AUX MAISONS DE TRANSFERT ET AUX AGENTS DE CHANGE
Transcription
AUX MAISONS DE TRANSFERT ET AUX AGENTS DE CHANGE
AUX MAISONS DE TRANSFERT ET AUX AGENTS DE CHANGE Les présentes lignes directrices résument les principales obligations légales auxquelles sont assujetties les maisons de transfert et les agents de change, et mettent en évidence les mesures que ceux-ci doivent inévitablement prendre pour améliorer et renforcer leur structure organisationnelle, ce conformément aux dispositions de la loi du 21 février 2001 relative au blanchiment des avoirs provenant du trafic illicite de la drogue et d’autres infractions graves. La Banque de la République d’Haïti (BRH), dans le cadre de ses inspections annuelles et ponctuelles, vérifiera les mécanismes mis en place par ces entités pour repérer et prévenir le blanchiment de fonds et prendra toutes les sanctions et mesures en cas de non respect des obligations légales et/ou règlementaires. Suivant l’article 2.1.1 de la loi du 21 février 2001, les dispositions des titres portant respectivement sur la prévention et la détection du blanchiment “s’appliquent à toute personne physique ou morale qui, dans le cadre de sa profession, réalise, contrôle ou conseille des opérations entraînant des dépôts, des échanges, des placements, des conversions ou tout autre mouvement de capitaux, et notamment aux établissements de crédit et aux institutions et intermédiaires financiers”. A cet effet, les maisons de transferts et les agents de change doivent mettre en œuvre les recommandations suivantes, prévues dans la loi du 21 février 2001. 1. Programme de prévention et de conformité Les maisons de transfert et les agents de change doivent mettre en place un programme de prévention et de conformité qui reflète la nature, l’ampleur et la complexité de l’institution concernée et qui comprend les éléments suivants : 1. la centralisation des informations sur l’identité des clients, donneurs d’ordre, bénéficiaires et titulaires de procuration, mandataires, ayants-droit économiques et sur les transactions suspectes ; 2. la nomination d’un officier de conformité et la désignation de responsables au niveau de chaque succursale le cas échéant ; 3. l’élaboration et l’application de politiques, de procédures et de méthodes destinées à assurer le respect des lois et règlements en vigueur ; 4. une évaluation des risques en matière de blanchiment d’argent ; 5. l’élaboration d’un programme de formation continue à l’intention des employés ; 6. un dispositif de contrôle interne de l’application et de l’efficacité des mesures adoptées pour l’application des politiques et procédures ; 7. la mise en place d’un dispositif de tests indépendants du contrôle de la conformité à la lutte anti-blanchiment. Le programme de prévention et de conformité doit être approuvé par le Conseil d’Administration de la maison de transfert ou l’agent de change, le cas échéant. 2. Désignation d’un officier de conformité Toutes les entités visées par les présentes doivent procéder à la nomination d’un officier de conformité. Cet officier doit être un cadre supérieur de l’institution, sélectionné en fonction de sa compétence, de son expérience, de sa probité et de son éthique professionnelle. Il devra dépendre directement de la haute direction pour tout ce qui à trait aux questions liées à la lutte contre le blanchiment des avoirs. L’officier de conformité a pour attributions de : • assurer l’application de la législation et de la réglementation anti-blanchiment ; • faire respecter les procédures et méthodes internes de lutte contre le blanchiment de capitaux ; • identifier les carences et faire les recommandations qui s’imposent ; • proposer des programmes de formation sur une base périodique ; • assurer la liaison avec l’Unité Centrale de Renseignements Financiers (UCREF) ; • préparer et acheminer les déclarations de soupçons à l’UCREF ; • s’assurer que les déclarations de transactions sont complétées et acheminées à l’UCREF dans les délais requis; • recevoir et donner suite aux demandes d’informations de l’UCREF et de toute autre autorité agissant dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux ; • exercer le devoir de vigilance vis-à-vis des clients. 