Les best practice de la conduite de changement
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Les best practice de la conduite de changement
NEWSLETTER - 4 MARS 2013 Conduite de changement : les best practice Dans le cadre de mon Executive Mastère in Consulting & Coaching for Change à HEC Oxford Saïd Business School en 2010, mon mémoire de recherche a porté sur « La gestion des émotions comme facteur clé de succès de la conduite de changement au sein des organisations ». Cette étude, régulièrement actualisée, a reposé sur des lectures et une vingtaine d’entretiens en entreprise. Elle m’a permis de recenser quinze best practice, qui ont pour objectif de sortir des modèles mathématiques issus du monde de la production et replacer l’Homme au 1 - © Agnes Menso cœur du processus de changement. représente la puissance créatrice. Introduction aux best practice de la conduite de changement Thanatos peut donc être assimilé à la fin d’un cycle, et Eros au commencement de quelque chose de nouveau. Une difficile cohabitation Que l’entreprise soit dans une phase de rupture (une fusion par exemple) ou au contraire, dans un processus continu de transformation (amélioration de la démarche qualité), la conduite de changement consiste à gérer de façon simultanée deux paradigmes : Thanatos et Eros. Dans la mythologie grecque, Thanatos est la personnification de la mort. Eros, quant à lui, La conduite de changement repose donc sur la capacité à préparer et gérer cette rupture, tout en mettant en place les facteurs clés de succès (KSF) nécessaires à la réussite du nouveau projet. Les défis des dirigeants En 2008, 73 % des dirigeants d’entreprises de plus de 500 salariés se préparaient à à déployer des programmes de transformation majeurs. En 2011, pour faire face à l’évolution des marchés et aux nouveaux mode de consommation,les grandes entreprises européennes engagent un programme de transformation tous les 6 mois. Ce rythme soutenu ne laisse que peu de temps pour se poser, prendre du recul et passer le moral des troupes en revue… Changement de type I et changement de type II Le changement de type I, ou homéostasie (du grec homoios, « similaire » et histēmi, « immobile ») consiste en des mesures autocorrectrices adoptées par le système pour protéger son maintien et son équilibre. Nous sommes ici dans une phase de non changement, maintenue par des ajustements permanents. Ces corrections, à terme, bloquent le système et provoquent une situation de crise, dont il doit sortir pour fonctionner de nouveau. 2 - © Agnes Menso C’est à ce moment-là qu’intervient le changement de type II. Le changement de type II est une évolution ou une modification du système en tant que tel. Les mesures autocorrectrices utilisées jusqu’à lors ne servent à rien et révèlent de profonds dysfonctionnements. Il est difficile pour une entreprise de se lancer dans un projet de conduite de changement de type II, sans au préalable être passée par une phase d’homéostasie. Le changement de type II est un projet d’envergure qui exige une remise en question totale du mode de fonctionnement de l’entreprise. Mais l’expérience montre, que le changement de type I, ne fait que reculer cette délicate remise en question et a malheureusement tendance à la rendre encore plus difficile. Gardons en mémoire Il n’existe pas de recette miracle pour conduire et réussir un projet de changement. Le changement, synonyme d’inconnu provoque une angoisse, réelle ou imaginaire. Une situation connue, même inconfortable, est toujours plus agréable car rassurante - qu’une situation inconnue. Il suscite généralement dans un premier temps, des résistances et des incompréhensions, puis une adhésion volontaire ou contrainte. Le changement ne sera pas appréhendé de la même façon par tous. Un déménagement, par exemple est un des événements les plus perturbants qui soit pour des collaborateurs. Pour certains, qui ont privilégié une certaine mobilité professionnelle, qui se sont adaptés à de nouveaux outils de travail, ce déménagement ne va avoir que peu d’impacts sur leur vie au quotidien. Ils vont rapidement retrouver leurs marques. Pour d’autres en revanche, il va bouleverser tout un équilibre et remettre en cause une organisation. Ces collaborateurs auront donc besoin de plus de temps pour faire face et s’adapter. Cette