Caractérisation de biofilms formés à la surface de

Transcription

Caractérisation de biofilms formés à la surface de
é q u i p e d e
recherche sur les
r e l a t i o n s
m a t r i c e
ext r acellulair e
c e l l u l e s
ECOLE DOCTORALE SCIENCE ET INGENIERIE
de l’Université de Cergy-Pontoise
THESE
Présentée pour l’obtention du grade de Docteur de l’Université de Cergy-Pontoise
Spécialité : Microbiologie
Caractérisation de biofilms formés à la surface de membranes
de nanofiltration dans un processus de production d’eau potable
et stratégies de lutte anti-biofilm
Par
Ahmed HOUARI
Equipe de Recherche sur les Relations Matrice Extracellulaire Cellules
EA 1391
Soutenue le Jeudi 24 Septembre 2009
Devant le jury composé de
J.C. BLOCK
T. JOUENNE
E. PAUL
M. DJAFER
O. GALLET
P. DI MARTINO
Professeur à l'université de Nancy
Directeur de recherche CNRS, Rouen
Professeur à l'université de Toulouse, INSA
Docteur d'université, Véolia eau, Nanterre
Professeur à l'université de Cergy-Pontoise
Professeur à l'université de Cergy-Pontoise
Rapporteur
Rapporteur
Examinateur
Examinateur
Examinateur
Directeur de thèse
Remerciements
Les travaux présentés dans ce mémoire ont été réalisés au sein du laboratoire ERRMECe (EA 1391)
de l’université de Cergy-Pontoise sous la direction scientifique du Professeur Patrick Di Martino en
collaboration avec Véolia Eau et le syndicat des eaux d’Ile de France (SEDIF).
Je tiens à remercier en premier lieu Patrick Di Martino pour la confiance qu'il m'a accordé en me
proposant ce sujet de thèse, pour son encadrement paternel et la compréhension dont il a fait preuve
dans les moments les plus difficiles. Je remercie également Malik Djafer, Responsable de l’unité
environnement et process qualité d'eau de Véolia Eau Banlieue de Paris et Véronique Heim, directeur
général adjoint des services techniques du SEDIF pour leur support scientifiquement et financier dans
la conduite de mes travaux.
Je remercie Messieurs Jean Claude Block, Professeur des universités (Université de Nancy), Thierry
Jouenne Directeur de recherche CNRS (Université de Rouen), Etienne Paul Professeur des universités
(INSA de Toulouse), Malik Djafer Responsable de l’unité environnement et process qualité d'eau
(Véolia Eau banlieue de Paris), et Olivier Gallet, Professeur des universités (Université de CergyPontoise) de l’honneur qu’ils m’ont fait en acceptant d'évaluer mes travaux de thèse.
Je remercie toutes les personnes qui ont permis à ce travail de fructifier, et notamment :
Madame Véronique Larreta-Garde, Professeur des Universités, pour m’avoir accueillie au sein du
laboratoire qu’elle dirige,
Mesdames Hélène Habarou, Karima Kecili et Monsieur Cyril Marconnet Ingénieurs de recherche et
développement (Véolia Eau banlieue de Paris) pour leurs compétences, leur gentillesse et l'aide
scientifique et technique qu'ils m'ont fournis,
Monsieur Ludovic Galas, Ingénieur de recherche INSERM à l'Université de Rouen (U413), pour ses
connaissances, sa sympathie, la formation qu'il m'a donné et les longs moments que nous avons passé
à faire des acquisitions en microscopie confocale,
Madame Irène Zimmerlin, Technicienne de l’Université de Rouen (UMR 6143 CNRS) pour ses
grandes compétences dans le domaine de la microscopie électronique,
Je remercie également tous les membres d'ERRMECe pour leur sympathie. Je tiens tout
particulièrement à remercier Damien et Julien pour l'aide scientifique et technique qu'ils m'ont
apportée, leur amitié et tout le reste. Merci à Flô pour sa participation aux manipulations, sa gentillesse
et son dévouement. Merci à Céline, Julien, Marie Cécile, Loraine, Lucie, Rémy, Edefia, Pierre, pour
l’amitié, l’aide et la gentillesse qu’ils ont manifestée à mon égard. Enfin, je tiens à remercier ma
famille et mes amis pour leur soutien et leurs encouragements dans les bons moments comme dans les
moments difficiles. Merci à tous du fond du cœur.
Sommaire
Introduction générale et objectifs……………………………………………….. p17
Revue bibliographique………………………………………………………………p26
I. Le biofilm…………………………………………………………………………...p27
A. Définition et caractéristiques …………………………………………………… p27
1. Définition…………………………………………………………………. p27
2. Morphologie et architecture………………………………………………. p29
3. Effet des forces de flux sur le développement de biofilm………………... p34
B. Spécificité des bactéries organisées en biofilm…………………………………. p36
1. Modification du transcriptome et du protéome…………………………....p36
2. Résistance aux stress……………………………………………………… p39
C. Etapes générales de formation d’un biofilm bactérien………………………….. p44
1. Adhérence à un support…………………………………………………… p44
2. Maturation du biofilm……………………………………………………... p48
3. Détachement………………………………………………………………. p50
II. Nanofiltration en production d’eau potable, colmatage membranaire………...p53
A. Filtration en production d’eau potable………………………………………….. p53
B. Principe et bases théoriques de la NF……………………………………………p56
1. Structure des membranes de nanofiltration………………………………..p57
2. Caractéristiques des membranes organiques……………………………... p58
3. Mise en œuvre du procédé de nanofiltration………………………………p59
C. Colmatage des membranes……………………………………………………… p62
1.
2.
3.
4.
Concentration polarisation………………………………………………... p62
Adsorption et blocage des pores………………………………………….. p63
Formation du « gâteau »………………………………………………….. p63
Colmatage biologique ou biocolmatage………………………………….. p64
III. Exemples de stratégies existantes pour lutter contre les biofilms………….
A. Stratégies de prévention……………………………………………………..
p68
p68
1. Matériaux « résistants à la colonisation »………………………………… p68
2. Maîtrise de la matière organique biodisponible…………………………... p72
3. Maîtrise des populations microbiennes planctoniques................................ p74
4
B. Stratégies curatives..........................................................................................
1.
2.
3.
4.
p78
Traitements chimiques non enzymatiques................................................... p78
Traitements enzymatiques........................................................................... p80
Traitements physiques................................................................................. p81
Protocole de nettoyage................................................................................ p82
Matériel et méthodes................................................................................................... p84
I. Matériel et installations mises en œuvre pour les études...................................... p85
A. Le matériel d’étude............................................................................................... p85
1. Pilote intégré à l’usine de Méry-sur-Oise.................................................... p85
2. Pilote de nanofiltration indépendant........................................................... p87
3. Autopsie des membranes............................................................................. p90
B. Les processus de nettoyage................................................................................... p91
1. Nettoyage in vitro des membranes............................................................... p91
2. Nettoyage des membranes sur pilote........................................................... p92
II. Les techniques d’analyse......................................................................................... p93
A. Les techniques d’imagerie..................................................................................... p93
1. Microscopie à épifluorescence..................................................................... p93
a. Principe................................................................................................. p93
b. Application........................................................................................... p94
2. Microscopie confocale à balayage laser...................................................... p95
a. Principe................................................................................................ p95
b. Application........................................................................................... p97
3. Microscopie électronique à balayage........................................................... p98
a. Principe................................................................................................. p98
b. Application........................................................................................... p99
B. Les techniques biochimiques et physicochimiques............................................... p100
1. Analyse du dépôt de colmatage par spectroscopie infrarouge à transformée de
Fourier en mode de réflexion totale atténuée (ATR-FTIR)............................. p100
a. Principe................................................................................................. p100
b. Application........................................................................................... p104
2. Mesure de l’activité du biofilm par ATPmètrie........................................... p105
a. Principe.................................................................................................. p105
b. Application............................................................................................ p106
3. Analyse du dépôt de colmatage par rhéologie............................................ p107
a. Principe................................................................................................. p107
5
b. Application........................................................................................... p109
4. Détermination de la mouillabilité par mesure d’angles de contact............. p110
a. Principe................................................................................................. p110
b. Application........................................................................................... p112
5. Mesure des paramètres hydrauliques et de qualité d’eau............................ p113
a. Calcul du Kw....................................................................................... p113
b. Calcul du FCL...................................................................................... p114
c. Détermination de la qualité de l’eau..................................................... p114
6. Tests statistiques.......................................................................................... p116
Résultats.......................................................................................................................... p117
I. Cinétique de formation d’un biofilm sur membrane de nanofiltration en
fonctionnement dans une usine de production d’eau potable.............................. p118
A. Développement du biofilm NF.............................................................................. p118
1. Analyse du développement du biofilm NF en imagerie.............................. p118
2. Analyse du développement du biofilm NF par spectroscopie infrarouge à
transformée de Fourier..................................................................................... p130
3. Analyse des propriétés physicochimiques et mécaniques du biofilm NF....p133
4. Performance de filtration membranaire et qualité de l'eau d'alimentation...p136
B. Comparaison des biofilms NF après 717 jours et après 7 années de fonctionnement
............................................................................................................................... p140
1. Analyse en microscopie confocale...............................................................p140
2. Analyse par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier................. p142
3. Analyse des propriétés physicochimiques et mécaniques des biofilms
NF.................................................................................................................... p143
II. Stratégies de lutte anti-biofilm................................................................................ p146
A. Maîtrise du développement de biofilm par prétraitement de l’eau
d’alimentation....................................................................................................... p147
1. Impact de la réduction de la matière organique dissoute sur le biocolmatage
membranaire..................................................................................................... p147
2. Réduction du nombre de microorganismes viables planctoniques.............. p152
a. Effet de l’irradiation aux UV sur les bactéries planctoniques.............. p153
b. Effet de l’irradiation UV sur le colmatage membranaire, alimentation en
eau filtrée sable..................................................................................... p155
c. Effet de l’irradiation UV sur le colmatage membranaire, alimentation en
eau filtrée sur charbon actif en grain puis ozonée................................ p161
B. Maîtrise des biofilms par traitement des membranes colmatées: nettoyages
chimiques, développement d’un protocole de conservation des membranes colmatées
in vitro compatible avec des essais de nettoyage.................................................. p164
6
1. Essais de nettoyages..................................................................................... p165
2. Effets du stockage de membranes colmatées sur le biofilm NF et sur l’efficacité
de nettoyage..................................................................................................... p172
Discussion........................................................................................................................ p177
I. Cinétique de développement microbien sur membrane NF.................................p178
II. Prétraitements et traitements................................................................................. p189
A. Prétraitements........................................................................................................ p189
B. Traitements............................................................................................................ p192
Conclusion et perspectives........................................................................................ p197
Références bibliographiques................................................................................... p201
Annexes............................................................................................................................ p214
7
Liste des figures
Revue bibliographique
I. Le biofilm
Figure 1 : Morphologie macroscopique d’un biofilm......................................................... p27
Figure 2 : Exemple de morphologie microscopique d’un biofilm...................................... p28
Figure 3 : Architecture microscopique de 2 biofilms mono-espèce.................................... p29
Figure 4 : Architecture microscopique d’un biofilm selon l’échelle d’observation............ p30
Figure 5 : Exemples d’organisation microscopique d’un biofilm en fonction du support.. p31
Figure 6 : Formule chimique et structuration de l’alginate (monomère et polymère)........ p33
Figure 7 : Conformation de l’alginate en présence et en absence de calcium..................... p34
Figure 8 : Comparaison de l’architecture et de la proportion des exopolysaccharides d’un
biofilm qui se développe dans des conditions de flux différentes....................................... p35
Figure 9 : Comparaison de l’expression protéique par électrophorèse bidimensionnelle d’une
bactérie au cours de son développement (planctonique, biofilm)....................................... p38
Figure 10 : Mécanisme de résistance suite à l’action d’un agent antimicrobien lié à des
« persitants »........................................................................................................................ p41
Figure 11 : Mécanismes de résistance d’un biofilm à un traitement antimicrobien............ p43
Figure 12 : Modèle de développement d’un biofilm bactérien........................................... p44
Figure 13 : Modèle de forces et interactions pouvant être mises en jeu lors de la formation
d’un biofilm......................................................................................................................... p46
Figure 14 : Décrochage de grappes de biofilm soumis à une force de flux........................ p51
II. Nanofiltration en production d’eau potable, colmatage membranaire
Figure 15 : Différentes techniques de séparation par procédés membranaires................... p56
Figure 16 : Schéma de la composition d’une membrane NF.............................................. p58
Figure 17 : Schéma représentant la répartition des débits dans un module membranaire.. p59
Figure 18 : Schéma d’un module NF spiralé....................................................................... p60
Figure 19 : Schéma d’une installation à simple passage..................................................... p61
Figure 20 : Schéma d’une installation avec système de recirculation................................. p62
8
Figure 21 : Développement d’un biofilm sur verre alimenté par des eaux usées................ p65
Figure 22 : Développement d’un biofilm sur des membranes alimenté par des eaux usées
............................................................................................................................................. p66
Figure 23 : Visualisation d’un biofilm sur des membranes NF colmatées..........................p67
III. Les différentes stratégies existantes pour lutter contre les biofilms
Figure 24 : Shéma des SAMs et des MAMs associé à leur mouillabilité de surface.......... p69
Figure 25 : Morphologies d’un biofilm en fonction du caratère hydrophile ou hydrophobe de
la surface.............................................................................................................................. p70
Figure 26 : Membranes UF endommagées par des traitements chimiques abusifs............. p80
Matériel et Méthodes
I. Matériel et installations mises en œuvre pour les études
Figure 27 : Filière membranaire de l’usine de Mery sur Oise............................................. p85
Figure 28 : Différentes prises de vue d’un module NF et de ses membranes associées..... p86
Figure 29 : Schéma du pilote de nanofiltration de Mery sur Oise...................................... p87
Figure 30 : Photographie d’un pilote indépendant.............................................................. p88
Figure 31 : Schéma d’un pilote de nanofiltration indépendant........................................... p89
Figure 32 : Composition d’une membrane NF.................................................................... p90
Figure 33 : Protocole expérimental de 3 essais de nettoyages in vitro................................ p91
II. Les techniques d’analyse
Figure 34 : Principe de confocalité...................................................................................... p96
Figure 35 : Schéma d’un microscope confocal................................................................... p97
Figure 36 : Emissions électroniques et électromagnétiques possibles en microscopie
électronique......................................................................................................................... p99
Figure 37 : Principe d’un cristal ATR multi-réflexions...................................................... p100
Figure 38 : Type de vibrations des molécules en infrarouge...............................................p101
9
Figure 39 : Spectres IR d’une membrane NF neuve et d’une membrane après plusieurs années
de fonctionnement............................................................................................................... p103
Figure 40 : Représentation du comportement rhéologique de différents matériaux soumis à un
test de fluage........................................................................................................................ p108
Figure 41 : Photographies du rhéomètre utilisé................................................................... p109
Figure 42 : Représentation schématique de l’angle de contact........................................... p111
Figure 43 : Angle de contact d’une surface hydrophile et d’une surface hydrophobe........ p111
Figure 44 : Schéma d’un goniomètre.................................................................................. p112
Résultats
I. Cinétique de formation d’un biofilm sur membrane de nanofiltration en
fonctionnement dans une usine de production d’eau potable
Figure 45 : Microorganismes à la surface de la membrane NF à J7 (microscopie à
épifluorescence)................................................................................................................... p119
Figure 46 : Illustration de la biodiversité retrouvée sur les membranes NF (microscopie à
épifluorescence et MEB)..................................................................................................... p120
Figure 47 : Microorganismes et polysaccharides associés à la surface de la membrane NF à J7
et J80 (microscopie à épifluorescence)................................................................................p122
Figure 48 : Développement des microorganismes et des polysaccharides associés à la surface
de la membrane NF à J7, J80, J475 et J717 (microscopie confocale)................................. p123
Figure 49 : Réseau de polysaccharides à J80 (microscopie confocale)...............................p124
Figure 50 : Modélisation du biofilm à J717........................................................................ p126
Figure 51 : Biofilm à la surface de la membrane NF à J475 et J717 (MEB)...................... p127
Figure 52 : Evolution de l’épaisseur du biofilm au cours du temps de fonctionnement..... p128
Figure 53 : Evolution des spectres IR au cours du temps de fonctionnement des membranes
NF........................................................................................................................................ p130
Figure 54 : Evolution des valeurs relatives de signaux IR au cours du développement du
biofilm NF........................................................................................................................... p132
Figure 55 : Evolution de l’angle de contact de la membrane NF au cours du temps de
fonctionnement.................................................................................................................... p134
10
Figure 56 : Viscosité du biofilm NF à J475 et J717 soumis à une vitesse de cisaillement
croissante............................................................................................................................. p135
Figure 57 : Module élastique (G’) et module visqueux (G’’) du biofilm à J475 et J717 soumis
à une fréquence croissante................................................................................................... p136
Figure 58 : Evolution de la perméabilité membranaire (Kw) et du facteur de colmatage
longitudinal (FCL) au cours du temps de fonctionnement des membranes NF.................. p137
Figure 58bis: Evolution du carbone organique total (COT) dans l'eau d'alimentation et de la
température de l’eau au cours du temps de fonctionnement des membranes NF............... p139
Figure 59 : Structuration des biofilms NF J717 et 7 ans (microscopie confocale)............. p141
Figure 60 : Comparaison des spectres IR des membranes NF à J717 et 7ans.....................p142
Figure 61 : Comportement viscoélastique des biofilms NF J717 et 7 ans.......................... p144
Figure 62 : Viscosité du biofilm NF J717 et 7 ans soumis à une vitesse de cisaillement
croissante............................................................................................................................. p145
Figure 63 : Module élastique (G’) et module visqueux (G’’) du biofilm J717et 7 ans soumis à
une fréquence croissante......................................................................................................p146
II. Stratégies de lutte anti-biofilm
Figure 64 : Structure des microorganismes et polysaccharides associés en fonction du
prétraitement (microscopie confocale)................................................................................ p148
Figure 65 : Spectres IR des membranes NF en fonction du prétraitement.......................... p150
Figure 66 : Evolution des paramètres de filtration de la membrane NF en fonction des
prétraitements...................................................................................................................... p151
Figure 67 : Effets du débit de l’eau d’alimentation et de la dose d’irradiation UV sur la
mortalité des bactéries libres............................................................................................... p154
Figure 67 bis: Photographie de particules présentes dans l'eau d'alimentation transportant des
microorganismes vivants (microscopie à épifluorescence)................................................. p154
Figure 68 : Schéma des pilotes NF..................................................................................... p155
Figure 69 : Membrane témoin après 10 semaines de fonctionnement (absence d’irradiation,
microscopie à épifluorescence)........................................................................................... p156
Figure 70 : Structure des microorganismes et des polysaccharides associés sur la membrane
NF en présence ou en absence d’irradiation UV de l’eau d’alimentation (microscopie
confocale, filtration sable)................................................................................................... p158
11
Figure 71 : Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 10 semaines..........................................p159
Figure 72 : Structure des microorganismes et des polysaccharides associées sur la membrane
NF en présence ou en absence d’irradiation UV de l’eau d’alimentation (microscopie
confocale, filtration charbon actif)..................................................................................... p162
Figure 73 : Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 20 semaines..........................................p163
Figure 74 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane neuve............ p166
Figure 75 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 7 jours...................................................................................................................... p167
Figure 76 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 80 jours..................................................................................................................... p168
Figure 77 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 475 jours................................................................................................................... p169
Figure 78 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 717 jours................................................................................................................... p171
Figure 79 : Analyse ATR-FTIR de l’évolution du dépôt de colmatage au cours du temps de
stockage............................................................................................................................... p173
Figure 80 : Analyse ATR-FTIR de l’effet du vieillissement du dépôt de colmatage sur
l’efficacité des procédures de nettoyage..............................................................................p175
Discussion
Figure 81 : Viscosité effective () en fonction du module de perte effectif (G0) pour 45
biofilms testés...................................................................................................................... p183
Figure 82 : Détermination de la viscosité (η) de solutions contenant des polymères en
proportion variables par application d’une force de cisaillement croissante...................... p185
Figure 83 : Spectres mécaniques du module de conservation (G’) et du module de perte (G’’)
d’un mélange agar/carraghénane......................................................................................... p186
Figure 84 : Schéma représentant l’effet du pH sur la structure des EPS............................. p193
12
Liste des tableaux et annexes
Tableau 1 : Spécificités de différents types de membranes de filtration............................. p54
Tableau 2 : Longueurs d’ondes d’excitation et d’émission des fluorophores..................... p94
Tableau 3 : Association entre les lectines et les motifs sucrés marqués............................. p95
Tableau 4 : Quantification volumique des signaux fluorescents du biofilm au cours du
temps................................................................................................................................... p129
Tableau 5 : Quantification volumique des signaux fluorescents du biofilm en fonction du
prétraitement........................................................................................................................ p149
Tableau 6 : Evolution des paramètres de filtration membranaires durant 10 semaines de
fonctionnement.................................................................................................................... p160
Tableau 7 : Evolution des paramètres de filtration membranaires sur 20 semaines de
fonctionnement.................................................................................................................... p164
Tableau 8 : Comparaison des valeurs relatives de signaux IR de biofilm au cours du temps de
stockage............................................................................................................................... p174
Tableau 9 : Comparaison de l’efficacité de nettoyage au cours du temps de stockage par
analyse ATR-FTIR.............................................................................................................. p176
Annexe 1 : Tables d’infrarouge........................................................................................... p215
Annexe 2: Spectres IR d’une membrane NF neuve et d’une membrane après plusieurs années
de fonctionnement (grossissement Figure 39)..................................................................... p222
Annexe 3 : Images de la surface membranaire obtenues par microscopie confocale à J7, J80,
J475, J717............................................................................................................................ p223
Annexe 4 : Modélisation de la surface du biofilm NF à J7, J80, J475 et J717................... p224
Annexe 5 : Evolution des spectres IR au cours du temps de fonctionnement des membranes
NF (grossissement Figure 53)............................................................................................. p226
Annexe 5 bis : Comparaison des valeurs relatives pour la bande amide I et amide II au cours
des différentes études.......................................................................................................... p227
Annexe 6 : Evolution du Kw et du COT dans l'eau d'alimentation au cours du temps de
fonctionnement des membranes NF.................................................................................... p228
Annexe 7 : Evolution du FCL et du COT dans l'eau d'alimentation au cours du temps de
fonctionnement des membranes NF.................................................................................... p228
13
Annexe 8 : Comparaison des spectres IR des membranes NF à J717 et 7ans
(grossissement Figure 60)................................................................................................... p229
Annexe 9 : Modélisation de la surface du biofilm NF après prétraitement de l’eau
d’alimentation au sable ou au charbon actif après 20 semaines de fonctionnement........... p230
Annexe 10 : Spectres IR des membranes NF en fonction du prétraitement
(grossissement Figure 65)................................................................................................... p231
Annexe 11 : Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 10 semaines
(grossissement Figure 71)................................................................................................... p232
Annexe 12 : Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 20 semaines
(grossissement Figure 73)................................................................................................... p233
Annexe 13 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane neuve
(grossissement Figure 74)....................................................................................................p234
Annexe 14 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 7 jours (grossissement Figure 75)............................................................................ p235
Annexe 15 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 80 jours (grossissement Figure 76).......................................................................... p236
Annexe 16 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 475 jours (grossissement Figure 77)........................................................................ p237
Annexe 17 : Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 717 jours (grossissement Figure 78)........................................................................ p238
Annexe 18 : Analyse ATR-FTIR de l’évolution du dépôt de colmatage au cours du temps de
stockage (grossissement Figure 79).....................................................................................p239
Annexe 19 : Analyse ATR-FTIR de l’effet du vieillissement du dépôt de colmatage sur
l’efficacité des procédures de nettoyage (grossissement Figure 80)................................... p240
Annexe 20 : Evolution de la viscosité d'un biofilm NF soumis par application d'une vitesse de
cisaillement croissante puis décroissante............................................................................ p241
Annexe 21 : Article de « Houari et al. » paru dans « Biofouling » en Juillet 2008........... p242
Annexe 22 : Article de « Marconnet et al. » paru dans « Desalination » en Juin 2009...... p248
Annexe 23 : Article de « Houari et al. » paru dans « Desalination and Water Treatment » en
2009..................................................................................................................................... p256
14
Liste des abréviations et symboles
AH : Lectine de Arachis hypogaea
AFM : Microscopie à Force Atomique (AFM : Atomic Force Microscopy)
ATP : Adénosine Triphosphate
ATR-FTIR : spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier en mode de réflexion totale
atténuée (ATR-FTIR : Attenuated Total Reflection Fourier Transform Infrared)
BS : Lectine de Bandeiraea simplicifolia
CA : Lectine de Concanavaline A
COA : Carbone Organique Assimilable
COD : Carbone Organique Dissous (DOC : Dissolved Organic Carbon)
CODB : Carbone Organique Dissout Biodégradable (BDOC : Biodegradable Dissolved
Organic Carbon)
COT : Carbone Organique Total (TOC : Total Organic Carbon)
DAPI : Diamino-4’,6-phénylindol-2dichlorhydrate
EDTA : Ethylène Diamine Tétraacétique
EPS : Exopolysaccharides de la matrice du biofilm
FCL : Facteur de colmatage longitudinal ou perte de charge longitudinale
FITC : Isothiocyanate de Fluoresceine
G : Monomère d’acide α-L-glucuronique
G0 : Module de perte effectif
G’ : Module de conservation ou module élastique
G’’ : Module de perte ou module visqueux
HSL : Homosérine Lactone
IR : infrarouge
J : Module de complaisance
Kw : perméabilité membranaire
LE : Lectine de Lycopersicon esculentum
M : Monomère d’acide β-D-mannuronique
MCBL : Microscopie Confocale à Balayage Laser (CLSM : Confocal Laser Scanning
Microscopy)
MEB : Microscopie Electronique à Balayage (SEM : Scanning Electron Microscopy)
MAMs : Monocouches Mécaniquement Assemblées (MAMs :Mechanically-Assembled
Monolayers)
15
MF : Microfiltration
NF : Nanofiltration
NOM: Matières Organiques Naturelles (NOM : Natural Organic Matter)
Pa : Pression d’alimentation
Pc : Pression du concentrat
PFA : Paraformaldéhyde
Qa : Débit d’alimentation
Qc : Débit de concentrat
Qp : Débit de perméat
QS: Quorum Sensing
RO: Osmose inverse (RO: Reverse Osmosis)
SAMs : Monocouches Auto-Assemblées (Self-Assembled Monolayers SAMs)
SDS: Sodium Dodecyl Sulfate
TAP : Traitement Anti-Protéique
TC : Traitement Chimique alcalin
TME: Traitement MultiEnzymatique
TRITC : Tetramethyl Rhodamine Iso Thio Cyanate
TV : Lectine de Triticum vulgaris
UE : Lectine d’Ulex europaeus
UF : Ultrafiltration
UP: Ultrapure
UV : Ultraviolets
α-D-man : α-D-mannoses
α-D-glc : α-D-glucoses
β-L-fuc: β-L-fucose
β-gal : β-galactoses
β-galNAc : N-acetyl-β-galactosamines
β-gal(1->3)galNAc : N-acetyl-β-galactosamines
(glcNAc)2 : N-acetyl-β-D-glucosamines
(glcNAc)3 : N-acetyl-glucosamines
λ: Temps de relaxation élastique
η : Viscosité
η 0: Viscosité effective
16
Introduction générale
et objectifs
17
L’eau est une ressource indispensable au maintien de la vie sur terre, c’est également
une ressource hautement stratégique car de la ressource en eau dépendent de nombreuses
activités humaines (Levi et al., 2007). La composition chimique de l’eau dans le milieu
naturel est très variable selon la couche géologique d’où elle provient et les substances
chimiques qu’elle a rencontré. En effet l’eau agit comme un solvant qui transporte des espèces
chimiques et permet la migration des polluants dans les milieux naturels. L’eau contient aussi
des gaz dissous, principalement de l’air et du gaz carbonique, et parfois des hydrocarbures
légers comme le méthane. Les eaux naturelles contiennent en général beaucoup de matières
minérales dissoutes sous formes ioniques; principalement des ions calcium (Ca2+), magnésium
(Mg2+), sodium (Na+), potassium (K+), carbonates (CO32-), bicarbonates (HCO3-), sulfates
(SO42-), chlorures (Cl-) et nitrates (NO3-). Ces ions proviennent principalement du lessivage
des sols par les eaux de pluie et de ruissellement mais peuvent aussi résulter de l’activité
humaine et notamment de rejets non contrôlés dans l’environnement. Ainsi, des ions nitrates
peuvent provenir d’exploitations agricoles et des ions de métaux lourds peuvent résulter
d’activités industrielles. Par érosion des sols, les eaux de ruissellement peuvent également
contenir des matières minérales en suspension, par exemple des matériaux argileux ou des
limons. Les eaux peuvent aussi contenir des matières organiques; ces matières sont alors
présentes soit sous forme dissoute, d’origine naturelle, comme les carbohydrates, les acides
humiques, les pigments ou des composés d’origine artificielle comme les hydrocarbures, les
solvants chlorés, les pesticides, soit en suspension, c’est le cas des déchets végétaux ou du
plancton.
L’eau potable nécessite une très grande qualité car elle doit satisfaire les besoins des
organismes humains et les exigences correspondantes en matière d’hygiène et de santé. La
définition d’une eau potable est régie par des normes qui fixent des teneurs limites maximales
pour certaines substances nocives susceptibles d’être présentes dans l’eau. Une eau potable
doit être exempte de germes pathogènes, comme des virus ou des bactéries, et d’organismes
parasites. Elle ne doit pas non plus contenir certaines substances minérales considérées
comme toxiques, tels les nitrates, les phosphates et les métaux lourds, ni des composés
organiques comme les hydrocarbures et les pesticides. A l’inverse, la présence de certaines
substances, comme les oligo-éléments peut-être vivement souhaitée car considérée comme
indispensable à l’organisme humain.
18
Dans les milieux naturels, l’eau peut subir de nombreuses contaminations de nature
chimique et/ou biologique. La contamination d’une eau peut avoir de graves répercutions sur
l’environnement mais également, dans le cas de l’eau potable, sur la santé des
consommateurs. L’Organisation Mondiale de la Santé estime que 80% des maladies affectant
la population mondiale sont associées à l’eau (Desjardins, 1997). Les maladies les plus
courantes présentant un lien direct avec une contamination de l'eau sont les pathologies
infectieuses gastrointestinales dues à des contaminations virales ou bactériennes et les
maladies parasitaires comme la schistosomase, le paludisme ou encore l'onchocercose. Les
risques microbiologiques des milieux hydriques sont jugés prioritaires en raison de leur
rapidité et facilité d'apparition et de l'extension des épidémies associées aux contaminations
microbiologiques. Cependant, les risques chimiques doivent également être pris en
considération car un certain nombre de micropolluants comme des métaux lourds, des
nitrates, des pesticides, des résidus médicamenteux s'accumulent dans les eaux du fait de
l'activité humaine. La combinaison de plusieurs micropolluants dans l’eau (« effet cocktail »)
pourrait avoir des effets toxiques même lorsque chaque composé est individuellement à une
concentration inférieure au seuil toléré par la réglementation. Les liens entre ces
micropolluants chimiques et différentes pathologies humaines sont difficiles à établir comme
le montrent de nombreuses publications scientifiques (Brody et al., 2006; McElroy et al.,
2008; Powlson et al., 2008; Ward et al., 2008; Yang et al., 2009). A l’époque du « principe de
précaution », on peut tout de même dire que des micropolluants sont suspectés, selon leur type
et leur concentration, d’être impliqués à court ou à long terme dans des dérèglements
hormonaux, des malformations génitales, des troubles de la reproduction et des cancers chez
l’homme (Morris 1995; Jones et al., 2005). Le chlore utilisé comme désinfectant dans l’eau
potable distribuée en réseau ne présente aucun risque sur le plan sanitaire mais ses dérivés,
dont notamment certains trihalométhanes (THM) peuvent constituer un risque pour la santé
humaine en favorisant les cancers de la vessie et en engendrant des troubles au moment de la
grossesse, au-delà de 0,1 mg/L, seuil fixé par le Code de la Santé Publique.
Dans ce cadre, les traitements visant à assainir l’eau et à la rendre potable constituent
un enjeu économique et sanitaire majeur. Une des méthodes de choix pour assainir l’eau est la
filtration par des procédés membranaires. La nanofiltration (filtration à l’échelle du
nanomètre) est un procédé de haute technologie particulièrement adapté au traitement des
eaux de surface. En effet, cette technologie fournit une barrière permettant d’éliminer un
grand nombre de virus, de microorganismes et de micropolluants comme les pesticides et
19
donc d’obtenir une eau d’une grande pureté tant microbiologique que chimique. Le pendant à
ce seuil de filtration de l’ordre du nanomètre est une nécessaire mise au point des matériaux
membranaires et du procédé pour limiter la déminéralisation en cours de filtration, ce qui
n’empêche pas une nécessaire reminéralisation avant distribution de l’eau en réseau. Les
membranes de nanofiltration sont coûteuses et leur durée de vie est limitée par le phénomène
de colmatage. Ce colmatage membranaire constitue encore aujourd’hui le principal verrou
technologique qui limite l’usage de la nanofiltration en production d’eau potable. En effet,
une couche nommée dépôt de colmatage se forme au cours du processus de filtration, modifie
les propriétés initiales de filtration de la membrane et cause de sérieux problèmes au niveau
de la production d’eau potable. Le colmatage conduit à de nouveaux surcoûts car les usines
doivent augmenter les pressions d’alimentation pour maintenir le niveau de production
(surcoût énergétique) et appliquer des processus de nettoyage réguliers (coût économique et
impact environnemental). De plus, ces processus de nettoyage des membranes de
nanofiltration ont une efficacité très limitée pour enlever la partie organique du dépôt. Avec la
prise de conscience de l’impact planétaire des activités humaines sur la santé de notre planète,
plus que les problèmes technologiques et économiques, l’impact du colmatage membranaire
sur l’environnement doit être aboli pour envisager un développement massif de l’usage des
procédés de filtration de type nanofiltration ou osmose inverse pour la production d’eau
potable.
Le colmatage peut être d’origine organique ou inorganique. De nombreuses études se
sont focalisées sur les aspects chimiques et physiques du colmatage montrant que les matières
organiques naturelles et les cations métalliques classiquement présents dans les eaux de
surface participent activement au colmatage. D’autres études ont démontré que des
membranes en fonctionnement sont recouvertes d’un biofilm, biofilm suspecté de jouer un
rôle clé dans le colmatage.
Le biofilm est un constituant universel de notre biosphère. Il est défini comme une
organisation cellulaire de microorganismes accrochés à un support qui s'entourent d'une
matrice d'exopolymères. Ces communautés de microorganismes structurées en biofilm sont
capables, comme d’autres structures pluricellulaires, de s’adapter à leur environnement et de
résister à différents types de stress. Les biofilms sont en constante évolution pour maintenir la
vie microbienne quelles que soient les variations de conditions environnementales. Le biofilm
est une structure extrêmement résistante puisqu’il est capable de se développer et de se
20
maintenir dans des conditions drastiques et de résister aux procédures de nettoyages
chimiques conventionnelles.
Sur les membranes NF ayant fonctionné plusieurs années en usine, un biofilm dense et
structuré responsable d’un phénomène appelé biocolmatage est présent. Si les étapes du
développement d’un biofilm modèle obtenu en laboratoire sont maintenant bien décrites, le
développement de biofilm sur membrane de nanofiltration n’a été que peu étudié dans la
littérature. Le premier verrou scientifique à lever est un verrou fondamental qui consiste à
identifier et comprendre les étapes du développement du biofilm sur membrane NF, à décrire
son architecture et sa structuration au court du temps de fonctionnement de la membrane en
lien avec l’évolution des performances membranaires.
Classiquement, les expérimentations sont réalisées sur des temps courts en réacteur ou
en pilote car cela permet de maîtriser la qualité et la température de l’eau d’alimentation.
Ainsi, il est plus simple d'identifier les facteurs qui contribuent au colmatage de la membrane
et de relier les pertes d'efficacité de filtration de la membrane aux variations des facteurs
étudiés. Cependant, le fait d'imposer des paramètres et de réduire l'échelle en utilisant des
pilotes limite la portée des observations et représente un modèle qui s’éloigne de la réalité
industrielle de l’application de la technologie de nanofiltration.
Pour répondre à ce verrou scientifique décrit ci dessus, nous avons choisi d'étudier en
parallèle la formation de biofilm et le colmatage des membranes NF pendant deux ans sur un
pilote intégré à l’usine de Méry-sur-Oise qui mime au plus près les conditions usine. Pour
suivre qualitativement et quantitativement la croissance et la structuration du biofilm au court
du temps, nous avons couplé la microscopie à fluorescence (épifluorescence et confocale à
balayage laser), la microscopie électronique à balayage (MEB) et la spectroscopie infrarouge
à transformée de Fourier (ATR-FTIR). La microscopie à fluorescence a permis de suivre
l'abondance et l'architecture des constituants du biofilm dans l’espace pour ses composantes
cellulaires et matricielles (motifs saccharidiques d’exopolymères). L’utilisation d’une
approche d’analyse d’images avec un traitement informatique des acquisitions a complété
cette approche de microscopie à fluorescence en apportant des données quantitatives sur le
biofilm. La limite de la microscopie à fluorescence étant l’utilisation indispensable de
marqueurs, tout constituant non marqué n'a donc pas été pris en compte. Parallèlement,
l'ATR-FTIR a été utilisée car cette technique représente une approche plus globale. En effet,
un grand nombre de liaisons chimiques des constituants du biofilm vibrent et donnent des
signaux spécifiques qui peuvent être quantifiés. L'approche en MEB a complété la
21
microscopie à fluorescence en renseignant sur la topographie du biofilm. Le colmatage de la
membrane est évalué pendant toute la durée de l'étude grâce à deux paramètres classiquement
utilisés à l'usine de Mery sur Oise, la perméabilité membranaire (Kw) et le facteur de
colmatage longitudinal (FCL).
Pour relier la composition et l'architecture microscopique du biofilm à des propriétés
physiques pouvant expliquer les probables altérations des propriétés de filtration de la
membrane, la texture du biofilm a été analysée en rhéologie et la mouillabilité de la
membrane (caractère hydrophile ou hydrophobe) a été déterminée par mesure d'angle de
contact au court du temps.
Pour replacer cette étude cinétique de deux ans portant sur la formation du biofilm NF, une
comparaison avec un biofilm NF âgé de 7 ans a été faite. Cette comparaison devait permettre
de déterminer si le biofilm âgé de 2 ans pouvait encore évoluer d'un point de vue de son
abondance et de sa structure. Ainsi, pour les mêmes raisons que précédemment, la
microscopie à fluorescence et l'ATR-FTIR ont été utilisées. La rhéologie a également été
employée pour vérifier si la texture du biofilm entre ces temps de fonctionnement était
différente et si cela pouvait expliquer la persistance exceptionnelle du biofilm sur les
membranes.
Cette approche alliant plusieurs techniques complémentaires, permettant d’analyser la
matière à différentes échelles (du moléculaire au macroscopique en passant par le
microscopique), a pour objectif de comprendre les étapes de formation du biofilm NF, de
déterminer ses caractéristiques de constitution, structuration et texture au cours du temps et
de suivre l’impact du développement de biofilm sur le colmatage de la membrane. Une
meilleure connaissance des constituants, de l'architecture du biofilm et de leur évolution au
cours du temps doit également permettre de mettre en place des outils adaptés pour son
décrochage.
Le biofilm NF se développe malgré des contraintes hydrodynamiques fortes, des
variations de température saisonnières, des carences récurrentes en nutriments et des
processus de nettoyage industriels réguliers. Le deuxième verrou scientifique à lever est donc
la difficulté à maîtriser la quantité de biofilm présent à la surface des membranes NF. La
résolution de ce problème peut être envisagé de deux façons complémentaires différentes :
soit il faut agir de façon préventive par des prétraitements de l'eau d'alimentation pour réduire
au maximum la formation du biofilm sur les membranes NF, soit il faut agir de manière
22
curative en élaborant un traitement efficace qui élimine le plus de biofilm NF possible une
fois que celui ci s’est formé.
L'aspect préventif a été abordé par l'application de prétraitements ciblant des
constituants différents de l’eau d’alimentation et ne produisant pas de sous produits dangereux
pour la consommation. Dans un premier temps, la maîtrise de la matière organique dissoute
par deux procédés de préfiltrations différents (filtration sable ou charbon actif) a été étudiée.
Cette approche repose sur le fait de réduire une partie des éléments utilisables par les
microorganismes fixés à la membrane pour leur développement en espérant que cela aura un
impact sur la quantité de biofilm final produit. Dans un second temps, la maîtrise des
populations planctoniques par irradiation UV de l’eau d’alimentation a été expérimentée.
Cette démarche est basée sur le fait de réduire le nombre de microorganismes viables capables
de se développer sur la membrane en espérant que la quantité de biofilm final produit sera
diminuée.
Ces deux études ont été menées pour des raisons d'organisation sur des pilotes indépendants
moins proches de la réalité usine que le pilote intégré de l'étude cinétique. Ceci a permis
d'avoir sur des temps relativement courts des pistes sur l'efficacité des prétraitements testés
avant de passer à une échelle supérieure (pilote intégré ou usine). Les techniques utilisées
pour ces études pilotes ont été de nouveau un couplage de microscopie à fluorescence,
d'ATR-FTIR, de mesure de mouillabilité par angle de contact, de mesure de Kw et FCL. Ceci
ayant pour but de relier l'abondance et l'architecture du biofilm à des performances de
filtration des membranes NF. En plus de ces outils techniques, l’analyse de la viabilité
microbienne par microscopie à épifluorescence après marquage différentiel des bactéries
vivantes et mortes (iodure de propidium, syto9) et la mesure de l’activité cellulaire
(ATPmétrie) ont été utilisés lors de l'étude pilote sur la maîtrise des populations microbiennes
par irradiation UV. Ces deux méthodes ont servi respectivement à évaluer l'impact direct des
UV sur les microorganismes planctoniques dans l'eau d'alimentation et l'impact indirect des
UV sur le développement des microorganismes sur membrane NF.
L'aspect curatif a été abordé par le développement d’un protocole de conservation des
membranes colmatées avant nettoyage et l'application de plusieurs protocoles de nettoyages in
vitro. Les efficacités d'enlèvement du biofilm ont été évaluées au cours du processus de
conservation ou à différents stades de développement du biofilm en comparant les différents
23
protocoles. Ces expérimentations effectuées in vitro constituent des tests préliminaires
relativement rapides et peu coûteux, tant en terme d’équipements que de fonctionnement.
Les données de la littérature suggèrent que les protéines et surtout les polysaccharides
représentent une très forte proportion du dépôt de colmatage NF. Donc la stratégie employée a
été de comparer un traitement chimique classique pouvant être utilisé pour le nettoyage des
membranes avec des traitements enzymatiques ciblant des composants majeurs du biofilm
(protéines, polysaccharides) à différents stades de croissance. Les traitements sont donc
appliqués sur des coupons de membranes provenant de l'étude cinétique de développement du
biofilm sur 2 ans. Parallèlement à cette étude comparative, une solution enzymatique-alcaline
a été testée à différents stades de stockage des membranes pour évaluer jusqu'à quand les
procédures de nettoyages peuvent être pratiquées. L’efficacité relative des protocoles de
nettoyage a été déterminée par quantification des constituants du dépôt avant et après
nettoyage par ATR-FTIR car c'était la technique semi-quantitative la plus globale et la plus
appropriée dont nous disposions. Pour le protocole de conservation des membranes,
l’efficacité de nettoyage a également été appréhendée par mesure du gain de perméabilité à
l’aide d’un pilote membrane plane.
Ces études doivent permettre d'orienter la réflexion pour définir des prétraitements de
l'eau d'alimentation efficaces pour réduire la quantité de biofilm qui se forme sur les
membranes NF et une procédure de nettoyage adaptée aux différents stades de développement
du biofilm. Le but des prétraitements et des traitements n’étant pas d’éradiquer le biofilm
mais de maitriser son développement pour réduire au maximum le biocolmatage et conserver
les propriétés de filtration de la membrane NF le plus longtemps possible.
Ainsi, nos travaux répondent à un double objectif:
 l’un fondamental, d’amélioration de la connaissance de biofilms complexes par la
description de ses étapes de formation au cours du temps de fonctionnement des
membranes NF au travers des variations de nature et d'abondance de ses constituants,
des modifications de son architecture et de sa texture et de son influence sur le
colmatage membranaire
 l’autre appliqué, d’amélioration de procédés technologiques par l'évaluation de
l'efficacité de différents prétraitements et traitements visant à réduire le biocolmatage
24
et par la mise en place d'un protocole de conservation des membranes adapté à
l'application de nettoyages tardifs.
25
Revue bibliographique
26
I. Le biofilm
A. Définition et caractéristiques
1. Définition
Selon l’échelle d’observation d’un biofilm microbien, différentes descriptions peuvent
en être faites. A l’échelle macroscopique, celui-ci s’apparente à une substance biologique
visqueuse collée à l’interface entre une surface et une phase liquide (Figure 1).
Figure 1. Cylindre d’acier inoxydable avant (a) et après la formation d’un biofilm de 7 jours
(b). Le cylindre possède un diamètre de 2,2 cm et une hauteur de 5 cm. (D’après Simoes et
al., 2005b).
A l’échelle microscopique, il peut être défini comme un regroupement en communauté
de bactéries engluées dans une matrice de polymères (Figure 2).
27
Figure 2. Image d’un biofilm à Haemophilus influenzae par Microscopie électronique à
balayage (MEB). Image obtenue après une croissance de 24 heures en milieu LB sur du verre
en condition stérile. Au centre de l’image, les bacilles en agrégat sont bien définis. Au cœur et
à la base du monticule, sur la gauche de l’image, les bacilles sont moins visibles car ils sont
recouverts d’une matrice d’exopolymères. Barre d’échelle : 2 µm. (D’après Gallaher et al.,
2006).
Ces polymères extracellulaires sont dits autoinduits car synthétisés par les cellules
microbiennes et restent pour la plupart accrochés à la membrane de celles-ci. Les cellules
produisent donc un environnement matriciel généralement constitué de polysaccharides, de
protéines, d’acides nucléiques, de lipides. Pour les microorganismes, cette matrice sert
