Beethoven experience - Médiathèque de la Cité de la musique

Transcription

Beethoven experience - Médiathèque de la Cité de la musique
André Larquié
président
Brigitte Marger
directeur général
La cité de la musique rend hommage à Beethoven à travers deux expériences
particulièrement originales : la chorégraphie des Variations Diabelli op 120 par la
danseuse post-moderne américaine Twyla Tharp et l’intégrale des Quatuors à
cordes par le Quatuor Lindsay, une formation britannique actuellement appréciée pour sa lecture radicale et énergique de Beethoven.
introduction
page 3
Quatuors à cordes nos 1, 12 et 9
page 8
vendredi 4 juin à 20h
Quatuors à cordes nos 3 et 16
page 16
samedi 5 juin à 15h
Quatuors à cordes nos 2 et 8
page 20
concert du samedi 5 juin à 18h
Tharp - Diabelli
page 24
samedi 5 juin à 20h, dimanche 6 juin à 18h et mardi 8 juin à 21h
Quatuors à cordes nos 5, 11 et 14
page 27
concert du dimanche 6 juin à 15h
Quatuors à cordes nos 4, 10 et 15
page 33
concert du mardi 8 juin à 18h
Quatuors à cordes nos 6, 7 et 13
page 38
concert du mercredi 9 juin à 20h
biographies
page 47
Beethoven experience
les Quatuors à
cordes de Beethoven
Contrairement à beaucoup de ses contemporains,
Beethoven s’est peu consacré à l’opéra, et en particulier à l’opéra italien qui aurait pu lui apporter une
rapide notoriété. Il aura préféré cultiver le répertoire instrumental que les Kenner (connaisseurs) entretenaient
comme un signe de distinction et que les Liebhaber
(amateurs) pratiquaient à moindre niveau à travers la
transcription ou l’interprétation d’œuvres conçues pour
être plus accessibles. A l’évidence, c’est à la première
catégorie de musiciens que Beethoven a songé en
écrivant ses œuvres de musique de chambre les plus
intéressantes, des œuvres parmi lesquelles il faut compter ses Quatuors à cordes pour leur exemplarité à s’être
ostensiblement détachés des contingences liées au
marché de l’édition.
les mécènes
Une telle indépendance - même si certains l’ont par la
suite relativisée - n’aurait pu avoir lieu sans que
Beethoven ne s’inscrive dans un réseau de mécènes et
de riches amateurs qui étaient là pour lui apporter un
soutien financier et une audience auprès des classes
nobles. En échange de ce soutien, les protecteurs bénéficiaient de la présence de l’artiste dans leur salon, de
l’exclusivité de l’interprétation des œuvres commandées (pendant une période allant en général de six mois
à un an) et d’une dédicace en première page de l’édition. On compte ainsi cinq mécènes qui ont soutenu la
composition des quatuors à cordes de Beethoven : le
prince Lobkowitz (pour les Opus 18 et 74), le comte
Razoumovski, ambassadeur de Russie à Vienne (pour
l’Opus 59), le prince Nikolaus von Galitzin (pour les Opus
127, 130 et 132), le baron von Stutterheim (pour l’Opus
131) et le cardinal archiduc Rodolphe (pour la Grande
Fugue op 133). En marge de ces commanditaires,
d’autres personnages, comme le prince Lichnovski,
ont joué un rôle considérable dans le rayonnement de
ces œuvres. Ce dernier avait en effet constitué le premier
quatuor permanent — le Quatuor Schuppanzigh composé d’Ignaz Schuppanzigh, Louis Sina, Franz Weiss et
Nicolas Kraft - avec lequel il avait pris l’habitude de don-
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ner chaque vendredi matin un concert de quatuor à
cordes. Il leur offrit aussi de splendides instruments (un
Guarnerius de 1718, un Amati de 1690 et un violoncelle Guarnerius de 1675 actuellement exposés dans la
maison Beethoven de Bonn).
les trois périodes
La chronologie des Quatuors à cordes de Beethoven
incite spontanément à distinguer trois périodes de composition correspondant chacune à un style : la période
1798-1800 (les Quatuors n° 1 à 6 encore héritiers de la
tradition haydnienne) ; la période 1806-1810 (les
Quatuors n° 7 à 11 dont le style tour à tour « héroïque »
et expérimental vise à la distorsion de la forme classique) ; la période 1822-1826 (les Quatuors n° 12 à 16
dont les innovations — comme la généralisation du
développement ou la conscience d’une « grande forme »
— s’abstraient radicalement de tout modèle connu à
l’époque). Cette tripartition s’appuie d’ailleurs sur le fait
que Beethoven a écrit ses quatuors par « phase »
contrairement à l’écriture « continue » de ses
Symphonies ou de ses Sonates pour piano. Parmi les
premiers, Wilhelm von Lenz, un élève de Liszt, donne
une lecture personnelle de ces « trois styles » :
« Il est un phénomène dans Beethoven qu’il importe de constater, qui seul le fait comprendre, c’est qu’en lui, il y a trois
Beethoven très différents entre eux. Comme Raphaël et Rubens,
Beethoven a une première, une seconde, une troisième manière,
parfaitement caractérisées toutes les trois. Ces différences de
styles, ces directions de sa pensée, ces transformations capitales de son génie, sont les assises de son œuvre. (…)
Si ses premières productions respirent le génie de Mozart,
(...) vous trouverez, en cherchant bien, une première note
d’inquiète mélancolie. (...) Beethoven reprenait l’art où Mozart
l’avait laissé ; il se chargeait sur ses puissantes épaules pour
le porter plus loin.
Plus de charmilles au bon endroit, dans la seconde manière
de Beethoven, de quinconces espacés par les tyrannies de
l’école ; le maître méprise les jardins, il lui faut des parcs, le langage du silence de la forêt ; les maisons seront devenues des
châteaux (…). Il sera sa loi à lui, princeps legibus solutus est. (…)
De là la troisième et dernière transformation du génie de
Beethoven (…), les derniers quatuors à cordes qui ne sont
autre chose que le tableau de la vie du juste, des souvenirs de
son passage sur terre, souvenirs confus comme le sont les
souvenirs d’une chose aussi fragile et aussi multiple que l’hu-
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maine existence une fois qu’elle est restée en arrière de la
route. (…) Les idées de Beethoven, telles que ce style tout
exceptionnel les présente, sont toujours compliquées ; elles
sont la manifestation de sa pensée, quand elle appartenait à
une vie exceptionnelle s’écoulant en dehors de l’existence
réelle. (…) Fruit d’une immense méditation dont il n’y a pas
d’exemple, la troisième manière de Beethoven n’a plus la
spontanéité des deux premières. Tout en s’appuyant sur les
données de notre sphère d’impressions, Beethoven la dépasse
et la continue au-delà des limites qu’elle a pour nous. »
(Wilhelm von Lenz, Beethoven et ses trois styles, Paris,
1852, p. 50-56, p. 117)
Pour aussi séduisante et engageante qu’elle puisse
paraître — la pérennité de cette catégorisation tend
d’ailleurs à le prouver —, la division des compositions de Beethoven en trois styles mérite d’être discutée tant elle ne prend pas en compte certaines
constantes stylistiques qui touchent les trois périodes.
Franz Liszt répond d’ailleurs immédiatement à Wilhelm
von Lenz pour lui signaler les limites de cette conception strictement chronologique du style et lui proposer
de la remplacer par une dialectique entre respect et
distorsion des modèles formels.
« S’il m’appartenait de catégoriser les divers termes de la pensée du grand maître, manifestés dans ses Sonates, ses
Symphonies, ses Quatuors, je ne m’arrêterais guère, il est vrai,
à la division des trois styles, assez généralement adoptée maintenant et que vous avez suivie — mais prenant simplement
acte des questions soulevées jusqu’ici, je poserais franchement la grande question qui est l’axe de la critique et de l’esthétique musicale au point où nous a conduit Beethoven : à
savoir, en combien la forme traditionnelle ou convenue est
nécessairement déterminante pour l’organisme de la pensée ?
La solution de cette question, telle qu’elle se dégage de l’œuvre
de Beethoven même, me conduirait à partager cette œuvre
non pas en trois styles ou périodes — les mots style et période
ne pouvant être ici que des termes corollaires, subordonnés,
d’une signification vague et équivoque — mais très logiquement en deux catégories : la première, celle où la forme traditionnelle et convenue contient et régit la pensée du maître ; et
la seconde, celle où la pensée étend, brise, recrée et façonne
au gré de ses besoins et de ses inspirations la forme et le style.
Sans doute en procédant ainsi nous arrivons en droite ligne à ces
incessants problèmes de l’autorité et de la liberté. »
(lettre de Franz Liszt à Wilhelm von Lenz ; Weimar, 2
décembre 1852)
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Beethoven experience
Il est vrai que le timbre homogène du quatuor à cordes
n’a certainement pas compté pour rien dans les possibilités qu’offrait cette formation de pénétrer la logique
interne des langages musicaux : mieux que le piano,
le quatuor pouvait faire sonner le contrepoint ; mieux
que l’orchestre, le quatuor pouvait trouver un « son
collectif » ; mieux que les œuvres vocales, le quatuor
pouvait offrir une vision épurée et abstraite du discours musical. Et ce jusqu’aux plus « formalistes »
des musiciens qui trouveront, comme Igor Stravinsky,
un terrain idéal pour débarrasser la musique de l’anecdotique. « Le quatuor à cordes, écrit-il, est le plus
lucide support d’idées musicales jamais façonné, et
le plus chantant - donc le plus humain - des moyens
instrumentaux ; ou plutôt, alors qu’il n’était rien de
tout cela originellement et nécessairement, Beethoven
le rendit tel. Quant à ses pouvoirs intrinsèques, il s’est
révélé capable d’assumer des changements harmoniques plus fréquents que l’orchestre encore imparfaitement chromatique du temps de Beethoven,
entravé de surcroît par un problème de poids et un
problème d’équilibre. C’est d’autre part un moyen
d’expression plus intime, en partie pour les mêmes
raisons ; et plus satisfaisant à long terme pour ce qui
est du timbre : du moins pour moi, et cela sans doute
en partie parce que j’y suis le moins conscient de
l’élément timbre. Ses capacités de sostenuto sont
plus grandes que celles des ensembles d’instruments
à vent et ses possibilités de variation de tempo et
d’intensité, au niveau le plus faible, sont plus étendues. Comparé au piano, il l’emporte par la clarté du
jeu polyphonique et par une plus grande variété d’articulations dynamiques et de nuances. » (trad. revue
ARC « Beethoven », 1990, p. 32).
Emmanuel Hondré
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vendredi 4 juin - 20h
salle des concerts
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 1, en fa majeur, op 18 n° 1
allegro con brio, adagio affettuoso ed appassionato,
scherzo : allegro molto, allegro
durée : 28 minutes
Quatuor n° 12, en mi bémol majeur, op 127
maestoso/allegro teneramente, adagio, ma non troppo
e molto cantabile, scherzando vivace, finale
durée : 38 minutes
entracte
Quatuor n° 9, en ut majeur op 59 n° 3, « Razoumovski »
introduzione : andante con moto/allegro vivace, andante
con moto quasi allegretto, menuetto, allegretto molto
durée : 29 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 14 juin à 14h
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : 1799-1800 ; création : date inconnue ; édition :
Quatuor n° 1
1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
en fa majeur op 18 n° 1
Composés entre 1798 et 1800, les six Quatuors op
18 constituent le dernier exemple de quatuors édités
par série de six (pratique établie depuis le milieu du
XVIIIe siècle). L’ordre de composition ne correspond
pas à l’ordre d’édition puisque Beethoven a écrit les
quatuors dans l’ordre suivant : n° 3, 2, 1, 5, 6 et 4. La
décision de s’inscrire dans un genre musical que Mozart
et Haydn avait déjà brillamment illustré semble naître de
la volonté d’un mécène, celui-là même qui avait déjà
commandé à Haydn les Six Quatuors op 71-74. « En
1785, rappelle Wegeler, « le comte [Anton Georg]
Apponyi [1751-1817] chargea Beethoven de composer un quatuor moyennant des honoraires fixés ; il n’en
avait encore fait paraître aucun. Le comte déclara qu’il
ne voulait pas avoir ce quatuor pour lui tout seul six
mois avant sa publication, qu’il n’exigeait pas qu’il lui fut
dédié, etc. D’après de nombreux souvenirs que j’ai
conservés de ce fait, Beethoven se mit deux fois à
l’œuvre pour remplir cette commande ; mais il sortit
du premier essai un grand trio pour instruments à
cordes [op 3] et du second un quintette pour instruments à cordes [op 4]. » La dédicace rendra finalement hommage au prince Lobkowitz, bien qu’une
dédicace intime semble associer ce quatuor au jeune
pasteur Karl Amenda que connaissait Beethoven.
