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1 LA COMPAGNIE DE TROP
Avec
Marion BOTTOLLIER, Sandra CHOQUET, Cyril TEXIER
et Diane REGNEAULT
Création sonore : Guillaume CALLIER
Costumes
et scénographie : La Compagnie de Trop, avec la collaboration de Laurianne
SCIMEMI
2 Il est tôt Claire dort encore. Mais c’est l’heure
De se lever d’aller aux toilettes de déjeuner de retourner aux toilettes de se laver de s’habiller de se
coiffer de se brosser les dents de se coiffer de se maquiller de mettre un bijou
C’est l’heure de se regarder dans la glace
et de fermer la porte à clé deux tours pour le verrou du haut et un autre pour celui du milieu
c’est l’heure de courir pour ne pas rater le transport de 7h50 de changer de descendre au terminus
prendre la rue de gauche puis celle de droite c’est l’heure de franchir la porte du bâtiment de saluer
Pierre Paul et Jean c’est l’heure du bureau de la machine à café du remplissage de feuilles de l’usage
du papier hygiénique c’est l’heure de la cantine de la machine à café du remplissage de feuilles de
l’usage du papier hygiénique
c’est l’heure de la fin
17h50 rangement
18h00 départ
18h14 transport
18h54 arrivée
19h00 les petites courses
19h25 la cuisine
19h50 dîner
20h00-20h40 : conversations en tous genres
20h50 : la petite émission
22h40 : au dodo
06h45 : réveil
06h50 la grosse commission 06h55 petit déjeuner 07h13 les toilettes 07h15 se laver 07h22 s’habiller
07h26 se coiffer 07h29 se laver les dents 07h32 se maquiller mettre un bijou
07h38 fermer la porte à clé
07h40 courir pour ne pas rater le transport de 07h50 08h02 changement 08h30 descente au terminus
08h50 la porte du bâtiment Pierre Paul Jean 09h00 machine à café 10h20 pause pipi 11h50 midi
12h30
12h52 13h13 14h12 15h25 16h50 17h08 17h50 18h00 18h14 18h54 19h00 19h2519h50 20h00 20h40
20h50 22h40 06h45 06h50 06h55 07h13 07h15 07h22 07h26 07h29 07h32 07h38 07h40 07h50 08h02
08h30 08h50 09h00 19h20 11h50 12h30 12h52 13h13 14h12 15h25 16h50 17h08 17h50 18h0018h14
18h54 19h00 19h2519h50 20h00 20h40 20h50 22h40 06h45 06h50 06h55 07h13 07h15 07h22 07h26
07h29 07h32 07h38 07h40 07h50 08h02 08h30 31
31 12 52 365 3650 10950 10950
109511095210953
10954 10955
10956
3 RESUME
Claire est une femme sans histoire.
Le matin, elle se lève, part au travail ; le soir elle rentre chez elle dormir. Les jours se suivent dans
cette routine sans incident. Pourtant quelque chose se fissure dans l’esprit de Claire.
Une voix l’incite à ouvrir les yeux sur son quotidien.
La voilà maintenant qui se regarde vivre. Jugeant avec effroi le vide de son existence.
Rien ne lui arrive, il ne se passe rien. Juste la succession des heures organisées, seulement le
passage du temps échéant.
La vie jusque-là acceptée, devient insupportable : C’est le réveil irréversible de l’angoisse.
Claire, poussée par cette voix intérieure qui continue de l’habiter, prend la décision de changer ses
heures banales en une vie originale.
On ne saura jamais vraiment quelle extravagance ni quel désespoir la mèneront à faire le choix de la
folie comme emblème de l’originalité parfaite. Mais Claire ne peut plus se sortir cette idée de la
tête : devenir folle, c’est la seule façon de profiter pleinement d’une vie différente. Ça devient une
idée fixe, et Claire s’y soumet, corps et âme. Abandonnant la logique commune pour se réfugier
dans des syllogismes dangereux, pleine de l’espoir d’inverser la raison admise. Luttant
maladroitement avec les clichés de la marginalité qu’elle tente en vain de s’approprier.
Peu à peu, Claire s’enferme dans un espace dont elle ne sortira plus : sa chambre, représentation
d’un espace mental désordonné et aveugle ; Claire déserte le monde pour y rester seule, en tête en
tête avec son obsession, la folie : cet endroit pour se rappeler l’intégralité de la vie et oublier la
mort, peut-être.