d’habitat et de protection contre les prédateurs, les agents antimicrobiens et plus généralement
les conditions de vie défavorables. Les individus constituant le biofilm sont capables de
communiquer entre eux par l’excrétion de molécules régulatrices, et de s’adapter en
échangeant du matériel génétique (Lewis, 2007; Mah et al., 2003; Sedgley et al., 2008).
D’un biofilm mono-espèce à l’autre, l’agencement des bactéries est différent ce qui
aboutit à une grande gamme d’architectures (Li et al., 2007). Par exemple, Corynebacterium
glutamicum (GRAM +) et Gluconobacter oxydans (GRAM -), deux bactéries couramment
utilisées dans l’industrie, forment des biofilms mono-espèce dont les structures sont
différentes. En effet, au bout de 48 heures, sur du polystyrène, à 30°C et avec un milieu de
culture similaire, C. glutamicum se développe en gros agrégats dense avec des zones vides de
28
colonisation alors que G. oxydans forme un tapis assez homogène avec une organisation
ressemblant à une façade de maison en crépis (Figure 3).
Figure 3. Images en contraste de phase de deux biofilms mono-espèces différents. (a) C.
glutamicum et (b) G. oxydans sont cultivés dans des boites de Pétri en polystyrène à 30°C
pendant 48 h avec une agitation égale à 50 rotations par minute. Barres d’échelles : 50 µm.
(D’après Li et al., 2007).
Les biofilms mono-espèce sont cependant rares dans la nature (Kolter et Greenberg,
2006). Ils sont plus fréquemment utilisés dans les laboratoires de recherche et dans l’industrie
notamment dans le domaine médical. En effet, les biofilms les plus couramment rencontrés
sont des biofilms multi-espèces ce qui les rend hétérogène par nature. Un biofilm buccal qui
se forme autour d’une simple dent est composé d’une centaine d’espèces différentes. De plus,
les individus constituant le biofilm possèdent une croissance, un patrimoine génétique et des
activités métaboliques très variés ce qui renforce l’hétérogénéité de l’ensemble de la structure
(Kolter et Greenberg, 2006). Le biofilm permet donc à des cellules microbiennes présentes
dans une phase liquide de coloniser des surfaces solides. Il représente pour les bactéries le
mode de croissance et de vie prédominant dans la nature depuis plusieurs millions d’années
(Hall-Stoodley et al., 2004).
Bien qu’il soit très hétérogène, le biofilm n’en reste pas moins très structuré.
2. Morphologie et architecture
D’un point de vue morphologique, le biofilm possède une structure très aboutie. Les
architectures le plus couramment décrites dans la littérature sont des amas formant de simples
29
tours ou des champignons entrecoupés par un vaste réseau de canaux d’eau (Figure 4). Celui
ci sert très probablement au transport des nutriments au sein du biofilm et au rejet des
métabolites indésirables ou toxiques (Eberl et al., 2000; Moller et al., 1997).
Figure 4. Photographies obtenues en MEB d’une souche d’Escherichia coli pathogène
illustrant l’organisation du biofilm en fonction de l’échelle d’observation : le biofilm en forme
de collines entrecoupées de canaux (x50), dans le biofilm (x2000), les interconnections des
bactéries (x20 000). (D’après Ghigo, 2003).
Cette structuration augmente de façon indéniable les surfaces d’échanges au sein du
biofilm et entre le biofilm et le milieu extérieur. Contrairement aux théories émises
initialement, il a été clairement montré que l’architecture et la distribution des
microorganismes au sein des biofilms ne sont pas dues au hasard mais sont le résultat d’un
grand nombre de facteurs.
La composition des nutriments a un impact sur l’architecture des communautés
organisées en biofilm (Moller et al., 1997; Parsek et Tolker-Nielsen, 2008). Par exemple, un
biofilm provenant de sédiments de raffinerie contaminés par du pétrole se développant en
30
présence d’’acide 2,4,6 trichlorobenzoique comme seule source de carbone a une architecture
classique avec une couche basale de cellules et de grosses structures en forme de collines
constituées de cellules et de polymères. Lorsque la source de carbone est modifiée en
remplaçant le milieu de culture par un milieu tryptocaséine-soja, ce biofilm devient homogène
et perd toutes ces structures en colline. La nature du support à partir duquel se développe un
biofilm influence fortement l’architecture de celui-ci (Figure 5). Chez Pseudomonas
aeruginosa, un biofilm de quarante huit heures forme une monocouche sur bille d’argile alors
que sur fibre de verre, celui-ci a une structuration étendue en trois dimensions (Vilain et al.,
2004b).
Figure 5. Photographies d’un biofilm de 2 jours (A) sur billes d’argile et (B) sur laine de
verre obtenues en microscopie électronique à balayage. (D’après Vilain et al., 2004b).
Les bactéries organisées en biofilm sont capables de communiquer entre elles des
informations souvent nécessaires à leur bon développement. Ce système de communication
intercellulaire est appelé Quorum Sensing (QS) et repose sur la sécrétion de molécules
signales porteuses d’informations. Beaucoup de systèmes de QS sont connus, mais les deux
plus couramment décris sont celui des acyl-homosérine lactone fréquemment retrouvé chez
les espèces Gram négatif et celui des oligopeptides signal chez les Gram positif (Parsek et
Greenberg, 2005). Chez la souche sauvage Serratia liquefaciens MG1, la synthèse de Nbutanoyl-L-homosérine lactone (C4-HSL) est réalisée sous contrôle du gène swrI. L’utilisation
d’un mutant au niveau de ce même gène aboutit à une épaisseur de biofilm plus faible ainsi
31
qu’à une modification de la structure. L’ajout de C4-HSL conduit à un retour à l’appariement
des bactéries en chaînes filamenteuses typique de la souche sauvage. Chez cette même espèce,
les gènes bsmA et bsmB sont également impliqués dans la morphologie du biofilm (Labbate
et al., 2004).
Chez Escherichia coli, la synthèse d’acide colanique et d’appendices filamenteux
extracellulaires appelés curli dans la structuration tridimensionnelle du biofilm en forme de
champignons a également été prouvée (May et Okabe, 2008), (Figure 4).
Chez P. aeruginosa, de l’ADN est libéré à l’extérieur des cellules au niveau de la tige de la
structure en champignon du biofilm. Comme la concentration d’ADN est plus importante là
ou les cellules bactériennes ont la plus forte mobilité, cet ADN extracellulaire pourrait servir
de base à la mobilité cellulaire pour la formation de la « coiffe » (Allesen-Holm et al., 2006).
Un réseau de fibres d’ADN extracellulaire connectant les cellules d’un biofilm a également
été mis en évidence chez une bactérie aquatique de rivière non identifiée appelée souche F8
(Bockelmann et al., 2006). Ces observations suggèrent un rôle structural important de l’ADN
extracellulaire.
La structuration variée et complexe du biofilm lui confère des propriétés physiques et
mécaniques remarquables. Il a été démontré que les biofilms sont des substances visqueuses
et élastiques par nature ce qui leur permet une grande résistance aux forces de décrochages
physiques (Towler et al., 2003).
De plus la résistance et la cohésion du biofilm sont accrues en présence d’ions
divalents. Ceci a été clairement démontré grâce à des mesures de l’énergie de cohésion par
microscopie à force atomique (atomic force microscopy : AFM) lors d’ajout de calcium à des
biofilms mixtes provenant de boues activées (Ahimou et al., 2007). Ce phénomène peut
s’expliquer par la formation d’un réseau solide entre les exopolysaccharides et des cations.
C’est le cas de l’alginate, un des polysaccharides majoritaires produit par P. aeruginosa en
présence d’ions calcium. Ces alginates sont composés de monomères d’acides β-Dmannuronique (M) et α-L-glucuronique (G) formant des séquences ou blocs distincts (Figure
6). La proportion et l’arrangement de ces blocs déterminent les propriétés physiques et la
réactivité des chaines polysaccharidiques résultantes (Davis et al., 2003).
32
Figure 6. Données de structure de l’alginate : (a) monomères d’alginate (M versus C), (b)
polymère d’alginates, (c) séquence de chaîne du polymère d’alginates. (D’après Davis et al.,
2003).
Généralement, en présence de cations monovalents, les alginates sont solubles mais ils
deviennent insolubles en présence d’ions divalents ou multivalents. Cette grande spécificité
des alginates pour les cations divalents est explicable par la forme en zigzag des zones
contenant des blocs G (Davis et al., 2003). Les cavités formées par ces zones permettent
l’interconnexion des chaines via des cations divalents comme le calcium et donc la formation
d’un réseau gélifié (figure 7). Plus le degré de liens formé est important, plus la viscosité sera
élevée.
33
Figure 7. Représentation schématique d’une gélification induite par le calcium de l’alginate
selon la structure de blocs en zigzag. (D’après Davis et al., 2003).
3. Effet des forces de flux sur le développement de biofilm
Selon l’environnement, le biofilm va se développer en présence ou en absence de
forces de flux. Il a été démontré qu’un biofilm qui se développe en présence d’une faible force
de flux peut être décroché facilement de sa surface si celui-ci est soumis à une force plus
élevée (Stoodley et al., 2002). Par contre, toutes les cellules bactériennes ne sont pas
décrochées et le nouveau biofilm qui va croître à partir des cellules subsistantes sera moins
épais et moins sensible aux fortes forces de pressions (Davidson et Stewart, 2008). Le
mécanisme exact à l’origine de cette résistance n’est pas connu mais chez Salmonella
enterica, par comparaison de deux biofilms qui se développent dans des conditions de flux
différentes (laminaire et turbulent), une modification significative des proportions des
exopolysaccharides est observée lorsque la vitesse de flux augmente. Par contre chez cette
même souche, aucune modification du pattern d’expression protéique n’est détectée
(Mangalappalli-Illathu et al., 2008). De plus, il semblerait que la quantité de cellules
bactériennes qui forme la biomasse après croissance ne puisse pas être reliée directement à
des différences de vitesses de flux. Par contre l’architecture d’un biofilm (notamment celle
des polysaccharides de la matrice) est clairement différente si celui-ci s’est développé sous de
34
faibles forces ou de fortes forces de pression (Figure 8). En effet, les proportions des motifs
sucrés marqués est différente et la morphologie l’est aussi. Comparé à un régime laminaire,
les polysaccharides forment nettement plus de gros agrégats denses et de structures fibrillaires
lorsque le biofilm se développe sous un régime turbulent.
Figure 8. Images de la fixation des lectines fluorescentes en microscopie confocale montrant
la composition des exopolysaccharides (EPS) de la matrice d’un biofilm de 168 h : (A et B)
sous une faible force de flux, (C et D) sous une forte force de flux. Les résidus GalNac, α-Lfucose des EPS sont marqués avec les lectines Glycine max-CY5 (bleu) et Ulex europaeus–
FITC (vert) respectivement. Les motifs GlcNAc2 et NeuNAc par la lectine de Triticum
vulgaris–TRITC (rouge). (D’après Mangalappalli-Illathu et al., 2008).
Sous une faible vitesse de flux, les agrégats bactériens sont capables de « vibrer »
indépendamment sur la surface ; par contre, soumis à une vitesse de flux importante, les
agrégats bactériens sont beaucoup plus cohésifs (Paris et al., 2007). Ce phénomène doit être
dû à la stratification du biofilm qui est nettement plus cohésif à sa base qu’au sommet (Derlon
et al., 2008). En effet, des biofilms formés sous de faibles forces de flux, atteignant
initialement des épaisseurs entre 1000 et 2000 µm après un mois de croissance s’érodent et
perdent 80% de leur masse initiale lorsqu’ils sont soumis à des pressions croissantes jusqu’à
35
atteindre une valeur limite. Un biofilm qui croit sous de fortes forces de pression ne pourrait
donc pas atteindre des épaisseurs trop élevées du fait de cette architecture en strates.
De plus, la puissance du flux a également un impact sur la résistance aux traitements
chimiques (Buckingham-Meyer et al., 2007; Simoes et al., 2005a). En effet, les biofilms sont
de plus en plus résistants aux agents antiseptiques lorsqu’ils se développent respectivement
sous un flux turbulent (fortes forces de flux), sous un flux laminaire (faibles forces de flux) ou
sans flux.
B. Spécificité des bactéries organisées en biofilm
1. Modification du transcriptome et du protéome
L’organisation en biofilm représente le mode de croissance de référence des bactéries
car ce mode d’organisation permet une protection contre les stresses et les prédateurs, une
séquestration des nutriments, l’utilisation des bénéfices de la coopération entre individus et
populations de la communauté. Au sein du biofilm, les bactéries sont dites sessiles, c'est-àdire attachées à un support contrairement aux bactéries dites planctoniques qui se déplacent
dans un liquide. Le passage de l’état planctonique à l’état sessile se traduit par un certain
nombre de modifications génétiques. Davies a montré en 1995 que chez des cellules
bactériennes de P. aeruginosa, le gène algC était activé quelques minutes après leur adhésion
à une surface en verre. L’expression de ce gène algC qui aboutit à la synthèse d’alginates est
suivie par la production d’une matrice (Davies et Geesey, 1995). La transition de l’état
planctonique à l’état sessile aboutit donc à des modifications de la transcription des gènes
appelée transcriptome et à des modifications des protéines traduites appelé protéome. Ces
évènements apportent donc des changements phénotypiques.
Des études ont montré qu’entre l’état planctonique et l’état biofilm, les variations
d’expression des gènes chez P. aeruginosa pouvaient être faibles de l’ordre de 2,9% ou plus
fortes de l’ordre de 17,1% en fonction des étapes de croissance des cultures planctoniques
témoins (Hentzer et al., 2005). Cela souligne l’importance de la culture de référence à laquelle
on compare la culture biofilm pour tirer des enseignements des différences observées. Chez
cette même espèce, il semblerait que le profil d’expression génomique des bactéries en
biofilm ait la plus grande similitude avec celui des bactéries planctoniques en phase
36
stationnaire (Hentzer et al., 2005). Chez Legionella pneumophila, entre les bactéries
planctoniques et les bactéries sessiles, un changement de l’expression génétique d’au moins
deux fois est visible pour environ 2,3% des gènes analysés. Chez cette même espèce, le profil
d’expression génomique des bactéries sessiles se rapprocherait plus de celui des bactéries en
cours de division lors de la phase exponentielle (Hindre et al., 2008). Donc il semble qu’il n’y
a pas de règle de conduite générale qui puisse être appliquée à l’ensemble des bactéries car les
profils d’expressions génétiques sont propres à chaque espèce voir à chaque souche
bactérienne.
L’analyse quantitative du transcriptome est donc très difficile à réaliser car elle dépend
des espèces bactériennes, des conditions expérimentales, de l’état de croissance des cultures
témoins ou des biofilms et des critères d’intérêts choisis pour déterminer la différence
d’expression. Le fait qu’il existe une forte hétérogénéité de l’état métabolique des cellules au
sein d’un biofilm représente également une difficulté supplémentaire. En effet, les analyses de
transcriptome sont essentiellement le reflet de cellules métaboliquement actives (Waite et al.,
2006; Ghigo, 2003). Un grand nombre de gènes dont l’expression est modifiée en condition
biofilm codent pour des protéines hypothétiques. Un des paramètres importants réside dans
l’implication de gènes liés à la respiration anaérobie suggérant la présence de niches
anaérobies au sein du biofilm (Hentzer et al., 2005).
L’étude du protéome bactérien est particulièrement complexe mais elle a pu se
généraliser avec le développement de l’électrophorèse bidimensionnelle couplée à la
spectrométrie de masse. Cette technique permet la séparation efficace et l’identification d’un
grand nombre de protéines et permet ainsi de caractériser les différences d’expression
protéiques présentes selon l’état planctonique ou sessile des bactéries. Il a ainsi été démontré
que les protéines produites par des cellules bactériennes de Streptococcus pneumoniae
organisées en biofilm diffèrent qualitativement et quantitativement des protéines synthétisées
par des bactéries planctoniques (Allegrucci et al., 2006). (Figure 9)
37
Figure 9. Images de gels obtenus par électrophorèse bidimensionnelle d’extraits totaux de
cellules de Streptococcus pneumoniae serotype 3 : (A) croissance planctonique, (B, C et D)
biofilm âgé de 3, 6 et 9 jours respectivement. (D’après Allegrucci et al., 2006).
Dans cette même étude, lorsque le protéome des bactéries planctoniques est comparé à
celui d’un biofilm de 3 jours, plus de 30% du protéome détectable est différent entre les deux
conditions. Ainsi, au sein d’un biofilm de 3 jours, 14% des protéines sont surexprimées et
18% sous exprimées. Les modifications du protéome se poursuivent au cours du
développement du biofilm. Après 9 jours de croissance, 11% des protéines sont surexprimées
et 34% sous exprimées. Au cours du cycle étudié (de planctonique à biofilm 9 jours), environ
54% des protéines sont produites de façon constante. Globalement, pour cette espèce, les
protéines surexprimées en biofilm sont des protéines associées à l’attachement, à la résistance
38
et à la virulence. Il semblerait donc que le cycle de vie d’une bactérie soit le sujet d’un
remaniement constant de ses constituants en fonction de son stade de développement.
Il est donc possible par la technique d’électrophorèse bidimensionnelle d’identifier des
protéines et de les regrouper dans des patterns protéiques correspondant à leurs fonctions.
Ainsi, des protéines servant à l’accrochage ou des protéines de régulation sont groupées dans
des patterns séparés de celles impliquées dans la virulence, dans la résistance aux
antibiotiques ou encore dans le Quorum Sensing (Southey-Pillig et al., 2005). Plusieurs
études ont confirmé notamment chez P. aeruginosa que les protéines produites sont
différentes en fonction du temps d’attachement mais aussi en fonction de la nature du support
(Sauer et al., 2002; Vilain et al., 2004a). Il existe également un certain nombre de protéines
hypothétiques (fonction inconnue) qui sont surexprimées en biofilm. Un exemple est celui de
la protéine hypothétique de P. aeruginosa qui est le produit de l'expression du gène pA3731
(Mace et al., 2008). En effet, une mutation au niveau de ce gène ne modifie pas la croissance
bactérienne planctonique mais altère fortement l’adhérence et la production de biofilm.
Il existe donc des divergences entre l’analyse du transcriptome et du protéome. Une
des explications peut venir du fait que le transcriptome représente un état court et souvent
transitoire qui conduit à une faible détection des variations dans l’expression des gènes, alors
que le protéome reflète l’expression de gènes aboutissant à des produits plus stables (Ghigo,
2003; Sauer, 2003). Cependant, les modifications d’expression des protéines entre les
bactéries planctoniques et les bactéries sessiles et l’existence de protéines à expression
biofilm spécifique suggèrent fortement l’existence d’un phénotype biofilm.
2. Résistance au stress
Plusieurs types de facteurs peuvent provoquer un stress. Le stress peut être provoqué
artificiellement par l’homme. C’est le cas des antibiothérapies, des traitements des surfaces
par des moyens physiques (rayonnements, chaleur, ultrasons…) ou chimiques (antiseptiques,
détergents, solutions alcalines ou acides…). Le stress peut également être d’origine
environnementale car les conditions retrouvées à la surface de la terre et dans les océans sont
parfois extrêmes (températures très faibles ou très hautes, fortes pressions, forte salinité, forte
concentration en métaux lourds, faible concentration en nutriments…). Pour coloniser et se
développer dans de telles conditions, les bactéries ont développé des résistances au stress.
39
L’organisation en biofilm est une des stratégies liée à cette résistance. En effet, les bactéries
organisées en biofilm sont capables d’une résistance aux agents antimicrobiens pouvant être
plus de mille fois supérieure aux simples cellules planctoniques (Nickel et al., 1985).
L’organisation structurale des bactéries en biofilm représente une piste pouvant
expliquer la résistance. Des études ont révélé une limitation de la diffusion de certaines
familles de molécules au sein du biofilm. C’est notamment le cas des aminoglycosides dans
les biofilms à P. aeruginosa (Shigeta et al., 1997) et du dioxyde de chlore dans des biofilms
se développant dans les canalisations d’eau (Jang et al., 2006).
D’autres molécules ne subissent pas de retard de pénétration et de délivrance. C’est le
cas des fluoroquinolones dans les biofilms à P. aeruginosa (Vrany et al., 1997).
La structuration en biofilm induit donc deux comportements de diffusion, lent ou
rapide, en fonction des molécules (Hornemann et al., 2008). Ce phénomène est dû à
l’interaction des molécules avec les exopolymères secrétés par les cellules bactériennes. Cette
stratégie peut représenter un moyen de persistance si la durée du stress n’est pas trop longue.
En effet, si le temps devient long, les molécules induisant le stress finiront par pénétrer dans
tout le biofilm une fois les sites de fixation aux exopolymères saturés. De plus la
concentration de la molécule occasionnant le stress peut également avoir une influence sur la
formation de biofilm. En effet, il a été montré que chez Staphyloccocus epidermidis des
concentrations inférieures à la concentration minimale inhibitrice pouvaient stimuler la
croissance bactérienne en biofilm (Houari et Di Martino, 2007).
Donc selon la nature, la dose et la durée du stress, la position des bactéries au sein du
biofilm peut être un facteur déterminant de la résistance. En effet, un gradient peut exister au
sein du biofilm et les bactéries les plus enfouies ne seront pas ou peu soumises au stress
(Huang et al., 1995). Mais l’architecture du biofilm ne peut pas expliquer à elle seule la
persistance bactérienne.
La véritable clé de la protection d’une communauté qu’elle soit animale, végétale ou
bactérienne contre un environnement instable est sa diversité (Boles et al., 2004). En effet, un
simple stress peut être la cause de la mort d’une communauté cellulaire entière si celles si sont
identiques. Par contre, Il est rare qu’un stress tue l’ensemble des individus d’un biofilm
encore plus si celui-ci est multi espèce. Les survivants sont dispersés dans l’ensemble de la
communauté et se retrouvent dans un environnement riche en nutriments formé par leurs
voisins morts. Leur croissance est phénoménale si la communauté n’est plus soumise au stress
40
(Costerton, 2007). Si le même stress se produit de nouveau, un grand nombre d’individus
proviendront de cette recroissance et posséderont la capacité de résistance (Figure 10). Il est
donc facile de comprendre ce phénomène en se plaçant uniquement d’un point de vue de la
sélection naturelle. De plus il a été montré qu’un biofilm bi-espèce est plus résistant que
chaque biofilm mono-espèce respectif suggérant ainsi de nouveau que la diversité représente
la clé de la survie (Simoes et al., 2008).
Figure 10. Mécanisme de résistance suite à l’action d’un agent antimicrobien lié à des
« variants phénotypiques » dits « persitants ». (D’après Drenkard, 2003).
La diversité au sein d’un biofilm peut être due à une différence d’activité entre les
individus le composant. Les bactéries qui se trouvent dans les « champignons » près de
l’interface avec la phase liquide ont un meilleur accès aux nutriments et à l’oxygène. Elles ont
des activités de croissance et de division généralement plus intense que les bactéries enfouies.
Le pourcentage de bactéries persistantes dans une population en croissance est très faible et
atteint un maximum d’environ 1% en atteignant la phase stationnaire (Spoering et Lewis,
2001). De plus, si la croissance d’une population est lente, la proportion de bactéries
persistantes sera supérieure à celle d’une population dont la croissance est rapide. Les
bactéries au sein d’un biofilm ayant par définition des activités différentes probablement en
rapport direct avec une accessibilité aux nutriments différentes, les stresses occasionnés par
des molécules entrant dans leur métabolisme auront également des impacts différents. Les
bactéries très actives seront plus sensibles que les bactéries peu actives ou quiescentes
(Walters et al., 2003; Anderl et al., 2003).
41
La résistance des individus au sein du biofilm peut donc être due à une diversité de
populations ou à une différence d’activité au sein de la communauté. Ces deux phénomènes
pouvant être reliés plus généralement à une diversité génotypique et phénotypique au sein du
biofilm (Ghigo, 2001).
Une des classes de molécules représentant un stress important pour une communauté
bactérienne est celle des antibiotiques. Une des stratégies mise en place par les bactéries de la
communauté est d’empêcher ou au moins de réduire l’accessibilité des antibiotiques à leur
cible. Un exemple est celui de P. aeruginosa qui exprime le gène ndvB. Ce gène code pour
une glucosyltransférase induisant la production d’oses cycliques dans l’espace périplasmique
de la bactérie et uniquement quand celle-ci est organisée en biofilm (Mah et al., 2003). Ces
glucanes cycliques protégeraient ainsi la bactérie par piégeage de la tobramycine avant que
celle-ci n’atteigne sa cible. L’utilisation d’un mutant sur le gène ndvB aboutit à la
sensibilisation des cellules bactériennes du biofilm à cet antibiotique montrant ainsi la
participation de ce gène dans la le processus de résistance. L’analyse du profil d’expression
génétique de souches d’E. coli persistantes a montré d’une part une diminution de la
régulation des voies de biosynthèse et d’autre part une surexpression de gènes conduisant à la
production de toxines et d’antitoxines. Respectivement, la première observation concorde
avec un état de dormance et la seconde avec l’inhibition de certaines fonctions essentielles qui
conduisent à l’acquisition d’une résistance aux antibiotiques. Ces facteurs prouvent
l’adaptation du génotype et du phénotype bactérien permettant la persistance d’un type de
population au sein du biofilm (Lewis, 2008; Lewis, 2007). De plus, il peut exister un transfert
de gène horizontal entre les plasmides des individus constituant un biofilm (Sedgley et al.,
2008). Plus les vitesses de recombinaison chez un individu et de transfert de gènes
horizontaux entre individus sont élevées, plus la diversité génomique du biofilm résultant sera
grande et plus les cellules bactériennes de la communauté seront capables de survivre aux
attaques (Boles et al., 2004).
Un autre système dépendant de l’expression du génome bactérien et permettant
l’acquisition d’une résistance au stress est celui des pompes à efflux. Ce système est une des
voies permettant aux cellules eucaryotes ou procaryotes l’expulsion hors de la cellule de
drogues, d’ions métalliques toxiques, de solvants organiques ou d’autres ligands. En général,
chez les bactéries, les pompes à efflux ne sont pas exprimées dans un milieu de croissance
sans toxines et leur expression est induite par l’exposition à une large gamme d’agents
42
antimicrobiens dans des doses létales (Drenkard, 2003). Classiquement chez les bactéries
GRAM négatif, la prise en charge et le transport hors de la cellule de diverses toxines est
effectué par trois partenaires : une protéine transmembranaire cytoplasmique qui est
enchevêtrée dans la membrane, une protéine de transport possédant une large gamme de
reconnaissance de molécules potentiellement toxiques qui exporte le substrat à travers la
membrane interne et une protéine membranaire externe qui facilite le passage du substrat à
travers la membrane externe. Chez E. coli ces protéines sont respectivement AcrA, AcrB et
TolC (Routh et al., 2009). Des travaux ont même montré que l’expression des gènes codant
pour le système à efflux AcrAB est accrue lorsque E. coli entre en phase stationnaire
suggérant que les pompes à efflux peuvent être surexprimées au sein des biofilms matures
(Drenkard, 2003).
Les biofilms bactériens retrouvés dans la nature présentent donc de par leur
composition, leur architecture et surtout de par leur diversité génétique et phénotypique, une
grande capacité de résistance au stress (Figure 11). Ceci leur permet de se développer et de
coloniser une grande partie de l’écosystème terrestre même lorsque les conditions sont
extrêmes (Raymond et al., 2008).
Figure 11. Schéma représentant les mécanismes possibles de résistance d’un biofilm à P.
aeruginosa à un traitement antimicrobien. (D’après Drenkard, 2003).
43
C. Etapes générales de formation d’un biofilm
La colonisation d’une surface par une bactérie aboutissant à la formation d’un biofilm
est un mécanisme séquentiel. En effet, le développement d’un biofilm bactérien peut se
diviser en 3 grandes étapes : l’adhérence (réversible puis irréversible), la maturation
(formation de microcolonies, croissance et production d’exopolymères) et le détachement
(Figure 12).
Figure 12. Modèle de développement d’un biofilm bactérien. (D’après Ghigo, 2003).
1. Adhérence à un support
L’interface entre une surface solide et un milieu liquide représente des conditions
environnementales idéales pour l’attachement et la croissance des microorganismes. Avant
d’aborder l’attachement à proprement dit de la bactérie, il est nécessaire de s’intéresser à
l’environnement c'est-à-dire au support servant à l’attachement, au milieu liquide servant de
vecteur et à leurs interactions.
Les caractéristiques physico-chimiques du support et du liquide vecteur ont une
influence non négligeable sur l’attachement des bactéries. En effet, il a été démontré qu’un
support possédant une forte rugosité de surface induisait localement une diminution des forces
de cisaillement et engendrait donc un meilleur attachement qu’un support lisse (Boyd et al.,
2002). De même, plusieurs études ont décrit un attachement bactérien plus important sur des
44
surfaces hydrophobes non polaires comme le plastique ou le téflon que sur des surfaces
hydrophiles comme le verre ou le métal (Fletcher et Loeb, 1979). Concernant le milieu
aqueux, il a été clairement montré que des modifications de son pH, de sa concentration en
nutriments, de sa force ionique, de sa température et de sa vitesse ont une influence sur
l’adhérence bactérienne (Sheng et al., 2008; Donlan, 2002).
Cependant, les théories générales sur l’adhésion à un support sont parfois sujettes à
controverse car le support est en contact avec un milieu liquide et ce support évolue lui-même
en fonction de la composition du milieu liquide et du temps de contact. En effet, les molécules
inorganiques ou organiques comme les protéines, les carbohydrates ou les lipides contenues
dans la phase liquide vont passer en phase solide, conditionner la surface en quelques minutes
et continuer à s’agréger pendant plusieurs heures (Donlan, 2002). Ce phénomène est appelé le
conditionnement de la surface ou l’établissement d’un film primaire. L’établissement de ce
film primaire va faciliter l’adsorption des microorganismes sur la surface solide car les
charges, les potentiels et les tensions de surface sont souvent modifiés favorablement
améliorant ainsi l’encrage et l’accessibilité aux nutriments (Jain et Bhosle, 2009; Garrett et
al., 2008). Donc la nature du support et du milieu aqueux ainsi que leurs interactions jouent
un rôle primordial dans l’attachement des bactéries.
D’un point de vue cellulaire, l’attachement initial est facilité par les forces
hydrodynamiques, le chimiotactisme et les interactions hydrophobes. Initialement, les cellules
microbiennes sont transportées de la phase liquide vers le support conditionné par deux types
de mécanismes. Le premier est un transport passif et aléatoire sous l’effet des forces
physiques hydrodynamiques comme les forces de flux. Le second est plus actif et plus
spécifique car un certain nombre de bactéries sont capables de détecter la présence de
nutriments ou de toxines via des récepteurs de surface et de se mouvoir grâce à des
appendices bactériens comme les flagelles. La bactérie planctonique peut ainsi modifier sa
trajectoire en fonction de son environnement chimique. Elle sera attirée par les nutriments et
repoussée par les substances toxiques (Lux et Shi, 2004).
Une fraction des cellules qui atteignent la surface s’adsorbe de façon réversible. Un
certain nombre de facteurs comme l’énergie, le conditionnement de la surface, l’orientation de
la bactérie, la température, la pression osmotique sont des conditions environnementales
variables qui contribuent à l’adhérence bactérienne. Les théories DLVO (Derjauin–Landau–
Verwey–Overbeek) et DLVO étendue servant à décrire la stabilité des systèmes colloïdaux
sont utilisées pour expliquer l’adhérence réversible des bactéries (Hermansson, 1999; Strevett
45
et Chen, 2003). Ces théories reposent sur des différences comportementales entre bactéries à
GRAM négatif et bactéries à GRAM positif. En effet, la composition chimique des parois
bactériennes externes est différente entre GRAM + et GRAM -, avec présence de
lipopolysaccharides chez les GRAM - et de peptidoglycane chez les GRAM +. Cette
différence morphologique induit une divergence dans les caractéristiques physicochimiques
externes des bactéries et donc de l’accrochage à une surface. Ces théories prennent également
en compte la distance entre la bactérie et le support. Cette distance bactérie - surface
détermine l’intensité des forces d’attraction et de répulsion mises en jeu. D’un point de vue
distance décroissante par rapport à la surface, ces forces sont les forces de flux, les forces de
répulsion stériques, les forces d’attraction et de répulsion électrostatiques, les forces de Van
der Waals, et les attractions hydrophobes (Figure 13).
Figure 13. Représentation schématique des forces et interactions pouvant être mises en jeu
lors de la formation d’un biofilm. (D’après L. Ploux (ICSI – Mulhouse) Atelier Biomatériaux,
19-21 mars 2007, Le Mans, www.mrct.cnrs.fr/PF/Ateliers/Atelier2007/Introduction.pdf).
Au stade d’adhésion initiale, la bactérie est faiblement accrochée à la surface et elle va
se décrocher si les forces répulsives sont supérieures aux forces attractives. Les forces mises
46
en jeu à cette étape sont des interactions hydrophobes, électrostatiques et de Van Der Waals.
Les interactions hydrophobes semblent avoir une importance particulière car elles pourraient
permettre de surmonter les répulsions électrostatiques entre les cellules et la surface
conditionnée (Garrett et al., 2008; Donlan, 2002). Les cellules bactériennes planctoniques ont
une paroi composée d’une bicouche lipidique hydrophobe. Elles sont protégées par un
certains nombre de structures qu’elles produisent et qui restent accrochées à leur surface
(Beveridge, 2006). Ces structures comme les protéines et les appendices bactériens de type
fimbriae, flagelles ou pili peuvent posséder des domaines hydrophobes qui participent à
l’accrochage. D’ailleurs il a été démontré que les appendices bactériens augmentent fortement
l’hydrophobicité de la cellule bactérienne et l’attachement à la surface (Di Martino et al.,
2003). Les structures comme les exopolysaccharides ou les lipopolysaccharides sont quant à
eux plus importants dans l’attachement aux matériaux hydrophiles. Chez une souche de P.
aeruginosa ne possédant pas de pili, des mutations des gènes pel codant pour des protéines
impliqués dans la synthèse de polysaccharides aboutissent à de sévères problèmes
d’attachement aux surfaces (Vasseur et al., 2005).
Cependant, les théories DLVO ne sont pas parfaitement adaptées aux particules molles de
type bactérie qui sont par nature hétérogènes, perméables et déformables. Ainsi, des modèles
théoriques mathématiques tenant compte des forces électrostatiques, hydrodynamiques et des
caractéristiques mécaniques des interfaces des particules molles sont développés (Gaboriaud
et al., 2008).
Ensuite, une partie des bactéries qui sont accrochées de façon réversible restent
immobilisées et adhèrent de façon irréversible au support. Cette transition entre les deux états
se fait grâce à des interactions spécifiques entre des facteurs d’adhérence bactériens et des
molécules adsorbées sur le support (Van der Mei et al., 2008) et/ou à la synthèse
d’exopolymères par les bactéries adhérentes. La bactérie serait capable de détecter le contact
avec la surface par un mécanisme nommé « surface sensing » et d’induire des voies de
transduction de signaux et réguler la synthèse de pili (Lejeune, 2003). Ceci a notamment été
observé chez E. coli qui, via la protéine NlpE protéine de la membrane externe, va activer le
système à deux composants Cpx qui régule positivement la synthèse de pili et serait impliqué
dans la transduction des signaux (Stanley et Lazazzera, 2004). Mais les appendices bactériens
tels que les pili ne sont pas les seuls facteurs permettant le passage à la maturation du biofilm.
En effet, chez P. aeruginosa, la protéine SadB dont la fonction est inconnue serait impliquée
dans le passage entre l’accrochage réversible et irréversible. Ceci a été démontré par la
47
création de mutants déficients en protéine SadB qui malgré la conservation des capacités
d’accrochage et de mouvement via les flagelles sont incapables de former des colonies signe
distinguant la première étape de maturation du biofilm (Caiazza et O'Toole, 2004).
2. Maturation du biofilm
L’étape de maturation se traduit tout d’abord par une augmentation de la taille de la
structure. En effet, les bactéries fixées vont augmenter leur nombre en se multipliant et en
recrutant de nouvelles bactéries provenant de la phase liquide. Ce phénomène de croissance
entraîne la colonisation de la surface. Les bactéries vont donc former des agrégats bactériens
qui portent le nom de microcolonies. En plus de cette croissance, elles vont secréter un
microenvironnement, une matrice extracellulaire qui va leur permettre une protection contre
les stress, une zone nutritionnelle privilégiée et une communauté où la communication amène
l’évolution et la survie. La structure de l’ensemble va évoluer vers une structure
tridimensionnelle comme par exemple la forme couramment décrite en champignon traversée
de canaux.
A ce stade, le terme de biofilm peut être utilisé car les deux paramètres indispensables
à la constitution d’un biofilm sont présents : la multiplication microbienne sur une surface et
la production d’une matrice d’exopolymères. L’augmentation de taille de la structure via la
multiplication cellulaire et la synthèse importante de matrice correspondent à l’étape de
maturation du biofilm. Les exopolysaccharides ou hydrates de carbone représentant une forte
proportion des exopolymères jouent un rôle important dans le processus de maturation. En
effet, chez E. coli, un mutant qui ne produit plus l’acide colanique, adhère aux surfaces mais
son biofilm est incapable d’acquérir sa structure tridimensionnelle (Danese et al., 2000). Chez
P. aeruginosa, les gènes pel sont impliqués dans la synthèse d’hydrates de carbone. Les
bactéries qui subissent des mutations de ces gènes conservent leur mobilité (twitching,
swimming) mais leur attachement à la surface est plus lâche et surtout elles ne produisent pas
de matrice (Friedman et Kolter, 2004; Vasseur et al., 2005). Les exopolysaccharides sont
donc souvent nécessaires à la maturation du biofilm mais ce ne sont pas les seuls. En effet, les
molécules signales servant à la communication bactérienne ont également un rôle crucial.
C’est le cas de l’indole chez les espèces productrices d’indole. Chez E. coli, l’utilisation d’un
mutant non producteur d’indole ou l’ajout d’un inhibiteur chimique qui bloque sa production
48
chez une souche sauvage aboutit à une diminution de formation de biofilm. L’ajout d’indole à
des conditions physiologiques restaure le niveau de formation de la souche sauvage utilisée
initialement (Martino et al., 2003).
Un autre facteur jouant un rôle dans cette étape de maturation est le Quorum Sensing.
En effet, des perturbations de cette voie de régulation par utilisation de molécules chimiques
qui modifient le signal ou des mutations aboutissent à des variations de la structure du
biofilm. La perturbation du Quorum Sensing conduit généralement à une réduction de la
biomasse et à des biofilms non différenciés, aplatis, avec une adhérence amoindrie
(Hooshangi et Bentley, 2008).
Chez S. liquefaciens, comme décrit dans la partie « morphologie et architecture », un
mutant incapable de synthétiser une molécule du Quorum Sensing, la N-butanoyl-Lhomosérine lactone, produit un biofilm fin et non différencié (Labbate et al., 2004). L’ajout
exogène de cette même molécule signale restaure l’épaisseur et la structure typique en
filaments enchevêtrés du biofilm formé par la souche sauvage.
Chez Vibrio cholerae sauvage en biofilm, les molécules intervenant dans le Quorum
Sensing sont surexprimées en comparaison avec le mode de vie planctonique (Liu et al.,
2007). Ceci démontrant bien l’importance de l’échange de signaux pour organiser les
individus et établir la stratégie de la communauté. Chez des mutants déficients en hapR, gène
impliqué dans le Quorum Sensing, le biofilm est plus épais, plus mature que chez le sauvage.
Lorsque hapR est réintroduit par ajout de plasmides et exprimé avant huit heures de contact,
le biofilm est plus fin et plus mobile comme celui de la souche sauvage. Le Quorum sensing
peut donc agir négativement sur la maturation du biofilm, mais cette voie pourrait
correspondre à une stratégie privilégiant la rapidité de colonisation.
Chez un grand nombre d’autres espèces bactériennes, comme P. aeruginosa, plusieurs
voies de régulation du Quorum Sensing sont également connues pour affecter le
développement du biofilm (Kirisits et Parsek, 2006). Positif ou négatif pour la maturation du
biofilm, selon le type de bactérie et les conditions environnementales, le rôle de la
communication reste primordial au devenir de la communauté (Hooshangi et Bentley, 2008).
La maturation s’accompagne donc de l’activation et/ou de l’inactivation d’un certain
nombre de voies biologiques. En effet, comme décrit dans la partie sur les « spécificités liées
au biofilm », sa formation et sa maturation passent par des modifications de la transcription et
de la traduction. La surexpression ou la sous expression génétique et protéique est variable
selon l’environnement, le type bactérien et le temps d’accrochage. Chez P. aeruginosa il a été
49
démontré qu’un biofilm jeune surexprime des gènes impliqués dans la synthèse de protéines
de transport de petites molécules et dans la synthèse de pili de type IV (Waite et al., 2005). Le
biofilm plus mature surexprime des gènes agissant sur le catabolisme du carbone, le
métabolisme des acides aminés, la synthèse de protéines de transport membranaire et de
protéines liés à la résistance. Chez Streptococcus pneumoniae, la surexpression de certaines
de ces mêmes familles protéiques ne se déroule pas au même stade de maturation (Allegrucci
et al., 2006; Sauer et al., 2002). Donc la régulation génétique et protéique est bien variable
selon le type bactérien et selon le temps d’accrochage.
3. Détachement
Le détachement des bactéries du biofilm peut être de deux sortes, passif ou actif. En
effet, il peut résulter d’un décrochage physique lorsque les forces de flux sont supérieures à la
résistance et à la cohésion du biofilm. Il peut également être déclenché par les bactéries elles
mêmes sous l’action de divers signaux internes ou environnementaux.
Le biofilm hétérogène par nature est composé de strates dont la cohésion augmente
avec la profondeur (Coufort et al., 2007). Si la force de flux varie peu, le détachement passif
s’effectue en général dans les couches supérieures moins cohésives du biofilm du fait de leur
éloignement de la base. Le décrochage porte différents noms selon la taille des fractions qui
retournent dans la phase liquide. Le terme sloughing désigne le détachement de grosses
particules de taille équivalente à l’épaisseur du biofilm n’affectant que des parties
particulières du biofilm. L’érosion et l’abrasion se produisent sur l’ensemble de la surface du
biofilm et induisent le détachement de plus petits morceaux. L’érosion est due à l’application
des forces de cisaillements du liquide en mouvement et l’abrasion est la résultante de
collisions entre particules contenues dans le liquide et la surface du biofilm. La zone de
biofilm arrachée peut être considérablement élargie si la force de flux augmente rapidement
(Derlon et al., 2008). Chez Staphyloccocus aureus, une expérience d’observation du
décrochage sur un biofilm structuré de sept jours a été réalisée. Le biofilm après 45 minutes
d’accrochage se développe sous une force de flux constante. Après sept jours de
développement, des grappes de tailles différentes pouvant contenir environ 107 cellules se
décrochent (figure 14). Les cellules bactériennes formant les grappes sont solidement
attachées par une fine couche de matrice extracellulaire. Ces agrégats permettent aux bactéries
d’acquérir une résistance aux antibiotiques bien supérieure à celle de bactéries planctoniques
50
en croissance mais similaires à des bactéries planctoniques en phase stationnaire. Ceci serait
dû au métabolisme ralenti de certaines bactéries en biofilm ce qui confirme l’hypothèse selon
laquelle ces grappes conservent le phénotype biofilm (Fux et al., 2004). Le décrochage se
passe en deux étapes dépendantes du temps : une période courte où le biofilm est capable
d’absorber les forces de cisaillement induites par le flux grâce à une déformation élastique et
une période plus longue où la composante visqueuse du biofilm va prendre le dessus,
entraînant la rupture au niveau des parties les moins cohésives et le décrochage de morceaux
de biofilm. Ces agrégats seraient capables de se déplacer par mouvement de rotation sur les
parois favorisant ainsi l’expansion de la colonisation (Rupp et al., 2005).
Figure 14. Décrochage d’un biofilm de S. aureus soumis à une force de flux. (A) représente
le biofilm en forme d’agrégats séparés par des canaux. (B et C) montre le détachement de
grappes de biofilm de 7 jours avec 15 minutes d’intervalle. Les flèches noires désignent le
sens du flux de nutriments. (D’après Fux et al., 2004).
L’autre façon d’augmenter l’expansion géographique du biofilm est le détachement
actif de microorganismes. Ce processus est plus complexe car les cellules bactériennes
51
sessiles doivent retourner à un phénotype planctonique et se détacher des composés de la
matrice pour retourner à la phase liquide (O’Toole 2000). Contrairement au détachement
passif, ce détachement actif ne résulte pas uniquement de l’action des forces
hydrodynamiques mais est induit par un stress nutritionnel, par une densité de population trop
importante ou par une exposition à des antimicrobiens. En effet, chez P. aeruginosa PAO1,
une augmentation soudaine de la disponibilité de la source de carbone induit une dispersion
des bactéries en biofilm (Sauer et al., 2004) . Une concentration de 20 mM de succinate
aboutit à une diminution des bactéries attachées d’environ 80% chez un biofilm de quatre
jours. La dispersion active des bactéries du biofilm met en jeu la production d’enzymes
microbiennes pour dégrader les polysaccharides qui lient le biofilm. La matrice localement
dégradée permet la libération des bactéries (Vats et Lee 2000). Chez P. aeruginosa, chez E.
coli, et chez Streptococcus equi, la production respective des enzymes alginate lyase, Nactétyl-heparosan lyase, hyaluronidase, capables de dégrader la matrice ont été mises en
évidence (Garrett et al., 2008). Simultanément, des opérons codant pour des protéines de
flagelles sont surexprimés. Ces actions conjointes libèrent donc les microorganismes de leurs
attaches, restaurent leur mobilité pour retourner dans la phase liquide et recommencer un
cycle de colonisation sur un autre site. Chez P. aeruginosa, le détachement provoqué par une
brusque augmentation de la source carbonée s’accompagne d’une sous expression progressive
du gène pilA qui intervient normalement dans la biosynthèse de pili de type IV utiles à
l’adhérence. En parallèle, le gène fliC impliqué dans la production de flagelles responsables
de la mobilité bactérienne est surexprimé (Sauer et al., 2004). Chez cette même espèce
bactérienne, il avait préalablement été démontré qu’au cours du cycle de développement du
biofilm, le protéome des bactéries en phase de dispersion était plus proche de celui des
bactéries planctoniques que des bactéries en biofilm mature (Sauer et al., 2002). En effet, en
phase de détachement actif, 35% des protéines sont sous exprimées comparées au biofilm
mature. Tous ces éléments permettent de prouver que le biofilm possède bien des phénotypes
différents selon son stade de développement. Celui-ci peut vivre durablement sur une surface
ou se disperser pour coloniser d’autres sites an fonction de variations de son environnement.
52
II. Nanofiltration en production d’eau potable, colmatage
membranaire
L’eau potable est un produit indispensable à la vie. Sa distribution au domicile du
consommateur est un élément essentiel au confort de vie. L’eau qui arrive au robinet doit être
satisfaisante d’un point de vue odeur, couleur et gout, et ne doit présenter aucun danger pour
le consommateur. Pour ces raisons, l’eau de surface servant de matière première doit subir des
traitements pour éliminer un maximum de matière organique, de microorganismes
potentiellement pathogènes ainsi que de composés chimiques dangereux pour la santé
(pesticides…). Pour cela, plusieurs stratégies existent, mais une des plus efficaces est la
filtration.
A. Filtration en production d’eau potable
Une membrane correspond à une barrière ou à une discontinuité entre deux milieux
permettant la séparation sélective ou l’exclusion d’un certain nombre de composés d’un
milieu vers l’autre (Sheikholeslami, 2007). Cette séparation peut être causée par différents
mécanismes mais résulte toujours de l’existence d’une force motrice. Cette force motrice peut
être induite par l‘existence d’une différence de pression, de potentiel électrique, de
concentration entre les deux milieux séparés par la membrane.
Les membranes peuvent être minérales ou organiques. Respectivement, différents
matériaux inorganiques ou des polymères peuvent servir à la fabrication de ces membranes.
En production d’eau potable, les matériaux utilisés sont principalement des polymères et la
force motrice est due à un gradient de pression.
Plusieurs critères peuvent servir à la classification des membranes. Elles peuvent être
classées en fonction de leurs applications, des matériaux qui les composent, de la porosité, du
mécanisme de séparation, du type de force motrice. La classification la plus couramment
utilisée est basée sur la porosité (Tableau 1).
Au niveau des membranes utilisées dans la production d’eau potable, les paramètres
servant à la classification sont la taille des pores, le seuil de coupure (« Molecular Weight Cut
Off » : MWCO) et la perméabilité de l’eau pure à 25°C. Quatre procédés de filtration se
distinguent selon la taille décroissante des pores (Sheikholeslami, 2007):
53
 Macro-pores ou microfiltration (MF) dont la taille des pores est supérieur à 50 nm
 Meso-pores ou ultrafiltration (UF) dont la taille des pores est comprise entre 5 et 50
nm
 Micro-pores ou nanofiltration (NF) dont la taille des pores est inférieure à 5 nm
 Non-pores ou osmose inverse (RO) dont la taille des pores est d’ordre ionique
Type
Taille des particules
(Angstrom)
Type de particules
Gamme de poids
moléculaire (Daltons)
Osmose inverse
< 14
Ioniques
< 500
Nanofiltration
8 – 90
Ioniques et petites
molécules
200 - 20000
Ultrafiltration
40 – 1000
Molécules et petits
colloïdes
10000 - 200000
Microfiltration
500 – 20000
Colloïdes
>100000
Tableau 1. Détermination approximative des spécificités de différents types de membranes :
tailles, types de particules et gamme de masse moléculaire admises pour la filtration. (D’après
Sheikholeslami, 2007).
La microfiltration est un procédé de filtration basse pression (< 350 kPa) pour séparer
les matières colloïdales et les particules en suspension dans une gamme comprise entre 0,05 et
10 micromètres (Figure 15). Elle est principalement utilisée pour la clarification, c'est-à-dire
pour réduire la turbidité du liquide à filtrer. Cette étape de clarification représente une barrière
pour un grand nombre de microorganismes notamment pathogènes mais ne permet pas la
rétention des virus.
L’ultrafiltration est un procédé proche de la microfiltration mais le fractionnement est
plus sélectif et les pressions restent assez faibles (50-500kPa) (Bonnelly, 2005; Godart, 2000;
Tamas, 2004). Elle est fréquemment utilisée pour le fractionnement du lait et de la crème dans
54
l’industrie laitière mais trouve aussi des applications pour le fractionnement des protéines.
Cette technique concentre dans l’eau non filtrée les solides en suspension et les molécules
dont le poids moléculaire est supérieur à 10000 Da (Figure 15). L’eau filtrée contient donc les
molécules de faible poids moléculaire, de la matière organique et des ions. Ce procédé permet
l’enlèvement partiel de la matière organique naturelle (Bouchard et al., 2003). La
combinaison de cette technique avec une étape de coagulation ou d’adsorption sur charbon
actif augmente de façon sensible l’enlèvement de la matière organique.
La nanofiltration (NF) est un procédé encore plus sélectif que l’ultrafiltration. La
pression d’opération en NF varie généralement de 500 à 1500 kPa (Bonnelly, 2005; Godart,
2000; Tamas, 2004). Elle est souvent utilisée pour la décoloration, la déminéralisation ou le
dessalement de l’eau. Comme l’ultrafiltration, la nanofiltration permet l’enlèvement de
solides en suspensions, mais la faible taille de ses pores aboutit à un bien meilleur enlèvement
des virus, de la matière organique et des ions multivalents (Figure 15). D’ailleurs, ce procédé
est bien connu pour sa capacité à retenir un grand nombre de micropolluants tels que les
pesticides. L’eau non filtrée (concentrat) se caractérisera donc par une augmentation de ses
concentrations en matière organique, en solides en suspension, en ions polyvalents. L’eau
filtrée contiendra des ions monovalents et des matières organiques de faible poids moléculaire
tels que des alcools.
L’osmose inverse est un procédé haute pression (5 à 8 MPa) permettant d’obtenir une
eau d’une très grande pureté mais très couteux en énergie (Bonnelly, 2005; Godart, 2000;
Tamas, 2004). Cette technique sert principalement au dessalement de l’eau de mer mais elle
est également utilisée pour la production d’eau ultrapure ou l’extraction de protéines du
lactosérum dans l’industrie laitière. L’osmose inverse permet donc de retenir les ions et
molécules sans pour autant concentrer ou séparer l’ensemble des minéraux (Figure 15). L’eau
filtrée sera donc partiellement déminéralisée et l’eau non filtrée sera concentrée en éléments
ioniques et non ioniques, en microparticules, en colloïdes et en microorganismes.
55
Figure 15. Différentes techniques de séparation par procédés membranaires. (D’après Godart,
2000).
B. Principe et bases théoriques de la NF
Cette partie a été très largement inspirée par un ouvrage de référence : Guide de la
nanofiltration (Guizard, 2000).
La nanofiltration est une technique de séparation dont les applications se situent entre
l’ultrafiltration et l’osmose inverse. Elle possède une structure microporeuse dont les pores
sont inférieurs à 5 nm et une structure membranaire portant en général des charges ioniques
superficielles. Les principales caractéristiques de ce type de membrane sont :
 La séparation des solutés se fait en partie en fonction de la masse moléculaire. En effet,
les solutés retenus ont une masse moléculaire comprise entre 200 et 2000 g.mol-1.
 La séparation dépend également de la charge des solutés.
56
 Les flux de solvant obtenus sont meilleurs et les pressions de travail sont plus basses
que ceux utilisés en osmose inverse.
Les caractéristiques de ces membranes leurs permettent d’être utilisables à grande
échelle et donc de posséder un grand nombre d’applications industrielles notamment dans les
secteurs comme les biotechnologies, l’agroalimentaire, la production d’eau potable. Elles sont
par exemples utilisées pour le dessalement du lactosérum dans l’industrie laitière, la
récupération de l’éthylèneglycol contenu dans les liquides antigel usagés, le recyclage des
effluents de la teinturerie ou le traitement d’eau potable. L’avènement de membranes en
céramique (inorganiques) a permis de travailler dans des conditions plus dures que celles où
les membranes organiques sont utilisées. En effet, il est devenu possible de travailler avec des
températures élevées, en solvant organique, avec des produits corrosifs. Un exemple
d’application de ce type de membranes est le recyclage de solutions alcalines de nettoyage.
1. Structure des membranes de nanofiltration
Les membranes de nanofiltration ont une structure asymétrique. Elles peuvent être
organiques ou minérales et sont composées de polymères ou d’oxydes métalliques. La
membrane de nanofiltration est classiquement constituée de trois parties (Figure 16). Chacune
de ces parties possédant une fonction propre :