Le premier mouvement (allegro con brio) prend à son
compte la logique d’un allegro de sonate (exposition
des thèmes, développement, réexposition) en privilégiant nettement le premier groupe thématique au
détriment du second de type « mélodie accompagnée ». Beethoven expose en effet un motif initial de
broderie rythmée qui servira de ferment unitaire au
mouvement, un geste tendant au monothématisme
sans pour autant le réaliser (comme plus tard dans
la Cinquième Symphonie ou la Sonate op 31 n° 2).
L’auteur avait pourtant, dans une première version,
donné la priorité à ce « motif générateur » en le citant
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Beethoven experience
130 fois, alors que la version actuelle, il ne le mentionne plus que 104 fois. Pour autant, l’importance
accordée à ce motif reste importante et doit se comprendre à l’échelle du quatuor entier, les mouvements
suivants s’inspirant de cette même cellule.
Le second mouvement (adagio affettuoso ad appassionato) applique au tempo lent le même plan de
sonate, avec la particularité de combiner, dans la réexposition, les éléments de l’exposition — plutôt lyriques
— aux bourrasques expressives du développement
(broderies ascendantes avec sforzandi, opposition
pp/f), et d’écourter la réexposition au profit d’un développement terminal. Pour composer ce mouvement,
« je me suis représenté, aurait confié Beethoven à Karl
Amenda, la scène du tombeau de Roméo et Juliette » :
une indication qui peut éventuellement expliquer les
grands élans mélodramatiques du mouvement sans
pour autant servir de « programme ».
Le scherzo (allegro molto) est surtout intéressant pour
son jeu d’appuis déplacés et son jeu de carrures
(paires pour les périodes d’exposition thématique,
impaires pour les périodes de développement comme
celle qui suit la barre de reprise centrale). Le Trio
contraste avec la première partie par ses appels rustiques (petites notes, broderie initiale) et des carrures
absolument régulières
Le finale (allegro) combine la logique d’un allegro de
sonate à celle d’un rondo. Beethoven redonne en effet
le refrain in extenso en fin d’exposition et construit l’exposition sur un équilibre ternaire refrain-premier couplet-refrain (qui sera repris dans la réexposition). Le
thème principal s’inspire de la broderie du premier
mouvement et son développement insiste sur les imitations bien qu’un nouveau thème apparaisse peu
après (phrasé lyrique en rythmes complémentaires).
Comme dans le premier mouvement, de multiples alternances entre unissons et écriture en mélodie accompagnée ponctuent le discours en lui donnant une force
dynamique très efficace.
notes de programme | 9
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Quatuor n° 12,
composition : 1823-1824 ; création : 6 mars 1825 ; édition :
en mi bémol majeur, op 127 1826 ; l’œuvre est dédiée « au prince Nikolaus von Galitzin ».
Violoniste passionné de quatuor — il transposait
même pour quatuor à cordes les Sonates pour piano
de Beethoven —, le prince Galitzine (1795-1866) a
commandé en 1822 trois quatuors à Beethoven, commande que le compositeur honorera en 1824 après
avoir terminé sa IXe Symphonie. Les quatre mouvements de l’Opus 127 sont apparus à beaucoup
comme une gigantesque introduction au cycle des
derniers quatuors (composés dans l’ordre suivant :
12, 15, 13, Grande Fugue, 14 et 16). Cette dernière
période créatrice correspond pour Beethoven à celle
de la complète surdité. Elle est en même temps celle
d’une imagination exceptionnellement féconde qui
deviendra mythique pour beaucoup d’admirateurs.
Le premier mouvement du Quatuor n° 12 commence
par une courte introduction lente, marquée et syncopée (maestoso), fondée sur des sauts de quartes
ascendantes qui se trouveront repris dans l’allegro
(premier thème) puis inversés (second thème). Le
style s’est épuré depuis le Quartetto serioso : les carrures sont régulières (8 + 8 pour le premier thème ; 8
+ 8 pour le second). L’introduction maestoso agit
comme un signal pour le début du développement
et celui de la réexposition — d’habitude, l’exposition
lente n’est jamais citée dans le cours de l’allegro.
Cette inclusion de l’adagio dans l’allegro — prolongée
magistralement dans le premier mouvement du
Quatuor n° 13 — sert d’ailleurs à court-circuiter l’articulation de la forme-sonate : associée d’abord à
l’exposition puis au développement, elle signale une
fausse réexposition en ut majeur en plein développement, empêchant la véritable réexposition d’avoir
tout son impact dramatique en mi bémol majeur sur
le premier thème. La forme-sonate devient ainsi un
cadre non-dynamique, ce qui ne fait pas partie de ce
cadre devenant précisément dynamique.
Le thème et variations qui suit est un exemple idéal de
10 | cité de la musique
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variations non figuratives. Amorcé par deux mesures,
le thème ressemble à une ode symétrique de deux
périodes divisées chacune en deux (incises suspensives jouées au violon ; incises conclusives jouées au
violoncelle). La var. 1 change de manière inattendue
l’harmonie et témoigne d’un foisonnement mélodique
(accumulation de contrechants faisant disparaître le
thème, légèrement orné, à cause de l’égalité de traitement de voix). La var. 2, ornementale, disloque le
thème : les voix qui chantent le thème (fioritures aux
deux violons) sont accompagnées en staccato dans
un esprit de marche rapide. La var. 3 en mi majeur
(ton du second degré abaissé) laisse le thème complètement dépouillé — squelette mélodique « dématérialisé, ramené à ses éléments essentiels, dépouillé
de [ses] ornements », commentait Vincent D’Indy —
mais constitue pourtant le point culminant du mouvement. La var. 4 ramène la bémol majeur : le thème
est d’abord absent quand le violon I chante une nouvelle mélodie, mais apparaît au violoncelle presque
inchangé. La var. 5 se compose d’une suite d’épisodes où des bribes du thème servent de signaux
elliptiques, le tout dans la tonalité d’ut # (ré b) majeur,
la sous-dominante. La var. 6 réintègre un certain sens
des carrures du thème, sans toutefois le laisser apparaître, les arabesques du violon contaminant le reste
des cordes.
Le scherzo s’appuie sur deux éléments thématiques :
le rythme pointé (appliqué à la mélodie, avec un antécédent ascendant et un conséquent descendant) et
le trille (cité en accompagnement). Dans la partie centrale du scherzo, d’étonnantes interjections aux cordes
graves rappellent, avant le retour du scherzo, les récitatifs instrumentaux de la Neuvième Symphonie. Le
Trio prolonge l’opposition mélodie accompagnée/unisson dans un type d’expression radicalement éloigné
du scherzo : legato, phrasé continu, accents rustiques des cordes graves. Le retour du scherzo surprend en réexposant le conséquent avant
l’antécédent, ainsi qu’en feignant, dans une ultime
notes de programme | 11
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coda, de reprendre le trio pour la seconde fois, juste
avant de conclure in extremis.
Le dernier mouvement (finale) est une forme-sonate
très particulière dont le premier groupe thématique
(legato en mi bémol majeur : un A1 discret et insaisissable ; un A2 plus net en « polymélodie ») et le
second thème (staccato homorythmique) sont juxtaposés sans véritablement créer de dynamique. La
réexposition, omettant le premier groupe, prolonge
bien le travail thématique mais sans lui donner plus
de force : en place de la coda, deux grandes pages
crescendo filent un tissu polyphonique serré et translucide dont émergent les arabesques des parties intermédiaires. Les tonalités répondent à cette même
logique : juxtaposées, elles sont utilisées comme des
couleurs pour composer une mosaïque.
Quatuor n° 9
en ut majeur op 59 n° 3
composition : 1807 ; création : janvier 1809 ; édition : 1808 ;
l’œuvre est dédiée « au comte Razoumovski », ambassadeur de Russie à Vienne.
Parmi les trois Quatuors op 59, le Quatuor n° 9 se
distingue par l’originalité de son finale, ce dernier
incarnant la nouvelle fonction que Beethoven voulait
confier aux mouvements conclusifs. En effet, si le
finale de l’Opus 59 n° 1 reste léger (dans la tradition
classique), si celui de l’Opus 59 n° 2 s’équilibre un
peu plus avec le « poids » de l’allegro initial, le finale de
l’Opus 59 n° 3 devient le véritable point de concentration de toutes les énergies du quatuor, pressentant en cela les visées extrêmes que Beethoven pourra
développer dans la Neuvième Symphonie ou dans le
Quatuor n° 13 (dont le finale n’est autre que la Grande
Fugue op 133).
Le premier mouvement commence par une introduction lente — fait rare dans les quatuors antérieurs
de Beethoven : celle-ci opère par glissements de
notes visant à élargir l’ambitus en éventail et s’appuyant harmoniquement sur trois accords de septièmes diminuées dont le total des notes aboutit au
12 | cité de la musique
Beethoven experience
total chromatique, le tout dans une vision presque
haydnienne du « chaos » précédant l’« ordre » (l’allegro suivant). Ce geste d’agrandissement de l’ambitus
trouvera un écho à la fin du quatrième mouvement,
dans la coda élargie elle aussi « en éventail » mais
culminant cette fois-ci avec une nuance et une puissance extrêmes. L’allegro vivace est de forme sonate.
Le premier groupe thématique oppose un premier
thème (A1) exposé solo par le violon I (on en retiendra
surtout la levée détachée et l’assise sur des piliers
mélodiques ascendants et le rythme pointé) à un
second thème « collectif » (A2) fondé sur le rythme
dactylique. Le second groupe thématique, plus fluide
(doubles croches en sol majeur), marquera finalement
peu le mouvement, et encore moins le développement centré sagement sur l’extension du thème A1
(une paraphrase plus qu’un véritable développement).
La réexposition reprend le premier groupe thématique en en changeant les caractéristiques essentielles : le profil mélodique a beau être reconnaissable,
le thème est orné par le premier violon et accompagné par des rondes tenues aux autres cordes. La fin
du mouvement propose un dernier geste répondant
à l’ouverture « chaotique » de l’introduction lente :
une montée chromatique stringendo, donnant cette
fois-ci dans l’ordre le total chromatique.
Le second mouvement (andante con moto quasi allegretto) constitue l’un des sommets de l’expressivité
cantabile chez Beethoven. Le balancement ternaire
(pulsé par les pizzicati du violoncelle) se double du
charme des secondes augmentées pour l’exposé du
premier thème. Le second groupe thématique s’oppose au premier par le jeu staccato et par la clarté
d’ut majeur. La forme du reste du mouvement est
assez surprenante : le développement ne s’appuie
que sur le motif de transition ; la réexposition commence par le second thème ; et cette dernière comporte deux développements terminaux qui encadrent
la réexposition du premier thème. Ces caractéristiques s’expliquent en partie par la lecture non dynanotes de programme | 13
Beethoven experience
mique que Beethoven fait de la forme-sonate bithématique à travers laquelle il préfère voir une juxtaposition et un balancement d’Humor sans confrontation
thématique.
