Le traitement des inégalités dans les établissements, reportages

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Le traitement des inégalités dans les établissements, reportages
dossier
INÉGALITÉS À L’ÉCOLE
Collège Pierre Perrin à Tremblay
TOUS ÉGAUX GRÂCE À
LA GRAVURE ET À L’ÉCRITURE
Le collège Pierre Perrin à Tremblay est engagé dans une opération
d’écriture et de gravure
avec l’association ATD Quart
Monde. Objectif : un brassage
culturel entre les familles du
collège.
Serge Bouvier, professeur d’arts plastiques au collège et Nathalie Gendre, permanente de l’association ATD Quart Monde (ici avec Perrine Paris et Yvette Parlot, bénévoles) : “la création n’a pas
de frontières socio-culturelles”.
d’ATD Quart Monde du canton d’Antrain.
Durant trois jours, les enfants “ruraux” ont
montré qu’ils pouvaient créer des œuvres
de qualité et s’exprimer devant un public
“très urbain” de parisiens. “On nous a fait
confiance. Il n’y avait pas de différence entre
nous”, racontait une des jeunes collégiennes
en rentrant de son séjour dans la capitale.
LE DROIT DE CRÉER
Il y a un peu plus d’un an, en février 1999,
une vingtaine d’élèves et de membres de
l’association ATD Quart Monde ont présenté leurs travaux de gravure et d’écriture
à la cité des sciences et de la Villette à Paris
à l’occasion des journées du “Livre contre la
misère”.
Ce moment fort était l’aboutissement de
quatre années de travail entre l’atelier de
pratique artistique Gravure du collège Pierre
Perrin à Tremblay et l’atelier d’écriture
Un réseau de compétences
Douze kilomètres séparent les collèges de
Saint-Brice-en-Cogles et de Tremblay. Arrivés
conjointement en 1998, Marie Morel et Claude
Jabot, chefs d’établissement, ont été
confrontés aux mêmes constats de ruralité et
aux mêmes interlocuteurs : la DRAC, le FRAC,
les collectivités et en particulier une
association “Mairie conseils” leur permettant
de proposer tout type de projets par le biais du
syndicat mixte des Marches de Bretagne.
D’emblée, ils ont donc décidé de mutualiser
leurs compétences. “Le collège de Saint-Briceen-Cogles possède une section européenne
avec un réseau de correspondants étrangers,
une galerie d’art à vocation pédagogique. Celui
de Tremblay un pôle artistique et technologique avec des compétences dans le
domaine d’internet”, souligne Claude Jabot,
principal du collège coglais. “De plus, nous
partageons du personnel : intendant,
enseignants en service partagé ce qui facilite la
liaison et le développement de projets
communs. Le voyage que nous organisons
ensemble au Québec est un premier exemple
de notre collaboration”. S’ils n’en sont qu’aux
balbutiements, à terme, les deux établissements souhaiteraient développer un volet
commun dans leur projet d’établissement.
Le partenariat entre l’association et le collège
est né d’un désir commun de lutter contre
un déficit socio-culturel du canton d’Antrain
à travers la réalisation de productions plastiques. “Nos deux démarches artistiques
visaient un même objectif : réaliser un brassage culturel entre des enfants de familles
modestes et plus aisées. La création n’a pas
de frontières socio-culturelles”, expliquent
Nathalie Gendre, permanente de l’association ATD Quart Monde et Serge Bouvier,
professeur d’arts plastiques du collège, chevilles ouvrières de ce projet.
Plusieurs mercredis par mois, des élèves du
canton d’Antrain se sont
ainsi retrouvés à l’atelier d’écriture d’ATD
Quart Monde puis à
celui de gravure du col-
lège. Les textes étaient élaborés avec l’aide d’une écrivaine Nicole
Laurent Catrice, puis les élèves apprenaient
les techniques de gravure, encadrés par Serge
Bouvier et Hervé Aussan, graveur.
Si l’opération a permis de faire travailler
ensemble des enfants de milieux différents,
elle a surtout donné aux familles une occasion d’entrer à l’école en dehors d’un
contexte scolaire. “Les parents venaient chercher leurs enfants, regardaient leurs travaux,
et peu à peu entraient dans l’école. À travers
les enfants, c’est un travail de rupture de l’isolement des familles et de liaison entre les
familles et l’école que nous réalisons”, explique
Nathalie Gendre. “Dans le canton, en dehors
du sport, il y a peu d’activités extra-scolaires :
chacune pose en effet le problème du coût, du
déplacement et du manque de motivation”,
poursuit Yvette Parlot, institutrice en retraite
et bénévole d’ATD Quart Monde.