La démence, elle la cherche dans les livres de psychologie, dans l’ivresse, dans l’amour blessé, dans
d’autres souffrances que les siennes.
Des phrases qui ne lui appartiennent pas sortent de sa bouche ; Claire ne connaît pas ceux qui les
ont prononcées un jour.
Des fantômes de la littérature dramatique viennent visiter Claire ; à travers son corps, ils
reconstituent l’histoire du théâtre et invitent la jeune femme à s’approprier cette histoire pour
inventer la sienne. Dans le prolongement de la leur.
Une nouvelle voix intérieure apparaît. Elle identifie tous ces revenants qui s’accaparent le cerveau
de Claire.
Un être irréel se débat, quatre actes durant, avec le réel pour atteindre l’état de fiction.
On ne sait pas si, à la fin, Claire, femme de notre monde et de notre temps meurt de sa folie, on sait
simplement qu’elle existe désormais comme présence théâtrale. Qu’elle vient de naître comme
personnage ; peut-être comme actrice.
La pièce commencerait alors au moment où elle paraît s’achever.
4 Comment vivre ?
Mais vraiment vivre.
Une vie à moi.
Pas une existence simplement soumise aux contraintes et aux circonstances,
pas une existence qui dépende seulement de la volonté des autres.
Je veux préserver une part,
une toute petite part qui m’appartienne ;
quelque chose.
Quelque chose dont à la fin je dirai :
Voilà, ça, c’était ma vie ;
pour le reste…
je m’en fous ;
mais ça,
ce choix-là :
Vous ne me l’enlèverez pas.
5 JEU AVEC LA THEATRALITE
Au début, il n’y a rien, presque rien sur le plateau, une table, une chaise et deux pendrillons en fond
de scène. Comme un reste d’ancien décor.
Au début, il n’y a personne, simplement une voix, qui sort de derrière les rideaux. On pense aux
fantômes du théâtre, plus probablement à des didascalies.
Une femme passe et repasse, sans s’attarder, parfois elle amène un objet : un verre, des gants, un
journal… On pense à une régisseuse.
S’amuser à faire croire à une chose pendant qu’une autre se joue, c’est à quoi
nous passons notre temps dans ce spectacle. Détourner les codes du théâtre
(qu’ils soient littéraires ou scéniques), nous moquer des acteurs en même temps
que l’on célèbre le jeu, faire appel à la tragédie comme un tremplin pour nous
élancer dans la comédie, déplacer le sérieux, tâcher de brouiller les définitions,
nous perdre dans les frontières.
Sans jamais nous départir de l’humour.
Nous commençons avec une pièce pour terminer avec une autre.
La voix de derrière les rideaux n’a rien à voir avec des didascalies qui seraient diffusées en voix-off,
c’est une tête coincée entre deux pendrillons, une tête qui se découvre de plus en plus : d’abord on
ne distingue qu’une chevelure sombre puis au fur et à mesure que passent les jours pour l’écriture et
les minutes pour la scène, un visage se découvre. Quelqu’un est là.
La femme qui passe et repasse et qu’on prenait pour une régisseuse ou une costumière finit par
s’asseoir un petit moment, elle repart, revient, reste un peu plus longtemps à chaque retour. Elle se
met à parler, d’abord de simples mots de politesse au téléphone, quelques banals commentaires pour
elle-même, puis une ou deux réflexions.
6 Claire Du Puits, née un neuf décembre à la campagne,
Y a grandi jusqu’à l’âge de sept ans,
Est partie vivre dans des villes de plus en plus grandes, pour étudier puis
Travailler.
Sans goût particulier pour les études, sans affinité avec une quelconque profession.
Ne pas se plaindre.
J’ai des amis. J’ai des amants. Les gens m’aiment bien.
Je ne mange pas trop.
Je ne bois pas trop. Je vis bien.
Je gagne correctement ma vie. Je ne dépense pas mal.
Je paye un loyer, je paye des factures, le restaurant, les cafés, les soirées.
J’ai des plaisirs et des distractions.
J’ai appris à gérer mon argent, ces derniers temps j’ai même acheté un chien.
J’ai appris à organiser mon temps :
Il reste une place pour l’imprévu,
L’ennui passe inaperçu.
Je vais bien.
Un somnifère.