Le menuet (grazioso) constitue l’élément le plus archaïsant des quatre mouvements : régularité caricaturale
des carrures, pas de modulations, Trio de peu d’intérêt
(un jeu d’arpèges ascendants et descendants détachés)… Une telle simplification de l’écriture peut à
juste titre apparaître comme une transition — de
« demi-caractère » même — servant à donner plus
de poids au finale.
Ce mouvement se présente en effet comme le point
culminant et la conclusion de tout le quatuor. Il s’agit
d’une gigantesque forme-sonate fuguée combinée à
l’esprit d’un mouvement perpétuel et appliquée à une
longueur exceptionnelle de 429 mesures. Une fois
encore, le premier thème fugué (entrée successives
de l’alto sur la tonique, du violon II sur la dominante, du
violoncelle puis du violon I sur la tonique) l’emporte
nettement sur le second groupe thématique qui se
caractérise seulement par des relais et des mouvements contraires. Le développement commence en
mi bémol majeur pour amorcer une série de marches
et de soufflets de nuance (crescendos / decrescendos). La réexposition reprend le principe de la fugue initale, avec la présentation d’un nouveau contre-sujet en
valeurs longues détachées qui se transformera en
accords sonores et dynamiques. Une immense coda
virtuose et jubilatoire s’appuie symboliquement sur
des lignes mélodiques descendantes pour mieux
ensuite les transformer en lignes ascendantes.
E. H.
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samedi 5 juin - 15h
amphithéâtre du musée
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 3, en ré majeur, op 18 n° 3
allegro, andante con moto, allegro, presto
durée : 29 minutes
Quatuor n° 16, en fa majeur, op 135
allegretto, vivace, lento assai cantante e tranquillo, grave
ma non troppo tratto/allegro
durée : 25 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 10 juin à 12h35
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : 1798 ; création : date inconnue ; édition :
Quatuor n° 3
1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
en ré majeur op 18 n° 3
Le Quatuor n° 3 est en fait le premier à avoir été composé dans la série de l’Opus 18. Le premier mouvement (allegro) repose sur un plan de sonate sans
développement terminal. Il constitue l’un des exemples
les plus audibles du principe de projection d’un motif
générateur sur toute l’œuvre. Ce motif (une septième
mineure ascendante et une seconde mineure descendante) est d’abord exposé au premier violon solo.
La septième (la-sol en rondes) trouvera ensuite un
écho à grande échelle dans la relation tonale entre
ré majeur (premier thème) et ut majeur (second
thème) ; de même que la seconde mineure descendante (sol-fa #) se projettera dans la résolution du mi
bémol majeur (fin du développement terminal) vers
le ré majeur (coda). Au-delà de ces rapports entre
petite et grande échelle, un autre parcours mérite l’attention : celui qui transforme, au fil du mouvement,
les lignes diatoniques descendantes (premier thème
au violon I) ou ascendantes (premier thème au violoncelle) en lignes chromatiques ascendantes (conclusion de la première partie au violoncelle ; accents sf
répartis entre le violoncelle et le violon II au milieu du
développement).
Le second mouvement (andante con moto) rend
inclassable la forme-sonate qui lui sert de base : au lieu
du développement attendu commence une fausse
réexposition à laquelle s’enchaîne finalement le développement ; la réexposition ne reprend que le pont
et le second groupe thématique (en omettant de réexposer le premier groupe thématique). Ce mouvement
témoigne aussi d’un intérêt particulier pour les changements d’orchestration, les citations thématiques
circulant entre toutes les parties.
Le troisième mouvement (allegro) offre peu de surprises, même si ses effets d’orchestration (doublures,
octaviations) sont ingénieuses.
Le quatrième mouvement (presto) emprunte son tempo
notes de programme | 16
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aux danses enlevées (gigue, tarentelle) sans pour autant
s’appuyer sur des appuis rythmiques clairs. Le développement de cette forme-sonate fait intervenir l’écriture en fugato. Les périodes de conclusion — qui a
priori servent de « pôle de stabilité » — sont par ailleurs
les témoins de coups de butoir (tonalités appoggiaturées) caractéristiques de la manière beethovénienne
consistant à malmener les attentes de l’auditeur.
Quatuor n° 16,
en fa majeur, op 135
composition : 1826 ; création : date inconnue ; édition :
1827 ; l’œuvre est dédiée « à Johann Wolfmeier ».
Dans de multiples quatuors de la dernière période,
Beethoven avait augmenté la présence des « récitatifs instrumentaux » censés rendre la musique éloquente sans usage de la parole — cette rhétorique
abstraite se retrouve dans le grave ma non troppo
tratto du Quatuor n° 16. Mais Beethoven s’est aussi
essayé, à plusieurs reprises, à faire figurer des indications textuelles plus précises (comme le chant de
reconnaissance d’un convalescent à la Divinité du
Quatuor n° 15 ou à travers les indications comme
« Mit innigster Empfindung » (avec beaucoup de sentiment) dans la même œuvre. Le Quatuor n° 16 propose encore un autre usage de la parole dans la
partition : celui consistant à se servir d’indications
verbales — et énigmatiques — pour « faire parler la
musique » en évitant toutefois l’anecdotique (comme
dans le grave ma non troppo tratto qui fait figurer en
exergue « Der schwer gefasste entschluss - Muss es
sein ? Es muss sein ! » (La décision difficile à prendre
- Le faut-il ? Il le faut !). Pour l’auditeur, le sens de
cette résolution reste fatalement abscons, même si
plusieurs exégètes ont tenté d’expliquer ce dialogue
par des anecdotes biographiques à la limite du rocambolesque (Beethoven forçant un certain Dembscher à
délier sa bourse, ou Beethoven se demandant s’il
devait vraiment écrire une musique pour de l’argent…).
Il faut plutôt considérer ces répliques énigmatiques
comme une volonté délibérée de sortir du circonsnotes de programme | 17
Beethoven experience
tanciel et d’arriver à un niveau d’universalité qui puisse
tirer le texte vers une multiplicité de sens possibles.
Car c’est bien de cette manière que la parole beethovénienne peut se transformer en symbole, acquérir un certain niveau d’abstraction et se rapprocher
en cela de la musique.
Les autres mouvements posent moins de « problèmes » puisqu’ils ont en commun de cultiver une
certaine sobriété stylistique que l’on pourrait qualifier
de « consensuelle » après les recherches expérimentales des autres quatuors de la dernière période.
Le premier mouvement renoue par exemple avec le
plan d’un allegro de sonate, le deuxième avec le
caractère conventionnel du scherzo et le troisième
(lento assai) avec le principe de variation.
E. H.
notes de programme | 18
samedi 5 juin - 18h
amphithéâtre du musée
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 2, en sol majeur, op 18 n° 2
allegro, adagio cantabile, scherzo : allegro, allegro molto
quasi presto
durée : 23 minutes
Quatuor n° 8, en mi mineur, op 59 n° 2, « Razoumovski »
allegro, molto adagio, allegretto, finale : presto
durée : 35 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 24 juin à 12h35
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : 1799 ; création : date inconnue ; édition :
Quatuor n° 2 en sol majeur 1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
op 18 n° 2
Considéré par Kerman comme l’un des plus proches
du modèle haydnien, le Quatuor n° 2 offre au premier
violon un rôle directif et virtuose qu’il n’aura plus dans
la plupart des quatuors postérieurs. De forme-sonate,
le premier mouvement (allegro) se caractérise par un
certain morcellement thématique. Le premier thème
se compose par exemple d’une cellule en gamme
ornée, d’une deuxième cellule pointée et d’une troisième cellule lyrique et conclusive. Le développement
se sert d’une écriture contrapuntique non fuguée —
anticipant sur l’écriture en « strates superposées »
de la Grande Fugue op 133.
Le second mouvement (adagio cantabile) emprunte sa
forme ternaire (A lent, B vif, A’ lent) à l’air vocal. Cette
référence va même plus loin, puisque Beethoven s’ingénie à retrouver avec le quatuor à cordes une version
instrumentale de la vocalité à fioritures inspirée du
style italien.
Le scherzo (allegro) se situe dans un univers proche
du style de jeunesse de Beethoven. L’introduction (en
rythme dactylique) se rapproche par exemple de l’introduction de la Sérénade op 25 (composée en 17951796) : le phrasé, rugueux et anguleux, se cherche
sans réussir à trouver un son plein et adapté au quatuor.
Le Trio en ut majeur se détourne de l’habituelle forme
binaire à reprise puisque le développement, placé avant
le rappel de la première section, est anticipé au profit
d’un important développement terminal déplaçant le
centre de gravité de cette section.
Le finale (allegro molto quasi presto) est une formesonate sans développement terminal. La thématique,
claire et légère, présente un intéressant jeu de relais
(dans la période de conclusion) prolongé dans le développement. Après une première fausse réexposition en
ut majeur, puis une seconde en la bémol majeur, la
véritable réexposition culminera avec un ajout de
contrechants.
notes de programme | 20
Beethoven experience
Quatuor n° 8
en mi mineur op 59 n° 2
composition : 1804-1806 ; création : janvier 1809 ; édition :
1808 ; l’œuvre est dédiée « au comte Razoumovski »,
ambassadeur de Russie à Vienne.
Le Quatuor n° 8 est celui de l’Opus 59 dont les caractéristiques s’adressent le plus explicitement au comte
Razoumovski (ambassadeur de Russie, et à ce titre
allié de l’Autriche dans la lutte anti-napoléonienne).
Le finale cite en effet un « thème russe » — en français
dans l’édition originale — dont la « russitude » est
attestée par la reprise qu’en fera plus tard Modeste
Moussorgski dans Boris Godounov (Scène du
Couronnement) et Nikolai Rimski-Korsakov dans La
Fiancée du Tsar (pages 43 et 128 de l’édition Belaiev).
Contrairement à l’allegro de sonate du Quatuor n° 7,
le premier mouvement du Quatuor n° 8 s’appuie sur
une grande stabilité tonale (quelques tonalités appoggiaturées ne remettent pas en cause cette stabilité).
C’est en revanche dans le phrasé que l’on trouve une
grande fluidité (contrechants, doublures, arabesques
de doubles croches). Dans ce contexte, les thèmes
restent difficiles à cerner tout en étant nombreux : en
plus des deux groupes thématiques, il faut compterun motif de pont et un motif de conclusion.
Beethoven donne l’impression d’exposer une
« mosaïque » de motifs qui prendra une valeur réellement thématique au fur et à mesure du mouvement.
Comme le deuxième mouvement du Quatuor n° 7,
ce mouvement devient donc « progressivement thématique », révélant sa thématique plutôt que l’exposant, pour la développer ensuite. On s‘aperçoit par
exemple que les deux accords initiaux ne font pas à
proprement parler partie du premier groupe thématique puisqu’ils ne seront ensuite utilisés qu’à titre de
« chevilles » entre les sections : le rebond initial (très
haydnien) attend donc le cours du mouvement pour
révéler sa fonction et témoigne d’une conception de
la forme radicalement moderne.
Le second mouvement (molto adagio) hésite entre la
forme-sonate et celle d’un thème et variations. Le
notes de programme | 21
Beethoven experience
thème initial (deux périodes en valeurs longues) est
à peine conclu que s’enchaînent directement la variation 1 (thème au violon II, contrechant sur rythme trochaïque au violon I) puis la variation 2 (thème en
rétrograde transposé au violon II avant d’être repris en
imitation à l’alto et au violoncelle). Ici s’arrête la similitude avec la forme d’un « thème et variations »
puisque l’irruption d’une transition et celle d’un second
groupe thématique (de couleur schubertienne) apporte
l’élément de contraste essentiel au principe bithématique de la forme-sonate. D’une manière récurrente, les notes longues du premier thème
réapparaîtront au fil du mouvement, en changeant
toutefois les intervalles qu’elles portaient.