A TERME, POSITIVER SON IMAGE
Cette opération s’est révélée en fait le point
de départ d’une réflexion approfondie. Situé
en zone rurale, à 40 kilomètres de Rennes sur
la route de Caen, le collège Pierre Perrin à
Tremblay scolarise 210 élèves et possède le
seul internat public sans spécificité du département. À ce titre, il
accueille des jeunes
en grande difficulté
scolaire ou sociale.
Le collège a décidé
de faire de l’ouverture
culturelle un combat
de chaque instant et a cherché à positiver son image. “Nous avions des
atouts dans le domaine des arts plastiques et
de la technologie, grâce au travail réalisé par
deux enseignants”, explique Marie Morel,
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MARS 2000
ATD Quart Monde :
Rompre l’isolement des
familles les plus pauvres
L’association ATD Quart Monde est implantée à Rennes depuis 1985. L’antenne coordonne les actions de Brest, Saint-Brieuc et
Laval. Ses objectifs sont de rencontrer des
familles en grande pauvreté, en ville et à la
campagne, notamment autour d’actions à
dominante culturelle : bibliothèques de rue,
universités populaires, ateliers de pratiques
artistiques… “Notre ambition est de rompre
l’isolement dans lequel se trouvent les
familles les plus pauvres et de faire comprendre que nous sommes tous des citoyens
à part entière”, explique Hervé Lefeuvre,
permanent de l’association à Rennes. “Nous
menons plusieurs projets avec des écoles et
des collèges, des responsables éducatifs
comme l’IUFM. Ces familles en difficulté,
qui ont eu le plus souvent un vécu extrêmement pénible avec cette institution, ont
compris que l’école représente un enjeu
considérable pour leurs enfants mais aussi
pour eux, adultes”. Les universités populaires auxquelles participent 80 familles de
toute la Bretagne démontrent ainsi qu’il
n’est jamais trop tard pour apprendre. ATD
Quart Monde souhaiterait maintenant développer un partenariat plus étroit avec l’IUFM
de Bretagne pour aider les enseignants à
mieux connaître et comprendre les familles
en grande pauvreté.
Séance de travail pour les élèves de l’option
Image et média
principale du collège. En 1998, un parcours
pédagogique diversifié Pratiques artistiques
se crée, axé sur la gravure, la technologie
(les collégiens numérisent leurs gravures et
les présentent sur Internet), et le français
pour l’écriture des textes d’accompagnement. À la rentrée dernière, grâce au soutien
de l’inspection académique d’Ille-et-Vilaine,
une option Image et média s’ouvre en classe
de quatrième. Les douze élèves qui la fréquentent ont ainsi déjà eu l’occasion de
découvrir le patrimoine du Mont-SaintMichel et de réaliser une vidéo durant leur
sortie avec l’aide de lycéens en section
Cinéma de Bréquigny à Rennes. Tous iront
également au Québec cette année avec
d’autres élèves du collège de Saint-Briceen-Cogles avec lequel le collège s’engage
dans une démarche de mutualisation de
compétences (voir ci-contre).
Pour lutter contre “un manque d’ambition
des jeunes, une pauvreté culturelle, des rapports complexes avec les familles”, Marie
Morel est convaincue de la nécessité de s’impliquer dans la vie du canton, de travailler
bien sûr avec la municipalité, mais aussi de
connaître les familles, les habitants de la
commune, les commerçants de Tremblay.
“C’est une question de crédibilité”. La principale a ainsi choisi d’habiter sur place et se
réjouit de voir des enseignants suivre cet
exemple.
NATHALIE LE GARJEAN
dossier
INÉGALITÉS À L’ÉCOLE
La zone d’éducation prioritaire de Brest
Proche des besoins des élèves
UN CONTRAT POUR RÉUSSIR
La zone d’éducation prioritaire de Brest existe depuis bientôt 20 ans. À la
rentrée dernière, elle a publié des résultats préoccupants sur la réussite
scolaire de ses élèves. Une situation contre laquelle la ZEP veut réagir avec
une nouvelle arme : le contrat de réussite.
établissement à l’autre. Depuis toutes ces
années, les collèges ont essayé de s’adapter,
au mieux, aux problèmes particuliers de
leur environnement.
