidence des marqueurs prédictifs de l’évolution tumorale. Une étude de
l’expression de p16INK4A par immunohistochimie dans les cancers de la
langue à montré que la perte d’expression de p16INK4A est associé à une
réduction significative de la survie et de l’intervalle libre sans récidive(11).
De même, selon certaines études, la mutation de P53 est associée à un
mauvais pronostic, en particulier chez les patients traités par chimio et/ou
radiothérapie, réduisant la survie et l’intervalle libre sans récidive(17, 47).
Plusieurs études ont montré que l’amplification du gène de la cycline D1
ou qu’une surexpression de la protéine cycline D1 représentaient des
facteurs pronostics péjoratifs(8, 96). Le role de Bcl2 est plus controversé.
3.1.5.1.4
Récepteurs et marqueurs tumoraux
Récepteur à l’EGF : l’expression du récepteur du facteur de croissance
épidermique (EGFR) est augmenté dans la majorité des cancers
épidermoïdes des VADS, et il est associé à des caractères d’agressivité et
de résistance au traitement. Ce récepteur intervient dans de nombreuses
voies de signalisation cellulaire et joue un rôle important dans la
régulation de la prolifération des cellules épithéliales. L’EGF et le TGF-α
(transforming growth factor) sont les 2 ligands de ce récepteur : leur
liaison entraine une activation du récepteur à la tyrosine kinase qui
entraine une cascade de réaction cellulaire. Une surexpression de l’EGRF
entraine ainsi une augmentation de la prolifération cellulaire, de
l’angiogénèse, du pouvoir métastatique, de la survie cellulaire et une
inhibition de l’apoptose. Elle est associée à une diminution de la survie des
patients atteints de carcinome épidermoïde des VADS, principalement lors
d’un traitement par radiothérapie ou chimiothérapie(47, 86).
Marqueurs de prolifération : Ki67 et PCNA (Proliferating Cell Nuclear
Antigen). Une étude immuno-histochimique portant sur 80 patients a
montré que ces marqueurs de prolifération permettent de prédire
l’apparition de métastases ganglionnaires.
D’autres marqueurs ont également été étudiés (métalloprotéases, Cox2,
aneuploïdie, FGF, VEGF). Au total, les altérations chromosomiques et
géniques sont nombreuses dans les carcinomes épidermoïdes des VADS.
L’utilité de ces marqueurs pour le pronostic et le choix de la thérapeutique
est probable, bien que les études actuelles soient parfois contradictoires.
Il existe des essais cliniques en cours, en particulier les molécules antiEGFR, qui ont permi de déboucher sur des protocoles thérapeutiques
tangibles.
37
3.1.5.2
Le carcinome verruqueux (ou
papillomatose orale floride)
tumeur
d’Ackerman
ou
Il s’agit d’un sous type de carcinome épidermoïde, très bien différencié,
qui est le plus souvent présent dans la cavité buccale (15 à 35% des cas).
Il se présente sous la forme d’une tumeur exophytique de croissance
lente, le plus souvent développée sur une lésion leucoplasique. Il
s’observe le plus souvent chez les hommes de 60 à 70 ans.
Histologiquement, il s’agit d’une tumeur malpighienne d’architecture
papillaire. Ces papilles sont de grande taille en « tapis de haute laine »,
recouvertes par une kératose épaisse (en « clocher d’église »). Les
mitoses sont rares et observées au niveau de la couche basale.
Ces carcinomes ne métastasent pas mais peuvent se transformer en
authentique carcinome infiltrant.
3.1.5.3
Carcinome épidermoïde de type basaloïde
Il s’agit d’une variante rare et agressive, de haut grade, avec une double
population cellulaire basaloïde et malpighienne mature. Il s’observe le plus
souvent au niveau de la base de langue et prédomine chez les hommes
entre 60 et 80 ans. Les cellules sont basaloïdes, régulières, à noyau
ovalaire et s’agencent en lobules, bordés par des cellules en palissade. Au
centre des lobules, on trouve des plages de nécrose (aspect de
comédonécrose). Cette composante basaloïde est associée à un
contingent de carcinome épidermoïde conventionnel. Ce type de
carcinome possède un fort pouvoir métastatique, en particulier au
poumon.
3.1.5.4
Carcinome indifférencié de type naso-pharynx (UCNT) ou
lympho-épithélial
Il représente seulement 0,8 à 2% des cancers de la cavité buccale et de
l’oropharynx.
Il s’agit d’un carcinome épidermoïde indifférencié accompagné d’un
infiltrat lympho-plasmocytaire réactif important. Il envahit dans 90% des
cas la loge amygdalienne et la base de langue. L’association avec une
infection par l’EBV est identique avec les tumeurs du nasopharynx.
C’est un carcinome très lymphophile et radiosensible.
Carcinome sarcomatoïde (ou carcinome
pseudosarcome ou carcinosarcome) :
à
cellules
fusiformes
ou
38
Il s’agit d’une variante du carcinome épidermoïde, constitué de cellules
fusiformes, de mauvais pronostic. Il est le plus souvent situé dans le
larynx ou l’hypopharynx. Le diagnostic différentiel est celui du sarcome.
3.1.5.5
Adenocarcinome et tumeur des glandes salivaires accessoires
(carcinome adénoïde kystique)
Il s’agit du second type le plus fréquent des tumeurs malignes des glandes
salivaires : il représente 35 à 50% des tumeurs malignes des glandes
salivaires accessoires et jusqu’à 60% des glandes sublinguales. Elles
présentent fréquemment un envahissement périneural ou périvasculaire.
Ce sont des tumeurs biologiquement aggressives qui peuvent donner des
métastases même des années après l’exérèse de la lésion primitive.
Le pronostic est influencé par la forme histologique de la tumeur, sa taille
et l’importance des marges chirurgicales.
3.1.5.6
Autres
Les autres tumeurs de la langue peuvent être lymphomateuse (base de
langue), sarcome de Kaposi, mélanome muqueux malin, carcinome
épidermoïde acantholytique, carcinome cuniculatum et carcinome adénosquameux, carcinome neuroendocrine, sarcome (en particulier le
rhabdomyosarcome et le leiomyosarcome).
3.2 Diagnostic clinique d’un cancer de la langue
3.2.1 Diagnostic clinique
L’accès facile à la cavité buccale permet aux médecins non spécialistes ou
aux dentistes de poser le diagnostic, ou tout du moins d’orienter le patient
vers une structure adaptée.
Le symptôme fonctionnel le plus souvent mis en avant est la douleur,
parfois irradiée (otalgie réflexe).
Viennent ensuite la sensation de corps étranger, une tuméfaction, une
ulcération, un saignement aux traumatismes mineurs.
Dans les formes évoluées, il peut s’agir d’une adénopathie cervicale, d’un
trismus, d’une fracture mandibulaire, d’une perméation cutanée ou d’une
altération de l’état général.
L’examen clinique recherche alors la localisation de la tumeur et précise
son extension aux structures de voisinage, que ce soit dans la cavité
39
buccale ou les différents étages du pharynx. La palpation et la recherche
d’une induration tissulaire péri-lésionnelle permet d’évaluer l’extension
tumorale en profondeur. Etude de la protraction linguale. La palpation des
aires ganglionnaires recherche une extension locorégionale, et un examen
clinique complet recherche d’éventuelles métastases symptomatiques.
3.2.2 Bilan pré thérapeutique
Il comprend le bilan d’extension locorégionale et à distance de la maladie,
ainsi que le bilan de l’état général du patient (opérabilité, tolérance d’une
éventuelle chimio ou radiothérapie)
3.2.2.1
Panendoscopie
Elle est réalisée sous anesthésie générale : elle complète l’examen
clinique de la cavité buccale, permet la réalisation de biopsies et recherche
un éventuel cancer synchrone de l’ensemble des VADS, de l’œsophage
voire des bronches.
3.2.2.2
TDM & IRM
Les deux principaux examens réalisés sont la tomodensitométrie cervicofaciale et l’IRM cervico-faciale.
Depuis l’avènement des scanners multibarettes, le temps d’acquisition a
considérablement diminué. Une première acquisition est réalisée en
respiration lente ou en apnée, de la base du crâne à la base du cou.
L’examen est ensuite réalisé après injection de produit de contraste. Dans
l’étude des carcinomes épidermoïdes, souvent peu vascularisés, l’injection
de produit de contraste doit être biphasique, c'est-à-dire réalisée en 2
temps séparés par une pause. La première injection permet l’imprégnation
tissulaire, puis la seconde permet l’opacification des axes vasculaires,
juste avant l’acquisition des images. Les coupes natives sont fines
(<1mm) et se chevauchent de 50% de façon à pouvoir réaliser des
reconstructions tridimensionnelles.
Les séquences d’acquisition rapide en pondération T1 et T2 permettent de
réaliser un bilan IRM des VADS et des aires ganglionnaires en moins de 20
minutes. La mandibule est maintenue en place par une sangle durant
l’acquisition. L’exploration tumorale est réalisée en pondération T2 et T1
avant injection puis en pondération T1 après injection (on y associe une
saturation du signal de la graisse ce qui permet d’améliorer la détection
du signal tumoral dans les espaces graisseux). Par rapport au signal
musculaire, la tumeur apparaît en iso ou hyposignal T1 avant injection,
discret hypersignal T2 et se rehausse après injection. L’exploration
40
ganglionnaire est réalisée en pondération T2 avec saturation du signal de
la graisse.
Dans l’étude des tumeurs de la cavité orale, l’IRM est l’examen de choix
car il permet de différencier les 4 principaux types de tissus mous :
muscles, glandes salivaires, muqueuse et espaces graisseux profonds. Par
contre, la TDM et le dentascanner peuvent être utiles pour évaluer
l’atteinte osseuse.
L’étude des différents plans musculaires en IRM permet de repérer le
pédicule vasculo-nerveux lingual (en dehors du plan des muscles génioglosse et génio-hyoïdien) et le pédicule du nerf hypoglosse (sous le plan
du muscle hyo-glosse). Ces plans anatomiques constituent des voies
d’extension tumorale dans le plan sagittal de la langue. L’imagerie doit
également rechercher un franchissement de la ligne médiane (septum),
un envahissement osseuse mandibulaire et évaluer l’envahissement
profond (extension vers la base de langue ou le plancher buccal souvent
sous évalué par l’examen clinique).
Les tumeurs avec extension au plancher antérieure sont responsables
d’une obstruction précoce du canal de Wharton avec sous maxillite
obstructive secondaire mais aussi d’un envahissement rapide des muscles
génio-hyoïdien et génio-glosse.
Les lyses corticales seront mieux étudiées par la
l’envahissement de la médullaire est plus précise à
survenir sans lyse corticale par les collets dentaires en
disparition de l’hypersignal graisseux médullaire en
rehaussé après injection de produit de contraste.
TDM, alors que
l’IRM (elle peut
mauvaise état) :
pondération T1,
Dans l’étude des aires ganglionnaires cervicales, la TDM et l’IRM ont la
même rentabilité diagnostique : elles permettent de mettre en évidence
des adénopathies infracliniques, mais les micrométastases restent
insuffisamment dépistées, y compris avec l’emploi des produits de
contraste. Le bilan d’imagerie des aires ganglionnaires ne permet donc
pas de se passer du curage diagnostique du premier relais dans la plupart
des localisations, ou selon les centres, de la réalisation de la technique du
ganglion sentinelle.
41
Les critères d’atteinte ganglionnaire en TDM et IRM sont identiques :
- Ganglions hétérogènes, même de petite taille.
- Ganglions à contours irréguliers ou avec densification de la graisse
périphérique (suspects de rupture capsulaire).
- Ganglions de petite taille ayant perdu leur caractère réniforme et
oblong (rapport grand axe/ petit axe < 2).
- Ganglions de grand taille (petit axe transverse > 1cm
élargissement > 1,2cm pour les ganglions sous digastriques).
ou
L’imagerie permet donc le bilan du nombre, de la taille et de la répartition
des adénopathies cervicales, ce qui permet de déterminer le N de la
classification TNM.
3.2.2.3
TEP-FDG
Le TEP-FDG (Tomographie par Emission de Positons au Fluoro-2-déoxy-DGlucose)
reflète
l’activité
métabolique
des
tissus,
et
fixe
préférentiellement sur les tissus cancéreux qui présentent un métabolisme
anaérobie prédominant. Ceux-ci apparaissent sous la forme d’un foyer
hyperfixant. Cependant, sa résolution spatiale est faible, même lorsqu’elle
est couplée à un TDM, et la taille tumorale doit être au moins de 6 mm.
D’autre part, il existe de nombreux faux positifs du fait de son manque de
spécificité (en particulier lorsqu’il existe des foyers inflammatoires ou
infectieux non tumoraux).
Les indications de la TEP-FDG sont définies dans les SOR :
- Caractérisation des tumeurs des VADS et d’un éventuel second cancer
(niveau de preuve B2).
- Recherche d’une tumeur primitive en cas d’adénopathie métastatique
cervicale sans site primitif connu (niveau de preuve C).
- Bilan d’extension d’un cancer des VADS non traité (niveau de preuve
B2).
- Evaluation de la réponse thérapeutique des cancers des VADS (niveau
de preuve B2).
- Détection des récidives d’un cancer des VADS (niveau de preuve B2).
42
La TEP-FDG peut également être utile lors de la réalisation de la
radiothérapie en modulation d’intensité (IRMT) : elle permet de
déterminer le GTV (Gross Tumor Volume) métabolique, à combiner au
GTV scanographique.
Cet examen se révèle donc particulièrement utile lors du bilan initial des
cancers stade III et IV et lorsque l’on suspecte une dissémination à
distance ou une seconde localisation. Ses indications seront probablement
élargies avec l’utilisation d’autres traceurs, plus spécifiques, en cours
d’études (en particulier le fluoro-éthyl-L-thyrosine, plus spécifique des
carcinomes épidermoïdes, notamment en cas de phénomènes
inflammatoires).
3.2.2.4
Examens complémentaires
Lorsque la TEP-FDG n’est pas disponible, le bilan d’extension est réalisé
par une radiographie pulmonaire. Les autres examens (échographie
abdominale, scintigraphie osseuse et scanner cérébral) sont optionnels
selon les SOR.
Le bilan des axes vasculaires cervicaux et éventuellement des
membres inférieurs lorsqu’une réparation par lambeau libre est envisagée.
L’orthopantomogramme : il permet la remise en état bucco-dentaire
avant radiothérapie.
Bilan de l’état général :
Compte tenu de la forte prévalence de l’intoxication tabagique, voire des
difficultés d’alimentation chez les patients avec un cancer de la langue, un
bilan complet de l’état nutritionnel est indispensable avant la prise en
charge : bilan alimentaire, perte de poids, suppléments caloriques et
protidiques, éventuellement mise en place d’une sonde d’alimentation
nasogastrique ou d’une gastrostomie.
Un sevrage alcoolo-tabagique doit être débuté avant le début du
traitement : le sevrage tabagique améliore les capacités de guérison et
diminue le risque d’infection postopératoire, tandis que le sevrage
alcoolique évite certaines complications neurologiques en postopératoire
(delirium tremens en particulier).
Le bilan préthérapeutique sera complété par l’évaluation des fonctions
hépatique, cardiaque, vasculaire, rénale et pulmonaire.
43
3.2.3 Classification TNM
Après la réalisation de ces examens, il doit être possible de classer le
patient selon la classification TNM (classification internationale proposée
par le chirurgien français Pierre Denoix en 1946, remaniée périodiquement
par l’UICC) :
T0 : pas de tumeur primitive décelable.
Tis : carcinome in situ.
T1 : tumeur < 2cm dans son plus grand axe.
T2 : tumeur dont le grand axe est compris entre 2 et 4cm.
T3 : tumeur > 4cm.
Le stade T4 diffère pour les cancers de la base de langue et les cancers de
la langue mobile.
3.2.3.1
T4 langue mobile
T4a :
- Envahissement de la lèvre, du nerf alvéolaire inférieur, du plancher
buccal ou de la peau.
- Envahissement de la cavité orale, muscles extrinsèques profonds,
sinus maxillaire, peau.
T4b : envahissement de l’espace masticateur, des apophyses ptérygoïdes,
de la base du crâne, de l’artère carotide interne.
3.2.3.2
T4 base de langue
T4a : tumeur envahissant la musculature linguale profonde (génio-glosse,
hyo-glosse, palato-glosse et stylo-glosse), le larynx, le muscle
ptérygoïdien médial, palais, mandibule.
T4b : tumeur envahissant le muscle ptérygoïdien latéral, les apophyses
ptérygoïdes, le rhinopharynx latéral, la base du crâne ou l’artère carotide.
N0 : pas de signe d’atteinte ganglionnaire.
N1 : 1 ganglion homolatéral < 3cm de grand axe.
N2a : 1 ganglion homolatéral de 3 à 6cm.
N2b : ganglions multiples, homolatéraux < 6cm.
N2c : ganglions bilatéraux < 6cm
N3 : ganglion(s) > 6cm.
M0 : absence de métastase à distance.
M1 : présence de métastase à distance.
44
3.3 Place des traitements
3.3.1 Traitement chirurgical
Elle représente le principal traitement des cancers de la langue, avec des
marges de résection d’au moins 5mm. Les différentes techniques et leurs
indications seront développées au chapitre suivant.
-
-
Patients N0 ou N1, elle est associée à un évidemment cervical
fonctionnel homolatéral dans les formes latéralisées, et bilatéral
lorsque la tumeur se rapproche de la ligne médiane. Zones.
Patients N0 âgés : une surveillance simple peut être proposée
(bénéfice / risque).
Patients N2 et N3 : l’évidemment est complet, conservateur ou radical
selon la taille et la fixité des adénopathies et exploration ganglionnaire
controlatérale.
Dans les tumeurs T1 et T2N0, il est possible de réaliser une technique du
ganglion sentinelle de façon à limiter la réalisation d’un évidemment
cervical fonctionnel : le risque de sous évaluer l’envahissement
ganglionnaire (understaging) des cancers de la langue lors du bilan
clinique et radiologique conventionnel dans les tumeurs T1 est de 13% et
de 34% dans les lésions T2. Le repérage du ganglion sentinelle est réalisé
en préopératoire par lymphoscintigraphie puis repéré en per-opératoire
par une gamma caméra. L’examen extemporané du ou des ganglions
sentinelles permet de déterminer en per-opératoire s’il faut réaliser un
évidemment ganglionnaire cervical complet ou non.
Cette exérèse carcinologique sera suivie par une chirurgie reconstructrice
lorsque la perte de substance entraine des séquelles fonctionnelles
importantes. Les différentes techniques de reconstruction seront abordées
ultérieurement.
La pièce opératoire sera ensuite orientée, éventuellement accompagnée
de recoupes des marges d’exérèse, et fera ensuite l’objet d’un examen
histologique. Celui-ci détermine la nature de l’exérèse (complète, reliquat
microscopique ou macroscopique) et recherche des facteurs histologiques
de mauvais pronostic : embols néoplasiques vasculaires et lymphatiques,
engainements périnerveux, index mitotique élevé, différenciation cellulaire
pauvre, berges chirurgicales envahies.
L’étude de l’évidemment ganglionnaire permet de déterminer le nombre
de ganglions envahis et recherche également certains facteurs de mauvais
pronostic : atteinte de plus de 3 ganglions et rupture capsulaire.
45
3.3.2 Radiothérapie
La radiothérapie conventionnelle utilise les photons X des accélérateurs de
particules de 4 à 6 MeV ou les photons gamma du cobalt. Les doses
utilisées vont de 60 à 75 Gy, à raison de 5 séances de 1,2 à 2 Gy par
semaine, sur la tumeur et/ou les ganglions. Une surimpression
ganglionnaire peut être réalisée sur une adénopathie (ou concomitant
boost).
De
nouvelles
modalités
d’irradiation
sont
apparues :
hyperfractionnement (qui consiste à diminuer la dose par fraction et à
augmenter le nombre de fractions de façon à protéger de façon relative
les cellules saines) et radiothérapie accélérée (de façon à limiter les
phénomènes de repopulation tumorale pour des lésions à renouvellement
rapide).
La radiothérapie par modulation d’intensité (IMRT) est une technique plus
récente qui permet de délivrer la dose au volume cible avec une meilleure
conformation des faisceaux et en variant l’intensité émise à l’intérieur de
chaque faisceau. Elle permet la préservation du tissu sain avoisinant (en
particulier les glandes salivaires) et permet aussi d’augmenter et/ ou de
mieux distribuer la dose délivrée au volume cible.
-
-
-
Tumeurs T1 et T2 < 3cm : radiothérapie postopératoire en cas de
facteurs de mauvais pronostics à l’étude histologique (55Gy sur le lit
tumoral). En cas de résection histologiquement insuffisante et reprise
chirurgicale non réalisable, l’irradiation est de 70Gy sur le lit tumoral.
Tumeurs T2 > 3cm, T3 et T4 : radiothérapie postopératoire de 55Gy
sur le lit tumoral.
Adénopathies N0 et N1 : radiothérapie postopératoire en cas de
facteurs de mauvais pronostic histologiques : 45Gy sur les territoires
non envahis, 55Gy sur les chaines envahies et complément de 10Gy
en cas de rupture capsulaire.
Adénopathies N2 et N3 : radiothérapie postopératoire systématique
selon les mêmes modalités.
Dans certains cas, elle peut constituer le traitement de la maladie,
associée éventuellement à une chimiothérapie.
Elle présente un certain nombre de complications :
-
-
Précoces : radiomucite de gravité variable, pouvant justifier une
alimentation entérale transitoire ou définitive, dysgueusie, épithélite,
hyposialie, xérostomie. Ces complications sont liées à l’atteinte des
glandes salivaires, ce qui entraine des perturbations importantes de
l’équilibre biochimique et bactériologique de la cavité buccale.
Radiodermite de gravité variable.
Tardives : caries dentaires, limitation de l’ouverture buccale (fibrose
des
muscles
masticateurs),
xérostomie,
hypothyroïdie
ou
46
ostéoradionécrose mandibulaire, la plus grave des complications
tardives.
3.3.3 Chimiothérapie
Elle peut être utilisée en traitement d’induction (chimiothérapie néoadjuvante), en postopératoire (concomitante d’une radiothérapie), en
traitement palliatif (récidive tumorale non opérable ou présence de
métastases) ou concomitante d’une radiothérapie exclusive.
3.3.3.1
Chimiothérapie néo-adjuvante
L’association cisplatine, 5-FU et Taxotère semble être le protocole de
référence en cas d’indication d’une chimiothérapie d’induction ou face à un
cancer à cinétique de prolifération rapide ou à risque d’évolution
métastatique majeur (envahissement ganglionnaire important et bas
situé).
3.3.3.2
Chimiothérapie concomitante et radiothérapie
Il
n’existe
pas
de
différence
entre
l’administration
d’une
monochimiothérapie ou d’une polychimiothérapie à base de platines, quel
que soit le type de radiothérapie.
Chimiothérapie adjuvante : absence de bénéfice en terme de contrôle
local ou de survie globale.
3.3.3.3
Thérapies ciblées contre l’EGF
En 2006, le cétuximab (Erbitux) a obtenu l’AMM dans le traitement des
cancers des VADS (en association avec la radiothérapie): il s’agit d’un
anticorps monoclonal qui bloque le récepteur à l’EGF dans sa portion
extracellulaire. Le gefitinib (Iressa), qui fonctionne selon le même principe
mais qui bloque le récepteur dans sa portion intracellulaire est en cours
d’essais cliniques.
D’autres anticorps sont en cours d’évaluation (anti-angiogénèse en
particulier).
Au total, les drogues les plus actives sont le méthotrexate, les sels de
platine, les taxanes et le 5-FU. Le cétuximab représente la thérapie ciblée
la plus prometteuse en situation localement avancée, en association avec
la radiothérapie ou en cas de récidive loco-régionale ou métastatique. La
place de la chimiothérapie est prépondérante dans la prise en charge des
carcinomes épidermoïdes localement avancés, notamment en situation
néo-adjuvante et concomitante de la radiothérapie. Le bénéfice en
situation de récidive locorégionale ou métastatique est moins net.
47
3.3.4 Curiethérapie
Le traitement des cancers de la langue par curiethérapie est de moins en
moins utilisé, principalement en raison de ses effets secondaires : douleur,
fasciculations, ostéoradionécrose mandibulaire.
Dans les tumeurs de la langue mobile, on préfère le plus souvent le
traitement chirurgical, qui offre les mêmes possibilités de contrôle
carcinologique, avec des suites plus simples.
Pour les cancers de la base de langue, elle peut être utilisée et doit être
réalisée sous anesthésie générale.
Le contrôle local
3.3.5 Indications
Le choix des traitements est décidé en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) : le patient fait l’objet d’un plan de traitement
personnalisé.
3.3.5.1
Traitement de la tumeur
-
Tumeur Tis : traitement chirurgical seul.
-
Tumeurs T1 et T2 de moins de 3 cm de grand axe : traitement
chirurgical de première intention. La radiothérapie postopératoire ne
sera décidée qu’après étude histologique de la pièce d’exérèse, en cas
de facteurs de mauvais pronostic. On pourra alors y associer une
chimiothérapie concomitante.
Tumeurs T1 et T2 de moins de 3 cm de grand axe peuvent également
être traitées par curiethérapie interstitielle.
