Compte rendu de la conférence X-Mines au Féminin
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Compte rendu de la conférence X-Mines au Féminin
Compte rendu de la visite de l’Expo Sonia Rykiel – 12 Février 2009 Musée des Arts décoratifs, Paris Organisatrice : Marianne Levy Association de loi 1901 reconnue d’utilité publique, Les Arts Décoratifs ont été créés en 1882 et regroupent entre autres le musée des Arts Décoratifs, le musée de la Mode et du Textile et le musée de la Publicité. L’institution fonctionne sur le principe d’expositions, renouvelées tous les 6 mois environ. Sonia Rykiel fonde sa maison en mai 1968 et va renouveler l’idée de la mode, s’opposant aux dictats qui s’imposaient alors à toutes les strates de la société : la silhouette Dior, le changement de collection deux fois par an, etc… (Christian Dior souhaitait un retour à l’époque de Napoléon III avec changement de vêtements 6 fois par jour). Elle annonce les créateurs japonais des années 80 (Yojhi Yamamoto notamment), Martin Margiela, … Sonia Rykiel, souvent associée à la couleur noire, apporte aussi l’idée de « déconstruction », de vêtement qui ne prend forme que sur le corps, avec un vestiaire mou, souvent fait de maille ou de jersey. Elle reprend aussi la forme trapèze introduite par André Courrèges dans les années 60. A l’écoute de son époque, elle impose cependant son style, audacieux et provocant (par exemple avec ses découpe de vêtements rappelant des sous-vêtements). Très souvent, elle ira à l’inverse de la mode du moment : pastels lorsque la mode est aux couleurs vives, unis par opposition aux motifs. Sonia Rykiel est une femme « qui s’est faite elle-même ». Aujourd’hui, la maison Rykiel est encore indépendante, ce qui, dans le secteur du luxe, est suffisamment rare pour être souligné. Issue d’un milieu bourgeois, elle raconte « qu’elle n’était pas faite pour travailler » : d’ailleurs, elle ne sait pas coudre et ses dessins resteront toujours des ébauches très simples1. Ne trouvant pas de vêtements à sa convenance, elle en vient à faire refaçonner ceux de la boutique appartenant à son mari, les renvoyant aux fournisseurs avec des consignes de modifications, plusieurs fois de suite. De petit gabarit, Sonia Rykiel va tout d’abord s’essayer à la « diminution » du pull pour qu'il s'ajuste à son petit gabarit - elle ne trouvait pas sa taille et voulait ajuster les mesures. N’étant pas couturière, elle demande des coutures à l’envers (visibles à l’extérieur du vêtement), pour diminuer l’épaisseur et porter le tissu au plus près du corps, créant un style propre - si on avait laissé les coutures normales, cela aurait donner des sur-épaisseurs disgracieuses et très inconfortables. C’est le pull qui la lance véritablement. Accessoire de mode durant les années 20-30 avec Schiaparelli, elle le remet au goût du jour avec de nombreuses innovations : de nouvelles matières permettent le pull transparent (en contradiction avec la fonction principale de tenir chaud), les pulls trompe l’œil (à l’image des surréalistes comme Dali), les pulls ornés de faux nœuds, etc. 1 Rykiel ne sait pas coudre, de même pour Schiaparelli. (Balanciaga, Gaultier, Dior, Chanel savent coudre). Chanel dira avec dédain de Schiaparelli que c’est « une artiste qui fait des robes ». Enceinte de sa fille Nathalie, elle crée une robe en jersey très évasée, qui fait scandale mais plait aux femmes. Sonia Rykiel s’approprie la mini-jupe, introduite en France par Courrèges en 1965 (créée par Marie Kant à Londres). Dès ses premières années de création, elle comprend l’importance du marketing et au milieu de motifs « bonne maman », apparaissent déjà les initiales SR. Elsa Schiaparelli l’avait déjà initié dans les années 1930. Elle rompt avec le déroulement traditionnel et quelque peu guindé des défilés, introduisant une grande liberté dans ses « shows » . Dans les années 70, elle ira même jusqu'à faire défiler des mannequins qui se déshabillent devant le public, insistant sur le caractère accessoire du vêtement : elle dira « comme mes yeux sous mes paupières ». Par ailleurs, ses défilés se veulent « humains », avec des mannequins naturels, souriants. La mise en scène et l’attitude se veulent nonchalantes, provocantes, à l’image des peintures de Von Dongens ou des photographies de Guy Bourdin, préfigurant le Porno Chic des années 70. Rykiel est l’une des premières à comprendre l’importance du sportswear. Elle voit le jogging comme un vêtement de liberté par excellence, le summum étant de le porter avec des talons aiguilles. La femme doit le porter à la façon d’un homme : mains dans les poches, jambes écartées. Elle ajoute aux joggings des éléments brillants, festifs. Elle s’inspire du vêtement masculin2, et s’attaque au pantalon. Une loi de Napoléon Ier, (d’ailleurs non abrogée…) en interdit le port par la femme, n’empêchant