Le scherzo (allegretto) comporte un double trio
(comme dans les Quatuors n° 4 et 10). L’élégance
de son style provient de la légèreté des rythmes complémentaires répartis entre la mélodie et l’accompagnement. La fugue du Trio I expose le sujet (un autre
« thème russe ») à l’alto joué staccato ; le contre-sujet
(violon II) consiste en une arabesque de triolets ; un
second contre-sujet intervient à l’alto au moment de
l’entrée du sujet au violon II. Une deuxième série d’entrées (alto, violon II, violoncelle, violon I), avec un nouveau contre-sujet en croches, précède une troisième
série d’entrées contrapuntiques en canon strict.
Le finale (presto) est une forme-sonate inspirée du
rondo : le premier thème revient en effet très fréquemment mais — phénomène relativement rare —
sa présence tend à diminuer (il est repris quatre fois au
début de l’exposition, trois fois à la fin de l’exposition, deux fois à la fin de la réexposition et seulement
une fois dans le développement terminal), comme s’il
se « dissolvait » dans l’œuvre. Ce thème est aussi
intéressant pour son incertitude tonale puisqu’il feint
un ut majeur pour se conclure finalement en mi mineur.
E. H.
notes de programme | 22
samedi 5 juin - 20h
dimanche 6 juin - 18h
mardi 8 juin - 21h
salle des concerts
Diabelli
Twyla Tharp, chorégraphie
Nikolai Demidenko, piano
Ludwig van Beethoven
Trente-trois Variations sur un thème de valse de
Diabelli, op 120
thème : vivace
var. 1 : alla marcia maestoso ; var. 2 : poco allegro ;
var. 3 : l’istesso tempo ; var. 4 : un poco più vivace ;
var. 5 : allegro vivace ; var. 6 : allegro ma non troppo ;
var. 7 : un poco più allegro ; var. 8 : poco vivace ;
var. 9 : allegro pesante e risoluto ; var. 10 : presto ;
var. 11 : allegretto ; var. 12 : un poco più moto ;
var. 13 : vivace ; var. 14 : grave e maestoso ;
var. 15 : presto scherzando ; var. 16 : allegro ;
var. 17 : allegro ; var. 18 : poco moderato ;
var. 19 : presto ; var. 20 : andante ;
var. 21 : allegro con brio ; var. 22 : allegro molto « alla
Notte e giorno faticar di Mozart » ;
var. 23 : allegro assai ; var. 24 : fughetta andante ;
var. 25 : allegro ; var. 26 : piacevole ; var. 27 : vivace ;
var. 28 : allegro ; var. 29 : adagio ma non troppo ;
var. 30 : andante sempre cantabile ; var. 31 : largo molto
espressivo ; var. 32 : double fugue ; var. 33 : tempo di
menuetto moderato
Stacy Caddell, Gabrielle Malone, Helen
Saunders, Sandra Stanton, Elizabeth
Zengara, Jamie Bishton, Alexander Kølpin,
Thomas Lund, Victor Quijada, Andrew
Robinson, danse
Geoffrey Beene, costumes
commande de la cité de la musique
et du Barbican Centre (Londres)
production Tharp Productions, New York City
remerciements à Alfred Brendel, Susan Kagan et Linda Greenberg
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven
Trente-trois Variations
sur un thème de valse
de Diabelli, op 120
Commencé en 1819 pour être terminé en 1823, le
cycle des Variations Diabelli fut — avec les Bagatelles
op 126 — la dernière œuvre de Beethoven consacrée au piano. Les proportions monumentales de ce
cycle étaient imprévisibles puisque, quand l’éditeur
Anton Diabelli proposa à plusieurs compositeurs un
thème de valse à varier, Beethoven refusa tout d’abord
cette idée, pour ensuite se laisser aller à griffonner
quelques esquisses, puis de véritables variations. Les
deux tiers de celles-ci furent esquissées dès 1819,
mais l’auteur s’interrompit brutalement, en 1821, pour
terminer la Missa Solemnis, ses trois dernières sonates
pour piano et l’ouverture La Consécration de la maison. Il revient à son cycle de variations au cours de l’hiver 1822-1823. Les Trente-trois Variations effraient
tout d’abord Diabelli, mais celui-ci perçoit vite l’importance de l’œuvre qu’il compare aux Variations
Goldberg de Bach. Il se décide alors à les publier en
1823 en même temps que les variations rendues par
les autres compositeurs. Dans son édition, une partie rassemble les variations de compositeurs comme
Schubert, Czerny, Liszt, Hummel, Kalkbrenner,
Moschelès, Mozart fils, tandis que l’autre demeure
entièrement consacrée à celles de Beethoven...
Ces dernières se présentent sous forme de cycle,
mais ressemblent davantage à une succession de
facettes contrastées dont la logique ne répond pas à
l’amplification habituelle d’un thème initial. L’aspect
constructif de la variation (ajouts, ornementation) laisse
plutôt la priorité à la déconstruction. La première variation en est un parfait exemple puisqu’elle lamine littéralement le thème de Diabelli au lieu de l’orner ou de
le paraphraser. Après le coup d’éponge jeté sur ce
qui n’était en fait qu’un prétexte, la logique des enchaînements tient de l’opposition (des styles, du tempo ou
des tonalités) plus que de l’unité. Les variations 2 à 10
forment une première phase où les recherches rythmiques alternent avec l’isolement de figures librement
développées. Les variations 11 à 23 enchaînent
ensuite des séquences lyriques (var. 11-12) à d’autres,
notes de programme | 24
Beethoven experience
qui morcellent le discours par une déstabilisation des
harmonies du thème (var. 18). Le thème voit même
son contour mélodique entrer en concurrence avec un
nouveau thème, celui du premier air de Leporello dans
le Don Giovanni de Mozart, cité dans la variation 22 de
manière reconnaissable et franchement parodique.
Les variations 24 à 28 sont, quant à elles, d’une écriture légère et virtuose, en contraste avec le dernier
groupe de variations (29 à 33) qui introduit le mode
mineur, le contrepoint savant (double fugue de la variation n° 32) et même un ultime hommage au classicisme de Mozart et Haydn (variation 33). Le cycle se
termine en laissant l’impression d’un immense kaléidoscope d’états contrastés, mêlés quelques fois
contre leur gré, et dégageant des frottements une
tension typiquement beethovénienne qui s’ingénie à
détourner le prévisible et à se distancer des modèles.
Mais fallait-il s’en étonner alors que le titre portait déjà
la mention de veränderungen, c’est-à-dire d’« altération », autant dans le sens de « note altérée » que
celui de « thème altéré » ? La variation prend donc,
dans ce cycle, une dimension particulière qui tend à
souligner les liens qui unissent chez Beethoven l’acte
de création et l’acte de destruction. Comme si créer
devait forcément passer par une lutte contre un élément donné, lutte dont l’auditeur pourrait sentir toute
la distance prise pour s’en éloigner et tirer de cette
tension une émotion.
E. H.
notes de programme | 25
dimanche 6 juin - 15h
amphithéâtre du musée
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 5, en la majeur, op 18 n° 5
allegro, menuetto, andante cantabile, allegro
durée : 28 minutes
Quatuor n° 11, en fa mineur, op 95, « Quartetto
serioso »
allegro con brio, allegretto ma non troppo, allegro assai
vivace ma serioso, larghetto espressivo/allegretto agitato
durée : 21 minutes
entracte
Quatuor n° 14, en ut dièse mineur, op 131
adagio ma non troppo e molto espressivo, allegro molto
vivace, allegro moderato/adagio, andante ma non troppo
e molto cantabile, presto, adagio quasi un poco andante,
allegro
durée : 40 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 15 juin à 14h
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : 1799 ; création : date inconnue ; édition :
Quatuor n° 5
1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
en la majeur op 18 n °5
Considéré avec le Quatuor n° 2 comme un des plus
fidèles au modèle haydnien, le Quatuor n° 5 est aussi
l’un des moins connus de la série de l’Opus 18.
Le premier mouvement (allegro) reprend fidèlement
le plan de la forme-sonate (second thème à la dominante mineure, le reste du parcours tonal étant sans
surprise) et dynamise le discours par de traditionnelles oppositions de nuances ou entre unissons et en
contrepoint.
Le second mouvement (menuetto) cultive les signes
d’allégeance à l’égard du menuet classique : carrures
régulières (en 4 + 8), un bref canon en ré majeur (pour
conclure après la récapitulation), jeu sur les accentuations des troisièmes temps (Trio) et usage des
pédales (un mi est tenu tout au long du Trio).
Le troisième mouvement (andante cantabile) emprunte
au ton de la sous-dominante (ré majeur) et prend la
forme d’un thème et variations. Comme dans les
Variations Diabelli, le thème reste volontairement d’allure simple et symétrique pour mieux se trouver
déconstruit lors de la première variation (un surprenant fugato, empilant les voix du grave vers l’aigu, fait
oublier le thème, et les périodes de conclusion claudiquent sur les contretemps qui restent seuls en lice).
La variation 2 reste plus conventionnelle (variation
ornementale) alors que les variations suivantes développent des gestes originaux : la variation 3 réduit le
thème à un squelette mélodique habillé par les batteries du violon II, d’abord isolées puis contaminées à
l’ensemble des instruments d’accompagnement (un
foisonnement typiquement beethovénien) ; la variation 4 change les couleurs harmoniques du thème ;
la variation 5 contraste par l’irruption jubilatoire de
motifs de foire (trilles du violon I calqués sur le piccolo
des orchestres de rue, unissons violon II/alto, basse
rebondissante du violoncelle).
Le finale (allegro) retrouve la majeur ainsi que l’organotes de programme | 27
Beethoven experience
nisation d’une forme-sonate. Le premier thème est
amorcé par une série d’imitations (sur l’anacrouse de
la tête du thème), ce qui produit l’effet d’une prolifération dynamique ajouté à l’éclatement des timbres
instrumentaux. Le second thème (legato) se caractérise par deux sauts de quartes ascendantes placés sur un accompagnement chromatique.
Quatuor n° 11
en fa mineur op 95,
« Quartetto serioso »
composition : 1810 ; création : 1814 ; édition : 1816 ; l’œuvre
est dédiée « à Nikolaus Zmeskall von Domanovetz ».
Contemporain de l’Ouverture d’Egmont (également
en fa majeur), le Quatuor n° 11 se présente comme un
quatuor d’expérimentation, comme le fruit d’une
recherche intérieure — Joseph Kerman parle
d’« œuvre de crise » — et comme une œuvre dont
l’originalité étonnante inaugure la nouvelle rhétorique
musicale des quatuors de la dernière période. Notons
également que pour la première fois, ce Quatuor n’est
pas dédié à un riche mécène mais à un ami personnel, Nikolaus Zmeskall von Domanovetz.
Le premier mouvement (allegro con brio) présente,
comme dans l’Opus 18 n° 1, une cellule thématique
de broderie à l’unisson à laquelle répond une seconde
cellule d’octave pointée. Le second groupe thématique (en ré bémol majeur) possède la particularité
d’être « réparti » entre les parties de violon et d’alto.
Les chocs tonals (provoqués par l’irruption marquée
de la tonalité du second degré abaissé : ré majeur
appoggiaturant ré bémol majeur) s’ajoutent aux oppositions du développement entre le motif de broderie et
l’octave des deux cellules initiales. La réexposition se
trouve amputée du premier groupe thématique (qui
avait servi de matière au développement) et des
périodes de conclusion.
Particulièrement intéressant pour son incertitude tonale
(le mouvement commence en ré majeur mais tend
perpétuellement vers sol mineur ou ré mineur, surtout à l’occasion de l’exposé du second groupe thématique), le second mouvement (allegretto ma non
28 | cité de la musique
Beethoven experience
troppo) commence par une descente diatonique (dans
le style d’une passacaille) à laquelle répond immédiatement une montée diatonique (celle du thème A).
Le second groupe thématique contraste par le style
fugué (sujet chromatique descendant présenté à l’occasion de quatre entrées). Le développement cite
d’abord la basse de passacaille en lui adjoignant des
retards aux parties supérieures ; la partie suivante
réutilise le contrepoint du second groupe avec un
nouveau contre-sujet destiné à souligner le travail sur
la densification des quintes et des mouvements
contraires. Dans la réexposition, l’exposé fugué du
second groupe subit une nouvelle transformation :
les entrées se trouvent compressées par un effet de
strettes (non rigoureuses).