7 Bientôt, Claire a des bizarreries, elle présente des signes anormaux. Sa folie grandit.
Et plus sa folie grandit, plus Claire se confond avec une actrice.
Une actrice habitant sur une scène qu’elle ne veut plus quitter, revivant tout à la fois les rôles
qu’elle a joués autrefois ou ceux qu’elle aurait aimés incarner…
Une actrice qui refuserait d’avoir des partenaires et voudrait séquestrer les spectateurs du théâtre
pour qu’ils la regardent vivre.
La pièce devient de plus en plus le lieu du théâtre ou un texte dans lequel s’enferme un personnage,
et de moins en moins chambre.
Quand la voisine frappe à sa porte, elle frappe d’abord treize puis trois coups.
Quand Claire veut boire de l’alcool, dans la bouteille, le vin a été remplacé par du jus de pruneaux.
Des cintres, tombe une pluie de journaux trempés de sang ; c’est l’actualité qui intervient comme un
deus ex machina.
Claire se sent observée par des présences étrangères.
L’écriture du texte et du spectacle, joue en permanence avec cette possibilité
d’une double lecture : ou bien Claire est une femme ordinaire que la dépression
ou le vide de l’existence mène à la folie, ou bien c’est une actrice que le manque
ou le surplus d’incarnation mène à la démence.
Nous sommes dans la vie ordinaire, ou dans un théâtre, c’est selon. Cela est
valable non seulement pour le personnage de Claire mais pour tous les autres
personnages.
Si nous sommes dans la vie ordinaire, nous avons à faire à des hommes et des femmes, si nous
sommes au théâtre, à des figures types.
Notons ici, et c’est une autre des particularités d’ORIGINALE, que Claire évite avec un entêtement
risible et inquiétant tout échange avec des êtres « ordinaires ».
A moins qu’il n’y ait une porte, un écran, un combiné téléphonique : une distance matérielle
infranchissable entre elle et la chair de ses semblables, Claire ne veut plus voir personne, ni parler à
qui que soit.
Elle fuit ses semblables de peur qu’une relation avec eux ne l’entraîne dans un schéma de pièce
classique.
8 LES AUTRES PERSONNAGES
Ils sont systématiquement relégués à l’extérieur de la pièce.
Il y a la mère, elle n’est admise que comme voix au téléphone et si elle a le malheur de
prétendre à une visite, elle se verra interdire tout accès à la chambre.
La mère, ce pourrait être aussi la vieille actrice qui fut célèbre en son temps et qui essaie
aujourd’hui de prodiguer quelques conseils à la nouvelle génération.
Il y a la voisine, elle est autorisée à rester sur le seuil derrière la porte, jamais à entrer chez
Claire.
La voisine, ce pourrait être une actrice de boulevard ou une servante de Molière peut-être.
Il y a l’amoureux. On pourrait croire à son entrée qu’un personnage enfin arrive de
l’extérieur, mais si Claire l’accueille chez elle, elle le fait en fermant les yeux, au sens propre du
terme : jamais elle ne le regardera.
Claire reporte sans cesse « la scène d’amour », elle essaie d’abord de préparer au mieux son
partenaire pour qu’il lui donne parfaitement la réplique et faire ainsi de leur rencontre un moment
mythique. Evidemment c’est le fiasco et lorsque l’amoureux, n’y tenant plus, finit par demander à
Claire d’ouvrir les yeux, elle le chassera de chez elle à coups de pied et d’insultes. Pour les
personnages, la scène n’aura pas lieu ; les acteurs, eux, auront joué à ne pas jouer ensemble.
L’amoureux, ce pourrait être le jeune premier d’une pièce romantique.
Leur histoire qui avait commencé sur un site de rencontre finira, non pas dans de grandes tirades
dramatiques comme l’aurait souhaité Claire, mais par un échange de sms en vulgaire langage texto.
Le messager d’autrefois est ici évincé par les outils technologiques modernes.
Auteur et metteur en scène interrogent les nouvelles possibilités de jeu maintenant
que deux personnes n’ont plus besoin d’être physiquement en présence l’une de
l’autre pour parler ensemble.
Quels nouveaux dialogues cela permet-il d’écrire ? Quels nouveaux codes de jeu cela permet-il
d’inventer ?
Evoquons aussi la présence des deux machinistes à la fin de la pièce qui viennent ôter le
décor du spectacle et vider le plateau, vêtus de noir et que Claire, prend à tort aussi bien qu’à raison,
pour deux infirmiers venus l’emmener dans une clinique.