Un support macroporeux possédant une grande résistance mécanique et permettant
donc une filtration avec des flux de liquide élevés

Une ou plusieurs couches intermédiaires (méso ou macroporeuses) assurant la liaison
entre le support et la couche dite active

La couche active qui réalise la séparation à proprement dit. Cette couche est peu
épaisse, de l’ordre du micron, et possède des pores dont les tailles de diamètres sont de
l’ordre du nanomètre.
57
Figure 16. Schéma de la composition d’une membrane NF. (D’après « Les cahiers du CFM »,
Guizard, 2000).
Cette structure permet donc une sélectivité de séparation importante en fonction de la
masse moléculaire (< 2000 g.mol-1) et de la charge des solutés même à des flux élevés. Ces
caractéristiques sont communes à toutes les membranes de nanofiltration. Mais chaque classe
de membrane, minérale ou organique, possède des caractéristiques physiques et chimiques
spécifiques à leur nature. Seules les membranes organiques seront détaillées car c’est le type
de membrane qui est utilisé pour la production d’eau potable.
2. Caractéristiques des membranes organiques
Les membranes de nanofiltration organiques sont élaborées en deux étapes :
 Un support de matrice tissée ou non tissée sert de base à la fixation d’une couche
intermédiaire macroporeuse de polymères d’une épaisseur comprise entre 40 et 100
µm environ. Cette couche intermédiaire est souvent composée de polysulfone. Elle est
anisotrope et possède une perméabilité très élevée.
 Par la suite, une fine couche d’une épaisseur comprise entre 0,3 et 3 µm est déposée ou
directement polymérisé. Cette couche est la couche active, c’est elle qui confère à la
membrane des propriétés de transport et de sélectivité. Elle doit posséder une bonne
résistance mécanique, une bonne inertie chimique et des propriétés de rétention
spécifiques. Le maillage de cette couche permet de déterminer un seuil de coupure
58
représentant une barrière sélective selon la taille des solutés. La nature des polymères
constituant cette couche active joue également un rôle important dans la rétention des
solutés. En effet, les groupements amide, carboxyle ou sulfone couramment utilisés
pour la confection de cette couche sont susceptibles de porter des charges électriques
permanentes ou en fonction du pH du milieu. L’absence, la présence et la nature des
charges modifiant de façon sensible la rétention des solutés.
3. Mise en œuvre du procédé de nanofiltration
Les membranes de nanofiltration sont classiquement disposées dans des modules. Le
module est un dispositif compact composé d’un carter rigide contenant la membrane et
constitue la base des installations de nanofiltration. Le liquide à filtrer entre dans le module
par une entrée appelée alimentation. Dans le module, le débit se divise en deux débits de
sortie. Le liquide qui est filtré par passage au travers de la membrane est nommé perméat. La
partie qui n’a pas été filtrée est appelée rétentat ou concentrat car le liquide est concentré par
les éléments qui ne sont pas filtrés (Figure 17).
Figure 17. Schéma représentant la répartition des débits dans un module membranaire.
(D’après « Les Cahiers du CFM », Guizard, 2000).
59
Les modules les plus couramment utilisés pour la production d’eau potable par
nanofiltration sont les modules spiralés (Figure 18). Ces modules sont composés de feuillets
de membranes NF planes enroulées en alternance avec des grilles d’espacements grossières
autour d’un tube collecteur de perméat. Ces grilles servent à accroitre le niveau de turbidité
admissible par les membranes. Chaque feuillet est lui-même constitué de deux faces de
membranes de nanofiltration collées et reliées l’une à l’autre par une grille d’espacement plus
fine. Celle-ci sert à l’évacuation tangentielle du perméat vers le tube collecteur de perméat.
L’ensemble de la structure est recouvert d’une coque en plastique rigide augmentant
ainsi sa résistance mécanique globale et permettant de l’insérer facilement dans un caisson
métallique sous pression de forme identique.
Figure 18. Représentation schématique d’un module NF spiralé. (D’après « Les cahiers du
CFM », Guizard, 2000).
D’un point de vue industriel, il est rare de n’utiliser qu’un seul module. En effet,
l’association et l’organisation de plusieurs modules sont nécessaires pour arriver à satisfaire
les exigences en termes de volume à traiter et de qualité de produit final. Deux méthodes sont
possibles pour l’assemblage des modules dans une installation à un ou plusieurs étages : la
60
méthode à simple passage ou celle à recirculation. Un étage représentant l’association en
parallèle de plusieurs modules de filtrations.
La méthode à simple passage comme son nom l’indique, signifie que le liquide
d’alimentation ne passe qu’une fois par module sans recirculation. Les étages successifs
présentent une surface membranaire et donc un nombre de modules de plus en plus faible. La
vitesse de circulation du fluide restant constante, c’est la pression entre chaque étage qui
chute. Le nombre de modules par étage et le nombre d’étages doivent être calculés en
fonction de chaque module vis-à-vis du fluide à filtrer (Figure 19).
Figure 19. Représentation schématique d’une installation à simple passage composée de 3
étages. (D’après « Les cahiers du CFM », Guizard, 2000).
La méthode à recirculation consiste à faire circuler de nouveau le fluide au niveau de
chaque étage. Ainsi la pression transmembranaire et la vitesse de circulation peuvent être
optimisées à chaque étage. Cette configuration une souplesse non négligeable mais implique
des coûts d’investissement et de fonctionnement supplémentaires (Figure 20).
61
Figure 20. Représentation schématique d’une installation avec système de recirculation
composée de 2 étages. (D’après « Les cahiers du CFM », Guizard, 2000).
C. Colmatage des membranes
Au cours du procédé de filtration d’eau, les membranes se colmatent progressivement.
Le colmatage des membranes peut être expliqué de différente façon selon le paramètre qui est
étudié. Cependant, au regard de tous les paramètres pouvant provoquer le colmatage, il paraît
cohérent de le définir comme un processus complexe qui résulte de l’accumulation d’un
certains nombre de phénomènes physico-chimiques et biologiques. Ceux-ci étant bien
évidemment corrélés les uns aux autres.
1. Concentration Polarisation
Lors du procédé de filtration :
 Une partie des molécules contenues dans l’eau d’alimentation traverse la membrane
formant ainsi le « perméat » (eau filtrée et destinée à la consommation).
 Une grande partie de ces molécules notamment indésirables ne traverse pas la
membrane et constitue le « concentrat » (eau non filtrée).
Les molécules non filtrées sont donc concentrées très près de la surface membranaire et elles
forment une zone ou le gradient de pression osmotique est plus important (Bonnelly, 2005).
62
Le fait que la pression osmotique augmente diminue de façon logique le flux de
perméation. En effet, la force motrice nécessaire pour traverser une zone concentrée doit être
plus importante que pour une zone moins concentrée (encombrement stérique, augmentation
des forces attractives et répulsives…).
Ce phénomène modifie l’équilibre établi initialement et favorise d’autres phénomènes
qui jouent également un rôle important dans le colmatage de la membrane (adsorption,
blocage des pores…). Les molécules peuvent parfois atteindre des doses saturantes, au-delà
leur degré de solubilité. Elles précipitent voir cristallisent ce qui augmente leur dépôt sur la
membrane.
2. Adsorption et blocage des pores
Les matières organiques ou inorganiques présentes dans l’eau d’alimentation sont
capables d’adhérer à la membrane via des interactions hydrophobes ou électrostatiques. En
fonction de la localisation de cette adsorption, dans un pore ou à la surface de la membrane,
celle-ci peut provoquer respectivement un blocage des pores et faciliter la formation d’une
couche colmatante nommée « gâteau ». Ces deux phénomènes vont tous les deux être liés et
participer au colmatage de la membrane. Le blocage des pores est non seulement dû à des
interactions, mais il peut également être la résultante d’un encombrement stérique (Childress
et Elimelech, 1996; Jermann et al., 2007; Broeckmann et al., 2006). Le colmatage qui s’opère
à l’entrée ou à l’intérieur des pores est plutôt un colmatage rapide alors que la formation du
« gâteau » est un phénomène plus lent.
3. Formation du « gâteau »
Un grand nombre de matières colmatantes sont capables d’interagir entre eux et avec
la membrane de filtration. Leur accumulation conduit à la formation d’une couche gélifiée
nommée « gâteau ». Il a été largement relaté qu’une grande partie des matières colmatantes
impliquées dans la formation de cette couche sont des matières organiques naturelles, des
colloïdes et des cations divalents. Les interactions entre les différents composés mis en jeu
permettent rigidification de l’ensemble de la couche. Cette couche s’épaissie, se densifie au
cours du temps jouant ainsi un rôle important dans la diminution de la vitesse de filtration de
l’eau. En effet, plus cette couche va être résistante, épaisse et compacte, plus les performances
63
de filtrations de la membrane vont être faibles (Song, 1998; Park et al., 2008; Lee et al.,
2005).
Le « gâteau » pourrait être assimilé à une seconde membrane. En effet, la couche
formée va posséder un pouvoir de séparation propre qui va adsorber ou laisser passer les
molécules selon leurs tailles et leurs charges. Comme les propriétés physico-chimiques de
cette couche sont différentes de celle de la membrane, elle va donc probablement à partir d’un
certain recouvrement et d’une certaine densité permettre une séparation plus poussée de la
matière et donc accentuer le phénomène de colmatage de la membrane.
4. Colmatage biologique ou biocolmatage :
Le colmatage biologique provient de ce qui est classiquement nommé « biofouling »
ou salissure de type biologique. Le biofouling correspond à un accrochage et au
développement non souhaité de biofilm sur des surfaces (Flemming, 2002). Ce phénomène
peut survenir dans de très nombreuses situations telles que la colonisation de matériels
médicaux, des membranes de filtrations, du réseau de distribution d’eau potable, des coques
de bateaux… Dans l’exemple d’un réacteur alimenté par des eaux usées industrielles
provenant d’une brasserie, la cinétique de formation de biofilm sur du verre est conforme à ce
que nous avons décrit précédemment dans la partie « étapes générales de formation du
biofilm » (Fernandez et al., 2008). Ainsi, le développement du biofilm peut être décortiqué
sur la base d’observations par microscopie électronique au cours du temps. Tout d’abord, des
microorganismes séparés colonisent la surface. Après quatre jours d’alimentation en eaux
usées, des microcolonies isolées sont observables. Après seulement huit jours, une matrice
d’exopolymères est présente autour des microcolonies (Figure 21).
64
Figure 21. Photographies de MEB d’un biofilm se développant sur du verre et alimenté par
des eaux usées industrielles provenant d’une brasserie. Grossissement x1000 pour l’ensemble
des clichés, sauf pour le temps 60 jours (x200) et pour les petits encadrés (x2000). (D’après
Fernandez et al., 2008).
Le terme colmatage biologique est généralement utilisé dans les processus impliquant
des membranes de filtrations et correspond au fouling induisant des pertes de perméabilité et
une diminution du flux traversant les membranes. Les étapes initiales de colmatage biologique
de membranes de nanofiltration alimentées par des eaux usées suivent un développement
proche mais plus rapide que celui observé ci-dessus par biofouling sur du verre (Ivnitsky et
al., 2007). Cette différence peut provenir de conditions de culture différentes ou du processus
de filtration en lui même. Au bout de seulement trois jours d’alimentation avec une eau usée
provenant d’un campus, un biofilm mature peu compact entouré d’une matrice
d’exopolymères est visible (Figure 22). Après sept jours, un biofilm multicouche plus resserré
65
composé de microorganismes variés est observable. Celui-ci est encore plus hétérogène et
compact après quatorze jours de fonctionnement.
Figure 22. Photographies de MEB d’un biofilm se développant sur des membranes NF et
alimenté par des eaux usées en fonction du temps de fonctionnement. (D’après Ivnitsky et al.,
2007).
Sachant que le colmatage des membranes de nanofiltration provenant d’usines de
production d’eau potable est majoritairement provoqué par le développement de biofilms
microbiens (Di Martino et al., 2007; Doumeche et al., 2007; Liikanen et al., 2002), la maîtrise
du développement de biofilm est un enjeu majeur pour les industriels. Le dépôt de colmatage
présent sur des membranes de nanofiltration en fonctionnement depuis cinq ans dans une
usine de production d’eau potable est composé principalement de carbohydrates et de
protéines (Doumeche et al., 2007). A la surface des membranes, un biofilm mature et
structuré est observable. Celui-ci contient des microorganismes et une grande quantité de
polysaccharides (Figure 23). Ces observations concordent avec une étude sur des pilotes qui
66
teste différents prétraitements (Speth et al., 2000). En effet, dans la plupart des cas, le dépôt
de colmatage présent sur les membranes NF est majoritairement composé de polysaccharides,
typiques d’un développement biologique.
Figure 23. Interactions entre les lectines fluorescentes et une membrane NF colmatée
visualisée en microscopie confocale après triple marquage. (a) DAPI (bleu), lectine AHTRITC (rouge), lectine TV-FITC (vert). (b) DAPI (bleu), lectine BS-TRITC (rouge), lectine
CA-FITC (vert). Les flèches blanches indiquent l’orientation du biofilm de la base au
sommet. (D’après Doumeche et al., 2007).
Dans le cas de colmatages membranaires non biologiques détaillés précédemment, la
quantité de dépôt formé peut être réduite par élimination d’une partie des matières
colmatantes de l’eau d’alimentation. Mais dans le cas du colmatage biologique, même si une
partie des bactéries planctoniques contenues dans l’eau d’alimentation est éliminée, celles qui
vont adhérer à la surface des membranes vont croître. Les procédures de nettoyage
67
augmentent l’hétérogénéité du biofilm formé à la surface des membranes NF car leur
efficacité n’est que partielle (Di Martino et al., 2007). Le dépôt de colmatage présent à la
surface des membranes NF est donc la résultante du développement de biofilm mais aussi du
matériel qui n’a pas été décroché lors des différentes étapes de nettoyage. Quelle que soit la
méthode utilisée pour le nettoyage, qu’elle soit physique (variation-inversion de flux) ou
chimique, la surface des membranes ne peut jamais être complètement débarrassée de
l’accumulation de biofilm. Il est donc nécessaire de s’intéresser aux différentes stratégies de
lutte existantes pour éliminer ou limiter leur développement et de développer des recherches
pour améliorer l’efficacité de la lutte anti-biofilm.
III.
Exemples de stratégies existantes pour lutter contre les
biofilms
Pour lutter contre les biofilms, deux grandes stratégies sont envisageables. La
première manière de procéder est d’éviter ou de contrôler la formation du biofilm. Elle
correspond à la stratégie préventive. La seconde possibilité est de détruire ou de réduire le
biofilm pendant ou après sa formation. C’est la stratégie curative.
A. Stratégies de prévention
Différentes approches peuvent définir la stratégie préventive. Le mode de croissance
en biofilm impliquant la colonisation d’une surface, une des solutions est de concevoir des
matériaux qui dans l’idéal empêcheraient ou en tout cas réduiraient significativement la
quantité de microorganismes vivants adhérents.
1. Matériaux « résistants à la colonisation »
Concernant les matériaux, deux paramètres physiques ont une importance primordiale
dans l’adhérence et la colonisation bactérienne : la topographie et le caractère hydrophile ou
hydrophobe de la surface. L’augmentation de la rugosité de surface de seulement 0,1µm est
suffisante pour modifier la force d’attachement des bactéries à la surface d’un matériau (Boyd
et al., 2002). Cette simple différence aboutit à une hausse significative de l’accrochage
(Taylor et al., 1998). Une surface possède par définition des caractéristiques propres aux
68
matériaux qui la composent. Il est cependant possible de modifier les propriétés initiales
d’une surface pour la rendre plus ou moins hydrophobe ou pour lui conférer des propriétés
bactéricides. La modification d’une surface peut être obtenue par le biais de traitements
physiques ou chimiques, et par greffage ou coating de diverses molécules. Le fait de créer ou
de modifier des surfaces permet de faire varier un seul paramètre à la fois et donc de relier les
résultats à ce paramètre. Tout ceci ayant comme objectif d’obtenir des matériaux difficilement
colonisables par les microorganismes.
Les surfaces modèles permettant le contrôle des paramètres de surface sont les
monocouches auto-assemblées (self-assembled monolayers SAMs). La formation de SAMs
consiste à greffer sur un matériau une monocouche chimique lui conférant les propriétés
voulues (Genzer et Efimenko, 2006). Cependant, la technique pour créer les SAMs présente
des problèmes. En effet, la limite de cette approche est le non recouvrement total de la
surface. La formation de monocouches mécaniquement assemblées (mechanically-assembled
monolayers : MAMs) permet d’optimiser le recouvrement de la surface traitée (Genzer et
Efimenko, 2006). Selon cette méthode, le matériau est étiré juste avant de déposer la
monocouche d’intérêt. Cette étape favorise ainsi la condensation de la monocouche et donc le
recouvrement total des couches sous-jacentes et le renforcement des propriétés de surface
voulues (figure 24).
Figure 24. Représentation shématique des SAMs et des MAMs (b) associée à mouillabilité
par angle de contact avec l’eau de ces surfaces (c). (D’après Genzer et Efimenko, 2006).
69
Les techniques de SAMs et MAMs ont permis d’évaluer l’effet de l’hydrophobicité et
des charges de surface sur la colonisation bactérienne. Il semble donc que plus une surface est
hydrophile, plus elle est résistante au développement bactérien (Tang et al., 2009; Tegoulia et
Cooper, 2002). De même, les surfaces chargées négativement sont moins facilement
colonisables que les surfaces chargées positivement (Katsikogianni et Missirlis, 2004). Ces
critères généraux suggèrent qu’il faut produire un matériau très hydrophile et chargé
négativement pour retarder le biofouling. Pourtant il a également été démontré que des
surfaces très hydrophobes voir superhydrophobes (angle de contact supérieur à 150°), qui ne
permettent pas à l’eau de rester à leur surface, présentent également des propriétés résistantes
à la colonisation bactérienne (Genzer et Efimenko, 2006). D’autres études minimisent l’effet
de l’hydrophobicité sur la quantité de biofilm formé mais démontrent son influence sur la
dynamique de formation et la morphologie du biofilm (Ploux et al., 2007). En effet, les
résultats obtenus avec une souche d’E. coli K12 capable de former du biofilm sur des surfaces
abiotiques montrent une différence structurale du biofilm en fonction de la surface colonisée.
Les bactéries s’arrangent sous forme d’agrégats sur des groupements méthyles hydrophobes
(CH3) et sous forme d’une structure analogue à des arbres sur des groupements hydroxyles
hydrophiles (NH2) (Figure 25).
Figure 25. Morphologies d’un biofilm sur une surface possédant des groupements NH2 et
CH3. Les images sont obtenues en microscopie à fluorescence après marquage au SYTO 9.
(D’après Ploux et al., 2007).
Des recherches sont également menées pour synthétiser des polymères (assemblages
de plusieurs monomères reliés par des liaisons covalentes) ou des réseaux de polymères
70
formant de nouveaux matériaux résistants à la colonisation. La nature chimique des
monomères utilisés a une influence essentielle sur les propriétés physico-chimiques du
matériau. Par exemple l’ajout de fluore sur un polymère de polyuréthane augmente
l’hydrophobie de la surface du polymère et modifie l’adhérence des microorganismes (Bakker
et al., 2003).
L’utilisation d’un copolymère, qui est un polymère issu de plusieurs espèces de
monomères différents pouvant allier les propriétés des monomères, est une piste de recherche
intéressante. Par exemple un copolymère poly(imide-b-siloxane) montre des propriétés
différentes en fonction de la synthèse et du pourcentage de chaque composé dans le matériau
(Novák et al., 2008). Grâce à l’incorporation de siloxane dans le polymère d’imide, la surface
devient plus hydrophobe, l’angle de contact passant de 76° à 102° pour 30% de poly siloxane.
Les réseaux de polymères interpénétrés (RIPs) peuvent également présenter des avantages
importants pour maitriser la colonisation bactérienne. Par exemple un RIP constitué de
poly(vinylacetate) et de silicate (K. Mori et al., 2006) montre des propriétés d’anti-adhérence
très proche de celle des peintures anti-adhérences utilisées (environ 90% de l’activité
répulsive des peintures).
De nombreux travaux ont été menés en faisant varier les molécules qui seront en
contact avec les microorganismes, certaines modifiant comme ci-dessus les propriétés
physiques de surface, d’autres possédants des effets bactéricides. La modification de surfaces
par coating de peptides (Glinel et al., 2009; Harris et al., 2004), d’anti-inflammatoires non
stéroïdiens (Baveja et al., 2004), de métaux comme les sels d’argent (Johnson et al., 2006) ou
d’antibiotiques (Darouiche, 2008) semble prévenir la colonisation bactérienne. Des protéines
de muscle de poisson ont également révélées des propriétés anti-biofilm remarquables
(Vejborg et Klemm, 2008).
Une des principales difficultés rencontrées dans l’élaboration de matériaux résistants à
la colonisation est l’impact de ces matériaux sur l’environnement ou sur la santé humaine.
Pour illustrer cela, nous pouvons citer le tributylétain, un biocide contenu dans les peintures
utilisées pour prévenir la formation de biofilm induisant la corrosion des coques de navires.
Celui-ci est interdit depuis le 1er Janvier 2008 car il s’est avéré que son relargage dans les
océans est fortement toxique pour les organismes de cet écosystème (Rapport assemblée
nationale 2006, http://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r3512.asp).
71
Une autre approche envisageable pour maîtriser le développement de biofilm est de
réduire de manière sensible les sources nutritionnelles et énergétiques des bactéries. Pour cela,
il est nécessaire d’agir sur les quantités de matières organiques biodisponibles présentes dans
l’eau.
2. Maîtrise de la matière organique biodisponible
Dans le cadre du traitement des eaux de surface pour produire de l’eau potable, l’eau
d’alimentation des membranes contient des matières organiques naturelles (Natural organic
matter : NOM). Ces matières organiques sont ubiquitaires et proviennent généralement de la
décomposition ou de l’humification des organismes animaux et végétaux. Les matières
organiques peuvent être classées dans différentes catégories selon leur capacité à être utilisées
par les microorganismes (Labanowski, 2004) :

la matière organique labile, principalement constituée de composés simples pouvant
être utilisés directement par un grand nombre de microorganismes sans le recours à
des enzymes spécifiques. Généralement on considère qu’il s’agit de sucres simples,
d’acides organiques courts, d’acides aminés, de sucres aminés et de petites protéines.

la matière organique lentement dégradable et relativement stable contenant des
composés qui nécessitent des enzymes spéciales de décomposition, essentiellement
produites soit par quelques microorganismes moins intéressés par des substrats labiles
soit par des microorganismes en manque de substrats labiles. Des polysaccharides et
d’autres composés dérivés de plantes et de microorganismes constituent entre autre
cette fraction.

la matière organique récalcitrante qui n’est pas complètement biodégradable, qui
s’accumule dans le milieu. Cette fraction consiste en des structures qui ne sont pas
facilement rompues par des enzymes, comme des dérivés de lignine ou des composés
fortement altérés. Les substances humiques des sols et des milieux aquatiques comme
les acides humiques ou fulviques peuvent tout de même être partiellement dégradées
lors de réactions enzymatiques et utilisées par des bactéries pour produire de la
biomasse (Filip et al., 2000; Hertkorn et al., 2002). L’utilisation des substances
humiques est fortement dépendante de leur nature, de celle des microorganismes et des
conditions de culture. Les substances humiques aquatiques seraient préférentiellement
utilisées comme source d’azote par les microorganismes indigènes.
72
Une corrélation positive a été décrite entre la croissance de bactéries provenant d’une
flore naturelle mixte des eaux et la concentration de carbone organique dissout
biodégradable (CODB) ou BDOC dans la terminologie anglo-saxonne (Biodegradable
dissolved organic carbon) (Volk et al., 1992). Cette corrélation n’est pas avérée pour des
souches non indigènes montrant l’importance d’une bonne adaptation des espèces à leur
environnement. La mesure de CODB est un paramètre pertinent pour évaluer le potentiel de
recroissance bactérienne, meilleur que la mesure du carbone organique total (COT ou TOC :
total organic carbon en anglais).
Lors du processus de filtration d’eau par nanofiltration, plusieurs prétraitements sont
utilisés pour éviter de détériorer les modules membranaires mais également pour réduire le
colmatage. Ces procédés sont la coagulation, les préfiltrations sur sable, sur charbon actif ions
ou la préfiltration par des techniques membranaires comme l’ultrafiltration. La coagulation a
pour but la déstabilisation des colloïdes et leur agglomération ainsi que celle des particules
fines en suspension par ajout d’un coagulant. Le plus souvent, ce sont des sels de métal
trivalent (fer, aluminium) qui apportent beaucoup de cations. Elle agit également par
adsorption sur les substances dissoutes et les grosses molécules organiques hydrophiles en
suspension stable. Elle est utilisée pour la clarification, la décoloration, l’agglomération des
précipités résultant d’un adoucissement calcosodique, l’amélioration du goût et de l’odeur.
L’efficacité de la coagulation pour réduire la matière organique dissoute dans l’eau a
été clairement démontrée (Gao et Yue, 2005; Volk et al., 2000). Selon l’optimisation du
protocole de coagulation, une diminution du carbone organique dissous (COD ou DOC :
Dissolved organic carbon en anglais) de 29 à 43% et du CODB de 30 à 38% est obtenue.
Cependant, dans la plupart des cas, la coagulation n’a pas d’effet sur le carbone organique
assimilable (COA) correspondant à la fraction de matière organique labile directement
utilisable par les microorganismes. Ceci est probablement du au faible poids moléculaire des
composés non humiques.
Les filtres à sable ou à charbon actif peuvent être utilisés de façon classique lors d’une
filtration rapide pour capter les particules. Le filtre à sable permet d’arrêter par filtration les
grosses particules comme les algues et les flocs formés par un prétraitement de coagulation.
Le filtre à charbon actif repose plus sur sa capacité d’adsorption des microorganismes et des
particules. Ces procédés aident à éliminer la couleur, le goût, l'odeur et les autres problèmes
liés à la matière organique. Si ces deux types de filtres sont utilisés par filtration lente, ils
peuvent également améliorer la purification de l’eau de manière biologique. En effet, des
73
biofilms s’installent sur les grains de sables ou de charbon des filtres et utilisent les molécules
organiques et inorganiques contenues dans l’eau pour leur développement (Godart, 2000). Les
filtrations sur sable et sur charbon actif réduisent la quantité de NOM dans l’eau
d’alimentation d’usines d’eau potable (Bèle et al., 2006). La filtration sur charbon actif est
plus efficace que la filtration sur sable concernant le COD et les sous-produits provenant de
l’action d’antiseptiques (Kim et Kang, 2008). La préfiltration par ultrafiltration quant à elle
permet l’enlèvement partiel des NOM. En effet, sur une eau de surface, ce traitement aboutit à
une diminution du COT allant jusqu’à 30% (Bouchard et al., 2003). La combinaison de cette
préfiltration avec une étape de coagulation réduit sensiblement les NOM avec des taux de
réduction de COT supérieurs à 60%.
Comme les microorganismes sont véhiculés par une phase liquide, une autre approche
possible est d’agir directement sur la quantité de bactéries dans le liquide. Logiquement, plus
la densité bactérienne dans le liquide est faible, plus le nombre de bactéries capables de
coloniser la surface sera faible.
3. Maîtrise des populations microbiennes planctoniques
La biomasse planctonique résulte de la multiplication des bactéries présentes dans la
phase liquide et du décrochage des cellules bactériennes du biofilm. Une des méthodes
utilisées pour maîtriser les populations microbiennes est basée sur l’utilisation de biocides.
Des biocides fréquemment utilisés pour assainir l’eau sont le chlore (Cl2) ou les dérivés
chlorés comme l’acide hypochloreux (HClO), le Dioxyde de chlore (ClO2) ou l’hypochlorite
de sodium (NaOCl). Ces composés sont des oxydants qui réagissent avec différentes
structures cellulaires affectant ainsi de nombreuses voies métaboliques et physiologiques (Phe
et al., 2005). Ils peuvent endommager les membranes bactériennes en modifiant leur
perméabilité et inhiber la production d’ATP. Ils oxydent également les liaisons soufrées des
enzymes induisant des altérations irréversibles. De plus fortes doses d'oxydant conduisent à la
dégradation des acides nucléiques bactériens. Une concentration en chlore comprise entre 1 et
3 mg/L aboutit à une réduction significative (de 1 à plusieurs logs selon les conditions) des
bactéries en biofilm (Goeres et al., 2004; Paquin et al., 1992). Le chlore, même à forte
concentration, ne détruit pas l’ensemble du biofilm suggérant l’atteinte des couches
superficielles mais pas des couches profondes. De plus, l’impact de la chloration est amoindri
lorsque le biofilm se développe en régime de flux turbulent (Buckingham-Meyer et al., 2007).
74
Si plusieurs cycles de réduction et d’augmentation de la concentration en chlore sont opérés, il
semble que le nombre de bactéries viables est de plus en plus important au cours des cycles
(Codony et al., 2005). Cette succession d’épisodes d’arrêt de la chloration réduit la
susceptibilité des bactéries au traitement par probable accélération du développement des
communautés en biofilm pendant ces périodes.
Le chlore et les dérivés chlorés ont une activité antimicrobienne mais leur réaction
avec des substances organiques peut former des sous produits de réaction comme les
trihalométhanes (THM), les acides acétiques halogénés, les chlorites et les chlorates (Gaid et
al., 2006). Ces produits présentent une activité toxique au-delà d’une concentration seuil, et
constituent donc un risque pour l’environnement et la santé publique (directive
communautaire 98/8/CE du Parlement européen fixant un cadre réglementaire relatif au
contrôle de la mise sur le marché des produits biocides). Parallèlement à ces facteurs
réglementaires, l’usage de biocides est générateur de surcoûts de production. C’est pourquoi
des solutions alternatives ont été et sont toujours recherchées.
Un autre biocide fréquemment utilisé pour le traitement de l’eau est l’ozone. C’est un
agent oxydant puissant dont le mode d’action se rapproche de celui du chlore. L’ozone
perturbe la production d'ATP et induit une mortalité des bactéries par perte du contenu du
cytoplasme. Les actions désinfectantes, à l’égard des germes pathogènes, et inactivantes à
l’égard des virus, sont obtenues en quelques minutes sous la seule réserve que soit maintenu
un résiduel d’ozone suffisant (± 0,4 g/m3). Les taux d’application varient de 1 à 6 g/m 3 (2,5
g/m3 en moyenne), suivant la qualité des eaux et des produits susceptibles d’être attaqués par
l’ozone. Les microalgues (et leurs toxines), les protozoaires, les mollusques de petite taille,
leurs larves et une grande partie des autres composantes du plancton sont détruits en quelques
minutes pour des taux de traitement faibles : 0,5 à 1 g/m3 (résiduel final voisin de zéro).
L’ozonation conduit à une destruction des doubles liaisons des composés organiques et les
dégrade en forme oxydée plus simple et souvent sous forme de chaîne linéaire, sous laquelle
ils sont mieux et plus rapidement assimilables par les microorganismes. L’ozonation
transforme donc le COD en CODB (Nishijima, Fahmi et al. 2003) améliorant ainsi leur
biodégradabilité. Ceci peut avoir un effet contraire à son action antiseptique. En effet, le
CODB représente la fraction directement assimilable par les microorganismes donc un
substrat de choix pour la réparation et la croissance cellulaire. Il est donc préférable d’ajouter
une étape de chloration à l’ozonation pour conserver ses effets antibactériens. L’ozonation est
efficace envers une grande partie des matières humiques, des phénols et des composés
75
précipités contenant du fer et du manganèse. Contrairement à la chloration, son utilisation ne
conduit pas à la formation de composés (ozonides) gênants. Dans tous les cas, les odeurs et
les goûts désagréables sont éliminés. Toutefois, certains sous-produits de l’ozonation peuvent
poser problème. C’est le cas des bromates dont la valeur peut excéder le seuil fixé par
diverses réglementations dont celles d’Europe ou des États-Unis (Godart, 2000; Code de la
santé publique 2007).
La maîtrise des populations bactériennes planctoniques peut également être
appréhendée par l’irradiation par des rayonnements ultraviolets (UV) de la phase liquide
véhiculant les microorganismes. L’irradiation UV peut avoir deux conséquences majeures sur
les microorganismes. Le premier effet connu est l’effet bactéricide qui consiste en
l’éclatement direct de la membrane cellulaire du fait de l’irradiation (Gaid et al., 2006). Le
second, est l’effet bactériostatique qui se traduit par la modification du capital génétique des
microorganismes. En effet, l'absorption de l'énergie des UV par l'ADN entraîne la formation
de dimères de thymines adjacentes, ce qui provoque la distorsion de la double hélice (AlAdhami et al., 2007). Cette déformation est normalement reconnue par une nucléase qui
dégrade localement la molécule à partir du dimère alors qu'une ADN polymérase la
resynthétise sous sa forme normale. Ces enzymes de réparation peuvent cependant faire des
erreurs et ainsi être à l'origine de mutations. Plus les enzymes sont sollicitées et plus le risque
d'apparition de mutation est important. Ces mutations peuvent engendrer des cellules qui ne
peuvent ni se reproduire, ni synthétiser les protéines nécessaires à leur survie. Dans ce cas, les
microorganismes sont inactivés.
La technologie UV présente plusieurs avantages : il n’y a pas d’ajout de réactif
chimique, l’eau ne présente pas de problème de goût ou d’odeur, les UV ne sont pas corrosifs
et à une dose de 400 J.m2, l’abattement des parasites tels que Cryptosporidium et des bactéries
comme les entérocoques est important (plusieurs logs) (Gaid et al., 2006; Franzin et al.,
2002). Cela dit, un prétraitement UV présente des limites. Les UV ne peuvent détruire que ce
qu’ils atteignent. Donc si un microorganisme est suspendu à une particule ou si l’eau est
trouble à cause d’une forte concentration en matière organique, en ions ferriques ou en ions
manganèse, alors celui-ci ne sera pas atteint pas le rayonnement et donc ne sera pas détruit. Il
est donc essentiel que la qualité d’eau soit la meilleure possible en amont du traitement UV
(Colon et Jhawar 1993). Le paramètre déterminant dans cette qualité d’eau étant une grande
transparence ou faible turbidité. La mortalité induite par le rayonnement est dose dépendante
76
mais la dose à appliquer pour atteindre l'inactivation cellulaire est très variable selon le type
de microorganismes (Conlon et Jhawar, 1993). En plus du type cellulaire, l’état dans lequel se
trouve la bactérie est également primordial pour l’efficacité du traitement UV. En effet
l’action d’une dose utile sur les bactéries planctoniques devient mineure lorsque celles-ci
s’organisent en biofilm (Lehtola et al., 2005). De plus, même si les microorganismes sont
atteints par le rayonnement, une bonne partie de ceux-ci ne meurt pas directement et est
capable de réparer les dégâts causés. Donc non seulement, plus la concentration en matière
humique est forte plus la bactérie sera protégée contre le rayonnement, mais aussi plus les
bactéries non atteintes irréversiblement sont capables de réparer leurs dommages et de
survivre (Alkan et al., 2007; Camper, 2004). Ce phénomène est lié à des modifications
chimiques de macromolécules humiques lors de l’irradiation UV qui génèrent des nutriments
de plus petite taille directement utilisables par les microorganismes, ce qui induirait une
augmentation du nombre de bactéries viables (Corin et al., 1998). Enfin il ne faut jamais
oublier que l’effet des UV n’est que temporaire, des recontaminations sont possibles. Ainsi,
plus on s’éloigne du point d’irradiation, plus la contamination croît (Franzin et al., 2002). Par
contre il est possible d’ajouter en aval des UV un traitement chimique contenant un
désinfectant tel que les chloramines pour maintenir l’effet bactéricide obtenu par l’irradiation.
Cette étape a pour but de limiter la croissance des microorganismes survivants (Mofidi et
Linden, 2004).
Des différences d'efficacité entre l’irradiation UV et d'autres prétraitements comme la
chloration, peuvent être observées. Mais lors de son utilisation conjointe avec un autre
prétraitement comme l’oxydation par ozone ou par peroxyde d’hydrogène ou l’ajout de
chloramines, l'irradiation UV peut présenter un réel gain d’efficacité (Huang et al., 2001;
Mofidi et al., 2000; Mofidi et Linden, 2004).
Il existe donc différentes façons de prévenir la colonisation d’un support mais cette
prévention n’est jamais totale. De plus, une stratégie préventive risque de sélectionner des
microorganismes résistants. Il est donc également nécessaire de mettre en place une stratégie
curative basée sur l’identification, le ciblage et la destruction des différents constituants du
biofilm au cours de son développement.
77
B. Stratégies curatives
Le colmatage des membranes de filtration d’eau conduit à des diminutions sensibles
des performances de filtration. Ce dépôt est constitué par le développement d’un biofilm
complexe car il est le produit du développement de microorganismes et de leur matrice, mais
également du piégeage d’un certain nombre de matières minérales et organiques contenues
dans l’eau d’alimentation. Les stratégies curatives visent donc à enlever les différents
constituants du dépôt (biofilm et matière inorganique) après sa formation pour permettre à la
membrane de retrouver ses capacités de filtration initiales.
Selon les spécifications des fournisseurs, les membranes de nanofiltration devraient
être nettoyées soit lorsque le flux de perméat chute de 10%, soit quand les concentrations en
sels dans le perméat augmentent de 10%, soit quand la perte de charge normalisée (colmatage
longitudinal des modules) atteint les 15%. Les intervalles de nettoyage sont dépendants des
sites de production pouvant aller de quelques jours à plusieurs mois. Pour éviter l’installation
d’un dépôt de colmatage irréversible, il est nécessaire d’effectuer des nettoyages réguliers
après un certain temps de fonctionnement, même si les paramètres sont encore dans
conformes aux spécifications des fabricants de membranes (AWWA-M46, 1999).
Les traitements de type chimique sont les traitements les plus couramment utilisés
pour le nettoyage des membranes NF. Le choix de l’agent nettoyant et des conditions de
nettoyage doivent dépendre de la nature du dépôt de colmatage mais également de la
résistance de la membrane au traitement. Les paramètres classiquement définis pour un
nettoyage sont la température, la concentration en solution nettoyante, le pH, la pression, le
flux et le temps de contact (Al-Amoudi et Lovitt, 2007; Liikanen, 2006).
1. Traitements chimiques non enzymatiques
Les traitements chimiques non enzymatiques peuvent être divisés en plusieurs
catégories : les traitements oxydants, les traitements acides, les traitements alcalins, les
traitements par des chélateurs d’ions métalliques et enfin les traitements par des agents
tensioactifs également appelés surfactants (Al-Amoudi et Lovitt, 2007). Plusieurs études
abordent la différence d’efficacité entre ces traitements pour la destruction des
microorganismes organisés en biofilm et pour le nettoyage des souillures (Mittelman, 1998;
78
Whittaker et al., 1984). Les traitements chimiques, en modifiant les paramètres chimiques du
milieu environnant, induisent le décrochage et ou la mort des microorganismes.
Les agents oxydants comme le chlore, le peroxyde d’hydrogène ou l’acide peracétique
peuvent être utilisées pour le nettoyage des membranes. L’acide peracétique peut être utilisé
sur tout type de membrane (Liikanen, 2006) mais il semble peu efficace. En effet, il n’a
aucune action sur un biofilm d’E. coli formé sur du verre (Loukili et al., 2006). Le chlore et le
peroxyde d’hydrogène sont des oxydants puissants qui génèrent par leur action sur les
polymères organiques un grand nombre de groupements oxygène. Ceci augmente le caractère
hydrophile du dépôt colmatant et donc améliore la solubilisation et réduit l’adhésion des
matières colmatantes à la membrane (Liu et al., 2000). De plus comme vu dans la partie
« maîtrise des populations microbiennes », les oxydants ont une activité biocide. En condition
acide, le chlore a un potentiel d’oxydation trop fort qui peut altérer la membrane. En condition
alcaline, les matières colmatantes sont moins compactes (Liu et al., 2000). Ceci permet une
meilleure accessibilité au chlore et donc une meilleure efficacité de nettoyage.
Les traitements alcalins sont généralement efficaces pour réduire la quantité de
colloïdes et de matière organique dans les dépôts de colmatage membranaire (Al-Amoudi et
Lovitt, 2007). Les traitements alcalins associés à des chélateurs peuvent restituer un flux de
filtration proche de celui d’une membrane neuve (Li et Elimelech, 2004; Liikanen et al.,
2002). Les traitements alcalins permettent de détruire une bonne partie des souillures
biologiques, des matières organiques naturelles et une partie des matières minérales. Les
traitements par chélateurs induisent, par la capture d’ions métalliques, le décrochage de
matières inorganiques, organiques et biologiques. Les traitements acides présentent une
certaine efficacité pour le relargage d’une partie de la matière inorganique fixée aux
membranes comme les ions calcium (Gwon et al., 2003). Par contre, les traitements acides ne
permettent pas aux membranes de nanofiltration, d’ultrafiltration, et d’osmose inverse, de
retrouver un flux aussi important qu’avec des traitements alcalins quelle que soit l’origine du
dépôt de colmatage (Liikanen et al., 2002; Madaeni et al., 2001; Paugam et al., 2006).
Certaines publications soulèvent le problème de traitements chimiques abusifs qui
rendent les membranes plus perméables qu’à leur état vierge (Bohner et Bradley, 1992). Les
membranes perdent alors leurs propriétés de rétention caractéristiques et deviennent donc
inutilisables (Figure 26). Lors d’une investigation sur les traitements de nettoyage, il est donc
indispensable de s’assurer de l’absence d’altération des membranes.
79
Figure 26. Membranes d’ultrafiltration en polysulfone endommagées par des traitements
chimiques abusifs. (D’après Bohner et Bradley, 1992).
Des traitements moins corrosifs comme les agents tensioactifs (détergents) peuvent
être utilisés. Il existe plusieurs catégories d’agents tensioactifs (anioniques, cationiques,
zwitterioniques, non ioniques). Le traitement par des tensioactifs anioniques à pH basique
montre une bonne efficacité de nettoyage (Mohammadi et al., 2002), tandis que le traitement
par des tensioactifs cationiques est peu probant (Lee et al., 2001). Les tensioactifs non
ioniques réduisent les quantités de biofilm et de microorganismes vivants mais avec une
efficacité moindre (Chen et Stewart, 2000). Les détergents zwitterioniques ne sont pas
abordés dans la littérature pour le nettoyage des membranes.
2. Traitements enzymatiques
Les traitements enzymatiques utilisent des enzymes qui se fixent spécifiquement à un
substrat pour induire une réaction biologique comme un clivage par exemple. D’après la
littérature, les préparations nettoyantes à base d’enzymes sont parmi les plus efficaces pour le
traitement des souillures de type biologique comme les biofilms (Whittaker et al., 1984). Les
avantages des traitements enzymatiques sont leur spécificité pour une cible, les températures
optimales d’utilisation n’excédant en général pas 50°C, un pH d’utilisation optimal de l’ordre
du pH physiologique, une durée d’action en général assez courte si la concentration en
enzyme est optimale (Argüello et al., 2003), le caractère biodégradable des enzymes et leur
80
durée de vie limitée dans un environnement hostile. Ainsi, ces traitements ne dégradent pas
les membranes de filtration, et ne nécessitent a priori pas non plus de frais supplémentaires
pour le traitement des déchets.
Cependant, comme le matériel biologique est complexe et hétérogène, l’utilisation
d’un seul type d’enzyme pour le nettoyage est peu efficace. Johansen et collaborateurs (1997)
ont ainsi testé différentes enzymes seules ou ensembles contre des biofilms mono spécifiques
in vitro dans des conditions de laboratoire. L’enzyme « Pectinex ultra » dégrade la matrice de
polysaccharides et décroche des bactéries avec une efficacité variable selon les espèces et n’a
pas d’activité bactéricide. La « glucose oxydase » et la « lactopéroxydase » possèdent un effet
bactéricide synergique. La « subtilisine A » détient une activité nettoyante envers les
protéines, mais pas d’activité bactéricide. Elle inhibe même l’activité bactéricide d’autres
enzymes comme la glucose oxydase. La mutanase et la dextranase ont une action synergique
pour éliminer le biofilm de la plaque dentaire sans action bactéricide. Ainsi, une solution de
nettoyage contenant plusieurs enzymes paraît être plus adaptée au nettoyage du dépôt de
colmatage de nanofiltration qui est de par sa composition très hétérogène (Johansen et al.,
1997). Celles ci peuvent être utilisées ensemble ou l’une à la suite de l’autre selon que leurs
effets soient synergiques ou inhibant.
3. Traitements physiques
Certains traitements utilisent des moyens physiques comme des modifications de
température, des actions mécaniques (les lavages hydrauliques), des rayonnements (ultra
violet), ou des ultrasons pour décrocher ou détruire les souillures de type biologique, minérale
ou organique.
Les traitements physiques sont rarement utilisés seuls car leur action présente un effet
synergique avec un certain nombre de traitements chimiques ou enzymatiques. L’optimisation
de la température, du temps de contact et la vitesse du flux appliqués lors du nettoyage
chimique contribuent à un meilleur enlèvement du dépôt de colmatage organique (Ang et al.,
2006). Pour le décrochage des matières inorganiques, l’efficacité de nettoyage par action
hydraulique est faible en comparaison des traitements chimiques (Gwon et al., 2003).
Cependant, ce traitement par action hydraulique associé à d’autres traitements peut apporter
un gain d’efficacité intéressant. L’utilisation des UV a un effet faible sur les bactéries
organisées en biofilm car les exopolymères absorbent une grande partie des rayonnements
protégeant ainsi les cellules bactériennes (Elasri et Miller, 1999). La dose habituellement
81
efficace pour détruire des bactéries planctoniques devient ainsi négligeable envers les
bactéries organisées en biofilm (Lehtola et al., 2005). Les ultrasons à faible intensité sont
efficaces pour détruire les microorganismes mais n’ont pas d’effet sur la structure des
biofilms, ils ne déstabilisent pas la matrice d’exopolymères et ne dispersent pas les
microorganismes (Qian et al., 1996). Par contre, en associant les ultrasons avec un traitement
enzymatique, un effet synergique est observé améliorant ainsi les effets du traitement
enzymatique seul pour la destruction du biofilm (Oulahal-Lagsir et al., 2003). Des résultats
similaires d’actions synergiques ont été décrits avec des associations ultrasons – agents
antimicrobiens (Qian et al., 1996).
En résumé, les nettoyages physiques sont intéressants pour l’optimisation des
nettoyages mais leur action seule ne permet pas de nettoyer efficacement les membranes de
filtration.
4. Protocole de nettoyage
Pour être efficace, un protocole de nettoyage doit être une association de différents
produits utilisés de manière simultanée ou successive. La température, le pH, la force ionique,
la concentration de chacun des produits, leur temps et leur ordre d’application jouent un rôle
essentiel dans l’optimisation des procédés de nettoyage (Madaeni et al., 2001). Par ailleurs,
des étapes de rinçage avec de l’eau filtrée séparent habituellement deux étapes d’action de
solutions nettoyantes.
Sur la base des données bibliographiques, les pistes de recherche les plus intéressantes
pour l’amélioration des procédures de nettoyage de membranes de nanofiltration sont
l’utilisation d’un chélateur pour éliminer les matières organiques naturelles (NOM) et les
matières inorganiques (ions métalliques) puis une association entre un traitement
multienzymatique et un tensioactif pour les microorganismes associés en biofilm (Al-Amoudi
et Lovitt, 2007). Il est également important de déterminer l’efficacité des traitements alcalins
et acides. La nature exacte et l’ordre des traitements font partie de la mise au point du
protocole de nettoyage. L’utilisation de ces traitements chimiques en association avec un
traitement aux ultrasons peut être envisagée pour augmenter l’efficacité de nettoyage.
Toutes ces données bibliographiques ont été obtenues dans différents laboratoires,
dans des domaines variés (industrie de production d’eau, industrie agroalimentaire, milieu
médical, recherche académique…), dans des conditions expérimentales très différentes
(biofilms sur acier inoxydable, sur plastique, sur membranes, utilisation de procédés différents
82
de filtration : ultrafiltration, osmose inverse, nanofiltration, différence de qualité de l’eau en
terme chimique et microbiologique induisant des différences de proportion, des variations
spatio-temporelles des matières organiques et inorganiques des dépôts…). Un protocole de
nettoyage doit être spécialement adapté à un cas particulier car il doit prendre en compte les
impératifs de production industrielle (rythme de production, coût) et la nature exacte du dépôt
de colmatage. Dans le cas de notre étude, il était donc indispensable de déterminer dans un
premier temps avec précision la nature ainsi que la cinétique de formation du dépôt de
colmatage dans l’usine de Méry-sur-Oise. Dans un second temps, il fallait tester différents
traitements adaptés à la nature de ce dépôt.
83
Matériel et Méthodes
84
I. Matériel et installations mises en œuvre pour les études
A. Le matériel d’étude
1. Pilote intégré à l’usine de Méry-sur-Oise
L’usine de Méry-sur-Oise située dans le nord de la banlieue parisienne produit de l’eau
potable à partir de la rivière Oise. Cette usine possède deux filières principales : la filière
membranaire (Figure 27) et la filière biologique qui produisent respectivement environ
130 000 et 50 000 m3 d’eau par jour (Cyna et al., 2002). L’eau de l’Oise est une eau riche en
matière organique qui doit subir plusieurs étapes de prétraitements avant d’arriver sur les
membranes de nanofiltration. Ces prétraitements sont la coagulation, la floculation,
l’ozonation, la filtration.
Figure 27. Photographie de la filière membranaire de l’usine de Mery sur Oise.
La filière membranaire est composée de 8 files, elles mêmes constituées de 3 étages.
L’eau d’alimentation provenant de l’Oise subit les étapes de prétraitements et arrive sur les
membranes NF de l’étage 1. Une partie de cette eau va être nanofiltrée (le perméat ou filtrat)
85
et va subir une irradiation UV avant de se diriger vers le système de distribution. L’autre
partie non filtrée (rétentat ou concentrat) va servir à alimenter l’étage suivant et ainsi de suite.
La filière membranaire de l’usine possède un pilote intégré au système de production. Le
fonctionnement de ce pilote participe à la production de l’usine mais il peut en être
déconnecté. Ce pilote permet de suivre le colmatage de membranes, de tester différents types
de membranes et de faire des essais de nettoyages autres que ceux couramment pratiqués sur
l’usine sans trop perturber le fonctionnement de celle-ci. Le pilote intégré est composé de 3
étages comme le reste des installations de nanofiltration de l’usine (Figure 29). Chaque étage
comprend un certain nombre de tubes de pression contenant chacun 6 modules de
nanofiltration. Le module de nanofiltration est un dispositif compact composé d’un carter
rigide contenant la membrane NF enroulée et la base des unités de nanofiltration (Figure 28).
Les modules utilisés sont des modules spiralés de 8 pouces composés de feuillets de
membranes NF planes enroulées en alternance avec des grilles d’espacements grossières
autour d’un tube collecteur de perméat (Figure 28). Ces grilles servent à accroitre le niveau de
turbidité admissible par les membranes.
Figure 28. Photographies d’un module de filtration rigide (a), d’un module de filtration
déroulé après autopsie (b) et d’un morceau de membrane neuve recouverte d’une grille
d’espacement (c). Les feuillets de membrane NF sont bien visibles (b).
86
Le pilote intégré est constitué de 4 tubes de pression au 1er étage, 2 tubes au 2éme étage
et 1 tube au 3ème étage (Figure 29). Les tubes du pilote sont isolés du reste de la file en phase
de production d’eau potable et raccordés au reste de la file en phase de régénération
(nettoyages usine). Le débit d’alimentation des modules de l’étage 1 est de 35 m3/h.
Figure 29. Schéma du pilote de nanofiltration de Mery sur Oise contenant des modules
filtrants.
2. Pilote de nanofiltration indépendant
Ces pilotes dits indépendants ont été conçus et réalisés par la direction technique
banlieue de Paris de Véolia eau. Ce type de pilote n’est pas intégré à une usine de production
d’eau potable. Il est constitué d’un tube de pression, de pompes qui régulent le débit et d’un
système automatisé d’acquisition de données (Figure 30).
87
Figure 30. Photographie d’un pilote indépendant.
Deux pilotes sont alimentés en parallèle par la même eau d’alimentation ou par deux
eaux de qualité différentes. Le tube de pression de chaque pilote contient un module spiralé de
4 pouces. Une boucle de recirculation est présente sur chaque pilote et permet d’enrichir l’eau
d’alimentation avec du concentrat pour mimer ce qui se passe entre deux étages d’une usine
comme Méry-sur-Oise et accélérer le phénomène de colmatage malgré la présence d’un
module unique (Figure 31). En amont des pilotes, l’eau d’alimentation subit des
prétraitements classiques pour un système de filtration d’eau consistant à neutraliser le pH,
ajouter des anticoagulants et réaliser une double filtration sur cartouche (seuils de coupure :
10 et 5µm). Dans certaines études, un prétraitement par filtration sur sable, sur charbons actifs
en grain et ozonation ou une irradiation UV peuvent être réalisés.
88
Figure 31. Schéma d’un pilote de nanofiltration indépendant.
Le facteur de concentration défini comme le ratio du flux initial alimentant la
membrane sur le flux de la boucle de recirculation est fixé à 1,4. L’eau d’alimentation possède
un débit de 2 m3/h. Ces caractéristiques sont identiques pour les 3 études réalisées sur ce type
de pilote.
La première étude réalisée sur ce type de pilote compare le biocolmatage des
membranes en fonction de la teneur en carbone organique biodisponible (CODB) de l’eau
d’alimentation. Les teneurs différentes en CODB sont générées par deux types de
préfiltration : une des eaux est préfiltrée sur sable et l’autre est préfiltrée sur charbon actif en
grains et subi un processus d’ozonation.
Les deux études suivantes réalisées avec ces pilotes ont appréhendé l’impact de
l’irradiation de l’eau d’alimentation par des ultraviolets sur le biocolmatage membranaire. Au
sein de chacune de ces études, deux pilotes sont alimentés en parallèle par la même qualité
d’eau mis à par l’irradiation. Pour l’une des études, l’eau est préfiltrée sur sable et pour l’autre
préfiltrée sur charbon actif/ozonation. Un pilote sert de témoin et l’autre est équipé en amont
de la filtration par cartouche d’une lampe UV. Cette lampe UV basse pression (Abiotec,
Clamart, France) possède une longueur d’arc de 1045 mm, une puissance totale de 205 Watts
et une puissance émise à 254 nm de 60 W.
89
3. Autopsie des membranes
Les pilotes de nanofiltration ont été équipés à chaque nouvelle étude de modules de
filtration contenant des membranes NF200 (DOW). Ces membranes sont composées de
plusieurs couches : un support de polyester macroporeux possédant une grande résistance
mécanique, une couche intermédiaire de polysulfone assurant la liaison entre le support et la
couche dite active, et une couche active en surface de polypyperazine qui réalise la séparation
à proprement parlé (Figure 32).
Figure 32. Schéma de la composition d’une membrane NF. (D’après « Les cahiers du CFM »,
Guizard, 2000).
Les membranes NF200 neuves possèdent une charge négative globale élevée, un seuil
de coupure faible (360 Da), une faible hydrophobicité et une faible rugosité de surface
(Bellona et Drewes, 2005; Her et al., 2000; Marconnet et al., 2009) . Toutes ces
caractéristiques servent notamment à empêcher la fixation des matières organiques naturelles
hydrophobes par des phénomènes de répulsion électrostatique et d’exclusion stérique.
Les modules de filtration contenant les membranes sont extraits après différents temps
de fonctionnement selon les études. Pour l’étude cinétique du développement de biofilm, les
modules de filtration sont extraits après 7, 80, 475 et 717 jours de fonctionnement. Pour
effectuer une comparaison du dernier point de la cinétique avec une membrane en
fonctionnement depuis de nombreuses années, un module ayant fonctionné au sein de l’usine
pendant 7 ans est également utilisé. Pour l’étude évaluant la formation du biofilm en fonction
90
de la concentration de l’eau d’alimentation en matières organiques dissoutes, l’extraction a
lieu après 20 semaines de fonctionnement. Pour les études estimant l’action de l’irradiation
UV sur le biocolmatage des membranes, les extractions ont respectivement lieu au bout de 10
semaines pour l’étude dont l’eau d’alimentation est préfiltrée sur sable et de 20 semaines pour
l’étude dont l’eau d’alimentation est préfiltrée sur charbon actif et ozonée.
L’ensemble des techniques analytiques et des nettoyages in vitro sont pratiqués sur des
échantillons de coupons membranaires découpés à partir de feuillets déroulés d’un module
extrait. Ces coupons ont une surface variable et sont traités différemment selon la technique
d’analyse utilisée comme décrit ultérieurement.
B. Les processus de nettoyage
1. Nettoyage in vitro des membranes
Après autopsie des membranes, des coupons d’une surface d’environ 1 cm2 sont
découpés pour effectuer les nettoyages in vitro. Une fois les traitements de nettoyage
effectués, les coupons sont préparés selon la méthode d’analyse choisie (description ci après).
3 protocoles de nettoyage in vitro en bain statique sont appliqués (Figure 33).
Figure 33. Protocole expérimental des 3 essais de nettoyages in vitro. UP, ultrapure. L’eau
UP est une eau bi-distillé de qualité 18 MΩ. Cadre rouge : application d'un principe actif
différent entre les protocoles de nettoyage.
91
Ces nettoyages sont identiques pour l’ensemble des étapes hormis une étape
d’application d’un principe actif différent (encadré sur la Figure 33). Les 3 types de
traitements appliqués sont :