Le scherzo (allegro assai vivace ma serioso) étonne
par son début en interjections entrecoupées de
silences. Comme dans le mouvement précédent, il
oscille entre deux tonalités : ut mineur et fa mineur.
C’est en revanche le rythme pointé qui donne à ce
scherzo son unité. Le double trio est écrit en sol bémol
majeur (ton du second degré abaissé de fa) ; d’essence purement harmonique, il déroule des arpèges
en glissant (par note commune) vers des régions
tonales très éloignées (comme ré majeur).
Le finale (larghetto espressivo/allegretto agitato) va
de fa mineur vers fa majeur (coda à 2/2 en stile buffa).
De forme-sonate (sans période de conclusion en fin
de première partie), ce mouvement marque de très
nettes ruptures dans le flux du discours. Certaines
sections de l’allegretto se trouvent par exemple brusquement interrompues par des interjections que l’on
peut qualifier de « gestes rhétoriques ».
Le Quatuor n° 11 s’impose donc comme une œuvre
prophétique même si elle pose certainement autant de
problèmes qu’elle n’en résout : Beethoven attendra
d’ailleurs 1823 avant de se remettre à composer un
quatuor à cordes. Le Quatuor n°11 annonce également différents traits stylistiques qui s’imposeront
dans la dernière période : l’obsession de la fugue, les
notes de programme | 29
Beethoven experience
qualités de concision et de contraste, la distanciation vis-à-vis de la forme-sonate (le développement est
souvent devenu très simple pour surprendre en surgissant en d’autres emplacements) et l’unification
motivique à grande échelle (faire découler le tout d’un,
ce qui est aussi proche de la fugue).
Quatuor n° 14,
composition : décembre 1825 - octobre 1826 ; création :
en ut dièse mineur, op 131 date inconnue ; édition : avril 1827 ; l’œuvre est dédiée « au
baron von Stutterheim ».
Le Quatuor op 131 compte parmi les plus aboutis de
la dernière période. Ses sept mouvements enchaînés témoignent d’une conscience aiguë de la grande
forme — le Quatuor n° 13 n’en comportait que six.
Le premier mouvement commence par une intense
introduction fuguée et legato — dans l’esprit de ricercari
anciens — : un des mouvements qui a peut-être inspiré
Richard Wagner lorsqu’il écrivait qu’avec les derniers
quatuors, « nous sommes ici en présence d’un lyrisme
si pathétique qu’il confine au domaine d’un art dramatique idéal ». (Beethoven, p. 133)
Le deuxième mouvement (allegro molto vivace)
emprunte encore à la forme-sonate sans développement, avec permanence du rythme trochaïque. Le
premier groupe thématique est exposé nettement,
par opposition au second groupe insaisissable. En
place du second thème, c’est le premier thème en
mi majeur qui intervient, le second motif thématique
ressemblant à un motif de conclusion de peu d‘intérêt thématique.
Après un bref récitatif instrumental (avec ponctuations
« orchestrales »), le quatrième mouvement présente un
thème suivi de sept variations (séparées elles aussi par
de fréquents récitatifs instrumentaux). Curieusement,
l’exposé du thème (en relais entre les deux violons) ressemble déjà à une variation ; la var.1 continue à déployer
des relais entre un instrument soliste et trois autres avant
de laisser proliférer des figurations à toutes les voix (trajet de hétérophonie à l’homophonie) ; la var. 2 (piu
30 | cité de la musique
Beethoven experience
mosso) relance de nouveaux relais, d’abord épars
(Klangfarbenmelodie) puis homophones (sur une pulsation nettement audible, voire ironique) ; la var. 3
(andante moderato e lusinghiero) assure d’autres relais
par paire de voix, d’abord sur une rythme trochaïque
puis sur des motifs de trilles ; la var. 4 (adagio) opère
un trajet inverse : celui allant d’une polyphonie expressive vers le morcellement du phrasé ; la var. 5 (allegretto)
joue sur les empilements d’accords ; la var. 6 (adagio ma
non troppo e semplice) présente une mélodies d’accords (seule les doubles croches du violoncelle viennent interrompre cette unité homorythmique, pour
progressivement lui donner un rebond par opposition de
nuances) ; la var. 7 (allegretto) s’éclate en de multiples
tempi qui permettent de résumer les variations précédentes et d’opérer une transition avec la suite.
Comme dans le Quatuor n° 12, le scherzo réduit son
matériau thématique au minimum (un motif pour le
scherzo, un autre pour le trio repris et varié deux fois). Le
sixième mouvement sert d’introduction lente au finale en
reprenant le caractère recueilli de l’introduction du
Quatuor (sans contrepoint, dans le style d’un choral).
Le finale renoue avec le principe dynamique de la
forme-sonate, avec un premier groupe thématique
batailleur — A1 en unisson (arpège rythmé) ; A2 sur un
rythme trochaïque (comme celui du premier mouvement) ; A3 descente diatonique lyrique — et un
second groupe nettement chantant. Le développement terminal prend une importance immense (la moitié du mouvement), réussissant à donner à la forme de
la sonate une modernité inouïe. « Dans la création
musicale de Beethoven, écrivait Wagner, l’élément
important pour l’histoire de l’art est que tout procédé
technique destiné à rendre l’artiste intelligible, à le rattacher au monde extérieur par un lien de convention,
apparaît en son œuvre comme un jaillissement spontané et acquiert ainsi la signification la plus haute ».
(Beethoven, p. 112)
E. H.
notes de programme | 31
mardi 8 juin - 18h
amphithéâtre du musée
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 4, en ut mineur, op 18 n° 4
allegro ma non tanto, andante scherzoso quasi allegretto,
menuetto : allegretto, allegro
durée : 23 minutes
Quatuor n° 10, en mi bémol majeur, op 74, « Les Harpes »
poco adagio/allegro, adagio ma non troppo, presto, allegretto con variazioni
durée : 30 minutes
entracte
Quatuor n° 15, en la mineur, op 132
assai sostenuto/allegro, allegro ma non tanto, molto adagio : Heiliger Dankgesang eines Genesen an die Gottheit,
in der lydischen Tonart, alla marcia assai vivace, allegro
appassionato
durée : 45 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 17 juin à 14h
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : date inconnue ; création : date inconnue ;
Quatuor n° 4
édition : 1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
en ut mineur op 18 n° 4
Ecrit en dernier dans la série de l’Opus 18, le Quatuor
n° 4 est celui que Kerman critique ouvertement pour
avoir cédé à une certaine facilité mélodique (Kerman
s’appuie d’ailleurs sur l’absence d’esquisses préparatoires pour motiver son appréciation).
Le premier mouvement (allegro ma non tanto) reprend,
il est vrai sans surprises, le plan d’une forme-sonate,
avec, qui plus est, des thèmes chantants (groupettos), des doublures expressives, des carrures régulières, des tonalités prévisibles (à l’exception de la
majorisation du second thème dans la réexposition), un
très bref développement terminal et une hiérarchie
assez claire entre soliste et instruments d’accompagnement. Il reste que l’inspiration enflammée, combinée à une rhétorique discursive, a su conserver à ce
mouvement un très grand succès auprès du public.
Le second mouvement (scherzo/andante scherzoso
quasi allegretto) pourrait être qualifié de « fuguesonate » : l’exposé du premier thème est une fugue à
quatre entrées successives (violon II, alto, violon I,
violoncelle) sur un sujet joué staccato et inhabituellement dansant pour une fugue ; le pont, un divertissement ; le second thème, un jeu en fugato d’esprit
conclusif ; le développement, un grand divertissement s’inspirant d’abord des silences puis des
marches harmoniques ; la réexposition, un retour de
la fugue agrémentée d’un foisonnement de nouveaux
contre-sujets… Le tout conclu par une mise en abîme
ironique du style ancien que Beethoven avait appris
avec Albrechtberger en 1792 puis ensuite avec Salieri.
Le menuetto (allegretto) reprend la métrique ternaire
habituelle pour lui donner un ton plus romantique
(accents, sforzandi, lyrisme du premier thème, oppositions majeur/mineur) : une inclination prolongée dans
le Trio par un jeu subtil d’espace rendu par l’effet
d’écho entre le violon II et le violoncelle (sous les trémolos frémissants du violon I).
notes de programme | 33
Beethoven experience
Le finale (allegro) s’inspire d’un rondo à la tsigane
pour en reprendre les signes les plus exotiques
(rubato, opposition de caractères, jeu sur les suspensions, retour à la « dictature » du premier violon).
Quatuor n° 10
en mi bémol majeur
op 74, « Les Harpes »
composition : octobre 1809 ; création : date inconnue ; édition : 1810 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
Le Quatuor n° 10 se présente comme un quatuor de
consolidation, de synthèse et de tranquille force.
Certains y ont même vu un retour à l’esprit de l’Opus
18 (la dédicace rend à nouveau hommage au prince
Lobkowitz). Ce quatuor constitue également la dernière œuvre « héroïque » de Beethoven pour quatuor
à cordes, le Quatuor n° 11 « serioso » s’orientant
ensuite vers des mondes sonores plus intérieurs.
L’introduction lente (poco adagio) du premier mouvement (allegro) s’avère moins tendue que La
Malinconia op 18 n° 6 : inclinée vers les intervalles
de triton mélodique, elle se conclut par une montée
chromatique (violon I). L’allegro respecte la logique
d’une forme-sonate bithématique. Le premier thème
se constitue de deux cellules : une première en arpège
détaché qui donnera son surnom au Quatuor quand
cet arpège sera repris en pizzicati pour l’accompagnement ; et une seconde plus chantante insistant
sur les sixtes ascendantes et descendantes.
L’ensemble du premier groupe thématique baigne
dans une grande clarté dont seuls émergent quelques
coups de massue (frottements dus à des fausses
relations entre les parties extrêmes et l’alto).
L’exposition du second groupe thématique — une
« thématique fluide » — oppose un premier élément en
si bémol majeur (B1) et un second en ut mineur (B2).
Le développement commence, en sol majeur, par
citer le matériau thématique du premier groupe avant
d’entamer un jeu de construction/déconstruction
traité avec force crescendo/decrescendo et trémolos aux parties intermédiaires. Le développement terminal prolonge cette recherche en combinant le motif
34 | cité de la musique
Beethoven experience
« des harpes » donné en relais (sur des septièmes
diminuées) entre les trois instruments accompagnateurs, tandis que le violon se saisit du motif d’arpège
pour le dérouler en un virtuose mouvement perpétuel — une référence évidente à Bach. Ce flot continu
de doubles croches laissera s’épanouir in extremis
un vibrant thème (violon II et alto) inspiré de la cellule
chantante du premier thème.
Le mouvement lent (adagio ma non troppo) est un
rondo varié en la bémol majeur (A B A’C A’’ coda),
chaque reprise de A étant ornée différemment simultanément à toutes les parties (donnant ainsi l’impression d’un contrechant généralisé). Le motif des
harpes est à nouveau cité legato (A’) puis en pizzicati
à l’alto (A’’).
Le scherzo présente de grandes similitudes avec la
Cinquième Symphonie (composée entre 1805 et
1808) pour ses trois croches en anacrouses. Le trio
(Piu presto quasi prestissimo) est repris deux fois —
une constante chez Beethoven — et commence par
un fugato amorcé par le violoncelle solo sur un contresujet en valeur longues et appuyées dans l’esprit
« sérieux » du contrepoint.