Les directeurs d’écoles et principaux de collèges ont pris l’habitude de travailler en
conseil de zones. “Ce fonctionnement en
équipe nous permet de répartir les moyens
attribués à la ZEP sur la base des projets
(70 %) et des effectifs (30 %)”, détaille Gérard
Ferrec, inspecteur de la circonscription. Le
contrat de réussite a été signé pour trois ans.
Un bilan d’étape sera effectué chaque année :
l’occasion d’amorcer une culture d’évaluation réciproque entre les établissements et
l’institution.
BIEN VIVRE EN GROUPE
Réfléchir sur la tolérance à travers des saynètes créées par les jeunes.
Le contrat de réussite de la ZEP de Brest a
été signé en janvier dernier. Il est l’aboutissement d’un travail de fond entre tous les
partenaires concernés par la réussite des
élèves : écoles, collèges, inspection académique, rectorat. Claire Engrand est coordonnatrice de la ZEP et chargée de mission
au contrat de ville (1). Depuis quatre ans,
avec un œil attentif sur l’ensemble
des écoles et collèges de Brest,
elle étudie, évalue, coordonne
et mobilise tous les acteurs.
Les collèges Kéranroux, Kerhallet et
Kérichen font partie de la ZEP depuis 1982.
Pourtant leur situation n’est pas identique :
public d’élèves, profils des enseignants, liaison avec les écoles et le quartier varient sensiblement
d’un
CONSTATS PRÉOCCUPANTS
“Fuite d’élèves vers d’autres établissements, échec massif en sixième
des élèves des écoles de la ZEP, le diagnostic réalisé à l’occasion du contrat
de réussite a mis en évidence les difficultés sociales et scolaires de la ZEP”,
analyse Claire Engrand, sur la
base de l’étude d’une cohorte
de 85 élèves. Ces données
affichées dans le contrat
ont été présentées à
l’ensemble des parents
d’élèves, des partenaires
socio-éducatifs et des
collectivités. “Cela n’a
pas été sans susciter de
très vives réactions de
leur part, mais nous souhaitions jouer la carte de
la transparence complète et
retrouver la confiance des
familles”. La ZEP a donc
décidé d’axer tous ses
efforts sur le premier degré
et la sixième. “Notre ambition est de préserver une certaine mixité sociale à l’intérieur de
chaque établissement et donc d’enrayer la fuite d’élèves d’ici trois ans”,
explique Claire Engrand.
Dans le cadre du contrat de réussite, les collèges de Kéranroux, Kerhallet et Kérichen
réaffirment l’importance des apprentissages
fondamentaux et de l’éducation du futur
citoyen. Selon le cas, ils vont développer des
actions d’apprentissage, mettre en place ou
développer des actions de liaison entre instituteurs et professeurs de collèges : rencontres, réunions, formations communes. À
Kérichen, un travail de fond sur les nouveaux bulletins d’évaluation de sixième est
mené avec les enseignants.
L’un des objectifs du
contrat de réussite du
collège Kéranroux,
est de développer la
cohérence
entre
adultes. “Il s’agit d’établir un climat de travail
respectueux et serein”,
explique Stéphane Sachet,
principal du collège. Ainsi, plusieurs actions ont été organisées
depuis la rentrée dernière. Des rencontres avec un pédopsychiatre ont
été proposées à tous les personnels du collège afin d’aider ces
adultes à bien se positionner
face au comportement
souvent difficile des
enfants et des adolescents. “Ces réunions
sont très appréciées”,
souligne le principal.
Une commission “bienêtre” fonctionne au collège avec un intervenant
de l’équipe départementale
d’animation pédagogique
(EDAP). Elle permet à ses
membres — personnels,
représentants des parents
d’élèves, délégués élèves —
de participer à la réécriture
du règlement intérieur du collège et à son appropriation par tous.
“Dix-huit personnes : professeurs, aideéducateurs, personnels ATOS, surveillants et
Nicole Royant est enseignante de français au
collège Kérichen depuis treize ans. “Nous
avons réellement pris conscience de notre
statut de ZEP vers 1990. À cette époque, on
apportait un soutien particulier aux élèves
de sixième et cinquième en difficulté avec
quelques heures d’enseignement supplémentaires en français, en mathématiques, en
anglais”. Des ateliers étaient également
organisés pour les quatrièmes. Cette
démarche dura cinq ans. “Certains enfants
en tiraient profit. Pour d’autres, c’était trop
dur et insuffisant. Mais le plus ennuyeux
était que cette heure en plus les étiquetait
comme élèves faibles, ce qu’ils rejetaient”.
