Scènes de vie : le clochard après les cours

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Scènes de vie : le clochard après les cours
Scènes de vie : le clochard
après les cours
Je quitte l’Institut Mutualiste Montsouris, le séminaire de
psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent vient de se
terminer pour cette année. Un dernier cours où je n’étais pas
vraiment là, occupée à régler mes comptes avec mes anges
médecins (j’ai le chic pour me fâcher avec la médecine puis me
réconcilier très vite). Ce ne sont pas les médecins qui
m’énervent et encore moins ceux qui m’accompagnent (et me
supportent !) mais plutôt les « bugs » que nous pouvons tous
rencontrer lorsque nous tombons malade.
Ce soir-là, je suis arrivée déjà un peu remontée dans la salle
de réunion : j’étais plongée depuis le midi dans la lecture de
mon dossier médical (désolée pour les téléscopages de
courriers mais les délais étaient vraiment dépassés…).
HL – 2001 Mais elle est où ma colère ?
Sans compter la douleur que je supporte depuis plusieurs mois
mais nous avançons puisque je viens de me faire prescrire des
antidouleurs en attendant l’examen qui aurait pu et dû se
faire il y a deux mois déjà. No more comment. Enfin si,
comment : je trouve cela ballot de dire à une personne
souffrante de rentrer se détendre chez elle pour admettre deux
mois plus tard qu’elle nécessite des soins. Je dis ça je dis
rien, nan pas la colère !Je sors de l’IMM donc et un clochard
se met devant moi pour me parler. Il me complimente sur mon
bronzage et je dois lui expliquer que je ne suis pas partie en
vacances ; j’ai oublié de me protéger du soleil pendant 4
heures d’écriture au bord de la piscine de ma salle de sport
(j’ai plus transpiré en écrivant que pendant le combat juste
avant). Je n’ai jamais été un exemple à suivre et je comprends
mieux pourquoi je déteste faire la crêpe à la plage. Je ne
vais pas cumuler toutes les addictions tout de même… Il
regarde mon tatouage à la cheville et me pose des questions
sur la croix de vie Egyptienne.C’est peut-être idiot mais ces
10 minutes de papotage m’ont fait du bien, la journée avait
été bien galère. Je crois qu’à lui aussi cette discussion a
fait du bien. Je repars, je suis garée juste en face dans une
ruelle.Je voulais retranscrire mes notes et c’est en seconde
partie de soirée que j’ai percuté que je n’avais plus ma
pochette (verte la pochette, c’est important car la sécurité
de l’IMM sait maintenant que je tiens plus à ma pochette qu’à
mon sommeil).J’ai fait l’aller-retour une première fois à
minuit : rien dans la ruelle sombre. Le Dr Votadoro me dit
dans un mail de ne pas m’inquiéter, on la trouverait dans la
salle le lendemain. Entre temps la sécurité m’avait déjà
informée qu’elle n’y était plus. C’est à 4 heures du matin en
me couchant que j’ai tilté sur le pit stop que j’avais fait en
partant. Je rappelle la sécu et effectivement la pochette
était bien posée sur le bord du lavabo. Je me suis couchée à 5
heures… La pochette ne quittera plus mon domicile de sitôt, le
pire c’est que depuis le matin j’avais un mauvais
pressentiment à son sujet.
Le contenu de la pochette est un nouveau manuscrit. Des écrits
déjà censurés par mes soins mais qui nécessiteront encore bien
des relectures.
Cette histoire est une formidable expérience de lâcher-prise.
4 heures de travail de perdues et un calepin entier rempli de
notes… J’ai su relativiser : les corrections je les avais en
tête et pour les notes elles étaient belles et bien perdues
mais tant pis ! J’ai même essayé de positiver : le clochard
était peut-être plongé dans une bonne lecture
Ou un gentil
éditeur tomberait par hasard sur la pochette verte…
C’est l’histoire d’un bel acte manqué. Egarer ce type d’écrits
au sein même d’un service de psychiatrie j’aurais voulu le
faire exprès je n’y serai pas parvenue. Je me suis souvenue
d’un acte manqué pour L’âme en éveil qui me l’avait fait
terminer de manière urgemment douloureuse. Mon inconscient
tente de me passer un message. Ce soir-là ma voiture a évité
le tram. Ce n’est pas le cas de la voiture d’en face.
Un passeur sachant passer…
Sabrina
J’exploite toujours mes bénévoles le dimanche mais ce fut
sport !
Source : blog psychologies.com.

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