Le traitement alcalin (Ultrasil 110, Ecolab) qui sera qualifié de traitement
chimique (TC). Les composants principaux de l’Ultrasil 110 sont l’éthylène
diamine tétraacétique (EDTA), l’hydroxyde de sodium et le Sodium Dodecyl
Sulfate (SDS). L’EDTA est un chélateur de cations métalliques qui déstructure
fortement les réseaux contenant des cations comme le calcium. Le SDS est un
détergent anionique très polaire qui solubilise la grande majorité des protéines
membranaires. L’hydroxyde de sodium induit une augmentation de pH qui
déstabilise les membranes cellulaires et dénature les protéines. Ce dernier renforce
donc l’effet du SDS.

Le traitement contenant une protéase (Ultrasil 67-69, Ecolab) qualifié de
traitement anti-protéique (TAP). Les principaux principes actifs de l’Ultrasil 6769 sont la subtilisine et le carbonate de sodium. La subtilisine est une sérine
protéase bactérienne (endopeptidase) capable de cliver les protéines en condition
alcaline. Le carbonate de sodium provoque une alcalinisation du milieu et agi par
déstabilisation des membranes cellulaires.

Le traitement alliant l’action de la même protéase (Ultrasil 67-69) et d’enzymes
dirigées contre les polysaccharides. Ce traitement sera nommé traitement
multienzymatique (TME). Le TME contient de la β-galactosidase (Sigma, Saint
Quentin Fallavier, France), et un mélange qualifié de pectinase contenant une
activité polygalacturonase et en plus faible proportion des activités cellulases
hydrolysant respectivement les liaisons entre 2 galactoses en beta, en alpha-1 et 4
de l’acide galacturonique et les polymères du glucose (Sigma, Saint Quentin
Fallavier, France).
2. Nettoyage des membranes sur pilote
Des nettoyages sont également effectués pour l’étude sur le vieillissement du dépôt de
colmatage (stockage des membranes). Ces tests de nettoyage et perméabilité membranaires
associés sont réalisés sur un pilote membrane plane (Osmonics, Minnetonka, Etats Unis).
Pour cela, des échantillons de membrane en fonctionnement depuis plusieurs années sont
92
découpés. Ces coupons ont une surface de 16.5 cm × 16.5 cm sont directement placés dans le
pilote pour subir les tests. Le nettoyage consiste à utiliser une solution enzymatique alcaline
suivie d’une solution acide (Ecolab, Issy les Moulineaux, France). Entre ces deux étapes, les
coupons de membrane sont rincés avec de l’eau ultrapure en condition dynamique.
L’efficacité de nettoyage a été évaluée pour les paramètres membranaires par filtration d’une
solution synthétique de MgSO4 dans des conditions standards (25°C, 70 psi). Ces mesures
sont répétées 3 fois. Pour l’enlèvement du biofilm, un coupon de 16,5 x 16,5 cm a été découpé
en plus petits morceaux et suit le protocole classique de préparation des échantillons analysé
par ATR-FTIR.
II. Les techniques d’analyse
A. Les techniques d’imagerie
1. Microscopie à épifluorescence
a. Principe
Une molécule fluorescente (fluorochrome ou fluorophore) possède la propriété
d'absorber de l'énergie lumineuse (lumière d'excitation) et de la restituer rapidement (moins
d’une nanoseconde) sous forme de lumière fluorescente (lumière d'émission). L'absorption
d'une partie de l'énergie par d'autres molécules du milieu et une perte sous forme de chaleur,
conduit à une énergie de lumière réémise plus faible que celle qui a été absorbée. Ceci se
traduit par une augmentation de la longueur d'onde donc un déplacement du spectre
d'émission vers des longueurs d'onde plus élevées (loi de Stokes). Ce phénomène permet la
séparation et la détection de la lumière de fluorescence émise par le fluorochrome excité.
Le microscope à épifluorescence utilisé est le modèle DMLB (Leica, Nanterre,
France). Il est équipé de deux lampes, une lampe ordinaire pour une observation classique par
transmission et une lampe à arc pour la fluorescence. Des filtres d'excitation permettent de
choisir la longueur d'onde incidente et des filtres d'émission (ou d'arrêt) permettent de
sélectionner les radiations émises par l'objet excité. Un microscope équipé en épifluorescence
est pourvu de plusieurs jeux de filtres correspondant aux fluorochromes les plus
habituellement
utilisés :
rhodamine,
fluorescéine
et
Diamino-4’,6-phénylindol93
2dichlorhydrate (DAPI) qui émettent respectivement dans le rouge, le vert et le bleu (Tableau
2).
Fluorochrome utilisé
Longueur d'onde d'excitation (nm)
Longueur d'onde d'émission
(nm)
FITC
494
520
340
488
364 (complexé à l'ADN)
454 (complexé à l'ADN)
550
570
DAPI
TRIC
Tableau 2. Longueurs d’ondes d’excitation et d’émission des fluorophores utilisés.
b. Application
Après autopsie des modules, des coupons de membrane d’environ 1cm2 sont prélevés.
Les coupons sont ensuite fixés avec du paraformaldéhyde (PFA) à 4% dans de l’eau distillée
stérile. Après fixation, les coupons sont rincés 2 fois à l’eau distillée stérile, incubés 20
minutes à température ambiante dans l’obscurité en présence de deux solutions de lectines
différentes couplées à des fluorophores (100 µg/mL en eau stérile pour chaque lectine). Une
solution de lectine couplée avec du Tetramethyl Rhodamine Iso Thio Cyanate (TRITC) est
mélangée avec une solution de lectine couplée avec de l’Isothiocyanate de Fluoresceine
(FITC). Six motifs saccharidiques sont marqués par six lectines fluorescentes (Sigma, Saint
Quentin Fallavier, France) (Tableau 3).
94
Tableau 3. Description de l’association entre les lectines utilisées et les motifs marqués.
Les coupons sont ensuite lavés à deux reprises avec de l’eau distillée stérile et incubés
20 minutes à température ambiante à l’abri de la lumière dans une solution de DAPI à une
concentration de 1 µg/ml (Sigma, Saint Quentin Fallavier, France). Les coupons sont de
nouveau rincés deux fois à l’eau distillée stérile et fixés entre lames et lamelles avec du
Mowiol (Calbiochem, Meudon, France). Après une nuit de séchage à température ambiante,
les montages sont ensuite conservés à l’obscurité à 4°C.
2. Microscopie confocale à balayage laser
a. Principe
Les images en microscopie à fluorescence classique ont une perte de résolution de
l’image due à l’excitation des fluorochromes se situant hors du plan focal. En effet les
fluorochromes sont excités par la lumière sur toute l’épaisseur de la préparation, ce qui se
traduit par une image contaminée par un bruit de fond. L’objectif de la microscopie confocale
à balayage laser (MCBL) ou CLSM en terminologie anglo-saxonne (Confocal Laser Scanning
Microscopy) est d’éliminer la lumière provenant des plans défocalisés qui parasitent le plan
focal. Le CLSM est donc une adaptation du microscope à fluorescence conventionnel dans
95
laquelle la source lumineuse et le détecteur sont réduits aux dimensions d’un point, à l’aide de
diaphragmes de quelques micromètres, situés en position confocale (Figure 34).
Figure 34. Principe de confocalité, source et détecteur sont deux points conjugués. (D'après
http://www.techno-science.net).
L’excitation des fluorochromes se fait par un laser qui est une source lumineuse
monochromatique dont le faisceau ne fait que quelques dixièmes de millimètres de diamètre.
Les lasers les plus couramment utilisés sont les lasers argon/krypton (488 nm et 568 nm) et
hélium néon (633 nm). La préparation va être balayée par le laser point par point suivant l’axe
des X et l’axe des Y grâce à des miroirs (Figure 35). La fluorescence est ré-émise dans les
trois dimensions et dans les différents plans. Un pinhole (trou d'épingle) est présent à l’entrée
du photodétecteur pour ne récupérer que les photons provenant du point illuminé. Les photons
de fluorescence vont être captés par le photodétecteur pour être amplifiés et transformés en
signal électrique dont l’intensité est proportionnelle au nombre de photons reçus. Ce signal
électrique va ensuite être numérisé en un niveau de gris. Ainsi, point par point, une image 2D
est reconstituée. La platine porte objet peut être déplacée selon un troisième axe z (Figure 35).
En définissant un pas constant Δz, plusieurs images en XY peuvent être enregistrées. Puis
l’ensemble est assemblé par traitement du signal pour donner une image en 3 dimensions
(xyz). Une des caractéristiques principales de cet appareil est donc de fournir une
représentation en volume de l’objet sans avoir à le couper en tranches fines. Cependant, le
faisceau laser doit pénétrer la matière et des pertes de lumière se produisent sur les trajets
aller-retour. Par conséquent, l’épaisseur de la partie explorée de l’objet est limitée par son
degré de transparence. En pratique, l’épaisseur est comprise entre 10 et 100 µm, quelque fois
200 µm.
96
Figure 35. Schéma d’un microscope confocal. (D'après http://www.techno-science.net).
b. Application
Les échantillons sont préparés de la même manière que pour le microscope à
épifluorescence. Le microscope confocal utilisé est de type Leica SP2 (Leica microsystems,
Reuil-Malmaison, France). Le DAPI est excité à 405 nm et observé entre 410 et 500 nm. Le
FITC est excité à 488 nm et observé entre 505 et 540 nm. Le TRITC est excité à 543 nm et
observé entre 560 et 600 nm. La sélection des fenêtres d’émission spectrale est obtenue par
analyse de la longueur d’onde par mono-marquage de coupons de membrane. Les paramètres
d’acquisition des données en microscopie confocale sont adaptés à l’observation directe en
épifluorescence. Les images (1024 x 1024 pixels) sont acquises en mode séquentiel entre
plan, pour éviter les signaux parasites. Une vitesse d’acquisition de 400 Hz est appliquée. Les
données acquises en confocale à l’aide du logiciel LCS (Leica confocal softaware) sont
transférés au logiciel Imaris 6.0 (Bitplane, AG, Zurich) pour obtenir une photographie qui
assemble les données des différents plans et qui donne également les projections selon des
axes XY et XZ.
Pour l’analyse quantitative volumique des signaux fluorescents en microscopie
confocale, les lots de lectines utilisés et les paramètres d’acquisition et de traitement du signal
97
sont identiques pour tous les échantillons d’une même étude. La période d’acquisition des
données est également réduite un maximum pour éviter les pertes de puissances des lasers qui
se produisent au cours du temps. Tout ceci permet de s’assurer de la validité de comparaison
des résultats. Les images (512 x 512 pixels) sont modélisées à l’aide du logiciel Imaris 6.0
(Bitplane, AG, Zurich) pour obtenir des modélisations en 3 dimensions. Ces modélisations
volumiques permettent d’accéder au volume de chaque fluorophore à partir des données
acquises en microscopie confocale.
3. Microscopie électronique à balayage
a. Principe
La microscopie électronique à balayage (MEB) ou « Scanning Electron Microscopy en
terminologie anglo-saxonne (SEM) est une technique d’observation de la topographie des
surfaces. Elle est fondée principalement sur la détection des électrons secondaires émergents
de la surface sous l’impact d’un très fin pinceau d’électrons primaires qui balaye la surface
observée et permet d’obtenir des images avec un pouvoir séparateur souvent inférieur à 5 nm
et une grande profondeur de champ.
Elle utilise, en complément, les autres interactions des électrons primaires avec
l’échantillon : émergence des électrons rétrodiffusés, absorption des électrons primaires, ainsi
que l’émission de photons X et parfois celle de photons proches du visible. Chacune de ces
interactions est significative de la topographie et/ou de la composition de la surface
(Figure 36).
98
Figure 36. Principales émissions électroniques et électromagnétiques dues aux interactions
d’un faisceau d’électrons avec un échantillon.
b. Application
Des coupons de 1 cm² sont découpés des membranes NF après autopsie. Les
échantillons sont fixés avec une solution de cacodylate 0,1 M et de glutaraldéhyde 2% (m/v)
et rincés 3 fois dans un bain de 10 min avec une solution de cacodylate 0,2 M. Ils sont ensuite
déshydratés par des bains successifs de 10 min dans des solutions d’éthanol de concentration
croissante (30%, 50%, 80% et 100%). Les échantillons sont enfin séchés pendant 2 h dans une
étuve à 37°C, placés sur les supports adaptés, métallisés avec de l’or-palladium puis observés
au microscope électronique à balayage (ZEISS EVO 40 EP).
99
B. Les techniques biochimiques et physicochimiques
1. Analyse du dépôt de colmatage par spectroscopie infrarouge à transformée de
Fourier en mode de réflexion totale atténuée (ATR-FTIR)
a. Principe
La spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier en mode réflexion totale atténuée
(ATR- FTIR) est une technique basée sur l'absorption d'un rayonnement infrarouge par le
matériau analysé. Elle permet de déterminer les fonctions chimiques d’un matériau par
détection des vibrations caractéristiques des liaisons chimiques du matériau en question.
Le concept de la spectroscopie en réflexion interne provient du fait que l’onde, se
propageant dans un milieu optique dense d’indice de réfraction n1 (le cristal ATR), subit une
réflexion interne totale à l’interface formée avec un milieu adjacent au premier, mais ayant un
indice de réfraction plus faible n2 (gaz ou liquide). Cette onde formée à l’interface est appelée
onde évanescente. Lorsque l’énergie (longueur d’onde) apportée par le faisceau lumineux est
voisine de l'énergie de vibration de la molécule, cette dernière absorbe le rayonnement et une
diminution de l'intensité réfléchie diminue. Cependant, à chaque réflexion, l’absorption est
faible. C’est pourquoi, afin d’amplifier au maximum le signal, certains cristaux ATR sont
multi-réflexions, c’est-à-dire que le faisceau laser se réfléchit un grand nombre de fois à la
surface, multipliant ainsi le nombre d’ondes évanescentes générées (Figure 37).
Figure
37.
Principe
d’un
cristal
http://chemgroups.ucdavis.edu/~land/ATR.html).
ATR
multi-réflexions.
(D’après
100
Le domaine infrarouge, situé entre 4000 cm-1 et 400 cm-1 (longueurs d’onde comprises
entre 2,5 et 25 μm), correspond au domaine d'énergie de vibration des molécules. Toutes les
vibrations ne donnent pas lieu à une absorption, cela va dépendre aussi de la géométrie de la
molécule et en particulier de sa symétrie. En effet, il existe différents modes
vibrationnels, symétriques ou asymétriques : les élongations (étirements) ν et les déformations
δ, dans le plan ou hors du plan (Figure 38).
Figure 38. Type de vibrations des molécules soumises à une longueur d’onde: élongations
symétriques (a, b) et asymétriques (c, d), déformations, dans le plan, symétriques (e, f) et
asymétriques (g, h) et déformations, hors du plan, symétriques (i, j) et asymétriques (k, l).
La position des bandes d'absorption dépend en particulier de la masse des atomes ainsi
que de la différence d'électronégativité entre ces atomes. Ainsi, pour un matériau de
composition chimique et de structure données, correspond un ensemble de bandes
d'absorption caractéristiques permettant d'identifier le matériau.
Suite à la réception du signal par un détecteur, la signature de l'intensité en fonction de
la position du miroir est convertie en un spectre infrarouge par une opération mathématique
appelée transformée de Fourier. Ce spectre est la moyenne de nombreux signaux obtenus
101
après avoir effectué plusieurs acquisitions (scans) de l’échantillon. Le nombre de scans est ici
de 32.
Les informations obtenues à partir des spectres peuvent être qualitatives et
quantitatives. D’un point de vue qualitatif, les longueurs d'onde auxquelles l'échantillon
absorbe sont caractéristiques des groupements chimiques présents dans le matériau analysé.
Les spectres obtenus sont donc spécifiques de ce matériau. Des tables permettent d'attribuer
les absorptions aux différents groupements chimiques présents (Annexe 1). Un même
groupement peut donner lieu à plusieurs types de vibrations (élongations ou déformations,
symétriques ou asymétriques) et donc, à des absorptions à différentes fréquences, ou nombres
d’onde.
D’un point de vue quantitatif, l'intensité de l'absorption à la longueur d'onde
caractéristique est reliée à la concentration du groupement chimique responsable de
l'absorption. En mesurant l'aire du signal caractéristique, il est possible de comparer la
proportion d'un groupement chimique donné par rapport à un autre. Dans ce cas, les
informations obtenues sont semi-quantitatives. D’un point de vue pratique ces travaux de
thèse s’intéressent à la formation de biofilm à la surface des membranes NF. La membrane
NF 200 possède un spectre spécifique aux groupements qui la composent (Figure 39, Annexe
2). Les groupements polysulfones de la membrane fournissent notamment des signaux autour
de 1110 cm-1 (double liaison des cycles aromatiques), 1016 cm-1 (groupements Ether) et 1151
cm-1 (groupements sulfones) qui se trouve dans la même zone que les signaux de biofilm
(Doumeche et al., 2007; Her et al., 2000). En effet, un massif entre 900 et 1200 cm-1
correspond principalement à des signaux révélant la présence de polysaccharides et d’acides
nucléiques (ADN-ARN) ce qui rend la comparaison des aires délicate.
102
Figure 39. Spectres IR d’une membrane NF neuve (a) et d’une membrane après plusieurs
années de fonctionnement (b). Les flèches verte (≈ 1650 cm-1) et bleue (≈ 1550 cm-1)
désignent respectivement la bande Amide I et Amide II toutes deux caractéristiques des
protéines. La flèche rouge montre un pic à 1040 cm-1 généralement majoritaire du massif
entre 900 et 1200 cm-1 représentant la matrice d’exopolysaccharides et le flèche noire indique
le pic de sulfones autour de 700 cm-1 qui est un des pics de référence de la membrane NF.
Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation
de plusieurs spectres IR.
Il est décidé de mesurer la hauteur des pics de biofilm pour évaluer la concentration
relative de ceux-ci. La présence d’une couche de biofilm s’accompagne d’une diminution des
signaux de membrane. Donc le fait de faire un rapport de hauteur entre les signaux de biofilm
et les signaux de membrane donnera une double indication sur l’évolution de la concentration
relative des constituants du biofilm mais aussi sur le recouvrement de la membrane par ce
biofilm. Ces rapports de hauteurs de pics sont nommés « valeurs relatives de signaux IR ».
Les pics choisis pour les protéines et les polysaccharides sont respectivement les pics autour
de 1650 cm-1 et 1040 cm-1 (pics majoritaires du biocolmatage des membranes en
fonctionnement depuis plusieurs années : Figure 39, Annexe 2). Pour la membrane, c’est le
pic des sulfones autour de 700 cm-1 qui est utilisé (pic hors des signaux de biocolmatage et
toujours visible lorsque les membranes sont fortement colmatées : Figure 39, Annexe 2).
L’évaluation de ces valeurs relatives (1650 cm-1 / 700 cm-1, 1040 cm-1 / 700cm-1) représente
un compromis pour l’évaluation semi-quantitative du biocolmatage des membranes. Pour
confirmer les résultats obtenus avec les valeurs relatives des signaux amide I, les valeurs
relatives de la bande amide II (1550 cm-1 / 700cm-1) également caractéristiques des protéines
ont été calculées (Annexe 5 bis).
103
b. Application
Des coupons de membranes d’une surface d’environ 1 cm2 sont découpés et séchés à
l’air à une température de 40°C. En effet, l'eau absorbe fortement à 1640 cm-1 (Chittur, 1998)
correspondant aux vibrations de déformation de la liaison OH. Elle peut donc représenter un
signal parasite pour la bande amide I des protéines dont le maximum d'absorption est autour
de 1650 cm-1. Pour résoudre ce problème, plusieurs solutions peuvent être envisagées:
 Le degré d'hydratation du biofilm et du support n’est pas maîtrisé, et d’ailleurs n’est
pas maîtrisable. Il parait donc difficile de déterminer quelle quantité de signal liée à
l’eau il faut exactement soustraire car la teneur en eau des échantillons n’est pas
quantifiable.
 Il aurait été possible de deuterer les échantillons pour remplacer l'eau. Cependant, le
temps de contact pour remplacer toute l'eau par du D2O n'est pas connu et les effets de
l'évolution du biofilm ou de son décrochage à la surface de la membrane par cette
opération sont également un facteur qui n'est pas maîtrisé.
 La solution choisie a été de sécher le dépôt de colmatage à l'air dans une étuve à une
température de 40°C. Cette méthode présente également des désavantages car
l'ensemble de l'eau ne peut être complètement retiré. En effet, le biofilm est un
matériau très hydraté, l'eau libre doit s'évaporer rapidement, mais il est difficile
d'évaluer le devenir de l'eau liée. Cependant, la méthode par séchage est simple et
permet de conserver sur les coupons toute la matière présente initialement fournissant
des avantages non négligeables comparée aux autres méthodes. De plus, plus le
biofilm est abondant, plus la quantité d'eau résiduelle après séchage doit être
importante donc même si cette eau apporte un biais, elle oriente tout de même
l'analyse dans le bon sens.
Le séchage peut également apporter des légers décalages des bandes représentatives du
biofilm, mais les valeurs pour les calculs semi-quantitatifs ont toujours été relevées au
maximum d'absorption. Donc parmi les 3 méthodes potentielles, c'est celle ci qui a été retenue
car c'est celle dont les biais sont les moins gênants.
Les coupons de membrane séchés sont placés tels quels sur le cristal et compressés
avec une force toujours identique pour obtenir un contact équivalent entre tous les
échantillons et la surface du cristal. Le spectromètre utilisé est un modèle Tensor 27 de
marque Brucker. Ce spectromètre est équipé d’un cristal ZnSe avec un faisceau laser
104
pénétrant l'échantillon sur une épaisseur d'environ 1 µm avec un angle de 45°. L’acquisition
des spectres s’effectue à l’interface solide-air à température ambiante (20 ± 2°C). Les spectres
sont collectés à une résolution de 2 cm-1. Chaque spectre obtenu est une moyenne de 32 scans
et est enregistré sous le logiciel OPUS. Les spectres sont analysés entre 2000 et 600 cm-1 car
les signaux d’intérêts se trouvent dans cette gamme. Enfin, pour chaque spectre, une ligne de
base est effectuée pour ne garder que les signaux spécifiques à l’échantillon analysé.
Selon les études, le nombre de coupons et donc de spectres obtenus sont différents.
Les graphiques présentés pour l’étude sur l’influence des matières organiques dissoutes et
pour les points J7 et J80 de l’étude cinétique sont l’accumulation de 5 spectres donc 5 endroits
différents de la membrane. Le nombre de spectres récoltés lors de ces études ayant montré un
manque de significativité statistique pour l’analyse semi-quantitative (valeurs relatives), il a
été décidé d’augmenter le nombre d’acquisitions. Ainsi, tous les graphiques présentés pour les
autres temps de la cinétique et toutes les autres études ultérieures sont l’accumulation d’au
moins 15 spectres réalisés en des points différents de la membrane.
2. Mesure de l’activité du biofilm par ATPmètrie
a. Principe
La concentration en adénosine triphosphate (ATP) a été déterminée par luminescence
à l’aide du test luciférine-luciférase. Le test est basé sur la capacité de production de lumière
par la luciférase suite à la transformation de son substrat, la luciférine qui dépend directement
de la présence d’ATP. La réaction s’établissant est la suivante :
Luciférine + ATP + 02
Mg2+
Luciférase
oxyluciférine + AMP + pyrophosphate + C02 + photons
La quantité de photons ainsi émise est proportionnelle à la quantité d’ATP présente
dans l’échantillon analysé. L’intensité de lumière émise est mesurée à l’aide d’un
luminomètre qui comporte une chambre à échantillon, un détecteur, un processeur qui traite le
signal reçu et une sortie permettant de lire les résultats. La lumière peut être quantifiée et son
intensité peut être exprimée en nombre de photons. La longueur d'onde de ces photons se situe
généralement entre 400 et 700 nm. On note également la présence d’un tube
105
photomultiplicateur qui va "multiplier" les photons à l'aide de plusieurs dynodes afin que les
photons émis en faible quantité par un échantillon biologique soient mesurables par le
détecteur.
b. Application
Des coupons de membrane avec une surface de 9,6 cm² ont été découpés et placés
dans des tubes à hémolyses de 5 ml. Après ajout de 3 ml d’eau ultrapure, les échantillons sont
congelés à -24°C pour être conservés et analysés par la suite. Après décongélation, les
échantillons sont soniqués à l’aide d’un Sonicateur de type Sonifier® S250A (Branson
Ultrasons, Rungis, France) afin de libérer l’ATP des bactéries pendant 5 minutes (50%
bruit/silence, puissance 4) en présence de glace. La quantité d’ATP est mesurée à l’aide d’une
solution réactionnelle préparée à partir d’un Kit de détermination d’ATP Invitrogen (Eugene,
Oregon, USA). La solution réactionnelle pour la mesure d’ATP est la suivante :
 8,9 ml d’eau ultrapure stérile
 0,5 ml de tampon de réaction 20X (tampon tricine (TRIS+glycine) 500 mM, pH 7,8,
MgSO4 100 mM, EDTA 2 mM, azide de sodium 2 mM).
 0,1 ml de DTT 0,1 M
 0,5 ml de D-luciférine 10 mM
 2,5 µl de luciférase 5 mg/ml
On réalise une gamme étalon de différentes solutions d’ATP de concentration
différentes. Pour la réaction, 30µL d’échantillon sont mélangés à 270 µl de solution
réactionnelle dans un microtube. On mesure la quantité de photons émis par les échantillons
grâce au luminomètre Sirius (Berthold Detection System GmbH, Pforzheim, Allemagne)
donnant un résultat en RLU/s (Relative light unity/s). Cette luminescence est rapportée à une
quantité d’ATP en picomoles grâce à la gamme étalon. Puis à une quantité d’ATP par unité de
surface de membrane.
106
3. Analyse du dépôt de colmatage par rhéologie
a. Principe
La rhéologie est une branche de la physique qui étudie l’écoulement ou la déformation
d’échantillons sous l’effet de contraintes qui leur sont appliquées. Cette discipline permet de
caractériser les propriétés mécaniques telles que la viscosité et l’élasticité de matériaux en
déformant l’échantillon par l’application d’une contrainte.
La viscosité est une résistance à l’écoulement, synonyme de frictions internes. Les
unités en sont le Pascale.seconde (Pa.s) et son symbole est . Tous les fluides présentent des
propriétés visqueuses. Mais si ceux-ci possèdent une structure relativement complexe, ils
présentent également des propriétés élastiques. Cette élasticité se manifeste en particulier par
le fait que, lorsqu’on applique ou supprime brutalement un cisaillement, il apparaît un régime
transitoire pendant lequel la structure de l’échantillon évolue avant de se stabiliser.
Dans le cas d’une solution de polymère, par exemple, l’application brutale d’un
cisaillement va faire évoluer la conformation des macromolécules d’une configuration repliée
sur elle-même à une conformation plus étirée. La macromolécule, en passant de l’état de
repos à l’état d’équilibre sous cisaillement, emmagasine de l’énergie élastique qu’elle peut
restituer à l’arrêt du cisaillement : tout se passe comme si la macromolécule jouait le rôle de
ressort. L’étude des paramètres caractérisant la viscoélasticité donne des informations sur la
nature et l’état de polymérisation d’une macromolécule.
Classiquement, deux grands types d’analyses sont effectués : les analyses en mode
rotatoire et en mode oscillatoire.
L’analyse en rotation permet d’étudier la viscosité (en Pa.s) en appliquant une vitesse
de cisaillement (contrainte en s-1). La diminution de la viscosité de l’échantillon en fonction
de la vitesse de cisaillement appliquée est une caractéristique de rhéofluidification et
réciproquement l’augmentation de la viscosité en fonction de la vitesse de cisaillement est une
caractéristique de rhéoépaississement. Au contraire, un fluide est dit newtonien si sa viscosité
est indépendante de la contrainte appliquée (cas de l’eau).
En oscillation, avec un balayage de fréquence et un balayage de déformation, on peut
déterminer non seulement le comportement visqueux mais également le comportement
107
élastique qui sont représentés par le module de conservation ou module élastique (G’ en Pa) et
le module de perte ou module visqueux (G’’ en Pa).Un matériel est dit élastique lorsqu’il se
déforme immédiatement lors de l’application d’une force et retourne à sa forme initiale
lorsqu’on arrête la contrainte. Un matériau visqueux se déforme continuellement par un
phénomène d’écoulement si la contrainte est toujours appliquée. Ainsi, la présence d’un G’ et
d’un G’’ permet de dire que le système est viscoélastique car il possède à la fois des
caractéristiques analogues à celle des solides élastiques et des caractéristiques de fluides
visqueux.
Lors de ce type d’analyses, les déformations imposées à l’échantillon peuvent
engendrer une destruction du réseau macromoléculaire qui le constitue. Il faut donc se situer
dans un domaine de déformation où l’échantillon peut se déformer sans modification de sa
structure : c’est le domaine linéaire. La mesure du G’ et du G’’ sont valables dans ce domaine.
Un test de fluage permet de caractériser le comportement viscoélastique d’un biofilm
(Towler et al., 2003). Ce test comporte deux étapes : la première consiste à appliquer une
contrainte de cisaillement constante par rotation pendant un temps donné et la seconde
correspond à l’arrêt ou suppression de cette force. La mesure de la déformation de
l’échantillon au cours de ces périodes renseigne sur le caractère élastique et ou visqueux de ce
dernier (Figure 40).
Figure 40. Test de fluage déterminant le comportement élastique et ou visqueuse en réponse à
une force appliquée. Une contrainte constante est appliquée au temps zéro et cette contrainte
est arrêtée au temps T. Schéma adapté d’une étude sur la relaxation des biofilms (d'après
Shaw et al., 2004).
108
Un solide élastique idéal répond au stress instantanément à t = 0 par une déformation
instantanée. La déformation reste alors constante jusqu’à la suppression du stress à t = T,
temps auquel le matériel se détend et reprend sa conformation initiale.
Un fluide visqueux idéal répond à un stress imposé constant sur t Є [0, T] par une
déformation linéaire en fonction du temps. Lorsque t = T, il n’y a pas de retour à la forme
initiale.
Un fluide viscoélastique idéal répond avec les caractéristiques d’un solide élastique et
d’un fluide visqueux.
b. Application
Les mesures rhéologiques sont effectuées avec un rhéomètre rotatif cône/plateau
RheoStress 150 de marque Thermoelectron (Courtaboeuf, France). Ce rhéomètre est équipé
d’un plateau fixe sur lequel est déposé l’échantillon et d’un cône qui va venir au contact de
l’échantillon pour appliquer une contrainte (Figure 41).
Figure 41. Photographies du rhéomètre RheoStress 150 et du dispositif cône/plateau.
109
Une fois l’échantillon en place, le système est recouvert d’huile de silicone et d’une
cloche pour éviter tous les phénomènes d’évaporation et maintenir une température constante
dans l’enceinte.
Les échantillons de biofilm sont récoltés par grattage délicat de la surface des feuillets
de membranes NF après autopsie. Le biofilm gratté est conservé à 4°C en chambre humide
dans des boîtes de pétri stériles le temps de réaliser les manipulations.
Les analyses en oscillation et en rotation sont effectuées pour l’étude sur la cinétique
de développement bactérien à partir du jour 475 car précédemment la quantité de biofilm est
trop faible. Pour les mêmes raisons, les tests de fluages sont menés uniquement au jour 717 et
sur la membrane en fonctionnement depuis 7 ans. L’ensemble des analyses est réalisé à une
température constante de 20°C.
L’analyse en rotation de la viscosité soumise à des contraintes (vitesses de
cisaillement) croissante est réalisée entre 0,1 et 20 s-1.
Les mesures de G’ (module élastique) et de G’’ (module visqueux) en mode
oscillatoire sont conduites dans une gamme allant de 1 à 100Hz. La réponse du biofilm aux
oscillations harmoniques est étudiée avec une déformation constante faible de 0,05 pour
s’assurer que les signaux recueillis seront dans le domaine linéaire.
Lors des tests de fluage en rotation, la déformation des échantillons en réponse à une
contrainte constante de 30 Pa est mesurée pendant 10 minutes. A partir de ce temps, la
contrainte est stoppée pendant 5 minutes pour évaluer la relaxation des échantillons.
Pour toutes ces expériences, un cône de 6cm/2° Ti est utilisé.
4. Détermination de la mouillabilité par mesure d’angles de contact
a. Principe
Cette méthode macroscopique permet de rendre compte de l’aptitude d’un liquide à
s’étaler sur une surface par mouillabilité (Zisman, 1964). Lorsqu’une goutte de liquide est
déposée sur une surface solide plane, l'angle entre la tangente à la goutte au point de contact et
la surface solide est appelé angle de contact θ (Figure 42). La mesure de l'angle de contact θ
110
permet également d'accéder à l'énergie de surface du liquide et du solide, tout en discriminant
les composantes polaires ou apolaires de cette énergie (van Oss, 1995). En effet, la forme
d’une goutte à la surface d’un solide est régie par trois paramètres, les tensions superficielles γ
présentes aux différentes interfaces : solide-vapeur γSV, solide-liquide γSL et liquide-vapeur
γLV (Figure 42). Ces trois grandeurs et l'angle de contact θ sont reliés par l’équation de
Young : γSV - γSL = γLV cos θ. La mesure de l’angle de contact θ permet également d’obtenir
des informations sur l’homogénéité chimique et physique de la surface.
Figure 42. Tensions superficielles γ et angle de contact θ d’une goutte de liquide déposée sur
un support solide.
Dans le cas où le liquide utilisé est l’eau, la mesure de l’angle de contact θ permet de
définir le caractère hydrophile (θ < 90°, grande énergie de surface) ou hydrophobe (θ > 90°,
faible énergie de surface) d’une surface (Figure 43).
Figure 43. Angle de contact θ formé par une goutte d’eau sur une surface hydrophile (a) et
hydrophobe (b).
111
b. Application
Des coupons de membranes d’environ 1 cm2 sont découpés après autopsie et séchés à
l’air à une température de 40°C. Le fait de sécher le dépôt fait partie de la méthode car comme
pour l'infrarouge, le degré d'hydratation du biofilm n'est pas maîtrisé. Si les coupons de
membrane ne sont pas séchés, l'eau à la surface du biofilm va interagir avec la goutte d'eau
ultrapure déposée lors de l'analyse. La goutte va s'étaler et donner une valeur erronée de
l'angle de contact qui ne sera plus celle des constituants intrinsèques du biofilm. C'est pour
cela qu'il est également important de relever rapidement la valeur de l'angle de contact car
lorsque le biofilm se réhydrate, la goutte a tendance à s'étaler au fur et à mesure du temps.
Les coupons séchés sont collés à l’aide d’un ruban adhésif double face sur des lames
de verre pour s’assurer que la surface est plane (caractéristique importante pour mesure de
l’angle de contact). Lors de ces expérimentations, seule l’affinité de l’eau (caractère
hydrophobe ou hydrophile) pour les membranes recouvertes ou non de biofilm est évaluée.
Pour cela, une goutte d’eau ultrapure (déionisée) (Milli-Q, Millipore) de 25 µL est déposée
sur les supports testés. Chaque mesure d’angle de contact est effectuée au moins 3 fois par
condition. C’est à dire que l’angle de contact d’une membrane NF est au moins évalué avec 3
coupons découpés sur cette membrane. Les mesures d’angle de contact θ sont effectuées à
température ambiante à l’aide d’un goniomètre (Krüss G10, Hambourg, Allemagne), muni
d’une micro-seringue et d’une caméra (Figure 44).
Figure 44. Représentation schématique de la mesure d’angle de contact à l’aide d’un
goniomètre.
112
5. Mesure des paramètres hydrauliques et de qualité d’eau
Les deux paramètres de filtration des membranes utilisés sont la perméabilité
membranaire (Kw) et le facteur de colmatage longitudinal (FCL). Kw rend compte de la
capacité de la membrane à produire du perméat sous l’effet de la pression. C’est un paramètre
physico-chimique qui peut être relié à la structure et à la charge de la membrane. FCL
renseigne sur la perte de pression qui s’installe le long du module de filtration lorsque la
membrane est colmatée (pression mesurée à l’entrée et à la sortie du tube). Il est représentatif
de la surface du dépôt de colmatage. Lorsque la membrane se colmate, le Kw diminue et le
FCL augmente.
Des débitmètres et des manomètres ont été installés afin de mesurer en continu pour
chaque pilote : le débit d’alimentation Qa, le débit de perméat Qp, le débit de concentrat Qc,
la pression d’alimentation Pa et la pression du concentrat Pc. Les données des capteurs sont
transmises vers une centrale de mesure via leur sortie électronique. Ces données sont
nécessaires au calcul mathématique de Kw et de FCL.
a. Calcul du Kw
Le calcul de Kw est réalisé grâce à l’équation suivante :
Kw 
Qp
TCF  S  Peff
Kw : perméabilité (L.h-1.m-2.bar-1) à 25°C
Qp : débit de perméat (L.h-1)
S : surface de la membrane (m²)
TCF : le facteur de correction de température déterminé selon l’équation 1,038T-25 où
T (température de l’eau °C)
∆Peff : pression transmembranaire efficace (bar). Elle correspond au surplus de pression
appliquée par rapport à la pression osmotique, c’est le moteur de la filtration
113
P  Pc
 a  c –  
∆Peff   a
p
 – Pp – 

  
   

Pa, Pc, Pp : pression de l’alimentation, du concentrat et du perméat (bars)
a, c, p : pression osmotique de l’alimentation, du concentrat et du perméat (bars)
b. Calcul du FCL
Le calcul de FCL est réalisé grâce à l’équation suivante :
(L) t  (Qm) 
Nouveau FCL 

(L)  (Qm)t 
1, 7

( FCTL )
( FCTL ) t
(ΔL)t : la perte de charge longitudinale mesurée à l’instant t, DPI (bar). Cette valeur
correspond à la différence de pression existante entre l’entrée et la sortie du module NF.
(ΔL)° : la perte de charge longitudinale mesurée au démarrage quand les modules sont neufs
Qm=(Qa+Qc)/2=(2×Qa-Qp)/2
(FCTΔL)° le facteur de correction de température au démarrage
FCT=A2+B2×T avec A2=1,1878 et B2=-0,0075
(FCTΔL)° le facteur de correction de température calculé à l’instant t.


