Moladji L`enfant terrible
Transcription
Moladji L`enfant terrible
Accroches n°52 21 MUSIQUES | Chanson Moladji L’enfant terrible F igure familière du rock francophone, novice légendaire, David Ricci surfe sur ce paradoxe pour donner vie aux chansons de Moladji. Épaulé par Sacha Toorop (Zop Hopop) et autres fins musiciens d’ici, l’artiste promène ses mots sur les trottoirs de notre quotidien. Jamais marrants, toujours justes, ces textes épouseront bientôt les mélodies d’un premier album. À ranger entre Arno et Jacques Higelin. À écouter du soir au petit matin. | Nicolas Alsteen | Ma musique ne s’adresse pas aux hipsters. Sacha Toorop (Zop Hopop) est impliqué dans la réalisation de votre album. Quel est son rôle précis ? Sacha est notre producteur. C’est le directeur artistique du projet. Sur la base de son expérience, c’est lui qui va trancher, opter pour les meilleures solutions. Sacha Toorop a travaillé avec Dominique A, Yann Tiersen ou Françoiz Breut. Dans mon entourage, c’est la personne qui connaît le mieux le métier. Il est multi-instrumentiste, développe énormément d’idées et chante formidablement bien. C’est une forte personnalité, une vraie personne de confiance. Vos chansons jettent un regard critique, voire désabusé, sur © MOLADJI l’état du monde. Pourtant, la musique Pouvez-vous revenir sur la de Moladji ne plombe jamais genèse du projet, l’avant Moladji ? l’ambiance. Recherchez-vous cette DAVID RICCI (VOIX ) : De 1991 à ambivalence, ce décalage, entre 1996, je jouais avec les Chamalow, textes et mélodies ? un groupe de rock français, actif dans la province de Luxembourg. En cinq ans, on a joué plus de 300 concerts. Après cet épisode, j’ai arrêté de chanter, mais pas d’écrire. J’ai bossé un temps comme régisseur à la Soundstation, l’ancienne salle de concerts liégeoise. En 2007, j’ai commencé à retravailler sur mes textes avec beaucoup d’envies, mais sans réellement savoir dans quelle direction avancer. J’ai alors multiplié les expériences avec des musiciens différents sous le nom de Moladji. En 2009, le groupe s’est stabilisé autour du line-up actuel. Au début du projet, je me cantonais dans un pessimisme ambiant. Aujourd’hui, je cherche d’abord à partager quelque chose de positif. Cela dit, je suis incapable d’écrire un morceau rigolo et sautillant. En règle générale, je me laisse aller. Je fonctionne au naturel en essayant d’écrire des chansons dans l’air du temps. Et là, on ne peut pas dire que l’époque soit aux grandes réjouissances. Certaines régions du monde vont mal. L’Europe n’est pas vraiment épargnée. On est dans une période de déclin et de remise en question de notre mode de vie. Chanter que tout va bien quand le monde s’écroule, ce n’est pas mon genre. Depuis plusieurs années, vous êtes installés dans la province de Liège. Mais vous êtes d’origine gaumaise. La région vous manque-t-elle parfois ? Si je suis nostalgique, c’est surtout de la Gaume d’avant. L’appel des gros salaires luxembourgeois a considérablement modifié l’équilibre social de la région. Les forêts et la campagne sont toujours là. Mais l’état d’esprit, le franc-parler et la gouaille régionale ont tendance à disparaître au profit des grosses bagnoles à plaques jaunes et d’une société bien-pensante au portefeuille trop rempli. Il reste des jeunes, des mecs à la ramasse et des gens formidables. Il existe toujours un côté filou et taré en Gaume, mais il faut mieux chercher pour le trouver. Ma famille et mes amis les plus chers vivent toujours là-bas. C’est ma région de cœur. Le nom de scène Moladji trouve d’ailleurs ses origines dans l’argot gaumais. Cela signifie l’enfant turbulent . Vous voyezvous parfois comme le vilain petit canard de la chanson française ? C’est difficile à dire. Je vais attendre la sortie de l’album avant de me prononcer. Pour l’instant, je me sens surtout novice. Je n’ai aucune idée de la place que peut trouver Moladji sur la scène locale, belge et internationale. À la veille de la sortie du disque, quelles sont vos attentes ? On compte vraiment sur l’album pour passer en radio. Aujourd’hui, dans la chanson, c’est essentiel. Je dois cibler les bonnes radios et le bon public. Ma musique ne s’adresse pas aux hipsters. Là, je ne juge pas, je suis réaliste. Mes textes parleront plus facilement à des auditeurs aguerris, des gens de 30 à 77 ans qui, d’une façon ou d’une autre, ont déjà un background en chanson française. www.moladji.com CD MOLADJI (Koko Records )