Marseille a les ciseaux

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Marseille a les ciseaux
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LIGUE 1
Notre sélection
Le Journal de l’Île
Marseille
a les ciseaux
Sa dynamique actuelle est telle que l’OM pense
pouvoir sortir vainqueur de la course au titre.
L’OL, en tête de la L 1 depuis miseptembre, sent depuis trois journées le souffle des Marseillais, tapis à seulement un point derrière.
En 2009, l’OM empile des statistiques de premier de la classe. Plus
grand nombre de points (26),
meilleure différence de buts (+
13), meilleure défense (2 buts encaissés). Une trajectoire qui fait
espérer à l’OM d’être le premier à
faire tomber le septuple champion de France, dix-sept ans après
son dernier titre national.
AVANT-HIER APRÈS-MIDI, Éric
Gerets avait une petite mine : «Je
n’arrivais pas à dormir, alors j’ai
revu le match.» Une manière de
tromper l’insomnie en prolongeant le plaisir de la soirée au
stade Geoffroy-Guichard où Marseille a frappé fort. Lyon, Bordeaux, le Paris-SG et Lille avaient
gagné, alors l’OM a répliqué par
une victoire record (3-0) dans
l’antre des Verts. Jamais, en
soixante-dix ans de confrontations, il ne s’y était imposé par
trois buts d’écart. Dans leur
chasse derrière Lyon, ils font actuellement parler la poudre et les
mots chargés d’ambition. Être
champions, ils y croient et Hatem Ben Arfa, le transfuge lyonnais, est venu le dire avant-hier :
«Nous sentons que tout Marseille a
faim d’un titre et on va tout faire
pour l’avoir. Tout le monde y croit.
Lorsque j’étais à Lyon, c’était
comme ça. Cette année, on a vrai-
ment la possibilité de faire quelque
chose. Il ne faut surtout pas s’enflammer parce que tout peut aller
très vite. Mais si on reste concentré
et vigilant, on peut y arriver. Je sens
de la confiance dans le groupe. On
ne parle pas du titre pour en parler
mais parce qu’on est conscients de
pouvoir y arriver. Et c’est ça qui me
fait plaisir. On joue tous les matches pour être champions et, grâce
à cet état d’esprit, on arrive à se surpasser.»
Une ambition qu’Éric Gerets
dit avoir instillée depuis le début
de la saison : «Il y a deux possibilités quand on évoque l’objectif
d’être champions. Ne rien dire mais,
si vous arrivez en bonne position en
fin de saison, c’est alors prendre le
risque que les joueurs soient déboussolés par cette perspective. J’ai préféré avoir l’honnêteté de l’annoncer.
Là, petit à petit, ils commencent à
croire que c’est possible et ils doivent se dire : “Merde, il avait raison, ce vieux !”»
Tous les indicateurs
au vert
Cela fait effectivement un moment qu’il avait claironné cet objectif. Le 29 mai dernier, il annonçait dans L’Équipe :
«L’ambition pour la saison prochaine, c’est d’être champion. On
peut avoir celle d’être deuxième ou
troisième parce que c’est la Ligue des
champions. Ce n’est pas une honte.
Le rempart marseillais a fait exploser les Stéphanois lors du dernier match de la trentième journée (3-0). Vitorino Hilton, Brandao, Taye Taiwo,
Renato Civelli et Benoît Cheyrou (de gauche à droite) sont lancés dans la course au titre. (Photo Richard Martin)
Mais il faut vivre pour remporter des
titres. On a prouvé cette saison (la
saison dernière) que l’écart avec
Lyon n’était pas insurmontable
puisqu’on les a battus deux fois en
Championnat (2-1, 3-1).»
Dans cet entretien, Gerets évoquait les faiblesses de l’OM
d’alors : «Il a manqué des choses à
l’équipe, malgré tous ses efforts.
Comme conserver un certain niveau
de performance, à l’image de ce que
sait faire Lyon. Si on n’a pas le ballon, il y a un travail à faire, un pres-
sing de toute l’équipe. On a pris trop
de buts sur des fautes individuelles,
avec beaucoup trop de mauvais placements, de mauvais contrôles, de
passes qui ont relancé l’adversaire.
On n’a pas assez marqué et par trop
peu de joueurs.»
Dix mois après ce catalogue des
manquements, les Marseillais
ont gommé bon nombre de ces
insuffisances, la dynamique est
au plus haut, tous les indicateurs
sont au vert. Hier, les Marseillais
se sont entraînés sous un grand
ciel bleu et tous avaient le sourire. Le revenant (Civelli), la surprise (Mears), le remplaçant de
luxe (Ben Arfa), l’animateur de
vestiaire (Wiltord, voir par ailleurs), les victimes des rotations
(Zubar, J. Rodriguez, Mbami) et
tous les autres.