-
-
Tumeurs T2 de plus de 3cm de grand axe et T3 : glossectomie
subtotale ou totale. Ces exérèses larges seront dans la mesure du
possible reconstruite par un lambeau libre dans le même temps. Une
radiothérapie postopératoire sera réalisée, éventuellement associée à
une chimiothérapie adjuvante.
-
Tumeurs T4 : elles seront traitées comme les tumeurs T3.
Cependant, en cas de tumeur inextirpable, de contre indication
opératoire ou de refus du patient, on proposera alors au patient une
chimiothérapie néo-adjuvante suivie d’une radiothérapie avec
chimiothérapie concomitante. Le traitement sera d’autant plus
volontiers médical que la tumeur s’étend à l’épiglotte ou au larynx.
48
3.3.5.2
Traitement des aires ganglionnaires
-
Aires ganglionnaires N0 et N1 : évidemment ganglionnaire cervical
homolatéral ou bilatéral selon la localisation de la tumeur, suivi par
une radiothérapie en cas de facteurs de mauvais pronostic à l’examen
histologique, éventuellement associée à une chimiothérapie adjuvante.
-
Aires ganglionnaires N2 et N3 : évidemment ganglionnaire bilatéral
suivi de radiothérapie postopératoire systématique, éventuellement
associée à une chimiothérapie adjuvante.
3.3.5.3
Indications de la curiethérapie
Elle peut être utilisée exclusivement ou en association avec la
radiothérapie transcutanée et/ou avec la chirurgie (en particulier pour
traiter les aires ganglionnaires cervicales). Cependant, elle n’est indiquée
que pour les tumeurs bien limitées T1N0 ou T2N0, d’un diamètre
n’excédant pas 3 – 4 cm.
49
4
Techniques chirurgicales
4.1 Glossectomies
La chirurgie à but carcinologique de la langue impose une exérèse avec
des marges macroscopiques larges (1,5 à 2cm), associé à un évidemment
ganglionnaire correspondant au siège de la tumeur, au mieux en
monobloc.
La voie d’abord cutanée est classiquement une cervicotomie horizontale
type Sebileau : elle débute en regard de la mastoïde, passe à 2 cm de
l’angle mandibulaire et remonte vers la symphyse mandibulaire. Celle-ci
peut être complétée un refend vertical de la lèvre inférieure
(mandibulotomie associée) pour permettre une meilleure visualisation de
l’exérèse d’une lésion de la base de la langue. L’incision cutanée peut
également être prolongée par un trait de refend vertical vers la clavicule
pour faciliter le curage ganglionnaire cervical.
Le temps chirurgical débute par le curage ganglionnaire, qui peut être
envoyé à l’examen histologique selon les différents groupes, ou alors
laissé en monobloc avec la pièce d’exérèse.
La voie muqueuse dépend du siège et de l’envahissement de la lésion. Les
petites tumeurs peuvent être retirées par voie buccale (VB). Pour les
exérèses transversales limitées à la langue mobile, éventuellement
étendue au plancher buccal antérieur ou à la mandibule, on peut utiliser
une voie de « pull-through ».
Pour les tumeurs de la base de langue, on utilise le plus souvent une voie
de mandibulotomie (BPVM ou Bucco Pharyngectomie par Voie de
Mandibulotomie ou voie cervico-trans-orale) ou encore BPTM (Bucco
Pharyngectomie Trans Mandibulaire) non interruptrice. Cette voie d’abord
offre une excellente vision de l’oropharynx.
L’extension tumorale latérale vers les muscles ptérygoïdiens ou la
mandibule impose de pratiquer leur exérèse par BPTM (interruptrice). La
perte de substance osseuse n’est pas obligatoirement reconstruite.
L’envahissement antérieur de la mandibule impose de réaliser une
mandibulectomie horizontale non interruptrice ou une ablation de la
symphyse (nécessitant alors une reconstruction osseuse le plus souvent).
50
En dehors du cas particulier d’envahissement des vallécules, on peut
associer à l’exérèse carcinologique une laryngectomie à visée purement
fonctionnelle, pour éviter les fausses routes.
4.2 Séquelles de la glossectomie
Elles sont proportionnelles à l’exérèse linguale mais aussi à l’extension aux
structures de voisinage. On peut distinguer schématiquement les
conséquences liées à la langue mobile et à la base de langue(2, 92).
4.2.1 Exérèse de la langue mobile
-
-
-
Déglutition : la langue mobile joue un rôle fondamental lors de la
phase labio-buccale et orale de la déglutition. Lors d’une résection,
le patient est incapable de garder les aliments dans la cavité
buccale, de les faire circuler lors de la mastication, de les regrouper
pour constituer le bol alimentaire et de le transporter vers l’arrière.
Les aliments sont donc éparpillés dans la cavité buccale, mal
mâchés, créant alors une déglutition fragmentée, prématurée ou au
contraire retardée. L’hygiène buccale est altérée.
Elocution : impossibilité d’émettre les phonèmes labiaux ou
dentopalatins. La consonne la plus touchée est le « T ». Les autres
consonnes antérieures sont le « D » et le « S ».
La sensibilité de la langue jour un rôle très important dans sa
fonction.
Gustation : elle est assurée par le nerf lingual (sucré, salé, acide).
Mécanismes compensatoires : lorsque la perte de substance
dépasse la moitié de la langue mobile, la compensation par la
langue restante n’est pas possible. On constate alors une
compensation par les organes voisins, tels que les muscles
péribuccaux et jugaux, pour faire progresser le bol alimentaire vers
l’arrière. Le patient réalise un nettoyage de la cavité buccale à l’aide
de son doigt ou par ingestion de liquides.
L’élocution est compensée par une augmentation de l’activité des
lèvres, des dents et du palais.
Cependant, les résultats fonctionnels sont largement dépendants du
volume de langue restante et de sa mobilité : lorsque la perte de
substance est supérieure à 50% (contact linguo-palatin insuffisant)
et en l’absence de reconstruction, les résultats fonctionnels de la
glossectomie sont très mauvais.
51
4.2.2 Exérèse de la base de langue
-
-
-
-
Déglutition : de nombreuses études ont souligné l’importance du
volume et de la mobilité de la racine de la langue pour déglutir. La
rétraction de la base de langue entraine un contact avec l’épiglotte
et la paroi postérieure du pharynx, ce qui représente une étape
essentielle de la phase pharyngo-laryngée de la déglutition. C’est
l’atteinte du nerf grand hypoglosse qui est déterminante.
Protection des VAS : ces résections sont parfois associées à des
facteurs aggravants. La lésion des nerfs laryngés supérieurs
(assurant la sensibilité du larynx et participant à l’arc réflexe contre
la déglutition) et la lésion des muscles sus hyoïdiens (qui participent
à la suspension laryngée et à son élévation lors de la déglutition)
constituent un handicap fonctionnel supplémentaire et augmentent
le risque de fausse route.
Elocution : l’incompétence linguo-palatine, liée à la perte de
volume de la base de langue, gène l’élocution des syllabes
postérieures « G,K,Q,R ».
Sensibilité : elle est également fondamentale dans le bon
fonctionnement de la base de langue.
Mécanismes compensatoires : les études dynamiques de la
déglutition chez des patients avec glossectomie totale ont mis en
évidence la persistance d’une pompe de propulsion positive,
suggérant une augmentation de l’activité des muscles buccaux,
palatins et pharyngés postérieurs, permettant une compensation
partielle. D’autre part, la préservation des nerfs laryngés
supérieurs, de l’os hyoïde, de certains muscles sus hyoïdiens (en
particulier les muscles digastriques et stylo-hoïdiens) et des
muscles constricteurs du pharynx permet de conserver une
élévation du larynx.
52
5
Techniques de reconstruction linguale
5.1 Buts de la reconstruction
5.1.1 Assurer la survie du patient
5.1.1.1
Protection des axes vasculaires cervicaux
Les axes vasculaires jugulo-carotidiens sont fréquemment exposés lors
des gestes d’exérèse tumorale.
Le risque d’hémorragie massive par rupture vasculaire, après un
évidement ganglionnaire radical ou une chirurgie de rattrapage, doit être
systématiquement prévenu en protégeant ces vaisseaux par un lambeau
locorégional (le plus souvent par un lambeau de pectoralis major).
L’étanchéité de la cavité orale doit être parfaite afin de prévenir tout
risque de fistule salivaire.
5.1.1.2
Protection des VAS
La liberté des voies aériennes supérieures est assurée en postopératoire
immédiat par la trachéotomie. Elle prévient des risques d’inhalation
salivaire ou de sang, ou d’obstruction haute liée à un œdème important,
un hématome, ou à un lambeau de volume excessif. La trachéotomie est
habituellement transitoire et retirée au cours de la première semaine
postopératoire.
5.1.2 Restaurer la fonction
Il est illusoire de vouloir reconstruire ad integrum une langue : sa haute
spécificité et son anatomie complexe n’ont pas d’équivalent dans le corps
humain. Les résultats de la reconstruction doivent donc être réaliste et les
expectatives du chirurgien et du patient humbles.
5.1.2.1
Reconstruction de langue mobile
L’accent est mis sur la mobilité :
-
Reconstruction du sillon pelvi-lingual de façon à préserver la
mobilité linguale.
Restauration de la morphologie linguale de façon à permettre ses
interactions avec les dents et les lèvres pour la phonation.
53
-
Resensibilisation du lambeau par anastomose nerveuse avec le nerf
lingual.
5.1.2.2
Reconstruction de la base de langue
L’accent est mis sur le volume :
-
Protection des VAS.
Reprise de la déglutition.
Suspension laryngée.
5.2 Principes de la reconstruction
L’importance et le siège de la perte de substance linguale, à laquelle
s’ajoute les résections des tissus de voisinage, conditionne le préjudice
fonctionnel de la chirurgie.
Les qualités requises pour une reconstruction optimale dérivent des
fonctions de la langue :
-
Tissus de revêtement : sensibilité, sensorialité et lubrification.
Muscles de la langue : volume, mobilité et motricité.
Du fait de sa complexité anatomique et fonctionnelle, il est illusoire de
vouloir reconstruire à l’identique une langue à l’aide de tissus autologues.
Faute de mieux, il faut dans la mesure du possible tenter de respecter 4
principes de reconstruction :
5.2.1 Préserver la fonction restante
Lors d’une exérèse carcinologique, la mobilité de la langue restante doit
être préservée. Ainsi, elle ne sera pas utilisée pour combler une perte de
substance et ne sera pas suturée au plancher.
Dans les pertes de substance marginales du bord libre de la langue (TM ou
TB < ¼), la cicatrisation dirigée sera préférable à la réalisation d’un
lambeau local ou loco-régional pédiculé(88, 128) qui peut constituer une
bride et limiter la mobilité linguale.
Dans les pertes de substance atteignant le plancher buccal, une greffe de
peau totale peut être réalisée, de façon à éviter une ankyloglossie lors de
la cicatrisation dirigée.
Ces moyens ne pourront être utilisés qu’en cas de perte de substance peu
importante : la langue restante permet d’assurer convenablement
l’ensemble de ses fonctions, il n’est donc pas nécessaire de compenser la
perte tissulaire à l’aide de lambeaux libres.
54
Lors des reconstructions par lambeaux libres, la préservation de la
fonction restante reste indispensable, mais il faudra également permettre
la mobilité de la portion reconstruite de la langue à l’aide d’artifices
techniques qui seront détaillés. En effet, une reconstruction non mobile
peut brider la langue restante(49).
La stabilité du volume lingual antérieur permet de préserver la phonation
en assurant le contact palatin de la langue mobile.
Le volume de la base de langue protège les VAS et assure une force de
propulsion et une élocution correcte.
Lorsque les impératifs carcinologiques le permettent, la conservation des
nerfs laryngés supérieurs permet une meilleure récupération de la
déglutition(34, 125, 136).
De même, la conservation d’un palais ou d’un pharynx sensible aide à la
récupération fonctionnelle.
5.2.2 Motricité de la reconstruction
Cet impératif découle du précédent.
Une reconstruction linguale de morphologie parfaite mais inerte ne permet
pas d’obtenir des résultats fonctionnels satisfaisants. La motricité de la
langue reconstruite sera assurée par plusieurs moyens :
-
Dans les glossectomies marginales, il faut s’attacher à préserver la
mobilité de la langue restante (« préserver la fonction restante »).
-
Dans les glossectomies subtotales, il faut conserver au minimum
une base de langue fonctionnelle qui permettra de mobiliser un
lambeau inerte (type lambeau fascio-cutané) ou d’aider à la
mobilisation d’un lambeau musculaire revitalisé (type lambeau
musculaire de latissimus dorsi ou rectus abdominis).
Dans les glossectomies totales, il faut assurer une reconstruction à
l’aide d’un lambeau musculaire revitalisé. L’anastomose au nerf
grand hypoglosse est à privilégier.
-
5.2.3 Protéger les organes restants
Lorsque la perte de substance est trop importante, la reconstruction est
indispensable pour protéger les organes de voisinage et leur fonction
(couverture osseuse, protection des voies aériennes, déglutition,
élocution).
55
La suspension laryngée est ainsi incontournable dans les résections larges
de la base de langue : elle protège le larynx des fausses routes et assure
une bonne hauteur antérieure, de façon à faciliter le contact palatolingual. Elle est réalisée le plus souvent longitudinalement par suspension
de l’os hyoïde(46, 136).
En cas d’exposition osseuse, la couverture de la mandibule permet d’éviter
les complications infectieuses mais aussi de prévenir les complications de
la radiothérapie (ostéoradionécrose mandibulaire).
5.2.4 Sensibilité de la reconstruction
Elle permet d’améliorer les résultats fonctionnels de la reconstruction(12,
60, 72, 135).
Chez le sujet sain, l’anesthésie d’une portion de la cavité buccale entraine
des troubles fonctionnels (troubles de la déglutition et de la phonation).
Différentes techniques permettant une reconstruction sensible ont été
utilisées.
56
5.3 Classification d’Urken
S = symphyse
B = body (branche horizontale)
OS
Mandibule
R = Ramus (branche verticale)
C = Condyle
L = Lip (lèvres)
B = Bouche
Muqueuse
SP = Soft Palate (palais mou)
FOM = Floor Of Mouth (plancher buccal) indice A = antérieur et L = latéral
PH = Pharynx
M = Mobile avec indice de taille allant de ¼, ½, ¾, à nf pour non fonctionnel
MOU
Langue = T
B = Base avec indice de taille allant de ¼, ½, ¾, à nf pour non fonctionnel
TG = Total Glossectomy (glossectomie totale)
CH = Cheek (joue)
Peau = C
N = Neck (cou)
M = Menton
57
L = Lèvre
XII = grand hypoglosse
L = Lingual
NERF
Nerf = N
VII = facial
IA = Inferior Alveolar (alvéolaire inférieur)
58
5.4 Techniques chirurgicales
Les techniques de cicatrisation dirigée, les sutures directes, la greffe de
peau et les lambeaux locaux ne seront pas abordés car ils ne font pas
l’objet de ce travail.
5.4.1 Lambeaux pédiculés locaux
Lambeau de FAMM (Facial Artery Musculo Mucosa) et lambeau de
buccinateur : ils sont utiles pour reconstruire une partie du plancher
buccal(6, 106), tout en préservant la mobilité linguale (qui est alors
généralement laissée en cicatrisation dirigée).
Figure 10 : utilisations du lambeau de FAMM
Photo 1 : vues peropératoires d'un lambeau de buccinateur
59
5.4.2 Lambeaux pédiculés cervicaux
Les principaux lambeaux utilisés sont les lambeaux musculaire soushyoïdien et sous mental(84, 101).
5.4.2.1
Lambeau sous hyoïdien
Il a été décrit par Wang en 1979 et la présentation de sa série date de
1986(141).
Dolivet(33) présente les résultats d’une série de lambeaux sous-hyoïdiens
avec une modification de la technique de prélèvement. Ce lambeau
présente pour avantage sa fiabilité, la possibilité d’une suture directe du
site donneur et ses propriétés plastiques (lambeau fin).
Par contre, il peut s’avérer insuffisant pour les pertes de substances plus
importantes, en particulier lorsque la chirurgie est réalisée par une voie de
pull through, contre-indiqué après une radiothérapie de la zone donneuse
(diminution de la fiabilité vasculaire), en cas d’envahissement
ganglionnaire de la région de son pédicule (artère thyroidienne supérieure,
1 cas rapporté par l’auteur) ou en cas d’évidemment cervical radical.
5.4.2.2
Lambeau sous mental
Il a également été utilisé sous forme pédiulé en reconstruction linguale.
Cependant, le pédicule vasculaire du lambeau sous mental est situé dans
les aires de drainage lymphatique cervicales. Par exemple, le pédicule du
lambeau sous mental (artère sous mentale, ou artère de Martin, issue du
pédicule facial) chemine dans les zones 1 et 2 de l’évidemment
ganglionnaire cervical. Il existe donc un risque de laisser au contact du
pédicule des ganglions métastatiques en cas de dissection frileuse de
celui-ci(24).
D’autre part, ces lambeaux ne sont pas sensibles, et ils ne possèdent pas
la plasticité des lambeaux libres.
60
Photo 2 : Reconstruction de la face ventrale de langue (Chow et al.)(24)
5.4.3 Lambeaux pédiculés loco-régionaux
5.4.3.1
Lambeau fascio-cutané deltopectoral
Les grands lambeaux pédiculés utilisés en endobuccal datent du début des
années 60 : le lambeau fascio-cutané deltopectoral est le plus connu(30).
Certains auteurs ont même réalisé une anastomose nerveuse sensitive
pour améliorer les résultats fonctionnels(28).
5.4.3.2
Lambeau musculo-cutané de trapezius
Le lambeau de trapèze a également été utilisé(20, 117). Initialement, le
but de ces lambeaux était la fermeture de la perte de substance orofaciale
pour protéger les pédicules vasculaires cervicaux contre les écoulements
salivaires. C’est à cette époque qu’on était introduites les prothèses
palatines pour compenser le manque de volume de la reconstruction(16,
91).
Cependant, l’amélioration des techniques de prélèvement et une meilleure
connaissance de l’anatomie vasculaire ont permis d’étendre leur
utilisation : ainsi, le lambeau myocutané de trapezius, vascularisé par les
61
branches descendantes de l’artère cervicale transverse, peut être utilisé
pour la reconstruction des défects de la langue(20).
Photo 3 : reconstruction d'une hémilangue molbile par lambeau pédiculé
musculo-cutané de trapezius(20)
62
5.4.3.3
Lambeau musculocutané de pectoralis major
C’est Ariyan, en 1979, qui a décrit ce lambeau dans la reconstruction
linguale(28). C’est un lambeau fiable et facile à prélever(90) mais qui est
peu modelable et dont le volume manque de stabilité dans le temps. Le
pédicule du lambeau peut également constituer une bride, gênant alors la
mobilité linguale. Il a été de moins en moins utilisé en première intention
au profit du lambeau antebrachial, en raison de ses résultats fonctionnels
moins bon(123).
5.4.3.4
Lambeau musculocutané de latissimus dorsi
Chez la femme, il est plus utilisé que le lambeau musculocutané de
pectoralis major en raison de la rançon cicatricielle plus acceptable.
Lorsqu’il est utilisé en version pédiculée, il possède des caractéristiques
similaires aux autres lambeaux pédiculés. Il est le plus souvent utilisé en
chirurgie de sauvetage car il ne permet pas de reconstruction fonctionnelle
de la langue.
Ces lambeaux pédiculés sont parfois associés entre eux, en particulier
avec le lambeau deltopectoral.
Certaines études retrouvent de moins bons résultats fonctionnels et de
moins bons indices de qualité de vie lorsque la reconstruction linguale a
été réalisée à l’aide de lambeaux pédiculés(113, 123, 129). De façon
générale, les lambeaux pédiculés sont de moins en moins utilisés à cause
de leur manque de volume, de leur faible plasticité et de la traction
exercée par le pédicule. Ils conservent des indications chez les patients
qui présentent une contre indication aux lambeaux libres, un terrain
précaire ou en chirurgie de rattrapage.
5.4.4 Lambeaux libres
L’introduction des lambeaux libres a été initialement motivée par la
nécessité de la reconstruction osseuse. Leur utilisation a été élargie à la
reconstruction des tissus mous pour pallier aux insuffisances des
lambeaux pédiculés. Dès 1986, Soutar(122) rapporte une série de 60 cas
de reconstruction intra orale avec un lambeau chinois.
Classiquement, le choix du ou des lambeaux
caractéristiques linguales à reconstruire :
libres
dépend
des
63
5.4.4.1
Goût
Aucun tissu du corps humain n’est capable de reproduire cette
sensorialité. Au vu des techniques actuelles, sa restauration ne fait pas
l’objet d’une reconstruction.
L’allogreffe de langue pourrait être une solution intéressante, mais les
difficultés d’obtention d’un greffon et la nécessité d’un traitement
immunosuppresseur
combiné
avec
une
radiothérapie
et
une
chimiothérapie postopératoire semblent réfuter son utilisation.
Dans l’avenir, seul le génie biomédical (engineering tissulaire) pourrait
offrir une solution de reconstruction plus satisfaisante.
5.4.4.2
Lubrification
L’asialie et la xérostomie sont des effets secondaires de la radiothérapie.
Elles entrainent des dysgueusies et des troubles de la déglutition. Les
lambeaux permettant de rétablir cette fonction sont les lambeaux de
jejunum, de colon et gastro-épiploïques(7, 39).
Le plus utilisé est le lambeau gastro-épiploïque : il a été décrit sous forme
de lambeau libre pour la première fois en 1972, pour la couverture d’une
perte de substance du scalp(89). Son utilisation reste toutefois peu
fréquente : la littérature médicale comporte moins de 100 cas publiés
dans les reconstructions cervico-faciales.
Bien qu’il soit le plus souvent utilisé dans les reconstructions pharyngées
et laryngées (en particulier lors des chirurgies de rattrapage), il est
également employé dans les reconstructions linguales(39, 100). Il est le
seul lambeau à posséder un pouvoir lubrifiant (bien qu’acide), sa surface
de couverture est importante et son long pédicule facilite l’anastomose
microchirurgicale. Cependant, il ne possède aucune motricité et sa
mobilité est limitée.
Il existe un phénomène de réinnervation sensitive spontanée, mais moins
intéressante qu’avec les lambeaux fascio-cutanés(110).
Compte tenu de ces défauts, Sharma a donc associé ce lambeau avec de
la muqueuse gastrique et un lambeau musculaire de gracilis, de façon à
combiner les avantages des 2 reconstructions(118).
64
Figure 11 : Schéma du montage(118)
Photo 4 : résultat(118)
5.4.4.3
Sensibilité
La première publication de reconstruction sensible de la cavité orale a été
réalisée en 1977(28): David a utilisé un lambeau delto-pectoral
resensibilisé par 2 méthodes. La première préserve les rameaux nerveux
sensitifs supraclaviculaires qui innervent la pointe du lambeau tandis que
l’autre consiste à anastomoser ces rameaux nerveux à un nerf sensitif
intra buccal.
65
Soutar(122) est le premier à avoir décrit l’utilisation d’un lambeau
antebrachial sensible dans la reconstruction de l’oropharynx : le patient a
retrouvé une sensibilité lors de la déglutition associée à une gêne rétroauriculaire. L’anastomose nerveuse avait été réalisée entre le nerf cutané
brachial et le nerf grand auriculaire.
Urken en 1992(137) décrit une série de reconstruction mandibulaire et
linguale en associant un lambeau libre de crête iliaque et un lambeau
antebrachial sensible. Malgré un nombre de patients inclus peu important,
il retrouve dans son étude rétrospective un bénéfice fonctionnel lors de
l’utilisation d’un lambeau sensible. Urken améliore sa technique avec le
lambeau antebrachial bilobé(134) et insiste à nouveau sur les bénéfices
fonctionnels des lambeaux sensibles.
Netscher(97)étudie la qualité de l’innervation sensitive chez 12 patients
ayant bénéficié d’une reconstruction linguale avec un lambeau
antebrachial. Seuls 7 lambeaux ont eu une anastomose nerveuse. Bien
que la qualité de la sensibilité soit meilleure dans ces cas la, les 5 autres
lambeaux ont également présenté une sensibilité satisfaisante. Il existe
donc une repousse nerveuse spontanée, chez les patients dont le nerf
lingual a été préservé.
Dans une petite série (8 patients), Loewen(76) a comparé la sensibilité
d’une hémilangue reconstruite avec un lambeau antebrachial sensible
avec une population témoin : la qualité de l’innervation sensitive est
moins bonne et l’auteur rapporte les difficultés rencontrées dans la
mastication et la phonation à cette différence de sensibilité. Cependant,
l’auteur n’a pas pris en compte le volume de langue reconstruite, élément
fondamental lors de la déglutition.
Cordeiro, chez 66 patients sains, retrouve une baisse de la sensibilité intra
orale chez les patients âgés et les patients tabagiques(25). Il a également
montré que nerf le plus performant pour l’anastomose nerveuse est le nerf
lingual. La sensibilité du lambeau peut parfois être plus fine que la
sensibilité initiale au niveau de la zone donneuse, probablement en raison
de la plus grande projection corticale du nerf receveur.
Par contre, la radiothérapie postopératoire affecte la qualité de la
réinnervation sensitive(5).