pas quelques transgressions précoces (George Sand par exemple). Il est progressivement autorisé à la fin du XIXe siècle, pour la pratique du sport (cheval et bicyclette en 1909, ski et golf en 1920) et pour la plage, et comme tenue de détente en intérieur. Après guerre, il est autorisé à l’école dans les années 60, avec une jupe par dessus. Ce n’est qu’en 1966 qu’il sera complètement autorisé. L’année 1966 est d’ailleurs celle du lancement du tailleur-pantalon d’Yves Saint-Laurent. La notion de déconstruction est au cœur de la création de Rykiel. Elle annonce Kenzo dans les année 70, Yamamoto dans les années 80. Elle est traitée de « paupériste » qui ruine la matière lorsqu’elle associe couleur noire et déconstruction : elle dira d’ailleurs qu’elle souhaiterait des vêtement qui vous poussent de l’intérieur, comme des cheveux, des poils, de la fourrure, des idées… Sonia Rykiel utilise des motifs floraux, fait des références à Raoul Dufy (qui a d’ailleurs travaillé pour Paul Poiret), s’inspire des tissus d’ameublement. Elle utilise le trompe l’œil sur certaines de ses créations. Rykiel utilise aussi les rayures. Elles ont mauvaise presse dans l’imaginaire collectif: associées aux bagnards, aux marins, elles sont aussi considérées comme « l’étoffe du diable » (Judas est souvent représenté avec des rayures). Gaultier les utilise pour ses marinières, et aujourd’hui, elles se retrouvent souvent dans les Tout comme l’avait fait Chanel avec son tailleur, créé dans les années 1910 et relancé en 1954 (utilisant du jersey, matière jusqu’alors utilisée pour les sous-vêtements masculins). Dans les années 50, le tailleur Chanel est porté par des femmes libérées (contrairement aux collections de Dior). 2 vêtements de sport. Elle s’intéresse aussi au total look : une tenue avec unité de couleur et de matière. Sonia Rykiel est une intellectuelle, on retrouve souvent des livres dans ses boutiques, des lectures pendant les défilés. Elle écrit des livres (par exemple : L’envers à l’endroit).L’une des caractéristiques souvent citées de Rykiel est l’usage de la couleur noire pour elle. Sa véritable couleur est le rouge, cependant, ses cheveux roux en empêchent l’usage, elle adopte donc le noir, qu’elle considère comme épuré, allant à l’essentiel – nécessitant un maquillage soigné. Symbole de puissance, le noir3 est une couleur qui permet véritablement au vêtement de « sublimer » la personne - elle ouvre d’ailleurs la voie aux créateurs japonais sur ce point. Dans les années 1970, elle est élue « femme la plus élégante » ex-æquo avec Catherine Deneuve (égérie de Saint-Laurent). Dans une interview, elle confie que cette distinction vient récompenser une femme économe, qui porte depuis 5 ans le même manteau noir qu’elle s’est créé – l’idée de pérennité est là. Elle crée des vêtement associant le noir et la dentelle par dessus4 : rappelant les corsets des grand-mères, le résultat est ambigu, il donne un aspect femme objet, « cocotte », la dentelle étant jusqu’alors un vêtement du dessous. Dans la marche pour la libération de la femme, après 1968, ces créations font scandale alors que la femme des années 80 se voit en « wonder woman », dans sa famille, son travail et son corps. (et pourtant, le corset peut bien apparaître comme un moyen artificiel de sculpter le corps…). Rykiel choque encore avec ses robes de jersey et dentelle, dont l’échancrure rend impossible le port de sousvêtements. Elle crée aussi des marabouts, pour les soirées. Sur les pas de sa mère, Nathalie Rykiel rejoint la maison en tant que mannequin dans les années 70, puis au niveau de la communication. Elle lance les lignes enfant et homme, diversifie les produits. En terme de communication, Sonia Rykiel est l’une des premières créatrices à se lancer dans un travail de collaboration - avec la photographe Dominique Isserman (elle sera aussi photographiée par Sarah Moon) au sens où la contribution du photographe est aussi importante que la sienne. Dominique Isserman va véritablement intégrer l’esprit Rykiel : classique, avec un grand souffle de liberté. Ses photographies sont françaises, mettant en scène le produit dans son univers, par opposition au style américain qui met tout l’accent sur le produit lui-même. La mise en scène se veut provocante, par l’attitude des personnages, les interdits (cigare, cigarette). Les photographies sont très souvent en noir et blanc, et concentrent le regard sur le haut du corps, le visage, ou des groupes de personnages. Alors que le couturier était jusqu’alors reclus dans sa tour d’ivoire, inconnu du grand public, Rykiel devient une superstar, s’impliquant physiquement dans la communication de sa marque. >>>>> La prochaine Expo sera sur Madeleine Vionnet (1876-1975) 3 4 Le noir rappelle aussi la robe noire de Chanel. A rapprocher de certaines créations de Gaultier pour Madona