En 1995, par le biais de classes bilangues,
des classes de niveaux ont été réintroduites.
“Si le soutien ne suffisait pas dans les
classes difficiles, les moyens supplémentaires accordés au titre de la ZEP et grâce au
contrat de ville nous permettaient de mettre
en place des activités originales et de faire
venir des intervenants extérieurs”. Les
élèves ont ainsi pu travailler avec un écrivain,
un mime, participer à de nombreuses opérations de “lecture-écriture”. Avantages :
l’amélioration de l’image de ces classes et
des comportements agités des élèves.
Inconvénient : ces activités restaient dans le
domaine péri-éducatif.
L’école ne peut pas tout
Aujourd’hui, Nicole Royant a en charge la
remédiation en sixième. Chaque semaine,
elle prend en charge un groupe de huit
élèves en fonction de leurs résultats aux
tests d’évaluation. “Chaque mois, je sollicite
d’autres élèves pour faire rouler les effectifs :
deux classes et demi au total. Depuis la rentrée, une élève est sortie du groupe avec un
réel profit. Mais pour la plupart des autres,
ce travail est insuffisant, ces jeunes auraient
besoin d’un suivi individuel”. Ceux qui le
souhaitent peuvent bénéficier d’une aide
aux devoirs “mais ils n’en profitent pas beaucoup : ils considèrent cela comme une activité supplémentaire”. Malgré un sentiment
d’impuissance, “l’école ne peut résoudre
toutes les difficultés sociales endurées par
ces élèves”, l’enseignante de français admet
que ce suivi en petit groupe lui permet de
mieux connaître et valoriser les élèves qui
lui sont confiés : les siens et ceux des autres
classes. “Avec des sujets d’actualité, j’essaye
également de leur faire prendre conscience
de l’importance de l’école”. Pour Jean-Pierre
Petton, principal-adjoint du collège Kérichen,
les premiers bilans de fonctionnement de la
remédiation en mathématiques et en français sont assez positifs, mais il rencontre
des difficultés croissantes à impliquer des
enseignants dans cette activité effectuée
en heures supplémentaires.
parents d’élèves ont participé à notre récente
demi-journée de formation”, se réjouit
Stéphane Sachet.
Enfin, le 15 février dernier, et pour préparer
une semaine d’action citoyenne en avril,
une troupe de théâtre Charivari a organisé
une animation sur la citoyenneté. Le matin,
une heure a été banalisée en classe pour que
chacun puisse réfléchir sur des mots : violence, racisme, harcèlement moral, racket…
ou au contraire, tolérance, respect, écoute…
Toute l’après-midi, les élèves ont créé et joué
des saynètes sur ces thèmes.
“Ces opérations ne sont que quelques exemples
mais toutes doivent nous aider à former un
élève citoyen et responsable”, espère le principal. “La diminution du nombre des sanctions et des comportements d’incivilité, le taux
de participation des adultes nous serviront
d’indicateurs d’évaluation”.
(1) L’axe éducation et formation du contrat de ville, signé dans le cadre de la politique partenariale de l’État, permet de coordonner l’action des établissements du premier et du second degré et de disposer d’une enveloppe financière.
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MARS 2000
NATHALIE LE GARJEAN
dossier
INÉGALITÉS À L’ÉCOLE
Des métiers de garçons pour les filles
UNE QUESTION DE MENTALITÉ
Une exposition “pourquoi pas elles ?” démontre que des filles peuvent
exercer des métiers dits masculins.
À l’initiative de Nicole Guenneuguès,
chargée de mission “égalité des chances
entre les filles et les garçons”, les animatrices de l’Institut breton d’éducation permanente (IBEP) ont proposé à plusieurs
collèges de l’académie de présenter une
exposition “pourquoi pas elles ?” sensibilisant les filles à l’exercice de métiers dits
masculins.
Avec les collèges Pen Ar Cleuz à Brest et
Kerdurand à Riantec, le collège Malifeu à
Rennes a présenté cette exposition à ses
élèves et organisé une rencontre avec une
vingtaine d’élèves représentant leurs
camarades de quatrième.