Santamaria(111) a évalué les différents nerfs receveurs peuvant être
utilisés : nerf alvéolaire inférieur, nerf grand auriculaire ou encore une
branche du plexus cervical superficiel.
Schultes(114) a publié un cas clinique avec une technique de
reconstruction linguale par lambeau libre sensible musculo-cutané de
latissimus dorsi, qui présente une sensibilité discriminative et calorique à
9 mois postopératoire.
66
Ainsi, bien que la sensibilité linguale soit diminuée dans la population à
risque de carcinome épidermoïde lingual et qu’il existe un phénomène de
ré-innervation sensitive des lambeaux en l’absence d’anastomose
nerveuse sensitive, l’utilisation des lambeaux sensibles avec anastomose
nerveuse apporte un bénéfice fonctionnel lors de la reconstruction(12, 60,
72, 135). Cependant, les principales études sont rétrospectives et
comportent de faibles cohortes.
La plupart des lambeaux peuvent être resensibilisés : antebrachial(97,
111, 134, 137), anterolatéral de cuisse(107), latissimus dorsi(114), fascia
lata(23), antebrachial cubital, face externe de bras, grand droit de
l’abdomen(87).
5.4.4.4
Volume
L’importance de l’obtention d’un bon volume lingual découle naturellement
de la physiologie de la déglutition et de l’élocution. Elle est
particulièrement importante dans les reconstructions de la base de
langue(59).
Les lambeaux musculaires sont particulièrement vulnérables au long
cours : on peut estimer qu’entre la dénervation motrice et la radiothérapie
adjuvante, ils perdent 2/3 de leur volume.
Photo 5 : latissimus dorsi avant et après radiothérapie
Dans les lambeaux fascio-cutanés, le volume apporté est déterminé
principalement par la couche hypodermique, stable dans le temps, même
après radiothérapie.
67
5.4.4.5
Motricité
Il est illusoire de chercher à rétablir l’ensemble des mouvements
complexes de la langue, assurés par 17 muscles intriqués. Les muscles
dont nous disposons ne sont composés que de fibres musculaires
unidirectionnelles : les possibilités de mouvements sont donc très limitées.
Les lambeaux musculaires utilisés dans la reconstruction linguale doivent
naturellement être anastomosés avec le nerf moteur de la langue, le nerf
grand hypoglosse (XII). Il est également possible d’y associer une
réinnervation sensitive.
Dans les reconstructions linguales après exérèse importante, le plus
important est de protéger les VADS en évitant les fausses routes puis de
permettre une alimentation et une élocution satisfaisantes.
Il faut alors privilégier la contraction antéro-postérieure qui remplace la
pompe oropharyngée de propulsion, horizontalise l’épiglotte et permet
l’obstruction des voies aériennes supérieures. Le raccourcissement
musculaire augmente sa hauteur ce qui permet un contact palatin. D’autre
part, le muscle est tendu entre l’arc mandibulaire et l’os hyoïde, ce qui
permet à la fois de reconstruire le plancher buccal mais aussi de
suspendre le larynx pour lutter contre les fausses routes.
Les 2 lambeaux les plus utilisés sont le muscle grand dorsal et le muscle
grand droit de l’abdomen (qui possède une aponévrose musculaire large
permettant une suspension solide).
68
Lambeau
Goût Lubrification Sensibilité Mobilité Volume Motricité
Suspension
laryngée
Antebrachial
-
-
+++
+++
+
-
-
Latissimus dorsi
-
-
-
++
++
++
++
Rectus abdominis
-
-
++
+
+++
++
+++
Gastro-épiploïque
-
+++
-
+
++
-
-
Fascia lata
-
-
++
+
++
++
+
Antérolatéral de
cuisse
-
-
+++
+++
+++
-
-
Tableau 2 : propriétés des différents lambeaux libres
69
5.5 Indications classiques des lambeaux libres selon la perte
de substance
5.5.1 Glossectomie marginale : groupe 1 (TM < ¼ et TB < ¼)
L’objectif est de lutter contre la formation d’une éventuelle bride limitant
la mobilité de la langue restante.
Nous avons vu que les petites pertes de substances seront préférablement
traitées avec des moyens simples et fiables : cicatrisation dirigée, suture
directe, greffe de peau semi-épaisse, lambeaux locaux.
5.5.2 Hémiglossectomie : groupe 2 (TM ½)
70
L’objectif est de protéger et de respecter la langue restante.
Dans les exérèses TM ½ c’est l’indication type du lambeau
antebrachial sensible : de nombreuses études ont montré sa fiabilité et la
qualité des résultats de la reconstruction. Il est pliable, plastique, peut
être resensibilisé et il possède un pédicule vasculaire long. Même s’il
n’apporte pas un volume tissulaire important, la persistance de
l’hémilangue controlatérale et de la base de langue offre des résultats
fonctionnels satisfaisants(54, 72).
De plus, la réalisation d’un lambeau antebrachial sensible bifolié, artifice
technique décrit par Urken(134), permet de reconstruire également le
plancher buccal, préservant ainsi la mobilité linguale.
Figure 12: prélèvement du lambeau antebrachial sensible bifolié
Figure 13 : mise en place du lambeau et reconstruction d'une
hémilangue et du planher buccal
71
5.5.3 Résection de la totalité de la langue mobile : groupe 3 (TM nf)
L’objectif est de protéger la base de langue et de reconstruire la langue
mobile.
Dans les résections de la totalité de la langue mobile, le lambeau
antebrachial sensible trifolié est classiquement indiqué : il associe 2
lambeaux bifoliés d’Urken et permet donc de reconstruire la langue mobile
et le plancher buccal de part et d’autre de la néo langue mobile. Les
résultats fonctionnels sont souvent médiocres, à cause du volume
tissulaire insuffisant. L’élocution est difficilement compréhensible,
l’alimentation difficile mais les VADS restent protégées grâce à la base de
langue native.
72
5.5.4 Hémiglossectomie et glossectomie subtotale : groupe 4 (TB ½) et
groupe 5 (TB ¾)
L’objectif est de respecter ce qu’il reste de base de langue et de protéger
les VAS.
Dans les résections d’une hémi base de langue (TB ½, le plus souvent
associé à une résection partielle de la langue mobile), le faible volume du
lambeau antebrachial ne permet pas d’obtenir une phonation et une
déglutition satisfaisante, et peut également compromettre la protection
des VADS. Dans les subglossectomies (TB ¾), le volume d’un lambeau
antebrachial sera toujours insuffisant, compromettant également le
résultat fonctionnel et la qualité de vie des patients.
Dans ces indications, ce sont classiquement les lambeaux musculaires qui
sont utilisés, en particulier le latissimus dorsi ou le rectus abdominis avec
revitalisation motrice.
Il est également possible d’employer un lambeau perforant de DIEP,
prélevé de façon verticale.
73
5.5.5 Glossectomies totales : groupe 6 (TG)
L’objectif est de protéger les VAS et de permettre une alimentation et une
élocution satisfaisantes.
Les reconstructions sont alors le plus souvent réalisées avec des lambeaux
musculaires (latissimus dorsi et rectus abdominis).
Figure 14 : reconstruction d'une glossectomie totale avec un lambeau
musculo-cutané de latissimus dorsi
Le lambeau de latissimus dorsi permet ainsi d’apporter en postopératoire
immédiat un bon volume tissulaire, en particulier au niveau de la base de
langue. Il permet également de réaliser une suspension laryngée efficace,
de façon à protéger les VAS. L’inconvénient majeur de ces lambeaux
74
musculaires au long cours est la perte de volume liée à la radiothérapie,
malgré la revitalisation motrice.
Le lambeau de muscle rectus abdominis revitalisé et sensible permet
d’apporter beaucoup de volume à la reconstruction. D’autre part, grâce à
son importante composante fascio-cutanée, il permet une suspension
laryngée de très bonne qualité. Il résiste mieux à la radiothérapie que le
lambeau de latissimus dorsi.
Figure 15 : reconstruction d'une glossectomies totale avec un lambeau
musculo-cutané de rectus abdominis
75
6
Le lambeau antéro-latéral de cuisse
Le lambeau antérolatéral de cuisse (ALC) connait une utilisation
croissante. Ses caractéristiques méritent de le faire figurer dans l’arsenal
thérapeutique du chirurgien plasticien, en particulier lors des
reconstructions linguales. Son introduction modifie considérablement les
indications relatives des lambeaux en fonction des pertes de substances.
Nous verrons donc successivement des rappels sur les lambeaux cutanés
et perforants puis nous détaillerons l’histoire, l’anatomie et les techniques
relatives au lambeau ALC.
6.1 Evolution des lambeaux cutanés
6.1.1 Lambeaux fascio-cutanés
Le concept de lambeau fascio-cutané revient à Ponten(103) en 1981
même si certains lambeaux fascio-cutanés avaient déjà été décrits,
comme par exemple le lambeau delto-pectoral(102) ou le cross-leg(73).
Il montre, au niveau de la jambe, que le rapport longueur / largeur des
lambeaux à pédicule proximal peut atteindre 2,5 sans risque vasculaire de
nécrose. Il suffit pour cela de prélever l’aponévrose jambière avec le
lambeau.
Haertsch(40) précise la même année que le fait d’inclure cette aponévrose
permet de respecter les réseaux vasculaires anastomotiques, en
particulier le plexus sus-facial qui est le réseau vasculaire cutané le plus
riche.
Le prélèvement du fascia musculaire sous-jacent à la palette cutané
devient donc une notion capitale car confère au lambeau une sécurité
vasculaire en respectant l’interdépendance des plexus vasculaires cutanés.
Les lambeaux fascio-cutanés sont donc vascularisés par un réseau
vasculaire péri-fascial qui est vascularisé par des artères à destination
cutanée dont Nakajima(94) fait une classification en 1986.
D’après la classification de Nakajima
un lambeau fascio-cutané est
composé de peau et de fascia (compartiments D et F) et est vascularisé,
via le réseau anastomotique péri-fascial, par les 6 types d’artères à
destination cutanée (type A à F).
76
Figure 16: Classification des vaisseaux perforants le fascia profond par
Nakajima(90) en 1986 ; (X) fascia profond ; (S) vaisseau source ; (A) artère
cutanée directe ; (B) artère septo-cutanée directe ; (C) branche cutanée directe
d’un vaisseau musculaire ; (D) branche perforante cutanée d’un vaisseau
musculaire ; (E) perforante septo-cutanée ; (F) perforante musculo-cutanée.
Cormack et lamberty(26) en 1984 font également une classification des
lambeaux fascio-cutanés en fonction des artères les suppléant.
Figure 17: Classification des lambeaux fascio-cutanés par Cormack et
Lamberty(41) en 1984; Type A : lambeaux avec des perforantes multiples et
non identifiées ; Type B : lambeau avec une perforante unique ; Type C :
lambeau avec des perforantes multiples et segmentées, branches d’un unique
vaisseau sous-facial nécessaire à la vitalité du lambeau
77
Figure 18: Classification des lambaux fascio-cutanés par Mathes et Nahai(40)
en 1986 ; Type A : lambeaux avec un pédicule cutané direct ; Type B : lambeau
avec un pédicule septo-cutané ; Type C : lambeau avec un pédicule musculocutané.
En 1987 Taylor et Palmer(127) présentent le concept d’« angiosome » :
c’est une unité anatomique composite, pluri-tissulaire, vascularisé par un
vaisseau principal et correspondant à un territoire cutané unique. Le
territoire cutané de l’angiosome est vascularisé par une artère cutanée
directe. Elle traverse indifférement les septa inter ou intra-musculaires et
le fascia profond, mais elle reste principalement destinée à la peau. Les
artères cutanées indirectes qui traversent le muscle n’ont qu’un rôle
accessoire dans la vascularisation cutanée.
Ce principe d’artères cutanées directes et indirectes était déjà décrit en
1893 par Spalteholz. On peut l’appliquer à la classification de Nakajima :
les artères cutanées directes correspondent aux type A, B, C et E ; et les
artères cutanées indirectes aux types D et F.
Certains auteurs comme Thomas(130) ont tenté d’amincir les lambeaux
cutanés afin d’obtenir de meilleurs résultats esthétiques et fonctionnels
(thin flap). Ils sacrifiaient alors le réseau anastomotique péri-fascial
amoindrissant la perfusion cutanée et donc la fiabilité des lambeaux
cutanés de grande longueur.
Ces lambeaux ont également été décrits à flux rétrograde, notion
débutant avec les lambeaux à méso vasculaire axial comme le lambeau
chinois(120) décrit par Song ou le lambeau péronier au membre
inférieur(21), puis s’appliquant aux lambeaux fascio-cutanés jambiers(38)
basculés à 180° tel le lambeau jambier externe.
Le retour veineux anti-physiologique fut d’abord expliqué par une absence
ou une incompétence des valvules, puis par l’existence de veines
communicantes permettant le passage d’une veine à une autre shuntant
les valvules.
L’essentiel des lambeaux fascio-cutanés décrits l’ont été sous forme
pédiculée. L’avènement des lambeaux libres durant les années 70 et 80 a
limité un temps leur application. Mais ils connaissent actuellement un
regain d’intérêt en s’inscrivant dans une logique de réduction de la
78
technicité des gestes de reconstruction et du temps opératoire, diminuant
donc les risques opératoires chez certains patients polypathologiques.
6.1.2 Lambeaux neurocutanés
Les lambeaux dits « neuro-cutanés » sont des lambeaux axiaux basés sur
les réseaux vasculaires extrinsèques ou intrinsèques des nerfs
périphériques. Taylor a décrit à partir de 1976 les différents types de
vascularisation des nerfs périphériques dans le cadre de leurs transferts
microanastomosés.
La vascularisation extrinsèque du nerf correspond souvent à une artère
unique, qui traverse le fascia profond à proximité du nerf avant de
s’étendre au plan cutané. Le principal rôle de cette artère est de
vasculariser le nerf, et dans une moindre mesure de vasculariser un
territoire cutané.
Les lambeaux neuro-cutanés peuvent ainsi être considérés comme des
lambeaux à artères cutanées indirectes. Les lambeaux fascio-cutanés
« géants » de jambe décrits par Ponten(103) en 1981, et à l’origine des
premières
études anatomiques
de
la
vascularisation
cutanée,
correspondent probablement à ces lambeaux neuro-cutanés.
Figure 19 : classification des nerfs périphériques selon leur vascularisation,
appliquée au transferts libres de nerfs, par Suami et Taylor(124) ; (A) nerf sans
division et vascularisation extrinsèque segmentaire par un vaisseau parallèle ;
(B) nerf avec plusieurs branches de division, mais et vascularisation également
extrinsèque segmentaire par un vaisseau parallèle ; (C) nerf sans division et
vascularisation intrinsèque épineurale longitudinale ; (D) et (E) nerf avec
plusieurs vascularisations segemntaire ou plusieurs divisions.
79
6.1.3 Lambeaux perforants
Un nouveau concept de lambeau fait son apparition en 1986 avec
Kroll(70) qui préleva une palette cutanée dont la vascularisation dépendait
de perforantes musculo-cutanées disséquées. Il réalisa des lambeaux
fascio-cutanés fessiers et paravertébraux
en disséquant les artères
perforantes musculaires qui vascularisent la palette cutanée. Même si la
dissection ne remontait pas jusqu’à l’origine du pédicule les bases
techniques du lambeau perforant étaient posées.
Cinq types de perforantes sont répertoriées selon une version simplifiée
de la classification de Nakajima(94) :
-
-
-
-
Les perforantes directes qui traversent uniquement le fascia profond.
Les perforantes indirectes musculaires qui vascularisent principalement
les tissus sous-cutanés, après avoir traversé le muscle puis le fascia
profond.
Les perforantes indirectes musculaires qui vascularisent principalement
le muscle, mais donnent des branches secondaires aux tissus souscutanés.
Les perforantes indirectes périmysiales qui cheminent à travers les
fibres musculaires dans le périmysium, avant de tranverser le fascia
profond.
Les perforantes indirectes septales qui traversent le septum
intermusculaire avant de franchir le fascia profond.
Figure 20 : schéma des perforantesdirectes et indirectes selon la classification
de Gent en 2001(10) ; (1) perforantes directes traversant uniquement le fascia
profond ; (2) perforantes indirectes musculaires principalement destinées à la
vascularisation cutanée ; (3) perforantes indirectes musculaires principalement
destinées au muscle mais présentant des branches secondaires pour les tissus
sous-cutanés ; (4) perforantes indirectes périmysiales cheminant dans le
périmysium entre les fibres musculaires ; (5) perforantes indirectes septales
traversant le septum inter-musculaire.
Koshima(69) et Soeda proposent en 1989 un lambeau para-ombilical
vascularisé par l’artère épigastrique inférieure profonde pour couvrir des
80
pertes de substances cutanées inguinales. Ce lambeau ressemble au
lambeau de Taylor mais le muscle rectus abdominis n’est pas prélevé. Les
vaisseaux perforants disséqués en intra-musculaire jusqu’à leur origine
permettent d’éviter l’excès de volume dû au muscle et les séquelles
pariétales postopératoires. Ce lambeau fut ensuite prélevé comme
lambeau libre(68) par Koshima.
Il fut baptisé lambeau de DIEP (Deep Inferior Epigastrique Perforator) par
Allen(4) en 1994 qui l’utilisa comme lambeau libre pour la reconstruction
mammaire, indication principale du lambeau. Les lambeaux perforants
sont donc centrés sur des artères perforantes innominées qui sont
disséquées jusqu’au vaisseau de taille plus importante. Ceci présente deux
avantages :
-
Le flux sanguin cutané augmente après ligature des branches
musculaires collatérales des artères perforantes musculo-cutanées.
Le nombre de sites donneurs peut être augmenté considérablement si
l’on considère les 374 artères à destination cutanée de Taylor.
Ils constituent une avancée majeure dans la tendance à diminuer les
séquelles du site donneur car :
-
-
Ils permettent d’augmenter potentiellement le nombre de lambeaux
prélevés sur une artère secondaire sans sacrifice de l’axe artériel
principal.
Ils respectent le muscle ainsi disséqué lui conservant toute action
motrice et intégrité (notamment disparition des éventrations pour le
DIEP).
Rapidement le terme de lambeau perforant est devenu un nom commun à
tout type de lambeaux cutanés constitué d’un pédicule unique, sans se
soucier ni du trajet, ni de l’origine des vaisseaux perforants.
Wei(143) avait restreint l’utilisation du terme « lambeau perforant » aux
lambeaux, basés sur un vaisseau perforant le fascia profond, dont le
prélèvement nécessite un temps de dissection intra-musculaire. La
conférence de consensus de 2001(10) définit également les lambeaux
perforants selon les impératifs techniques liés à leur prélèvement, et
permet ainsi de les distinguer des lambeaux conventionnels :
-
-
Un lambeau perforant comprend de la peau et / ou de la graisse soucutanée. Sa vascularisation est assurée par au moins un vaisseau
perforant le fascia profond. Les perforantes peuvent cheminer au
travers, ou entre les tissus profonds.
Une perforante musculaire est un vaisseau qui traverse le muscle
avant de vasculariser la peau.
Une perforante septale est un vaisseau qui traverse uniquement le
septum intermusculaire avant de vasculariser la peau.
81
-
Un lambeau vascularisé par une perforante musculaire est un lambeau
perforant musculaire.
Un lambeau vascularisé par une perforante septale est un lambeau
perforant septal.
Les perforantes indirectes musculaires et périmysiales sont regroupées au
sein des lambeaux perforants musculaires car leur technique de dissection
est proche.
6.1.3.1
Classification des lambeaux perforants
L’utilisation par les auteurs de noms différents pour un même lambeau
perforant porte à confusion. Ces dix dernières années, la description sans
nomenclature consensuelle d’une multitude de nouveaux lambeaux
perforants a rendu la littérature obscure.
Les lambeaux perforants de la région thoracique latérale sont par exemple
désignés à la fois comme « thoraco-dorsal artery perforator flap »,
« latissimus dorsi perforator flap », « latissimus dorsi perforator based
fasciocutaneous flap », ou « latissimus dorsi musculo-cutaneous flap
without muscle ».
Pour la région abominale, les noms de « deep inferior epigastric perforator
flap » et « paraumbilical / periumbilical perforator flap » sont utilisés
indifférement.
Le nom de « anterolateral thigh perforator flap » ne précise pas si le
prélèvement du lambeau est basé sur des perforantes septo-cutanées ou
musculo-cutanées, alors que la technique opératoire diffère totalement.
La nécessité d’établir une nomenclature internationale s’est donc imposée.
Elle devait permettre de distinguer par des termes simples et précis les
différents lambeaux perforants, selon le type de perforante et donc la
technique de prélèvement (musculo-cutanée, septo-cutanée ou cutanée
directe), et selon leur vaisseau source ou le muscle sous-jacent.
La conférence de consensus de 2001(10) a permis d’établir une première
nomenclature internationale standardisée : elle propose de désigner les
lambeaux perforants selon le vaisseau nourricier (et non par le muscle
sous-jacent). S’il existe plusieurs lambeaux basés sur un même vaisseau,
leur nom précisera leur région anatomique ou leur muscle d’origine.
Par exemple l’artère circonflexe latérale est à l’origine de deux lambeaux :
le lambeau perforant de fascia lata et le lambeau perforant antéro-latéral
de cuisse. L’application stricte de ces définitions peut faire considérer tous
les lambeaux cutanés comme des lambeaux perforants, et toutes les
artères destinées à la peau comme des perforantes directes ou indirectes.
82
Les lambeaux neuro-cutané sural, antébrachial radial, scapulaires et parascapulaires ou inguinal peuvent donc théoriquement être définis en
lambeaux perforants. Blondeel, Koshima et Wei(10) recommandent
cependant de limiter l’utilisation du terme lambeau perforant aux
lambeaux cutanés vascularisés par des perforantes indirectes musculaires
ou septales. Contrairement à la dissection des lambeaux perforants
indirects, le prélèvement d’un lambeau cutané basé sur des perforantes
cutanées directes fait appel une chirurgie simple et rapide. Le terme de
« lambeau perforant » doit traduire les contraintes techniques liées à une
dissection intramusculaire ou septale.
En 2003 Geddes et al.(36) recommande de nommer tous les lambeaux
perforants musculo-cutanés selon les initiales de leur vaisseau d’origine,
en précisant par un suffixe le muscle traversé. Cette nomenclature repose
sur la classification des angiosomes(127) : Geddes fait correspondre la
quarantaire de territoires décrits par Taylor avec les principaux vaisseaux
à l’origine de lambeaux perforants. Le lambeau perforant musculocutané
antérolatéral de cuisse, vascularisé par la branche descendante de l’artère
circonflexe latérale fémorale à travers le muscle vaste latéral, devient
ainsi le « LCFAP-vl » (« Lateral Femoral Artery Perforator flap » - « Vastus
Lateralis »). Le lambeau perforant musculocutané de fascia lata,
vascularisé par la branche transverse de l’artère circonflexe latérale
fémorale à travers le muscle tenseur du fascia lata, devient le « LCFAP-tfl
(« Lateral Femoral Artery Perforator flap » - « Tensor Fasciae Latae »). Il
ajoute le suffixe « –s » pour les lambeaux perforants septo-cutanés
(« LCFAP-s »).
Kim(57) propose en 2005 une nouvelle nomenclature des lambeaux
perforants. Elle nomme de manière simple et précise chaque lambeau
perforant selon le type de perforante prélevée (« MCp » pour « musculocutaneous perforator », « SCp » pour « septo-cutaneous » et « DCp »
pour « direct cutaneous »), et selon la préservation ou non de son
vaisseau d’origine. Les lambeaux perforant musculo-cutanés sont désignés
par le muscle sous-jacent (« tensor fasciae latae perforator flap »). Les
lambeaux septo-cutanés et cutanés directs, de dissection plus simple, sont
nommés selon le vaisseau source de la perforante (« submental perforator
flap »). Lorsque le calibre de la perforante au niveau du fascia profond est
suffisant pour réaliser une anastomose, le lambeau est prélevé sans
dissection musculaire et en respectant le vaisseau source : c’est un
« perforator based flap ». Les techniques variées de prélèvement de
palette cutanée fine, en disséquant une épaisseur minimale de graisse
sous-cutanée ou par dégraissage primaire, sont regroupées selon le terme
général de « thin perforator flap ». Cette nomenclature est adaptée aux
variations anatomiques du point d’émergence des perforantes et elle
précise pour chaque lambeau sa technique de prélèvement.
Parmi les lambeaux perforants de la région thoracique latérale, on
différencie le « latissimus dorsi perforator flap » (MCp), le « thoracodorsal
83
perforator flap » (SCp) et le « latissimus dorsi perforator based flap »
(MCp).
Sept types de lambeaux perforants antéro-latéraux de cuisse peuvent être
distingués selon cette nomenclature : « rectus femoris perforator flap » et
« vastus lateralis perforator flap » (MCp) ; « lateral circumflex femoral
perforator flap » et « descending perforator flap » (SCp) ; « rectus
femoris perforator based flap », « vastus lateralis perforator based flap »
et « descending perforator based flap ».
La frontière entre les lambeaux fascio-cutanés conventionnels et les
lambeaux perforants septo-cutanés ou cutanés directs est toujours un
sujet de débat entre les auteurs, qui peut être précisée par cette
classification. Le lambeau fasciocutané antébrachial radial est prélevé
dans sa forme classique avec la totalité du fascia profond et du septum.