Enchaîné au mouvement précédent, le finale est un
thème suivi de six variations. Ce thème se caractérise
par les rythmes pointés, par les fréquentes interruptions du phrasé et par des mouvements contraires (utilisés surtout dans sa seconde partie). La var. 1 insiste
sur les mouvements contraires appliqués aux accords
de l’harmonie joués staccato. La var. 2 opère une
réduction harmonique du thème (avec variation ornementale du thème à l’alto, le thème étant « pris » dans
l’harmonie). La var. 3 tisse un flot de doubles croches
à la tierce (violon II et violoncelle), laissant le thème tenter de percer aux deux autres instruments (piliers mélodiques du thème joués à contretemps). La var. 4 opère
une nouvelle réduction harmonique (avec déplacement
des piliers mélodiques). La var. 5 travaille les contretemps et la var. 6 entame une densification progressive du rythme (apparition des triolets sur pédale au
notes de programme | 35
Beethoven experience
violoncelle) qui aboutira à la généralisation des dactyles puis des doubles croches homophoniques.
Quatuor n° 15,
en la mineur, op 132
composition : 1823-1825 ; création : 9 septembre 1825 ;
édition : 1827 ; l’œuvre est dédiée « au prince Nikolaus von
Galitzin ».
Comme dans le Quatuor n° 13, le Quatuor n° 15 vise
à confronter différents styles (choral, marche, récitatif
instrumental et cantabile entre le molto adagio et l’allegro appassionato) pour mieux en faire ressortir les différences, puis le tour de force qui les fait coexister.
Les liens entre ces deux quatuors ne s’en tiennent
d’ailleurs pas là puisque l’introduction lente du Quatuor
n° 15 cite les intervalles de la Grande Fugue ; leurs
allegros initiaux s’inspirent aussi de la même opposition entre tempo lent et tempo rapide. Après un
scherzo développé (240 mesures), le troisième mouvement se positionne comme le climax de l’œuvre.
Intitulé Heiliger Dankgesang eines Genesen an die
Gottheit, in der lydischen Tonart (Chant de reconnaissance d’un convalescent à la Divinité, dans le
mode lydien), il est né de la gratitude éprouvée par
Beethoven après une grave maladie contractée début
1825. Le lyrisme y est à la fois sublime et intérieur,
s’inspirant du style de choral pour susciter cette noble
solennité. Plusieurs sections se succèdent : A (cinq
phrases de choral harmonisé en mode de fa ou mode
lydien) ; B (une section contrastante en ré majeur de
mètre ternaire 3/8) ; A2 (un retour du style choral) ;
une variation ornementale de B ; et enfin A3 (le choral en canon).
E. H.
36 | cité de la musique
mercredi 9 juin - 20h
salle des concerts
Ludwig van Beethoven
Quatuor n° 6, en si bémol majeur, op 18 n° 6
allegro con brio, adagio ma non troppo, scherzo : allegro, adagio/allegretto quasi allegro/adagio/allegretto
durée : 25 minutes
Quatuor n° 7, en fa majeur, op 59 n° 1, « Razoumovski »
allegro, allegretto vivace e sempre scherzando, adagio
molto e mesto, allegro
durée : 38 minutes
entracte
Quatuor n° 13, en si bémol majeur, op 130
adagio ma non troppo/allegro, presto, andante con moto
ma non troppo, alla danza tedesca : allegro assai, cavatine : adagio molto espressivo
Grande Fugue, en si bémol majeur, op 133
durée : 42 minutes
Quatuor Lindsay :
Peter Cropper, violon
Ronald Birks, violon
Robin Ireland, alto
Bernard Gregor-Smith, violoncelle
concert enregistré par Radio France
diffusion sur France Musique le 18 juin à 14h
Beethoven experience
Ludwig van Beethoven composition : 1799-1800 ; création : date inconnue ; édition :
Quatuor n° 6
1801 ; l’œuvre est dédiée « au prince Lobkowitz ».
en si bémol majeur op 18
n° 6
Le seul de l’Opus 18 à s’échapper de l’ordonnancement traditionnel en quatre mouvements, le Quatuor
n° 6 possède un épisode atypique (La Malinconia)
placé entre le scherzo et le finale, et servant d’introduction lente à ce dernier mouvement.
Le premier mouvement (allegro con brio) commence
par cultiver les références au style classique : formesonate pulsée par des sforzandi mozartiens, deux
parties reprises, développement peu ambitieux se
limitant à des réponses entre les instruments et à des
modulations par marches harmoniques, bref développement terminal. Le second mouvement (adagio
ma non troppo) continue dans cette recherche de
symétrie. Sa forme est celle d’un Lied avec développement terminal (A, B, A’, développement, coda) et la
première partie (A) est constituée de quatre membres
isométriques (quatre fois quatre mesures : a, a’, b,
a’’). En plus de cette symétrie s’élabore un savant jeu
de contrechants et d’enrichissements rythmiques (sur
un rythme pointé typiquement beethovénien) dont
l’aspect foisonnant se trouve compensé par l’homorythmie qui donne parfois l’impression de « chanter à
quatre ». La partie B est annoncée par un unisson
mystérieux (mi bémol mineur anticipé par le développement terminal) alors que la cadence du violon
prépare le retour de la première partie (A’).
Le scherzo (allegro) fait partie des mouvements proprement « inouïs » composés par Beethoven. Sa subtilité rythmique est telle qu’aucune pulsation ne réussit
véritablement à s’installer. L’analyse de la partition
révèle comment Beethoven s’y prend : sur la mesure
à 3/4 traditionnelle — déjà brouillée par l’anacrouse —
, le rythme de l’alto et du violoncelle font croire à un 6/8
en s’appuyant sur la levée, alors que les violons font
croire à un 3/4 (également décalé sur l’anacrouse) en
insistant sur le deuxième temps sf… De multiples
syncopes achèvent de rendre le résultat sonore rythnotes de programme | 38
Beethoven experience
miquement imperceptible. Seul le Trio, avec ses dactyles simples, permet de se fixer aisément sur un
mètre, axant du coup l’opposition entre menuet et
trio sur un ordre rythmique et non tonal (ces deux
sections sont en si bémol majeur).
La Malinconia (adagio) constitue une introduction
lente au finale (les deux s’enchaînent). Elle se structure
en deux sections reposant sur des carrures de quatre
mesures absolument régulières et construites symétriquement : une première partie de 20 mesures culminant par une montée diatonique harmonisée en
septièmes diminuées ; et une seconde de 24 mesures
résolvant les tensions harmoniques par une mélodie
grave et ténébreuse accompagnée par des chutes
de quintes mélodiques. L’intérêt de ce mouvement
est clairement harmonique, se situant presque dans
la tradition des pièces expérimentales anciennes (ricercare) censées montrer en peu de lignes toute la
« science » et la maîtrise d’un compositeur. Malgré
cet aspect savant, Beethoven indique « Questo pezzo
si deve trattare colla piu gran delicatezza » (Ce passage doit être joué avec la plus grande délicatesse)
pour indiquer que les phrasés interrompus et les profils mélodiques interrogatifs et suspensifs sont néanmoins là dans un but expressif.
Le finale (allegretto quasi allegro) apporte une résolution sans ambiguïté aux tensions harmoniques de La
Malinconia en évoquant la simplicité populaires des
danses viennoises. Voisinent ainsi, à l’échelle de deux
mouvements enchaînés, le savant et le populaire : un
hommage évident à Haydn. Le mouvement commence comme une forme-sonate sans développement auquel vient s’ajouter inopinément la citation
de La Malinconia — qui pourrait faire office de développement —, avant de redonner une « seconde réexposition » : ce que l’on pourrait comprendre comme
une forme-sonate monothématique avec une double
réexposition encadrant le développement.
notes de programme | 39
Beethoven experience
Quatuor n° 7
en fa majeur op 59 n° 1
composition : 1806 ; création : janvier 1809 ; édition : 1808 ;
l’œuvre est dédiée « au comte Razoumovski », ambassadeur de Russie à Vienne.
Les années 1800-1801 ont marqué une avancée
importante dans la carrière de Beethoven : grande
créativité, reconnaissance du milieu musical, contrats
durables avec ses éditeurs… Et dans le même temps,
la prise de conscience aiguë de sa surdité (Testament
d’Heiligenstadt, 1802) l’a amené à résoudre cette
crise par la transcendance « héroïque » de son infirmité, voire par l’auto-mise en scène de cette transcendance — « Ne garde plus le secret de ta surdité,
même dans ton art » annote-t-il dans la marge de
l’un de ses quatuors dédiés à Razoumovski. La série
des trois Quatuors op 59 témoigne de l’avènement de
ce style « héroïque » qui s’assortit d’une quête de la
« grande forme » et d’un nouvel espace musical.
Chaque quatuor dure désormais près de quarantecinq minutes. Les velléités symphoniques sont aussi
clairement affichées (« Quatuors-symphonies, telle
serait la vraie dénomination de la triade opus 59 »
commentait Marliave). L’ambitus s’agrandit enfin,
atteignant des écarts vertigineux de cinq octaves
(mesure 388 à la fin du premier mouvement ; mesure
21 du finale « russe »).
Le Quatuor op 59 n° 1 a été composé en 1806, juste
après la Troisième Symphonie et Fidelio. Plus que les
trois autres, le premier mouvement (allegro) témoigne
de cette tension « héroïque » entre le cadre préétabli
— le classicisme servant de « prétexte » — et les
volontés personnelles du compositeur. Pas moins de
trois thèmes se succèdent pour la seule exposition
du premier groupe thématique : le premier (A1) exposé
au violoncelle (sur double pédale du violon II et de
l’alto) ; le second (A2) privilégiant le paramètre rythmique ; le troisième (A3) constitué d’une arabesque
déroulée sur un accord parfait joué sostenuto. En
regard, le second groupe thématique reste plus léger
(trilles, triolets servant aux périodes de transition,
notes de programme | 40
Beethoven experience
mélodie d’accords). Le développement combine ces
éléments en travaillant la tête du thème A1 avec les
triolets associés aux transitions, avant de faire intervenir une section fugato sur un sujet lointainement
inspiré de A2. Le développement terminal conclut le
mouvement par un travail sur les masses sonores
apparenté à la dialectique symphonique.
Le scherzo se trouve remplacé par une forme-sonate
dont une des particularités consiste à masquer le
début du développement. L’exposé initial des éléments thématiques n’est pas non plus franchement
explicite puisque le thème complet ne sera révélé
qu’à la mesure 239, comme si le thème ne devenait
« thème » qu’après avoir connu l’épreuve de l’œuvre
entière — une vision radicalement opposée à l’esthétique classique qui expose une cellule génératrice
pour en faire naître l’œuvre. Les autres traits remarquables de ce mouvement concernent la réexposition (précédée de A2), les modulations (par notes
communes, par glissements chromatiques et par
enharmonie) ainsi que la période de conclusion (un
fugato rempli d’ironie).
Le troisième mouvement (adagio molto e mesto) allie
une expressivité touchante au raffinement intellectuel
d’une forme subtilement située entre forme-sonate
et rondo (cf. Sonate « pathétique ») ou entre formesonate et forme Lied (le premier groupe thématique est
cité in extenso en fin de réexposition). La cadence
du violon I permet l’enchaînement avec le finale (allegro) dont le « thème russe » (dactyle et trochée) est
d’abord exposé au violoncelle (cf. premier mouvement). Le trille (violon I) qui s’associe à ce thème
constitue le second « élément barbare » qui sera
exploité au cours du mouvement dans un jeu de
masses (avec grands ambitus) et un jeu rythmique
(rythmes complémentaires dans les périodes de
conclusion). La dernière codetta fait intervenir un
fugato avec un nouveau sujet (le « thème russe »
devient alors contre-sujet).
notes de programme | 41
Beethoven experience
Quatuor n° 13
composition : 1825 ; création : 21 mars 1826 ; édition :
en si bémol majeur op 130 1827 ; l’œuvre est dédiée « au prince Nikolaus von Galitzin ».
Grande Fugue
composition : 1824 - octobre 1825 ; création : 21 mars
en si bémol majeur op 133 1826 ; édition : 1830 ; l’œuvre est dédiée « au cardinal archiduc Rodolphe ».