Avec tous ces personnages, Claire n’établira pas de véritable relation ; les êtres réels de chair et de
sang, ne sont pas faits pour entrer dans cette pièce là, ils restent des voix à l’extérieur.
Dans la chambre, au début, seuls les animaux sont admis : un poisson rouge invisible, puis la
chienne, Diane enfermée dans une boîte ; elle sera rapidement chassée à coups de pied. Comme
plus tard l’amoureux.
Très vite, la chambre est réservée uniquement aux apparitions et aux fantômes, l’incarnation
accordée seulement aux présences irréelles. Et c’est un autre des paradoxes avec lesquels nous
jouons : comment faire jouer l’invisible à nos corps palpables, comment incarner des
êtres dont la nature est justement la désincarnation ?
9 Qui se souviendra que moi aussi j’étais vivante ?
Que la sensation de la vie battait dans mes veines ?
10 CLAIRE ET SES DOUBLES
Les seuls êtres admis chez Claire sont des doubles, des projections d’elle-même. Autrement-dit
personne.
D’abord, il n’y a que Lomise, voix intérieure lointaine qui se rapproche et s’incarne de plus en plus.
Claire n’a pas tout de suite conscience de sa présence. Elle ne voit pas Lomise qui reste deux actes
durant dans son dos à observer tous ses faits et gestes.
Au début, nous ne savons même pas si Claire entend Lomise. Le dialogue qui s’établit entre elles
est hasardeux, presque accidentel.
Jouer ensemble, développer une conscience aigue du partenaire, être attentif à tous
ses faits et gestes mais que les personnages ne se doutent pas toujours de la présence
des autres, c’est un des paradoxes de la scène qu’explorent avec jubilation les
actrices.
Au moment où Claire prend nettement conscience de la présence de Lomise, une troisième figure
féminine apparaît : la Femme-Bibliothèque ; double du double, voix intérieure de la voix intérieure.
C’est par l’apparition de la Femme-Bibliothèque que la présence du théâtre et de son histoire
devient lisible.
Dès que Claire tente une phrase, une idée, un geste pour accéder à l’originalité qu’elle s’est fixée, la
Femme-Bibliothèque vient rappeler que cette phrase, cette idée et ce geste ne lui appartiennent pas,
mais que d’autres les ont déjà accomplis avant elle et d’autres encore avant eux… Ces autres
peuvent aussi bien être des personnages fictifs que des personnes réelles, pour elle ça ne fait aucune
différence. Le rôle de la Femme-Bibliothèque consiste à prouver que l’originalité n’existe pas, qu’il
n’y a que des références. Références qu’elle connaît et qu’elle cite, dès que l’occasion se présente,
non pas avec la gravité d’une bibliothécaire trop sérieuse mais avec la joie de l’ironie et le plaisir
des labyrinthes.
11 Dans une histoire du théâtre, Claire serait le personnage, Lomise l’auteur et la
femme-bibliothèque, l’inconscient de l’auteur, la mémoire collective de la littérature
et plus précisément des œuvres théâtrales, un « sur-narrateur » en quelque sorte.
Les volontés de ces trois entités s’affrontent :
Il y a la volonté de Lomise, probable auteure d’une silhouette dont elle ne sait à peu près rien mais
de laquelle elle veut s’emparer pour créer un personnage.
Il y a celle de la Femme-Bibliothèque, toujours insatisfaite de l’histoire en cours, appelant Lomise,
et donc Claire, à dépasser l’écriture.
Il y a celle de Claire, une femme qui, n’ayant pas la moindre idée de son potentiel fictionnel, résiste
aux auteurs pour tenter d’inventer elle-même son propre récit.
Qui manipule qui ?
12 follefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefolle
follefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefolle
J’y suis presque ! Il ne faut pas que j’y pense !
Je n’y suis pas presque…je n’y suis pas presque…
Je suis FOLLEFOLLEFOLLE je n’y suis pas
FOLLEFOLLEFOLLE
FOLLE
FOLLE
FOLLE je
FOLLE
pas
presque…
n’y
suis
pas
presque…
presque…pas
FOLLE
presque…FOLLE
FOLLEFOLLEFOLLE
FOLLE
Je n’y suis pas du tout !
Je suis guérie avant même d’être malade !
C’est de sa faute ! Le presque ! C’est lui ! Il gâche tout !