3. Identification des clients et obligation de vigilance Les entités visées dans les présentes lignes directrices doivent accorder une importance particulière aux normes relatives à la connaissance du client pour préserver leur réputation et l’intégrité du système financier. Pour cela les maisons de transfert et les agents de change doivent mettre en place des procédures et prendre des mesures permettant d’établir l’identité des clients, des bénéficiaires, des donneurs d’ordre, des titulaires de procuration, des mandataires et des ayants droit économiques. En effet, la loi sur le blanchiment des avoirs provenant du trafic illicite de la drogue et d’autres infractions graves fait obligation aux personnes assujetties de s’assurer de l’identité et de l’adresse des clients, même occasionnels, avant d’entrer en relation d’affaires avec le client ou d’effectuer des opérations (article 2.2.2). L’identification et la vérification de l’identité portent sur le patronyme légal et autres noms utilisés (par exemple : nom de jeune fille), le lieu et la date de naissance. L’identification des clients s’effectue par la présentation de documents officiels (carte d’identification nationale, passeport, permis de conduire). Des informations doivent, en outre, être recueillies sur l’adresse permanente des personnes identifiées. Une copie de tous les documents doit être faite, classée et centralisée. Des contrôles formels doivent être effectués quant à la signature, aux éventuelles anomalies sur la photographie et à l’apparence physique du client potentiel. Lorsque le client est une personne morale, l’identification et la vérification de l’identité porte sur la dénomination sociale, la forme juridique, l’attestation d’existence, l’adresse du siège social, les administrateurs et la connaissance des dispositions régissant le pouvoir d’engager la personne morale. Les maisons de transfert et les agents de change doivent prendre des mesures raisonnables pour obtenir des informations sur l’identité véritable des personnes dans l’intérêt desquelles une transaction est effectuée, s’il y a le moindre doute sur le fait que ces clients pourraient ne pas agir pour leur propre compte. Aussi, les mandataires ne peuvent arguer du secret professionnel pour ne pas divulguer l’identité du réel bénéficiaire. Les pièces et renseignements visant à l’identification des clients doivent être exigés lors de l’exécution des transactions en espèces c’est-à-dire pour une somme globalement égale ou supérieure à quarante mille gourdes (Gdes 40,000.00) pour les maisons de transfert ou quatre cent mille gourdes (Gdes 400,000.00) pour les agents de change ou l’équivalent en monnaie étrangère, pour une opération occasionnelle de montant élevé, pour une opération de change, pour les remises et transmissions de fonds, pour toute transaction effectuée dans des conditions de complexité inhabituelles ou injustifiées. Les entités visées par les présentes lignes directrices sont astreintes à exercer une vigilance constante et à procéder à un examen attentif des opérations en veillant à ce qu’elles soient cohérentes avec la connaissance actualisée qu’elles ont de leurs clients. Elles doivent faire preuve d’une connaissance étendue et actualisée du client pour être à même de déceler d’éventuelles incohérences ou anomalies dans leurs opérations. 4. Elaboration de rapports Deux types de rapports doivent être élaborés: les déclarations systématiques de transactions pour toute opération globalement égale ou supérieure au seuil établi et les déclarations de soupçon lorsque des doutes existent quant à la licéité, la légitimité ou la régularité d’une transaction. Pour toute transaction qui parait complexe ou inhabituelle ou sans justification économique ou sans objet licite, même lorsque le montant en jeu n’atteint pas le seuil établi, les entités doivent recueillir toutes les informations pertinentes quant à l’origine des fonds et l’identité des personnes impliquées dans la transaction, et établir un rapport. Les maisons de transfert et les agents de change doivent faire preuve d’une vigilance particulière en cas de variations extrêmes des mouvements de fonds (fréquence des transactions, etc.), même lorsque les opérations en question paraissent, à première vue, normales. Ils peuvent, au besoin, établir un rapport confidentiel écrit comportant tous les renseignements utiles et requis par la loi sur les modalités de la transaction et les personnes concernées. Les rapports automatiques de transaction et les déclarations de soupçon doivent être transmis à l’Unité Centrale de Renseignements Financiers (UCREF) par voie de communication électronique, par télécopie ou à défaut par tout moyen écrit, conformément aux délais établis par voie règlementaire. 