Monumental, le Quatuor op 130 est aussi atypique :
six mouvements conclus, soit par un finale modeste
(allegro d’une dizaine de minutes), soit par un finale
gigantesque — la Grande Fugue — qui, au même
titre que le finale de l’Ode à la joie, reste unique dans
l’histoire du quatuor (750 mesures pour ce seul
finale…) et sera finalement édité séparément. Le
Quatuor op 130 témoigne aussi de la volonté de
Beethoven de concilier l’hétérogène, en faisant se
succéder une cavatina issue de l’air vocal, une danza
tedesca inspirée des danses populaires et cette
Grande Fugue inspirée de la tradition la plus savante
de l’écriture musicale.
Dans le premier mouvement, pour contrer la logique
interne d’une forme-sonate, Beethoven se sert de
deux pôles d’écriture dont la proximité produira une
énergie dynamique : un stile adagio statique et chromatique (A) ; et un stile allegro mobile et diatonique (P).
Ces deux forces antinomiques sont confrontées à
échelle très rapprochée au début de l’exposition
(APAP), au début du développement (APAPAP) et à la
fin de la coda (APAPAP). L’opposition, déjà présente
dans le Quatuor n° 12 (premier mouvement), est ici
structurelle et non plus introductive. Entre ces oppositions stratégiques, la logique de la forme-sonate
n’est plus qu’un souvenir désincarné : le second
groupe thématique, exposé en sol bémol majeur, est
réexposé en ré bémol majeur et non au ton de la
tonique. Les lieux traditionnels de tension — le corps
du développement et la section d’attente de la réexposition (la « retransition ») — disparaissent au profit
des oppositions de tempi signalées plus haut.
Le Scherzo très bref reste peu innovant par la forme
notes de programme | 42
Beethoven experience
mais surprend par l’extrême concentration de ses
gestes musicaux (un des traits de la dernière période
de Beethoven) : une figure pour le Scherzo (en si
bémol mineur) et une autre pour le Trio (en si bémol
majeur). Seule rupture dans cette unité une peu
obsessionnelle : le récitatif instrumental avant la réexposition du Scherzo.
Le troisième mouvement n’est pas à proprement parler un mouvement lent mais plutôt un andante expressif (indiqué Andante con moto ma non troppo, poco
scherzoso) qui se situe entre ironie et esprit fantasque
(inventivité foisonnante des figures d’accompagnement, subtilité des nuances indiquées).
La danza tedesca (danse allemande) épure le style
pour mieux coller au populaire que ce scherzo qui ne
dit pas son nom est censé décrire. Seule écart à cette
volonté de faire simple : la coda qui déconstruit le
thème, d’abord en allégeant l’accompagnement puis
en donnant en Klangfarbenmelodie le thème en rétrograde…
Qualifié par Kerman d’« air d’opéra fictif », cette cavatine (petit air) est de forme ABCA’ (passage C « beklemmt », oppressé), une forme très proche de l’air de
Florestan emprisonné (Fidelio).
La fugue constitue l’une des manières qu’a trouvées
Beethoven pour renouveler la forme-sonate en opposant à l’esthétique du contraste, du bithématisme et
de la dramaturgie des modulations, celle de l’unité
d’éléments a priori hétérogènes, du monothématisme
et de l’absence de dramaturgie des modulations. La
fugue représente aussi un des éléments essentiels à
la symbolique beethovénienne : la conjonction des
contraires (les différentes voix) pour former un
ensemble cohérent (reflet de son humanisme). La
Grande Fugue se place enfin comme le « finale de
tous les finales » à cause de l’aspect extrême de sa
forme.
Les réactions à cette musique ont été très diverses,
et ce jusqu’à nos jours. Anton Schindler, contemporain de Beethoven, la percevra comme un héritage
notes de programme | 43
Beethoven experience
des fugues savantes de Bach - « Cet…
Anachronismus… appartient en vérité à des temps
reculés où l’art de combiner les sons était encore
fondé sur le calcul mathématique » (Anton Schindler,
Biographie von Ludwig von Beethoven, 1860, vol. II,
p. 115) -, jugement prolongé par Warren Kirkendale en
1963 lorsqu’il comparera la Grande fugue op 133 à
« L’Art de la fugue de Beethoven » (Acta Musicologica,
1963). Ce deux appréciations méritent d’être discutées puisque l’analyse de la fugue beethovénienne
ne révèle pas un goût aussi prononcé que les musiciens baroques pour la combinatoire (strettes, renversements, rétrogrades, doubles fugues…).
Beethoven préfère retenir de la fugue un « geste de
fugue » et un « effet de fugue » qu’il dramatise à un
point qu’aucun autre compositeur n’avait atteint avant
lui. Le rôle même du sujet de la fugue se situe entre
celui d’un sujet générateur (en rapport avec le principe
« déducteur » d’une fugue) et celui d’un thème de
sonate (en rapport avec la dramaturgie « abstraite »
d’une forme-sonate). De plus, ce thème-sujet n’est
pas utilisé au sens strict. Il est affiché dès son exposition comme un profil général devant permettre plusieurs exploitations possibles, à la manière d’un patron
mélodique qui unifierait le tout. L’intérêt ne se situe
donc pas dans la rigueur de la fugue, mais dans le
parcours que peut subir ce thème-sujet, dans le cadre
d’une vaste transformation thématique. C’est ce que
soulignait avec justesse Igor Stravinsky en écrivant
que « cette musique exemplifie un changement crucial : le passage du procédé contrapuntique aux transformations thématiques » (Igor Stravinsky, revue ARC
« Beethoven », 1990, p. 36) ; ou encore Philipp Racliff
en écrivant que « l’œuvre acquiert sa véritable signification lorsqu’on la considère non comme une fugue
d’une grande excentricité, mais comme une sorte de
poème symphonique comportant plusieurs épisodes
contrastés mais apparentés du point de vue thématique et une certaine part d’écriture fuguée »
(Beethoven’s String Quartets, 1965, p. 132).
notes de programme | 44
Beethoven experience
Le travail thématique que développe Beethoven dans
la Grande Fugue suit deux directions. La première
exploite des ressources d’ordre contrapuntique (variation des contre-sujets, renversables, strette, pédales) ;
la seconde des ressources d’ordre thématique (augmentation, diminution, inversion, syncopes, dissociation entre les paramètres rythmique et mélodique).
C’est cette seconde orientation qui retient le plus l’attention du compositeur, en lui permettant de s’abstraire de toute contingence « savante » et de privilégier
une rhétorique de la véhémence. Pierre Boulez montrait en effet comment la force du contraste remplaçait,
dans cette fugue, celle de la rigueur. « Chez Beethoven
en particulier, la rencontre ne va pas sans heurts, sans
chocs violents : car les relations harmoniques ne s’accomodent pas toujours des intervalles employés
contrapuntiquement ; cette musique « rigoureuse »
— expression la plus pure d’un style, d’une écriture —
devient aussi musique éminemment « dramatique ».
(...) Ce qui précisément donne aux fugues de
Beethoven leur caractère exceptionnel, ce qui fait
d’elles des créations uniques et inégalées, c’est cette
confrontation périlleuse entre des rigueurs d’ordre
différent qui ne peuvent qu’entrer en conflit ; aux frontières du possible, elles témoignent de l’hiatus qui va
s’accentuant entre des formes qui restent le symbole
du style rigoureux et une pensée harmonique qui
s’émancipe avec une virulence accrue. Quand le
drame de cet hiatus est ressenti de façon aussi aiguë
qu’il l’a été par Beethoven, alors cela donne la fugue
de l’op 106, la Grande Fugue pour archets entre
autres. » (Pierre Boulez, Relevés d’apprenti, Paris,
Seuil, 1966).
E. H.
notes de programme | 45
Beethoven experience
biographies
Quatuor Lindsay
Le Quatuor Lindsay est
désormais fermement établi sur la scène
internationale comme l’un
des tout premiers quatuors
à cordes. Ses interprétations prennent racine dans
la grande tradition européenne des quatuors à
cordes tels que les Busch
ou les Végh. Ils ont
d’ailleurs étudié durant leur
jeunesse avec Sandor
Végh et Sidney Griller. Le
Quatuor Lindsay a été
fondé en 1967 à la Royal
Academy of Music. Il
emprunte son nom à Lord
Lindsay, vice-chancelier et
fondateur de l’Université de
Keele à Sheffield où le
Quatuor a eu sa première
résidence. Après 6 ans
passés à l’Université de
Sheffield, le Quatuor
Lindsay devient quatuor en
résidence à l’Université de
Manchester où il donne
des séries de concerts
chaque saison, dirige des
séminaires, enseigne à des
ensembles de musique de
chambre. Le Quatuor
Lindsay enregistre pour
ASV. Il a gravé l’intégrale
des Quatuors à cordes de
Beethoven et de Bartók.
En 1984, le Quatuor reçoit
le Gramophone Chamber
Award pour l'enregistrement des derniers
Quatuors de Beethoven.
Le Quatuor Lindsay entretient une relation privilégiée
avec la musique de Sir
Michael Tippett dont il a
enregistré les quatre premiers quatuors. Le Quatuor
a aussi établi d’étroites collaborations avec d’autres
grands compositeurs
anglais comme Alexander
Goehr et Peter Maxwell
Davies. En France, le
Quatuor Lindsay s’est produit dans de nombreux
festivals : La Grange de
Meslay, Pontivy, Nohant,
Prades... mais aussi dans
les grandes salles parisiennes : Radio France,
Théâtre du Rond-Point,
Salle Gaveau, Théâtre des
Champs-Elysées. Il a participé à la Folle Journée
Beethoven à Nantes en
février 1996 et a été aussitôt réinvité pour la Folle
Journée Schubert en
1997, puis pour la Folle
Journée Brahms en 1999.
Le Quatuor Lindsay donne
régulièrement des concerts
en Europe et au USA. Il a
créé, à Sheffield en 1994,
un festival de musique de
chambre devenu un événement important dans la
vie musicale britannique.
Les concerts de ce festival
sont souvent doublés dans
plusieurs villes de GrandeBretagne, et notamment
au Wigmore Hall de
Londres. Les artistes se
rendent régulièrement au
Japon (novembre 1994,
septembre 1996,
décembre 1998). Le
Quatuor Lindsay joue des
instruments exceptionnels :
Peter Cropper, un
Stradivarius de la période
d’or ; Robin Ireland, un alto
Mori Costa de 1810 environ ; Ronald Birks et
Bernard Gregor-Smith ont
la chance que leur soit prêtés un Stradivarius Campo
Selice de 1694 et un violoncelle Ruggieri de la
même période.
Twyla Tharp
Depuis qu’elle a fondé sa
première compagnie en
1965, Twyla Tharp, danseuse et chorégraphe, a
signé un nombre important
de créations qui se sont
révélées déterminantes
pour l’affirmation de la
modern dance. Sa première création Tank Dive,
The Fugue, Eight Jelly Rolls
(sur la musique de Jelly
notes de programme | 46
Beethoven experience
Roll Morton), The Big
Pieces (sur la musique de
l’Orchestre de Paul
Whiteman et Thelonious
Monk) comptent parmi ses
œuvres les plus influentes
et les plus connues aujourd’hui. Twyla Tharp a
également porté la modern
dance sur les scènes de
Broadway, en 1981 avec
The Catherine Wheel en
collaboration avec David
Byrne, et en 1985 avec la
représentation de Singin’in
the Rain. Au cinéma, elle a
collaboré avec le réalisateur Milos Forman pour les
films Hair (1978), Ragtime
(1980) et Amadeus (1984) ;
avec Taylor Hackford pour
White Nights et avec
James Brooks pour I’ll Do
Anything (1994). En 1988,
Mikhail Baryshnikov, à
l’époque directeur artistique de l’American Ballet
Theater, lui propose d’être
son adjointe. En 1991,
Twyla Tharp est invitée à
être artiste résidente au
Wexner Center à
l’Université de l’Ohio.