( DPI ) t  (2  Qa  Q p ) 
Nouveau FCL 


( DPI )  (2  Qat  Q tp ) 
1, 7

(1,1878  0,0075  T )
(1,1878  0,0075  T ) t
c. Détermination de la qualité de l’eau
La qualité de l’eau alimentant les membranes NF est déterminée selon les études par
mesure du carbone organique total (COT), du carbone organique dissout (COD) ou du
carbone organique dissout biodégradable (CODB). Le COT et le COD sont mesurés avec un
analyseur de carbone total (Bioritech, Chamarande, France) utilisant une réaction
d’oxydation du carbone organique par du persulfate. Cette réaction est suivie par une
détection du CO2 produit par la réaction d’oxydation en infrarouge. Le CODB est déterminé
114
par incubation de bactéries fixés sur du sable dans un réacteur fermé selon la norme XP T
90-319 et la procédure développée par Joret et Lévi (Her et al., 2007).
Au cours de l'étude sur pilote indépendant visant à réduire le CODB dans l'eau
d'alimentation, la qualité microbiologique de l'eau d'alimentation a été déterminée par mesure
du nombre de microorganismes vivants et totaux. Ces deux paramètres ont été évalués en
faisant une moyenne des 14 prélèvements réalisés sur les 20 semaines de l'étude. Chaque
prélèvement d'eau d'alimentation de 50 mL est filtré sur une membrane Nucleopore (DMF
Schumacher, Gonesse, France) possédant un seuil de coupure à 0,22 µm. Le nombre de
microorganismes vivants et totaux sont obtenus respectivement par marquage au DAPI
(Sigma, Saint Quentin Fallavier, France) et au 5-Cyano-2,3-Ditolyl Tetrazolium Chloride
(CTC) (Coger, Paris, France). Les membranes après filtration sont incubées à l'obscurité 20
minutes avec une solution de DAPI à 2,5 µg/mL ou 2 heures avec une solution de CTC à
0,68 mg/mL. Après un rinçage à l'eau distillée stérile, les morceaux de membrane marqués au
DAPI (excitation/émission: 364/454 nm) et au CTC (excitation/émission: 360/630 nm) sont
respectivement recouverts d'huile à immersion (Olympus, France) ou de tampon glycine
(Pasteur Diagnostics, Marnes la Coquette, France) et placés entre lames et lamelles.
Les lames sont observées en microscopie à épifluorescence et la quantification du nombre de
microorganismes vivants ou totaux est effectuée par comptage respectif de 20 champs ou 10
champs pris de façon aléatoire. La moyenne des microorganismes vivants et totaux par unité
de surface est rapportée au nombre de microorganismes vivants et totaux moyen par unité de
volume dans l'eau d'alimentation.
Lors de l'étude sur l'effet de l'irradiation de l'eau d'alimentation par des UV sur la
formation de biofilm NF, la viabilité des microorganismes dans l'eau d'alimentation a été
testée en présence et en absence d'UV. Pour cela, 3 fois 100mL de chaque eau d'alimentation
ont été prélevés. Chaque prélèvement de 100 mL a été filtré sur une membrane Biosart
(Satorius, Goettingen, Allemagne) possédant un seuil de coupure de 0,22 µm. La viabilité des
cellules microbiennes a été déterminée à l'aide d'un Kit Live/Dead Bacligth bacterial viability
(Invitrogen, Cergy-Pontoise, France). Cette coloration différentielle est basée sur une
différence de perméabilité cellulaire vis-à-vis de ces deux colorants en fonction de l’intégrité
de leur paroi. En effet, lorsque les cellules microbiennes sont au contact d'un mélange des
deux colorants, les cellules vivantes laissent pénétrer seulement le SYTO 9, le retiennent et
apparaissent en vert (excitation/émission: 480/500 nm). Les cellules mortes possèdent une
115
paroi abîmée qui laisse pénétrer les 2 colorants et seul l'iodure de propidium est retenu. Ce
dernier fluoresce en rouge (excitation/émission: 490/635 nm).
Dans chaque condition, 3 morceaux de membrane provenant des 3 échantillonnages de l'eau
d'alimentation sont découpés. Ces coupons de membrane d'1cm2 sont incubés pendant 20
minutes à l'obscurité avec un mélange de SYTO 9 et d'iodure de propidium. Après un rinçage
à l'eau distillée stérile, les morceaux de membrane sont fixés entre lames et lamelles avec du
Mowiol (Calbiochem, Meudon, France).
Les lames sont observées en microscopie à épifluorescence et la quantification du nombre de
microorganismes est effectuée par comptage de 10 champs pris de façon aléatoire sur les 3
coupons de membrane. La moyenne des microorganismes morts et vivants par unité de
surface est rapportée au nombre de microorganismes morts et vivants moyen par unité de
volume dans l'eau d'alimentation.
6. Tests statistiques
Les tests statistiques utilisés au cours de cette thèse sont utilisés pour comparer les
échantillons sont le test de Student suivi du test de Fisher. Lorsque le risque P est inférieur à
0,05 alors les différences entre échantillons sont considérées comme significatives.
116
Résultats
117
I. Cinétique de formation d’un biofilm sur membrane de
nanofiltration en fonctionnement dans une usine de
production d’eau potable
A. Développement du biofilm NF
Le biocolmatage des membranes de nanofiltration de l’usine de production d’eau de
Méry sur Oise est étudié pendant 717 jours. L’étude est réalisée sur un pilote intégré à la file 6
de l’usine ce qui permet d’étudier les conditions de filtration réelles de l’usine sans pour
autant perturber son fonctionnement. Ce pilote est sur le modèle de l’usine constitué de 3
étages (Figure 29). Les étages 1, 2 et 3 contiennent respectivement 4, 2 et 1 tubes de pression.
Chaque tube de pression est lui-même composé de 6 modules de nanofiltration branchés en
série.
Ne seront présentés ici que les résultats pour les membranes de l’étage 1 du pilote file
6 qui filtrent directement l’eau d’alimentation telle qu’elle est sans modification de sa qualité
du fait de la technologie par nanofiltration. Le flux surfacique alimentant les membranes est
maintenu autour de 17 L.h-1.m-2.
Durant la période de l’étude, le biofilm est analysé à différents points de cinétique
d’alimentation : après 7, 80, 475 et 717 jours de fonctionnement.
1. Analyse du développement du biofilm NF en imagerie
Le développement des biofilms à la surface des membranes de nanofiltration d’eau
débute de la même manière que des biofilms de laboratoire dont la croissance est largement
décrite dans la littérature. Le biofilm formé sur les modules de nanofiltration commence par
une étape de fixation de cellules microbiennes à la surface de la membrane NF. Après
marquage au DAPI et visualisation par microscopie à épifluorescence, les microorganismes
adhérents apparaissent en bleu clair ou en blanc sur un fond bleu car la membrane NF possède
un caractère autofluorescent. Après 7 jours de fonctionnement (J7), des microorganismes de
formes et d’arrangements spatiaux variés sont présents sur les membranes : principalement
des bacilles et des coques majoritairement seuls ou sous forme de petits agrégats de quelques
cellules dispersés à la surface de la membrane (Figure 45,a). Certains bacilles forment des
118
chainettes ne dépassant généralement pas une dizaine d’individus. En plus du marquage
éparpillé majoritairement retrouvé à la surface de la membrane, certaines zones beaucoup plus
denses sont visibles (figure 45, b). Ces régions correspondant à des microcolonies de plus
grande taille sont intensément marquées et n’ont généralement pas de forme géométrique
particulière. Certaines de ces microcolonies ont une structure sphérique, d’autres une structure
elliptique ou n’ont pas de structure géométrique particulière. La technique de microscopie à
épifluorescence ne permettant pas une acquisition des images en plusieurs dimensions, ces
gros agrégats bactériens apparaissent globalement sous une forme cotonneuse, un peu floue,
rappelant les nuages.
Figure 45. Photographies obtenues par microscopie à épifluorescence de la membrane après 7
jours de fonctionnement après coloration au DAPI. Grossissement x630. Deux zones
d’organisation distincte des bactéries adhérentes sont visualisées.
Après 80 jours de fonctionnement (J80) la microflore est plus diversifiée. En effet, les
morphologies des microorganismes et leurs organisations spatiales sont bien plus variées qu’à
J7. En plus des morphologies présentes à J7, on observe des bactéries filamenteuses (Figure
46, f, g), quelques formes qui semblent correspondre à des amibes de type thécamoebien
(figure 46, a, b), quelques algues et des assemblages bactériens formant des chaînes
circulaires ou linéaires, des sphères, des ellipses ou encore des agrégats bactériens sans
véritable forme géométrique. (Figure 46, c, d, e).
119
Figure 46. Photographies réalisées à différents temps de la cinétique de développement
bactérien illustrant la biodiversité. Les observations sont faites en microscopie à
épifluorescence après marquage au DAPI (a, b, c, d, e, f, g) ou en microscopie électronique à
balayage après déshydratation et recouvrement avec une pellicule platine (h, i, j, k, l, m).
120
Après 475 et 717 jours de fonctionnement, le développement des cellules
microbiennes tend à former de très gros agrégats en 3 dimensions ce qui rend l’observation et
l’acquisition des différentes morphologies en fluorescence plus difficile. Ces observations
microscopiques à épifluorescence ont été précisées par des observations en microscopie
électronique à balayage. En effet, par rapport à la microscopie à épifluorescence, le MEB
retranscrit mieux la topographie des biofilms, permet de mieux définir les morphologies
observées et de leur attribuer une identification probable selon la géométrie et la taille des
structures (Figure 46). Des bacilles et des coques de différentes tailles sont présents : leur
longueur est comprise entre moins d’un micron et 5 µm et leur diamètre est compris entre
moins de 0,2 µm et environ 1,5 µm, respectivement. Il existe des bactéries d’aspect
filamenteux sans septum visible ou constituées d’une association de cellules bactériennes
individuelles (longs bacilles formants de longues chaines : Figure 46 m). Certaines bactéries
formant de longs assemblages peuvent correspondre à des bactéries photosynthétiques de type
cyanobactérie comme Anabaena sperica (Figure 46 j). On observe aussi des microorganismes
eucaryotes : des amibes du groupe des thécamoebiens et des algues unicellulaires (Figure 46,
h, i et k, l, respectivement). Les thécamoebiens observés sont des prédateurs se nourrissant
des biofilms pouvant correspondre à Pleurophrys et Euglypha (Figure 46, h, i).
A J7, la majorité des polysaccharides révélés par le marquage par des lectines couplées
à des fluorochromes est localisé au niveau des agrégats bactériens. Plus les microorganismes
sont concentrés à un endroit donné, plus les lectines fixées aux polysaccharides sont intenses
et abondantes au niveau de cette zone (Figure 47). A J80, le biofilm est plus abondant, plus
épais et bien plus structuré par rapport à J7. En effet, après 7 jours de fonctionnement, la
membrane est principalement colonisée par des microorganismes dont les cellules
individualisées sont parfaitement observables, la proportion de carbohydrates étant faible.
Après 80 jours de fonctionnement, les polysaccharides s’organisent autour des microcolonies
et occupent un espace important par rapport à l’espace occupé par les microorganismes
(Figure 47).
121
Figure 47. Photographies obtenues par microscopie à épifluorescence de la membrane après 7
(a, b, c) et 80 (d, e, f) jours de fonctionnement après triple marquage au DAPI (bleu), aux
lectines d’Arachis hypogaea : AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc , rouge) et de Triticum
vulgaris : TV-FITC (résidus (glcNAc)2, vert). Grossissement x630.
L’observation de ces mêmes échantillons en microscopie confocale permet de préciser
l’organisation de la biomasse à la surface des membranes NF (Figure 48).
122
Figure 48. Images de la surface membranaire obtenues par microscopie confocale après 7
jours (a), 80 jours (b), 475 jours (c) et 717 jours (d) de fonctionnement après triple marquage :
DAPI (bleu), lectine AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc, rouge), lectine TV-FITC
(résidus (glcNAc)2, vert). Les flèches représentent le sens d’interprétation des projections dans
l’épaisseur (ZX et ZY), de la membrane vers la surface du biofilm.
L’élimination du bruit de fond lié à l’autofluorescence de la membrane NF permet de
mieux appréhender les proportions relatives des différents résidus marqués. Ces observations
révèlent que l’étape initiale du biofilm NF est gouvernée par la synthèse de polysaccharides
portant majoritairement des motifs galactosamines et glucosamines marqués respectivement
par les lectines AH et TV. Les résidus saccharidiques marqués par AH sont organisés sous
forme de nuages très fluorescents et petites fibres épaisses. Ceux marqués par TV, BS, CA,
UE, LE sont petits et ponctiformes à ce stade de développement (Figure 48, Annexe 3). Tous
les motifs saccharidiques marqués par les lectines sont beaucoup plus abondants à J80 par
rapport à J7 (Figure 48, Annexe 3). Les motifs galactosamines marqués par la lectine AH
majoritaires au jour 7 restent parmi les plus représentés. Les résidus fucoses et glucosamines
123
marqués respectivement par les lectines UE et LE qui étaient peu présents après 7 jours de
fonctionnement, deviennent également abondants. Les motifs galactoses, glucosamines et
mannoses marqués respectivement par BS, TV et CA semblent un peu moins nombreux
(Annexe 3). Conjointement à cette modification des proportions des polysaccharides, une
augmentation de la biodiversité est observée entre J7 et J80. Des réseaux de polysaccharides
synthétisés par les microorganismes au cours de leur développement sont visibles en plusieurs
points de la membrane à J80. Ces réseaux sont principalement révélés par le marquage avec
les lectines AH, UE et LE. Ils sont constitués de fibres ramifiées et enchevêtrées qui jouent
probablement un rôle de renforcement de la cohésion et donc de la résistance de ce biofilm
aux contraintes mécaniques (Figure 49).
Figure 49. Observation en microscopie confocale de la membrane après 80 jours de
fonctionnement après triple marquage : DAPI (bleu), lectine AH-TRITC (résidus β-gal(1>3)galNAc, rouge), Lectine TV-FITC (résidus (glcNAc)2, vert). Les flèches représentent les
projections dans l’épaisseur (ZX et ZY), de la membrane vers la surface du biofilm.
Le développement du biofilm entre 80 et 475 jours de fonctionnement se traduit
principalement par une densification et une augmentation du recouvrement horizontal de la
membrane. L’observation du biofilm en microscopie confocale après marquage fluorescent
révèle la présence de microcolonies plus volumineuses et plus denses. Tous les motifs
saccharidiques marqués par les lectines fluorescentes sont plus nombreux comparés à la durée
de fonctionnement précédente. Tous les polysaccharides révélés sont dans des proportions
124
importantes et semblent être en proportions équivalentes à l’exception des motifs marqués par
la lectine CA qui semblent moins abondants (Figure 48, Annexe 3). L’organisation spatiale
des exopolysaccharides marqués par les lectines reste similaire au temps précédent. On
retrouve les résidus galactosamines, galactoses et fucoses marqués respectivement par les
lectines AH BS et UE qui forment classiquement de gros agrégats ou des réseaux de
filaments. Les motifs glucosamines marqués par les lectines TV et LE sont organisés selon les
zones de façon ponctiforme, en amas ou sous forme de filaments courts ou plus longs. Enfin,
les motifs mannoses reconnus par la lectine CA sont principalement organisés de manière
ponctiforme. A J475, les microorganismes apparemment plus abondants par rapport à J80
sont de moins en moins visibles. En effet, ils sont englués dans une matrice de
polysaccharides très développée et les espaces vides de marquage sont devenus inexistants.
L’augmentation du recouvrement de la membrane par un biofilm plus dense en
polysaccharides est le fait du développement d’un biofilm qui demeure hétérogène par son
relief, sa diversité de peuplement et de composants matriciels. Il existe donc toujours des
zones plus ou moins compactes avec des variabilités de nature polysaccharidique importantes
selon la région observée (figure projection ZX, ZY confocale). La tendance à la densification
et au recouvrement horizontal du biofilm observée après 475 jours de fonctionnement se
poursuit à J717. Les microcolonies sont alors très compactes et intensément marquées par les
lectines utilisées. L’organisation spatiale des exopolysaccharides marqués par les lectines
reste similaire au point précédent. Les microorganismes sont de plus en plus recouverts par la
matrice de polysaccharides. Les polysaccharides formant des réseaux ramifiés et de longues
fibres enchevêtrées sont particulièrement nombreux, ce qui montre un net renforcement de la
matrice du biofilm. L’ensemble des motifs saccharidiques marqués par les lectines
fluorescentes ont progressé quantitativement par rapport au point de cinétique précédent. Les
motifs marqués par la lectine CA restent cependant peu abondants par rapport aux autres
motifs comme après 475 jours de fonctionnement (Annexe 3).
En modélisant les clichés obtenus en microscopie confocale, des images en 3
dimensions peuvent être formées à l’aide du logiciel Imaris. La modélisation obtenue après
717 jours de fonctionnement permet d’illustrer le fort recouvrement de la membrane par la
matrice d’exopolysaccharides (Figure 50).
125
Figure 50. Modélisation de la surface du biofilm NF après 717 jours de fonctionnement.
Cette modélisation est obtenue grâce aux images acquises en microscopie confocale après
triple marquage au DAPI (bleu), aux lectines AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc, rouge)
et TV-FITC (résidus (glcNAc)2, vert). a) et c) représentent deux zones de la surface du biofilm
vu de face. b) et d) montrent respectivement une vue oblique zoomée de a) et c).
La grande majorité des microorganismes est engluée dans la matrice. Quelques
colonies non recouvertes sont tout de même visibles en surface. Celles-ci sont surement dues
à l’apport de bactéries planctoniques qui s’accrochent et colonisent le biofilm déjà présent sur
la membrane. Selon la zone d’observation, les résidus galactosamines et glucosamines
marqués respectivement par les lectines AH et TV n’ont pas la même abondance, ni la même
position dans l’espace. Le biofilm n’est pas plan, il forme en 3 dimensions une succession de
bosses et de creux plus ou moins prononcés. Le relief, la variabilité de composition en
126
polysaccharides et de densité en fonction de la zone contribuent à l’hétérogénéité du biofilm
NF.
Après 475 jours de fonctionnement, par observation en microscopie électronique à
balayage, les microorganismes de différentes formes (bacilles, coques, bactéries
filamenteuses) sont clairement enchâssés dans une matrice extracellulaire comme décrit
précédemment en microscopie à fluorescence (Figure 48). Bien que déshydraté pour
l’application de cette technique, l’architecture hétérogène du biofilm avec des zones de
protubérances et des zones de creux est bien visible. La surface de la membrane est fortement
recouverte à ce stade. A J717, le biofilm ressemble fortement à celui du point précédent même
si la membrane semble légèrement plus recouverte (Figure 51).
Figure 51. Images de la surface de la membrane NF obtenues par microscopie électronique à
balayage après 475 jours (a) et 717 jours (b) de fonctionnement après déshydratation et
recouvrement avec une pellicule platine.
La croissance du biofilm en épaisseur a été suivie par microscopie confocale (Figure 52).
127
Figure 52. Evolution de l’épaisseur du biofilm au cours du temps de fonctionnement.
L’épaisseur est mesurée par observation en microscopie confocale (n=3).
Le biofilm atteint en 7 jours une épaisseur pouvant aller jusqu’à 34 µm au niveau de
certains îlots bien précis. S’en suit une très forte croissance en épaisseur puisque l’épaisseur
moyenne du biofilm est de 54 ± 10 µm après 80 jours. Le biofilm reste cependant hétérogène
du point de vue de sa quantité, de sa composition et de son architecture comme nous l’avons
décrit précédemment. Ainsi, l’observation des projections selon les axes ZX et ZY révèle des
zones plus ou moins compactes avec des variabilités de nature polysaccharidique importantes
selon la région observée et des structures en forme de vallées et de collines (Figure 48). A
J475 puis à J717, le fort recouvrement horizontal de la membrane par du biofilm est
également accompagné d’une très faible croissance verticale. En effet, l’épaisseur mesurée
par microscopie confocale est de 61 ± 15 µm et de 64 ± 4 µm après 475 jours et 717 jours de
fonctionnement, respectivement. La conjonction de ces phénomènes aboutit à une diminution
de l’hétérogénéité de surface bien illustrée par les projections selon les axes ZX et ZY,
hétérogénéité qui était précédemment occasionnée par des zones de non recouvrement. Cela
montre qu’entre J80 et J717, le biofilm croît principalement par augmentation du
recouvrement horizontal et densification.
La forte progression quantitative du biofilm au cours du temps et plus particulièrement
de ses deux paramètres que sont les microorganismes et les carbohydrates de matrice a été
évaluée grâce à une quantification volumique des signaux fluorescents par microscopie
confocale. Cette quantification a été réalisée à partir d’images obtenues en microscopie
confocale pour les marquages au DAPI et aux lectines AH et TV (Voir Matériel et Méthodes
128
partie II.A.2, Annexe 4). L’acquisition des images et leur traitement ont été réalisés dans les
mêmes conditions ce qui permet d’évaluer la variation d’un signal au cours du temps. Cette
approche confirme l’augmentation très forte du volume des microcolonies et de la matrice de
polysaccharides (surtout les résidus galactosamines) entre 7 et 80 jours de fonctionnement
même si les différences ne sont pas statistiquement significatives du fait de la forte
hétérogénéité existante (Figure 48). Entre J80 et J475 le volume de microorganismes marqué
au DAPI augmente très peu. Par contre, le volume des résidus galactosamines marqués par la
lectine AH principalement et des motifs glucosamines marqués par la lectine TV progressent
fortement et de façon significative (P < 0,05). Après 475 jours de fonctionnement, les
microorganismes semblent occuper un volume inférieur à celui de la matrice
d’exopolysaccharides. Entre J475 et J717, tous les signaux évoluent très fortement à la hausse
(P < 0,001, P < 0,01 et P < 0,0001 respectivement pour les signaux DAPI, AH-TRITC et TVFITC) avec une forte modification des proportions relatives des différents motifs de
polysaccharides. A ce stade, le volume de polysaccharides représente la majorité du volume
total du biofilm. Sur la base non exhaustive de la technique utilisée, les polysaccharides
pourraient représenter plus de 90% du volume de biofilm et les microorganismes moins de
10%.
Tableau 4. Quantification volumique des signaux fluorescents du biofilm au cours du temps
par microscopie confocale.
129
2. Analyse du développement du biofilm NF par spectroscopie infrarouge à
transformée de Fourier
L’évolution de la colonisation des membranes NF au cours du temps, décrite ci-dessus
par observation en microscopie à fluorescence, a également été suivie par analyse ATR-FTIR.
Après 7 jours de fonctionnement, une partie des spectres IR des membranes NF présente de
légères modifications comparés aux spectres IR d’une membrane NF neuve (Figure 53,
Annexe 5).
Figure 53. Evolution des spectres infrarouge au cours du temps de fonctionnement des
membranes NF. a), b), c), d), et e) représentent respectivement les spectres d’une membrane
neuve et d’une membrane après 7, 80, 475 et 717 jours de fonctionnement. Les flèches vertes
désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique des protéines et les flèches rouges
montrent un signal (≈ 1040 cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour
appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de
plusieurs spectres IR.
Ces spectres présentent une augmentation du signal amide I (pic proche de 1650 cm -1:
vibration de l’étirement du C=O des groupes peptidiques) résultant principalement de la
présence de protéines. Une croissance des pics proches de 1040 cm-1 est également
observable. La région comprise entre 900 et 1200 cm-1 correspond principalement à des
signaux révélant la présence de polysaccharides et d’acides nucléiques (ADN-ARN)
130
(vibrations des liaisons C-O-C, C-O, de l’étirement des cycles et de l’étirement du P=O de la
liaison phosphodiester : Doumeche et al. 2007). Le couplage des résultats d’infrarouge et
d’imagerie suggère cependant que les signaux IR entre 900 et 1200 cm-1 correspondent
majoritairement aux exopolysaccharides et minoritairement aux acides nucléiques. En effet,
en imagerie la présence d’exopolysaccharides est nettement observable par contre les acides
nucléiques extracellulaires ne le sont pas. Donc dans la suite du texte, ces signaux seront
appelés signaux de polysaccharides. A J80 les signaux correspondant aux protéines et aux
polysaccharides sont plus intenses (Figure 53, Annexe 5). Les signaux de membrane sont
atténués mais la majorité d’entre eux reste bien visibles. A J475, les signaux polysaccharides
deviennent majoritaires, ce qui démontre qu’à ce stade, la matrice du biofilm est très
fortement développée. A J717, les spectres obtenus par ATR-FTIR sont globalement
analogues aux spectres obtenus au point de cinétique précédent. Les signaux des protéines et
des polysaccharides sont intenses avec prédominance des signaux des polysaccharides (Figure
53, Annexe 5). Le massif de signaux correspondant aux polysaccharides est composé de 4
pics visibles à J80 (pics autour de 1080, 1040, 1000 et 970 cm-1). Chaque pic doit
correspondre à la vibration d’un groupement chimique présent au niveau des carbohydrates
qui apporte sa contribution à la formation du massif. L’apparition de ces pics à cette période
concorde avec la diversité des signaux lectines décrite en imagerie. A J475 et à J717, le pic à
1040 cm-1 est majoritaire parmi les différents signaux de polysaccharides, comme c’est le cas
pour des membranes en fonctionnement depuis plusieurs années (Di Martino et al., 2007). A
J475, seul le signal à 1040 cm-1 est visible, les autres pics de polysaccharides étant inclus dans
le massif. A J717, le massif est moins homogène, le signal à 970 cm-1 se démarquant du
massif global. Ces différences de profil pourraient être la conséquence d’une diversification
de la matrice qui s’accompagnerait de modifications des proportions des groupements
chimiques au sein du biofilm au cours du temps. L’apparition de pics de polysaccharides peut
correspondre à des modifications des proportions de polysaccharides de la matrice visibles en
microscopie confocale et par quantification volumique.
Pour évaluer la contamination de la membrane par le biofilm, une approche semiquantitative est utilisée : les valeurs de signaux IR relatives à un signal standard de membrane
(Voir Matériel et méthodes, partie II,B,1). Cette notion de valeur relative repose sur le
principe que par ATR-FTIR, plus la densité et l’épaisseur du biofilm formé à la surface des
membranes sont importantes, plus les signaux qui vont en résulter seront intenses et plus les
pics de membranes seront faibles. Donc pour comparer les différents temps de
131
fonctionnement de l’étude cinétique avec des valeurs chiffrées, le rapport entre les signaux
correspondant au biofilm (Protéines : 1650 cm-1, polysaccharides 1040 cm-1) et un signal
caractéristique de la membrane (700 cm-1) est calculé. La figure 54 présente l’évolution des
signaux relatifs de biofilm au cours du temps.
Figure 54. Evolution des valeurs relatives de signaux IR au cours de la cinétique de
développement du biofilm pour la bande Amide I (1650 cm-1) et pour le pic représentant
majoritairement les polysaccharides (1040 cm-1).
Des signaux de biofilm sont détectés dès J7 : pour la membrane neuve et la membrane
en fonctionnement depuis 7 jours, les valeurs du pic relatif amide I (1650 cm-1) sont
respectivement de 0,25 ± 0,02 et 0,37 ± 0,05. Celles du signal relatif des polysaccharides
(1040 cm-1) sont respectivement 0,03 ± 0,004 et 0,11 ± 0,10. A J80, il y a une augmentation
très importante des signaux relatifs des biofilms. Les valeurs relatives de signaux IR passent
de 0,37 ± 0,05 à 2,47 ± 0,15 pour la bande amide I et de 0,11 ± 0,10 à 2,24 ± 0,28 pour les
signaux des carbohydrates entre J7 et J80, respectivement. Ces différences sont
statistiquement significatives (P < 0,05). A J475, les valeurs relatives de signaux IR pour la
bande amide I évoluent très légèrement à la hausse (2,62 ± 1,28). Cette augmentation n’est
pas significative. Les valeurs relatives des signaux de carbohydrates augmentent de manière
sensible et significative (3,90 ± 2,30, P < 0,01). Ces résultats appuient les conclusions
obtenues par les techniques d’imagerie selon lesquelles les microorganismes augmentent peu
alors que les polysaccharides progressent sensiblement à ce stade. A J717, les valeurs
relatives de signaux IR pour la bande amide I et les polysaccharides augmentent de manière
non significative (3,47 ± 1,76 et 5,04 ± 2,77, respectivement). Ceci pourrait refléter un
132
ralentissement de la croissance du biofilm. Les résultats d’imagerie montrent que cette
croissance, bien que non significative en IR est bien réelle. Cette non signification statistique
de la différence de croissance pourrait provenir de l’hétérogénéité de concentration et de
recouvrement des polysaccharides.
Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II également caractéristique des protéines
suivent la même tendance et ont des significativités statistiques analogues aux valeurs
relatives de la bande amide I (Annexe 5 bis, a).
3. Analyse des propriétés physicochimiques et mécaniques du biofilm NF
Nous venons de voir que le biofilm se développe au cours du temps jusqu’à recouvrir
la totalité de la surface membranaire avec une diminution progressive de l’hétérogénéité de
surface aboutissant à une couche de nature bien différente de celle de la membrane NF neuve.
Ce développement de biofilm se traduit par une diminution progressive de la mouillabilité de
la surface de la membrane colmatée au cours du temps (Figure 55). Dès 80 jours de
fonctionnement, la mouillabilité de la membrane est affectée par le développement du biofilm
NF. En effet, la valeur de l’angle de contact inférieure à 15° pour une membrane neuve atteint
une moyenne de 48,2° ± 11,3 à J80. Cette diminution d’affinité de l’eau pour la membrane se
poursuit de façon linéaire au cours du temps avec des valeurs moyennes d’angles de contact
de 69,6° ± 2,1 et de 79,9° ± 4,5, à J475 et J717, respectivement. Il est à noter que l’écart type
des valeurs de mouillabilité mesurées à J80 est important et que les écarts type des valeurs
mesurées à J475 et J717 sont plus faibles. Cette diminution de la dispersion des valeurs de
mouillabilité mesurées confirme la diminution de l’hétérogénéité de surface observée avec
d’autres techniques analytiques au cours du temps. En effet, quelle que soit la technique
choisie, la dispersion des valeurs par rapport à la moyenne se réduit en fonction du temps.
C'est le cas des proportions des écarts types par rapport à la moyenne pour IR (Résultats,
partie I.A.2), et pour la quantification volumique des signaux fluorescents (Résultats, partie
I.A.1). Les écarts types en valeurs absolues sont également réduits entre J80 et J717 pour
l'épaisseur du biofilm (Résultats, partie I.A.1).
133
Figure 55. Evolution de l’angle de contact de la membrane NF au cours du temps de
fonctionnement.
A partir de 475 jours de fonctionnement, la quantité de biofilm formé permet
d’analyser de nouveaux paramètres indicateurs des propriétés mécaniques du biofilm par
rhéologie. Cette approche n’a pas pu être appliquée aux temps de fonctionnement précédents
car la quantité de biofilm était insuffisante pour procéder aux mesures. Les propriétés
mécaniques du biofilm gratté de la surface membranaire sont déterminées en mode rotatoire et
oscillatoire. Lors des tests en rotation, la viscosité du biofilm âgé de 475 et 717 jours décroît
lorsque la vitesse de cisaillement augmente (Figure 56). Ce type de comportement est
caractéristique du phénomène de rhéofluidification. Le biofilm a une viscosité de 300 Pa.s à
J475 et 370 Pa.s à J717. Sur l’ensemble de la gamme de vitesse de cisaillement utilisée, la
viscosité du biofilm âgé de 717 jours est supérieure à la viscosité du biofilm âgé de 475 jours.
134
Figure 56. Analyse rhéologique de la viscosité du biofilm âgé de 475 et 717 jours soumis à
une vitesse de cisaillement croissante. Les mesures sont obtenues en mode rotatoire.
Les mesures en oscillation permettent la mesure de deux facteurs : le module de perte
ou module élastique G’ et le module de conservation ou module visqueux G’’ (Figure 57).
Pour des biofilms âgés de 475 et 717 jours, les résultats obtenus en oscillation lors d’un
balayage de fréquence (1 à 100 Hz) montrent un domaine linéaire pour lequel G’ et G’’ sont
parallèles entre 1 et 30 Hz. Dans ce domaine linéaire, les valeurs du module élastique (G’)
varient entre 2020 et 3300 Pa et celles du module visqueux entre 600 et 1390 Pa. Ce
comportement traduit le caractère viscoélastique de l’échantillon. Les valeurs du module
élastique sont légèrement plus élevées à J717 par rapport à J475.
135
Figure 57. Analyse rhéologique du module élastique (G’) et du module visqueux (G’’) du
biofilm âgé de 475 et 717 jours soumis à une fréquence croissante. Les mesures sont obtenues
en mode oscillatoire.
Quelle que soit la fréquence appliquée, les valeurs de G’ restent supérieures à celles de
G’’. Ceci est d’après la science des polymères la définition d’un gel. Le biofilm qui se forme à
la surface des membranes NF est donc un gel au sens rhéologique du terme. En mode
oscillatoire, le domaine linéaire et l’allure des courbes restent également inchangés à J717
(Figure 57). Ces faibles augmentations de la viscosité et de l’élasticité concordent avec la
densification du biofilm et la croissance des réseaux fibreux de polysaccharides. Ces
structures assurent une plus forte cohésion du biofilm.
4. Performance de filtration membranaire et qualité de l'eau d'alimentation
Afin de relier l’évolution du développement de biofilm à la surface des membranes NF
à une baisse de performance de filtration, la perméabilité et le facteur de charge longitudinale
(FCL) ont été suivis tout au long de l’étude cinétique (Figure 58).
136
Figure 58. Evolution de la perméabilité membranaire (Kw) (a) et du facteur de colmatage
longitudinal (FCL) (b) au cours du temps de fonctionnement des membranes NF. Les flèches
représentent les périodes d’extraction correspondant à J7, J80, J475 et J717. Les pointillés
verticaux montrent les nettoyages usines effectués.
La perte de perméabilité membranaire a été évaluée par mesure du Kw. Ce facteur
rend compte de l’aptitude d’une membrane à produire du perméat sous l’effet de la pression.
C'est-à-dire que lorsque le Kw diminue, à pression constante, le débit de perméat par unité de
surface baisse également. Lorsque la membrane se colmate, le Kw diminue et le FCL
augmente. La valeur de Kw passe de 5,98 à 5,51 L. h-1. m-2. bar-1 entre 7 et 80 jours de
fonctionnement, soit une perte de perméabilité faible de 8%. Le développement du dépôt de
colmatage et au sein de ce dernier, du biofilm, perturbe donc la filtration assez rapidement
137
même si la baisse totale de perméabilité est encore modérée. La perméabilité membranaire
subit une chute continue tout au long de l'étude. Entre J80 et le nettoyage à J260 (en date du
15/01/07) le Kw passe de 5,51 à 3,02 L.h-1.m-2.bar-1soit une forte baisse de 45%. Ce nettoyage
permet de revenir temporairement à une valeur de Kw de 6,53 L.h-1.m-2.bar-1. Entre ce
nettoyage et J475, le Kw diminue de nouveau de 13 % atteignant 5,68 L.h -1.m-2.bar-1. Après
475 jours de fonctionnent, malgré des nettoyages réguliers, l’établissement d’un biofilm
compact s’accompagne d’une nouvelle diminution des performances de filtration de la
membrane. Le Kw évolue entre les deux derniers points de la cinétique passant de 5,8 à 4,41
L.h-1.m-2.bar-1 soit une baisse de 22%. Donc, la perméabilité membranaire est affectée
rapidement et tout au long de la cinétique avec des pertes de perméabilité importantes dès J80.
Le FCL évolue un peu différemment du Kw. En effet, entre J7 et J80, il n’évolue pas (valeurs
respectives : 0,97 et 0,98). Entre J80 et J475, il augmente de 9% passant de 0,98 à 1,07. Juste
après J475, un nettoyage permet de retrouver une valeur de 0,91. Entre ce nettoyage et J717,
le FCL évolue de 0,91 à 1,20 soit une forte augmentation de 32%. Le colmatage longitudinal
ne varie pas de manière linéaire, son évolution comporte trois phases. Une première phase
pendant laquelle il reste inchangé, une seconde phase pendant laquelle il augmente faiblement
puis une troisième phase d’augmentation très forte.
Pour pouvoir comprendre les différentes phases de croissance du biofilm sur
membrane au cours du temps de l'étude, il est judicieux de s'intéresser à la qualité de l'eau qui
alimente les membranes.
Malheureusement, la qualité microbiologique de l'eau n'est pas testée en amont de la
nanofiltration, donc le nombre de microorganismes qui arrive sur la membrane en fonction de
la période n'est pas connu. Par contre la concentration en carbone organique total (COT) de
l'eau d'alimentation des membranes et sa variabilité au cours du temps sont mesurées. Ce
facteur pourrait avoir son importance soit en agissant directement sur le colmatage de la
membrane soit en agissant indirectement sur la croissance du biofilm NF.
Cependant, il n'y a pas de corrélation claire entre:

La concentration en COT et la baisse de perméabilité membranaire (Kw). Les fortes
concentrations en COT n'induisent pas de diminution nette des valeurs de Kw (Annexe
6).

La concentration en COT et l'augmentation du facteur de colmatage longitudinal
(FCL). Les fortes concentrations en COT n'induisent pas de hausse nette des valeurs
de FCL (Annexe 7).
138