A cause du presque folle je suis complètement normale !
Non.
Non.
Je
suis
folle je
suis folle je
suis folle je
suis folle je
suis
Pas de presque. Anéantir le presque.
Je suis fooooooooooooooooooooooLfoooooooooooooooLfOlfOl FOL
Trouver une langue où le mot presque n’existe pas et apprendre à penser dans cette langue.
folle très folle folle. Elle est folle. Elle est folle. Elle est folle. Elle est folle. Elle est folle.
Très folle foltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfolfoltrèfol
Il ne sera pas dit d’elle qu’elle a presque réussi car alors elle aura échoué
follefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefollefolle
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
folfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfolfol
Ne pas s’endormir.
Ne pas s’endormir.
Ne pas s’endormir
FFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFFOLLE.
FOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOLLE.
FOLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLE.
FOLLEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE. 13 LA FOLIE DE CLAIRE
La folie, ce n’est pas uniquement le personnage de Claire qui la représente mais toute la
structure du texte, par un jeu de miroirs sans fond, de poupées-gigognes drôles et inquiétantes.
La folie ce n’est pas tant Claire que la pièce dans laquelle elle se trouve : Un enchevêtrement
où la surenchère mène nécessairement la raison au bout de ses limites.
Dans la tête de Claire : Lomise ;
Dans la tête de Lomise : la Femme-Bibliothèque,
Dans la tête de la Femme-Bibliothèque : tous les personnages de toutes les pièces de théâtre,
même celles qui n’ont pas encore été écrites.
Autant de présences encastrées dans la tête de Claire.
Sa folie est une arborescence à croissance exponentielle.
Trois figures féminines dessinent une seule et même femme. La folie, c’est le conflit entre ces
trois figures.
Lomise, prisonnière des murs d’une chambre où elle s’ennuie à mourir attend de Claire une
proposition -une seule- qui sorte de l’ordinaire au point de n’avoir jamais été expérimentée
par personne. Cette proposition, en même temps qu’elle délivrerait Claire du quotidien, la
libérerait elle de ses murs.
On pourrait dire que Lomise, tête pensante mais figée, attend de Claire un corps qui mettrait
en branle ses désirs, dans l’espoir qu’à elle, Lomise, la procuration suffira.
La proposition tant escomptée n’arrivera pas ; tout a déjà été dit ou pensé par quelqu’un
d’autre, tout le sera ; la Femme-Bibliothèque le rappelle sans cesse.
Ce rappel permanent que les actes et les pensées quels qu’ils soient, ne sont la propriété de
personne et appartiennent à tous, a le don de rendre folle, non pas Claire qui ne verra ni
n’entendra jamais la Femme-Bibliothèque mais Lomise.
Et c’est ainsi que Lomise, aliénée par la Femme-Bibliothèque, essaie de contaminer Claire de
sa folie ; mais Claire ne contribue qu’à faire croître la folie de Lomise en cherchant avec
acharnement une démence inaccessible.
La folie de Claire est aussi une folie par contagion, une folie qui se mord la queue.
Claire ne se doute de rien, elle continue à chercher une démence idéale, inatteignable, sans
rien soupçonner de celle qui s’empare de son être.
C’est peut-être cela le comble de la folie, vouloir devenir fou et méconnaître que nous le
sommes déjà.
Encore une fois, rappelons que pour nous atteler à ce sujet, nous avons choisi de
céder la priorité à l’humour. Un humour exacerbé par quelques accents de
gravité.
14 Liste pratique pour une vie originale : 1) Mmmmm… Se teindre les cheveux en bleu !
Déjà vu.
2) Acheter un rat ?
Déjà fait.
3) Devenir végétarienne.
Déjà pris.
4) Contredire systématiquement tout et n’importe quoi. C’est courant.
5) Dormir la fenêtre ouverte toute l’année, c’est dangereux.
6) Trouver un style vestimentaire remarquable. C’est pas mal ça. Enfin, c’est la mode.
7) Pisser debout.
Personne ne le verra.
8) Vivre en communauté ! C’est ringard !
9) Quitter la ville pour garder des chèvres en Lozère…C’est la merde.
10) Détruire la société. C’est mort.