Le prélèvement peut se limiter au septum, et respecter le fascia profond :
c’est un lambeau septo-cutané antébrachial radial. Il peut également être
réalisé en lambeau perforant : « radial perforator flap » (SCp) ou « flexor
carpi radialis perforator flap » (MCp).
Cette nomenclature simple établie par Kim est une des plus complète de
la littérature, elle sera probablement bientôt la référence dans la chirurgie
des lambeaux perforants.
Figure 21 : Lambeau perforant cutané direct nommé selon son vaisseau
d’origine, d’après Kim(54); (X) vaisseau d’origine ; (DC-p) perforante cutanée
directe.
84
Figure 22: Lambeau perforant septocutané nommé selon son vaisseau d’origine,
d’après Kim(54); (Y) vaisseau d’origine ; (SC-p) perforante septocutanée.
Figure 23 : Lambeau perforant musculocutané nommé selon le muscle traversé
par la perforante musculocutanée, d’après Kim(54); (Y) vaisseau d’origine ;
(MC-p) perforante musculocutanée ; (B) Muscle traversé par la perforante.
Figure 24 : Lambeaux de la région antébrachiale radiale selon Kim(54). (A)
lambeau fascio-cutané comprenant le fascia profond et le septum ; (B) lambeau
septo-cutané respectant le fascia profond ; (C) lambeau perforant septo-cutané
radial basé sur une perforante septale, respectant le septum et le fascia profond
; (D) lambeau perforant du flexor carpi radialis basé sur une perforante
musculo-cutanée ; (MCp) perforante musculo-cutanée ; (SCp) perforante septocutanée ; (RA) artère radiale ; (FCR) flexor carpi radialis.
85
Figure 25 : Lambeaux de la région antéro-latérale de cuisse selon Kim(54) ; (A)
lambeau musculo-cutané ; (B) lambeau perforant de vaste latéral ; (C) lambeau
perforant de la branche descendante, respectant la branche transverse et
l’artère circonflexe fémorale latérale ; (D) lambeau perforant circonflexe
fémoral latéral, avec un long pédicule proximal ; (E) lambeau basé sur la
perforante du vaste latéral ; (F) lambeau basé sur la perforante descendante.
86
6.2 Rappels anatomiques sur le lambeau ALC
6.2.1 Muscles et fascias de la région antérolatérale de la cuisse
Les muscles de la cuisse sont répartis en 3 groupes : antérieur (muscles
fléchisseurs), médial (muscles adducteurs) et postérieur (muscles
extenseurs). Ils sont enveloppés dans le fascia fémoral profond ou fascia
lata.
De la face profonde du fascia lata partent 2 septums intermusculaires
fémoraux, médial et latéral, qui se fixent sur les lèvres de la ligne âpre. Le
septum intermusculaire latéral se situe entre le biceps fémoral en arrière
et le vaste latéral en avant, tandis que le septum intermusculaire médial
sépare le muscle vaste médial et les adducteurs. Ces septums délimitent
les 2 loges de la cuisse.
Dans la loge antérieure de la cuisse, on trouve en superficie le muscle
sartorius (entre épine iliaque antéro-supérieure et patte d’oie) et en
profondeur les muscles quadriceps (constitué des muscles droit fémoral,
vaste médial, vaste latéral et vaste intermédiaire) et articulaire du genou
(faisceau aberrant du muscle vaste intermédiaire).
Le muscle sartorius est vascularisé par l’artère circonflexe iliaque
superficielle tandis que le muscle quadriceps est vascularisé par l’artère
fémorale profonde. Ils sont innervés par les branches terminales
musculaires du nerf fémoral.
6.2.2 Nerfs de la région antérolatérale de la cuisse
Ils sont issus du plexus lombal.
6.2.2.1
Nerf cutané latéral de la cuisse
Il s’agit du seul nerf sensitif pur de la cuisse.
-
Origine : il est issu des neurofibres de L2 et L3.
Rapports : il chemine obliquement et latéralement vers l’épine iliaque
antéro-supérieure et émerge du bord latéral du muscle grand psoas au
niveau de la crête iliaque. Il passe ensuite sous ou à travers le
ligament inguinal, à 1cm environ de l’épine iliaque antéro-supérieure.
Enfin, il est sur le muscle sartorius et se divise en 2 branches,
antérieure et postérieure.
87
-
Branches terminales : la branche postérieure traverse le fascia lata
et innerve la peau de la région supéro-latérale de la cuisse. La branche
antérieure descend sous le fascia lata qu’elle traverse après un trajet
vertical de 10cm environ. Elle innerve la région antérolatérale de la
cuisse jusqu’au genou.
Figure 26 : territoires sensitifs de la cuisse
6.2.2.2
-
-
Nerf fémoral : nerf mixte
Origine : il est issu des neurofibres de L2, L3 et L4.
Rapports : il descend latéralement entre les 2 plans du muscle grand
psoas, puis se dirige en avant et passe sous le ligament inguinal. Il se
termine dans le triangle fémoral en une dizaine de branches.
Branches terminales : branches musculaires (muscles sartorius et
quadriceps), nerfs cutanés antérieurs de la cuisse (innervation
sensitive de la face antérieure de la cuisse) et nerf saphène
(innervation sensitive de la face antéro-médiale de la jambe).
88
89
6.2.3 Anatomie vasculaire du lambeau ALC
Le pédicule du lambeau est la branche descendante de l’artère circonflexe
fémorale latérale (ACFL). Il s’agit d’une branche collatérale de l’artère
fémorale profonde de la cuisse, elle-même collatérale de l’artère fémorale.
L’ACFL nait juste après la naissance de l’artère fémorale profonde et se
dirige latéralement, croisant la face postérieure du muscle droit fémoral.
Elle se divise alors en 3 rameaux : un rameau ascendant (qui
s’anastomose avec l’artère circonflexe fémorale médiale), transverse (qui
contourne le fémur et participe à l’anastomose cruciforme) et un rameau
descendant.
La branche descendante chemine entre les muscles vastus latéralis et
rectus femoris, en compagnie de la branche motrice du nerf fémoral,
destinée au muscle vaste latéral.
Elle donne des branches musculaires pour ces muscles mais aussi des
branches perforantes vascularisant la palette cutanée de la face antérolatérale de la cuisse.
90
91
6.3 Histoire du lambeau antéro-latéral de cuisse
La première publication concernant le lambeau antéro-latéral de cuisse a
été réalisée par Song en 1984(121).
Selon lui, le pédicule du lambeau est la branche descendante de l’ACFL,
d’un diamètre de 2mm et d’une longueur de 8cm, qui donne une branche
septo-cutanée et des branches cutanées accessoires destinées à la palette
du lambeau.
Dans cette première publication, comprenant 9 cas, les artères
vascularisant la palette étaient des artères septo-cutanées directes, et non
des perforantes musculo-cutanées (même s’il était parfois nécessaire de
disséquer ces vaisseaux à travers une fine couche musculaire). Ce
lambeau était donc un lambeau septo-cutané, avec un pédicule situé sur
un axe vasculaire secondaire, de type B dans la classification de Nakajima.
Entre 1984 et 2000, seules 31 publications concernant le lambeau ALC
sont parues, parmi lesquelles 28 d’origine asiatique.
Deux publications occidentales ont suggéré des différences anatomiques
entre les sujets asiatiques et occidentaux, rendant plus difficile la
réalisation du lambeau chez ces derniers : épaisseur plus importante du
panicule adipeux de la cuisse, présence de poils gênante dans certaines
reconstructions et dissection du pédicule vasculaire plus ardue.
Variabilités anatomiques
Parmi les 31 premières publications, 9 concernaient les variations
anatomiques.
6.3.1 Absence d’artère cutanée utilisable
Koshima, en 1989, rapporta pour 5 de ses 13 cas une absence de
perforante, obligeant à réaliser un autre lambeau de voisinage (lambeau
antéro-médial ou tenseur du fascia lata).
Par la suite, seules 3 autres publications ne retrouvèrent aucune
perforante cutanée(18, 62, 149), dans des proportions variant entre 0,89
et 5,4%.
En fait, il semble que dans les cas ou une artère n’est pas facilement
individualisable, la vascularisation de la palette cutanée soit assurée par
des vaisseaux grêles, dont la dissection est difficile et dangereuse, ce qui
nécessite donc d’emporter une partie du chef du muscle quadriceps.
Koshima fut d’ailleurs par la suite l’un des principaux utilisateurs du
lambeau ALC.
92
Dans sa série sur 168 patients, Luo(78) rapporte dans 2% des cas la
présence d’artères grêles. On peut donc considérer que l’absence d’artère
cutanée n’est pas une variation anatomique.
6.3.2 Variation de l’origine du pédicule vasculaire
Kimata(61) décrit 3 types de vascularisation :
-
-
Type 1 (68,8%) : origine classique (branche descendante de l’ACFL).
Type 2, 3 et 8 (17,1%) : le pédicule est bien la branche descendante,
mais son origine est variable (de l’artère fémorale commune à l’artère
fémorale profonde).
Type 4, 5, 6 et 7 (14,3%) : l’artère cutanée est issue directement de
l’artère fémorale circonflexe latérale ou de l’artère fémorale profonde.
Figure 27: variations d'origine des artères circonflexes de la cuisse
93
6.3.3 Variations dans le type de vascularisation cutanée
Il s’agit de la plus grande variabilité anatomique.
Song décrit initialement des perforantes septo-cutanées directes,
provenant d’un tronc artériel profond destiné à la vascularisation
musculaire (type B de Nakajima).
Cependant, dès 1988, Xu(146) retrouve dans une étude sur 35 dissections
anatomiques 60% de perforantes musculo-cutanées (type D de Nakajima)
et 40% de perforantes septo-cutanées (type E de Nakajima). Depuis, dans
les études anatomiques successives, la prédominance des artères
perforantes sur les artères directes d’une part, et la prédominance des
perforantes musculo-cutanées sur les perforantes septo-cutanées d’autre
part, n’ont cessé d’augmenter. Ainsi, la prévalence des artères perforantes
musculo-cutanées varie de 77 à 89,9% selon les études(18, 78, 81, 82,
131, 138). Le taux de la vascularisation par des artères perforantes,
quelle que soit leur type, varie de 89,9 à 100% selon les études.
Ainsi, à l’aide des nombreuses études anatomiques réalisées, il est
possible de mieux préciser la vascularisation du lambeau ALC :
6.3.3.1
Type des perforantes cutanées
Il est vascularisé dans la majorité des cas par des perforantes musculocutanées (type D Nakajima) ou des branches cutanées d’artères
musculaires (type C) et plus rarement par des artères perforantes septocutanées (type E). Le lambeau ALC peut ainsi est considéré comme un
lambeau musculo-cutané de vaste latéral, que l’on peut prélever sur un
mode perforant.
6.3.3.2
Nombre des perforantes
Dans la majorité des études, il existe 2 perforantes(138, 149).
6.3.3.3
Localisation des perforantes
Si l’on divise en 10 portions la distance entre épine iliaque antérosupérieure (EIAS) et bord supéro-externe de la patella :
Dans les études asiatiques, la localisation maximale des perforantes se
situe au point 0,5 (soit entre les segments V et VI), avec également un pic
à 0,3 et 0,4.
94
Dans les études caucasiennes, elles sont localisées principalement au
point 0,3 (23,7%), 0,4 (45,3%) et 0,5 (31%).
Ainsi, une palette cutanée centrée sur le milieu de la ligne joignant EIAS
et bord supéro-externe de la patella emporte toujours les perforantes
vascularisant la palette cutanée du lambeau ALC. Celles-ci sont
généralement situées dans un rayon de 5 cm autour du point médian.
Le repérage doppler pré-opératoire ne nous parait donc pas indispensable.
Son utilisation possède cependant une valeur prédictive positive de
95,8%, mais en moyenne 35 minutes sont nécessaires pour réaliser cet
examen(52).
Il faut cependant souligner l’existence possible d’une branche motrice du
nerf fémoral qui chemine entre 2 perforantes vascularisant la palette
cutanée du lambeau. Lorsque les perforantes sont issues du même
pédicule, 2 solutions sont possibles : section puis anastome de la branche
motrice du nerf fémoral, ou alors sacrifice d’une perforante si la dissection
en a préservé plus de 2. Cette branche nerveuse participe à la stabilité
extrinsèque du genou.
6.3.3.4
Dimensions de la palette cutanée
Certains auteurs rapportent des palettes vascularisées par une seule
perforante avec des dimensions de l’ordre de 20x30cm. Il semble malgré
tout plus prudent d’emporter plusieurs perforantes, en particulier pour
pouvoir repérer une torsion du pédicule.
6.4 Sequelles du prélèvement
Le prélèvement d’un lambeau sur le mode perforant, par rapport au
lambeau musculo-cutané emportant le vastus lateralis du muscle
quadriceps n’entraine qu’une préservation
minime de la force
musculaire(71) : l’intêret de ce mode de prélèvement réside plutôt dans
les qualités plastiques du lambeau perforant, qui est plus fin.
Ce lambeau permet la préservation des axes vasculaires majeurs de la
jambe, ce qui est un atout indéniable par rapport au lambeau antebrachial
radial par exemple.
La fermeture du site donneur est possible lorsque la largeur de la palette
cutanée ne dépasse pas 8 ou 9cm.
Certains auteurs ont réalisé une pré-expansion de la zone donneuse(42,
132), ce qui leur a permis de prélever des lambeaux de grande taille,
95
minces, avec fermeture directe. Par contre, il existe un risque théorique
de lésion par compression des perforantes lors de l’expansion cutanée
d’une part, et cette technique augmente le nombre de temps opératoires
d’autre part.
Dans notre expérience, lorsqu’il n’est pas possible de fermer le site
donneur en suture directe, l’utilisation d’une greffe de peau mince en
couverture immédiate n’est pas recommandée. En effet, à cause de la
difficulté d’immobiliser le muscle quadriceps, la greffe cutanée savonne et
sa prise est aléatoire. Nous préférons réaliser une cicatrisation dirigée,
éventuellement aidée au début par une thérapie à pression négative.
Il est également possible de réaliser une fermeture en double VY(147), à
l’aide de 2 lambeaux vascularisés en haut par des perforantes à flux
anterograde, et en bas par des perforantes à flux rétrograde provenant de
l’artère géniculaire supérieure.
Certains auteurs, lors du prélèvements de lambeaux très larges,
suggèrent de fermer le défet cutané à l’aide d’un lambeau inguinal(1).
Les séquelles rapportées dans la littérature vont de la cicatrice discrète à
la hernie
du muscle
quadriceps, nécessitant une réparation
chirurgicale(98).
6.5 Utilisations du lambeau ALC
Certains raffinements techniques sont apparus depuis sa publication
initiale :
6.5.1 Lambeau aminci (thin flap)
Son utilisation découle du concept décrit par Kimura en 1996(65). Il s’agit
d’un prélèvement sous dermique des lambeaux, de façon à éviter le
dégraissage secondaire. Au niveau de l’arrivée du pédicule dans le
lambeau, le dégraissage sera plus ou moins proche des vaisseaux, en
fonction de leur mode d’arrivée (perpendiculaire ou tangentiel aux tissus).
Ce dégraissage doit être effectué avant le clampage vasculaire, concerne
tout le tissu sous cutané sous le fascia superficialis et nécessite de
conserver au moins 3 ou 4mm d’épaisseur car la vascularisation cutanée
est assurée par les plexus sous dermiques artériels et les plexus veineux
hypodermiques superficiels.
Compte tenu de son anatomie vasculaire, le lambeau ALC permet un
amincissement uniforme et complet de la palette cutanée.
96
Cet artifice technique permet d’accroitre la plasticité de ce lambeau en
améliorant sa souplesse et les possibilités de modelage ou de plicature, ce
qui en fait un concurrent direct du lambeau antebrachial radial.
Il faut cependant être prudent dans son utilisation chez les sujets
occidentaux : dans une étude anatomique, Alkureishi(3) montra une
perfusion distale diminuée ou absente après amincissement du lambeau.
Dans sa série concernant les reconstructions de l’oropharynx, Ross(109)
rapporte des complications (nécrose partielle ou totale) sur les lambeaux
amincis en per-opératoire. Par contre, ceux qui ont été dégraissés à
distance de l’intervention n’ont pas présenté de souffrance vasculaire.
Dans les indications de reconstruction nécessitant un lambeau fin, il vaut
donc mieux privilégier le lambeau antebrachial plutôt qu’un lambeau ALC
aminci de façon excessive.
6.5.2 Lambeau sensible
La première publication date de 1995 par Cheng(22) pour une
reconstruction du pénis. Il a réalisé une anastomose entre le nerf dorsal
de la verge et le nerf cutané fémoral latéral de la cuisse. Ce type de
resensibilisation a également été réalisé lors de reconstructions de la
main(53).
Cependant, l’indication principale concerne les reconstructions de la
langue : Kuo(71) publia le premier 9 reconstructions linguales par
lambeau ALC resensibilisé. D’autres publications ont suivi(29, 50, 149,
150).
Ribuffo(107) a précisé l’innervation sensitive de la cuisse : il existe des
nerfs sensitifs perforants, issus du nerf fémoral, qui innervent
partiellement le territoire du lambeau ALC, tandis que le nerf cutané
fémoral latéral innerve la totalité du territoire. Il est donc possible de
prélever un lambeau sensible en préservant la sensibilité de la cuisse.
Certains auteurs rapportent une resensibilisation spontanée des
lambeaux, sans anastomose nerveuse(110).
6.5.3 Autres variantes
Il existe d’autres utilisations possibles, qui ne concernent pas la
reconstruction de la langue : lambeau pédicule (à flux antérograde ou
rétrograde), lambeau désépidermisé de comblement ou utilisé en flow
through et short pédicule (préservation de la branche descendante et
branchement sur un autre lambeau libre), prélèvement cutané associé à
97
une bande de
inférieure(148).
fascia
lata
pour
la
reconstruction
d’une
lèvre
Au total, le lambeau ALC a nécessité plusieurs années avant de trouver
ses indications en chirurgie reconstructrice. Cette latence est expliquée
principalement par les variabilités anatomiques entre sujets asiatiques et
occidentaux mais aussi par son mode de vascularisation perforant. Son
essor a probablement été favorisé par celui des lambeaux perforants,
comme le lambeau perforant de DIEP (Deep Inferior Epigastric
Perforator).
6.6 Technique de prélèvement du lambeau ALC
6.6.1 Principes de prélèvement des lambeaux perforants
Le dessin de la palette cutanée est réalisé selon les repères anatomiques
de la zone de prélèvement, ou selon l’imagerie pé-opératoire. La largeur
de la palette est déterminée par l’estimation de la taille du défect et par la
nécessité de fermeture directe du site donneur.
L’incision d’une des berges de la palette cutanée atteint le plan du fascia
profond qu’elle respecte.
La dissection suit un plan sus-fascial jusqu’à identifier la ou les
perforantes du lambeau. Si une seule perforante peut suffire à la
vascularisation de la palette cutanée, il est recommandé d’inclure deux
perforantes au prélèvement afin d’accroitre sa fiabilité vasculaire, et
surtout d’éviter le risque de torsion du pédicule. Si une seule perforante
est prélevable, le « twist » du pédicule peut être prévenu en fixant la
partie proximale du pédicule au bord de la palette du lambeau(18).
La perforante dominante, généralement de gros calibre et pulsatile, est
disséquée au niveau de son point d’émergence au travers du fascia
profond sous loupes grossissantes ou au microscope. La dissection de la
perforante se poursuit classiquement en « tunneling technique »(79) de
distal en proximal, vers le vaisseau source. Les vaisseaux sont humidifiés
tout au long de la dissection. Les mouvement de traction sur le pédicule
favorisent le vasospasme et donc doivent être scrupuleusement évités.
En cas de perforante musculo-cutanée, les fibres musculaires et les nerfs
moteurs sont respectés et réclinés de part et d’autre de la perforante, en
réalisant l’hémostase pas à pas des multiples collatérales musculaires au
nylon 10/0. L’utilisation de clips vasculaires est à proscrire.
En cas de perforante septocutanée, la dissection suit le plan du septum.
98
Pour les lambeaux chimériques, on réalise préférentiellement une
dissection de proximal en distal. Le pédicule est ligaturé à une longueur
suffisante pour son anastomose avec les vaisseaux receveurs. Lors de la
mise en place du lambeau sur le site receveur, l’anastomose est réalisée
sans tension du pédicule après contrôle de l’absence de twist.
Celik, Wei et al.(18) ont réalisé en 2002 une étude rétrospective de 439
lambeaux perforants de la région antérolatérale de cuisse, en évaluant les
mécanismes ayant conduit à la perte de 3,4% des lambeaux. Les trois
principales causes d’échec sont la méconnaissance du type de
vascularisation, un mauvais positionnement du pédicule dans la zone
receveuse, et les erreurs techniques liée à un manque d’expérience. Ils
proposent donc cinq « règles d’or » aux prélèvements des lambeaux
perforants :
-
Cartographie préopératoire des perforante du lambeau par Doppler
Dissection méticuleuse aux loupes grossissantes ou au microscope.
Inclusion d’une collerette de fascia profond au pied de la perforante.
Utilisation ponctuelle de lidocaïne (Xylocaïne®) lors de la dissection
des perforantes pour éviter un vasospasme.
En cas de reprise : rechercher une torsion du pédicule ou un
saignement d’une des collatérales musculaires.
Kim(58) présente trois points techniques des prélèvements de lambeaux
perforants de latissimus dorsi permettant de diminuer les risques de
congestion veineuse en cas de perforante fines ou non pulsatiles. Comme
beaucoup d’autres auteurs, il recommande d’inclure aux moins deux
perforantes dans le lambeau, en particulier si la première perforante est
non pulsatile ou de petit calibre. La réalisation d’une anastomose en T
entre le pédicule et les vaisseaux receveurs, peut diminuer le flux artériel
et donc le retour veineux. Après libération de la perforante et de son
vaisseau source, il est possible de prélever une portion musculaire de 2 à
3 cm autour du trajet intra-musculaire supposé de la perforante pour
éviter tout traumatisme des vaisseaux : c’est la technique du « musclesparing flap ».
6.6.2 Technique du muscle-sparring flap
Les lambeaux musculo-cutanés « muscle-sparing », ou « économes en
muscle », correspondent aux prélèvements d’une large palette cutanée
associée à une portion de muscle sous-jacent, tout en conservant
l’innervation et la fonction du musculaire.
Cette technique est décrite(43, 115) comme étant plus simple, plus rapide
et surtout plus fiable que celle des lambeaux perforants. Elle est utilisée
99
par Hamdi et al.(43) principalement en reconstruction mammaire lorsque
les perforantes du latissimus dorsi sont de petit calibre ou non pulsatiles,
et que le lambeau perforant classique n’est pas réalisable. L’inclusion d’un
segment musculaire est réalisée après repérage du point de pénétration
de la perforante musculaire à la face profonde du muscle et de son point
d’émergence au travers du fascia profond.
Cette technique épargne le temps de dissection intramusculaire et limite
donc les risques de lésions traumatiques des perforantes. Une portion
musculaire est importante permet de prélever un plus un grand nombre
de perforantes, mais implique également des lésions nerveuses plus
importants.
Figure 28 : Technique de « muscle-sparing » selon Hamdi(42) ; de la superficie
à la profondeur : palette cutanée, perforantes musculaires, latissimus dorsi,
serratus anterior, et plan costal ; (A) lambeau perforant de latissimus dorsi ;
(B) LD-MS de type I : portion musculaire de 4 x 2 cm ; (C) LD-MS de type II :
segment de plus de 5 cm de large, prélevé au bord antérieur du muscle ; (D) LDMS de type III :prélèvement subtotal du muscle.
6.6.3 Lambeau perforants « fins » et microdissection
Dans certaines indications de resurfaçage, en particulier au niveau de
l’extrémité céphalique ou au niveau des membres, la palette cutanée des
lambeaux perforants peut présenter une épaisseur excessive.
Kimura et al.(64, 66) a développé une technique de « micro-dissection »
des perforantes au sein du tissu adipeux permettant de réaliser des
lambeaux perforants fins. D’après ses auteurs, cette technique de
microchirurgie permet de réaliser des lambeaux cutanés « à la carte »
100
adaptés à la fois aux caractéristiques tri-dimensionnelles du défect à
combler, et au type de peau à remplacer.
Kim(59) présente des séries de lambeaux perforants de grand dorsal
« superthin » pour la couverture des pertes de substance de la main de
surface modérée ou large. L’épaisseur de ces lambeaux perforants fins
varie entre 5 et 7 millimètres, avec des dimensions allant de 5 x 3 cm à
21 x 11 centimètres. Selon Kim le re-surfaçage par lambeau a un intérêt
fonctionnel pour la reconstruction de la main, au même titre que le
rétablissement d’une mobilité. Les techniques classiques de couverture de
pertes de substance étendues se limitent aux greffes de peaux et aux
lambeaux fasciocutanés, parfois expansés. Les résultats esthétiques et
fonctionnels des greffes de peau sont souvent médiocres. Les lambeaux
musculocutanés ou fasciocutanés, pédiculés ou libres, présentent souvent
une morbidité importante du site donneur et une épaisseur parfois
excessive.