La concentration en COT et la croissance des microorganismes sur la membrane NF
(Figure 58bis). En effet, les périodes de croissance nette des microorganismes ont été
identifiées entre J7 et J80 (courant période chaude 1) et entre J475 et J717 (courant
période froide 2) alors que les périodes de forte concentration en COT correspondent
principalement aux deux périodes froides. De plus, il existe une forte variabilité du
COT entre deux points d'extraction donc il est vraiment difficile de relier la croissance
des bactéries sur la membrane avec ce paramètre.
Figure 58bis. Evolution du carbone organique total (COT) dans l'eau d'alimentation et de la
température de l’eau au cours du temps de fonctionnement des membranes NF. Les flèches
représentent les périodes d’extraction correspondant à J7, J80, J475 et J717.
139
B. Comparaison des biofilms NF après 717 jours et après 7 années de
fonctionnement
La partie des résultats présentés au cours de ce chapitre correspondant à l’analyse de la
texture des biofilms par rhéologie a fait l’objet de la publication « Rheology of biofilms
formed at the surface of NF membranes in a drinking water production unit» parue en Juillet
2008 dans le volume 24 de « Biofouling » pages 235 à 240 (Annexe 21).
L’analyse de la formation de biofilm sur les membranes de nanofiltration de l’usine de
Méry sur Oise pour des durées de fonctionnement variant de 7 à 717 jours a permis de décrire
la cinétique de colonisation des membranes associée à des altérations importantes des
performances de filtration. Cependant, la durée de vie des membranes NF est bien supérieure
à 717 jours et nombre de modules de l’usine ont été en fonctionnement depuis leur mise en
service c'est-à-dire 1999. Nous avons donc analysé le dépôt de colmatage de membranes en
fonctionnement depuis 7 années pour le comparer au dépôt des membranes en fonctionnement
depuis 717 jours. Pour cela, trois techniques ont été utilisées : la microscopie à fluorescence
après un triple marquage au DAPI et aux lectines-TRITC et FITC, la spectroscopie ATRFTIR et la rhéologie.
1. Analyse en microscopie confocale
L’observation en microscopie confocale des échantillons après marquage révèle que la
nature des deux biofilms est analogue (Figure 59).
140
Figure 59. Images de la surface membranaire obtenues par microscopie confocale après 717
jours (a, b) et après 7 ans (c, d) de fonctionnement après triple marquage. a) et c) DAPI (bleu),
lectine AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc : rouge), Lectine TV-FITC (résidus
(glcNAc)2: vert) ; b) et d) DAPI (bleu), lectine UE-TRITC (résidus β-L-fuc: rouge), LE-FITC
(résidus (glcNAc)3: vert). Les flèches représentent le sens d’interprétation des projections
dans l’épaisseur (ZX et ZY), de la membrane vers la surface du biofilm.
En effet, les résidus sucrés marqués sont les mêmes. Par contre, la morphologie du
biofilm et les proportions des polysaccharides marqués sont différentes. En effet, les résidus
galactosamines et fucoses marqués respectivement par les lectines AH et UE (rouge) forment
plus de structures filamenteuses enchevêtrées et moins d’agrégats denses sur la membrane en
service depuis plusieurs années par rapport à la membrane en fonctionnement depuis 717
jours. Les résidus glucosamines marqués par la lectine TV ne présentent pas de différence
sensible entre les membranes. Ceux marqués par la lectine LE sont morphologiquement
proches mais les agrégats sont plus facilement observables au niveau de la membrane en
fonctionnement depuis 7 années. La répartition des microorganismes dans l’épaisseur du
141
dépôt diverge également entre les deux conditions. Sur la membrane en fonctionnement
depuis 717 jours, les microorganismes sont retrouvés à différentes profondeurs dans le biofilm
alors que pour l’autre membrane (7 ans), ils sont présents majoritairement à la surface du
dépôt. Ce phénomène est certainement dû au nombre importants de nettoyages qu’a subit la
membrane en fonctionnement depuis plusieurs années. Ces nettoyages répétés détruisent
probablement une grande partie des bactéries dans toute l’épaisseur du dépôt. Le grand
nombre de microorganismes visibles en surface peut provenir d’un phénomène de
recolonisation de la matrice non enlevée par les procédures de nettoyage.
2. Analyse par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier
La comparaison des dépôts de colmatage formés après 717 jours et après 7 années de
fonctionnement par analyse ATR-FTIR révèle que la progression de recouvrement de la
membrane par le biofilm n’est pas terminée à J717 (Figure 60, Annexe 8).
Figure 60. Comparaison des spectres infrarouge des membranes NF en fonctionnement
depuis 717 jours (a) et 7 ans (b). Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1)
caractéristique des protéines et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1)
caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt
de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
L’analyse qualitative des spectres IR semble montrer une différence de proportion de
certaines liaisons chimiques. En effet, le massif de polysaccharides provenant du biofilm de
142
J717 montre des pics distincts (1040 cm-1 et 970 cm-1) alors que celui de 7 ans ne permet de
distinguer clairement que le pic majoritaire à 1040 cm-1. Cette constatation concorde avec les
différences de proportions de polysaccharides visibles en microscopie confocale.
Les valeurs relatives de signaux IR pour les protéines (≈ 1650 cm-1) sont
respectivement de 3,47 ± 1,76 et de 6,80 ± 1,60 pour les membranes en fonctionnement
depuis 717 jours et 7 ans. Pour les carbohydrates (≈ 1040 cm-1), ces valeurs relatives sont de
5,04 ± 2,77 et 16,68 ± 4,39, respectivement. La comparaison des valeurs relatives de signaux
IR de biofilm montre donc que pour le signal amide I et amide II (Annexe 5 bis, b) comme
pour le signal des polysaccharidiques, les quantités de matière biologique sont
significativement plus importantes pour la membrane la plus âgée (P < 0,0001 et P < 0,00001,
respectivement). Ceci démontre que le biofilm est plus développé sur la membrane en service
depuis 7 années.
L’analyse qualitative et semi quantitative des spectres des deux biofilms suggèrent que
la couche de biofilm sur la membrane la plus âgée est plus homogène. En effet, les différents
spectres de cet échantillon peuvent quasiment se superposer. De plus, les signaux
caractéristiques de la membrane NF, notamment le pic choisi comme référence à 700 cm-1,
sont très fortement atténués pour la membrane en fonctionnement depuis 7 années par rapport
à J717. Ainsi, malgré les nettoyages réguliers, le biofilm poursuit son développement sur la
membrane de façon irréversible et continue au cours du temps tout durant la filtration.
3. Analyse des propriétés physicochimiques et mécaniques des biofilms NF
Les propriétés mécaniques des biofilms formés après 717 jours et 7 années de
fonctionnement ont été comparées par analyse en rhéologie.
Le test de fluage en rotation est utilisé classiquement dans la littérature pour montrer le
caractère viscoélastique d’un échantillon. Il est basé sur l’application d’une contrainte brutale
constante pour évaluer la déformation du matériau. Puis cette force est stoppée brusquement
pour tester la relaxation de l’échantillon.
Les tests de fluage sont appliqués sur les biofilms provenant des membranes en
fonctionnement depuis 717 jours et 7 ans avec une force constante de 30 Pa pendant 10
minutes suivie d’une période de relaxation de 5 minutes (Figure 61).
143
Figure 61. Comparaison du comportement viscoélastique de biofilms NF formés après 717
jours et 7 ans de fonctionnement. Le module de complaisance J est inversement proportionnel
à la contrainte. 1, 2, 3, et 4 indiquent les phases de déformation des biofilms.
La déformation des biofilms NF suit 4 étapes caractéristiques des fluides
viscoélastiques. En effet, la phase 1 correspond à la réponse élastique de l’échantillon
(étirement rapide) soumis à l’application d’une contrainte brusque. La seconde phase traduit
le comportement visqueux du biofilm qui s’écoule. La troisième phase qui fait suite à l’arrêt
de la contrainte est une relaxation élastique rapide. La quatrième phase est un écoulement
visqueux de relaxation pour retrouver l’état initial.
L’analyse des courbes de fluage permet de déterminer les facteurs η0 et G0 qui
correspondent respectivement à la viscosité et à l’élasticité effectives de l’échantillon. Les η 0
des biofilms en fonctionnement depuis 717 jours et 7 ans sont respectivement de 4,94. 106 ±
1,126. 106 et de 3,31. 106 ± 0,66. 105 Pa.s. Les G0 sont respectivement de 1541 ± 102 et de
1378 ± 258 Pa. Les valeurs sont proches mais les légères différences viendraient des
variations de structures moléculaires entre les deux échantillons : il y a plus de fibres
enchevêtrées et moins d’agrégats denses dans le biofilm de la membrane en fonctionnement
depuis 7 ans.
Les analyses effectuées en rotation montrent des divergences dans la réponse des deux
biofilms à une augmentation de la vitesse de cisaillement (Figure 62). Pour une vitesse de
cisaillement de 0,3 s-1, la viscosité est analogue pour les deux biofilms (363 Pa.s versus 370
144
Pa.s, pour J717 et 7 années, respectivement). Au cours du processus de rhéofluidification,
c'est-à-dire lorsque le biofilm se fluidifie avec l’augmentation de la vitesse de cisaillement,
des différences de comportement apparaissent (Figure 62).
Figure 62. Comparaison du comportement visqueux de biofilms NF âgés de 717 jours et 7
ans soumis à une vitesse de cisaillement croissante. Les mesures sont obtenues par rhéologie
en mode rotatoire. Les pointillés rouges matérialisent la vitesse de cisaillement pour laquelle
un changement de pente est observé (biofilm J717).
En effet, sur la gamme de contrainte appliquée, pour la membrane en fonctionnement
depuis 7 années, la baisse de viscosité du biofilm semble uniforme et proportionnelle à
l’augmentation de la vitesse de cisaillement appliquée. Par contre, pour la membrane en
fonctionnement depuis 717 jours, la courbe a une allure différente et présente deux pentes
distinctes autour d’une vitesse de cisaillement de 4,8 s-1. Au-delà de 4,8 s-1, la baisse de
viscosité est plus forte amenant à une viscosité finale inférieure à celle du biofilm âgé de 7
ans. Cette divergence de comportement peut être liée à des différences dans la structure des
deux biofilms comme des variations au niveau des proportions et de l’arrangement de leurs
constituants.
Les analyses rhéologiques obtenues par oscillation ne montrent pas de différence
prononcée entre les deux biofilms (Figure 63). Les valeurs des modules élastiques (G’) et
145
visqueux (G’’) de même que l’allure des courbes rhéologiques en fonction de la fréquence
appliquée résultantes sont proches. Il existe cependant des différences très faibles qui
rejoignent les résultats obtenus avec les tests de fluage. Ainsi, la viscosité et l’élasticité du
biofilm à J717 sont légèrement supérieures au biofilm de 7 ans. Or, le biofilm de 7 ans
possède une concentration supérieure en protéines et polysaccharides comparé au biofilm âgé
de 717 jours. Dans un gel, la concentration en monomères, leur nature et les liens entre
monomères ont un impact sur la viscosité et l'élasticité de la structure. Nos résultats illustrent
donc bien que la concentration des constituants du biofilm NF n’est pas le seul élément
déterminant ses propriétés mécaniques.
Figure 63. Evolution rhéologique du module élastique (G’) et du module visqueux (G’’) du
biofilm soumis à une fréquence croissante pour des membranes âgées de 717 jours et de 7 ans.
Les mesures sont obtenues par rhéologie en mode oscillatoire.
II. Stratégies de lutte anti-biofilm
Deux stratégies peuvent être utilisées pour lutter contre les biofilms : une stratégie
préventive qui consiste en une maîtrise des facteurs impliqués dans le développement du
biofilm et une stratégie curative qui consiste à s’attaquer aux constituants d’un biofilm formé.
Nous avons développé une approche curative par étude de solutions de nettoyage contenant
des activités enzymatiques dirigées contre des composants majeurs des biofilms et une
146
approche préventive d’optimisation des prétraitements de l’eau à filtrer en ciblant le carbone
organique dissout (COD) ou les bactéries planctoniques viables. Les études préventives sont
réalisées sur des pilotes indépendants dont le flux surfacique est maintenu autour de 17 L.h 1
.m-2 comme c'était le cas pour l'étude cinétique de développement microbien sur pilote
intégré à l'usine présentée précédemment.
A. Maîtrise du développement de biofilm par prétraitement de l’eau
d’alimentation
1. Impact de la réduction de la matière organique dissoute sur le biocolmatage
membranaire
Une partie des résultats présentés au cours de ce chapitre fait l’objet de la publication
« Biodegradable dissolved organic carbon concentration of feedwater and NF membrane
biofouling: a pilot train study » parue en Juin 2009 dans le volume 242 de « Désalination »
pages 228 à 235 (Annexe 22).
Le COD et particulièrement sa fraction biodisponible (CODB) constitue l’un des
éléments essentiels de la nutrition des microorganismes. La concentration en CODB est donc
susceptible d’influencer fortement la croissance microbienne, au moins pour la biomasse
planctonique. Deux types de prétraitements, habituellement utilisés dans les process de
potabilisation d’eau, ont été appliqué à une eau de surface afin d’y réduire la concentration en
COD et CODB. Ainsi, l’eau d’alimentation des membranes a subi une préfiltration sur sable
ou une préfiltration sur charbon actif en grains associée à une ozonation. Chacun de ces deux
traitements possède une efficacité différente sur l’enlèvement de la matière organique. Les
valeurs résiduelles de COD et de CODB sont de 1,8 ± 0,4 et de 0,5 ± 0,2 mg C/L pour l’eau
filtrée sur sable et de 1,4 ± 0,3 et 0,3 ± 0,1 mg C/L pour l’eau filtrée sur charbon actif,
respectivement. Le fait que les concentrations en COD et CODB soient inférieures pour l’eau
filtrée sur charbon actif est statistiquement significatif (P < 0,01 pour les deux paramètres).
Les concentrations en microorganismes totaux et vivants sont déterminées respectivement par
marquage au DAPI et au CTC. Les valeurs de microorganismes totaux et vivants dans l’eau
sont respectivement de 5,3 et 3,9 Log cellules/mL pour l’eau filtrée sur sable et de 5,1 et 4,1
Log cellules/mL pour l’eau filtrée sur charbon actif, respectivement. Au vu de ces très faibles
147
différences, la concentration en microorganismes est considérée comme similaire dans les
deux eaux. Ce paramètre n'induira donc pas de différence de biocolmatage entre les deux
membranes.
Après 20 semaines de fonctionnement, le biofilm formé à la surface des membranes
alimentées par les deux eaux est analysé par ATR-FTIR et par microscopie confocale après
marquage au DAPI et aux lectines fluorescentes (AH-TRITC et TV-FITC).
D’un point de vue qualitatif, l’observation en microscopie confocale des échantillons révèle
une structuration du biofilm analogue entre les deux conditions (Figure 64). Par contre, une
différence nette dans la quantité de biofilm formé est observée entre les deux prétraitements.
Figure 64 : Images obtenues par microscopie confocale de la membrane alimentée par de
l’eau préfiltrée sur sable (photo gauche) ou par de l’eau préfiltrée sur charbon actif (photo de
droite) après 20 semaines de fonctionnement. Marqueurs fluorescents : DAPI (bleu), lectine
AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc: rouge), Lectine TV-FITC (résidus (glcNAc)2: vert).
Les flèches représentent le sens d’interprétation des projections dans l’épaisseur (ZX et ZY),
de la membrane vers la surface du biofilm.
Des microcolonies microbiennes et des polysaccharides sont présents à la surface des
membranes. Les polysaccharides sont particulièrement denses au niveau des microcolonies,
ce qui suggère leur origine cellulaire. Les résidus galactosamines marqués par la lectine AHTRITC forment dans les deux cas des agrégats relativement compacts dont l’abondance
dépend de la zone d’observation. Dans le cas des motifs glucosamines reconnus par la lectine
TV-FITC, les structures marquées sont souvent ponctiformes et s’organisent en amas lorsque
leur concentration est particulièrement élevée. En plus de ces structures observées dans les
deux conditions dans des proportions analogues, de nombreuses fibres longues sont également
148
visibles au niveau du biofilm alimenté par l’eau préfiltrée au sable alors que de nombreuses
structures globulaires sont retrouvées pour une alimentation par l’eau préfiltrée sur charbon
actif.
Dans les deux conditions, les biofilms sont hétérogènes, avec des zones de densité
variable. Dans le cas d’une alimentation en eau préfiltrée au sable, le biofilm apparait plus
abondant et plus dense (Figure 64). Cette différence est observée pour la quantité de
microorganismes fixés et d’exopolysaccharides à la surface de la membrane NF.
La modélisation par microscopie confocale de cinq images pour chacune des deux conditions
permet une quantification volumique des signaux fluorescents. Cette quantification confirme
les résultats semi-quantitatifs de l’observation directe des échantillons en microscopie
(Tableau 5). Que ce soit avec le marquage au DAPI ou aux lectines AH-TRITC ou TV-FITC,
le volume de matière marquée est statistiquement plus important dans le cas de l’alimentation
par l’eau filtrée au sable comparée à l’eau préfiltrée au charbon actif (P < 0,0001, P < 0,01 et
P < 0,05, respectivement).
Tableau 5. Volumes occupés par les microorganismes (marquage DAPI) et les
polysaccharides (marquages AH-TRITC et TV-FITC) obtenus par modélisation et traitement
des images de microscopie confocale. Les images des modélisations ayant servi à la
quantification sont reportées en Annexe 9.
L’analyse des membranes colmatées par ATR-FTIR montre des profils similaires pour
les deux conditions (Figure 65, Annexe 10).
149
Figure 65. Effet de la réduction de la matière organique dissoute dans l’eau d’alimentation
sur les spectres IR de membranes NF en fonctionnement pendant 20 semaines. a), b), c) sont
respectivement les spectres obtenus pour une membrane neuve, pour une membrane dont
l’eau d’alimentation est filtrée sur sable ou sur charbon actif. Les flèches vertes désignent la
bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique des protéines et les flèches rouges montrent un
signal (≈ 1040 cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender
l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs
spectres IR.
Ceci démontre que les prétraitements utilisés ne modifient pas la nature des matières
colmatantes à la surface des membranes NF. Cette constatation va dans le sens des
observations microscopiques. Les signaux IR relatifs au signal de membrane correspondant
aux protéines (≈ 1650 cm-1) et aux polysaccharides (≈ 1040 cm-1) sont plus élevés pour une
alimentation en eau préfiltrée sable par rapport à une alimentation en eau filtrée sur charbon
actif (1,36 ± 0,55 versus 1,14 ± 0,45 et 1,13 ± 0,59 versus 0,79 ± 0,45, respectivement).
Cependant, ces différences ne sont pas statistiquement significatives (P > 0,05). L’absence de
différence statistique est probablement due à l’hétérogénéité des biofilms et à une insuffisance
du nombre d’acquisitions de spectres par échantillon (5 spectres IR par échantillon). En effet
la différence de quantité de biofilm observée en ATR-FTIR confirme les précédentes
observations réalisées par les techniques d’observations microscopiques. Pour les études
réalisées dans la suite de ce travail, nous avons augmenté le nombre d’acquisitions de spectres
en effectuant au moins 15 spectres par échantillon.
Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II également caractéristique des protéines
suivent la même tendance et ont des significativités statistiques analogues aux valeurs
relatives de la bande amide I (Annexe 5 bis, c).
150
Le développement de biofilm à la surface des membranes NF induit un biocolmatage à partir
du moment où il est associé à des pertes de performance de filtration membranaire. Pour relier
ces différences dans les dépôts de colmatage des membranes NF à des différences de perte de
performance, les paramètres de filtration membranaire ont été évalués dans les deux
conditions. Pour cela, deux facteurs ont été suivis au cours du temps : la perméabilité (Kw) et
le facteur de colmatage ou perte de charge longitudinale des membranes (FCL) (Figure 66).
Figure 66. Evolution des paramètres de filtration de la membrane NF alimentée par de l’eau
préfiltrée sur sable ou sur charbon actif. Les graphiques de gauche et de droite présentent
respectivement la variation de perméabilité (Kw) et du facteur de colmatage longitudinal
(FCL) en fonction du temps de fonctionnement.
Le Kw de la membrane avec l'eau filtrée charbon actif est plus faible que celui avec
l'eau filtrée sable au démarrage de l'étude (temps zéro). Cependant, il ne faut pas regarder les
valeurs absolues mais les valeurs relatives. C’est une différence de perméabilité entre deux
temps de fonctionnement qu’il faut analyser. En effet, les membranes lors de leur mise en
fonctionnement ne possèdent pas le même Kw au départ, c'est donc l'évolution de ce Kw au
cours du temps par rapport à la valeur initiale qu'il faut suivre. Dans les deux conditions, la
perte de perméabilité due au colmatage de la membrane évolue de la même façon. La
perméabilité de la membrane alimentée avec de l’eau préfiltrée sur sable est de 6,0 L. h-1. m-2.
bar-1 au début du cycle, de 6,3 L. h-1. m-2. bar-1 entre 7 et 15 semaines de fonctionnement et de
à 5,7 L. h-1. m-2. bar-1 à la fin du cycle. Cette valeur finale correspond à une baisse de
perméabilité de 10%. La perméabilité de la membrane alimentée avec de l’eau préfiltrée sur
charbon actif est de 5,4 L. h-1. m-2. bar-1 au début du cycle, de 5,7 L. h-1. m-2. bar-1 entre 7 et
151
15 semaines et termine à 4,9 L. h-1. m-2. bar-1 après 20 semaines de fonctionnement. Cette
valeur finale correspond à une baisse de perméabilité de 14%.
La perte de charge longitudinale pour la membrane alimentée avec de l’eau préfiltrée
sur sable apparaît au bout de 13 semaines comme c’est le cas pour la perte de perméabilité.
Après 20 semaines de filtration, la valeur de FCL a augmenté de 13%. Pour la membrane
alimentée par de l’eau préfiltrée sur charbon actif, la baisse de perméabilité observée ne
s’accompagne d’aucune perte de charge longitudinale. Comme c’était le cas lors de l’étude de
la cinétique du développement du biofilm, il semble que le facteur de colmatage longitudinal
concorde bien avec la quantité de biofilm présente à la surface des membranes.
Donc, mis à part la diminution de perméabilité membranaire qui n’est pas
discriminante, l’ensemble des données recueillies (microscopie confocale, ATR-FTIR, FCL)
montre que le développement de biofilm induit un colmatage d’origine biologique.
L'augmentation de la concentration en matière organique dissoute est associée à une
augmentation du développement de biofilm et du biocolmatage. Ceci est valable dans la
gamme de concentration de COD et CODB de cette étude pilote obtenue par deux
prétraitements différents classiques (préfiltration sable et préfiltration charbon actif couplée à
l'ozonation).
2. Réduction du nombre de microorganismes viables planctoniques
L’une des premières étapes de la formation de biofilm est un transfert de cellules
microbiennes d’une phase liquide à un support solide. Ensuite, les bactéries sessiles vont se
multiplier sur le support et produire des exopolymères. La concentration en bactéries
planctoniques viables va donc déterminer la quantité de cellules pouvant être transférées à la
surface membranaire pour ensuite y développer un biofilm. La technique retenue pour
diminuer le nombre de microorganismes viables dans l’eau d’alimentation est la technique
physique d’irradiation par des rayonnements UV. Dans un premier temps, l’effet des UV sur
la viabilité des microorganismes planctoniques présents dans l’eau d’alimentation est testé.
L’objectif de cette première approche est de déterminer si les UV ont une action létale dose
dépendante et de fixer la dose d’irradiation à utiliser. Une fois cette dose déterminée, l’impact
du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur le développement de dépôt de
biocolmatage sur des membranes NF est déterminé au cours du fonctionnement d’un pilote de
nanofiltration. Un premier cycle de 10 semaines est réalisé avec de l’eau d’alimentation filtrée
sur sable avant d’être irradiée aux UV. Cette eau possède un fort potentiel de biocolmatage
152
pour les membranes NF comme nous l’avons montré dans l’étude précédente. Elle a été
utilisée dans un premier temps pour tester des conditions de fortes concentrations en matière
organique dissoute. Un second cycle de 20 semaines a été mené avec une eau d’alimentation
traitée par du charbon actif en grain puis traitée par ozonation. Cette eau possède des
concentrations en matières organiques dissoutes inférieures et donc un plus faible potentiel de
biocolmatage.
a. Effet de l’irradiation aux UV sur les bactéries planctoniques
La régulation de la dose d’UV appliquée est obtenue par modification du débit de
l’eau d’alimentation. Ainsi, les débits utilisés sont de 11, 14 et 23 m3/h correspondant
respectivement à des doses d’irradiation de 400, 300 et 150 J/m2 lorsque la lampe UV est en
fonctionnement. Plus le débit est lent, plus la dose appliquée est importante. La viabilité
bactérienne a été déterminée par microscopie à épifluorescence après marquage différentiel
des bactéries vivantes et mortes par un mélange SYTO 9 - iodure de propidium.
Dans un premier temps, nous avons mesuré le pourcentage de bactéries mortes et
vivantes dans l’eau à chacun des trois débits utilisés en absence d’irradiation UV. L’objectif
est de mettre en évidence un éventuel impact de la variation du débit sur la viabilité des
bactéries planctoniques. On constate qu’à tous les débits, la majorité des cellules
planctoniques dans l’eau d’alimentation des pilotes sont mortes en absence de toute
irradiation UV. Pour les débits de 11, 14 et 23 m3/h la proportion de bactéries mortes est
respectivement de 83,6 ; 83,8 et 69,6%. Il n’y a pas de différence statistiquement significative
entre les débits de 11 et 14 m3/h. Par contre, le débit maximal de 23 m3/h est associé à une
diminution significative du pourcentage de bactéries mortes en comparaison des deux débits
plus lents (Figure 67, respectivement, P < 0,05 et P < 0,01).
153
Figure 67. Effets du débit de l’eau d’alimentation et de la dose d’irradiation UV sur la
mortalité des bactéries libres. En présence de radiation UV, les débits de 11, 14 et 23 m3/h
correspondent aux doses de 400, 300 et 150 J/m2, respectivement.
Pour ce débit de 23 m3/h, on observe beaucoup de particules en suspension dans l’eau
qui véhiculent des microcolonies de bactéries vivantes (Figure 67 bis). Ces particules ne sont
pas observées pour les deux débits plus élevés. On peut supposer que ce fort débit arrache des
particules métalliques porteuses de fractions de biofilms présents à la surface des
canalisations correspondant au phénomène de biocorrosion couramment décrit dans la
littérature.
Figure 67 bis. Photographie obtenue par microscopie à épifluorescence de particules
transportant des microorganismes vivants. Ces photos sont réalisées à la suite d'une filtration
de l'eau d'alimentation à un débit de 23 m3/h avec une membrane possédant un seuil de
coupure à 0,22 µm. La coloration est réalisée avec du SYTO 9. Les particules probablement
de type métallique apparaissent en marron-orangé et les microorganismes vivants en vert
clair. Le vert foncé provient de l'autofluorescence de la membrane. Grossissement x630.
154
Dans un second temps, nous avons analysé la viabilité bactérienne dans l’eau aux
différents débits en présence d’irradiation UV. Pour les débits de 11, 14 et 23 m3/h (doses de
400, 300 et 150 J/m2, respectivement), la proportion de bactéries mortes passe respectivement
de 83,6 à 88,1 %, de 83,8 à 89,7% et de 69,6% à 73,4%. Les traitements UV augmentent donc
la proportion de bactéries mortes de manière faible mais significative (Figure 67) pour les
doses de 400 et 300 J/m2 (P < 0,001 et P < 0,05, respectivement). L’augmentation très faible
de la proportion des bactéries mortes n’est pas significative pour la plus faible dose (150
J/m2). De plus, pour cette dose minimale, on observe également après irradiation la présence
de particules solides qui véhiculent des microcolonies de bactéries vivantes. Ces particules,
arrachées de la surface des canalisations, doivent protéger les microorganismes de
l’irradiation UV.
L’irradiation UV induit donc de manière dose dépendante une mortalité parmi les
bactéries libres. Par contre, la mortalité induite reste faible même à la dose la plus forte et la
quantité de bactéries libres vivantes qui traversent cette « barrière UV » est de l’ordre de 1000
cellules par ml.
b. Effet de l’irradiation UV sur le colmatage membranaire, alimentation en eau filtrée
sable
Deux pilotes mis en parallèle sont alimentés par la même eau filtrée sable pendant une
durée de 10 semaines. Le pilote 1 est alimenté par une eau non irradiée alors que le pilote 2
est alimenté par la même eau soumise à une irradiation UV de 400 J/m2 (Figure 68). Les
paramètres de performance membranaire (perméabilité et perte de charge longitudinale) sont
mesurés en continu.
Figure 68. Schéma des pilotes NF. Les deux pilotes sont alimentés par la même eau à la seule
différence que l’eau destinée au pilote 2 subit un prétraitement par irradiation UV.
155
Au terme de ces 10 semaines, les modules sont autopsiés et les membranes NF qu’ils
contenaient analysées, par mesure d’ATP dans le dépôt, microscopie à fluorescence après
marquage du biofilm par du DAPI et des lectines couplées à des fluorochromes, par
spectroscopie infrarouge ATR-FTIR et par mesure de la mouillabilité.
Le dépôt formé à la surface des membranes témoin, c'est-à-dire sans irradiation,
contient de nombreux microorganismes principalement organisés en microcolonies. A la
surface membranaire, on observe également des polysaccharides avec une grande
hétérogénéité dans leur organisation, leur disposition et leur densité (Figure 69). Le
dénombrement des microorganismes par observation au microscope à épifluorescence révèle
une concentration moyenne de bactéries fixées de 2,2 x 106 cellules par cm2.
Figure 69. Photographies obtenues par microscopie à épifluorescence de la membrane témoin
après 10 semaines de fonctionnement (absence d’irradiation). Les colorations sont réalisées
par triple marquage au DAPI (bleu), au lectines AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc,
rouge) et LE-FITC (résidus (glcNAc)3, vert). Grossissement x630.
Les motifs galactosamines et glucosamines respectivement marqués par les lectines
AH-TRITC er LE-FITC forment de petites structures ponctiformes bien définies ou des
agrégats denses de plus grande taille souvent circulaires (Figure 70). Les résidus fucoses et
mannoses, respectivement reconnus par UE-TRITC et CA-FITC, forment plutôt de petits
bâtonnets courts et épais. Les résidus marqués par AH et LE sont plus abondants que les
résidus marqués par UE et CA. Il existe des zones fortement concentrées en microorganismes
et en polysaccharides et d’autres plus faiblement colonisées. Ces zones fortement colonisées
constituent des massifs proéminents séparés par des canyons constitués de zones plus
156
faiblement colonisées. L’ensemble constitue des biofilms fortement structurés dans un espace
en trois dimensions (Figure 70).
Le dépôt formé à la surface des membranes alimentées par une eau traitée par
irradiation UV contient une quantité légèrement plus faible de bactéries fixées (1,07 x 106
cellules par cm2). La quantification de ces bactéries est une nouvelle fois obtenue par
comptage direct de 10 champs en microscopie à épifluorescence après marquage de la
membrane NF au DAPI. La moyenne du nombre de microorganismes est rapportée à un cm2.
On observe également des modifications quantitatives et qualitatives des polysaccharides du
dépôt de ces membranes (Figure 70). En effet, les résidus galactosamines et glucosamines
marqués respectivement par les lectines AH-TRITC et LE-FITC sont quantitativement
diminués. Les motifs fucoses et mannoses, respectivement marqués par les lectines UE-TRIC
et CA-FITC, ne semblent pas présenter de changement quantitatif comparés au témoin.
157
Figure 70. Images de la surface membranaire des modules témoins (a, b) et des modules dont
l’eau d’alimentation est prétraitée par des UV (c, d) obtenues par microscopie confocale après
10 semaines de fonctionnement. La coloration est obtenue par triple marquage : a) et c) DAPI
(bleu), lectine AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc, rouge), Lectine LE-FITC
(résidus (glcNAc)3 , vert) ; b) et d) DAPI (bleu), lectine UE-TRITC (résidus β-L-fuc, rouge),
Lectine CA-FITC (résidus α-D-man et α-D-glc, vert). Les flèches représentent le sens
d’interprétation des projections dans l’épaisseur (ZX et ZY), de la membrane vers la surface
du biofilm.
Par contre d’un point de vue morphologique, il existe des différences visibles entre les
biofilms obtenus dans les deux conditions. Quelle que soit la lectine utilisée, la densité de
marquage est bien plus hétérogène après traitement UV. Dans ce cas, les microcolonies
bactériennes forment des zones compactes très intensément marquées entourées de
158
nombreuses zones quasiment vides de marquages. En absence d’irradiation UV, la membrane
est plus uniformément recouverte de biofilm.
Ces observations réalisées par microscopie à fluorescence sont confirmées par les
analyses d’ATR-FTIR et de mouillabilité.
L’analyse des spectres IR du dépôt des membranes des deux pilotes révèle également
une plus grande hétérogénéité du biofilm alimenté par une eau irradiée aux UV (Figure 71,
Annexe 11). Bien que le nombre de spectres réalisés soit le même dans les deux conditions,
un plus grand nombre de spectres sont visibles pour la membrane alimentée par de l’eau
irradiée alors que pour la membrane alimentée par l’eau non irradiée, de nombreux spectres se
chevauchent.
Figure 71. Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 10 semaines. L’eau d’alimentation est filtrée
sur sable. (a) présente les spectres d’une membrane neuve, (b) et (c), absence et présence
d’irradiation UV, respectivement. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650
cm-1) caractéristique de la biomasse et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1)
caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt
de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I sont de 0,87 ± 0,22 pour le
témoin sans traitement et de 0,74 ± 0,25 en cas d’irradiation UV. Les valeurs relatives de
signaux IR pour les polysaccharides sont de 0,52 ± 0,22 pour le témoin et de 0,44 ± 0,29 en
cas d’irradiation UV. Les différences observées entre les deux conditions sont statistiquement
significatives (P < 0,01 et P < 0,05 respectivement pour les valeurs relatives amide I et
polysaccharides). Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II également caractéristique
159
des protéines suivent la même tendance et ont des significativités statistiques analogues aux
valeurs relatives de la bande amide I (Annexe 5 bis, d).
L’irradiation UV diminue également de manière significative la quantité d’ATP
présente dans le dépôt de colmatage des modules. Les valeurs d’ATP du biofilm formé sur les
membranes du module témoin et traitée sont respectivement de 0,68 ± 0,13 et 0,30 ± 0,06
pmoles/cm2. Cette diminution est importante puisqu’elle est de l’ordre de 55% et
statistiquement significative (P < 0,001). Cette différence peut provenir de la plus faible
quantité de biofilm retrouvée à la surface des membranes alimentées par l’eau traitée.
Le recouvrement des membranes par un biofilm, aboutit dans les deux conditions à
une diminution de la mouillabilité de la membrane avec une diminution significativement plus
faible après irradiation UV. Les valeurs d’angles de contact pour la membrane témoin et la
membrane en présence d’irradiation sont respectivement de 83,4° ± 7,6 et de 74,7° ± 4,3 (P <
0,05). Le développement de biofilm se traduit également par une faible baisse des
performances membranaires (Tableau 6). L’irradiation UV n’apporte pas d’avantage sensible
pour diminuer cette perte de performances. Si la perte de charge longitudinale est légèrement
plus faible en cas d’irradiation, la perte de perméabilité est légèrement plus élevée.
Tableau 6. Evolution des paramètres de filtration membranaires durant 10 semaines de
fonctionnement. Kw, perméabilité. FCL, facteur de colmatage longitudinal.
160
c. Effet de l’irradiation UV sur le colmatage membranaire, alimentation en eau filtrée
sur charbon actif en grain puis ozonée
Dans cette seconde étude, l’étape de filtration sur sable est remplacée par une étape de
traitement avec du charbon actif en grain suivie d’une ozonation. De plus, le cycle dure 20
semaines au lieu de 10 dans l’étude précédente. Le pilote 1 sert toujours de témoin et l’eau
d’alimentation du pilote 2 est préalablement soumise à une irradiation UV de 400 J/m2. A la
fin du cycle, les modules sont autopsiés et les membranes NF qu’ils contenaient analysées de
la même manière qu’au cycle précédent.
Avec un prétraitement de l’eau d’alimentation avec du charbon actif en grain suivie
d’une ozonation, on observe un fort développement de biofilm à la surface des membranes
des pilotes, comme lors de l’étude précédente avec une eau d’alimentation préfiltrée sur sable
(Figure 70). Les motifs galactosamines marqués par la lectine AH-TRITC semblent cependant
être plus représentés (Figure 72).
Le biofilm formé à la surface des membranes dont l’eau d’alimentation a été traitée
aux UV présente une différence morphologique par rapport à l’absence d’irradiation (Figure
72). Le marquage par les lectines AH-TRITC et LE-FITC révèle que l’hétérogénéité y est
supérieure. En effet, quel que soit le marquage, des zones compactes et abondamment
marquées par les lectines entrecoupées de zones vides sont visibles. L’irradiation UV semble
donc conduire à la formation d’un biofilm qui recouvre moins la membrane par rapport au
témoin. Cependant, le biofilm reste abondant avec des zones très compactes par endroit. Cette
structuration est particulièrement visible après marquage des résidus galactosamines et
glucosamines respectivement reconnus par les lectines AH-TRITC et LE-FITC, bien plus
abondants que les motifs fucoses et mannoses respectivement marqués par UE-TRITC et CAFITC (Figure 72).
161
Figure 72. Images de microscopie confocale de la surface membranaire du module témoin (a,
b) et du module dont l’eau d’alimentation est traitée par irradiation UV (c, d) après 20
semaines de fonctionnement. La coloration est obtenue par triple marquage : a) et c) DAPI
(bleu), lectine AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc, rouge), Lectine LE-FITC
(résidus (glcNAc)3, vert) ; b) et d) DAPI (bleu), lectine UE-TRITC (résidus β-L-fuc, rouge),
Lectine CA-FITC (résidus α-D-man et α-D-glc, vert). Les flèches représentent le sens
d’interprétation des projections dans l’épaisseur (ZX et ZY) de la membrane vers la surface
du biofilm.
Comme pour le cycle précédent, les observations de microscopie à fluorescence sont
confirmées par les analyses infrarouges. L’analyse des spectres IR révèle des profils de
spectres très proches en présence ou en absence de prétraitement avec une plus grande
hétérogénéité du biofilm alimenté par une eau irradiée aux UV (Figure 73, Annexe 12).
162
Figure 73. Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres
IR de membranes NF en fonctionnement pendant 20 semaines. L’eau d’alimentation est filtrée
sur charbon actif. (a) présente les spectres d’une membrane neuve, (b) et (c), absence et
présence d’irradiation UV, respectivement. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈
1650 cm-1) caractéristique de la biomasse et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm1
) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du
dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I sont de 2,42 ± 0,88 pour le
témoin sans traitement et de 1,23 ± 0,36 pour le biofilm alimenté par l’eau irradiée. Les
valeurs relatives de signaux IR pour le pic de polysaccharides (1040 cm-1) sont de 2,16 ± 1,02
pour le témoin et de 1,29 ± 0,45 pour le biofilm alimenté par l’eau irradiée. Les différences
observées sont statistiquement significatives (P < 0,000001 pour les signaux amide I et P <
0,0001 pour les signaux polysaccharides) et sont bien supérieures aux différences observées
lors de l’étude précédente. Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II également
caractéristique des protéines suivent la même tendance et ont des significativités statistiques
analogues aux valeurs relatives de la bande amide I (Annexe 5 bis, e).
L’irradiation UV diminue également de manière significative la quantité d’ATP
présente dans le dépôt de colmatage des modules. Les valeurs d’ATP du biofilm formé sur les
membranes du module témoin et traitée sont respectivement de 0,40 ± 0,16 et 0,18 ± 0,12
pmoles/cm2. Cette diminution est similaire à celle de l’étude précédente puisqu’elle est de
l’ordre de 55% et statistiquement significative (P < 0,01).
Le recouvrement des membranes NF par un biofilm aboutit à une diminution de la
mouillabilité de la membrane analogue dans les deux conditions. Les valeurs d’angles de
contact en absence et en présence d’irradiation UV sont respectivement de 73,7° et de 75,3°
163
(P > 0,05). L’irradiation UV n’apporte pas de bénéfice quant à la perte de mouillabilité des
membranes NF dans cette étude. Par contre, l’irradiation UV a un impact sur l’évolution des
paramètres de filtration membranaire. Sur ces 20 semaines de fonctionnement, la baisse de la
perméabilité membranaire (Kw) est bien plus faible lorsque l’eau d’alimentation est traitée
aux UV par rapport au témoin (Tableau 7).
Tableau 7. Evolution des paramètres de filtration membranaires sur 20 semaines de
fonctionnement. L’eau d’alimentation est préfiltrée sur charbon actif puis ozonée.
Le facteur de colmatage longitudinal (FCL) augmente fortement sans traitement et
n’évolue pas avec le traitement aux UV. L’impact des UV sur l’évolution des paramètres Kw
et FCL illustrent le même phénomène : le traitement aux UV d’une eau préfiltrée sur charbon
actif et ozonée induit un retard de colmatage de la membrane NF. C’est un retard du
biocolmatage comme l’ont montré les analyses de microscopie confocale et d’infrarouge.
B. Maîtrise des biofilms par traitement des membranes colmatées :
nettoyages chimiques, développement d’un protocole de conservation
des membranes colmatées in vitro compatible avec des essais de
nettoyage
Le dépôt de colmatage formé à la surface des membranes NF est la cause des pertes de
performances initiales de celles-ci. Comme les prétraitements connus ralentissent sa formation
164
mais ne peuvent l’empêcher, il est primordial d’effectuer des traitements de nettoyages
régulièrement. Ces traitements ont pour but d’enlever un maximum de dépôt pour permettre à
la membrane de retrouver ou de se rapprocher de ses paramètres de filtration initiaux. C’est
pourquoi une partie de l’étude s’intéresse aux traitements chimiques.
1. Essais de nettoyages
Par définition, le biofilm est très variable et hétérogène selon les microorganismes qui
le composent, le support sur lequel il se fixe, les conditions environnementales (température,
pression, nutriments…) sous lesquelles il se développe. Les résultats de l’étude cinétique
précédemment décrits soulignent la variabilité de la proportion et de l’agencement des
constituants du biofilm NF en fonction de sa maturation. Une étude détaillée des constituants
du dépôt de colmatage de membranes NF est essentielle à l’élaboration d’un nettoyage adapté.
A l’usine de Méry-sur-Oise, le biocolmatage est le processus principal de formation du dépôt
de colmatage qui se forme à la surface des membranes NF au cours de la production d’eau
potable (Di Martino et al. 2007). La matière inorganique colmatante du dépôt est en grande
partie éliminée par les nettoyages chimiques actuels, ce qui n’est pas le cas de la matière
organique colmatante et en particulier des polysaccharides du dépôt (Di Martino et al. 2007).
Il est donc nécessaire de réaliser des études d’efficacité de nouvelles solutions de nettoyage
anti-biofilm pour améliorer l’efficacité des nettoyages industriels. Avant de réaliser ces tests à
grande échelle, une étape de tests préliminaires in vitro sur des coupons provenant de
membranes en fonctionnement en usine de production d’eau pourrait être une bonne
alternative. En effet, ces essais sont moins contraignants en termes de personnes, de temps et
de coût.
Afin d’identifier des possibilités d’amélioration de l’efficacité des solutions de
nettoyage des membranes colmatées, nous avons comparé l’efficacité de traitements de nature
différente, ciblant des composés organiques de manière globale ou de manière plus
spécifique. Ces traitements ont été testés à différents stades de formation du dépôt de
colmatage correspondant aux points de l’étude cinétique présentée précédemment. Des
traitements basés sur une succession de deux phases ont été utilisés : une première phase
correspond à la solution active contre la matière organique et une seconde phase
correspondant à un traitement par l’acide citrique ayant pour rôle d’éliminer le calcium et de
resserrer les pores de la membrane NF. Trois types de solutions actives contre la matière
biocolmatante ont été testés :
165
 un traitement alcalin (ultrasil 110) qui sera qualifié de traitement chimique (TC)
 un traitement contenant une protéase (Ultrasil 67-69) qualifié de traitement antiprotéique (TAP)
 un traitement alliant l’action de la même protéase (Ultrasil 67-69) et d’enzymes dirigés
contre les polysaccharides de la matrice (pectinase et -galactosidase). Ce traitement
sera nommé traitement multienzymatique (TME).
Ces trois traitements sont testés in vitro sur des coupons de membranes extraites après 7 jours,
80 jours, 475 jours et 717 jours de fonctionnement correspondant aux points d’autopsie des
membranes lors de l’étude cinétique.
L’efficacité des nettoyages est appréhendée par l’élimination de matière colmatante
déterminée par analyse infrarouge. Les nettoyages sont tout d’abord testés avec des coupons
de membrane neuve pour s’assurer qu’ils n’induisent pas de modifications des spectres
infrarouge de la membrane. Quel que soit le type de nettoyage utilisé, les spectres IR obtenus
ne présentent pas de modifications par rapport à une membrane maintenue dans l’eau
ultrapure (Figure 74, Annexe 13).
Figure 74. Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane neuve. Les
graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la membrane neuve
conservée dans de l’eau ultrapure, après application du traitement chimique (TC), du
traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Pour appréhender
l'hétérogénéité potentielle créée par les nettoyages, chaque graphique est l'accumulation de
plusieurs spectres IR.
166
Les solutions nettoyantes ont ensuite été appliquées sur des coupons de membranes
extraites à chacun des temps de fonctionnement correspondant à l’étude cinétique.
Après 7 jours de fonctionnement, les signaux représentatifs du biofilm sont très faibles avant
les nettoyages (Figure 75, Annexe 14). Quelle que soit la solution de nettoyage appliquée, les
signaux de matière biocolmatante disparaissent après nettoyage.
Figure 75. Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 7 jours. Le graphique a) représente les spectres de la membrane neuve. Les graphiques
b), c), d) et e) représentent respectivement les spectres IR de la membrane colonisée par du
biofilm non nettoyée, après application du traitement chimique (TC), du traitement antiprotéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes désignent la
bande Amide I caractéristique des protéines (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le
signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du
dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
Après 80 jours de fonctionnement, tous les nettoyages ont une action sur le biofilm
(Figure 76, Annexe 15). Quel que soit le type de traitement appliqué, la comparaison des
spectres IR avant et après nettoyage révèle une diminution des signaux amide I et de la bande
correspondant aux polysaccharides (Figure 76, Annexe 15).
167
Figure 76. Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 80 jours. Les graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de
la membrane colonisée par du biofilm non nettoyée, après application du traitement chimique
(TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les
flèches vertes désignent la bande Amide I caractéristique des protéines (1650 cm-1) et les
flèches rouges montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (1040 cm-1). Pour
appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de
plusieurs spectres IR.
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I sont de 2,47 ± 0,15 en
absence de traitement, de 1,29 ± 0,26 pour TC, de 1,04 ± 0,34 pour TAP, de 0,91 ± 0,23 pour
TME. Toutes ces différences observées entre le témoin sans traitement et les nettoyages sont
statistiquement significatives (P < 0,00001 ; P < 0,00001 ; P < 0,000001 respectivement pour
TC, TAP et TME).
Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II suivent la même tendance et ont des
significativités statistiques analogues aux valeurs relatives de la bande amide I (Annexe 5 bis,
f). Pour l’enlèvement des protéines, le traitement chimique (TC) est statistiquement moins
efficace que le traitement anti-protéique (TAP) (P < 0,05) et que le traitement
multienzymatique (TME) (P < 0,01). Par contre, le traitement TME ne présente pas de gain
d’efficacité comparé au traitement TAP (P > 0,05). Les valeurs relatives de signaux IR pour le
pic de polysaccharides sont de 2,24 ± 0,28 en absence de traitement, de 1,00 ± 0,37 pour TC,
168
de 0,81 ± 0,65 pour TAP, et de 0,63 ± 0,37 pour TME. Toutes les différences observées entre
le témoin sans traitement et les nettoyages sont statistiquement significatives (P < 0,0001 ; P
< 0,001 ; P < 0,0001 respectivement pour TC, TAP et TME). Pour l’enlèvement des
carbohydrates, le traitement TC est statistiquement moins efficace que TME (P < 0,05) par
contre il ne présente pas de différence avec TAP (P > 0,05). TME ne présente pas de gain
d’efficacité comparé à TAP (P > 0,05).
Tous les nettoyages enlèvent des protéines et des polysaccharides de la surface de la
membrane mais cette élimination de la matière biocolmatante n’est que partielle.
Après 475 jours de fonctionnement, l’observation du profil des spectres IR réalisés
avant et après nettoyage ne permet pas de juger de l’efficacité des traitements (Figure 77,
Annexe 16). En effet, le profil des spectres IR est le même dans tous les cas. Une
comparaison des intensités relatives des signaux de biofilms est donc indispensable pour juger
de l’efficacité des nettoyages.
Figure 77. Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 475 jours. Les graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR
de la membrane colmatée non nettoyée, après application du traitement chimique (TC), du
traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes
désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur
des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de
colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
169
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I sont de 2,62 ± 1,28 en
absence de traitement, de 1,58 ± 0,58 pour TC, de 1,51 ± 0,42 pour TAP, de 1,26 ± 0,50 pour
TME (P < 0,001 ; P < 0,001 ; P < 0,0001 respectivement pour TC, TAP et TME). Les valeurs
relatives de signaux IR pour la le pic de carbohydrates sont de 3,90 ± 2,30 en absence de
traitement, de 2,72 ± 1,22 pour TC, de 2,71 ± 0,94 pour TAP, de 2,33 ± 1,18 pour TME (Dans
tous les cas, P < 0,01). Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II suivent la même
tendance et ont des significativités statistiques analogues aux valeurs relatives de la bande
amide I (Annexe 5 bis, g).
Tous les traitements
permettent
l’enlèvement partiel de protéines
et
de
polysaccharides. Les traitements chimique (TC) et anti-protéique (TAP) ne présentent pas de
différence d’efficacité entre eux. Par contre le traitement multienzymatique (TME) est
significativement le plus efficace pour l’élimination des protéines et des polysaccharides.
Après 717 jours de fonctionnement, l’observation des spectres IR avant et après
nettoyage montre que les trois traitements modifient le profil des spectres de la membrane
colmatée au niveau du massif des polysaccharides (900 à 1200 cm-1) (Figure 78, Annexe 17).
Comme à J475, une comparaison des intensités relatives des signaux de biofilms est
indispensable pour comparer l’efficacité des solutions de nettoyage.
170
Figure 78. Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement
depuis 717 jours. Les graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR
de la membrane colmatée non nettoyée, après application du traitement chimique (TC), du
traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes
désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur
des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de
colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I sont de 3,47 ± 1,76 en
absence de traitement, de 1,53 ± 0,62 pour TC, de 1,08 ± 0,48 pour TAP, de 0,93 ± 0,39 pour
TME. Les valeurs relatives de signaux IR pour le pic de polysaccharides sont de 5,04 ± 2 ,77
en absence de traitement, de 2,45 ± 1,34 pour TC, de 1,57 ± 0,93 pour TAP, de 1,43 ± 0,83
pour TME. Toutes ces différences observées entre le témoin sans traitement et les nettoyages
sont statistiquement significatives (pour les signaux protéines (P < 0,0001 ; P < 0,00001 ; P <
0,001 respectivement pour TC, TAP et TME et pour les signaux polysaccharides P <
0,001 dans tous les cas). Les valeurs relatives en IR pour la bande amide II suivent la même
tendance et ont des significativités statistiques analogues aux valeurs relatives de la bande
amide I (Annexe 5 bis, h).
Pour l’enlèvement des protéines, le traitement chimique (TC) est statistiquement moins
efficace que le traitement protéique (TAP) (P < 0,01), lui-même moins efficace que le
traitement multienzymatique (TME) (P < 0,05). Pour l’élimination des carbohydrates, TC est
171
statistiquement moins efficace que TAP (P < 0,01) et que TME (P < 0,001). TME ne présente
pas de gain d’efficacité comparé à TAP (P > 0,05).
2. Effets du stockage de membranes colmatées sur le biofilm NF et sur
l’efficacité de nettoyage
Une partie des résultats présentés au cours de ce chapitre fait l’objet de la publication
« Effect of storage of NF membranes on fouling deposits and cleaning efficiency» parue en
2009 dans le volume 1 de « Desalination and Water Treatment » pages 307 à 311 (Annexe
23).
Comme décrit dans la partie précédente sur les nettoyages, il est essentiel de trouver
un traitement adapté à chaque type de biofilm qui exprime une grande variabilité selon la
nature des bactéries qui le forme, les conditions environnementales et le support colonisé.
Pour cela, de nombreux tests de nettoyages doivent être pratiqués et avant de pratiquer ces
nombreux tests à grande échelle (pilote ou usine), il peut être utile de les pratiquer sur des
coupons de membrane provenant de membranes usagées. Après extraction de ces modules