5. Transferts de fonds Dans le cadre des transferts de fonds, les maisons de transfert doivent identifier les donneurs d’ordre et les bénéficiaires effectifs. L’identification inclut les prénoms, le nom, l’adresse et tous autres renseignements qui accompagnent le transfert ou le message qui s’y rapporte tout au long de la chaîne de paiement. Les maisons de transfert doivent s’assurer que les transferts de fonds contiennent toutes les informations requises sur le donneur d’ordre et/ou le bénéficiaire et prendre des mesures appropriées dans le cas contraire. 6. Conservation des documents Les maisons de transfert et les agents de change sont tenues de conserver pendant une période de cinq (5) ans au moins, à partir de la date de cessation des relations avec le client, toute la documentation relative à l’identité des clients, les relevés d’opérations importantes en espèces, les fiches d’opérations de change, les documents concernant les transferts de fonds et les rapports mentionnés à la section 4 des présentes. A cette fin, une formule d’archivage des documents sur les opérations doit être utilisée pour la conservation des documents. Cette conservation des documents se rapportant aux transactions nationales et/ou internationales effectuées permettra de répondre rapidement aux demandes d’informations des autorités compétentes et de reconstituer les transactions individuelles (y compris les montants et les types d’espèces en cause, le cas échéant) de façon à fournir, si nécessaire, des preuves en cas de poursuite pour conduite criminelle. Une copie des rapports systématiques de transactions et des déclarations de soupçons doit être gardée et archivée par l’officier de conformité. 7. Discrétion de l’institution Les institutions doivent élaborer un code d’éthique définissant les règles de conduite de leurs cadres en matière de lutte contre le blanchiment et les rapports devant s’établir entre eux et les tiers. Les institutions, en l’occurrence leurs dirigeants et leurs préposés, doivent se garder de divulguer à qui que ce soit, à l’exception des autorités mentionnées par la loi, les informations détenues sur un client. Les personnes suscitées ont pour obligation de ne pas informer leurs clients ou tout autre tiers des suites données à une opération, lorsqu’une déclaration de soupçon aura été remplie et acheminée à l’UCREF. Toute dénonciation faite par l’institution ou une personne physique (cadre, officier de conformité) quant aux actions entreprises à l’occasion d’une transaction quelconque à des tiers, voire au client lui-même, expose l’institution ou la personne physique à des sanctions pénales et/ou administratives. 8. Mise en place de dispositifs de contrôle interne Les maisons de transfert et agents de change doivent faire preuve d’une vigilance constante et se doter d’une organisation et de procédures internes propres à assurer le respect des dispositions prévues par la loi et permettant aux responsables des opérations de prévenir et d’identifier toute tentative de blanchiment. Ce système de contrôle interne doit contenir, entre autres: • un mécanisme de contrôle des politiques et procédures internes de lutte contre le blanchiment; • une structure garantissant la confidentialité du traitement des informations; • des mesures d’identification des éléments à risques liés au blanchiment et des systèmes d’évaluation de ces risques; • un système de surveillance pouvant garantir la maîtrise des risques relatifs au blanchiment; • un système centralisé de documentations et d’informations. Le système de contrôle en place doit s’étendre à toutes les composantes de l’institution. Toute institution est donc tenue de prendre les mesures nécessaires pour garantir la stricte application des politiques et procédures en vigueur spécialement celles relatives au blanchiment d’argent. Lors des tests indépendants périodiques portant sur le respect des procédures internes, ou la bonne surveillance des risques, une vérification spécifique sur le volet blanchiment doit être effectuée par l’audit interne de l’institution. Les vérifications spécifiques peuvent notamment s’appliquer aux points suivants : • des entrevues auprès des employés chargés des opérations et de leurs superviseurs pour évaluer leur degré de connaissance et de respect des procédures de lutte contre le blanchiment de fonds adoptées par l’institution; • • • • l’examen d’un échantillon de formulaires d’archivage des documents et de formulaires de renseignements sur les transactions financières douteuses; une vérification du système de tenue des documents; l’existence des justificatifs joints ou référencés aux pièces comptables; la connaissance par les collaborateurs des règles internes anti-blanchiment. Les résultats de toute vérification doivent être signalés au Conseil d’Administration ou à la haute direction. Suivant la structure hiérarchique de l’institution, les questions relatives aux mesures prises ou à prendre et aux échéanciers prévus à cet égard doivent être connues et divulguées au personnel exécutant. 