Les lambeaux perforants fins sont une nouvelle option thérapeutique qui
propose une couverture des pertes de substance à la fois fonctionnelle et
esthétique, et des séquelles limitées du site donneur. L’indication de la
région de prélèvement dépend de la longueur et du calibre du pédicule
nécessaire à l’anastomose du lambeau et des caractéristiques de la peau à
remplacer : couleur, texture, souplesse et pilosité.
La technique micro-dissection est initialement décrite pour le lambeau
perforant de tensor fasciae latae(63), puis appliqué aux lambeaux
perforants de rectus abdominis, de latissimus dorsi, ou de la région
antérolatérale de cuisse(66). Le marquage doppler préopératoire n’est pas
systématique pour Kimura qui privilégie des repères anatomiques.
Pour le lambeau perforant de la région antérolatérale de cuisse, elle est
para-médiane à cette ligne et à mi-hauteur de cuisse. La dissection est
suivie dans un plan sus-fascial jusqu’à la perforante.
Selon Kim, le caractère pulsatile de la perforante est le premier critère de
choix d’un perforante viable.
Kimura décrit les vaisseaux perforants en trois portions, de la profondeur
à la superficie : le pied, le tronc et les branches. La « micro-dissection »
dégage le tronc de la perforante sur un cm de diamètre, puis excise les
gros lobules graisseux en profondeur pour faire apparaitre les premières
branches de division sous-cutanées. La dissection s’arrête au niveau du
plan adipeux superficiel où les lobules sont plus petits. Le tronc de la
perforante est dégagé du fascia profond et la dissection intramusculaire
(ou intermusculaire en cas de perforante septale) est poursuivie.
Le marquage du point de projection à la peau des branches superficielles
de la perforante correspond au centre de la palette cutanée du lambeau.
Le lambeau est enfin levé dans le plan du fascia superficiel à
101
l’électrocoagulation, jusqu’à la perforante et ses branches de division
sous-cutanées. Selon Kimura, le temps de micro-dissection prolonge la
durée opératoire d’environ une heure.
D’autres techniques de prélèvement de lambeaux fins sont décrites dans
la littérature(56), notamment après la levée complète du lambeau
perforant classique. Les gros lobules graisseux du plan profond sont
excisés aux ciseaux, de la périphérie du lambeau vers la perforante, en
préservant un collerette adipeuse de « pleine épaisseur » un centimètre
autour de la perforante. Contrairement à la technique de Kimura,
l’absence de contrôle visuel direct du trajet des branches de la perforante
dans le graisse entraine un risque vasculaire important.
La dissection intra-adipeuse des perforantes a permis à Kimura et al(64,
66) d’étudier leur distribution tridimensionnelle au sein du tissu graisseux,
en particulier le calibre du tronc et la distance entre le pied et les
premières branches de division. Il existe d’importantes variations du trajet
des perforantes selon leur origine musculocutanée ou septocutanée,
comme l’avait montré Nakajima(95)en 1998, mais également selon le
type de lambeau perforant.
Les perforantes septocutanées ont un trajet plus long dans le plan
graisseux profond et les branches de division secondaire sont plus
nombreuses que pour les perforantes musculocutanées.
Les lambeaux perforants de la région antérolatérale de cuisse présentent
plus de variations de leur vascularisation que les lambeaux perforants de
grand dorsal. Plusieurs études angiographiques ont précisé la distribution
et le trajet des perforantes dans le tissu sous-cutané. Kim(59) privilégie
l’utilisation du « latissimus dorsi perforator-based flap » : le trajet
intramusculaire des perforantes musculocutanées de grand dorsal est
particulièrement court, et un prélèvement de type « perforator-based »
limite les séquelles du site donneur.
Les détracteurs de la micro-dissection avancent que cette technique
implique des risques élevés de lésions des perforantes : étirement, torsion
et surtout vasospasme, et un allongement conséquent du temps
opératoire qui prédominent sur l’apport d’un lambeau fin. La correction
secondaire de l’épaisseur du lambeau est en outre accessible à un simple
dégraissage.
102
Figure 29 : de « micro-dissection » selon Kimura et al.(63; (A) (B) (C) (D)
étapes de dissection de la perforante musculocutanée sous microscope, en
haut : dissection des branches distales de la perforante, en bas : vue
transversale ; (E) (F) (G) levée du lambeau fin par électro-coagulation.
6.6.4 Technique du « free-style » free flap
Le concept de « free-style free flap » est développé par Wei(144) et
Mardini(83). Cette technique de prélèvement de lambeau perforant repose
uniquement sur le repérage préopératoire par doppler pulsé d’une ou
plusieurs perforantes cutanées dans une région anatomique donnée. Le
choix de la zone donneuse est fait selon des critères de couleur, texture et
souplesse cutanée, afin d’adapter le lambeau cutané aux caractéristiques
de la zone receveuse. Cette technique est principalement appliquée aux
transferts libres prélevés sur la cuisse(83), mais aussi au prélèvement de
lambeaux locaux(13).
En pratique(19), le doppler pulsé réalise la cartographie des perforantes
de la zone donneuse, sur lesquelles est centrée la palette cutanée. Le
signal sonore le plus fort et le plus pulsatile correspond généralement au
vaisseau de plus grand calibre.
La palette cutanée est incisée sur une seule de ses berges jusqu’au plan
du fascia profond. La dissection est réalisée dans un plan sus-fascial : le
fascia profond et éventuellement des nerfs sensitifs cutanés sont
préservés, la visibilité des vaisseaux cutanés est meilleure et le lambeau
perforant peut être plus fin. Une hémostase méticuleuse, au fur et à
mesure de la dissection, facilite le repérage des vaisseaux les plus fins. Le
trajet rétrograde de la dissection suit la perforante musculocutanée ou
septocutanée vers son vaisseau d’origine, jusqu’à ce que le calibre et la
longueur du pédicule conviennent à l’anastomose. Les dimensions et le
dessin définitif de la palette sont définis dans le dernier temps opératoire :
la palette cutanée est alors levée en ilôt et le pédicule est sectionné.
Pour Wei, la maîtrise du doppler et des techniques de dissection
intramusculaire permet donc théoriquement le prélèvement de lambeaux
cutanés dans toutes les régions anatomiques du corps, sans tenir compte
103
de leur vaisseau source. Ce mode prélèvement permet surtout d’adapter
au mieux la palette cutanée aux caractéristiques de la région à
reconstruire, et d’accroitre les possibilités régionales de lambeaux libres.
En cas de variation anatomique, cette technique apporte la sécurité de
permettre la recherche d’autres perforantes cutanées. La possibilité d’un
prélèvement « free-style » constitue selon Wei l’avantage fondamental
des lambeaux perforants sur tous les autres lambeaux libres.
Les principales limites du « free-style free flap » sont liées à la technique
parfois peu sensible du doppler pulsé, et à l’impossibilité de prévoir en
préopératoire le trajet des perforantes, le calibre et la longueur finale du
pédicule. La dissection de perforantes parfois de petit calibre ou longues
peut être techniquement difficile. Pour limiter les risques vasculaires, le
territoire cutané de la perforante doit être strictement respecté, et le
dégraissage per-opératoire sera prudent.
6.6.5 Repérage des perforantes
L’évaluation préopératoire de la vascularisation des sites de prélèvement
des lambeaux perforants permet à la fois de réduire le temps opératoire et
d’améliorer la sécurité vasculaire du lambeau.
En absence d’imagerie préopératoire, il est nécessaire de disséquer toutes
les perforantes de la région et de choisir la perforante dominante selon
son calibre et son caractère pulsatile mais sans connaitre la longueur de
son trajet intramusculaire. Ce temps d’exploration des perforantes long et
délicat, implique des risques lésionnels ou de spasmes artériels qui
peuvent compromettre la vitalité du lambeau. L’imagerie préopératoire
doit idéalement déterminer la ou les perforantes dominantes selon leur
localisation, leur trajet intramusculaire, leur calibre et l’importance de leur
flux vasculaire. Les trois principales techniques d’imagerie utilisées en
pratique sont : le doppler pulsé, le doppler couleur et l’angioscanner.
6.6.5.1
Repérage par doppler pulsé
C’est une technique d’imagerie simple, accessible, et peu coûteuse qui est
utilisée en routine dans tous les centres de chirurgie. L’intensité du signal
sonore est correlée au diamètre des vaisseaux et à l’importance du flux
vasculaire. Les fréquences hautes, situées entre 5 et 8 mHz, identifient les
vaisseaux les plus superficiels. Mais le doppler pulsé n’apporte que des
informations limitées et imprécises : la distinction entre vaisseaux axiaux
superficiels et perforantes est impossible. La spécificité et la valeur
prédictive positive du doppler sont donc faibles.
104
6.6.5.2
Repérage par doppler couleur
Le doppler couleur apporte des informations complètes sur la
vascularisation du site donneur. Il peut détailler les caractéristiques des
vaisseaux axiaux et des perforantes avec une vision dynamique de leur
flux vasculaire, le trajet des perforantes et l’épaisseur de la graisse souscutanée.
Blondeel et al.(9) a évalué une sensibilité de 96,2%, et une valeur
prédictive positive de 100% pour le repérage des perforantes de la région
péri-ombilicale. Les inconvénients du doppler couleur sont la durée de
l’examen (45 à 60 minutes) et la nécessité d’avoir un opérateur
compétent, habitué à ce type d’exploration.
6.6.5.3
Repérage par angioscanner
Contrairement
au
doppler
pulsé,
l’angioscanner
n’est
pas
systématiquement réalisé en préopératoire. Plusieurs études ont montré
que l’angioscanner présente des intérêts multiples, tant pour la
planification préopératoire que pour le prélèvement des lambeaux
perforants.
La haute résolution spatiale et les possibilités de vision tridimensionnelle
permettent de réaliser une « dissection virtuelle » du réseau vasculaire.
La sensibilité et la valeur prédictive positive du scanner sont nettement
supérieures à celles du doppler pulsé ou couleur : il définit avec précision
le point d’émergence de la perforante dans le fascia profond par rapport
aux principaux repères anatomiques de la région. Pour le lambeau
perforant de latissimus dorsi, les coordonnées spatiales des perforantes
sont établies selon l’angle de la scapula, le bord antérieur du muscle et le
sommet de l’aisselle. Pour le lambeau perforant de rectus abdominis,
l’ombilic est le point repère central. L’angioscanner détermine la
perforante la plus fiable pour le lambeau en analysant à la fois son calibre,
son trajet, sa localisation et ses rapports anatomiques. La corrélation
entre les résultats de l’angioscanner et les explorations per-opératoire est
bonne, avec peu de faux-négatifs.
Mun et al.(93) a démontré à travers une étude rétrospective de 25
lambeaux perforants de latissimus dorsi, que l’angioscanner préopératoire
réduit la durée de prélèvement du lambeau de 35 minutes (la « durée de
prélèvement » étant comprise entre le dessin et le sevrage du pédicule).
Pour des palettes cutanées inférieures à 50 cm², la longueur des cicatrices
de prélèvement était significativement moins grande dans le groupe ayant
bénéficié d’un angioscanner préopératoire.
105
La plus part des équipes spécialisées dans la reconstruction mammaire par
lambeau de DIEP ont intégré l’angioscanner à leur pratique quotidienne.
L’étude prospective de Masia(85) sur 126 lambeaux perforants de rectus
abdominis, a montré une réduction du temps de prélèvement de 100
minutes et une diminution significative du taux de complications
postopératoires.
Le choix préopératoire de la perforante dominante par le scanner semble
donc apporter une plus grande une sécurité vasculaire pour le lambeau.
La localisation précise et fiable des perforantes par le scanner évite les
difficultés classiques de la recherche per-opératoire des perforantes :
exposition large par de grandes incisions, dissection longue et prudente.
L’angioscanner permet en outre la planification préopératoire des
lambeaux chimériques, les différentes palettes cutanée étant tracées selon
le marquage percutané des perforantes.
Les performances de l’angioscanner sont variables selon le site de
prélèvement. La graisse sous-cutanée de la région péri-ombilicale est peu
dense et souvent épaisse, ce qui facilite la visualisation directe des
vaisseaux sous-cutanés au temps artériels. Pour les régions thoracique
latérale ou la cuisse leur localisation est plus difficile, car les perforantes
sont de plus petit calibre et la graisse plus dense.
L’exposition aux radiations ionisantes et le surcoût induit sont les seuls
inconvénients de cette technique.
6.6.6 Préparation préopératoire
Nous ne réalisions pas de repérage préalable des perforantes, que ce soit
à l’aide d’un angioscanner ou d’un doppler.
6.6.6.1
Installation
Le patient est installé en décubitus dorsal. Le lambeau est prélevé du côté
controlatéral à la lésion linguale, de façon à permettre le travail en double
équipe ORL / réparatrice.
Des alèzes sont placées sous la fesse côté prélèvement et l’ensemble du
membre inférieur est badigeonné puis inclus dans le champ opératoire.
106
6.6.6.2
Dessin du lambeau
Le dessin de la palette cutanée est préétabli. Celui-ci est réalisé en
fonction de l’étendue de l’exérèse carcinologique, qui est déterminée avec
la seconde équipe chirurgicale.
On trace tout d’abord une ligne joignant l’EIAS au bord supéro-externe de
la patella. Cette droite est divisée en 10 segments de longueur identique
et le tracé de la palette cutanée est centré sur les 4ème et 5ème segments.
Le dessin du lambeau est adapté à la perte de substance à reconstruire :
-
-
Lorsqu’elle est classé TM + TB ½, le dessin est alors identique à celui
du lambeau bifolé d’Urken.
Lorsqu’elle est classé TM NF, le dessin est celui du triptyque de
cathédrale, technique originale de reconstruction de la totalité de la
langue mobile.
Dans les autres cas, le dessin est réalisé à la demande, en tenant
compte en particulier de l’extension de la résection aux structures
voisines (pilier amygdalien, larynx). Les dimensions de la langue sont
décrites dans le chapitre anatomie.
Plusieurs dessins de lambeaux sont visibles dans les cas cliniques.
6.6.6.3
Technique chirurgicale
La palette cutanée est ensuite incisée à sa partie interne et se poursuit en
profondeur jusqu’à l’aponévrose du muscle rectus femoris. Celle-ci est
alors décollée de dedans en dehors, tout en réclinant le muscle en dedans.
Il est alors possible de repérer les perforantes vascularisant la palette
cutanée. Dans la plupart des cas, il est souhaitable de conserver au moins
2 perforantes, en particulier lorsque le dessin de la palette cutané est
complexe.
La dissection des perforantes cutanées directe est simple, tandis que la
dissection des perforantes septo ou musculo-cutanées est plus difficile. Il
est parfois nécessaire de sectionner quelques fibres du muscles vastus
lateralis de façon à pouvoir isoler les perforantes. Les collatérales
musculaires sont ligaturées.
Il arrive qu’une branche du nerf fémoral chemine entre 2 perforantes,
compliquant alors la levée du lambeau. Deux options sont alors possibles :
sacrifier une des perforantes, si d’autres vaisseaux de bons calibre sont
disponibles, ou alors sectionner le nerf moteur pour pouvoir libérer le
lambeau puis procéder ensuite à une réparation nerveuse.
107
La dissection se poursuit ensuite à la face externe de la palette cutanée et
l’aponévrose du muscle vastus lateralis est progressivement décollée,
jusqu’aux perforantes précédemment disséquées.
Au cours de la dissection, il est nécessaire de repérer et d’isoler un
rameau du nerf cutané latéral de la cuisse, qui permettra de réaliser une
reconstruction sensible de la langue.
Enfin, le pédicule vasculaire est disséqué de distal en proximal : il s’agit le
plus souvent de l’ACFL. Les différentes collatérales sont ligaturées. Le
lambeau peut alors être sevré.
Lors du positionnement de la palette cutanée, on vérifie l’absence de
« twist » du pédicule ou de ses branches perforantes.
Le lambeau est ensuite mis en place à l’aide de points de bâti au fil
résorbable 3/0. Les anastomoses vasculaires et nerveuses sont ensuite
réalisées avec un fil de nylon 9/0, à l’aide de loupes binoculaires
(amplification 4,5). Les vaisseaux cervicaux sont le plus souvent l’artère
faciale et une veine afférente du tronc thyro-linguo-facial. L’anastomose
nerveuse a été réalisée avec le nerf lingual.
Il est important de conserver ou de reconstruire un plan musculaire sous
le lambeau, au niveau du muscle mylo-hyoïdien, de façon à réduire le
risque de fistule salivaire cervicale en cas de désunion ou de nécrose
partielle du lambeau.
Le drainage est réalisé à l’aide d’une lame multi-tubulée.
La fermeture du site donneur est ensuite réalisée de 3 façons :
-
-
Fermeture directe le plus souvent. La largeur maximale du lambeau
dépend du morphotype du patient, mais elle est généralement
inférieure à 8 cm.
Fermeture à l’aide de 2 lambeaux d’avancement vascularisé a retro par
des perforantes issues des réseaux anastomotiques du genou.
Cicatrisation dirigée, éventuellement assistée initialement par une
thérapie à pression négative.
Les greffes cutanées ne sont plus utilisées : compte tenu de
l’importante mobilité du muscle quadriceps et de la difficulté
d’immobiliser complètement le membre inférieur, la prise de greffe est
mauvaise.
108
6.6.7 Gestion péri-opératoire
6.6.7.1
Anticoagulation
L’anticoagulation est débutée en période per-opératoire, dix minutes avant
le clampage, par de l’énoxaparine (LOVENOX®) à la dose de 30 UI/kg en
intraveineux (ou daltéparine sodique - FRAGMINE® 35 UI/kg). Lors des
24 premières heures postopératoires, cette héparine de bas poids
moléculaire est poursuivie par voie sous-cutanée, à la dose de 30 UI/kg
deux fois par jour ; la première injection étant réalisée 12 heures après
l’injection per-opératoire. A partir du 2ème jour, et jusqu’au 15ème jour
postopératoire, l’énoxaparine est poursuivi à la dose de 60 UI/kg une fois
par jour. En cas de contre-indication aux héparines de bas poids
moléculaire (troubles de l’hémostase, thrombopénie ou insuffisance
rénale), l’héparine non fractionnée sera utilisée par voie intraveineuse.
6.6.7.2
Antibiothérapie
En reconstruction cervico-faciale, l’antibioprophylaxie repose sur
l’amoxicilline
et
acide
clavulanique
(AUGMENTIN®).
Elle
est
habituellement arrêtée au deuxième jour post-opératoire. En cas
d’allergie, clindamycine (DALACINE®) et gentamicine (GENTALLINE®)
sont associés.
6.6.7.3
Autres
Le remplissage vasculaire est adapté à la chirurgie, en fixant pour
objectifs une variation de la pression artérielle moyenne inférieure à 30%
de la pression de base, et une hémoglobinémie supérieure à 10 g/dl.
6.6.8 Suites postopératoires
Soins locaux de la cavité buccale et bains de bouche pluriquotidiens.
Reprise de l’alimentation 48h après la décanulation et sous la surveillance
d’une orthophoniste.
109
7
Présentation des reconstructions de langue
par le lambeau antérolatéral de cuisse
Le lambeau ALC possède maintenant de nombreuses indications en
chirurgie reconstructrice cervico-faciale et en particulier en reconstruction
linguale. Nous présentons ici l’expérience de l’Institut Gustave Roussy
dans son utilisation puis nous verrons quelles sont les modifications de
l’algorithme décisionnel en fonction des pertes de substance.
7.1 Materiel
7.1.1 Cohorte de patients
L’étude concerne 23 patients, tous opérés à l’Institut Gustave Roussy
entre 2000 et 2008. Le recul moyen est de 20 mois [6 – 84].
Elle comporte une majorité d’hommes (sex ratio 2,6).
La moyenne d’âge dans la série est de 55 ans (23 – 63).
7.1.2 Maladie carcinologique
Les patients présentent des stades T3 ou T4 de la classification TNM et le
statu ganglionnaire était N0 ou N1 pour la plupart, 4 patients étaient
classés N2.
4 patients avaient déjà eu une intervention linguale et présentaient une
récidive locale.
Le type histologique le plus fréquent est le carcinome épidermoïde.
La plupart des patients ont eu une radiochimiothérapie adjuvante et 7
patients ont eu une chimiothérapie néo-adjuvante.
110
N° patient Recidive
1
2
3
4
5
6
7
8
9
non
non
non
non
non
non
oui
non
non
10
non
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
non
oui
non
oui
oui
non
non
non
non
non
non
non
non
Type histologique
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Rhabdomyosarcome
embryonnaire
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome adénoïde kystique
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Carcinome épidermoïde
Classification TNM Traitements associés à la chirurgie
T4N1M0
T4N2cM0
T4N0M0
T3N0M0
T3N0M0
T3N2aM0
T4N0M0
T3N0M0
T3N2aM0
radio chimio adjuvante
chimio néo + radiochimio adjuvante
Radiochimio adjuvante
radiochimio adjuvante
radiochimio adjuvante
radiochimio adjuvante
Chimio adjuvante + radiochimio adj
Radiochimio adjuvante
chimio neo + radio adjuvante
T4N0M0
chimio neo + radio adjuvante
T4aN0M0
T3N0M0
T4aN0M0
T4aN0M0
T3N0M0
T4N1M0
T4aN2bM0
T4aN2cM0
T4N0M0
T3N0M0
T4N1M0
T4N0M0
T4N0M0
radio adjuvante
radiochimio adjvantes
radio adjuvante
radiochimio adjuvante
chimio neo + radio adjuvante
radiochimio adjuvante
radiochimio adjvantes
radiochimio adjuvante
chimio neo + radiotherapie adjuvante
Radiochimio adjuvante
Chimio néo + radiochimio adjuvante
Radiochimio adjuvante
Radiochimio adjuvante
111
7.1.3 Technique opératoire
L’intervention est réalisée en double équipe : 1 équipe d’ORL qui réalise
l’exérèse carcinologique et 1 équipe de plasticiens qui prélève le lambeau
ALC. Elles agissent en simultané.
Les voies d’abord pour l’éxerèse linguale les plus souvent utilisées sont
celles de la mandibulotomie et du « pull-through ». L’abord cervical est
celui de Sebileau, ou une variante dérivée, permettant de réaliser
l’évidemment ganglionnaire cervical.
La technique opératoire du prélèvement du lambeau ALC a été décrite
dans le chapitre 6.
La gestion péri et postopératoire a été précedemment décrite.
7.2 Méthode
L’étude a été réalisée de façon rétrospective pour la plupart des patients
mais aussi prospective dans certains cas.
7.2.1 Reueil des résultats sur dossier
7.2.1.1
Données per-opératoires
La perte de substance liée à l’exérèse carcinologique a été décrite selon la
classification d’Urken, modifiée.
La réalisation d’un curage cervical radical modifié est précisée.
Type de dessin pour le prélèvement du lambeau, dimensions de la palette
cutanée, côté du prélèvement.
Vascularisation de la palette : nombre et type des perforantes, origine du
pédicule, particularités anatomiques.
Inclusion d’un rameau nerveux sensitif.
Mode de fermeture du site donneur.
Durée opératoire.
112
7.2.1.2
-
-
-
Données postopératoires immédiates
Complications immédiates du lambeau : nécrose partielle ou totale,
nécessité de reprise chirurgicale, utilisation de pansements
spécifiques.
Complications du site de reconstruction : infection, hématome,
désunion, fistule salivaire.
Complications du site donneur : infection, hématome, nécrose des
berges cutanées, trouble de la cicatrisation, durée du pansement,
trouble de la statique du genou.
Complication médicale, indépendante directement de la reconstruction.
Durée de la trachéotomie.
Date de la reprise alimentaire et mode d’alimentation.
7.2.1.3
Suivi carcinologique
Statut du patient : vivant ou décédé, rémission complète ou récidive locorégionale et/ou à distance, décès lié au cancer ou à une pathologie
associée.
Traitements adjuvants réalisés : radiothérapie (dose totale cumulée),
chimiothérapie.
Recul par rapport à la fin du traitement.
Taux de survie à 1 an et à 3 ans.
7.2.1.4
Etude du site donneur
Celui-ci a été réalisé en consultation et comporte différents items qui
évaluent l’aspect de la cicatrice et de la cuisse, l’utilisation du membre
opéré, la gêne sociale et la sensibilité cutanée de la cuisse controlatérale.
Le détail du questionnaire est situé en annexe.
7.2.2 Recueil de résultats en consultation
Les patients ont été convoqués pour un examen clinique suivi d’une série
de tests fonctionnels et de qualité de vie.
7.2.2.1
Tests fonctionnels
Ils étudient différents modules : mandibule, réhabilitation dentaire,
mastication, labio-jugal, lingual, élocution, déglutition qui sont complétés
par une étude plus globale de la face, avec les modules oculo-palpébral,
respiration, olfaction et esthétique.
113
Ces différents modules comportent plusieurs questions et leur résultat est
exprimé par un score.
Ce test fonctionnel comporte ainsi 9 modules :
-
Mandibule
Réhabilitation dentaire et mastication
Labio-jugal
Lingual
Elocution
Déglutition
Oculo-palpébral
Respiration-olfaction
Module esthétique
=
=
=
=
=
=
=
=
=
32
34
26
13
26
19
29
16
35
points
points
points
points
points
points
points
points
points
Le score global est pondéré sur 100. Un score de 100 correspondant à un
patient sans déficit fonctionnel ; et le plus mauvais score noté à 0, à un
patient aux séquelles majeures.