Se tatouer…se scarifier…se faire percer…vaincre la timidité, se promener nue, apprendre une langue
morte, accoucher de cinq enfants en une seule fois, aimer un cheval, épouser un arbre, habiter avec des
moines, faire le tour du monde à pied, battre le record d’amis virtuels, devenir célèbre, réciter des
poèmes aux heures de pointe…parler à l’envers…
La tante Marie le jour des règles, Sylvie les soirs de devoir conjugal, pas mal d’autres femmes, beaucoup d’hommes, Mais surtout Olga Déjà pris
Ah c’est
Irina, la sœur d’Olga mais aussi Camille quand elle a une envie pressante devant le porte close des toilettes occupées, un groupe d’adolescentes dans le dernier manège à grande vitesse, des mères inquiètes… Souche inchangée
Trouve autre chose
Cherche ! Cherche
Verchinine
Ma tête, j’ai mal à la tête.
Ah c’est affreux, affreux, affreux !
Des platitudes, rien que des platitudes.
Des schémas !
Je suis tellement limitée !
Ma vie n’est qu’un brouillon !
Ça ne pourra pas durer
comme ça
Sur le mur, à travers le bleu ébloui des bouquets depuis longtemps dégradé en de tristes ecchymoses,
derrière les verts d’autrefois étalant aujourd’hui une mine glauque, sous les tâches marron déjà jaunies
par le passage du rose et l’usure du blanc, le visage radieux d’une jeune étranglée
Je ne me reconnais nulle part !
15 JEU AVEC LES MOTS
Les mots, les expressions de la langue française qui ont été nos principaux outils lors de
l’écriture d’ORIGINALE sont restés des partenaires de jeu pour sa mise en scène.
Deux ou trois exemples :
Claire dit : « Je ne suis pas dans mon assiette », elle le fait en constatant que son reflet, qu’elle
a perçu dans un verre d’eau, n’est pas visible dans la porcelaine.
Lorsque l’amoureux arrive, elle prépare six roses dans une carafe, et lui sert à boire cette eau
de roses, pour l’envoûter. Avant son arrivée, elle écoute des sons d’éclairs : de coups de
foudre...
Ces expressions prises au pied de la lettre, au-delà du fait d’inciter l’acteur à jouer, nous
parlent également de la folie. Car c’est en effet un des symptômes de la folie de n’être plus
capable de comprendre le sens figuré des choses, mais de les entendre uniquement dans leur
sens propre.
16 J’ai besoin d’une névrose.
Quelque chose qui m’aurait pertubée quand j’étais petite.
Apparemment le mieux ce serait un truc sexuel.
Je passe tout en revue sans rien omettre.
une faute sans pardon
Ce n’est pas net.
Pas net du tout.
Je ne me rappelle de rien.
ce serait un bon début
Aucun souvenir.
Comme si je n’avais pas eu d’enfance.
C’est bizarre.
Peut-être que…
Mais oui, bien sûr !
Tous les traumatismes sont refoulés dans l’oubli,
Je n’ai pas de souvenirs :
Donc je refoule un traumatisme.
C’est évident.
Je refoule.
Je n’en reviens pas !
JE REFOULE !
C’est merveilleux !
[…]
J’ai un corps sain, c’est pour ça que mon esprit est sain,
Si j’avais un corps malsain, mon esprit serait malsain,
Donc,
Si je veux un esprit malsain, il me faut un esprit malsain
[…]
UN CHAGRIN D’AMOUR ! Il me faut un chagrin d’amour !
L’amour rend fou
Je veux être folle
Donc il faut que j’aime
C’est beau !
L’amour va me détruire.
L’amour pur, l’amour fou,
Je deviens une héroïne !
17 LE SON
Il contribue à raconter la folie de Claire, et la schizophrénie de l’histoire.
Les hallucinations de Claire, nous les avons voulues sonores afin que la double lecture
possible non seulement se voit, mais s’entende également.
C’est aussi grâce au son que nous rentrons dans la tête de Claire :
Il y a d’un côté les troubles auditifs de la femme, de l’autre, ceux du personnage.
La folie de Claire commence d’abord par le dérèglement de sa perception des sons quotidiens,
trop quotidiens : le réveil, la chasse d’eau, le bruit des couverts et de la mastication, les
aboiements de la chienne… tous ces bruits familiers se mettent à sonner étrangement ; il y a
un grain dans les mécanismes.