expertise ne doit en rien provoquer un excès de confiance, qui la rendrait moins vigilante sur certaines étapes et aurait pour conséquence de fragiliser la mise en place du projet. La gestion des émotions Les émotions ressenties lors d’un changement sont souvent contradictoires et il est fréquent de passer d’une phase d’angoisse à un état d’acceptation puis basculer à nouveau dans une phase d’appréhension. Elles sont parfaitement normales et sont les bienvenues, car elles ouvrent une fenêtre de discussion et d’échange, et permettent ainsi de se libérer d’un stress. Accompagner le changement, c’est avant tout replacer l’Homme au cœur du système. C’est une approche pragmatique qui paraît complexe et prend plus de temps. Sans en minimiser l’importance, les émotions sont liées au niveau d’expérience que l’organisation a acquis en termes de gestion du changement. En effet, plus une entreprise aura su gérer des transformations, plus vite elle saura mobiliser ses ressources et s’adapter. 3 - © Agnes Menso Néanmoins, elle permet aux dirigeants de sortir de leur tour d’ivoire et d’initier des projets d’entreprise ambitieux et fédérateurs. Sous réserve bien sûr, que les acteurs du changement respectent en amont certains fondamentaux. Conduite de changement : cinq fondamentaux à respecter en amont Anticiper La conduite de changement ne s’improvise pas. Elle se réfléchit et se prépare. Anticiper, c’est savoir se poser et prendre du recul pour analyser les ressources dont on dispose mais également les compétences et talents à acquérir pour atteindre un objectif. De par le développement des nouvelles technologies et l’accélération du rythme de travail, le temps de réflexion et de maturation s’est considérablement réduit mais il est indispensable et nécessaire dans la prise de décision. Créer et partager une vision La très forte incertitude au niveau mondial rend difficile l’élaboration d’une vision claire sur le moyen et long terme. Mais il est indispensable, pour soi et pour les autres, de se fixer un cap et de piloter son projet avec un objectif final et des objectifs intermédiaires. Mettre en place des objectifs « SMART » Portés par des plans d’action, ces objectifs rendent la vision plus concrète et plus compréhensible par tous. De plus, ils permettent de mobiliser et motiver les principaux acteurs en donnant un sens à l’action. Communiquer La communication doit être impeccable, et revient, selon l’enjeu du projet au PDG / DG de l’entreprise. Nous ne saurions que trop vous conseiller de faire preuve de transparence, d’honnêteté et d’empathie. Dans ce cadre là, la gestion des émotions est un facteur déterminant. Une prise de parole régulière et autant de fois que nécessaire permet de rassurer et faire taire les rumeurs. Une communication floue et hésitante, ainsi que des rumeurs peuvent avoir des conséquences 4 - © Agnes Menso désastreuses sur votre entreprise. Créer une équipe dédiée au projet Certaines entreprises, majoritairement de grands groupes, ont fait ce choix. Que l’on choisisse une internalisation totale ou partielle, cette cellule regroupe tous les acteurs concernés par le changement, des fonctions support aux directions opérationnelles, en passant par les partenaires sociaux. Il est indispensable d’y associer également le middle management. La mise en place de ce genre de comité permet une approche holistique - du grec holos, qui signifie «totalité», «l’entier» - qui ne morcèle pas l’individu mais le prend en compte dans sa globalité. Elle permet ainsi une vision plus large, porteuse de sens favorisant l’implication. Créer une équipe dédiée est un signe très fort envoyé par la Direction, qui marque ainsi sa capacité à accepter le challenge, la confrontation et la négociation. Il est difficile de dire, parmi ces cinq premières best practice, laquelle est la plus importante. Le succès du projet de transformation va surtout résider en un subtil dosage et une habile orchestration de chacune d’elle. L’anticipation me parait l’élément incontournable car fédérateur et porteur de la stratégie dans sa globalité. Néanmoins, il est indispensable de respecter quelques grands principes de management pour une adhésion au projet par le plus grand nombre. Conduite de changement : les principes de management à respecter Identifier les acteurs clés 30 % des collaborateurs suffisent à faire bouger une organisation. Ils sauront convaincre les 50 % qui ont plus un comportement de suiveur. Enfin, malgré leurs résistances, les 20 % restants se rallieront dans leur majorité au projet. Pour vous assurer le succès de votre projet, restez vigilants sur ceux qui ne s’associent pas au projet et assurezvous que vos collaborateurs directs fonctionnent de façon suffisamment autonome. Enfin, la «Génération Y», de par son tempérament et ses attentes, peut également être un levier pour amorcer un projet de transformation. ! ! 