Cette cotation est en cours de validation dans le cadre d’une étude
S.T.I.C. Chaque série de test a été réalisée par le même examinateur et a
été filmée.
Ces tests fonctionnels ont été répétés, à différents délais de la fin du
traitement, de manière à préciser l’évolution de la qualité des
reconstructions dans le temps :
-
-
Avant l’intervention chirurgicale pour les patients inclus dans le STIC
(test fonctionnel de référence).
6 mois après la fin du traitement (en considérant comme date de fin
de traitement la fin de la radiothérapie et/ou chimiothérapie adjuvante
si elle a eût lieu).
A la date de l’étude.
Le détail des modules est situé en annexe.
7.2.2.2
Tests de qualité de vie
L’évaluation de la qualité de vie des patients en carcinologie prend une
place croissante dans notre pratique quotidienne. Elle repose sur des
questionnaires remplis par le patient, et permet une analyse subjective de
la vie du patient à différents stades de sa maladie.
Depuis près de dix ans de nombreux questionnaires ont été développés.
En raison de leur utilisation courante, nous avons choisi de l’évaluer par 2
questionnaires de qualité de vie non spécifiques
EORTC QLQ C30
(« European Organization for Research and Treatment of Cancer ») et
114
PSS-HN (« Performance Status Scale Head & Neck ») ainsi que par un
questionnaire de qualité de vie spécifique tête et cou (EORTC QLQ
H&N35).
QLQ C30 :
Le QLQ-C30 est un questionnaire générique évaluant la qualité de vie
globale des patients atteints de cancer, quelle que soit sa localisation.
Il présente 5 dimensions fonctionnelles : fonctionnement physique,
limitation au travail ou dans les loisirs, vie familiale ou en société,
fonctionnement psychologiques et fonctions cognitives ; et 8 échelles de
symptômes : fatigue, nausées & vomissements, douleur, dyspnée,
insomnie, anorexie, constipation, diarrhées et un item isolé portant sur
les difficultés financières.
Le QLQ-C30 comporte ainsi 15 scores, chacun étant calculé comme la
somme algébrique des items qui s’y rapportent et étendu de 0 à 100. Pour
le score global de qualité de vie et les 9 scores fonctionnels, un résultat
élevé correspond à une bonne qualité de vie ou à une vie en bonne santé.
Pour les 5 scores de symptômes, un résultat élevé correspond à un grand
nombre de symptômes.
Les 2 dernières questions permettent de classer les patients par indice de
qualité de vie globale.
QLQ H&N35 :
Le QLQ-H&N35 est un questionnaire spécifique des cancers localisés au
niveau cervico-facial, quel que soit le stade de la maladie ou de la prise en
charge. Il doit être rempli avec le QLQ-C30.
Comme son nom l’indique, il comporte 35 questions regroupées en 7
dimensions : douleur, déglutition, goût et odorat, élocution, alimentation,
relation sociale, et sexualité ; et 11 items individuels.
Comme pour le questionnaire QLQ-C30, ces scores de symptômes sont
compris entre 0 et 100 et des scores élevés indiquent des problèmes
importants.
Ce questionnaire ne permet donc pas de donner un score de qualité de vie
globale : il n’est donc pas possible de hiérarchiser les patients sur le
module spécifique « tête et cou ».
Nous avons ainsi apprécié l’évolution de la qualité de vie de nos patients à
différents moments de leur prise en charge :
115
-
-
Avant l’intervention chirurgicale pour les patients inclus dans le STIC
(questionnaire de référence).
6 mois après la fin du traitement (en considérant comme date de fin
de traitement la fin de la radiothérapie et/ou chimiothérapie adjuvante
si elle a eût lieu).
A la date de l’étude.
Le détail des questionnaires de qualité de vie est situé en annexe.
PSS-HN :
L’échelle « Performance Status Scale Head and Neck » est également un
questionnaire spécifique utilisé carcinologie cervico-faciale.
Il présente 3 dimensions : alimentation en public, intelligibilité de
l’élocution et restrictions alimentaires. Chaque dimension présente un
score de 0 à 100, les scores les plus faibles témoignant d’une gêne
importante.
Echelle visuelle de bien être :
Elle permet aux patients de notre leur bien être global sur 10 points, avec
un principe de fonctionnement identique à l’échelle visuelle analogique.
7.3 Résultats
7.3.1 Cohorte de patients
Elle suit les statistiques de la littérature médicale : la plupart des patients
étaient des hommes, présentant un carcinome épidermoïde nécessitant
une résection importante (T3 ou T4), la plupart du temps N0.
7.3.2 Maladie carcinologique
3 patients ont présenté une récidive locale (13%), 3 patients ont présenté
une récidive ganglionnaire (13%) et 1 patient a présenté une seconde
localisation (4%).
Le taux de survie est de 69% au moment de l’étude : 6 patients sont
décédés de leur maladie (3 récidives locales et 3 récidives ganglionnaires)
et 1 patient est décédé des complications d’une cirrhose alcoolique à 4 ans
postopératoire (patient 5). Cependant, son décès a eu lieu entre le recueil
des données et l’analyse des résultats : c’est pourquoi, contrairement aux
autres patients décédés, les données ont pu être obtenues.
Un patient présente une deuxième néoplasie de la cavité buccale, distante
de la première.
116
N°
patient
Classification d’Urken
Groupe
Statut carcinologique
Survie
1
TM nf + FOM A + S
3
récidive ganglionnaire
Décès
2
TM nf + FOM A
3
rémission
oui
3
TM ½ + TB ½
4
récidive locale
Décès
4
TM ¾ + FOM A L droit
5
récidive ganglionnaire
Décès
5
TM nf + S
3
rémission
Décès (cirrhose)
6
TM ½ + TB ½
4
rémission
oui
7
TM ¾ + FOM A L gauche
5
récidive locale
Décès
8
TM ½ + TB ½ droite
4
Rémission mais 2ème
localisation
oui
9
TM ½ + TB ½ + FOM gauche
4
récidive ganglionnaire
Décès
10
TB ½
4
récidive locale
Décès
11
TM ½ + TB ½ + FOM A
4
rémission
oui
12
TM nf
3
rémission
oui
13
TB ¾
5
rémission
oui
14
TM nf + TB ¼
3
rémission
oui
15
TM ½ TB ½
4
rémission
oui
117
16
TM ½ TB ½
4
rémission
oui
17
TM nf + TB ½
3
rémission
oui
18
TM nf + FOM L + B droit
3
rémission
oui
19
TM nf + TB ½
5
rémission
oui
20
TB ¾
5
rémission
oui
21
TM nf
3
rémission
oui
22
TM nf
3
rémission
oui
23
TM ½ + TB ½
4
rémission
oui
118
7.3.3 Technique opératoire
Le dessin du lambeau est adapté à la perte de substance et aux nécessités
de la reconstruction.
Deux types de dessins ont principalement été utilisés : dessin bilobé
dérivé de la technique d’Urken (39%) pour les résections TM ½ + TB ½
permettant la reconstruction d’une hémi-langue, et le dessin du triptyque
de cathédrale pour les reconstructions TM nf de la langue mobile (26%).
Le dessin trifolié (21%) n’est plus utilisé actuellement en raison de ses
moins bons résultats fonctionnels que le dessin en triptyque de
cathédrale.
7.3.4 Données peropératoires
Les perforantes vascularisant la palette cutanée étaient de type D (82%),
E (39%) et C (4%) et au nombre de 3 (30%), 2 (39%) ou 1 (21%).
Chez 4 patients (17%), le pédicule était issus de la branche transverse de
l’artère circonflexe fémorale latérale, et non pas de la branche
descendante. Le premier lambeau réalisé possédait une perforante issue
du pédicule du fascia lata.
Le lambeau a pu être resensibilisé dans 65% des cas.
Dans certaines configurations anatomiques, il arrive qu’une branche
motrice du nerf fémoral chemine entre les perforantes vascularisant le
lambeau. Deux solutions différentes ont été réalisées :
- préservation de la branche nerveuse, ce qui implique de réaliser la
double (voire le triple, cas du patient 1) d’anastomoses vasculaires.
Cette solution est possible si les perforantes sont issues de pédicules
distincts ou de diamètre suffisant pour qu’une anastomose vasculaire
soit réalisée dans de bonnes conditions.
- Préservation des perforantes, avec section puis anastomose de la
branche nerveuse (fil microchirurgical + colle biologique).
119
N°
patient
Classification
d’Urken
Groupe
Dessin
cutané
1
TM nf + FOM A + S
3
Trifolié
2
TM nf + FOM A
3
Trifolié
3
TM ½ + TB ½
4
4
TM ¾ + FOM A L
5
Type et nombre
des perforantes
1D 1E 1 br fascia
lata
Sensibilisé
Particularités
peropératoires
Oui
3 pédicules distincts
2D
Non
0
Bilobé
2D
Non
0
5
Trilobé
2D 1E
Non
0
TM nf + S
3
Trifolié
1C 2D
Non
6
TM ½ + TB ½
4
Bilobé
1E 1D
Non
7
TM ¾ + FOM A L
5
Bilobé
1D 1E
Non
0
8
TM ½ + TB ½
4
Bilobé
2D
Oui
0
9
TM ½ + TB ½ +
FOM
4
Bilobé
2D
Non
0
10
TB ½
4
ALD
1E
Oui
0
11
TM ½ + TB ½ +
FOM A
4
Bilobé
1D
Oui
0
12
TM nf
3
Trifolié
1D 2E
Oui
Section / anastomose nerf
fémoral
13
TB ¾
5
ALD
2D
Oui
0
14
TM nf + TB ¼
3
Triptyque
1D
Oui
15
TM ½ +TB ½
4
Bilobé
1D
Oui
4 anastomoses
vasculaires
pédicule branche
transverse
Perforante issue du
pédicule transverse
Section / anastomose br.
nerf fémoral
120
16
TM ½ +TB ½
4
Bilobé
2D
Oui
Section / anastomose br.
nerf fémoral
17
TM nf + TB ½
3
Triptyque
1E
Oui
0
18
TM nf + FOM L + B
3
Triptyque
2D 1E
Oui
0
19
TM nf + TB ½
5
Triptyque
3D
Oui
0
20
TB ¾
5
ALD
2D
Oui
0
21
TM nf
3
Triptyque
1E 2D
Oui
0
22
TM nf
3
Triptyque
2D
Non
0
23
TM ½ + TB ½
4
Bilobé
1E 1D
Oui
Pédicule branche
transverse
121
7.3.5 Complications postopératoires
Deux désunions locales et 2 nécroses de pointe de langue sont à déplorer
en postopératoire, ainsi qu’un hématome du site donneur. Ces
complications ont nécessité une reprise au bloc opératoire sous anesthésie
générale. Un patient a présenté une fistule salivaire de résorbtion
spontanée sous traitement médical. Deux patients ont eu une perte de
leur greffe de peau lorsque la cuisse n’a pas pu être fermée en suture
directe. Ils ont été traités par cicatrisation dirigée.
La décanulation a eu lieu en moyenne entre J8 et J10, sauf chez les
patients ayant présenté une complication postopératoire : la durée de la
trachéotomie est alors rallongée d’une semaine environ.
Le reprise de l’alimentation a lieu 48h après la décanulation en moyenne.
122
N° patient
Complication
Reprise
chirurgicale
Décanulation
Alimentation per
os
Alimentation
1
0
0
J8
J11
PO
2
0
0
J8
J11
PO
3
0
0
J10
J13
PO + G
4
Désunion
Parage / suture
J14
J17
PO
5
0
0
J7
J9
PO
6
0
0
J6
J8
PO
7
0
0
J8
J10
PO mixé
8
0
0
J7
J13
PO mixé
9
0
0
J8
J10
PO
10
Hématome cuisse
Lavage
J12
J17
G
11
0
0
J8
J10
PO
12
Nécrose lambeaux
d’avancement
0
J7
J9
PO mixé
13
Nécrose GPM
0
J10
J12
PO + G
14
0
0
J10
J15
PO
15
Nécrose pointe
Parage / suture
J15
J17
PO mixé
123
16
0
0
J6
J14
PO
17
Désunion lambeau
Parage / suture
J7
J9
PO
18
Fistule salivaire
0
J7
J9
PO
19
0
0
J10
J12
PO mixé
20
0
0
J7
J9
PO
21
0
0
J8
J11
PO
22
Nécrose pointe
Parage / suture
J12
J15
PO
23
0
0
J10
J12
PO
124
7.3.6 Alimentation
A distance de la reconstruction, 3 patients (13%) avaient une nutrition
exclusive ou partielle par gastrostomie. Huit patients (34%) nécessitaient
un suivi diététique avec supplémentation nutritionnelle.
7.3.7 Evaluation du site donneur
La suture directe de la cuisse a pu être réalisée dans 73% des cas.
Dans les autres cas, la perte de substance a été traitée par greffe de peau
(13%), lambeaux d’avancement locaux (8%) ou cicatrisation dirigée
(6%).
Le résultat final de la cicatrisation est meilleur en cas de suture directe.
Seuls 8% des patients présentent une gêne sociale à cause de leur cuisse,
et 1 seul rapporte une gêne sportive.
125
N° patient
Dessin
cutané
Mode de
fermeture
Aspect
cicatrice
Aspect
cuisse
Gêne
sociale
Gêne
sportive
1
Triptyque
Suture directe
X
X
X
X
2
Triptyque
Suture directe
ABS
ABS
ABS
ABS
3
ALD
Suture directe
X
X
X
X
4
Bilobé
Suture directe
X
X
X
X
5
Triptyque
Suture directe
5/5
5/5
Non
Non
6
Bilobé
Suture directe
5/5
5/5
Non
Non
7
Bilobé
Suture directe
X
X
X
X
8
Bilobé
Suture directe
5/5
3/5
Non
Non
9
Bilobé
Suture directe
X
X
X
X
10
ALD
Suture directe
X
X
X
X
11
Bilobé
Suture directe
5/5
5/5
Non
Non
12
Triptyque
Cicatrisation
dirigée
3/5
4/5
Non
Non
13
ALD
Cicatrisation
dirigée
4/5
4/5
Non
Non
14
Triptyque
Suture directe
5/5
5/5
Non
Non
126
15
Bilobé
Suture directe
4/5
4/5
Non
Non
16
Bilobé
Suture directe
2/5
4/5
Oui
Non
17
Triptyque
Cicatrisation
dirigée
3/5
3/5
Non
Non
18
Triptyque
Suture directe
5/5
4/5
Non
Non
19
Triptyque
Cicatrisation
dirigée
3/5
3/5
Non
Oui
20
ALD
Cicatrisation
dirigée
3/5
3/5
Non
Non
21
Triptyque
Cicatrisation
dirigée
3/5
4/5
Non
Non
22
Triptyque
Suture directe
4/5
4/5
Oui
Non
23
Bilobé
Suture directe
5/5
5/5
Non
Non
127
7.3.8 Résultats fonctionnels
Dans notre série, Le score moyen des reconstructions est de 178/230, ce
qui correspond à 77% de la fonction.
Le score moyen des reconstructions TM nf est de 176/230 (173 – 178)
tandis que celui des reconstructions TM ½ + TB ½ est de 180/230 (164 –
195).
Mand = module mandibulaire / 32 points
Mastic = module mastication et réhabilitation dentaire / 34 points
Lab-jug = module labio-jugal / 26 points
Ling = module lingual / 13 points
Eloc = module élocution / 26 points
Déglu = module déglutition / 19 points
Ocul = module ocuo-palpébral / 29 points
Respi = module respiration et olfaction / 16 points
Esth = module esthétique / 35 points
Total sur 230 points.
La plupart des lambeaux présentent une sensibilité à la chaleur et un test
de Weber entre 10 et 15mm. La sensibilité à la pression est la plus
mauvaise, généralement supérieure à une pression exercée de 10g.
Il n’y a pas suffisament de lambeaux non sensibilisés évalués en
consultation, ce qui ne permet pas d’évaluer convenablement le bénéfice
de l’anastomose nerveuse.
128
N°
Urken
Groupe
Mand
Mastic
Lab-jug
Ling
Eloc
Déglu
Ocul
Respi
Esth
Tot
1
TM nf + FOM
3
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
2
TM nf + FOM
3
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
ABS
3
TM ½ + TB ½
4
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
4
TM ¾ + FOM
5
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
7
TM ¾ + FOM
5
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
9
TM ½ + TB ½ + FOM
4
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
10
TB ½
4
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
13
TB ¾
5
17
16
14
6
25
1
29
16
34
158
15
TM ½ +TB ½
4
18
10
18
3
24
12
29
16
34
164
5
TM nf + S
3
22
28
20
6
13
16
29
16
33
173
8
TM ½ + TB ½
4
21
18
18
6
21
12
29
16
32
173
18
TM nf + FOM
3
22
20
18
8
18
12
29
16
32
175
19
TM nf + TB ½
5
20
20
24
2
20
13
29
16
32
176
21
TM nf
3
26
23
18
1
18
12
29
16
33
176
12
TM nf
3
28
10
18
8
24
12
29
16
33
178
14
TM nf + TB ¼
3
14
27
24
1
22
16
29
16
29
178
129
22
TM nf
3
25
20
20
3
20
12
29
16
33
178
20
TB ¾
5
22
18
20
6
18
16
29
16
34
179
23
TM ½ + TB ½
4
23
18
18
8
22
13
29
16
34
181
16
TM ½ +TB ½
4
20
23
18
6
24
13
29
16
35
184
11
TM ½ + TB ½ + FOM
4
22
23
18
8
22
16
29
16
33
187
6
TM ½ + TB ½
4
27
23
16
7
26
17
29
16
34
195
17
TM nf + TB ½
3
27
20
22
8
23
18
29
16
34
197
130
N° patient
Dessin cutané
Sensibilisé
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
Trifolié
Trifolié
Bilobé
Trilobé
Trifolié
Bilobé
Bilobé
Bilobé
Bilobé
ALD
Bilobé
Trifolié
ALD
Triptyque
Bilobé
Bilobé
Triptyque
Triptyque
Triptyque
ALD
Triptyque
Triptyque
Bilobé
Oui
Non
Non
Non
Non
Non
Non
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Sensibilité chaud
/ froid
X
ABS
X
X
Oui
Non
X
Oui
X
X
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Test Weber
Monofilament
X
ABS
X
X
10mm
15mm
X
15mm
X
X
10mm
15mm
15mm
10mm
Non
10mm
10mm
15mm
20mm
20mm
15mm
20mm
15mm
X
ABS
X
X
10g
>10g
X
>10g
X
X
6g
>10g
10g
>10g
>10g
10g
10g
10g
4g
>10g
10g
>10g
10g
131
7.3.9 Qualité de vie
Les résultats des différents scores sont fournis sous forme de tableau,
après transformation des résultats des questions sous forme de fonctions
et de symptômes. Les questions qui sont utilisées pour obtenir un score
de fonction et de symptôme sont indiquées en annexe.
Pour les fonctions : un score de 100 points indique une fonction totalement
conservée :
Phys = physique
Trav = travail
Hum = humeur
Cogn = cognitif
Relat = relations
Pour les symptômes : un score de 0 indique l’absence de symptôme :
Asth = asthénie
N/V = nausées & vomissements
Doul = douleurs
Dysp = dyspnée
Insom = insomnie
Anor = anorexie
Constip = constipation
Diar = diarrhée
Fin = finances
132
Qualité de vie EORTC QLQ-30 : fonctions (vert) et symptômes (rose)
N°
patient
1
2
3
4
Phys
Trav
Hum
Cogn
relat
Asth
N/V
Doul
Dysp
Insom
Anor
Constip
Diar
Fin
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
5
100
100
75
100
100
11
0
0
0
33
0
0
0
0
6
93
67
75
100
75
33
0
33
0
0
67
0
0
0
7
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
8
93
100
100
100
100
11
0
0
33
33
0
0
0
0
9
10
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
11
67
67
50
100
33
50
17
83
0
33
67
33
0
0
12
100
100
75
83
100
0
0
0
0
0
0
0
0
0
13
87
67
50
83
67
0
0
0
0
33
67
0
33
0
14
87
100
75
83
75
33
17
33
0
0
67
0
33
0
15
67
67
50
100
33
78
33
33
0
0
67
0
67
0
16
100
100
100
83
100
0
0
33
0
0
0
0
0
0
17
87
67
8
33
33
78
17
83
33
33
67
67
33
67
18
87
100
75
100
33
11
17
33
0
0
33
0
0
0
133
19
87
100
75
83
75
50
33
33
0
33
67
33
0
0
20
87
67
67
100
17
44
33
33
0
0
33
0
33
0
21
100
100
100
83
100
0
0
33
0
0
33
0
0
0
22
87
100
75
100
75
33
0
0
0
0
33
33
0
0
23
100
67
75
100
75
0
0
0
0
33
33
0
0
0
134
Qualité de vie EORTC QLQ-H&N35 :
N°
PA
SW
SE
SP
SO
SC
SX
TE
OM
DR
SS
CO
FI
PK
NU
FE
WL
WG
1
2
3
4
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
5
0
17
0
0
0
0
33
0
0
33
0
0
0
0
0
0
0
100
6
0
42
17
67
50
7
33
33
33
100
100
33
0
0
100
0
0
0
7
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
8
0
42
0
22
17
0
17
100
100
100
0
0
0
0
100
0
0
0
9
10
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
11
33
25
17
67
50
33
33
0
0
100
33
33
33
100
0
0
0
0
12
25
25
67
56
100
40
0
0
100
100
100
33
0
0
100
0
0
100
13
17
50
17
22
100
60
50
33
33
67
67
0
33
0
100
100
0
0
14
33
25
17
22
25
33
67
33
33
33
67
33
33
0
100
0
0
0
15
33
25
0
22
42
47
50
0
0
100
33
0
33
100
100
100
100
0
16
0
42
0
22
50
33
33
0
0
100
67
0
33
0
0
0
0
100
17
25
8
50
11
33
20
50
33
0
67
67
33
33
100
0
0
100
0
18
33
25
17
22
100
20
33
33
0
67
33
33
0
0
100
0
0
100
135
19
17
50
17
22
25
7
33
33
33
67
67
0
0
100
100
0
100
0
20
8
100
17
78
100
60
0
100
33
0
100
0
0
100
0
100
100
0
21
33
25
17
22
33
20
33
33
33
67
67
33
0
100
0
0
0
0
22
25
50
67
56
33
33
0
33
0
67
33
0
33
0
0
0
0
0
23
25
50
17
22
67
33
33
33
0
67
33
0
0
0
0
0
0
100
PA
SW
SE
SP
SO
SC
SX
TE
OM
DR
SS
CO
FI
PK
NU
FE
WL
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
=
Douleur
Troubles de la déglutition
Troubles sensitifs
Troubles de la parole
Troubles repas en société
Troubles relations sociales
Troubles sexuels
Troubles dentaires
Limitation d’ouverture buccale
Xérostomie
Salive épaisse
Toux
Ressenti de la maladie
Prise d’antalgiques
Prise de suppléments nutritionnels
Sonde gastrique
Perte de poids
WG = Prise de poids
136
N° patient
PSS-HN / 100
Echelle visuelle de bien être / 10
Indice global QLQ-C30 / 100
1
X
X
X
2
X
X
X
3
X
X
X
4
X
X
X
7
X
X
X
9
X
X
X
10
X
X
X
21
77
7
58
15
32
4
67
20
8
7
67
18
58
8
67
22
80
8
67
8
58
7
67
14
72
5
75
13
58
7
75
17
77
7
75
137
19
38
7
75
5
82
8
75
12
35
9
75
16
72
6
75
23
72
8
75
11
60
8
83
6
50
9
92
138
N°
Groupe
Dessin
Score fonctionnel
Score global
qualité de vie QLQ
C30
1
3
Trifolié
X
X
2
3
Trifolié
ABS
X
5
3
Trifolié
173
75
18
3
Triptyque
175
67
21
3
Triptyque
176
58
12
3
Trifolié
178
75
14
3
Triptyque
178
75
22
3
Triptyque
178
67
17
3
Triptyque
197
75
10
4
Bifolié
X
X
3
4
Bifolié
X
X
9
4
Bifolié
X
X
15
4
Bifolié
164
67
8
4
Bifolié
173
67
23
4
Bifolié
181
75
139
16
4
Bifolié
184
75
11
4
Bifolié
187
83
6
4
Bifolié
195
92
4
5
Trifolié
X
X
7
5
Bifolié
X
X
13
5
ALD
158
75
19
5
Triptyque
176
75
20
5
ALD
179
67
ALD = à la demande (adapté à la perte de substance).
140
8
Discussion
Les patients concernés par la reconstruction linguale possèdent le plus
souvent un pronostic sombre, en particulier à cause du risque d’évolution
métastatique ganglionnaire ou général.
Cependant, la nécessité d’une reconstruction est aujourd’hui acquise, car
elle permet d’améliorer les résultats fonctionnels et les scores de qualité
de vie.
Celle-ci doit être effectuée lors du temps de l’exérèse carcinologique, car
la fibrose cicatricielle et la radiothérapie postopératoire rendent toute
réparation secondaire plus hasardeuse.