membranaires, les essais de nettoyages peuvent être longs et le biofilm étant un dépôt
d’origine biologique, sa composition doit très probablement évoluer en fonction du temps et
des conditions de stockages. Il est donc nécessaire de développer un modèle de conservation
des membranes pour évaluer l’évolution du dépôt au cours du temps et surtout de déterminer
si les nettoyages appliqués conservent la même efficacité au cours de ce vieillissement.
Cette étude repose sur le stockage de coupons de membranes colmatées pendant une
période de huit semaines dans de l’eau ultrapure à 4°C. Ces conditions de stockage ont été
choisies pour limiter la croissance microbienne et inhiber les activités enzymatiques
cellulaires et extracellulaires mais une évolution du dépôt de colmatage qualifié de
« vieillissement » est possible. Pour déterminer l’évolution du biofilm au cours du
vieillissement et ses effets sur l’efficacité de nettoyage, des coupons de membrane NF en
fonctionnement depuis plusieurs années sont analysés au temps zéro, après 4 semaines et
après 8 semaines de stockage avant et après nettoyage in vitro. Les tests pratiqués sont basés
sur deux techniques appropriées à l’évaluation de l’efficacité de nettoyage, l’analyse du dépôt
de colmatage par ATR-FTIR et la mesure de la perméabilité membranaire (Kw).
172
L’analyse du dépôt de colmatage par ATR-FTIR révèle une évolution du biofilm au
cours du temps dans les conditions de stockage choisies (Figure 79, Annexe 18).
Figure 79. Analyse ATR-FTIR de l’évolution du dépôt de colmatage au cours du temps de
stockage. Les graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la
membrane neuve, colmatée non stockée, colmatée et stockée 4 semaines, colmatée et stockée
8 semaines. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges
montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender
l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs
spectres IR.
Avant tout stockage, les spectres présentent une certaine homogénéité, les signaux
caractéristiques des matières colmatantes (protéines et polysaccharides) sont très intenses et
les signaux caractéristiques de la membrane très faibles. Après 4 semaines de stockage, une
hétérogénéité entre les spectres est observée, les signaux de biofilm semblent atténués et les
signaux de membrane augmentés. Après 8 semaines de stockage, le profil des spectres est
analogue au profil observé après 4 semaines.
Pour pouvoir comparer quantitativement les signaux, les valeurs relatives de signaux
IR pour la bande amide I (1650 cm-1) et pour le pic majoritaire des polysaccharides (1040 cm1
) sont calculées pour les différents temps (Tableau 8). Les résultats pour la bande amide II
sont reportés en annexe 5 bis, i.
173
Temps 0
4 semaines de
stockage
8 semaines de
stockage
Valeurs relatives signaux
Valeurs relatives signaux
IR amide I
IR polysaccharides
-1
(≈ 1650 cm )
(≈ 1040 cm-1)
6,80 +/- 1,60
16,68 +/- 4,39
4,32 +/- 2,37
9,62 +/- 5,75
4,15 +/- 2,35
9,39 +/- 5,96
Tableau 8. Comparaison des valeurs relatives de signaux IR de biofilm au cours du temps de
stockage
On observe une baisse significative des signaux relatifs des protéines et des
polysaccharides après 4 semaines de stockage (P < 0,05). Après 8 semaines de stockage, il
n’y a pas d’évolution significative de ces signaux (P > 0,05). Cette modification quantitative
des signaux de biofilm s’accompagne d’une faible hausse de la perméabilité membranaire
observée après 4 semaines de stockage et qui reste stable après 8 semaines. En effet, Kw est
de 5,3 ; 5,8 et 5,6 L. h-1.m-2.bar-1 pour T0, T4 et T8 semaines respectivement.
Cette modification du dépôt de colmatage pourrait avoir une répercussion sur
l’efficacité de nettoyage des solutions utilisées. Pour vérifier si c’est le cas, un nettoyage en
deux étapes est utilisé. Ce traitement consiste en l’application d’une solution enzymatique
alcaline suivie d’une solution acide sur des coupons de membrane ayant subi les mêmes
conditions de stockage que précédemment.
Le nettoyage a un effet visible sur le dépôt de colmatage en absence de stockage
(Figure 80, a et d, Annexe 19). En effet, le nettoyage induit une hétérogénéité entre les
spectres et une augmentation apparente de l’intensité des signaux caractéristiques de la
membrane. L’effet du nettoyage après 4 et 8 semaines de stockage n’est pas détectable par
174
simple observation des spectres. Comme nous l’avons montré dans l’étude précédente, le
nettoyage ne modifie pas la composition chimique du dépôt de colmatage.
Figure 80. Analyse ATR-FTIR de l’effet du vieillissement du dépôt de colmatage sur
l’efficacité des procédures de nettoyage. Les graphiques a), b), et c) représentent
respectivement les spectres IR de la membrane colmatée non stockée, de la membrane
colmatée stockée 4 semaines et de la membrane colmatée stockée 8 semaines. Les graphiques
d), e), et f) représentent les spectres IR des mêmes échantillons respectifs après nettoyage. Les
flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le
signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du
dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
Les valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I (≈ 1650 cm-1) et pour le pic
majoritaire des polysaccharides (≈ 1040 cm-1) sont calculées pour les différents temps de
stockage avant et après nettoyage (Tableau 9). Les résultats pour la bande amide II sont
reportés en annexe 5 bis, j.
175
Temps 0
Avant nettoyage
Temps 0
Après nettoyage
Temps 4 semaines
Avant nettoyage
Temps 4 semaines
Après nettoyage
Temps 8 semaines
Avant nettoyage
Temps 8 semaines
Après nettoyage
Valeurs relatives signaux
Valeurs relatives signaux IR
IR amide I
polysaccharides
(≈ 1650 cm-1)
(≈ 1040 cm-1)
6,80 +/- 1,60
16,68 +/- 4,39
2,34 +/- 1,37
5,07 +/- 2,47
4,32 +/- 2,37
9,62 +/- 5,75
2,58 +/- 1,89
5,35 +/- 4,18
4,15 +/- 2,35
9,39 +/- 5,96
4,03 +/- 1,96
9,42 +/- 5,26
Tableau 9. Comparaison de l’efficacité de nettoyage au cours du temps de stockage par
analyse ATR-FTIR.
Le nettoyage diminue de manière significative l’intensité des signaux relatifs des
protéines et des carbohydrates en absence de stockage (temps 0) et après 4 semaines de
stockage (P < 0,05). Le nettoyage appliqué est efficace pour enlever de la matière biologique
du dépôt avant stockage mais aussi après 4 semaines et ce malgré la modification du dépôt
due au stockage. Par contre, après 8 semaines de stockage, les valeurs relatives des signaux IR
des protéines et des polysaccharides ne sont pas différentes statistiquement avant et après
nettoyage. La procédure de nettoyage n’a aucun effet sur la matière biologique du dépôt après
8 semaines de stockage. Il semble donc que le biofilm soit devenu résistant au nettoyage après
8 semaines de conservation.
Le nettoyage induit un gain de perméabilité de 10, 5 et 5% pour les coupons de
membrane colmatée non stockées, stockées pendant 4 et 8 semaines, respectivement. Le
nettoyage diminue donc le colmatage des membranes NF quelle que soit la durée de stockage
testée. L’efficacité maximale étant observée avant stockage des membranes.
176
Discussion
177
I. Cinétique de développement microbien sur membrane NF
La caractérisation de la cinétique de formation de biofilm à la surface des membranes
NF a révélé de nombreuses similitudes avec des biofilms de laboratoire décrits dans la
littérature, mais également différentes divergences liées aux conditions spécifiques de
croissance lors de la nanofiltration. L’ensemble des résultats obtenus révèle clairement trois
étapes de formation du biofilm : formation de microcolonies adhérentes enchâssées dans une
matrice d'exopolymères, croissance du biofilm par développement des microcolonies
adhérentes avec augmentation de la biodiversité microbienne et maturation du biofilm.
La membrane NF 200 neuve utilisée lors de ces travaux de thèse est très hydrophile
puisque l’angle de contact à l’eau mesuré est inférieur à 15°. D’autres études ont mesuré un
angle de contact d’une trentaine de degrés pour des membranes de même type (Bellona et
Drewes, 2005; Her et al., 2000). Dans notre étude, la membrane neuve a été préalablement
rincée à l’eau ultrapure avant d’être séchée pour les mesures. Cette étape de rinçage pourrait
expliquer la différence de mouillabilité entre les études. Cela dit, la surface d’une membrane
NF200 neuve est hydrophile. La membrane NF200 est faiblement rugueuse (rugosité
moyenne entre 3 et 19 nm et rugosité maximale de 40 nm) et fortement chargée négativement
(Bellona et Drewes, 2005; Her et al., 2000; Marconnet et al., 2009). L’ensemble de ces
propriétés de surface confère à la membrane NF200 un certain degré de résistance à la
colonisation microbienne en comparaison de surfaces chargées positivement (Katsikogianni et
Missirlis, 2004), plus rugueuses (Boyd et al., 2002; Taylor et al., 1998) ou plus hydrophobes
(Tang et al., 2009; Tegoulia et Cooper, 2002). A priori, la membrane NF200 devrait donc être
initialement difficilement colonisable. Ainsi, la colonisation d’une membrane NF270 aux
caractéristiques proches d’une membrane NF200 est plus rapide en comparaison avec une
membrane NF90 plus hydrophobe et plus rugueuse (Subramani et Hoek, 2008). Cependant, la
rétention des matières organiques naturelles (NOM) et de molécules inorganiques par les
membranes NF aboutit à la formation d’un film dont les propriétés de charge et
d’hydrophobie peuvent modifier considérablement les propriétés de surface de la membrane
et doivent faciliter ainsi l’accrochage des microorganismes (Garrett et al., 2008; Jermann et
al., 2007). La formation du film primaire n’a pas été étudiée dans ces travaux de thèse, mais
de nombreuses équipes ont prouvé que des molécules organiques naturelles comme des
protéines et des carbohydrates ou des éléments inorganiques comme les cations divalents sont
178
retenus sur les membranes de filtration et participent activement au colmatage de celles-ci
(Jermann et al., 2007; Seidel et Elimelech, 2002).
Lors du processus de nanofiltration, après 7 jours de fonctionnement, des
microorganismes sont déjà observables à la surface de la membrane NF200. Des bactéries
adhérentes isolées (stade adhérence) et des microcolonies (stade biofilm) pouvant atteindre
une trentaine de micromètres d’épaisseur sont présentes à la surface de la membrane. Ces
structures composées de bactéries enchâssées dans des exopolymères organisées en
microcolonies correspondent au début du stade de maturation du biofilm. Ces résultats sont en
accord avec une autre étude qui relate le développement de biofilm lors de la filtration d’eaux
usées sur membrane NF (Ivnitsky et al., 2007). Dans ce cas, l’adhésion bactérienne initiale est
observée après seulement 8 heures de fonctionnement, la formation de microcolonies après 16
heures et la présence d’un biofilm affectant la perméabilité membranaire après 3 jours de
fonctionnement. La baisse de perméabilité après 7 jours de fonctionnement avoisine les 60%
alors que celle décrite par nos travaux est de l’ordre de 8%. Cette divergence de perte de
performance peut s’expliquer par des conditions expérimentales différentes comme la nature
de la membrane NF, la qualité d’eau (eaux usées versus eau de surface prétraitée), et la
température de l’eau qui est maintenue entre 20 et 34°C au cours de l’étude d’Ivnitsy et al.
(2007) ce qui favorise un développement plus rapide du biofilm. Il faut rappeler qu’au cours
de notre étude cinétique, la température de l’eau d’alimentation est d’environ 14°C lors des
premiers jours de fonctionnement. Le biofilm NF obtenu par filtration d’eaux usées atteint
une épaisseur comprise entre 20 et 30 microns après 7 jours de fonctionnement ce qui est
analogue aux biofilms NF obtenus sur une même période de temps par filtration d’une eau de
surface. Cependant, l'étude d’Ivnitsy et al. (2007) n’est menée que pendant 12 jours et les
valeurs d’épaisseurs ne sont pas décrites pour cette durée. Dans notre étude, le biofilm évolue
peu en épaisseur après 80 jours de fonctionnement et se stabilise aux alentours de soixante
microns. Cette épaisseur de biofilm est dans la gamme d’épaisseur précédemment retrouvée
au niveau de pilotes (20 à 80 µm) et d’usines (3 à 90 µm) sur des membranes de nanofiltration
et d’osmose inverse (Speth et al., 1998; Vrouwenvelder et al., 2008). Ces épaisseurs de
quelques dizaines de microns doivent être le fruit des conditions imputables au support, aux
conditions physicochimiques du milieu (température, nutriments, oxygène….) mais aussi très
certainement aux conditions hydrodynamiques. Des biofilms formés sur des supports en
plastique sous de faibles forces de flux, atteignent des épaisseurs beaucoup plus importantes
comprises entre 1000 et 2000 µm après un mois de croissance (Coufort et al., 2007). Ce
biofilm de 2000 µm soumis à des forces de pression graduelles s’érode en deux phases
179
jusqu’à atteindre une valeur d’épaisseur limite d’environ 200 µm pour une force de 2 Pa. Audelà de cette valeur, les quantités de biofilm ne varient quasiment pas et il reste environ 20%
de sa masse initiale. Il existe donc au sein des biofilms des strates qui possèdent une cohésion
décroissante en s’éloignant de la base. Un biofilm qui croit sous de fortes forces de pression
ne pourrait donc pas atteindre des épaisseurs trop élevées.
Dans notre modèle d’étude, la croissance du biofilm NF obtenu par filtration d’eau de
surface suit une évolution non linéaire. La biomasse augmente de manière très importante lors
d’une phase de croissance initiale qui s’étale sur 80 jours. En même temps, les
polysaccharides augmentent plus modestement. Le biofilm a alors une croissance dans toutes
les dimensions, à la fois verticale et horizontale. Cette période de formation de biofilm
correspond à une période d’augmentation de la température de l’eau qui est passée de 14° à
25°C favorisant ainsi une forte croissance microbienne. En effet, un biofilm, même s’il atteint
un état d’équilibre identique à différentes températures, met plus de temps à se développer à
des températures faibles (Ndiongue et al., 2005). Au cours de cette période, l’établissement du
biofilm modifie les propriétés physico-chimiques et les performances de la membrane : la
mouillabilité et la perméabilité de la membrane diminuent alors que le colmatage longitudinal
n’évolue pas. A 80 jours de fonctionnement, le biofilm demeure très hétérogène et ne
recouvre pas la totalité de la membrane. L’eau doit encore être capable de trouver des
chemins préférentiels au sein du dépôt jusqu’à filtration. Après J80, le biofilm continue sa
progression mais de manière différente : les microcolonies s’étendent plus horizontalement
que verticalement et le biofilm se densifie. On note une étape de croissance lente du biofilm
jusqu’à 475 jours de fonctionnement suivie d’une étape de croissance plus importante jusqu’à
717 jours. Ce changement de comportement peut être lié à la stratégie de colonisation des
microorganismes qui augmentent la proportion des polysaccharides de matrice qui leur
assurent une meilleure cohésion et les protègent contre les forces de flux. De nombreuses
données bibliographiques montrent que les forces de flux ont une incidence forte sur la
structure d’un biofilm (Garny et al., 2008; Pei-Shi et al., 2008; Stoodley et al., 2002).
Un biofilm qui se développe avec des vitesses de cisaillement importantes, comme
c’est le cas dans nos travaux (17 L.h-1.m-2), sera plus compact, plus dense, moins rugueux et
sa proportion en polysaccharides par cellule microbienne sera bien supérieure à un biofilm
formé sous de faibles contraintes mécaniques. De plus, il ne faut pas oublier que le pilote
subit le fonctionnement de l’usine avec des phases successives de nettoyage en ligne toutes
180
les 1000 heures de fonctionnement soit environ tous les 40 jours. Or, il a été montré que ces
nettoyages industriels éliminent la majorité des cellules adhérentes et enlèvent peu de
carbohydrates de la matrice des biofilms (Di Martino et al. 2007). On peut imaginer que la
biomasse est en constante reconstruction entre deux nettoyages alors que la matrice de
polysaccharides est en constante consolidation. Ainsi, les bactéries sont majoritairement
localisées dans une couche superficielle au sein des biofilms NF observés après plusieurs
années de filtration (Di Martino et al. 2007). Cela pourrait être lié à la recolonisation de la
matrice par des microorganismes planctoniques. Cependant, la localisation superficielle de la
majorité de la biomasse fixée peut également s’expliquer par la recherche d’un meilleur accès
à l’oxygène et aux nutriments (Wagner et al., 2009). Ainsi, en absence de nettoyages, des
bactéries de boues activées provenant du traitement d’eaux usées (croissance dans un réacteur
en présence d’un flux) sont principalement localisées dans les couches supérieures du biofilm
lorsque l’âge de celui-ci augmente.
La biodiversité du biofilm s’accentue au cours du temps de fonctionnement avec des
bactéries de différentes tailles, de différentes morphologies qui forment des assemblages
variés dans l’espace. D’autres types cellulaires sont également visibles à partir de 80 jours de
fonctionnement comme des algues, des cyanobactéries et des protozoaires du groupe
thécamoebien. Ces types de vie cellulaire couramment rencontrés dans les eaux de surface se
retrouvent dans les systèmes de distribution et il semble donc naturel qu’ils soient également
présents sur les membranes de filtration (Gilbert et al., 2000; Sibille et al., 1998). Le
thécamoebien étant un prédateur de bactéries, sa présence au niveau des biofilms sur la
membrane NF illustre l'existence d’un écosystème complexe.
L’augmentation de la biodiversité et la croissance microbienne s’accompagnent d’une
modification des proportions des différents motifs saccharidiques ciblés par les 6 lectines
utilisées au cours du temps. En effet, les résidus majoritaires après 7 jours de fonctionnement
sont clairement les galactosamines (β-gal(1->3)galNAc). Après 80 jours et jusqu’à 475 jours
de fonctionnement, l’ensemble de motifs marqués a quantitativement augmenté et leurs
proportions ont changé. Après 475 jours, l'abondance des résidus galactosamines (β-gal(1>3)galNAc), fucoses (β-L-fuc) et glucosamines (glcNAc)3) est analogue. Après 717 jours,
l’abondance et la densité des polysaccharides sont telles qu’une hiérarchisation est difficile à
établir. A ce stade, seule la quantité de résidus mannoses (α-D-man) est clairement inférieure
aux autres. Des différences de proportions en résidus polysaccharidiques en fonction de
181
l’espèce et en fonction du temps ont déjà été observées sur des temps plus courts (Leriche et
al., 2000). A effectifs de populations proches, la quantité de D-mannose et de N-acetyl-Dglucosamine synthétisée varie en fonction de l’espèce (Brevibacterium linens versus
Pseudomonas fluorescens) et fonction de la souche, au sein d’une même espèce
(Staphylococcus sp. E512.2 versus Staphylococcus sciuri CCL101). De plus, la production
relative en résidus saccharidiques varie au cours du temps. Au sein d’un biofilm
monospécifique de S. sciuri, après un jour d’incubation, il y a présence de résidus D-mannose
et N-acétyl-glucosamine. Ensuite, il y a arrêt de la synthèse des motifs N-acétyl-Dglucosamine alors qu’il y a une forte synthétise de résidus D-mannose durant 4 jours. Cela
illustre le lien qui existe entre les proportions de polysaccharides au sein de la matrice d’un
biofilm, son développement et son stade de maturité. La nature des polysaccharides présents
dans la matrice d’un biofilm est également influencée par les forces de flux auxquels il est
soumis. Chez Salmonella enterica, on observe des différences significatives des proportions
de résidus N-acétylgalactosamine, α-L-fucose et N-acétylglucosamine entre un biofilm qui se
développe dans des conditions de faible et de fortes forces de flux (Mangalappalli-Illathu et
al., 2008).
L’analyse des propriétés mécaniques des biofilms NF formés au cours de la production
d’eau potable montre un comportement viscoélastique. Lors de l’application d’un test de
fluage, le biofilm NF présente une réponse rapide de déformation élastique comme un solide
puis une réponse plus lente de déformation visqueuse comme un liquide. Ce comportement
viscoélastique a été démontré pour différents types de biofilms, naturels ou artificiels,
polymicrobiens ou monospécifiques, par des mesures avec un rhéomètre mais également par
des expériences de détachement sous contrainte de flux (Stoodley et al., 2002; Towler et al.,
2003; Vinogradov et al., 2004).
Le temps de relaxation élastique (λ) correspond au rapport entre la viscosité effective
() et le module de perte effectif (G0). Il est calculé sur la base des résultats des tests de
fluage. Le temps de relaxation élastique des biofilms NF de notre étude est d’environ 30
minutes, ce qui est analogue au temps de relaxation élastique de différents types de biofilms
ayant des valeurs de viscosité et d’élasticité très variées (Figure 81) (Shaw et al., 2004). La
réponse d’un biofilm à un stress mécanique semble donc universelle, c’est une réponse
viscoélastique qui permet au biofilm de résister à des variations des forces de flux. Un biofilm
constitue un matériau biologique dont les propriétés visqueuses et élastiques, bien que
182
variables car conditionnées par la biodiversité et les forces de flux, répondent à des règles
universelles.
Figure 81. Tracé de la viscosité effective () en fonction du module de perte effectif (G0)
pour 45 biofilms testés. (D’après Shaw et al., 2004).
Un comportement rhéofluidifiant a été observé pour les biofilms NF soumis à des
vitesses de cisaillement croissantes en rotation (J475, J717 et 7 ans). La rhéofluidification du
biofilm NF est en grande partie réversible lorsqu’on diminue la vitesse de cisaillement ce qui
est caractéristique du phénomène d'hystérèse (Annexe 20). Lors de la réalisation d’allersretours par augmentation puis diminution de la vitesse de cisaillement, les courbes de
diminution puis d’augmentation de la viscosité du biofilm NF sont relativement proches. Ce
comportement rhéologique ne semble pas majoritairement lié à des modifications strictement
irréversibles de la structure du biofilm comme des ruptures de liens covalents entre des
polymères de la matrice. L’origine de la rhéofluidification du biofilm NF sous contrainte
croissante des forces de cisaillement peut donc être recherchée dans la composition
polymérique de sa matrice. En effet, avec l’augmentation de la contrainte appliquée, les
polymères doivent se réarranger pour suivre la direction du flux imposé induisant ainsi une
baisse de la viscosité. Ce phénomène existe pour des polysaccharides seuls comme la
cellulose (Cancela et al., 2005) et le chitosane (Cho et al., 2006).
183
La viscosité et l’élasticité du biofilm NF augmentent faiblement au cours du temps
entre J475 et J717 mais diminuent faiblement ensuite (comparaison J717, biofilm âgé de 7
ans). Cette augmentation de la cohésion du biofilm entre J475 et J717 accompagne les
évolutions des quantités, des proportions et des structures des polysaccharides du biofilm au
cours de son développement (densification avec formation de gros agrégats et augmentation
des réseaux de filaments). La légère diminution de la cohésion du biofilm entre J717 et 7 ans
ne peut pas être reliée à une différence quantitative des polymères de matrice puisque leur
concentration continue d’augmenter mais doit être reliée à des différences qualitatives de ces
polymères. Les variations de la viscosité et de l’élasticité du biofilm NF au cours de sa
maturation peuvent être liées à des différences de nature, de concentration et de structuration
des constituants de sa matrice (Coussot et Grossiord, 2001). En rotation, l’augmentation de la
concentration d’un polymère de polysaccharides comme l’inuline ou l’amidon de maïs, induit
une augmentation de la viscosité initiale et un changement de l’allure de la courbe de
rhéofluidification (Figure 82, a, b, c, d, e, f) (Zimeri et Kokini, 2003). En mélangeant ces deux
polysaccharides dans des proportions différentes tout en gardant une concentration totale en
polymères inchangée, il apparaît un profil de rhéofluidification intermédiaire unique associant
les propriétés des deux polymères (Figure 82, a, b, c).
184
Figure 82. Détermination de la viscosité (η) de solutions contenant des polymères en
proportion variables par application d’une force de cisaillement croissante. Les concentrations
totales en polymères sont de (a) 2, (b) 5, (c) 10, (d) 20, (e) 30, et (f) 40% (poids/poids). Dans
les légendes, le ratio de gauche est l’inuline et celui de droite l’amidon de maïs
(inuline_amidon). (D’après Zimeri et Kokini, 2003).
En oscillation, un gel formé de deux polysaccharides différents (agar et carraghénane)
en proportions variables a un comportement rhéologique intermédiaire par rapport aux gels de
185
polysaccharides constitués d’un seul polymère testés indépendamment (Figure 83) (Norziah et
al., 2006).
Figure 83. Spectres mécaniques du module de conservation (G’) et du module de perte (G’’)
d’un mélange agar/carraghénane (concentration totale en polymères : 1,5% en poids) : 100/0
(triangle), 80/20 (cercle), 60/40 (triangle inversé), 40/60 (losange), 20/80 (carré) à pH 3,5. G’
et G’’ sont respectivement les symboles vides et pleins. (D’après Norziah et al., 2006).
Le nombre de liens et la structuration des réseaux de polymères ont une grande
influence sur leur réponse à la contrainte de cisaillement (Kavanagh et Ross-Murphy, 1998).
Les différences de comportement rhéofuidifiant observées en rotation sous contrainte
croissante de cisaillement entre les biofilms de maturité intermédiaire (J475 et J717) et le
biofilm mature (7 ans) pourraient être liées à des différences d’organisation et de structuration
des polymères au sein de la matrice des biofilms. Deux types d’organisation des polymères de
polysaccharides ont été observés au sein de la matrice des biofilms NF : des gros agrégats et
des réseaux enchevêtrés. Les biofilms de maturité intermédiaire possèdent plus de gros
agrégats et moins de réseaux enchevêtrés de polysaccharides que le biofilm mature. Des
interactions entre ces très gros amas de polymères pourraient conduire à une légère
augmentation de la viscosité et de l’élasticité initiale (en deçà de 4,8 s -1). A des forces de
rotation élevées (au-delà de 4,8 s-1), ces grosses structures qui interagissaient initialement
entre elles se désolidariseraient provoquant une rupture de pente. Cette nouvelle pente serait
la réponse du réseau restant de fibres enchevêtrées. Le réseau filamenteux très développé au
186
sein du biofilm mature serait capable de résister aux fortes forces de cisaillement appliquées
et conserverait un comportement de rhéofluidification linéaire sur l’ensemble de la gamme de
contraintes appliquées. Les agrégats étant plus espacés et moins nombreux ne pourraient pas
interagir et ne participeraient pas à la réponse rhéofluidifiante du biofilm mature. Ces
différences de comportement et d’architecture entre des biofilms NF d’âge différent illustrent
la maturation progressive du biofilm au cours de son développement qui est liée à la fois à
l’évolution de sa biodiversité et à son adaptation à son environnement (Laspidou et Rittmann,
2004).
Malgré ces différences mineures observées au cours de la maturation du biofilm NF, il
n’y a pas de changement profond de son comportement mécanique au cours de sa formation.
Lors des analyses en oscillation effectuées à différents stades du développement du biofilm
NF, la valeur du module de conservation (G’ : module élastique) est supérieure à celle du
module de perte (G’’ : module visqueux) quelle que soit la fréquence appliquée. Dans la
science des polymères, cette caractéristique définit le comportement d’un gel (Kavanagh et
Ross-Murphy, 1998). Les polysaccharides seuls comme les carragenanes ou l’alginate sont
connus pour réaliser des transitions sol-gel dans des conditions physico-chimiques adéquates
(Draget et al., 1998; Fernandes et al., 1991). Ce modèle de transition sol-gel des
polysaccharides au sein du biofilm est compatible avec les propriétés rhéologiques déjà
démontrées pour d’autres biofilms (Stoodley et al., 2002; Towler et al., 2003). La très forte
concentration en polysaccharides du biofilm NF et les propriétés de transition sol-gel des
carbohydrates purifiés suggèrent que les exopolysaccharides jouent un rôle déterminant dans
les propriétés mécaniques d’un biofilm. Cependant, les protéines comme la gélatine sont
également capables de former des gels et la présence ainsi que l’abondance d’un réseau de
protéines extracellulaire n’ayant pas été évalué par ces travaux de thèse, on ne peut pas
exclure la contribution des protéines dans la constitution du gel. De la même manière, malgré
l’absence d’arguments expérimentaux en faveur d’une présence importante d’ADN dans les
biofilms NF, on ne peut pas exclure une participation de l’ADN dans les propriétés
mécaniques de ces biofilms.
Quelle que soit la technique appliquée (test de fluage ou oscillation), le biofilm formé
à la surface des membranes NF a une viscosité et une élasticité supérieure à des biofilms de
laboratoire, que ce soient des biofilms mixtes ou des biofilms monospécifiques formés par
Streptococcus mutans soumis respectivement à un flux de 2 mL.min-1 et 7 mL.min-1 (Towler
187
et al., 2003; Vinogradov et al., 2004). Ainsi, le biofilm NF formé sous de fortes contraintes
hydrodynamiques est un biofilm particulièrement résistant. Ceci est surement la conséquence
de son adaptation structurale (densification, structures filamenteuses, faible épaisseur) aux
conditions drastiques sous lesquelles il se développe.
Le biofilm NF forme un dépôt superficiel qui masque totalement les propriétés de
surface de la membrane de nanofiltration. Cela se traduit par une baisse progressive de sa
mouillabilité. Or, la surface de la membrane constitue la zone de contact avec l’eau pour
réaliser la filtration. On peut donc s’attendre à une baisse de l’efficacité de nanofiltration au
cours du développement de biofilm. Les performances de nanofiltration et donc le colmatage
membranaire ont été évalués par mesure de la perméabilité membranaire (Kw) et du facteur
de colmatage longitudinal (FCL). Le Kw rend compte de l’aptitude d’une membrane à
produire du perméat sous l’effet de la pression. Le FCL rend compte de la baisse de pression
entre l’entrée de l’eau d’alimentation et la sortie du concentrat du module de filtration. Ce
facteur est important en termes de coût d’exploitation. En effet, le pilote, comme le reste de
l’usine, est constitué de 3 étages branchés en série. Si le FCL du premier étage augmente trop,
la pression en sortie du premier étage sera faible et donc les autres étages branchés en série,
bénéficieront d’une pression trop faible pour permettre la production d’eau potable.
La perméabilité membranaire est affectée rapidement et continuellement tout au long de la
cinétique. Ainsi, la perte de perméabilité des membranes NF est inversement corrélée avec le
développement du biofilm.
Le colmatage longitudinal ne suit pas la même cinétique d’évolution que le Kw. Il
évolue en plusieurs phases : une première phase pendant laquelle il reste inchangé, une
seconde phase pendant laquelle il augmente faiblement puis une troisième phase
d’augmentation très forte. Le FCL n’augmente que lorsque le biofilm a atteint un certain
seuil. La mesure des variations du FCL sont peu sensibles et ne rendent pas compte du
biofouling précoce (Vrouwenvelder et al., 2008). Dans une étude récente, Vrouwenvelder et
collaborateurs ont montré que les espaceurs disposés entre les feuillets membranaires avaient
un rôle essentiel dans l’augmentation du FCL (Vrouwenvelder et al., 2009a). De plus, les
conditions hydrodynamiques auxquelles sont soumises les membranes de filtration ont une
influence capitale sur l’accumulation de biomasse sur la membrane et sur l’augmentation du
FCL (Vrouwenvelder et al., 2009b).
188
II. Prétraitements et traitements
A. Prétraitements
Le but des prétraitements est de prévenir au maximum le colmatage des membranes
NF. Pour cela, les prétraitements de l’eau d’alimentation sont habituellement une combinaison
de différentes étapes ayant pour objet de diminuer la concentration en colloïdes,
microorganismes et matière organique (Al-Amoudi et Lovitt, 2007). A Méry-sur-Oise, le
colmatage biologique ou biocolmatage joue un rôle majeur dans le colmatage membranaire
(Di Martino et al. 2007, Doumèche et al. 2007). Deux facteurs majeurs qui influencent le
colmatage biologique sont la concentration en microorganismes viables capables de former un
biofilm sur la membrane et la concentration en molécules organiques biodisponibles, sources
de nutriments qui stimule la prolifération microbienne. Ces travaux de thèse se sont intéressés
à l’impact de ces deux facteurs sur le colmatage de membranes NF dans un modèle de pilote
indépendant de nanofiltration.
A concentration similaire en bactéries planctoniques, la réduction du carbone
organique dissout biodisponible (CODB) dans l’eau d’alimentation réduit sensiblement la
colonisation de la surface membranaire par les microorganismes et la production
d’exopolysaccharides. Malgré cette différence, un biofilm structuré et assez abondant est
présent dans les deux conditions. Ceci est probablement dû à la concentration en CODB qui
reste élevée malgré les traitements, de l’ordre d’une centaine de µg par litre. D’autres études
ont montré précédemment que des concentrations en carbone organique biodégradable plus
faibles, de l’ordre du µg par litre d’eau étaient suffisantes pour permettre la formation de
biofilm dans des conduits de distribution d’eau (Tsai et al., 2004) ainsi que sur des
membranes de nanofiltration et d’osmose inverse (Vrouwenvelder et Van der Kooij, 2001). Il
est donc illusoire de prévenir totalement le développement de biofilm sur les membranes NF
juste en améliorant la maîtrise de la concentration en CODB dans l’eau d’alimentation.
Cependant, l’objectif n’est pas d’obtenir une inhibition totale du développement de biofilm
mais d’améliorer sa maîtrise pour diminuer le colmatage membranaire d’origine biologique.
Lors de cette étude pilote, les marquages fluorescents ont révélé une forte présence de résidus
galactoses au niveau des polysaccharides de la matrice des biofilms NF comme cela a été
189
observé sur les membranes NF de l’usine de Méry-sur-Oise mais également au sein de
biofilms de laboratoire formés à partir d’eau de rivière (résultats de l’étude cinétique,
Doumèche et al. 2007, Neu et al. 2001). Une forte proportion en motifs galactoses semble être
une caractéristique constante des exopolysaccharides constituant la matrice des biofilms
alimentés par une eau de rivière.
L’impact du colmatage sur les performances de filtration de la membrane a été évalué
par mesure continue de la perméabilité membranaire et du facteur de colmatage longitudinal
lors de l’étude pilote. Une augmentation de la perte de charge longitudinale a été observée
uniquement avec l’eau d’alimentation présentant la plus forte concentration en CODB alors
qu’une baisse de perméabilité équivalente a été constatée avec les deux eaux d’alimentation.
D’après les résultats de l’évolution des paramètres hydrodynamiques obtenus lors de l’étude
cinétique, il semble que la perméabilité membranaire soit un paramètre physico-chimique lié à
la structure et à la charge du dépôt de colmatage et que le facteur de colmatage longitudinal
soit lié à la surface de ce dépôt. Les résultats d’ATR-FTIR et de microscopie confocale
montrent que le dépôt est de même nature quelle que soit l’eau d’alimentation. La différence
de potentiel de colmatage entre les deux eaux est quantitative et non qualitative. Il y a donc
une corrélation positive entre la concentration en CODB dans l’eau d’alimentation, le
colmatage biologique et la perte de charge longitudinale. Quand le CODB augmente, le
biocolmatage et la perte de charge longitudinale augmentent aussi. Cependant, d’autres
matières colmatantes comme les colloïdes et les cations divalents peuvent jouer un rôle
important dans les pertes de performances membranaires (Wang et al., 2005). Comme ces
facteurs n’ont pas été évalués lors de cette étude, leur contribution ne peut pas être écartée.
L’impact du paramètre cellulaire de l’eau d’alimentation sur le colmatage
membranaire a été étudié par un prétraitement basé sur l’irradiation aux ultraviolets.
L’irradiation UV sur le biocolmatage de membranes NF a été mise en oeuvre avec deux
qualités d’eau d’alimentation, avec dans un premier temps une eau préfiltrée sur sable
contenant une forte concentration de matières organiques dissoutes et dans un deuxième
temps une eau préfiltrée sur charbon actif en grain puis ozonée contenant une concentration
plus faible en matières organiques dissoutes.
Sur une eau « préfiltrée sable », l’application de la dose maximale d’UV (400J/m3)
réduit faiblement mais de façon significative le nombre de microorganismes vivants dans
190
l’eau d’alimentation. Même si l’efficacité est faible, ceci confirme le premier effet des UV qui
agi comme un agent bactéricide par éclatement de la membrane cellulaire sous l’effet direct
de l’irradiation (Gaid et al., 2006).
Quelle que soit la qualité de l’eau d’alimentation (filtration sable ou charbon) et
l’application ou non d’une irradiation UV, on observe un développement de biofilm sur les
membranes NF. D’un point de vue morphologique, les analyses en microscopie confocale
révèlent de fortes quantités de résidus galactosamines et glucosamines à la surface des
membranes. Cependant, pour les deux concentrations en CODB, l’irradiation UV induit une
diminution du développement de biofilm NF et crée une forte hétérogénéité bien supérieure
aux témoins non irradiés à la surface membranaire. En effet, le biofilm formé en présence
d’UV possède des domaines très denses entourés de nombreuses zones très faiblement
recouvertes. Ce phénomène est observable pour les deux qualités d’eau, mais il est bien plus
prononcé lorsque l’eau est filtrée sur charbon actif. Cette différence d’architecture vient
probablement du fait que le nombre de microorganismes capables de coloniser la membrane
et de se reproduire est inférieur lorsque l’eau est traitée aux UV. Ainsi, ce nombre de
microorganismes viables inférieur après traitement UV passe par la formation de grosses
microcolonies denses mais relativement dispersées. Dans tous les cas, les résultats d’ATRFTIR confirment que les UV diminuent significativement le recouvrement de la membrane
par les constituants protéiques et polysaccharidiques du biofilm. Ceci illustre le second effet
des UV qui ont une action bactériostatique en altérant le capital génétique des
microorganismes (Al-Adhami et al., 2007). Les mutations induites sur l’ADN par l’irradiation
comme la formation de dimères de thymine adjacentes peuvent induire une impossibilité de
réplication cellulaire voir un arrêt de la synthèse protéique nécessaires à la survie
microbienne. De plus, comparé à la filtration sur sable, les effets des UV sur la réduction de la
quantité de biofilm formé sont bien supérieurs lorsque l’eau est filtrée sur charbon actif. Ceci
confirme donc bien que le fait de diminuer la concentration en CODB renforce l’action des
UV même si en terme d’activité, l’abattement dû aux UV est de 55% quel que soit le
prétraitement. Deux hypothèses en accord avec la littérature peuvent expliquer la synergie
entre l’application des rayonnements UV et la diminution du CODB : soit les matières
organiques naturelles moins abondantes dans l’eau pourraient permettre une meilleure
accessibilité des rayonnements UV aux microorganismes planctoniques infligeant donc des
dégâts plus sévères, soit les microorganismes sessiles sur la membrane pourraient manquer de
ces matières organiques dissoutes indispensables aux mécanismes cellulaires de réparations
des dommages occasionnés (Alkan et al., 2007; Camper, 2004).
191
Afin de faire le lien entre quantité de biofilm formé et colmatage membranaire, des
paramètres physico-chimiques (mesure d’angle de contact) et des paramètres de performance
membranaire (perméabilité, perte de charge longitudinale) ont été mesurés. Avec l’eau
d’alimentation filtrée sur sable, la mouillabilité de la membrane est moins altérée lorsque
l’eau d’alimentation est traitée aux UV. Par contre, ce paramètre est insensible à l’irradiation
UV pour l’eau prétraitée par filtration charbon actif et ozonée. L’irradiation UV n’a que peu
d’impact sur l’évolution de la perméabilité membranaire pour les deux qualités d’eau. Après
irradiation UV, la baisse de perméabilité reste inchangée pour l’eau filtrée sable et diminue à
peine pour l’eau préfiltrée sur charbon actif et ozonée. Par contre, la perte de charge
longitudinale est moins forte après traitement UV. Cette amélioration du facteur de charge
longitudinal (FCL) est modérée pour l’eau filtrée sable mais est très marquée pour l’eau filtrée
sur charbon actif et ozonée. On s’aperçoit que plus la formation de biofilm NF est importante
et plus le FCL est élevé comme cela était le cas dans l’étude cinétique du développement
bactérien. Ceci confirme que le développement de biofilm est la cause principale du
colmatage des membranes NF lors de la production d’eau potable à partir d’une eau de
surface comme cela avait été démontré pour l’usine de Méry-sur-Oise (Di Martino et al.,
2007). La synergie des effets antimicrobiens des UV et de la diminution des matières
organiques dissoutes biodisponibles conduit donc à une diminution du biofilm à la surface des
membranes NF s’accompagnant d’une meilleure préservation des paramètres de filtration.
B. Traitements
Les résultats des essais de nettoyage in vitro sur les membranes NF colmatées
montrent clairement que le biofilm NF est sensible aux trois solutions de nettoyage mises en
œuvre. En effet, quel que soit le stade du développement du biofilm, tous les nettoyages
réduisent significativement les quantités de protéines et de polysaccharides présentes à la
surface de la membrane NF. Par contre, la comparaison de l’efficacité des différentes
solutions de nettoyage montre des sensibilités différentes du biofilm en fonction de sa
maturation. Tous les traitements ont la même efficacité envers un biofilm jeune (J7 et J80),
mais le traitement alcalin devient moins efficace que les traitements enzymatiques quand le
biofilm est plus mature (J475 et J717). Généralement, les traitements alcalins agissent par
déstabilisation de la membrane microbienne ou par dénaturation des protéines induisant ainsi
192
la mort cellulaire. Cependant, le pH a un impact sur la structuration des exopolymères
microbiens (Dogsa et al., 2005). Les substances polymériques extracellulaires d’une bactérie
marine constituées principalement de glucose, de galactose et de protéines forment de grosses
structures très denses à pH acide. Ces structures en pelote sont déroulées au fur et à mesure
que le pH augmente et devient basique. A pH 11, le réseau est toujours présent mais il est bien
plus homogène (Figure 84).
Figure 84. Schéma représentant l’effet du pH sur la structure des EPS. (D’après Dogsa et al.,
2005).
L’application de ce modèle au biofilm NF implique une décompaction des
exopolymères de matrice par un traitement alcalin. La densification et l’enchevêtrement des
réseaux de polysaccharides aux cours de la maturation du biofilm NF doivent rendre plus
difficile la déstructuration de sa matrice par le traitement alcalin. Ceci aboutit à un décrochage
partiel moins efficace que les traitements ciblés.
Le traitement contenant une protéase doit cliver les liaisons protéiques existantes entre
les cellules bactériennes ou liant les cellules à la matrice du biofilm conduisant au décrochage
de celles-ci. La localisation et l’organisation des protéines dans la matrice des biofilms NF ne
sont pas connues, il n’est donc pas possible d’analyser plus avant ce mécanisme d’action. Au
193
sein d’un biofilm jeune, le réseau d’exopolysaccharides étant encore peu développé, le
traitement multienzymatique ajoutant une osidase à une protéase n’apporte pas de gain
d’efficacité par rapport au traitement ciblant uniquement les protéines. Par contre, avec un
biofilm plus mature formé après 475 ou 717 jours de fonctionnement, l’ajout d’une osidase
augmente l’efficacité d’enlèvement du biofilm de la surface membranaire par rapport au
traitement par une protéase seule. L’ajout d’enzymes ciblant les carbohydrates doit
désorganiser le réseau complexe de polysaccharides de matrice, effet qui s’ajoute à l’action de
la protéase permettant un meilleur décrochage du biofilm même si celui-ci reste partiel.
Cependant, le gain d’efficacité lié à l’osidase reste faible. Le traitement multienzymatique
contient de la β-galactosidase, de la polygalacturonase et en plus faible proportion des
cellulases hydrolysant respectivement les liaisons entre 2 galactoses en beta, en alpha-1 et 4
de l’acide galacturonique et les polymères du glucose. Ces enzymes clivent des liaisons
spécifiques, or la diversité des polysaccharides de la matrice qui augmente au cours de la
maturation du biofilm, multiplie les cibles potentielles à cliver pour obtenir une déstabilisation
efficace du réseau de polysaccharides. Sur un biofilm mature formé en 717 jours, le traitement
multienzymatique (osidase + protéase) est significativement plus efficace que le traitement
constitué d’une protéase seule pour éliminer les protéines du biofilm. Cette action synergique
pourrait être liée à une meilleure diffusion de la protéase au sein du biofilm lors de l’action de
l’osidase. L’attaque d’un biofilm et plus généralement d’un gel par une enzyme est limité par
des phénomènes de diffusion (Fadda et al., 2003).
La réalisation d’essais de nettoyages ne peut pas être faite en conditions réelles sur
l’outil de production à cause d’impératifs d’exploitation. Il faut donc développer des tests sur
des modèles pilotes et des tests in vitro en laboratoire. On se trouve de nouveau confronté à
une limitation de la matière première car l‘extraction des membranes colmatées de modules
en fonctionnement dans une usine a un cout et un impact sur la production.
Pour faciliter la multiplication de tests in vitro de solutions nettoyantes, nous avons
testé un protocole de conservation de coupons de membranes colmatées provenant de
modules en fonctionnement dans l’usine de Méry-sur-Oise. Il apparaît que l’on peut tester
l’efficacité de solutions de nettoyage sur des coupons de membranes colmatées conservées
dans de l’eau ultrapure à 4°C pendant un maximum de 4 semaines. En effet, le dépôt de
colmatage évolue en fonction du temps de stockage et les nettoyages deviennent inefficaces
tant pour éliminer le biofilm que pour restaurer les performances membranaires après 8
semaines de conservation. On observe un décrochage limité du biofilm associé à une légère
194
hausse de perméabilité après 4 semaines de stockage des membranes. Une petite quantité de
biofilm se décroche de la membrane pendant cette période. Ce décrochage ne peut pas être lié
à des forces de flux car le stockage est effectué en mode statique (Christersson et al., 1988).
La stabilité d’un biofilm est déterminée par deux processus mutuellement exclusifs :
l’adhérence et le détachement de cellules de la matrice du biofilm. Différentes études ont
montré qu’un détachement actif au sein d’un biofilm était lié à un stress nutritif (Delaquis et
al., 1989; Sawyer et Hermanowicz, 1998). Les conditions de stockage en eau distillée utilisées
dans notre étude induisent un stress nutritif qui pourrait constituer un signal induisant le
décrochage actif d’une partie du biofilm. En absence de stockage ou après un stockage de 4
semaines, la procédure de nettoyage permet d’éliminer une partie du dépôt colmatant mais a
un impact faible sur la restauration de la perméabilité membranaire de l’ordre de 5 à 10%. Ce
gain de perméabilité est plus faible que les gains obtenus lors des nettoyages en ligne réalisés
dans l’usine de Méry-sur-Oise (Di Martino et al., 2007). Cette différence d’efficacité peut être
liée à l’application de forces de flux lors des nettoyages industriels qui consistent en une
succession de phases de trempage et de recirculation alors que les nettoyages réalisés in vitro
sont faits en bains statiques. Les gains de perméabilité peuvent être dus à un enlèvement de
matière colmatante mais également à une modification chimique des propriétés de surface de
la membrane (Al-Amoudi et al., 2007; Liikanen et al., 2002).
Ces modifications associées à un changement du potentiel zeta conduisent à une
augmentation de la perméabilité d’une membrane neuve. Une étude pilote comparant
plusieurs protocoles de nettoyage a montré qu’un traitement alcalin contenant des agents
chélatants présente la meilleure efficacité tant en terme de restauration de performances
membranaires qu’en terme d’élimination de matières colmatantes sur une membrane NF255
(Liikanen et al., 2002). Les traitements acides diminuent la perméabilité membranaire mais
réparent les capacités de rétention des ions. Comme le protocole que nous avons utilisé
associe une phase de traitement par une solution alcaline à une seconde phase de traitement
par une solution acide aux effets antagonistes en terme d’impact sur la perméabilité
membranaire, il nous était impossible de prédire son efficacité tant en terme d’élimination de
matière colmatante qu’en terme de gain de perméabilité.
La restauration partielle des performances membranaires observée après nettoyage de
membranes stockées 8 jours sans observer d’effet sur la matière biocolmatante peut être liée à
un effet direct des agents de nettoyage sur la membrane (modification de la membrane) ou par
élimination de matière colmatante inorganique invisible en analyse ATR-FTIR. En
195
conclusion, l’approche qui consiste à conserver en eau distillée à 4°C des coupons de
membranes NF colmatées est validée pour tester l’efficacité de solutions de nettoyage à
condition de ne pas dépasser une durée de stockage de 4 semaines.
196
Conclusion et perspectives
197
En conclusion à l’ensemble de ces travaux, nous pouvons dire que le colmatage des
membranes NF utilisées en production d’eau potable par filtration d’eaux de surface est au
moins en partie dû à la multiplication cellulaire et à l'accumulation d'exopolymères
biologiques à la surface membranaire, processus portant la signature d'un développement de
biofilm.
Le développement de ce biofilm s’accompagne d’une baisse des performances
hydrauliques des membranes NF. Ce biofilm suit les étapes de formation classiques d’un
biofilm. En effet, il se constitue les premiers jours de fonctionnement des membranes NF
neuves. Après seulement une semaine de fonctionnement, des bactéries à deux stades de
développement (adhérence et formation de microcolonies enchâssées dans une matrice) sont
visibles à la surface des membranes NF. A partir de ces bactéries isolées adhérentes et des
microcolonies entourées de leur matrice, le biofilm se développe tout d’abord horizontalement
et verticalement pendant plusieurs semaines avant de ralentir sa croissance. Ce
développement se poursuit par expansion horizontale et par densification. Après plusieurs
semaines de fonctionnement, les spécificités liées au biofilm NF sont visibles. Les
microorganismes et les polysaccharides de matrice se sont diversifiés et recouvrent
l’ensemble de la membrane en formant par endroit un biofilm très hétérogène. Les bactéries
sont à ce stade très largement engluées dans une matrice d’exopolymères. L’ensemble forme
une architecture connue de dômes dits en forme de champignon et de creux ou canyons.
Au cours de la maturation, le volume occupé par les exopolysaccharides augmente
beaucoup plus fortement que le volume occupé par les microorganismes. Ces polysaccharides
forment des amas très compacts de grande taille et des réseaux de filaments enchevêtrés. Cette
architecture du biofilm NF, caractéristique d’un biofilm soumis à des régimes de flux
turbulents, est associée à une très forte cohésion du biofilm. Les biofilms NF constituent une
couche viscoélastique à la surface des membranes. La viscosité et l’élasticité du biofilm NF
évoluent au cours de sa maturation, passant d’une phase d’augmentation à une phase de
diminution. Ces petites fluctuations semblent reliées à des différences de proportions relatives
des constituants de la matrice du biofilm et à des différences de structure de cette matrice. La
nanofiltration, par l’application de fortes forces de flux de façon continue pendant la
croissance du biofilm, aboutit à une diminution progressive de l’hétérogénéité de surface.
Bien que le biofilm NF reste hétérogène, l’amplitude de son relief diminue au cours du temps.
198
La formation du biofilm NF s’accompagne d’une baisse progressive de l’affinité de la
membrane pour l‘eau, d’une diminution linéaire de la perméabilité membranaire et d’une
augmentation non linéaire du colmatage longitudinal. Le développement d’un biofilm à la
surface de la membrane NF et les pertes d’efficacité de filtration semblent concorder.
Cependant, au cours de la période de l’étude, des nettoyages industriels ont été effectué
environ toutes les 1000 heures de fonctionnement sans que l’impact sur le biofilm ait été
directement évalué. Dans les études pilotes réalisées sans nettoyage, la croissance du biofilm
est corrélée avec la diminution de perméabilité et surtout avec l’augmentation de la perte de
charge longitudinale.
Il semblerait que le développement du biofilm soit un des principaux paramètres
responsable des modifications des propriétés hydrauliques de la membrane NF. Cependant,
ces travaux de thèses ne se sont intéressés qu’à la partie biologique du colmatage et d’autres
processus sont impliqués dans le colmatage des membranes NF. Parmi ces processus de
colmatage non biologique, il y a les phénomènes de concentrations polarisations,
d’adsorption, de blocage des pores. Ces événements contribuent à la formation d’une couche
possédant des propriétés de séparation propres (le gâteau) altérant les propriétés de filtration.
Le gâteau formé à la surface des membranes est décrit comme étant le résultat d’une
accumulation de matières organiques naturelles et de molécules inorganiques provenant de la
phase liquide. Cette vision du colmatage peut être qualifiée de « traditionnelle » car elle a été
développée par des approches de chimie. Les travaux présentés dans cette thèse, grâce à
l’apport de techniques de chimie mais également de biologie, d’histologie et de biophysique a
permis d’enrichir les connaissances des mécanismes de colmatage des membranes NF
utilisées en production d’eau potable.
Une meilleure maîtrise de la quantité de microorganismes viables et de la
concentration en CODB de l’eau d’alimentation des membranes NF permet, en freinant le
développement de biofilm, de préserver les performances membranaires. Cependant, les
prétraitements testés, malgré leur efficacité certaine, ne peuvent empêcher la formation de
biofilm. Il est donc primordial d’associer ces prétraitements à des nettoyages de la membrane.
Un large champ d’investigations est ouvert par les résultats qui montrent le gain d’efficacité
apporté par une recette de nettoyage qui cible une digestion enzymatique des constituants de
la matrice d’exopolymères des biofilms : les protéines et surtout les polysaccharides.
199
La prochaine étape serait d’identifier précisément les polysaccharides et les protéines
formés au cours du développement bactérien pour fournir un traitement sur mesure adapté aux
différents stades de formation du biofilm NF. En effet, notre étude ne s’est pas intéressée