5 - © Agnes Menso Favoriser les échanges avec vos leaders d’opinion et vos partenaires sociaux Les relations que vous entretenez (ou pas...) avec eux vont faire toute la différence dans la mise en place et l’aboutissement de votre projet. A leur niveau, de par leur pouvoir de dissuasion ou de conviction, ils peuvent faciliter ou au contraire rendre votre mission difficile. Une communication non adaptée pouvant avoir des conséquences désastreuses, privilégiez avec eux, un mode d’échanges basé sur l’honnêteté, la transparence et le respect. Chouchouter votre middle management C’est la courroie de transmission entre le terrain et vous. Ce sont vos managers de proximité qui vont relayer votre message auprès des équipes et vous transmettre leur retour. Ils sont en première ligne. ! Sachez les écouter et les entendre. Maintenez avec eux une relation de proximité et de confiance et privilégiez des points réguliers. Assurez-vous également qu’ils ont les compétences nécessaires et la formation adéquate pour rassurer leurs équipes et mener leur mission. Soyez à votre tour courroie de transmission en favorisant les échanges entre le middle management, les leaders d’opinion et les partenaires sociaux. Impliquer et motiver Chaque équipe a besoin de comprendre le cap qui lui est fixé. Il se traduit par l’expression d’une vision claire, portée non seulement par des valeurs communes et partagées par tous mais également au travers d’objectifs SMART. A ce stade, l’exemplarité du top management peut être un levier très puissant. Renforcer la Direction des Ressources Humaines dans son rôle de «business partner» Que ce soit dans une entreprise du CAC 40 ou dans une PME, le rôle de la DRH est de participer à la définition et mise en place des projets de l’entreprise, en partenariat avec la Direction Générale, les directions opérationnelles et les fonctions support. Sa connaissance de la législation, de la formation, des organisations, des métiers de l’entreprise et des Hommes la positionnent comme stratège dans l’entreprise et lui donnent toute la légitimité requise dans le cadre d’un projet de cette envergure. Ces cinq principes n’obéissent à aucun ordre en particulier. Ils vous interpellent dans votre rôle de manager et vous font prendre conscience de votre relation à l’autorité et au pouvoir. Libre à vous de les exercer comme 6 - © Agnes Menso bon vous semble, en cohérence avec les valeurs que vous défendez... indispensable afin de s’approprier et d’intégrer le processus de changement. Même si certains d’entre vous ont eu à gérer des projets de changement ambitieux, il est difficile d’être juge et partie en même temps. Référons-nous par exemple à la pyramide de Maslow, qui hiérarchise et distingue cinq types de besoins. Prenons comme projet de transformation, un déménagement, qui, nous le savons, est un des projets les plus difficiles à vivre au sein d’une organisation. C’est la raison pour laquelle, le recours à un intervenant externe, sur la gestion des émotions, peut être une aide précieuse. Il saura faire preuve d’impartialité et vous conseillera au mieux de vos intérêts et de ceux de votre entreprise. Conduite de changement : gestion des émotions Respecter les étapes du changement Par manque de temps, ces étapes sont souvent parcourues trop rapidement. Nous en comptons 7 : le choc (lié à l’annonce de la nouvelle), le refus, la colère, la dépression, le marchandage, le test et l’acceptation. Vivre chacune d’elles est Selon le niveau hiérarchique des collaborateurs, ce changement va bouleverser leur zone de sécurité (niveau 2) ou d’appartenance (niveau 3). Or, selon Maslow, le passage au niveau supérieur ne peut se faire qu’après validation des niveaux précédents. Il est donc quasiment impossible