8.1 Etudes sur les résultats fonctionnels
Certaines études ont montré qu’en l’absence de chirurgie réparatrice, le
potentiel fonctionnel de la langue restante est rapidement diminué(32).
Les séquelles fonctionnelles sont proportionnelles au volume de la
résection, et sont nettement majorées lorsque celui-ci dépasse 25 à 50%
du volume lingual total(14, 44).
L’intérêt est manifeste lors des glossectomies totales puisqu’en l’absence
de reconstruction, les patients perdent leurs capacités de déglutition, de
phonation et de gustation de façon complète et irrémédiable. Surtout, ils
perdent les mécanismes de protection des VAS ce qui compromet à court
terme leur survie.
Les lambeaux libres ont permis d’étendre ou de revenir à des indications
chirurgicales nécessitant l’exérèse de lésions de plus en plus
volumineuses, permettant un bénéfice oncologique pour les patients. Et
bien que la qualité des techniques de reconstructions se soit largement
améliorée, la qualité des résultats fonctionnels et le bénéfice en terme de
qualité de vie pour les patients n’est pas aussi évident qu’il pourrait l’être.
C’est la quantité de langue réséquée qui est et qui reste l’élément le plus
déterminant des suites fonctionnelles. Plus exactement, c’est la quantité
de langue fonctionnelle restante qui est déterminant.
L’autre élément déterminant dans la qualité des résultats fonctionnels est
le volume du lambeau. Ceci découle directement du volume de langue
réséquée. Plusieurs études ont mis en évidence son importance lors de la
reconstruction linguale.
141
Certaines études retrouvent de moins bons résultats fonctionnels et de
moins bons indices de qualité de vie lorsque la reconstruction linguale a
été réalisée à l’aide de lambeaux pédiculés(113, 129). De façon générale,
les lambeaux pédiculés sont de moins en moins utilisés à cause de leur
manque de volume, de leur faible plasticité et de la traction exercée par le
pédicule. Ils conservent des indications chez les patients qui présentent
une contre indication aux lambeaux libres, un terrain précaire ou en
chirurgie de rattrapage.
Ainsi, l’utilisation des lambeaux libres musculaires avec ré-innervation
motrice semble une option intéressante, mais la radiothérapie
postopératoire est responsable d’une atrophie compromettant non
seulement la mobilité du lambeau mais aussi réduisant son volume. Cette
détérioration des résultats est particulièrement importante pour le
lambeau musculaire de latissimus dorsi, bien que le lambeau de rectus
abdomini soit aussi altéré par la radiothérapie.
Lorsque la reconstruction est effectuée par un lambeau fasciocutané (donc
inerte), il faut impérativement conserver un moteur lingual, généralement
fourni par la base de langue, de façon à permettre la mobilisation du
lambeau(44).
A notre connaissance, il n’existe qu’une seule étude prospective
randomisant la technique de reconstruction après exérèse d’un cancer
lingual, datant de 1998(88). McConnel retrouve un meilleur résultat
fonctionnel (déglutition et phonation) chez les patients qui ont eu une
fermeture directe par rapport aux patients ayant eu une reconstruction
par lambeau pédiculé. Plus étonnant, les résultats fonctionnels de
déglutition sont également meilleurs si l’on compare avec les résultats
d’une reconstruction par lambeaux libres (les pertes de substances sont
comparables, seule la méthode de reconstruction diffère).
Dans une publication étudiant la déglutition après reconstruction cervicofaciale avec lambeaux libres (incluant 191 cas), les autres facteurs
pronostics de mauvais résultat sont la radiothérapie préopératoire, la
glossectomie totale et les résections hypopharyngées(55).
Ainsi, la maitrise des différentes techniques de reconstruction linguale, en
particulier des lambeaux libres, a permis d’élargir les indications
chirurgicales oncologiques. Ils offrent également des résultats fonctionnels
meilleurs que les lambeaux pédiculés. Il est donc acquis pour la plupart
des auteurs que la reconstruction linguale par lambeaux libres apporte un
bénéfice fonctionnel aux patients, bien que le pronostic de la maladie
reste sombre. Les principaux facteurs pronostics de la qualité de la
reconstruction sont le volume de la langue réséquée, la radiothérapie
préopératoire et les résections étendues à l’hypopharynx.
142
Dans notre série, les plus mauvais résultats fonctionnels sont observés
dans le module lingual (en moyenne < 50% de la fonction).
Lorsque les patients sont classés en fonction de leur score fonctionnel
global, il est intéressant de constater que les résultats en dessous de la
moyenne de la série sont la plupart du temps chez les patients présentant
une résection complète de langue mobile (TM nf). Inversement, les
meilleurs résultats de reconstructions sont observés chez les patients
ayant au une hémi-glossectomie (TM ½ +TB½).
Il n’y a pas eu
suffisamment de glossectomies subtotales (TB ¾) pour pouvoir évaluer
correctement le résultat fonctionnel de la reconstruction.
Le résultat fonctionnel des TM nf est grevé par la perte totale des
fonctions de la langue mobile, que nous ne savons pas parfaitement
reconstruire, compte tenu de sa haute spécificité et de l’absence
d’équivalent dans le corps humain.
L’allogreffe de langue pourrait être une solution intéressante, mais les
difficultés d’obtention d’un greffon et la nécessité d’un traitement
immunosuppresseur
combiné
avec
une
radiothérapie
et
une
chimiothérapie postopératoire semblent réfuter son utilisation.
Dans l’avenir, seul le génie biomédical (engineering tissulaire) pourrait
offrir une solution de reconstruction plus satisfaisante, y compris pour la
restauration des capacités gustatives.
Dans les résections volumineuses de langue, TM ½ + TB ½, la langue
restante est préservée. L’utilisation de l’artifice décrit par Urken permet la
reconstruction du plancher buccal et offre ainsi une bonne mobilité du
lambeau. Ainsi, la langue restante sert de moteur à la reconstruction et
permet non seulement la propulsion de la langue reconstruite mais aussi
la restauration de la quasi intégrité de ses mouvements. La néo-langue
est guidée par la langue native dans ses nouvelles fonctions.
De même, la restauration d’un volume tissulaire satisfaisant favorise le
contact de la langue avec les arcades dentaires et le palais.
Ces 2 éléments (mobité de la reconstruction guidée par une langue
restante préservée et volume de la néo-langue) expliquent sans doute les
meilleurs résultats de ce type de reconstruction.
Il semble donc que le lambeau ALC, grâce au volume important qu’il
apporte, permette de compenser de façon efficace la perte de volume
lingual et les conséquences fonctionnelles qui en découlent : le volume de
l’exérèse linguale n’est donc plus un élément déterminant des résultats
fontionnels : c’est la perte totale d’un organe, la langue mobile, qui est
déterminante.
143
8.2 Etudes sur la qualité de vie après glossectomie
Dans notre série, 3 patients étaient alimentés par gastrotomie
(exclusivement ou en partiellement) à distance de leur reconstruction. Le
patient 10 (TB ½) a présenté une récidive précoce de son sarcome
embryonnaire, expliquant les difficultés d’alimentation. Les 2 autres
patients, 3 et 13, ont eu des résections de la base de langue (TB ½ + TM
½ et TB ¾). Au moment de l’étude, 2 patients étaient décédés, il n’a
donc pas été possible d’évaluer l’impact de la nutrition entérale sur la
qualité de vie. Le 3ème patient présentait quelques altérations de fonctions
(humeur et relations) ainsi que des symptômes digestifs (diarrhée,
anorexie).
Dans le questionnaire spécifique tête et cou (EORTC QLQ-H&N35), les
symptômes affectant le plus fréquemment la qualité de vie sont la
xérostomie, les douleurs chroniques, la prise de suppléments
nutritionnels, la gêne des repas en société et la perte de poids. Les
douleurs de ce questionnaires sont orientées sur la tête et le cou (bouche,
mâchoire, gorge, à la déglutition). Ainsi, les séquelles de la radiothérapie
et les difficultés alimentaires sont dans cette étude les principales causes
d’altération de la qualité de vie.
Il n’est pas retrouvé de corrélation entre la localisation de l’exérèse et la
qualité de vie.
De façon assez paradoxale, les patients qui ont plus de 4 symptômes
altérant la qualité de vie chiffrent leur état de bien être entre 7 et 9/10,
excepté un patient qui chiffre à 4. Ces indices ne sont pas en relation avec
le score PSS-HN.
Il existe une meilleure relation entre l’indice de bien être global fourni par
les patients et l’indice déterminé par les questions du questionnaire QLQC30.
Traditionnellement, le résultat de la chirurgie carcinologique a été évalué
par le taux de récidive local et la durée de survie des patients. Cependant,
il est devenu acquis que le résultat fonctionnel et la qualité de vie sont des
éléments importants à prendre en compte et depuis une dizaine d’années
de nombreuses études ont été réalisées.
Le nombre de publication évaluant la qualité de vie après traitement
chirurgical a cru de façon régulière depuis les années 2000 :
144
50
40
30
Publications
20
10
0
1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
La plupart des études de qualité de vie comprennent des cohortes de
patients avec des stades carcinologiques et des sites néoplasiques
différents : ce sont des cohortes de patients avec un cancer « de la tête et
du cou », ce qui rend difficile l’extrapolation des résultats aux
reconstructions linguales.
D’autre part, les traitements néoadjuvants et adjuvants ne sont pas
identiques
dans les différentes cohortes : cela représente un biais
important compte tenu de leur impact propre sur la qualité de vie.
Trois questionnaires sont le plus fréquemment employés : EORTC, UWQOL (University of Washington Quality of Life) et le questionnaire
fonctionnel après traitement du cancer (« functional assessment of cancer
therapy »).
8.2.1 Qualité de vie et chirurgie
Schliephake and Jamil(113) ont évalué la qualité de vie liée à la
déglutition chez des patients ayant eu un cancer de la cavité buccale avec
résection chirurgicale (questionnaires EORTC QLQ 30 et EORTC QLQ H&N
35). Les résultats les moins bons sont retrouvé chez les patients ayant eu
une résection antérieure large, une diminution postopératoire de la
mobilité linguale et chez ceux qui ont bénéficié d’une reconstruction par
un lambeau myocutané pédiculé. Les meilleurs résultats ont été observés
pour les petites lésions (T1) et lors des reconstructions avec un lambeau
libre fasciocutané. Il est intéressant de remarquer que la qualité des
résultats s’améliore avec le temps, entre 3 mois et 1 an après la fin des
traitements.
Ces résultats sont similaires à ceux de l’étude de Costa
Bandeira(27)(questionnaire de qualité de vie SWAL-QOL) : les facteurs
pronostics sont l’étendue de la résection et la radiothérapie. Le nombre de
145
patients étudiés avec une reconstruction par lambeau libre est faible (8
patients). Les difficultés les plus fréquemment rencontrées par les patients
ont été la propulsion du bol alimentaire, la présence d’aliments stagnant
dans la cavité buccale et les fausses routes.
Dans une étude portant sur 570 patients traités pour cancer des voies
aérodigestives supérieures(129), plusieurs facteurs affectant la qualité de
vie sont retrouvés. Le plus important est directement lié à la chirurgie : la
persistance d’une nutrition entérale 1 an après la fin des traitements
affecte l’activité physique et professionnelle. Viennent ensuite les
comorbidités médicales, la persistance d’une trachéotomie, les traitements
adjuvants (en particulier la chimiothérapie) et l’importance du stade
tumoral.
8.2.2 Qualité de vie et radiothérapie
L’impact de la radiothérapie a été évalué dans une étude
néerlandaise(74), portant sur 425 patients, évalués par EORTC QLQ 30 et
RTOG (Radiation Therapy Oncology Group) LRMSS (Late Radiation
Morbidity Scoring System). La radiothérapie a été associée à un
traitement chirurgical et/ou à une chimiothérapie. La qualité de vie est
directement affectée par les séquelles à long terme du traitement :
xerostomie et troubles de la déglutition induits par la radiothérapie.
Machtay(80) a mis en évidence 3 facteurs prédictifs d’effets secondaires
affectant la qualité de vie après radiothérapie : stade tumoral et âge
avancé ainsi que l’évidemment cervical après radio-chimiothérapie.
L’IMRT semble pouvoir apporter un bénéfice aux patients, en diminuant
l’irradiation des tissus adjacents à la tumeur et ainsi en diminuant les
séquelles de la radiothérapie conventionnelle, en particulier la
xérostomie(140). Cependant, une étude longitudinale prospective de
Fang(35) n’a pas permis de mettre en évidence de bénéfice en termes de
qualité de vie entre l’IMRT et la radiothérapie conventionnelle.
8.2.3 Qualité de vie et chimiothérapie
Les études évaluent généralement de façon conjointe la radiothérapie et la
chimiothérapie adjuvantes. Il est donc difficile de déterminer le rôle
propre de la chimiothérapie. Ceci dit, le principal facteur altérant la qualité
de vie est la nutrition par voie entérale, qui est peu influencée directement
par la chimiothérapie. Par elle-même, elle est responsable d’une fatigue
chronique(15).
146
8.2.4 Qualité de vie et facteurs psychologiques
Hassanein(45) a étudié chez 68 patients la qualité de vie (à l’aide des
questionnaires UW-QOL et EORTC QLQ C30) après cancer de la cavité
orale et a mis en évidence une relation directe avec les résultats
fonctionnels de la reconstruction ainsi que les mécanismes psychologiques
développés par les patients pour gérer les conséquences du cancer
(questionnaire MAC-Q). Il existe une association significative entre
dépression et mauvais résultat fonctionnel (25% des patients). Il existe
également une association significative entre dépression et réactions
psychologiques néfastes comme le fatalisme, les préoccupations
excessivement anxieuses et la sensation d’impuissance face à la maladie.
Ces facteurs psychologiques ne sont pas reliés au sexe, âge, stade initial
de la tumeur, site tumorale et modalités thérapeutiques.
Ces résultats sont corroborés par une étude de Ronis(108) chez 317
patients : les facteurs prédictifs de baisse de la qualité de vie 1 an après
la fin des traitements sont la dépression et la poursuite du tabagisme.
Klug(67) a utilisé les questionnaires EORTC QLQ 30 et QLQ H&N 35 chez
67 patients (vivants 2 ans après la fin des traitements) qui ont été traité
pour des lésions de la cavité orale et oropharyngée, de stades T2 à T4,
par radio-chimiothérapie préopératoire et chirurgie carcinologique avec
reconstruction par lambeau libre. Il s’agit donc d’une série importante et
relativement homogène. Les plaintes principales sont liées aux troubles
alimentaires (largement dépendants de la réhabilitation dentaire, non
prise en charge dans cette étude autrichienne) et aux difficultés de
phonation. Cette étude ne retrouve pas de différence significative, en
termes de qualité de vie, selon le stade tumoral, le site, le type de
résection ou le temps écoulé après le traitement. Elle met par contre en
évidence 2 groupes de patients (39 avec un bon indice de qualité de vie et
28 avec un mauvais) sans pouvoir déterminer de facteur prédictif de
qualité de vie. Il s’agit probablement des limites des questionnaires
EORTC qui évaluent mal les facteurs sociaux, familiaux et psychologiques
des patients.
8.2.5 Qualité de vie et facteurs sociologiques et économiques
Plusieurs études ont mis en avant l’impact des facteurs socioéconomiques
sur la qualité de vie après traitement d’un cancer de la tête et du cou.
Demiral(31) retrouve un effet bénéfique du niveau d’éducation et du
niveau socioéconomique, qu’il rapporte aux conséquences financières du
traitement du cancer (42% des patients rapportent une baisse de leurs
revenus). Cependant, le principal facteur déterminant reste l’obtention de
la sécurité sociale (étude britannique).
147
Il existe peu d’étude évaluant la qualité de vie après traitement d’un
cancer de la langue sur une population homogène et importante. La
plupart des études de qualité de vie ont été réalisées sur des cohortes très
hétérogènes, que ce soit en terme de site et de stade tumoral, de
traitement oncologique, de technique de reconstruction et de traitements
néo et adjuvants. Il est cependant rassurant de constater que les
principales études utilisent des questionnaires de qualité de vie
standardisés et validés. Certaines publications ont mis en évidence un lien
entre technique de reconstruction et résultats fonctionnels, valorisant ainsi
l’utilisation des lambeaux libres en reconstruction linguale. Cependant,
certaines études ne retrouvent pas de lien significatif entre résultats
fonctionnels et qualité de vie. Plusieurs études identifient des facteurs
pronostics de qualité de vie, bien que leur importance respective soit
variable selon les auteurs : stade tumoral (dont va découler le volume de
langue réséquée ou encore le volume de langue restante), méthode de
reconstruction, alimentation, radiothérapie, chimiothérapie, facteurs
psychologiques, sociologiques et économiques. Enfin, plusieurs auteurs
expriment leurs doutes sur la capacité des questionnaires à prendre en
compte l’ensemble des paramètres affectant la qualité de vie, ce qui
explique certains indices bas malgré un bon résultat fonctionnel, et vice
versa(37).
Ainsi, nos résultats de qualité de vie sont conformes à la littérature
médicale : les principaux facteurs diminuant la qualité de vie sont la
nutrition par voie entérale et les séquelles de la radiothérapie.
8.3 Séquelles du site donneur
Plusieurs études ont comparé les séquelles après prélèvement d’un
lambeau antebrachial et d’un lambeau ALC.
Les séquelles les plus fréquentes après prélèvement antebrachial sont :
hypoesthésie distale (46 à 76% selon les études), impossibilité de porter
un bracelet ou une montre (38%), intolérance au froid et aspect
esthétique (8 à 14%). La plupart des études ne retrouvent pas de séquelle
fonctionnelle entre les 2 membres supérieurs.
Au niveau de la cuisse, les séquelles les plus fréquentes sont : asymétrie
dans le relief des cuisses, retard de cicatrisation. Son prélèvement
n’entraine pas de modification biomécanique du genou(133). Odili
rapporte un cas de hernie musculaire ayant nécessité une reprise
chirurgicale(98).
Dans notre étude, les séquelles du site donneur sont largement
influencées par la possibilité de réaliser une suture directe.
Nous ne réalisons plus de greffe cutanée lorsqu’une partie de la perte de
substance est laissée en cicatrisation dirigée : la prise de greffe est
148
aléatoire à cause de la difficulté d’immobiliser complètement les chefs du
muscle quadriceps. Le risque de savonnage et de nécrose de la greffe est
donc élevé. Nous préférons utiliser des lambeaux d’avancement locaux
lorsque cela est possible. Dans le cas contraire, nous traitons la perte de
substance en cicatrisation dirigée, qui est le plus souvent longue (entre 1
et 3 mois).
Malgré tout, seuls 2 patients (8%) présentent une gêne sociale liée au site
donneur, et 1 seul (4%) rapporte une gêne sportive.
8.4 Intérêts du lambeau anterolateral de cuisse
Il offre un volume tissulaire plus important que le lambeau antebrachial,
tandis que sa composition fascio-cutanée lui permet de rester stable après
radiothérapie. D’autre part, son prélèvement n’entraine pas le sacrifice
d’un axe vasculaire majeur.
Le choix du lambeau, lorsqu’il se doit se faire entre le lambeau
antebrachial et le lambeau ALC, sera conditionné par l’importance de la
perte de substance, mais aussi par le morphotype du patient. Ainsi, chez
les patients obèses, les indications du lambeau antebrachial seront
élargies aux pertes de substances dépassant une hémi langue mobile (>
TM ½). A contrario, chez les patients maigres ou dénutris, celui-ci
n’apporte que très peu de volume : on lui préfèrera alors le lambeau ALC,
même pour les pertes de substance classées TM ½.
D’autre part, le lambeau ALC est également indiqué lorsque le test d’Allen
n’est pas concluant et qu’il existe un risque vasculaire pour le pouce.
Les séquelles du site donneur sont acceptables, parfois considérées
comme moindre que celle secondaires au prélèvement du lambeau
antebrachial(25, 77, 112, 139).
8.5 Que faire en l’absence de perforante satisfaisante ?
Bien que cette situation ne ne soit pas présentée dans notre série,
certaines études anatomiques et cliniques rapportent l’absence de
perforante satisfaisante pour le lambeau ALC. Cette fréquence est variable
selon les auteurs, allant de 0,89 à 5,4%(18, 48, 51, 78, 142) des
patients.
Plusieurs alternatives sont possibles :
-
-
Réalisation d’un lambeau perforant de tenseur du fascia lata,
vascularisé par la branche transverse de l’artère circonflexe fémorale
latérale.
Utilisation d’un lambeau perforant antéromédial de cuisse.
149
-
Utilisation d’un lambeau musculaire de vastus lateralis recouvert par
une greffe de peau.
Utiliser un lambeau issu d’une autre région anatomique.
8.6 Choix de la méthode de reconstruction et place du
lambeau antérolatéral de cuisse
L’utilisation du lambeau anterolatéral de cuisse est un rajout récent aux
techniques de reconstruction linguale. Sa place dans l’arsenal
thérapeutique reste encore à définir. Nous proposons ici une modification
de la répartition classique du choix de la technique de reconstruction en
fonction de la perte de substance.
8.6.1 Glossectomies marginales : groupe 1 (TM < ¼ et TB < ¼)
Nous avons vu que les petites pertes de substances seront préférablement
traitées avec des moyens simples et fiables : cicatrisation dirigée, suture
directe, greffe de peau semi-épaisse, lambeaux locaux.
8.6.2 Groupe 2 (TM ½)
L’emploi du lambeau antebrachial dans les hémiglossectomies de langue
mobile (TM ½) reste parfaitement adapté : de nombreuses études ont
montré sa fiabilité et la qualité des résultats de la reconstruction. Nous
utilisons préférentiellement la technique du lambeau sensible bifolié
d’Urken. Même s’il n’apporte pas un volume tissulaire important, la
persistance de l’hémilangue controlatérale et de la base de langue offre
des résultats fonctionnels satisfaisants.
Dans quelques cas, le lambeau ALC peut constituer une alternative
intéressante : chez les sujets très maigres, chez qui le lambeau apporte
très peu de volume et chez les sujets qui présentent une contre indication
au lambeau antebrachial. Dans ce cas, le lambeau sera dégraissé (« thin
flap ») de façon prudente afin de ne pas compromettre sa vascularisation.
Certains auteurs ont proposé des modifications techniques dans le
prélèvement du lambeau antebrachial, afin de palier au manque de
volume.
Ainsi, une équipe canadienne(116) propose d’inclure avec le lambeau
fascio-cutané classiquement prélevé le fascia et la graisse sous cutanée de
la totalité de la face antérieure de l’avant bras. Ce supplément tissulaire
est ensuite enroulé sur lui-même pour apporter suffisamment de volume à
la base de langue, au prix d’une dissection plus extensive de l’avant bras.
150
Photo 6: la technique de la "queue de castor"
Photo 7 : la partie proximale du lambeau est enroulée sur elle même pour créer
du volume en base de langue
151
8.6.3 Glossectomies totales de langue mobile : groupe 3 (TM nf)
Nous utilisons désormais le lambeau sensible ALC avec la technique du
triptyque de cathédrale. Cela permet d’apporter un volume tissulaire
satisfaisant et des tissus sensibles dont le volume reste stable après
radiothérapie. Cette technique permet également de reconstruire le ou les
planchers de la bouche.
8.6.4 Hémiglossectomie et glossectomie subtotale : groupe 4 (TB ½) et
groupe 5 (TB ¾)
Le lambeau sensible d’ALC, le plus souvent utilisé sous forme bifoliée
d’Urken, permet de réaliser une reconstruction respectant les principes
énoncés. Il faut cependant veiller à ce que la base de langue restante
constitue un moteur suffisant pour mobiliser ce lambeau inerte.
152
Le lambeau libre de rectus abdominis constitue une alternative.
8.6.5 Glossectomies totales : TG
Enfin, les glossectomies totales (TG) sont classiquement reconstruites par
un lambeau libre de rectus abdominis. Il apporte une volume tissulaire
relativement stable après radiothérapie et permet une suspension
laryngée efficace grâce à sa composante fascio-cutanée.
Cependant, les lambeaux fascio-cutanés peuvent également être utilisés
dans cette indication : le DIEP vertical permet d’obtenir une protection des
VAS ainsi qu’une élocution compréhensible. Son volume autorise un
contact entre le lambeau et les arcades dentaires ainsi que le palais.
Répartition relative des lambeaux ALC et antébrachial
dans la reconstruction linguale
10
9
8
Nombre
7
6
Anterolateral de cuisse
5
Antebrachial
4
3
2
1
0
2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Année
153
9
Conclusion
La langue est un organe complexe, unique et hautement spécialisé. Elle
constitue un élément clef au sein de plusieurs appareils fonctionnels. Les
cancers de cette région sont la principale cause d’exérèse linguale.
L’importance de l’exérèse linguale, associée aux mutilations des organes
de voisinages, conditionne le pronostic fonctionnel et parfois vital des
patients. Celles qui dépassent la ligne médiane compromettent la survie et
la qualité de vie du patient, et requièrent des procédés de reconstruction
complexes, faisant appel le plus souvent aux lambeaux libres.