Pendant cette année, elle
crée quatre nouvelles
pièces (The Men’s Piece,
Grand Pas : Rhythm of the
Saints, Octet et Sextet) qui
seront présentées en 1992
au City Center de New
York. Elle chorégraphie
cette même année Cutting
Up avec sa compagnie et
Mikhail Baryshnikov. Dans
les années qui suivent,
Twyla Tharp crée des
œuvres pour les danseurs
de l’Opéra de Paris, de
l’American Ballet Theater,
du New York City Ballet et
pour sa propre compagnie.
Chorégraphe prolifique, elle
produit les pièces Demeter
& Persephone avec la
Compagnie Martha
Graham (1993), Waterbaby
Bagatelles avec le Boston
Ballet (1994) et New Works
avec sa compagnie (1994).
En 1995, Twyla Tharp
poursuit ses relations avec
l’American Ballet Theater,
présentant trois nouvelles
créations : Americans We,
How Near Heaven et Jump
Street sur une partition
commandée pour l’occasion et interprétée en direct
par Wynton Marsalis et son
ensemble. Elle présente
également I Remember
Clifford pour le Hubbard
Street Dance Chicago.
Avant de commencer à
travailler à THARP !, elle
crée pendant l’hiver 19951996 les nouvelles pièces
Mr Worldy Wise, un ballet
en trois actes pour le Royal
Ballet de Londres et The
Elements pour l’American
Ballet Theater. Twyla Tharp
a également publié son
autobiographie Push
comes to Shove en 1992,
année qui a vu la
Fondation John. D et
Catherine T. Mac Arthur lui
apporter son soutien financier.
Nikolai Demidenko
a fait ses études au
Conservatoire de Moscou
auprès de Dimitri
Bashkirov. Médaillé du
concours international de
Montréal en 1976 et du
concours Tchaïkovski en
1978, il fait ses débuts en
Angleterre avec l’Orchestre
symphonique de la Radio
de Moscou et Fedoseyev.
Depuis 1990, il réside en
Grande-Bretagne et
enseigne à la Menuhin
School. Très connu en
Angleterre, Nikolai
Demidenko s’est produit
dans la plupart des
grandes salles : au
Barbican Centre dans le
cadre du Festival
Schumann & Friends, au
Symphony Hall dans le
cycle Tchaïkovski, à
Birmingham avec
l’Orchestre philharmonique
de Saint-Petersbourg et
Yuri Temirkanov, au Royal
notes de programme | 47
Beethoven experience
Festival Hall avec le
Philharmonia et Heinrich
Schiff, au festival de Cardiff
avec le Bolchoï et
Alexandre Lazarev, etc. Au
Wigmore Hall de Londres,
entre janvier et juin 1993,
Nikolai Demidenko a donné
une série de six récitals
« piano master-works »
apportant ainsi sa vision
personnelle sur 250 années
de littérature pour piano.
Un double CD Nikolai
Demidenko live at Wigmore
Hall est sorti en décembre
1993 chez Hypérion. Au
printemps 1997, il a de
nouveau donné une série
de trois récitals au
Wigmore Hall (Romantic
Voyage). En février 1999,
c’est au Barbican Centre
qu’il se produira pour le
Celebrity Recital Series. A
l’étranger, il s’est également
produit avec de très grands
orchestres : le BBC
Philharmonic, le London
philharmonic Orchestra,
Israel Philharmonic (avec
Yaov Talmi), le Berliner
Symphoniker (avec
Gaetano Delogu),
l’Indianapolis symphony
Orchestra (avec Raymond
Leppard). Il a donné des
récitals au Concertgebouw
d’Amsterdam, à
Rotterdam, Milan, Tel Aviv,
Istanbul, Prague, Varsovie...
En France, il a joué à Paris
(Auditorium des Halles et
Radio France), Lyon,
Grenoble, Saint-Etienne,
Lorient et dans le cadre
des festivals de la Roque
d’Anthéron, Orangerie de
Bagatelle, Fêtes
Romantiques de Nohant,
Festival Chopin à Paris...
En octobre 1997, il a interprété le 2e Concerto de
Rachmaninov à
Strasbourg, avec la
Philharmonie de SaintPetersbourg.
Stacy Caddell
est née à Norfolk (Virginie)
où elle a commencé à danser à l’âge de cinq ans. A
douze ans, elle a reçu les
enseignements de plusieurs écoles comme
Joffrey et American Ballet
Theater School. A l’âge de
seize ans, elle a eu l’honneur de pouvoir suivre les
cours du Ballet américain,
où elle a été régulièrement
choisie pour danser des
rôles principaux lors des
ateliers annuels. Un an plus
tard, elle a figuré parmi les
danseurs invités par
George Balanchine à
rejoindre le Ballet de New
York. Elle a dansé de nombreux rôles principaux (A
Midsummer Night’s Dream,
Divertimento n° 15,
Symphony in C, The Tin
Soldier, et Tarantella). Elle
s’est produite plusieurs fois
dans les séries PBS Great
performances. Stacy a
quitté le Ballet de New York
pour rejoindre la compagnie Twyla Tharp. Elle a
tourné avec Twyla Tharp et
Mikail Baryshnikov dans
Cutting Up. Elle a participé
à la création instrumentale
de Red, White and Blues
de Twyla Tharp dont le ballet correspondant et intitulé
The Exquisite Corpse la
met en scène. Stacy a réalisé un film télévisé de In
The Upper Room et apparaît dans les films I’ll Do
Anything et Central Park.
Elle s’est produite avec des
danseurs étoiles du Ballet
américain, du Ballet international de Copenhague,
et est un des membres
fondateurs des compagnies Bonsai Dance Group,
Maximum Dance Company
et O’Day Dancers. Stacy
travaille régulièrement avec
Twyla Tharp.
Gabrielle Malone
est née à Naples et réside
à New York. Elle étudie la
danse classique, le jazz et
les claquettes depuis l’âge
notes de programme | 48
Beethoven experience
de quatre ans à la New
World School of the Arts
(Miami) et s’est produite en
Floride au théâtre de Dale
Andree, au Mary Street
Dance Theater, avec les
Gerri Houlithan Dancers, la
Dance Wave de Gary
Lund, et après son arrivée
à New York, avec Twyla
Tharp (Tharp !, The 100’s).
Helen Saunders
Née au Pays de Galles, elle
commence ses études de
danse au Royal Ballet
School en 1979. Elle s’est
produite avec le Royal
Ballet de 1986 à 1989,
puis a rejoint le Ballet royal
danois avec lequel elle a
dansé jusqu’en 1995.
Helen a créé des chorégraphies pour des ateliers
avec le Ballet royal danois,
l’ensemble Micado Dance
de Copenhague, et
Dansescenen également à
Copenhague. Elle est
membre du Nouveau
Théâtre de Danse danois
et enseigne la danse à
Copenhague.
Sandra Stanton
est née à Verona, New
York et a commencé à
danser à l’âge de cinq ans.
Elle a rejoint la compagnie
de danse Mohawk Valley
Performing Arts Regional
et a passé ses étés avec le
Ballet de Chicago, le Ballet
du Bolshoi à Vail, dans le
Colorado et le
Chautauqua. Elle a brièvement assisté aux NCSA puis
a continué à la Juilliard
School pour recevoir son
BFAen 1996. Depuis lors,
Sandra a dansé avec Twyla
Tharp comme membre privilégié de la compagnie.
Récemment, elle a travaillé
avec les La La La Human
Steps et dansé le premier
rôle de Salt d’Edward Lock
à Ottawa au Canada.
Elizabeth Zengara
a commencé ses études
de danse dans sa ville
natale à Wilmington
(Delaware) à l’âge de
quatre ans. Elle a ensuite
étudié à Tempe (Arizona) et
a dansé avec le Mesa Civic
Ballet. A seize ans,
Elizabeth a suivi la formation des écoles Jacob’s
Pillow, Dance Aspen et du
Ballet Marin au cours de
leurs programmes d’été.
Par la suite, elle a suivi un
enseignement complet à la
Milwaukee Ballet School et
a rejoint la compagnie un
an plus tard. Depuis lors,
Elizabeth a dansé avec le
Feld Ballet à New York et
danse fréquemment avec
le Ballet Met à Colombus
(Ohio), avec lequel elle a
dansé des rôles principaux
allant du classique au
contemporain, incluant les
œuvres de James
Kudelka, Peter Pucci,
David Nixon, Choo San
Goh, Ben Stevenson... Elle
a dansé dans le Lac des
Cygnes, Coppélia, La Belle
au bois dormant, Giselle, et
Casse-Noisette.
Actuellement, Elizabeth travaille sur son premier projet
avec Twyla Tharp.
Jamie Bishton
s’est produit comme danseur avec Twyla Tharp de
1985 à 1994.
Parallèlement, entre 1988
et 1990, il a dansé avec
l’American Ballet Theater. Il
a travaillé avec Twyla Tharp
sur plusieurs projets indépendants incluant des
productions pour le cinéma
et la télévision. Sa plus
récente association avec
elle a été d’être le directeur
des danseurs de sa dernière compagnie. Jamie
Bishton est un membre privilégié du Mikhail
Baryshnikov’s White Oak
Dance Project. Il se produit
avec cette compagnie jusqu’à présent. Jamie a reçu
notes de programme | 49
Beethoven experience
en 1995 un Award du New
York Dance and
Performance « Bessie »
pour Outstanding Creative
Achievement.
Alexander Kølpin
Natif de Copenhague,
Alexander Koelpin a commencé l’étude de la danse
au Ballet royal danois à
l’âge de 13 ans. Devenu
membre du corps de ballet
en 1983, puis danseur
étoile en 1986, il a remporté la même année le
August Bournonville
Honour Award au
Concours International du
Ballet Jackson. Il a effectué
une tournée avec Nina
Ananiashvili et les
International Stars, a été
invité par le Ballet australien et a dansé en solo
avec le Ballet Béjart de
Lausanne. Alexander
Koelpin a dansé les
œuvres de la plupart des
chorégraphes du XXe siècle
(Ailey, Balanchine, Kylian,
Cranko, Tharp).
Parallèlement à sa carrière
de danseur, il s’est produit
sur scène, au cinéma et à
la télévision.
Thomas Lund
a été admis à l’Ecole du
Ballet royal danois en
1986, est devenu stagiaire
du Ballet royal danois en
1991, membre du corps
de Ballet en 1993 et danseur étoile en 1996. Il a pris
part à un grand nombre de
spectacles comme Napoli
de Bournonville, Le Songe
d’une nuit d’été de Joy
Neumeier, La Sylphide,
Gaité parisienne de Béjart,
Roméo et Juliette de
Ashton, Caroline Mathilde
de Flemming Flindt,
Cendrillon, Zakouski de
Peter Martin... Il a été par
ailleurs invité à travers le
monde (Tokyo, Londres,
Riga, et Paris) pour différents spectacles, et en
particulier à Hiroshima où il
a dansé La Sylphide. En
1999, il a fait ses débuts
comme chorégraphe au
Théâtre royal danois avec
Relations.
Victor Quijada
né à Los Angeles
(Californie), il est diplômé
de la Los Angeles High
School for the Arts. Il a étudié et a travaillé avec
l’Ensemble Performance
de Rudy Perez de 1994 à
1996, période durant
laquelle il s’est également
produit en tant qu’invité
avec Elizabeth Streb
(Ringside), le Ballet San
Joaquim, le Ballet classique de Los Angeles.
Depuis 1996, Victor a travaillé avec Twyla Tharp
comme membre fondateur
de sa compagnie
« Tharp ! ».
Andrew Robinson
est né à Enfield (Londres). Il
a étudié à l’Ecole de Danse
Contemporaine de
Londres et a travaillé avec
Viola Farber, Robert
Cohan, Dan Wagoner et
Nancy Duncan. Il s’est
également produit avec la
compagnie de danse
Richard Alston, Aletta
Collins et depuis 1996
avec Twyla Tharp (Tharp !,
The 100’s, et The Diabelli).
technique
régie générale
Christophe Gualde
Didier Belkacem
Olivier Fioravanti
régie plateau
Jean-Marc Letang
régie lumières
Marc Gomez
notes de programme | 50

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