Zenden et Ziani, eux, étaient
en phase de reprise. Le premier
est espéré jeudi à Donestk lors
du match aller des quarts de finale de la Coupe de l’UEFA ou
alors dimanche pour la venue de
Grenoble. Le second devra patienter jusqu’au déplacement à
Lille (le 26 avril). Avant-hier, les
supporters n’étaient que quelques-uns à suivre leurs favoris,
installés sur une butte au centre
d’entraînement de la Commanderie. Seize ans après sa victoire
en Ligue des champions et son
dernier titre majeur, l’OM retient encore son souffle mais ils
sont nombreux à saliver devant
cette fin de saison et à y croire
cette fois, eux aussi
Dominique Rousseau
Et Wiltord dans tout ça ?
L’ancien Rennais espère du temps de jeu. Il en a même demandé à Gerets…
IL EST TOUT LÀ-BAS, sur le bord de la touche,
enseveli sous une pyramide marseillaise. On
distingue à peine la boule à zéro de Sylvain
Wiltord, cible nourrie de cette effusion de
joie après le premier but de Mamadou Niang
à Saint-Étienne (3-0). Une scène comme une
énième preuve de son rayonnement… dans
le vestiaire.
L’ancien international reste pourtant un
joueur dans sa tête, dans son corps même si
sa présence, paletot olympien sur le dos, semble plus anecdotique. Wiltord n’a pas réussi
à arracher une place dans l’équipe type et il
s’en tire aujourd’hui avec 332 minutes, un
bilan anorexique au regard de ses attentes.
Cela ne l’empêche pas de conserver un état
d’esprit irréprochable, sa marque de fabrique.
Wiltord en vieux sage ? Étonnant.
Wiltord, qui ne sera pas conservé par l’OM,
espérait toutefois placer quelques courses
dans la fin de soirée stéphanoise. Gerets lui
avait même évoqué la possibilité de remplacer Valbuena à vingt minutes de la fin.
Mais le but de Niang a modifié les plans du
Belge qui a choisi d’envoyer Modeste Mbami.
Après le match, Wiltord a demandé à son en-
traîneur des explications. Gerets raconte la
suite : «Je lui ai dit dans le vestiaire : “Tu te rends
compte avec la carrière que tu as. Par respect pour
toi, je ne pouvais pas te faire entrer quatre ou
cinq minutes.” C’est pour ça que j’ai envoyé Samassa qui est jeune pour le dernier remplacement. Pour moi, c’est vraiment une question de
respect vis-à-vis de Sylvain.»
«Mais c’est quelqu’un d’important, souligne
Hatem Ben Arfa. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si Rennes a des difficultés depuis son départ. Il a amené un dynamisme chez nous. C’est
le même qu’à Lyon : il a envie de jouer au ballon, il déconne. Il fait du bien à tout le monde.»
Wiltord se mue en vieux sage écouté. Récemment, Niang nous expliquait comment il aimait l’interroger sur ses passages à
Arsenal, en équipe de France,
sur ses succès passés. «On ne se lasse jamais
de lui poser des questions. Ce n’est pas n’importe qui ! Avant les matches, il parle beaucoup,
il encourage. Alors comment peut-on faire la
gueule sur le banc quand on voit ça ? Il faut
suivre son exemple. Même s’il me piquait la
place, ce serait un honneur.» Il n’en est pas
encore question. Et surtout pas jeudi à Donetsk.
Niang : «Il faut suivre son exemple»
Sauf que Wiltord a toujours conservé une
mentalité de jeune premier et qu’il meurt
d’envie d’apporter son vécu. Même cinq minutes. La passion du foot ne l’a, en fait, jamais abandonné. «J’ai vu Manchester UnitedAston Villa (3-2) dans l’après-midi à l’hôtel. On
sort de la chambre au même moment que Sylvain, reprend Gerets. Et il me dit : “Qu’est-ce
qu’on s’est régalés !” Cette réflexion montre à
quel point il aime le foot. Avant de venir, je lui
ai toutefois dit au téléphone quelle serait sa situation mais je comprends qu’il veuille jouer plus
d’autant qu’il est mieux aujourd’hui que lorsqu’il
est arrivé.» Pas assez toutefois pour s’immiscer dans la rotation actuelle.
Logique, Wiltord n’est pas qualifié pour la
Coupe de l’UEFA. Cela ne l’empêchera pas
de suivre ce quart de finale aller en premier
supporter...
Hervé Pénot

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