L’objectif de la chirurgie réparatrice est d’apporter un volume stable dans
la reconstruction de la base de langue et de permettre la mobilité de la
néo langue mobile. Le chirurgien plasticien doit de plus assurer la
préservation des fonctions vitales, en évitant les troubles de la déglutition,
et reconstruire un organe fonctionnel et sensible permettant d’assurer une
élocution et une déglutition satisfaisantes.
Le lambeau libre le plus utilisé est le lambeau antebrachial radial. Dans le
cas des pertes de substances intermédiaires, celui-ci ne permet pas
d’apporter un volume tissulaire suffisant, élément clef de la reconstruction
linguale, ce qui a emmené le plasticien à rechercher d’autres solutions.
Le lambeau antérolatéral de cuisse sensible offre une alternative
intéressante : sa structure cutanéo-adipeuse apporte un volume tissulaire
plus important qui est stable après radiothérapie et permet la
reconstruction de la langue et du plancher buccal. Il n’implique pas le
sacrifice d’un axe vasculaire majeur.
Dans notre série, les résultats fonctionnels sont variables selon le type
d’exérèse : la reconstruction d’une totalité de langue mobile (TM nf)
donne de moins bons résultats que les reconstructions de base de langue
(TB ½ et TB ¾) et d’hémilangue (TM ½ + TB ½). Ainsi, c’est la perte
complète d’un organe, la langue mobile, qui affecte le pronostic
fonctionnel, tandis que les reconstructions après résection d’un volume
lingual important donnent de bons résultats. L’épaisseur du lambeau
compense donc de façon adéquate la perte de substance, en particulier au
niveau de la langue mobile.
Les indices de qualité de vie sont largement dépendants de la qualité de
l’alimentation : les principaux symptômes affectant le résultat sont les
conséquences de la radiothérapie (xérostomie, douleur buccales, salive
154
épaisse) et la nutrition exclusive ou partielle par une sonde de
gastrostomie.
Les séquelles du site donneur sont principalement esthétiques et
présentées comme plus acceptables que celles du lambeau antebrachial
bien que ce sujet puisse faire débat : lorsque la suture directe n’est pas
possible (30%), la cicatrisation dirigée est longue et le résultat esthétique
de la cicatrice et de la cuisse plus modeste. Par contre, lorsqu’elle est
possible, le résultat est excellent.
Le lambeau antérolatéral de cuisse trouve donc sa place entre le lambeau
antébrachial et les lambeaux plus volumineux comme le grand droit de
l’abdomen dans les pertes de substances intermédiaires de la langue,
notamment lorsque la résection dépasse l’hémilangue mobile mais
préserve une partie de la base de langue.
Il est également indiqué en cas de test d’Allen négatif car il peut être
dégraissé.
Ainsi, dans notre expérience, nous avons éliminé les lambeaux à
composante musculaire au profit des lambeaux fascio-adipo-cutanés dans
la reconstruction linguale.
Le choix final du lambeau dépend de l’étoffe de la composante adipeuse
du lambeau qui est appariée à la taille de la perte de substance et le choix
ultime est pondéré par le morphotype du patient.
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11 Annexes
11.1
11.1.1
Cas cliniques
Reconstruction
du
groupe
3
(TM
nf)
par
un
lambeau
antérolatéral de cuisse sensible, selon la technique du triptyque de
cathédrale
Patient 19, 52 ans présentant une lésion ulcéro-bourgeonnante de langue
mobile dont l’histologie est un carcinome épidermoïde. La lésion est
classée T4N0M0 et bénéficie d’une chimiothérapie néoadjuvante (5FU –
cisplatyl – taxotere).
Le traitement chirurgical a été une pelvi-glosso-mandibulectomie non
interruptrice par voie de pull through avec curage radical modifié bilatéral
et reconstruction par un lambeau libre ALC sensible.
164
165
166
11.1.2
Reconstruction groupe 4 (TM ½ + TB ½) par un lambeau
antérolatéral de cuisse sensible, selon la technique du lambeau
bifolié d’Urken
Patiente 15, 61 ans, présentant une lésion de l’hémilangue gauche dont le
type histologique est un carcinome épidermoïde. Bilan d’extension négatif.
La lésion est classé T3N0M0.
Une hémiglossectomie a été réalisée par voie de pelvi-glossomandibulectomie non interruptrice avec évidemment ganglionnaire
cervical bilatéral et reconstruction par un lambeau antérolatéral de cuisse
sensible.
167
168
11.1.3
Reconstruction TB ¾ par un lambeau antérolatéral de cuisse
sensible
Patient 20, 37 ans, présentant un carcinome épidermoïde centré sur le
sillon amygdaloglosse droit. Intoxication alcoolo-tabagique importante, la
pathologie n’est pas secondaire à une infection par HPV. La lésion est
classée T3N0M0.
Le traitement chirurgical réalisé à été une bucco-pharyngectomie droite
par voie de mandibulotomie associée à un évidemment ganglionnaire
cervical radical modifié droit et reconstruction par un lambeau
antérolatéral de cuisse sensible.
169
170
171
11.2
11.2.1
Questionnaire d’évaluation du site donneur
Test de la sensibilité du lambeau
Test au monofilament:
-
Positif à partir de :
-
Négatif
Test de Weber (2 point discrimination test): distance minimale =
Sensation chaud: O / N
Sensation froid: O / N
Sensation morsure langue: O / N
Pilosité du lambeau: O / N
Gêne causée par la pilosité: O / N
Sensibilité subjective:
- Douleur
- Fourmillements
- Engourdissement
- Xérostomie
Macroglossie ressentie : O / N
11.2.2
Test de la sensibilité de la cuisse controlatérale
Test au monofilament:
-
Positif à partir de :
-
Négatif
Test de Weber (2 point discrimination test): distance minimale =
172
11.2.3
Evaluation du site donneur
Aspect esthétique de la cuisse :
Très satisfaisante
Satisfaisante
Acceptable
Décevante
Très décevante
Voussure
Dépression
Diminution du diamètre de la cuisse significatif
Hernie musculaire
Aspect de la cicatrice :
Très satisfaisante
Satisfaisante
Acceptable
Décevante
Très décevante
Fine
Elargie
Hypertrophique
Pigmentée
Longueur
Gêne sociale : O / N
Changement des habitudes vestimentaires : O / N
Difficultés à la marche : O / N
Instabilité du genou : O / N
Test de la sensibilité de la cuisse opérée :
Anesthésie
Hypoesthésie
Normale
Localisation des troubles sensitifs :
Gêne sportive : O / N
Déficit force musculaire : O / N
Durée des pansements :
11.2.4
Questionnaire d’évaluation fonctionnelle
173
1 - Module Mandibule = 32 points
Positionnement
mandibulaire antéropostérieur
Articulé dentaire
Ouverture buccale
maximum (espace
inter-dentaire ou si
pas de dent : espace
mesuré – 1,5 cm)
Mouvement
mandibulaire
Normal
O/N
5
Rétrognatie
O/N
2
Prognatie
O/N
3
Espace inter-incisif médian
aligné
O/N
10
Décalage < 1 incisive
O/N
7
Décalage = 1 incisive
O/N
5
Décalage < 2 incisives
O/N
3
Décalage = 2 incisives
O/N
1
Décalage > 2 incisives
O/N
0
≥ 4 cm et plus
9
[3,5 et 4[cm
8
[3 et 3,5[cm
7
[2,5 et 3[cm
6
[2 et 2,5[cm
[1,5 et 2[cm
5
En cm
4
[1 et 1,5[cm
3
[0,5 et 1[cm
2
[0 et 0,5[cm
1
= 0 cm
0
Propulsion mandibulaire
O/N
2
Rétropulsion mandibulaire
O/N
2
Diduction droite
O/N
2
Diduction gauche
O/N
2
2 - Module réhabilitation dentaire et mastication = 34 points
Composition de la
dentition et 2 points
par bloc (noté par
bloc dentaire =
incisivo-canin,
prémolaire, molaire).
Au total 12 blocs
Présence de tous les blocs
Un bloc en moins
12
Nombre
de bloc
présent
-2
174
Broyage des cacahuètes
par bloc molaire droite
O/N
5
Broyage des cacahuètes
par bloc molaire gauche
O/N
5
Broyage des cacahuètes
par bloc incisivo-canin
O/N
2
Possible
O/N
10
Possible après chirurgie de
correction
O/N
5
Impossible
O/N
0
Former le O
O/N
2
Former le I forcé (sourire)
O/N
2
Faire un baiser
O/N
2
Retrousser les lèvres en dedans
O/N
2
Succion d’un doigt
O/N
2
Siffler
O/N
2
Gonfler les joues
O/N
2
Passer l’air d’une joue à l’autre
O/N
2
Quantité
en cc
10
Qualité de la
réhabilitation = test
de mastication
(peanut grinding
test)
Qualité de la
reconstruction de la
crête alvéolaire
(avec ou sans
réhabilitation,
possibilité purement
technique de
réhabilitation
dentaire)
3 - Module labio-jugal = 26 points
Water holding test =
50 cc maximum
50 cc
Tranche de 10 cc
-2
4 - Module lingual = 13 points
≥ 2 cm
[1,5 et 2[ cm
Tirer
la
langue
(patient de profil =
nombre de cm audelà du plan des
lèvres)
[1 et 1,5[ cm
Quantifié
en cm de
langue
visible
6
5
4
[0,5 et 1[ cm
3
[0 et 0,5[ cm
2
Mobilisation
antérieure
sans vrai mouvement
1
Absence de mobilisation
0
Claquer la langue
O/N
1
Toucher la face interne de la joue droite
O/N
2
Toucher la face interne de la joue gauche
O/N
2
Toucher le voile membraneux
O/N
2
175
5 - Module élocution = 26 points
Fluidité au test de
lecture (texte avec
tous les phonèmes):
Compréhension au
test de lecture (la
bise et le soleil):
Répétitions
syllabiques : Si
correctement
prononcées =1,
sinon =0
Tenues de voyelles
pendant 3 secondes
Répétition de « Non,
bonne Maman n’est
jamais montée à
Miami »
Répétition de « le
beau bébé babille
bruyamment »
Pas de mots butés
O/N
3
1 à 3 mots butés
O/N
2
> 3 mots butés
O/N
0
Texte compris
normalement
O/N
5
Sens du texte compris
O/N
4
Mots compris sans le
sens
O/N
2
Texte incompréhensible
O/N
0
pa apa
ap
O/N
1
ta
ata
at
O/N
1
ka aka
ak
O/N
1
ma ama
am
O/N
1
na ana
an
O/N
1
la
ala
al
O/N
1
ra
ara
ar
O/N
1
a
O/N
1
o
O/N
1
é
O/N
1
on
O/N
1
ou
O/N
1
i
O/N
1
u
O/N
1
Normale
O/N
2
Compréhensible
O/N
1
Incompréhensible
O/N
0
Normale
O/N
2
Compréhensible
O/N
1
Incompréhensible
O/N
0
6 - Module déglutition = 19 points
<60 sec
Temps de déglutition
du yaourt :
60 à 70 sec
70 à 80 sec
> 80 sec
3
En
secondes
2
1
0
176
Test de clearance de
la cavité buccale :
Reflux nasal testé
avec le yaourt :
Pas de résidu de yaourt
O/N
2
Taches éparses
O/N
1
Muqueuse buccale
enduite
O/N
0
Aucun
O/N
4
Notion
O/N
2
Objectivé au mouchage
O/N
0
Absentes
Fausses routes
1 épisode
2
Nombre /
24h
> 1 épisode
Alimentation :
1
0
Solide
O/N
6
Quelques exclusions
(Steak)
O/N
5
Mouliné (mastication)
O/N
4
Mixé (pas de
mastication)
O/N
3
Liquide
O/N
2
Gastrostomie:
O/N
0/1
O/N
2
Avaler le WHT sans fausse route
7 - Module oculo-palpébral = 29 points
Positionnement du
globe oculaire
Oculo-motricité =
absence d’une
diplopie
Fente palpébrale
Hauteur des pupilles
identique
O/N
5
Présence d’une
enophtalmie
O/N
-3
Présence d’une
exophtalmie
O/N
-3
Axiale
O/N
5
En haut
O/N
3
En bas
O/N
3
A droite
O/N
3
A gauche
O/N
3
Symétrie de la fente
palpébrale
O/N
5
Dystopie canthale
interne
O/N
-2
Dystopie canthale
externe
O/N
-2
Présence d’un épicanthus
O/N
-2
177
Voies lacrymales
Paupière inférieure
Œil sec
O/N
8
Epiphora modéré
(changement de T°)
O/N
6
Epiphora chronique
mais lecture possible
O/N
4
Epiphora chronique
empêchant lecture
O/N
2
Epiphora obligeant la
fermeture œil
O/N
0
Forme normale
O/N
6
Légère lagophtalmie
(cupulisation)
O/N
4
Franche lagophtalmie
O/N
2
Ectropion +
conjonctivite
O/N
0
8 - Module respiration-olfaction = 16 points
Odorat
Compétence nasale
objectivée
Normal
O/N
2
Diminué
O/N
1
Absent
O/N
0
passage de l’air dans la
narine gauche
O/N
1
passage de l’air dans la
narine droite
O/N
1
2 lavages par jour max
Présence de croûtes
4 lavages par jour max
Plus de 4 lavages
« Voix nasonnée »
Compétence vélo
pharyngée : Répétition
de « Papa est parti
pour Paris »
Répétition de « Que le
kakou kaki caquette
coquettement »
Nombre
de lavage
/ 24 h
4
2
0
non
O/N
4
Un peu
O/N
2
Beaucoup
O/N
1
Incompréhensible
O/N
0
Normale
O/N
2
Compréhensible
O/N
1
Incompréhensible
O/N
0
Normale
O/N
2
Compréhensible
O/N
1
Incompréhensible
O/N
0
178
9 - Module esthétique = 35 points
Score global du visage
0 à 5 points
Module cou
0 à 5 points
Module menton
0 à 5 points
Module lèvres
0 à 5 points
Module nez
0 à 5 points
Module joues
0 à 5 points
Module oculo-palpébral
0 à 5 points
Score de 0 à 5
5 = aspect parfait sans marque ni asymétrie
4 = aspect presque parfait (présence d’une petite asymétrie ou cicatrice
visible)
3 = présence d’une asymétrie franche ou de trace de chirurgie mais sans
déformation franche
2 = déformation franche et disgracieuse
1 = séquelles importantes de la chirurgie choquant le regard et difficile à
vivre
pour le patient
0 = absence complète de la région et de reconstruction
Chaque région est notée puis un score global du visage est donné
179
11.3
Questionnaire EORTC QLQ-C30
Questionnaire de santé : indiquez, s'il vous plaît, si, durant la semaine passée, vous avez
été affecté(e) par l'un de ces symptômes ou problèmes. Entourez, s'il vous plaît, le chiffre qui
correspond le mieux à votre situation.
1 = pas du tout
2 = un peu
3 = assez
4 = Beaucoup
Au cours de la semaine passée :
1. Avez-vous des difficultés à faire certains efforts physiques
pénibles comme porter un sac à provision chargé ou
une valise ?
1
2
3
4
2. Avez-vous des difficultés à faire une longue promenade ?
1
2
3
4
3. Avez-vous des difficultés à faire un petit tour dehors ?
1
2
3
4
4. Etes-vous obligé(e) de rester au lit ou dans un fauteuil
pendant la journée ?
1
2
3
4
5. Avez-vous besoin d'aide pour manger, vous habiller,
faire votre toilette ou aller aux toilettes ?
1
2
3
4
6. Avez-vous été gêné(e) pour faire votre travail ou
vos activités de tous les jours ?
1
2
3
4
7. Avez-vous été gêné(e) dans vos activités de loisirs ?
1
2
3
4
8. Avez-vous eu le souffle court ?
1
2
3
4
9. Avez-vous eu mal ?
1
2
3
4
10. Avez-vous eu besoin de repos ?
1
2
3
4
11. Avez-vous eu des difficultés pour dormir ?
1
2
3
4
12. Vous êtes-vous senti(e) faible ?
1
2
3
4
13. Avez-vous manqué d'appétit ?
1
2
3
4
14. Avez-vous eu des nausées (mal au cœur) ?
1
2
3
4
15. Avez-vous vomi ?
1
2
3
4
16. Avez-vous été constipé(e) ?
1
2
3
4
17. Avez-vous eu de la diarrhée ?
1
2
3
4
18. Etiez-vous fatigué(e) ?
1
2
3
4
180
19. Des douleurs ont-elles perturbé vos activités
quotidiennes ?
1
2
3
4
20. Avez-vous eu des difficultés à vous concentrer sur
certaines choses par exemple pour lire le journal
ou regarder la télévision ?
1
2
3
4
21. Vous êtes-vous senti(e) tendu(e) ?
1
2
3
4
22. Vous êtes-vous fait du souci ?
1
2
3
4
23. Vous êtes-vous senti(e) irritable ?
1
2
3
4
24. Vous êtes-vous senti(e) déprimé(e) ?
1
2
3
4
25. Avez-vous eu des difficultés pour vous souvenir
de certaines choses ?
1
2
3
4
26. Votre état physique ou votre traitement médical
vous ont-ils gêné(e) dans votre vie familiale ?
1
2
3
4
27. Votre état physique ou votre traitement médical
vous ont-ils gêné(e) dans vos activités sociales
(par exemple, sortir avec des amis, aller au cinéma...) ?
1
2
3
4
28. Votre état physique ou votre traitement médical
vous ont-ils causé des problèmes financiers ?
1
2
3
4
Pour les questions suivantes, veuillez répondre en entourant le chiffre entre
1 et 7 qui s'applique le mieux à votre situation :
29. Comment évalueriez-vous votre état de santé au cours de la semaine passée ?
1
2
Très mauvais
3
4
5
6
7
Excellent
30. Comment évalueriez-vous l'ensemble de votre qualité de vie au cours de la semaine
passée ?
1
2
Très mauvais
3
4
5
6
7
Excellent
181
11.4
Questionnaire EORTCS QLQ-H&N35
Au cours de la semaine passée:
Pas du
tout
Un peu
Assez
Beaucoup
31
Avez-vous eu mal dans la bouche?
1
2
3
4
32
Avez-vous eu mal à la mâchoire?
1
2
3
4
33
Avez-vous eu des douleurs dans la
bouche?
1
2
3
4
34
Avez-vous eu mal à la gorge?
1
2
3
4
35
Avez-vous eu des problèmes en avalant
des liquides?
1
2
3
4
36
Avez-vous eu des problèmes en avalant
des aliments écrasés?
1
2
3
4
37
Avez-vous eu des problèmes en avalant
des aliments solides?
1
2
3
4
38
Vous êtes-vous étouffé(e) en avalant?
1
2
3
4
39
Avez-vous eu des problèmes de dents?
1
2
3
4
40
Avez-vous eu des problèmes à ouvrir
largement la bouche?
1
2
3
4
41
Avez-vous eu la bouche sèche?
1
2
3
4
42
Avez-vous eu une salive collante?
1
2
3
4
43
Avez-vous eu des problèmes d'odorat?
1
2
3
4
44
Avez-vous eu des problèmes de goût?
1
2
3
4
45
Avez-vous toussé?
1
2
3
4
46
Avez-vous été enroué(e)?
1
2
3
4
47
Vous êtes-vous senti(e) mal?
1
2
3
4
48
Votre apparence vous a-t-elle
préoccupé(e)?
1
2
3
4
182
Au cours de la semaine passée:
Pas du
tout
Un
peu
50. Avez-vous eu des difficultés à manger devant
votre famille?
1
2
3
4
51. Avez-vous eu des difficultés à manger devant
d'autres personnes?
1
2
3
4
52. Avez-vous eu des difficultés à prendre plaisir
aux repas?
1
2
3
4
53. Avez-vous eu des difficultés à parler à d'autres
personnes?
1
2
3
4
54. Avez-vous eu des difficultés à parler au
téléphone?
1
2
3
4
55. Avez-vous eu des difficultés à avoir un contact
social avec votre famille?
1
2
3
4
56. Avez-vous eu des difficultés à avoir un contact
social avec vos amis?
1
2
3
4
57. Avez-vous eu des difficultés à sortir en public?
1
2
3
4
58. Avez-vous eu des difficultés à avoir un contact
physique avec votre famille ou vos amis
1
2
3
4
59. Avez-vous éprouvé moins d'intérêt aux
relations sexuelles?
1
2
3
4
49. Avez-vous eu des difficultés à manger?
60. Avez-vous éprouvé moins de plaisir sexuel?
1
2
Assez Beaucoup
3
4
Au cours de la semaine passée:
Non
Oui
61.
Avez-vous pris des anti-douleurs?
1
2
62.
Avez-vous pris des suppléments nutritionnels (à l'exclusion de
vitamines)?
1
2
63.
Avez-vous utilisé une sonde d'alimentation?
1
2
64.
Avez-vous perdu du poids
1
2
65.
Avez-vous pris du poids?
183
Dimensions
Questions
Score Global
29, 30
Physique
Fonctions
Travail et Loisirs
Humeur
6, 7
21, 22, 23, 24, 25
Fonctions Cognitives
20, 25
Vie Familiale et Sociale
26, 27
Asthénie
Nausées & Vomissments
Symptômes
1, 2, 3, 4, 5
10, 12, 18
14, 15
Douleurs
9, 19
Dyspnée
8
Insomnie
11
Anorexie
13
Constipation
16
Diarrhée
17
Difficultés financières
28
184
11.5
Questionnaire PSS
Dans chaque catégorie, veuillez entourer le chiffre correspondant à votre situation.
11.5.1
Manger en public
100. Je n’ai aucune restriction en ce qui concerne le lieu des repas, les aliments
ou les compagnons de table. Je peux sortir au restaurant quand je veux.
75. Je n’ai aucune restriction en ce qui concerne le lieu des repas, mais je
modifie mon régime alimentaire lorsque je mange en public (je peux manger où
je veux, mais je ne mange pas ce que je veux en public ; je choisis des aliments
moins difficiles à manger)
50. Je ne mange qu’avec certaines personnes et dans certains lieux choisis.
25. Je ne mange que chez moi et seulement avec certaines personnes.
0. Je ne mange que chez moi et tout(e) seul(e).
11.5.2
Intelligibilité de la parole
100. On me comprend toujours quand je parle.
75. On me comprend la plupart du temps.
50. On me comprend en général, mais seulement quand l’autre personne est en
face de moi.
25. On a du mal à me comprendre.
0. On ne me comprend jamais, je ne communique que par écrit ou par un autre
moyen.
11.5.3
Restrictions alimentaires
100. Je mange ce que je veux sans restriction.
90. Je mange ce que je veux, sauf les radis et les pommes de terre crus qui sont
trop difficiles à manger.
80. Je mange ce que je veux, sauf la viande qui est trop difficile à manger.
70. Je mange ce que je veux, sauf les sandwichs et la baguette qui sont trop
difficiles à manger.
60. Je ne peux manger ni le fromage sec, ni les biscuits.
50. Je ne mange que les aliments hachés ou mixés qui sont faciles à mâcher
(pâtes, steak haché, poisson, légumes cuits, etc.…)
40. Je ne mange que des aliments qui n’ont pas besoin d’être mastiqués (purée,
compotes, crèmes, etc.….)
30. Je ne mange que les aliments passés au mixeur.
20. Je ne consomme que des aliments liquides chauds ou froids.
10. Je ne consomme que des aliments liquides froids.
0. Je ne peux pas m’alimenter par la bouche ; j’utilise ma sonde exclusivement.
185
Objectif : évaluer la place du lambeau antérolatéral de cuisse dans la
reconstruction linguale.
Méthode : nous avons évalué les résultats fonctionnels et les indices de
qualité de vie chez 23 patients.
Résultats : Les résultats fonctionnels sont bons (77% de la fonction en
moyenne). L’amputation de la langue mobile donne les moins bons
résultats, témoignant des difficultés de reconstruction de cet organe
complexe et unique. Par contre, l’importance du volume de l’exérèse
linguale n’est plus un facteur pronostic. Les indices de qualité de vie sont
altérés par la nutrition entérale et les séquelles de la radiothérapie.
Conclusion : nous avons éliminé les lambeaux musculaires (volume non
stable après radiothérapie). Le choix final du lambeau fasciocutané
dépend de son volume qui est appariée à la taille de la perte de
substance. La place du lambeau antérolatéral de cuisse se situe entre le
lambeau antébrachial et les perforants de l’abdomen (pertes de
substances intermédiaires de la langue).
Indications
of
reconstruction.
the
anterolateral
thigh
flap
in
tongue
Objective: To assess the role of the anterolateral thigh flap in tongue
reconstruction.
Method: We evaluated the functional results and quality of life in 23
patients.
Results: Functional results were good (average of 77% of the functions).
Amputation of the mobile tongue gives the worst results, reflecting the
difficulties to reconstruct this unique and complex organ. On the other
hand, a large tongue resection is no longer a prognostic factor for the
functional outcome. Quality of life is affected by enteral feeding and the
complications of radiotherapy.
Conclusion: we do not use any muscle flaps anymore (loss of volume
after radiotherapy). The choice of the fasciocutaneous flap depends on its
volume that is matched to the size of the tongue loss. The place of the
anterolateral thigh flap is between the forearm flap and the abdominal
perforators flaps (intermediate loss of the tongue).
Chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique.
Mots clés : Lambeaux
reconstruction.
perforants,
antérolatéral
de
cuisse,
langue,
186

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