À Malifeu, (320 élèves dont 6 handicapés),
l’opération s’intègre dans un projet global
de découverte des métiers et de respect des
différences. Pour l’équipe des trois professeurs principaux : Marie-Rose Brissot,
Valérie Juiff et Valentina Massiot, il s’agit
de “lutter contre les préjugés qui excluent les
femmes de certains métiers”. Conscientes
qu’en ce domaine leurs ambitions ne peuvent être que modestes, les enseignantes
espèrent contribuer à modifier la représentation que filles et garçons véhiculent
de ces métiers traditionnellement réservés
aux hommes. Depuis la rentrée 1999, les
élèves de quatrième ont ainsi participé au
Salon des arts et des métiers en octobre, à
Univers métiers en mars, visité le CIDF,
rencontré un directeur du centre de formation des apprentis, et entendu, au lycée
professionnel Mendès-France à Rennes,
les témoignages de filles minoritaires dans
leur formation. “Chacune de ces visites ou
rencontres fait l’objet d’un travail préparatoire et d’une exploitation sous la forme
d’une vidéo ou d’une exposition”, précisent
les trois professeurs principaux.
EXPOSITION ET RENCONTRE
Albane, Nadia et Geneviève, trois
anciennes stagiaires de l’IBEP, accompagnées des deux animatrices, Françoise Le
Verge et Johanna Bayle, ont témoigné de
leurs parcours professionnels devant un
public de quinze filles et garçons. Toutes
trois sont mariées et mamans. À 30 ans,
Albane vient d’être recrutée comme carreleuse dans une entreprise de bâtiment.
“J’ai une maîtrise de langues étrangères
appliquées et j’étais assistante de direction
commerciale dans une société d’export pendant plusieurs années, mais ce travail ne me
plaisait pas et j’ai décidé de me réorienter.
J’ai pris contact avec l’IBEP après avoir lu
un article sur cet organisme. J’ai choisi de
me réorienter dans le secteur du bâtiment et
j’ai obtenu un CAP de Carreleur”.
CONTACTS :
• IBEP: Institut Breton d’éducation permanente, 176
rue Jean Jaurès - 29200 Brest.
– Tél. : 0298463343
– Mél : [email protected]
• Nicole Guenneuguès, chargée de mission pour
l’égalité entre les filles et les garçons - SAIO rectorat.
– Mél : [email protected]
Nadia, titulaire d’un BEP de Comptabilitégestion a travaillé dans le prêt-à-porter, avant
de décider de s’arrêter pour réfléchir à ce
qu’elle voulait réellement faire. “La mission
locale m’a orientée vers l’IBEP où, à travers
différents stages en entreprise, je me suis rendue compte que je m’intéressais à la gestion
des stocks en entreprise, que j’aimais manipuler le chariot élévateur, organiser le rayonnage.
J’ai obtenu un BEP de Magasinage. Je travaille dans une entreprise de peintures pour
professionnels et je vais passer une licence de
cariste. J’ai vraiment trouvé ce que j’aimais
faire”.
Enfin Geneviève, sans formation, a découvert le métier de peintre en bâtiment à 35
ans, “Je travaille depuis 7 mois et tout se passe
très bien”.
Face à ces jeunes femmes, les élèves de quatrième très attentifs s’interrogent sur les
questions de gardes des enfants, sur la difficulté de trouver un stage, puis un emploi,
sur les conditions de travail…
Les réponses sont claires : “Après un moment
de curiosité, les chefs d’entreprise nous acceptent très bien. Certains recherchent même des
femmes pour assurer des tâches méticuleuses.
Mais nous ne sommes pas dupes, il y a actuellement de la place pour les femmes parce qu’ils
ne trouvent plus suffisamment d’employés.
Quand aux collègues, passé une période de
provocation, ils nous considèrent comme leurs
égaux.”
Nadia, d’origine marocaine, a dû se battre
un peu plus au sein même de sa famille qui
acceptait difficilement de voir une fille, une
sœur ou une épouse travailler dans un univers masculin. “J’ai dû faire comprendre à ma
mère que j’étais comme elle : au-delà des
apparences, c’était elle qui gérait le foyer”.
Toutes trois ont réussi à convaincre leur
entourage que l’essentiel était de faire une
activité que l’on aime et d’être satisfait de soi
chaque soir en rentrant à la maison. Un
message apparemment très bien reçu par les
collégiens et en particulier par une élève
dont la grand-mère était routière !
De très belles peintures sur bois de
couleurs vives constituent cette
exposition. Sous chacune d’elles, une
fiche d’identité : “Guilaine, 35 ans, BEP
secrétariat, a travaillé comme serveuse,
technicienne de surface, mère au foyer.