spécifiquement aux protéines extracellulaires qui, aux vues des résultats des nettoyages,
doivent contribuer à la cohésion du biofilm. De plus elle a permis de montrer que plusieurs
types de polysaccharides participaient au développement du biofilm NF. Ceux-ci
interviennent dans la structuration et la résistance du biofilm aux contraintes mécaniques et
aux agressions chimiques. Ce manque d’exhaustivité fournit une réponse pertinente mais
partielle à l’enlèvement du biofilm. Pour toutes ces raisons, il serait intéressant de caractériser
les protéines de la matrice par électrophorèse bidimensionnelle et les exopolysaccharides par
chromatographie liquide haute performance ou en phase gazeuse couplée à un détecteur de
masse. L’étude de matrices de biofilms reconstituées à partir de molécules artificielles ou
extraites de biofilms permettrait également de préciser le rôle de chaque partenaire dans
l’organisation, la structuration et les propriétés des biofilms NF.
200
Références bibliographiques
201
Ahimou, F., Semmens, M.J., Novak, P.J. et Haugstad, G. (2007) Biofilm cohesiveness
measurement using a novel atomic force microscopy methodology. Applied and
Environmental Microbiology 73(9), 2897-2904.
Al-Adhami, B.H., Nichols, R.A., Kusel, J.R., O'Grady, J. et Smith, H.V. (2007) Detection
of UV-induced thymine dimers in individual Cryptosporidium parvum and
Cryptosporidium hominis oocysts by immunofluorescence microscopy. Applied and
Environmental Microbiology 73(3), 947-955.
Al-Amoudi, A. et Lovitt, R.W. (2007) Fouling strategies and the cleaning system of NF
membranes and factors affecting cleaning efficiency. Journal of Membrane Science
303, 4-28.
Al-Amoudi, A., Williams, P., Mandale, S. et Lovitt, R.W. (2007) Cleaning results of new
and fouled nanofiltration membrane characterized by zeta potential and permeability.
Separation and Purification Technology 54(2), 234-240.
Alkan, U., Teksoy, A., Atesli, A. et Baskaya, H.S. (2007) Influence of humic substances on
the ultraviolet disinfection of surface waters. Water and Environment Journal 21(1),
61-68.
Allegrucci, M., Hu, F.Z., Shen, K., Hayes, J., Ehrlich, G.D., Post, J.C. et Sauer, K. (2006)
Phenotypic characterization of Streptococcus pneumoniae biofilm development.
Journal of Bacteriology 188(7), 2325-2335.
Allesen-Holm, M., Barken, K.B., Yang, L., Klausen, M., Webb, J.S., Kjelleberg, S.,
Molin, S., Givskov, M. et Tolker-Nielsen, T. (2006) A characterization of DNA
release in Pseudomonas aeruginosa cultures and biofilms. Molecular Microbiology
59(4), 1114-1128.
Anderl, J.N., Zahller, J., Roe, F. et Stewart, P.S. (2003) Role of nutrient limitation and
stationary-phase existence in Klebsiella pneumoniae biofilm resistance to ampicillin
and ciprofloxacin. Antimicrobial Agents and Chemotherapy 47(4), 1251-1256.
Ang, W.S., Lee, S.Y. et Elimelech, M. (2006) Chemical and physical aspects of cleaning of
organic-fouled reverse osmosis membranes. Journal of Membrane Science 272(1-2),
198-210.
Argüello, M.A., Alvarez, S., Riera, F.A. et Alvarez, R. (2003) Enzymatic cleaning of
inorganic membranes used for whey protein fractionation. Journal of Membrane
Science 216, 121-123.
AWWA-M46 (Ed.) (1999) Manual of water supply practices, reverse osmosis and
nanofiltration.American Water Works Association, Denver, USA.
Bakker, D.P., Huijs, F.M., Vries, J., Klijnstra, J.W., Busscher, H.J. et Van der Mei, H.C.
(2003) Bacterial deposition to fluoridated and non-fluoridated polyurethane coatings
with different elastic modulus and surface tension in a parallel plate and a stagnation
point flow chamber. Colloids and Surfaces B: Biointerfaces 32, 179-190.
Baveja, J.K., Willcox, M.D., Hume, E.B., Kumar, N., Odell, R. et Poole-Warren, L.A.
(2004) Furanones as potential anti-bacterial coatings on biomaterials. Biomaterials
25(20), 5003-5012.
Bèle, C., Habarou, H., Ambonguilat, S., Croué, J.P., Djafer, M. et Heim, V. (2006) How
to optimize NOM removal on drinking water plants? First step: making a good
diagnosis thanks to HPSEC. Water Practice and Technology 1(4).
Bellona, C. et Drewes, J.E. (2005) The role of membrane surface charge and solute physicochemical properties in the rejection of organic acids by NF membranes. Journal of
Membrane Science 249(1-2), 227-234.
Beveridge, T.J. (2006) Visualizing bacterial cell walls and biofilms. Microbe 1(279-284).
202
Bockelmann, U., Janke, A., Kuhn, R., Neu, T.R., Wecke, J., Lawrence, J.R. et Szewzyk,
U. (2006) Bacterial extracellular DNA forming a defined network-like structure.
FEMS Microbiology Letters 262(1), 31-38.
Bohner, H.F. et Bradley, R.L., Jr. (1992) Effective cleaning and sanitizing of polysulfone
ultrafiltration membrane systems. Journal of Dairy Science 75(3), 718-724.
Boles, B.R., Thoendel, M. et Singh, P.K. (2004) Self-generated diversity produces
"insurance effects" in biofilm communities. Proceedings of the National Academy of
Sciences U S A 101(47), 16630-16635.
Bonnelly, M. (Thèse) (2005) Étude pilote d'affinage par nanofiltration pour la production
d'eau potable. Université Laval, Faculté Des Sciences et de Génie.
Bouchard, C., Sérodes, J.B., Rahni, M., Ellis, D., Laflamme, E. et Rodriguez, M.J. (2003)
Étude du colmatage des membranes en ultrafiltration et en coagulation-ultrafiltration
d'eau de surface. Revue du Génie et de la Science de l'Environnement 2(2), 139-148.
Boyd, R.D., Verran, J., Jones, M.V. et Bhakoo, M. (2002) Use of the atomic force
microscope to determine the effect of substratum surface topography on bacterial
adhesion. Langmuir 18(6), 2343-2346.
Broeckmann, A., Busch, J., Wintgens, T. et Marquardt, w. (2006) Modeling of pore
blocking and cake layer formation in membrane filtration for wastewater treatment.
Desalination 189, 97-109.
Brody, J.G., Aschengrau, A., McKelvey, W., Swartz, C.H., Kennedy, T. et Rudel, R.A.
(2006) Breast cancer risk and drinking water contaminated by wastewater: a case
control study. Environmental Health 5, 28.
Buckingham-Meyer, K., Goeres, D.M. et Hamilton, M.A. (2007) Comparative evaluation
of biofilm disinfectant efficacy tests. Journal of Microbiological Methods 70(2), 236244.
Caiazza, N.C. et O'Toole, G.A. (2004) SadB is required for the transition from reversible to
irreversible attachment during biofilm formation by Pseudomonas aeruginosa PA14.
Journal of Bacteriology 186(14), 4476-4485.
Camper, A.K. (2004) Involvement of humic substances in regrowth. International Journal of
Food Microbiology 92(3), 355-364.
Cancela, M.A., Alvarez, E. et Maceiras, R. (2005) Effects of temperature and concentration
on carboxymethylcellulose with sucrose rheology. Journal of Food Engineering 71(4),
419-424.
Chen, X. et Stewart, P.S. (2000) Biofilm removal caused by chemical treatments. Water
Research 34 (17), 4229-4233.
Childress, A.E. et Elimelech, M. (1996) Effect of solution chemistry on the surface charge
of polymeric reverse osmosis and nanofiltration membranes. Journal of Membrane
Science 119, 253-268.
Chittur, K.K. (1998) FTIR/ATR for protein adsorption to biomaterial surfaces. Biomaterials
19(4-5), 357-369.
Cho, J.Y., Heuzey, M.C., Begin, A. et Carreau, P.J. (2006) Viscoelastic properties of
chitosan solutions: effect of concentration and ionic strength. Journal of Food
Engineering 74(4), 500-515.
Christersson, C.E., Glantz, P.O. et Baier, R.E. (1988) Role of temperature and shear forces
on microbial detachment. Scandinavian Journal of Dental Research 96(2), 91-98.
Codony, F., Morato, J. et Mas, J. (2005) Role of discontinuous chlorination on microbial
production by drinking water biofilms. Water Research 39(9), 1896-1906.
Conlon, W.J. et Jhawar, M. (1993) Pretreatment of membrane processes with ultraviolet
disinfection. Water resources proceedings AWWA annual conference San Antonio
Texas, 343-370.
203
Corin, N., Backlund, P. et Wiklund, T. (1998) Bacterial growth in humic waters exposed to
UV-radiation and simulated sunlight. Chemosphere 36(9), 1947-1958.
Costerton, J.W. (Ed.) (2007) The biofilm primer. Springer series on biofilms.
Coufort, C., Derlon, N., Ochoa-Chaves, J., Line, A. et Paul, E. (2007) Cohesion and
detachment in biofilm systems for different electron acceptor and donors. Water
Science and Technology 55(8-9), 421-428.
Coussot, P. et Grossiord, J.L. (Ed) (2001) Comprendre la rhéologie; de la circulation du
sang à la prise du béton. EDP sciences.
Cyna, B., Chagneau, G., Bablon, G. et Tanghe, N. (2002) Two years of nanofiltration at the
Méry-sur-Oise plant, France. Desalination 147(1-3), 69-75.
Danese, P.N., Pratt, L.A. et Kolter, R. (2000) Exopolysaccharide production is required for
development of Escherichia coli K-12 biofilm architecture. Journal of Bacteriology
182(12), 3593-3596.
Darouiche, R.O. (2008) In vivo efficacy of antimicrobial-coated devices - Reply. Journal of
Bone and Joint Surgery-American Volume 90A(8), 1785-1786.
Davidson, W.M. et Stewart, P.S. (2008) Visualization of antimicrobial action in
Staphylococcus epidemidis biofilms. Biofilm III proceedings Munich, 30.
Davies, D.G. et Geesey, G.G. (1995) Regulation of the alginate biosynthesis gene algC in
Pseudomonas aeruginosa during biofilm development in continuous culture. Applied
and Environmental Microbiology 61(3), 860-867.
Davis, T.A., Volesky, B. et Mucci, A. (2003) A review of the biochemistry of heavy metal
biosorption by brown algae. Water Research 37(18), 4311-4330.
Delaquis, P.J., Caldwell, D.E., Lawrence, J.R. et McCurdy, A.R. (1989) Detachment of
Pseudomonas fluorescens from biofilms on glass surfaces in response to nutrient
stress. Microbial Ecology 18(3), 199-210.
Derlon, N., Masse, A., Escudie, R., Bernet, N. et Paul, E. (2008) Stratification in the
cohesion of biofilms grown under various environmental conditions. Water Research
42(8-9), 2102-2110.
Desjardins, R. (Ed) (1997) Le traitement des eaux. Presses internationales polytechnique.
Di Martino, P., Cafferini, N., Joly, B. et Darfeuille-Michaud, A. (2003) Klebsiella
pneumoniae type 3 pili facilitate adherence and biofilm formation on abiotic surfaces.
Research in Microbiology 154(1), 9-16.
Di Martino, P., Doumeche, B., Galas, L., Vaudry, H., Heim, V. et Habarou, H. (2007)
Assessing chemical cleaning of nanofiltration membranes in a drinking water
production plant: a combination of chemical composition analysis and fluorescence
microscopy. Water Science and Technology 55(8-9), 219-225.
Dogsa, I., Kriechbaum, M., Stopar, D. et Laggner, P. (2005) Structure of bacterial
extracellular polymeric substances at different pH values as determined by SAXS.
Biophysical Journal 89(4), 2711-2720.
Donlan, R.M. (2002) Biofilms: microbial life on surfaces. Emerging Infectious Diseases 8(9),
881-890.
Doumeche, B., Galas, L., Vaudry, H. et Di Martino, P. (2007) Membrane foulants
characterization in a drinking water production unit. Food and Bioproducts Processing
85(C1), 42-48.
Draget, K.I., Steinsvag, K., Onsoyen, E. et Smidsrod, O. (1998) Na- and K-alginate; effect
on Ca2+-gelation. Carbohydrate Polymers 35(1-2), 1-6.
Drenkard, E. (2003) Antimicrobial resistance of Pseudomonas aeruginosa biofilms.
Microbes and Infection 5(13), 1213-1219.
Eberl, H.J., Picioreanu, C., Heijnen, J.J. et van Loosdrecht, M.C.M. (2000) A threedimensional numerical study on the correlation of spatial structure, hydrodynamic
204
conditions, and mass transfer and conversion in biofilms. Chemical Engineering
Science 55(24), 6209-6222.
Elasri, M.O. et Miller, R.V. (1999) Study of the response of a biofilm bacterial community
to UV radiation. Applied and Environmental Microbiology 65(5), 2025-2031.
Fadda, G.C., Lairez, D., Arrio, B., Carton, J.P. et Larreta-Garde, V. (2003) Enzymecatalyzed gel proteolysis: an anomalous diffusion-controlled mechanism. Biophysical
Journal 85(5), 2808-2817.
Fernandes, P.B., Goncalves, M.P. et Doublier, J.L. (1991) A Rheological characterization
of kappa-carrageenan galactomannan mixed gels - a comparison of locust bean gum
samples. Carbohydrate Polymers 16(3), 253-274.
Fernandez, N., Diaz, E.E., Amils, R. et Sanz, J.L. (2008) Analysis of microbial community
during biofilm development in an anaerobic wastewater treatment reactor. Microbial
Ecology 56(1), 121-132.
Filip, Z., Pecher, W. et Berthelin, J. (2000) Microbial utilization and transformation of
humic acid-like substances extracted from a mixture of municipal refuse and sewage
sludge disposed of in a landfill. Environmental Pollution 109(1), 83-89.
Flemming, H.C. (2002) Biofouling in water systems--cases, causes and countermeasures.
Applied Microbiology and Biotechnology 59(6), 629-640.
Fletcher, M. et Loeb, G.I. (1979) Influence of substratum characteristics on the attachment
of a marine pseudomonas to solid surfaces. Applied and Environmental Microbiology
37(1), 67-72.
Franzin, L., Cabodi, D. et Fantino, C. (2002) Evaluation of the efficacy of ultraviolet
irradiation for disinfection of hospital water contaminated by Legionella. Journal of
Hospital Infection 51(4), 269.
Friedman, L. et Kolter, R. (2004) Genes involved in matrix formation in Pseudomonas
aeruginosa PA14 biofilms. Molecular Microbiology 51(3), 675-690.
Fux, C.A., Wilson, S. et Stoodley, P. (2004) Detachment characteristics and oxacillin
resistance of Staphyloccocus aureus biofilm emboli in an in vitro catheter infection
model. Journal of Bacteriology 186(14), 4486-4491.
Gaboriaud, F., Gee, M.L., Strugnell, R. & Duval, J.F. (2008) Coupled electrostatic,
hydrodynamic, and mechanical properties of bacterial interfaces in aqueous media.
Langmuir 24(19), 10988-10995.
Gaid, K., Girodet, P., Bord, G. et Féliers, C. (2006) La désinfection aux ultraviolets: une
alternative de choix. L’eau l’industrie les nuisances 291, 37-44.
Gallaher, T.K., Wu, S., Webster, P. et Aguilera, R. (2006) Identification of biofilm
proteins in non-typeable Haemophilus Influenzae. BMC Microbiology 6 (65), 1-9.
Gao, B.Y. et Yue, Q.Y. (2005) Natural organic matter (NOM) removal from surface water by
coagulation. Journal of Environmental Sciences-China 17(1), 119-122.
Garny, K., Horn, H. et Neu, T.R. (2008) Interaction between biofilm development, structure
and detachment in rotating annular reactors. Bioprocess and Biosystems Engineering
31(6), 619-629.
Garrett, T.R., Bhakoo, M. et Zhang, Z.B. (2008) Bacterial adhesion and biofilms on
surfaces. Progress in Natural Science 18(9), 1049-1056.
Genzer, J. et Efimenko, K. (2006) Recent developments in superhydrophobic surfaces and
their relevance to marine fouling: a review. Biofouling 22(5-6), 339-360.
Ghigo, J.M. (2001) Natural conjugative plasmids induce bacterial biofilm development.
Nature 412(6845), 442-445.
Ghigo, J.M. (2003) Are there biofilm-specific physiological pathways beyond a reasonable
doubt? Research in Microbiology 154(1), 1-8.
205
Gilbert, D., Amblard, C., Bourdier, G., Francez, A.J. et Mitchell, E. (2000) Le régime
alimentaire des Thécamoebiens (Protista, Sarcodina). L' année biologique 39(2), 5768.
Glinel, K., Jonas, A.M., Jouenne, T., Leprince, J., Galas, L. et Huck, W.T. (2009)
Antibacterial and antifouling polymer brushes incorporating antimicrobial peptide.
Bioconjugate Chemistry 20(1), 71-77.
Godart, H. (2000) Eaux de distribution. Traitements unitaires. Techniques de l'ingénieur.
Génie civil CE1(C5200), C5200.1-C5200.20.
Goeres, D.M., Palys, T., Sandel, B.B. et Geiger, J. (2004) Evaluation of disinfectant
efficacy against biofilm and suspended bacteria in a laboratory swimming pool model.
Water Research 38(13), 3103-3109.
Guizard, D. (Ed.) (2000) Guide de la nanofiltration. Club Français des Membranes (CFM).
Gwon, E.M., Yu, M.J., Oh, H.K. et Ylee, Y.H. (2003) Fouling characteristics of NF and RO
operated for removal of dissolved matter from groundwater. Water Research 37(12),
2989-2997.
Hall-Stoodley, L., Costerton, J.W. et Stoodley, P. (2004) Bacterial biofilms: from the
natural environment to infectious diseases. Nature Reviews Microbiology 2(2), 95108.
Harris, L.G., Tosatti, S., Wieland, M., Textor, M. et Richards, R.G. (2004)
Staphylococcus aureus adhesion to titanium oxide surfaces coated with nonfunctionalized and peptide-functionalized poly(L-lysine)-grafted-poly(ethylene glycol)
copolymers. Biomaterials 25(18), 4135-4148.
Hentzer, M., Elberl, L. et Givskov, M. (2005) Transcriptome analysis of Pseudomonas
aeruginosa biofilm development: anaerobic respiration and iron limitation. Biofilms 2,
37-61.
Her, N., Amy, G. et Jarusutthirak, C. (2000) Seasonal variations of nanofiltration (NF)
foulants: identification and control. Desalination 132(1-3), 143-160.
Her, N., Amy, G., Plottu-Pecheux, A. et Yoon, Y. (2007) Identification of nanofiltration
membrane foulants. Water Research 41(17), 3936-3947.
Hermansson, M. (1999) The DLVO theory in microbial adhesion. Colloids and Surfaces BBiointerfaces 14(1-4), 105-119.
Hertkorn, N., Claus, H., Schmitt-Kopplin, P., Perdue, E.M. et Filip, Z. (2002) Utilization
and transformation of aquatic humic substances by autochthonous microorganisms.
Environmental Science and Technology 36(20), 4334-4345.
Hindre, T., Bruggemann, H., Buchrieser, C. et Hechard, Y. (2008) Transcriptional
profiling of Legionella pneumophila biofilm cells and the influence of iron on biofilm
formation. Microbiology 154(1), 30-41.
Hooshangi, S. et Bentley, W.E. (2008) From unicellular properties to multicellular behavior:
bacteria quorum sensing circuitry and applications. Current Opinion in Biotechnology
19(6), 550-555.
Hornemann, J.A., Lysova, A.A., Codd, S.L., Seymour, J.D., Busse, S.C., Stewart, P.S. et
Brown, J.R. (2008) Biopolymer and water dynamics in microbial biofilm
extracellular polymeric substance. Biomacromolecules 9(9), 2322-2328.
Houari, A. et Di Martino, P. (2007) Effect of chlorhexidine and benzalkonium chloride on
bacterial biofilm formation. Letters in Applied Microbiology 45(6), 652-656.
Huang, C.T., Yu, F.P., McFeters, G.A. et Stewart, P.S. (1995) Nonuniform spatial patterns
of respiratory activity within biofilms during disinfection. Applied and Environmental
Microbiology 61(6), 2252-2256.
206
Huang, J.Y., Takizawa, S. et Fujita, K. (2001) Comparison of UV and chlorine
pretreatment in pilot plant micro-filter membrane separation for drinking water.
Membranes in Drinking and Industrial Water Production 1(5 and 6), 245-251, 404.
Ivnitsky, H., Katz, I., Minz, D., Volvovic, G., Shimoni, E., Kesselman, E., Semiat, R. et
Dosoretz, C.G. (2007) Bacterial community composition and structure of biofilms
developing on nanofiltration membranes applied to wastewater treatment. Water
Research 41(17), 3924-3935.
Jain, A. et Bhosle, N.B. (2009) Biochemical composition of the marine conditioning film:
implications for bacterial adhesion. Biofouling 25(1), 13-19.
Jang, A., Szabo, J., Hosni, A.A., Coughlin, M. et Bishop, P.L. (2006) Measurement of
chlorine dioxide penetration in dairy process pipe biofilms during disinfection.
Applied Microbiology and Biotechnology 72(2), 368-376.
Jermann, D., Pronk, W., Meylan, S. et Boller, M. (2007) Interplay of different NOM
fouling mechanisms during ultrafiltration for drinking water production. Water
Research 41(8), 1713-1722.
Johansen, C., Falholt, P. et Gram, L. (1997) Enzymatic removal and disinfection of
bacterial biofilms. Applied and Environmental Microbiology 63(9), 3724-3728.
Johnson, J.R., Kuskowski, M.A. et Wilt, T.J. (2006) Systematic review: antimicrobial
urinary catheters to prevent catheter-associated urinary tract infection in hospitalized
patients. Annals of Internal Medicine 144(2), 116-126.
Jones, O.A., Lester, J.N. et Voulvoulis, N. (2005) Pharmaceuticals : a threat to drinking
water? Trends in biotechnology 23 (4), 163-167.
Katsikogianni, M. et Missirlis, Y.F. (2004) Concise review of mechanisms of bacterial
adhesion to biomaterials and of techniques used in estimating bacteria-material
interactions. European Cells and Materials Journal 8, 37-57.
Kavanagh, G.M. et Ross-Murphy, S.B. (1998) Rheological characterisation of polymer
gels. Progress in Polymer Science 23(3), 533-562.
Kim, J. et Kang, B. (2008) DBPs removal in GAC filter-adsorber. Water Research 42(1-2),
145-152.
Kirisits, M.J. et Parsek, M.R. (2006) Does Pseudomonas aeruginosa use intercellular
signalling to build biofilm communities? Cellular Microbiology 8(12), 1841-1849.
Kolter, R. et Greenberg, E.P. (2006) The superficial life of microbes. Nature 441, 300-302.
Labanowski, J. (Thèse) (2004) Matière organique naturelle et anthropique : vers une
meilleure compréhension de sa réactivité et de sa caractérisation. Laboratoire des
Sciences de l’Eau et de l’Environnement, Faculté des Sciences et Techniques Limoges.
Labbate, M., Queek, S.Y., Koh, K.S., Rice, S.A., Givskov, M. et Kjelleberg, S. (2004)
Quorum sensing-controlled biofilm development in Serratia liquefaciens MG1.
Journal of Bacteriology 186(3), 692-698.
Laspidou, C.S. et Rittmann, B.E. (2004) Modeling the development of biofilm density
including active bacteria, inert biomass, and extracellular polymeric substances. Water
Research 38(14-15), 3349-3361.
Lee, H., Amy, G., Cho, J., Yoon, Y., Moon, S.H. et Kim, I.S. (2001) Cleaning strategies for
flux recovery of an ultrafiltration membrane fouled by natural organic matter. Water
Research 35(14), 3301-3308.
Lee, S., Cho, J.W. et Elimelech, M. (2005) Combined influence of natural organic matter
(NOM) and colloidal particles on nanofiltration membrane fouling. Journal of
Membrane Science 262(1-2), 27-41.
Lehtola, M.J., Miettinen, I.T., Lampola, T., Hirvonen, A., Vartiainen, T. et Martikainen,
P.J. (2005) Pipeline materials modify the effectiveness of disinfectants in drinking
water distribution systems. Water Research 39(10), 1962-1971.
207
Lejeune, P. (2003) Contamination of abiotic surfaces: what a colonizing bacterium sees and
how to blur it. Trends in Microbiology 11(4), 179-184.
Leriche, V., Sibille, P. et Carpentier, B. (2000) Use of an enzyme-linked lectinsorbent assay
to monitor the shift in polysaccharide composition in bacterial biofilms. Applied and
Environmental Microbiology 66(5), 1851-1856.
Levi, Y., Germon, J.C., Legube, B., Block, J.C., des Abbayes, H., Houzelot, J.L.,
Gresillon, J.M., Blanc, G., Eymard, R., Amigues, J.P., Reynaud, A. et Humbert,
A. (2007) L’eau, enjeux et perspectives de recherche. Mission scientifique et
pédagogique.Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Lewis, K. (2007) Persister cells, dormancy and infectious disease. Nature Reviews
Microbiology 5(1), 48-56.
Lewis, K. (2008) Multidrug tolerance of biofilms and persister cells. Current Topics in
Microbiology and Immunology 322, 107-131.
Li, Q. et Elimelech, M. (2004) Organic fouling and chemical cleaning of nanofiltration
membranes: measurements and mechanisms. Environmental Science and Technology
38(17), 4683-4693.
Li, X.Z., Hauer, B. et Rosche, B. (2007) Single-species microbial biofilm screening for
industrial applications. Applied Microbiology and Biotechnology 76(6), 1255-1262.
Liikanen, R. (Thèse) (2006) Nanofiltration as a refining phase in surface water treatment.
Laboratory of Water and Wastewater Engineering University of Technology Helsinki.
Liikanen, R., Yli-Kuivila, J. et Laukkanen, R. (2002) Efficiency of various chemical
cleanings for nanofiltration membrane fouled by conventionally-treated surface water.
Journal of Membrane Science 195(2), 265-276.
Liu, C., Caothien, S., Hayes, J., Caothuy, T., Otoyo, T. et Ogawa, T. (2000) Membrane
Chemical Cleaning: From Art to Science. http://www.pall.com/pdf/mtcpaper.pdf.
Liu, Z., Stirling, F.R. et Zhu, J. (2007) Temporal quorum-sensing induction regulates Vibrio
cholerae biofilm architecture. Infection and Immunity 75(1), 122-126.
Loukili, N.H., Granbastien, B., Faure, K., Guery, B. et Beaucaire, G. (2006) Effect of
different stabilized preparations of peracetic acid on biofilm. Journal of Hospital
Infection 63(1), 70-72.
Lux, R. et Shi, W. (2004) Chemotaxis-guided movements in bacteria. Critical Reviews in
Oral Biology and Medicine 15(4), 207-220.
Mace, C., Seyer, D., Chemani, C., Cosette, P., Di-Martino, P., Guery, B., Filloux, A.,
Fontaine, M., Molle, V., Junter, G.A. et Jouenne, T. (2008) Identification of
biofilm-associated cluster (bac) in Pseudomonas aeruginosa involved in biofilm
formation and virulence. PLoS One 3(12), e3897.
Madaeni, S.S., Mohamamdi, T. et Moghadam, M.K. (2001) Chemical cleaning of reverse
osmosis membranes. Desalination 134, 77-82.
Mah, T.F., Pitts, B., Pellock, B., Walker, G.C., Stewart, P.S. et O'Toole, G.A. (2003) A
genetic basis for Pseudomonas aeruginosa biofilm antibiotic resistance. Nature
426(6964), 306-310.
Mangalappalli-Illathu, A.K., Lawrence, J.R., Swerhone, G.D. et Korber, D.R. (2008)
Architectural adaptation and protein expression patterns of Salmonella enterica
serovar enteritidis biofilms under laminar flow conditions. International Journal of
Food Microbiology 123(1-2), 109-120.
Marconnet, C., Houari, A., Galas, L., vaudry, H., Heim, V. et Di Martino, P. (2009)
Biodegradable dissolved organic carbon concentration of feed water and NF
membrane biofouling: a pilot train study. Desalination 242, 228-235.
208
Martino, P.D., Fursy, R., Bret, L., Sundararaju, B. et Phillips, R.S. (2003) Indole can act
as an extracellular signal to regulate biofilm formation of Escherichia coli and other
indole-producing bacteria. Canadian Journal of Microbiology 49(7), 443-449.
May, T. et Okabe, S. (2008) Escherichia coli harboring a natural IncF conjugative F plasmid
develops complex mature biofilms by stimulating synthesis of colanic acid and curli.
Journal of Bacteriology 190(22), 7479-7490.
McElroy, J.A., Trentham-Dietz, A., Gangnon, R.E., Hampton, J.M., Bersch, A.J.,
Kanarek, M.S. et Newcomb, P.A. (2008) Nitrogen-nitrate exposure from drinking
water and colorectal cancer risk for rural women in Wisconsin, USA. Journal of Water
and Health 6(3), 399-409.
Mittelman, M.W. (1998) Structure and functional characteristics of bacterial biofilms in fluid
processing operations. Journal of Dairy Science 81(10), 2760-2764.
Mofidi, A.A., Bartels, C.R., Coffey, B.M., Knoell, T., Safarik, J., Ishida, K., Bold, R. et
Ridgway, H.F. (2000) Ultraviolet irradiation as a membrane biofouling control
strategy. Annual conference Proceedings American Water Works Association Denver
Colorado.
Mofidi, A.A. et Linden, K.G. (2004) Disinfection-effectiveness of ultraviolet (UV) light for
heterotrophic bacteria leaving biologically active filters. Journal of Water Supply
Research and Technology-Aqua 53(8), 553-566.
Mohammadi, T., Madaeni, S.S. et Moghadam, M.K. (2002) Investigation of membrane
fouling. Desalination 153, 155-160.
Moller, S., Korber, D.R., Wolfaardt, G.M., Molin, S. et Caldwell, D.E. (1997) Impact of
nutrient composition on a degradative biofilm community. Applied and Environmental
Microbiology 63(6), 2432-2438.
Mori, K., Naito, M., Nakai, T., Fujiki. M., Kawabe, T. (2006) Novel approach for
Biofouling-release materials with interpenetrating polymer networks. Materials
Research Society Proceedings 897, J03-02, 1-7
Morris, R.D. (1995) Drinking water and cancer. Environmental Health Perspectives 103,
225-232.
Ndiongue, S., Huck, P.M. et Slawson, R.M. (2005) Effects of temperature and
biodegradable organic matter on control of biofilms by free chlorine in a model
drinking water distribution system. Water Research 39(6), 953-964.
Nickel, J.C., Ruseska, I., Wright, J.B. et Costerton, J.W. (1985) Tobramycin resistance of
Pseudomonas aeruginosa cells growing as a biofilm on urinary catheter material.
Antimicrobial Agents and Chemotherapy 27(4), 619-624.
Norziah, M.H., Foo, S.L. et Karim, A.A. (2006) Rheological studies on mixtures of agar
(Gracilaria changii) and kappa-carrageenan. Food Hydrocolloids 20(2-3), 204-217.
Novák, I., Sysel, P., Zemek, J., Špírková, M., Velicˇ, D., Aranyosiová, M., Florián, Š.,
Pollák, V., Kleinová, A., Lednicky´, F. et Janigová, I. (2008) Surface and adhesion
properties of poly(imide-siloxane) block copolymers. European Polymer Journal 45,
57–69.
Oulahal-Lagsir, N., Martial-Gros, A., Bonneau, M. et Blum, L.J. (2003) "Escherichia
coli-milk" biofilm removal from stainless steel surfaces: synergism between ultrasonic
waves and enzymes. Biofouling 19(3), 159-168.
Paquin, J.L., Block, J.C., Haudidier, K., Hartemann, P., Colin, F., Miazga, J. et Levi, Y.
(1992) Effect of chlorine on the bacterial colonisation of a model distribution system.
Revue des Sciences de l'Eau 5(3), 399-414.
Paris, T., Skali-Lami, S. et Block, J.C. (2007) Effect of wall shear rate on biofilm deposition
and grazing in drinking water flow chambers. Biotechnology and Bioengineering
97(6), 1550-1561.
209
Park, C., Lee, Y.H., Lee, S. et Hong, S. (2008) Effect of cake layer structure on colloidal
fouling in reverse osmosis membranes. Desalination 220(1-3), 335-344.
Parsek, M.R. et Greenberg, E.P. (2005) Sociomicrobiology: the connections between
quorum sensing and biofilms. Trends in Microbiology 13(1), 27-33.
Parsek, M.R. et Tolker-Nielsen, T. (2008) Pattern formation in Pseudomonas aeruginosa
biofilms. Current Opinion in Microbiology 11, 560–566 .
Paugam, L., Rabiller-Baudry, M., Delaunay, D., Fernandez Perez, J. et Chaufer, B.
(2006) Physico-chemical effect of simple alkaline and acid solutions in cleaning
sequences of spiral ultrafiltration membranes fouled by skim milk. Held at Jesus
College Cambridge, 277-284.
Pei-Shi, Q., Wen-bin, W. et Zheng, Q. (2008) Effect of shear stress on biofilm
morphological characteristics and the secretion of extracellular polymeric substances.
Bioinformatics and Biomedical Engineering, 3438 - 3441.
Phe, M.H., Dossot, M., Guilloteau, H. et Block, J.C. (2005) Nucleic acid fluorochromes and
flow cytometry prove useful in assessing the effect of chlorination on drinking water
bacteria. Water Research 39(15), 3618-3628.
Ploux, L., Beckendorff, S., Nardin, M. et Neunlist, S. (2007) Quantitative and
morphological analysis of biofilm formation on self-assembled monolayers. Colloids
and Surfaces B: Biointerfaces 57(2), 174-181.
Powlson, D.S., Addisott, T.M., Benjamin, N., Cassman, K.G., de Kok, T.M., van
Grinsven, H., L'hirondel, J.L., Avery, A.A. et van Kessel, C. (2008) When does
nitrate become a risk for humans? Journal of Environmental Quality 37(2), 291-295.
Qian, Z., Stoodley, P. et Pitt, W.G. (1996) Effect of low-intensity ultrasound upon biofilm
structure from confocal scanning laser microscopy observation. Biomaterials 17(20),
1975-1980.
Raymond, J.A., Christner, B.C. et Schuster, S.C. (2008) A bacterial ice-binding protein
from the Vostok ice core. Extremophiles 12(5), 713-717.
Routh, M.D., Su, C.C., Zhang, Q. et Yu, E.W. (2009) Structures of AcrR and CmeR:
insight into the mechanisms of transcriptional repression and multi-drug recognition in
the TetR family of regulators. Biochimica et Biophysica Acta 1794(5), 844-851.
Rupp, C.J., Fux, C.A. et Stoodley, P. (2005) Viscoelasticity of Staphylococcus aureus
biofilms in response to fluid shear allows resistance to detachment and facilitates
rolling migration. Applied and Environmental Microbiology 71(4), 2175-2178.
Sauer, K. (2003) The genomics and proteomics of biofilm formation. Genome Biology 4(6),
219.
Sauer, K., Camper, A.K., Ehrlich, G.D., Costerton, J.W. et Davies, D.G. (2002)
Pseudomonas aeruginosa displays multiple phenotypes during development as a
biofilm. Journal of Bacteriology 184(4), 1140-1154.
Sauer, K., Cullen, M.C., Rickard, A.H., Zeef, L.A., Davies, D.G. et Gilbert, P. (2004)
Characterization of nutrient-induced dispersion in Pseudomonas aeruginosa PAO1
biofilm. Journal of Bacteriology 186(21), 7312-7326.
Sawyer, L.K. et Hermanowicz, S.W. (1998) Detachment of biofilm bacteria due to
variations in nutrient supply. Water Science and Technology 37(4-5), 211-214.
Sedgley, C.M., Lee, E.H., Martin, M.J. et Flannagan, S.E. (2008) Antibiotic resistance
gene transfer between Streptococcus gordonii and Enterococcus faecalis in root canals
of teeth ex vivo. Journal of Endodontics 34(5), 570-574.
Seidel, A. et Elimelech, M. (2002) Coupling between chemical and physical interactions in
natural organic matter (NOM) fouling of nanofiltration membranes: implications for
fouling control. Journal of Membrane Science 203(1-2), 245-255.
210
Shaw, T., Winston, M., Rupp, C.J., Klapper, I. et Stoodley, P. (2004) Commonality of
elastic relaxation times in biofilms. Physical review letters 93(9), 098102.
Sheikholeslami, R. (Ed.) (2007) Fouling in membranes and thermal units, a unified approach
- its principles, assessment, control and mitigation. Balaban Desalination
Publications.
Sheng, X., Ting, Y.P. et Pehkonen, S.O. (2008) The influence of ionic strength, nutrients
and pH on bacterial adhesion to metals. Journal of Colloid and Interface Science 321,
256–264.
Shigeta, M., Tanaka, G., Komatsuzawa, H., Sugai, M., Suginaka, H. et Usui, T. (1997)
Permeation of antimicrobial agents through Pseudomonas aeruginosa biofilms: a
simple method. Chemotherapy 43(5), 340-345.
Sibille, I., Sime-Ngando, T., Mathieu, L. et Block, J.C. (1998) Protozoan bacterivory and
Escherichia coli survival in drinking water distribution systems. Applied and
Environmental Microbiology 64(1), 197-202.
Simoes, M., Pereira, M.O. et Vieira, M.J. (2005a) Action of a cationic surfactant on the
activity and removal of bacterial biofilms formed under different flow regimes. Water
Research 39(2-3), 478-486.
Simoes, M., Pereira, M.O. et Vieira, M.J. (2005b) Effect of mechanical stress on biofilms
challenged by different chemicals. Water Research 39(20), 5142-5152.
Simoes, M., Simoes, L.C. et Vieira, M.J. (2008) Species association increases biofilm
resistance to chemical and mechanical treatments. Water Research 43, 229-237.
Song, L.F. (1998) Flux decline in crossflow microfiltration and ultrafiltration: mechanisms
and modeling of membrane fouling. Journal of Membrane Science 139(2), 183-200.
Southey-Pillig, C.J., Davies, D.G. et Sauer, K. (2005) Characterization of temporal protein
production in Pseudomonas aeruginosa biofilms. Journal of Bacteriology 187(23),
8114-8126.
Speth, T.F., Gusses, A.M. et Summers, R.S. (2000) Evaluation of nanofiltration
pretreatments for flux loss control. Desalination 130, 31-44.
Speth, T.F., Summers, R.S. et Gusses, A.M. (1998) Nanofiltration foulants from a treated
surface water. Environmental Science and Technology 32(22), 3612-3617.
Spoering, A.L. et Lewis, K. (2001) Biofilms and planktonic cells of Pseudomonas
aeruginosa have similar resistance to killing by antimicrobials. Journal of
Bacteriology 183(23), 6746-6751.
Stanley, N.R. et Lazazzera, B.A. (2004) Environmental signals and regulatory pathways that
influence biofilm formation. Molecular Microbiology 52(4), 917-924.
Stoodley, P., Cargo, R., Rupp, C.J., Wilson, S. et Klapper, I. (2002) Biofilm material
properties as related to shear-induced deformation and detachment phenomena.
Journal of Industrial Microbiology and Biotechnology 29(6), 361-367.
Strevett, K.A. et Chen, G. (2003) Microbial surface thermodynamics and applications.
Research in Microbiology 154(5), 329-335.
Subramani, A. et Hoek, E.M.V. (2008) Direct observation of initial microbial deposition
onto reverse osmosis and nanofiltration membranes. Journal of Membrane Science
319(1-2), 111-125.
Tamas, A.P. (Mémoire) (2004) Etude comparée du colmatage en nanofiltration et en
ultrafiltration d'eau de surface. Faculté des sciences et de génie, Université Laval,
Québec.
Tang, H., Cao, T., Liang, X., Wang, A., Salley, S.O., McAllister, J., 2nd et Ng, K.Y.
(2009) Influence of silicone surface roughness and hydrophobicity on adhesion and
colonization of Staphylococcus epidermidis. Journal of Biomedical Materials
Research Part A 88(2), 454-463.
211
Taylor, R.L., Verran, J., Lees, G.C. et Ward, A.J. (1998) The influence of substratum
topography on bacterial adhesion to polymethyl methacrylate. Journal of Materials
Science: Materials in Medicine 9(1), 17-22.
Tegoulia, V.A. et Cooper, S.L. (2002) Staphylococcus aureus adhesion to self-assembled
monolayers: effect of surface chemistry and fibrinogen presence. Colloids and
Surfaces B: Biointerfaces 24(3-4), 217-228.
Towler, B.W., Rupp, C.J., Cunningham, A.B. et Stoodley, P. (2003) Viscoelastic
properties of a mixed culture biofilm from rheometer creep analysis. Biofouling 19(5),
279-285.
Tsai, Y.P., Pai, T.Y. et Qiu, J.M. (2004) The impacts of the AOC concentration on biofilm
formation under higher shear force condition. Journal of Biotechnology 111(2), 155167.
Van der Mei, H.C., Rustema-Abbing, M., Joop de Vries, J. et Busscher, H.J. (2008) Bond
strengthening in oral bacterial adhesion to salivary conditioning films. Applied and
Environmental microbiology 74(17), 5511–5515.
van Oss, C.J. (1995) Hydrophobicity of biosurfaces - origin, quantitative determination and
interaction energies. Colloids and Surfaces B: Biointerfaces 5, 91-110.
Vasseur, P., Vallet-Gely, I., Soscia, C., Genin, S. et Filloux, A. (2005) The pel genes of the
Pseudomonas aeruginosa PAK strain are involved at early and late stages of biofilm
formation. Microbiology 151(3), 985-997.
Vejborg, R.M. et Klemm, P. (2008) Blocking of bacterial biofilm formation by a fish protein
coating. Applied and Environmental Microbiology 74(11), 3551-3558.
Vilain, S., Cosette, P., Hubert, M., Lange, C., Junter, G.A. et Jouenne, T. (2004a)
Comparative proteomic analysis of planktonic and immobilized Pseudomonas
aeruginosa cells: a multivariate statistical approach. Analytical Biochemistry 329(1),
120-130.
Vilain, S., Cosette, P., Zimmerlin, I., Dupont, J.P., Junter, G.A. et Jouenne, T. (2004b)
Biofilm proteome: homogeneity or versatility? Journal of Proteomic Research 3(1),
132-136.
Vinogradov, A.M., Winston, M., Rupp, C.J. et Stoodley, P. (2004) Rheology of biofilms
formed from the dental plaque pathogen Streptococcus mutans. Biofilms 1, 49–56.
Volk, C., Bell, K., Ibrahim, E., Verges, D., Amy, G. et LeChevallier, M. (2000) Impact of
enhanced and optimized coagulation on removal of organic matter and its
biodegradable fraction in drinking water. Water Research 34(12), 3247-3257.
Volk, C.J., Renner, C. et Joret, J.C. (1992) The measurement of BDOC: an index of
bacterial regrowth potential in water. Revue des Sciences de l'Eau 5, 189-205.
Vrany, J.D., Stewart, P.S. et Suci, P.A. (1997) Comparison of recalcitrance to ciprofloxacin
and levofloxacin exhibited by Pseudomonas aeruginosa bofilms displaying rapidtransport characteristics. Antimicrobial Agents and Chemotherapy 41(6), 1352-1358.
Vrouwenvelder, J.S., Graf von der Schulenburg, D.A., Kruithof, J.C., Johns, M.L. et
van Loosdrecht, M.C. (2009a) Biofouling of spiral-wound nanofiltration and reverse
osmosis membranes: a feed spacer problem. Water Research 43(3), 583-594.
Vrouwenvelder, J.S., Hinrichs, C., Van der Meer, W.G., Van Loosdrecht, M.C. et
Kruithof, J.C. (2009b) Pressure drop increase by biofilm accumulation in spiral
wound RO and NF membrane systems: role of substrate concentration, flow velocity,
substrate load and flow direction. Biofouling 25(6), 543-555.
Vrouwenvelder, J.S., Manolarakis, S.A., van der Hoek, J.P., van Paassen, J.A.M., van
der Meer, W.G.J., van Agtmaal, J.M.C., Prummel, H.D.M., Kruithof, J.C. et van
Loosdrecht, M.C.M. (2008) Quantitative biofouling diagnosis in full scale
nanofiltration and reverse osmosis installations. Water Research 42(19), 4856-4868.
212
Vrouwenvelder, J.S. et Van der Kooij, D. (2001) Diagnosis, prediction and prevention of
biofouling of NF and RO membranes. Desalination 139, 65-71.
Ward, M.H., Heineman, E.F., Markin, R.S. et Weisenburger, D.D. (2008)
Adenocarcinoma of the stomach and esophagus and drinking water and dietary
sources of nitrate and nitrite. International Journal of Occupational and
Environmental Health 14(3), 193-197.
Wagner, M., Ivleva, N.P., Haisch, C., Niessner, R. et Horn, H. (2009) Combined use of
confocal laser scanning microscopy (CLSM) and raman microscopy (RM):
Investigations on EPS - Matrix. Water Research 43(1), 63-76.
Waite, R.D., Paccanaro, A., Papakonstantinopoulou, A., Hurst, J.M., Saqi, M., Littler,
E. et Curtis, M.A. (2006) Clustering of Pseudomonas aeruginosa transcriptomes
from planktonic cultures, developing and mature biofilms reveals distinct expression
profiles. BMC Genomics 7, 162.
Waite, R.D., Papakonstantinopoulou, A., Littler, E. et Curtis, M.A. (2005) Transcriptome
analysis of Pseudomonas aeruginosa growth: comparison of gene expression in
planktonic cultures and developing and mature biofilms. Journal of Bacteriology
187(18), 6571-6576.
Walters, M.C., 3rd, Roe, F., Bugnicourt, A., Franklin, M.J. et Stewart, P.S. (2003)
Contributions of antibiotic penetration, oxygen limitation, and low metabolic activity
to tolerance of Pseudomonas aeruginosa biofilms to ciprofloxacin and tobramycin.
Antimicrobial Agents and Chemotherapy 47(1), 317-323.
Wang, Z., Zhao, Y.Y., Wang, J.X. et Wang, S.C. (2005) Studies on nanofiltration
membrane fouling in the treatment of water solutions containing humic acids.
Desalination 178(1-3), 171-178.
Whittaker, C., Ridgway, H. et Olson, B.H. (1984) Evaluation of cleaning strategies for
removal of biofilms from reverse-osmosis membranes. Applied and Environmental
Microbiology 48(2), 395-403.
Yang, C.Y., Tsai, S.S. et Chiu, H.F. (2009) Nitrate in drinking water and risk of death from
pancreatic cancer in Taiwan. Journal of Toxicology and Environmental Health-Part aCurrent Issues 72(6), 397-401.
Zimeri, J.E. et Kokini, J.L. (2003) Rheological properties of inulin-waxy maize starch
systems. Carbohydrate Polymers 52(1), 67-85.
Zisman, W.A. (1964) Contact angle, wettability, and adhesion. F.M. Fowkes. Washington, D.
C.: American Chemical Society, 43, 1-51.
213
Annexes
214
Annexe 1. Tables d’infrarouge.
215
216
217
218
219
220
221
Annexe 2 (Grossissement Figure 39). Spectres IR d’une membrane NF neuve (a) et d’une membrane après plusieurs années de fonctionnement
(b). La flèche verte (≈ 1650 cm-1) désigne la bande Amide I caractéristique des protéines, la flèche rouge montre un pic à 1040 cm-1 généralement
majoritaire du massif entre 900 et 1200 cm-1 représentant la matrice d’exopolysaccharides et le flèche noire indique le pic de sulfones autour de
700 cm-1 qui est un des pics de référence de la membrane NF. Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est
l'accumulation de plusieurs spectres IR.
222
Annexe 3. Images de la surface membranaire obtenues par microscopie confocale après 7
jours (a, e, i), 80 jours (b, f, j), 475 jours (c, g, k) et 717 jours (d, h, l) de fonctionnement après
triple marquage : a), b), c), d), DAPI (bleu), lectine AH-TRITC (rouge), Lectine TV-FITC
(vert) ; e), f), g), h), DAPI (bleu), lectine BS-TRITC (rouge), Lectine CA-FITC (vert) ; i), j),
k), l), DAPI (bleu), lectine UE-TRITC (rouge), Lectine LE-FITC (vert). Les flèches
représentent le sens d’interprétation des projections dans l’épaisseur (ZX et ZY), de la
membrane vers la surface du biofilm.
223
Annexe 4. Modélisation de la surface du biofilm NF après 7 jours (a, b, c, d, e), 80 jours (f, g,
h, i, j), 475 jours (k, l, m, n, o) et 717 jours (p, q, r, s, t) de fonctionnement. Cette modélisation
est obtenue grâce aux images acquises en microscopie confocale après triple marquage au
DAPI (bleu), aux lectines AH-TRITC (résidus β-gal(1->3)galNAc, rouge) et TV-FITC
(résidus (glcNAc)2, vert).
224
225
Annexe 5 (grossissement Figure 53). Evolution des spectres infrarouge au cours du temps de fonctionnement des membranes NF. a), b), c), d), et
e) représentent respectivement les spectres d’une membrane neuve et d’une membrane après 7, 80, 475 et 717 jours de fonctionnement. Les
flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique des protéines et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1)
caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation
de plusieurs spectres IR
226
Annexe 5 bis. Comparaison des valeurs relatives de signaux IR pour la bande amide I et amide II au cours des différentes études. a) Cinétique du
développement bactérien. b) Comparaison d'un biofilm NF après J717 jours et 7 ans de fonctionnement. c) Effets de la variation de la
concentration en carbone dissous dans l'eau d'alimentation sur le développement du biofilm NF. d) Effets d'un prétraitement UV d'une eau
d'alimentation filtrée sur sable (EFS) sur le développement du biofilm NF. e) Effets d'un prétraitement UV d'une eau d'alimentation filtrée sur
charbon actif (CAG) sur le développement du biofilm NF. f) Effets des nettoyages sur le biofilm NF après 80 jours de fonctionnement. g) Effets
des nettoyages sur le biofilm NF après 475 jours de fonctionnement. h) Effets des nettoyages sur le biofilm NF après 717 jours de
fonctionnement. i) Effets du stockage de la membrane sur le biofilm NF. j) Effets du nettoyage lors du stockage du biofilm NF.
227
Annexe 6. Evolution de la perméabilité membranaire (Kw) et du carbone organique total
(COT) dans l'eau d'alimentation au cours du temps de fonctionnement des membranes NF.
Annexe 7. Evolution du facteur de colmatage longitudinal (FCL) et du carbone organique
total (COT) dans l'eau d'alimentation au cours du temps de fonctionnement des membranes
NF.
228
Annexe 8 (grossissement Figure 60). Comparaison des spectres infrarouge des membranes NF en fonctionnement depuis 717 jours (a) et 7 ans
(b). Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique des protéines et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040
cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est
l'accumulation de plusieurs spectres IR.
229
Annexe 9. Modélisation de la surface du biofilm NF après prétraitement de l’eau
d’alimentation au sable (a, b, c, d, e) ou au charbon actif (f, g, h, i, j) après 20 semaines de
fonctionnement. Cette modélisation est obtenue grâce aux images acquises en microscopie
confocale après triple marquage au DAPI (bleu), aux lectines AH-TRITC (résidus β-gal(1>3)galNAc, rouge) et TV-FITC (résidus (glcNAc)2, vert).
230
Annexe 10 (grossissement Figure 65). Effet de la réduction de la matière organique dissoute dans l’eau d’alimentation sur les spectres IR de
membranes NF en fonctionnement pendant 20 semaines. a), b), c) sont respectivement les spectres obtenus pour une membrane neuve, pour une
membrane dont l’eau d’alimentation est filtrée sur sable ou sur charbon actif. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1)
caractéristique des protéines et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour
appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
231
Annexe 11 (grossissement Figure 71). Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres IR de membranes NF en
fonctionnement pendant 10 semaines. L’eau d’alimentation est filtrée sur sable. (a) présente les spectres d’une membrane neuve, (b) et (c),
absence et présence d’irradiation UV, respectivement. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique de la biomasse
et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender l'hétérogénéité du
dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
232
Annexe 12 (grossissement Figure 73). Effet du prétraitement de l’eau d’alimentation par irradiation UV sur les spectres IR de membranes NF en
fonctionnement pendant 20 semaines. L’eau d’alimentation est filtrée sur charbon actif. (a) présente les spectres d’une membrane neuve, (b) et
(c), absence et présence d’irradiation UV, respectivement. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) caractéristique de la
biomasse et les flèches rouges montrent un signal (≈ 1040 cm-1) caractéristique de la matrice d’exopolysaccharides. Pour appréhender
l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
233
Annexe 13 (grossissement Figure 74). Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane neuve. Les graphiques a), b), c), et d)
représentent respectivement les spectres IR de la membrane neuve conservée dans de l’eau ultrapure, après application du traitement chimique
(TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Pour appréhender l'hétérogénéité potentielle créée par les
nettoyages, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
234
Annexe 14 (grossissement Figure 75). Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement depuis 7 jours. Le
graphique a) représente les spectres de la membrane neuve. Les graphiques b), c), d) et e) représentent respectivement les spectres IR de la
membrane colonisée par du biofilm non nettoyée, après application du traitement chimique (TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du
traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes désignent la bande Amide I caractéristique des protéines (≈ 1650 cm-1) et les flèches
rouges montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque
graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
235
Annexe 15 (grossissement Figure 76). Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement depuis 80 jours. Les
graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la membrane colonisée par du biofilm non nettoyée, après application
du traitement chimique (TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes désignent la bande
Amide I caractéristique des protéines (1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (1040 cm-1). Pour
appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
236
Annexe 16 (grossissement Figure 77). Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement depuis 475 jours. Les
graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la membrane colmatée non nettoyée, après application du traitement
chimique (TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈
1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt
de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
237
Annexe 17 (grossissement Figure 78). Analyse ATR-FTIR de l’effet des nettoyages sur la membrane en fonctionnement depuis 717 jours. Les
graphiques a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la membrane colmatée non nettoyée, après application du traitement
chimique (TC), du traitement anti-protéique (TAP) et du traitement multienzymatique (TME). Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈
1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt
de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs spectres IR.
238
Annexe 18 (grossissement Figure 79). Analyse ATR-FTIR de l’évolution du dépôt de colmatage au cours du temps de stockage. Les graphiques
a), b), c), et d) représentent respectivement les spectres IR de la membrane neuve, colmatée non stockée, colmatée et stockée 4 semaines,
colmatée et stockée 8 semaines. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm-1) et les flèches rouges montrent le signal révélateur
des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation de plusieurs
spectres IR.
239
Annexe 19 (grossissement Figure 80). Analyse ATR-FTIR de l’effet du vieillissement du dépôt de colmatage sur l’efficacité des procédures de
nettoyage. Les graphiques a), b), et c) représentent respectivement les spectres IR de la membrane colmatée non stockée, de la membrane
colmatée stockée 4 semaines et de la membrane colmatée stockée 8 semaines. Les graphiques d), e), et f) représentent les spectres IR des mêmes
échantillons respectifs après nettoyage. Les flèches vertes désignent la bande Amide I (≈ 1650 cm -1) et les flèches rouges montrent le signal
révélateur des exopolysaccharides (≈ 1040 cm-1). Pour appréhender l'hétérogénéité du dépôt de colmatage, chaque graphique est l'accumulation
de plusieurs spectres IR.
240
Annexe 20. Evolution de la viscosité d'un biofilm NF soumis par application d'une vitesse de
cisaillement croissante puis décroissante.
241
Résumé
Le colmatage des membranes servant à la production d’eau potable par des procédés de nanofiltration
(NF) est un problème récurrent. Ce colmatage conduit à des baisses de performances des membranes
et donc à des surcouts de production. Le dépôt de colmatage des membranes de nanofiltration est
majoritairement composé par un biofilm microbien. Ce biofilm initie son développement rapidement
après le début de l’alimentation des membranes par adhérence des microorganismes à la surface des
membranes, multiplication de la biomasse fixée, augmentation de sa biodiversité, et synthèse
d’exopolymères de matrice. La maturation du biofilm NF est un phénomène lent qui dure plusieurs
années. Elle se traduit par un recouvrement total de la surface membranaire, une diversification des
résidus saccharides de la matrice et un développement de réseaux de filaments saccharidiques. Les
biofilms NF forment un matériau viscoélastique qui présente une forte cohésion interne avec un temps
de relaxation élastique analogue à d’autres biofilms décrits dans la littérature. La perméabilité
membranaire est affectée rapidement et continuellement tout au long du processus de développement
du biofilm alors que la charge longitudinale n’est affectée que lorsque le biofilm a atteint un certain
seuil. Ce biocolmatage peut être diminué mais pas éradiqué par des stratégies préventives et curatives :
prétraitements qui diminuent la quantité de carbone organique dissous biodisponible et la
concentration en microorganismes planctoniques viables dans l’eau d’alimentation, traitements
multienzymatiques ciblant les protéines et les polysaccharides de la matrice du biofilm. Des essais de
nettoyages à différentes échelles permettront d’optimiser les protocoles de nettoyage industriel des
biofilms NF, un protocole de conservation de coupons de membranes colmatées compatible avec des
essais de nettoyage in vitro a été développé.
Mots clés : biofilm, viscoélastique, rhéologie, microscopie confocale à balayage laser, spectroscopie
infrarouge à transformée de Fourier, nanofiltration, eau potable, nettoyage, prétraitement.
Abstract
Fouling of membranes during water treatment by nanofiltration processes is a recurrent problem. This
fouling leads to membrane performance decreases and then to additional costs of production. Fouling
of membranes for drinking water production results mainly from the accumulation of a biofilm at the
membrane surface The NF biofilm begins its growth fastly after membrane feeding with surface water
by microorganism adherence to the membrane surface, multiplication of the sessile biomass, matrix
biopolymers synthesis. The biofilm matruration is a slower phenomenon which lasts many years.
Maturation consists in total covering of the membrane surface, matrix residues diversification, and
development of the polysaccharides filament network. The NF biofilms exhibited viscoelastic
behaviour with high internal cohesiveness and an elastic relaxation time lying within the range
previously determined for various biofilms. The NF membranes permeability decreased fastly and
continuously all along the biofilm development process but the longitudinal pressure drop increased
only after the biofim reached a quantitative threshold. Biofouling can be decreased but can not be
eradicated by preventive and curative treatments: pretreatments decreasing biodegradable organic
carbon and viable planctonic microorganisms in the feed water, multienzymatic treatments targeting
proteins and polysaccharides of the biofilm matrix. Cleaning tests at different scales are needed to
improve the industrial cleaning efficiency of NF membtranes. Instead of proceeding to full scale
cleaning tests, chemical cleaning can first be experimented on fouled membrane samples cut from
industrial modules. After extracting one fouled module from the plant, cleaning experiments of the
stored membranes can be done over a period of time in ultrapure distilled water, allowing to compare
the efficiency of different chemical agents toward identical fouled membrane cuttings.
Keywords: biofilm, viscoelastic, rheology, confocal laser scanning microscopy, attenuated total
reflected fourier transformed infrared spectroscopy, nanofiltration, potable water, cleaning,
pretreatment.
242