Et puis on perçoit aussi ces autres sons qui s’insinuent dans le cerveau de Claire, ils n’ont pas
de prise avec les objets réels. D’ailleurs on ne sait pas tout de suite les identifier, le sens des
sons advient avec la montée du délire, nous reconnaissons des bruits de papier, grignoté,
déchiré, de pages tournées.
On se croirait dans un vieux grenier, une bibliothèque plus sûrement.
Le monde réel et celui des livres se confondent, fiction et réalité se mordent la
queue. Ça s’entend. Nous n’échappons pas à la littérature, alors rions avec elle.
18 L’ESPACE
Dès l’écriture, la page blanche a été conçue comme un plateau nu : les personnages ont
chacun une place sur la page, tous sont représentés par une police différente…
La folie, nous avons également tenté de la traduire graphiquement : certains passages ont
plusieurs sens de lecture possible, un même mot peut être répété et agrandi plusieurs fois
jusqu’à envahir la page, des dessins sont projetés dans le texte…
Sur le plateau, ce sont tous ces indices graphiques que nous avons suivis pour mettre en scène
les personnages : la folie de Claire.
Claire et Lomise sont dans un même espace : la chambre, délimitée par un tracé blanc.
Au début, elles se partagent simultanément cet espace, l’une est à peine visible quand l’autre
est là ; Lomise a sa place dans le mur littérairement et derrière le rideau scéniquement, Claire
vit dans la chambre.
Cela ne dure pas.
L’espace physique, tout comme l’espace mental, est lui aussi une guerre.
Chez qui sommes-nous ?
La Femme-Bibliothèque elle, est en dehors, dans les coulisses de l’espace-chambre. Les
coulisses de cet espace, c’est justement le théâtre.
Quand elle en trahit la présence (sortant d’un amas de pendrillons qui dissimulait des piles de
livres qui la cachaient elle), la Femme-Bibliothèque le fait au sens double du mot, mettant au
jour non seulement un genre de la littérature mais également le théâtre physique : le bâtimentthéâtre ; transformant ainsi la chambre de Claire en un décor éventuel, la pièce en une
probable répétition, où se déroulent peut-être des improvisations vouées à être écrites.
Ce qu’on appelle la chambre dans le texte, est représenté sur la scène par une simple table et
une chaise. Le décor, fantomatique, lui aussi fait appel au passé.
Nous jouons avec les miettes d’une ancienne scénographie dont il ne reste à peu près rien,
sinon, le plus insignifiant : une table, une chaise.
La table est utilisée comme une petite scène sur la grande (là encore, on retrouve le principe
d’emboîtement). Elle peut servir de table ou de lit, ses tiroirs sont des coulisses d’où sortent
les accessoires nécessaires : C’est depuis le déploiement des objets et de ce qu’il en restera sur
le plateau que le lieu s’invente.
De même que la pièce est en train de s’écrire, le décor se crée sous nos yeux, il
n’existe pas au préalable, et cela est fondamental : il naît du jeu.
A la fin, il reste les traces d’un passage : sur le sol, des photos déchirées, l’eau des roses
renversée, des centaines de journaux… Quelque chose a eu lieu, quelqu’un a vécu.
La pièce est finie, c’est à ce moment que deux régisseurs viennent déblayer le plateau et
installer un décor dans lequel nous ne jouerons pas ; une nouvelle page blanche pour un
nouveau récit.
19 Au moment où l’on croit que la pièce se termine, (une servante vient d’être amenée par les
régisseurs), elle est en réalité prête à commencer.
Claire qui, jusque là, n’avait aucune existence possible comme personnage, maintenant
qu’elle a traversé tous les âges du théâtre, qu’elle a été influencée par toutes les histoires, est
peut-être prête désormais à prendre la relève. Comme un anthropophage mange la chair de ses
semblables pour se nourrir de leurs pouvoirs, Claire a ingéré le théâtre pour devenir
quelqu’un.
Ça y est, elle est maintenant dans la peau d’une jeune femme enfermée dans une clinique
psychiatrique.
Jusque là, le spectacle n’a pas eu lieu, c’est maintenant qu’il pourrait commencer mais le
rideau se ferme.
Peut-être pour éviter au spectateur une histoire qu’il connaît déjà…
Claire a échoué et réussi sa quête. Son échec, c’est probablement d’être arrivée au début d’un
nouveau récit illusoire, sa réussite c’est la recherche de ce récit.
Sa réussite c’est son hommage au théâtre.
Lien vers le teaser : http://youtu.be/fmQZckB5ND0
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