Le crystal meth - Des entrevues révèlent son impact sur les hommes
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Le crystal meth - Des entrevues révèlent son impact sur les hommes
Nouvelles-CATIE Des bulletins de nouvelles concis en matière de VIH et d’hépatite C de CATIE. Le crystal meth - Des entrevues révèlent son impact sur les hommes séropositifs 15 avril 2009 Le « crystal meth », aussi connu sous le nom de « ice » or « Tina » est une forme du stimulant méthamphétamine. Fumer du crystal meth entraîne une accumulation rapide de cette drogue dans le cerveau, ce qui déclenche une intense euphorie. Les utilisateurs ressentent aussi un sentiment accru de : vigilance énergie bien-être Stimulées par une forte concentration de crystal meth, les cellules du cerveau libèrent des grandes quantités de neurotransmetteurs, lesquels sont probablement la cause des nombreux effets initiaux fort agréables de la drogue. Cependant la libération de ces neurotransmetteurs -—dopamine, norépinephrine et sérotonine — stimule le système cardiovasculaire, faisant monter la tension artérielle et le rythme cardiaque. À dose élevée, le crystal meth peut entraîner une crise cardiaque. La concentration élevée de crystal meth dans le cerveau peut entraîner la dépendance et causer des lésions cérébrales. Les utilisateurs de crystal meth peuvent connaître des épisodes de délire et d’hallucinations et moins fréquemment une élocution incohérente temporaire, lesquelles durent des heures ou des jours. Le délire souvent inclut des sentiments de persécution. Il en résulte donc que les personnes présentant une psychose induite par le crystal meth deviennent agitées, émotionnellement instables et même hostiles. Un des grands défis pour ce qui est d’aider les toxicomanes à vaincre leur dépendance au crystal meth est que cette drogue semble diminuer la capacité d’introspection quant à leur condition. De plus, les symptômes de sevrage chez les personnes qui tentent d’arrêter leur consommation de crystal meth sont désagréables et peuvent inclure : profond manque d’énergie difficulté à dormir irritabilité changements de l’appétit perte d’intérêt dans les activités quotidiennes usuelles anxiété dépression envie marquée pour le crystal meth Stephen Kish, PhD, un chercheur qui étudie les questions de dépendance à l’Université de Toronto, mentionne un autre important défi à l’effet que le « souvenir » de la dépendance pourrait être neuroanatomique et impliquer des changements structurels réels au niveau des cellules du cerveau rendant la dépendance résistante [au traitement]. Des expériences sur des animaux suggèrent que le crystal meth affaiblit le système immunitaire. Comme nombre de substances illicites, le crystal meth diminue le jugement et la pensée critique. Par voie de conséquence, il a été signalé que les utilisateurs de crystal meth adoptent des comportements à risque et deviennent infectés par le VIH et autres infections transmissibles sexuellement. Bien que la recherche se poursuive, il n’y a à date aucune thérapie approuvée pour traiter la dépendance au crystal meth. Aider les utilisateurs à vaincre leur dépendance fait appel à une thérapie psychologique. Malgré le potentiel de dépendance fort élevé du crystal meth, certaines personnes continuent de la trouver séduisante. Pour cette raison, des chercheurs à la Stanford University , en Californie, ont interviewé des hommes séropositifs faisant usage de la crystal meth dans le but de mieux connaître les raisons de leur consommation. Les résultats de leurs recherches publiés dans le numéro d’avril 2009 du journal Qualitative Health Research donne un aperçu précieux du monde de la méthamphétamine et suggèrent de nouvelles avenues à explorer pour aider les usagers à vaincre leur dépendance. Détails de l’étude L’équipe de recherche a recruté 22 hommes séropositifs décrits comme suit: 45 % avaient au moins 45 ans 75 % avaient fait usage de crystal meth au cours des derniers 30 jours 45 % avaient fait usage de crystal meth au cours de la dernière semaine 68 % avaient étudié au niveau collégial ou universitaire 73 % étaient actuellement célibataire La proportion de participants des principaux groupes ethno-raciaux était la suivante : 32 % étaient de race blanche 32 % d’ethnicité hispanique 23 % étaient de race noire Résultats—Contexte familial Près de la moitié des participants ont mentionné avoir des parents ou des frères ou sœurs faisant aussi usage de substances illicites. Dans certains cas, les participants dévoilaient être devenus alcooliques en bas âge. Voici ce qu’un des hommes disait : « Ma situation familiale était très sombre. Il y avait beaucoup d’abus physique, mental et émotionnel. De nombreux divorces, beaucoup d’alcoolisme. Tu te débrouilles de la façon que tu as appris à te débrouiller, même sans