9. Programme d’auto-évaluation des mécanismes de prévention du blanchiment Les maisons de transfert et les agents de change doivent évaluer au moins une fois l’an l’efficacité de leurs procédures de détection des opérations de blanchiment afin d’identifier les points de faiblesse et faire des recommandations en ce qui a trait aux améliorations et/ou aux modifications à apporter aux mécanismes de contrôle déjà en place. Cette évaluation doit être effectuée par le vérificateur externe et sanctionnée par un rapport qui précise la nature, l’étendue et les procédés d’évaluation utilisés de même que les conclusions et recommandations. Ce rapport devra indiquer clairement si l’établissement a respecté les procédures internes et les exigences faites par la législation. Le rapport doit être transmis au conseil d’administration ou la haute direction et conservé pour consultation par la Banque de la République d’Haïti (BRH), le cas échéant, lors des inspections sur place. 10. Système de vérification externe et indépendante Les maisons de transfert et les agents de change doivent faire vérifier leurs livres, au moins une fois l’an, par des vérificateurs externes. A l’issue de cette vérification annuelle, les vérificateurs externes sont tenus de se prononcer sur le degré d’efficacité de la structure antiblanchiment mise en place par l’institution et du respect des lois et réglementations en vigueur en la matière. Lors de cette opération, les vérificateurs doivent s’assurer que : • • • • • les cadres ont un certain degré de connaissance des procédures relatives au blanchiment; les formulaires tant de déclaration systématique que de soupçon sont complétés correctement pour toutes les transactions lorsque nécessaire; les risques de blanchiment sont bien maîtrisés par les cadres de l’institution surtout par ceux affectés aux opérations ; le système de contrôle interne de l’institution répond aux critères de la lutte antiblanchiment ; les règles et procédures mises en place en matière d’identification et de connaissance des clients sont adéquates et bien suivies par les cadres concernés. 11. Programme de formation continue Les maisons de transfert et les agents de change doivent s’assurer que tous leurs employés, notamment ceux qui sont en contact permanent avec les clients, ont des connaissances minimales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et une maîtrise des dispositifs mis en place par l’institution pour participer à cette lutte. Des séances de formation continue doivent être organisées, sur une base régulière, pour les cadres du Service des Opérations. Les hauts cadres de l’institution, les cadres du Service de l’audit interne et l’officier de conformité doivent participer, sur une base régulière, au moins une fois l’an, à des séminaires sur le blanchiment de capitaux pour être à jour quant aux pratiques utilisées par les blanchisseurs et les nouvelles normes à respecter, tant sur le plan international, régional que local. 12. Sanctions administratives pour non respect des dispositions légales en matière de blanchiment Pour les faits suivants: • grave défaut de vigilance ou non respect des obligations d’identification du client; • non production de rapports systématiques de transaction ou de déclarations de soupçon; • dénonciation faite aux clients ou à des tiers relative aux actions entreprises en matière de prévention et de détection du blanchiment; • et toute autre violation des obligations contenues dans la loi du 21 février 2001, La Banque de la République d’Haïti (BRH) se réserve le droit d’engager toute procédure appropriée et/ou de prendre toutes mesures administratives conformément à la loi et à la réglementation en vigueur. Les sanctions peuvent être soit des amendes, soit des sanctions administratives (avertissement, suspension d’activité, retrait d’agrément ou interdiction définitive dans les cas les plus graves) sans préjudice de celles prévues par la loi, et de celles résultant de la responsabilité civile ou pénale qui peut être engagée en raison de la commission de l’infraction. Port-au-Prince, le 24 juillet 2012 Georges Henry fils Gouverneur Adjoint