Aujourd’hui carreleuse après avoir obtenu
un CAP carrelage”. Ce travail a été réalisé
spécifiquement par les stagiaires qui ont
appris en trois jours les techniques de
dessin et de peinture et se sont
représentées elles-mêmes. Chacun des
panneaux raconte ainsi une histoire :
celles de femmes ayant choisi, par goût,
d’exercer un métier traditionnellement
réservé aux hommes.
NATHALIE LE GARJEAN
Collège du Penker à Plestin-Les-Grèves
L’ÉDUCATION EN CONTINU
Pour Françoise Jaouen, principale du collège, maintenir
un niveau d’exigence élevé est indispensable en zone rurale.
Avec 325 élèves et 56 salariés, notre collège
est le deuxième “employeur”de la commune
de Plestin-Les-Grèves, 3 413 habitants.
L’architecture est moderne et nous disposons
d’un internat. 93 % des élèves déjeunent sur
place, 60 % utilisent un transport scolaire.
37 % sont issus de milieux défavorisés. Si
les taux de réussite scolaire (évaluation en
sixième, passage en seconde générale), sont
légèrement inférieurs aux moyennes académiques et départementales, le problème
essentiel des jeunes est qu’ils manquent
d’ambition, de références professionnelles
diversifiées.
QUALITÉ DE VIE
Nous avons pourtant beaucoup d’atouts en
mains : d’excellentes conditions de travail
avec des bâtiments spacieux, des équipements d’informatique pédagogique et un
laboratoire de langues très modernes…
L’équipe éducative est stable - la mer et le bassin d’emploi de Lannion sont proches - et
dynamique. Cette qualité de vie nous donne
la possibilité de développer de nombreuses
actions qui toutes visent à lutter contre une
inégalité géographique et culturelle. La particularité de notre collège où les élèves arrivent à 8 heures et ne repartent qu’à 17 heures
est de devoir prendre en charge l’élève dans
sa globalité. Nous proposons ainsi des activités sportives et culturelles : atelier d’arbi-
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trage de football, de danse bretonne, club
d’échec… sorties au cinéma, au théâtre,
organisation d’un spectacle sur Notre-Dame
de Paris réalisé par les élèves et la chorale de
la commune. Sans oublier les voyages scolaires dans le cadre de notre section européenne…
EXIGENCES PÉDAGOGIQUES
Nous essayons de maintenir de fortes exigences pédagogiques à tous les niveaux d’apprentissage. La remise à niveau en sixième en
mathématiques et en français donne de bons
résultats. En mathématiques, les enseignants
sont satisfaits du travail d’individualisation
permis par les modules et en font bénéficier tous les élèves. En français, les groupes
sont constitués par niveau. Les actions “lectures”, “Défi” et autres, sont nombreuses et
le collège a inauguré une formule de piquenique littéraire. Un parcours pédagogique
diversifié sur la toponymie en Bretagne et
une option technologie en 3e ont été créés.
Les collèges ruraux ne sont pas à l’abri des
incivilités et des sollicitations illicites et faire
de la prévention est ici aussi indispensable.
Les heures de vie de classe assurées par le
professeur principal sont ainsi consacrées à
la prévention de la violence et à la gestion des
conflits, à des rencontres éducatives sur la
santé… Enfin, notre charte de secteur scolaire nous incite à structurer une liaison
MARS 2000
Le 14 mars dernier, avec l’aide de la commune, l’équipe éducative du collège a organisé
pour la première fois, et avec succès, un forum
des métiers réunissant 55 professionnels.
pédagogique entre le cycle 3 du primaire et
les enseignements de collège,y compris entre
les bibliothèques et centres de documentation. Des stages communs de formation
réunissent les enseignants de CM2 et de
sixième, par disciplines. Pour préparer leur
entrée au collège, les élèves de CM2 sont
également accueillis durant une demi-journée et déjeunent à la cantine.
S’OUVRIR SUR LE CANTON
Les partenariats sont nombreux : nous avons
en effet un rôle d’animation de la commune.
Les parents sont invités à s’impliquer en de
multiples occasions dans la vie du collège.
Nous organisons les rencontres parents-professeurs selon une formule de rendez-vous.
Résultats : 85 % des parents participent aux
réunions. Dans le cadre du comité d’environnement à la santé et à la citoyenneté, le
collège propose régulièrement des conférences tout public.
FRANÇOISE JAOUEN