savoir que c’est-ce que tu fais. Pour moi, boire et consommer des drogues ont suivi. » Confrontés à la réalité Selon l’équipe de recherche, plusieurs participants étaient des hommes plus âgés qui vivaient avec le VIH depuis plus de dix ans. L’équipe notait que pour ces hommes « la transition entre participer activement à une communauté qui met l’accent sur la jeunesse, la beauté et le sexe prolifique, et des problèmes de vieillissement et de vouloir se ranger avec une personne avait été difficile. » Un des participants émettait le regret suivant : « Ma vie s’achève… c’est le vieillissement… c’est le sida. C’est la transition d’un partenaire à un autre. J’essaie de dire, je suis en transition mais non sans me battre jusqu’à la fin. » Soutien perçu Nombre de participants avaient l’impression que le crystal meth les avait aidés ou continuait à les aider à trouver soulagement face aux sentiments suivants : anxiété dépression chagrin solitude manque d’amour propre ne pas se sentir attrayant Plusieurs participants avaient le sentiment que le crystal meth les avait aidés à établir des liens avec d’autres personnes, « ne serait-ce que pour le sexe. » En plus de ces effets, les utilisateurs de crystal meth signalaient d’autres effets de l’utilisation de cette drogue qu’ils aimaient bien : meilleure capacité de concentration plus grande énergie dans l’exécution des activités quotidiennes Le sexe et le crystal meth Bien que le crystal meth ait une réputation chez certains hommes gais d’augmenter le plaisir sexuel, tous les hommes interviewés ne faisaient pas usage de crystal meth à cette fin. Cependant, pour certains qui l’utilisaient à cette fin, voici certaines des raisons invoquées : c’était la seule façon pour eux d’avoir des relations sexuelles avec leurs partenaires la drogue permettait à certains hommes « d’avoir des relations sexuelles fréquentes et plus orgasmiques » Une pente glissante Certains des hommes notaient qu’initialement ce n’est qu’occasionnellement qu’ils faisaient usage de crystal meth — pour atténuer leur anxiété ou parce qu’ils percevaient que sa consommation les rendait plus désirables —seulement pour découvrir en consommer plus fréquemment et, comme l’équipe de recherche l’indiquait, « la voir s’ingérer dans tous les aspects de leurs vies ». L’horreur de la dépendance Tous les participants étaient conscients de ce que les chercheurs appelaient « la destructivité générale » qui est souvent la conséquence de la dépendance au crystal meth. Voici certains exemples notés chez les participants à l’étude : « L’usage de crystal meth a détruit ma vie. J’avais une relation à long terme, j’avais un foyer, un emploi stable. Et, à cause du crystal, je n’ai plus rien de tout cela ». Un autre homme disait : « La drogue t’envahit tellement que tu perds le sens de qui tu es, tu ne sais plus qui tu es... » Nombre de participants signalaient avoir des sentiments de dépression, d’anxiété et de paranoïa après avoir consommé du crystal meth. Tous ces hommes faisaient usage de cette substance pour atténuer les sentiments suivants : dépression traumatisme gêne esseulement manque d’amour-propre Ces hommes avaient aussi noté que l’usage de crystal meth avait contribué à une détérioration de leur santé d’au moins une des façons suivantes. La drogue avait : joué un rôle dans leur acquisition de l’infection au VIH affaiblit leur système immunitaire réduit leur motivation à prendre soin d’eux-mêmes réduit leur motivation à prendre leurs médicaments anti-VIH, tel que prescrits Le crystal meth et les relations personnelles L'équipe d’étude a noté que pour plusieurs hommes le crystal meth constituait la seule façon d’établir des liens, « d’avoir des relations sexuelles ou autres interactions positives [avec d’autres personnes] ». Pourtant, plusieurs hommes avaient compris qu’avec le temps, leur consommation de crystal meth était devenue un obstacle à l’établissement de relations stables et heureuses. Les chercheurs ont aussi noté qu’un thème courant lors des entrevues était la divulgation de la présence de violence dans les relations suite à l’exposition au crystal meth. Une aliénation face aux valeurs La plupart des participants mentionnaient les valeurs fondamentales auxquelles ils s’identifiaient, notamment : l’honnêteté la générosité le comportement éthique l’engagement la spiritualité le comportement responsable l’exploration personnelle et la croissance [positive] Cependant, seulement certains des hommes avaient noté que la consommation de substances en général et plus particulièrement du crystal meth était en contradiction profonde avec ces valeurs énoncées. Souhait de s’en sortir Presque tous les hommes avaient essayé de se libérer de l’emprise du crystal meth mais seulement quelques-uns avaient réussi à demeurer sans consommation de crystal