pour un collaborateur de s’impliquer et se motiver sur des projets de niveau 4 tant que les besoins des niveaux inférieurs ne sont pas satisfaits. Les étapes du changement sont génératrices d’angoisse. Pour que le projet de transformation soit accueilli le mieux possible, nous vous conseillons de respecter chacune de ces étapes et de porter votre attention taux phases d’acquisition et d’apprentissage des nouvelles compétences. Comprendre les résistances et les peurs Ces peurs sont légitimes et il est important d’en comprendre les raisons : ce collaborateur résiste-t-il car il sent son emploi menacé ? Cette équipe résiste-telle par crainte de ne pas être à la hauteur dans sa nouvelle mission ? Formuler ces résistances dans un groupe de parole ou 7 - © Agnes Menso par le biais de séances individuelles ou collectives de coaching permet d’identifier obstacles et croyances. Après quelques séances, les perceptions commencent peu à peu à changer. C’est généralement à ce moment-là, que le processus s’enclenche. Favoriser les échanges La création de groupes de parole peut être une solution. Ils permettent à chacun de s’exprimer dans un cadre précis, défini et tenu par votre intervenant et de sortir de sa solitude. Se sentir moins seul ne résout pas tout. Néanmoins, exprimer ses craintes et se rendre compte qu’elles sont partagées par d’autres, peut aider à trouver des axes d’action individuels ou collectifs. Il n’y a pas de recette pour créer ces groupes de parole. Vous pouvez opter pour un mode aléatoire (ou semi- aléatoire) mais nous vous conseillons d’éviter dans un premier temps les groupes avec des liens hiérarchiques entre participants. Les managers et la Direction ont peu de temps pour s’inscrire dans cette démarche et sont rarement formés à ces aspects. De plus, les collaborateurs peuvent être suspicieux quant à la démarche et réfractaires pour s’exprimer comme ils le souhaiteraient. C’est la raison pour laquelle, nous vous suggérons de confier l’animation de ces groupes à un professionnel qui sera garant du cadre de l’intervention. Il saura également, dans le respect des règles de confidentialité et de déontologie, vous alerter et favoriser la transition d’une étape à l’autre, avec recul et bienveillance. Respecter les valeurs de l’entreprise Si vous défendez des principes de proximité ou de communication, faîtes-les vivre dans votre quotidien. Pour chacune de vos actions, demandez-vous si votre comportement est en adéquation avec ces valeurs.N’hésitez pas non plus à sensibiliser vos équipes sur cet aspect. Par exemple, si vous devez mener une vaste opération de réduction des dépenses, faites preuve d’exemplarité dans vos frais de déplacement et dans les lieux que vous choisissez pour l’organisation de vos séminaires... Ecouter votre intuition Elle est malheureusement trop peu utilisée car jugée comme irrationnelle. Même si cela est exact, l’intuition est un messager et peut constituer un élément agnesmenso-coaching.com! important dans votre prise de décision. Elle permet également de nuancer des positions trop rationnelles et parfois trop rapides ou brutales. Ecouter son intuition cela signifie également l’exprimer lors d’un COMEX, CODIR ou comité de pilotage... Même si ce genre d’intervention peut être mal perçu dans ce contexte, en allant jusqu’au bout de votre intention, vous ouvrez d’autres portes de discussion et autorisez vos équipes et collègues à faire de même. Que nous parlions d’un changement de rupture ou d’un changement en continu, celui-ci équivaut à modifier en profondeur l’ADN d’une entreprise. Il y a « un avant » et un « après ». L’homéostasie (du grec homoios, « similaire » et histēmi, « immobile »), dont nous parlions en introduction, est une notion fondamentale de la conduite de changement. Ces best practice ont pour but de vous aider à prendre du recul afin de mener et réussir, dans le respect de vos valeurs, un projet de transformation. La conduite de changement est un arbitrage permanent entre des processus mathématiques et financiers et le bien-être des collaborateurs. Les best practice que nous avons développées tendent vers cet équilibre. Il n’existe pas de recette miracle pour réussir le changement. Anticipé, porteur de sens et piloté, il peut devenir une formidable opportunité de mobilisation pour une entreprise.