meth pendant plus d’un an. Cela appuie les résultats de recherches antérieures qui montrent que cette drogue crée une forte dépendance. Parmi les hommes qui avaient tenté d’arrêter, ceux qui ont réussi ont trouvé qu’au moins un des changements draconiens suivants avaient aidé : déménager dans une autre ville créer un nouveau réseau d’amis et de connaissances rétablir les liens avec leurs familles Réfléchissant sur sa réussite à se sortir de sa dépendance au crystal meth, un des hommes disait : « Développer un réseau de soutien et me tenir loin des endroits où j’avais consommé et des personnes avec qui j’avais consommé ont été les premières choses qui m’ont aidé à me maintenir sans drogue. » Plusieurs des hommes qui ont tenté d’arrêter de consommer étaient motivés par au moins l’un des facteurs suivants : prise de conscience que l’usage de crystal meth dégradait leur santé pertes d’amis ou d’êtres chers en raison de leur comportement décès d’une personne aimée suite à l’usage d’une substance Mécontentement Une grande proportion des participants pensaient que le passage d’un emploi à temps plein à un soutien d’invalidité avait joué un rôle dans leur descente vers la dépendance. Plus spécifiquement, les hommes avaient noté qu’être en invalidité avait entraîné une perte graduelle de sens à la vie et de buts à y donner. Le crystal meth était utilisée par de nombreux hommes participant à cette étude pour soulager ce que l’équipe de la recherche a appelé « les fardeaux de leurs vies ». Les hommes ont agi ainsi bien que conscients que le soulagement que procure le crystal meth n’est que temporaire. Des raisons spécifiques pour un tel usage de crystal meth étaient les suivantes : vivre avec VIH/SIDA être en invalidité grave dépression désespoir Les hommes qui faisaient usage de crystal meth pour atténuer ces sentiments ont dit à l’équipe de recherche qu’ils faisaient de « l’automédication ». Un changement de perspective? L’équipe de recherche a écrit « qu’il y a une hypothèse courante à l’effet que l’usage et l’abus de substances va nécessairement à l’encontre des valeurs d’une personne et diminue le sens de la vie ». Cependant, les résultats révèlent que des entrevues plus à fond suggèrent que les hommes faisaient usage de crystal meth pour atteindre certains de leurs objectifs, notamment : accroitre leurs relations interpersonnelles essayer de se sortir d’une dépression avoir assez d’énergie pour les activités requises de la vie de tous les jours. Ces résultats suggèrent que les participants à cette étude utilisant le crystal meth pouvaient avoir des besoins sousjacents complexes portant sur la santé mentale et des questions psychosociales. L’équipe de recherche de Stanford suggère que les programmes de réhabilitation du crystal meth peuvent devoir envisager de nouvelles approches « à travers desquelles les gens se reconnaissent et à partir desquelles ils peuvent faire des choix différents [et sains] ». Les chercheurs ont encouragé les programmes de réhabilitation du crystal meth à ne pas seulement se limiter à s’occuper du « comportement problématique » mais aussi à : comprendre le contexte ayant mené à ce comportement incorporer ce qu’une personne conçoit comme importante et qu’elle a à cœur pour changer les choix comportementaux aider à se rallier au concept d’avoir une vie constructive et qui ait un sens le traitement doit se faire dans un climat exempt de jugements de valeur aider à faire face aux problèmes reliés à l’identité gaie et à sa relation avec l’usage de crystal meth La question de fatigue a été soulevée par les participants à cette étude. D’autres études ont confirmé que la fatigue peut être un problème lors d’infection au VIH. Cela peut être relié à la dépression et à l’anxiété, aux déficits hormonaux, à l’anémie et autres problèmes exigeant une investigation médicale. Il est à souhaiter que les résultats et les suggestions émises par cette étude serviront à améliorer les programmes visant à décourager l’usage de crystal meth et à le traiter. —Sean R. Hosein RÉFÉRENCES : 1. Chartier M, Araneta A, Duca L, et al. Personal values and meaning in the use of methamphetamine among HIVpositive men who have sex with men. Qualitative Health Research . 2009 Apr;19(4):504-18. 2. Urbina A, Jones K. Crystal methamphetamine, its analogues and HIV infection: medical and psychiatric aspects of a new epidemic. Clinical Infectious Diseases . 2004 Mar 15;38(6):890-4. 3. Koblin BA, Husnik MJ, Colfax G, et al. Risk factors for HIV infection among men who have sex with men. AIDS . 2006 Mar 21;20(5):731-9. 4. Day JJ, Carelli RM. Methamphetamine induces chronic corticostriatal depression: too much of a bad thing. Neuron. 2008. 2008 Apr 10;58(1):6-7. 5. Bamford NS, Zhang H, Joyce JA, et al. 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