Discours MCN 4 mai 2014

Transcription

Discours MCN 4 mai 2014
Hommage à Rémy Dumoncel
Mesdames et messieurs,
etc...
Ici même, le 4 mai 1944 en fin d’après-midi la Gestapo, avec à sa tête le sinistre Wilhelm
Korf, attendait Rémy Dumoncel.
Le train de Paris est entré en gare et s’est immobilisé devant le quai n°1 à 18h30. Le maire
d’Avon, à la stature de géant, est descendu de voiture et s’est avancé vers les hommes venus
l’arrêter.
Cette arrestation met un terme à l’action d’un résistant et fait de lui un héros.
Rémy Dumoncel, est né le 28 octobre 1888 à Romorantin. Après des études de droit à Paris il
entre en 1913 à la librairie Tallandier. Mobilisé en 1914 il est cinq fois blessé et reçoit la Croix
de Guerre et la Légion d’Honneur à titre militaire. Capturé il demeure près de quatre années
en captivité.
Après la Grande Guerre Rémy Dumoncel devient responsable des éditions Tallandier. En
parallèle à sa carrière d’éditeur il se consacre au service des Avonnais, il est élu conseiller
municipal d’Avon en 1923 puis maire en 1935.
Dès 1940 Rémy Dumoncel affiche des idées hostiles au régime de Vichy et à la collaboration.
Inlassablement Rémy Dumoncel aide les habitants de sa commune. Il se démène du mieux
qu’il le peut pour assurer de quoi manger aux plus nécessiteux.
En accord avec le Père Jacques et avec une partie de son équipe municipale il procure des
cartes d’alimentation, des cartes d’identité et des titres de transport à des évadés, à des
réfractaires au Service du Travail Obligatoire, à des Alsaciens-Lorrains et à des juifs fuyant les
persécutions.
Rémy Dumoncel est très vite soupçonné par la Gestapo de Melun. Souvent convoqué,
souvent interrogé, toujours sous surveillance il n’hésite pourtant jamais à s’exposer dans le
but de sauver la vie d’Avonnais arrêtés. Parfois avec succès, parfois en vain.
Un de ses deux fils, Bernard Dumoncel, a raconté que lorsque les Allemands ont exigé qu’il
fournisse une liste de 20 otages à fusiller en cas d’attentat sur la voie ferrée, Rémy
Dumoncel a donné une liste de 4 noms : le sien et ceux de Paul Mathéry, du Père Jacques et
du Père Philippe tous les quatre ayant insisté pour y être inscrits.
Rémy Dumoncel, membre du réseau de résistance Vélite-Thermopyles, joue un rôle
important dans l’armée des Ombres tant à Avon que dans la maison d’édition Tallandier où il
protège des écrivains juifs et fait en sorte qu’aucun livre favorable à la collaboration ou à
l’Allemagne nazie ne soit jamais publié.
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Une telle action ne peut passer inaperçue et peu à peu l’étau se resserre autour d’Avon.
Le 3 mai 1943 le capitaine Léon Guéneau, responsable de la cantine municipale mais aussi
membre important du réseau « Ceux de Libération-Vengeance » est arrêté puis déporté sous
l’étiquette « Nacht und Nebel » (Nuit et Brouillard). Il meurt dans le camp de Mülsen le 1er
novembre 1944.
Le 15 janvier 1944, le secrétaire de mairie Paul Mathéry et l’interprète, Charles Ziegler sont
arrêtés en même temps que le Père Jacques et les 3 enfants juifs du Petit-Collège des
Carmes. Rémy Dumoncel obtient de Korf la libération de Charles Ziegler mais Paul Mathéry,
torturé par le chef de la Gestapo est finalement déporté. Paul Mathéry est mort à Melk,
camp annexe de Mauthausen, le 2 août 1944.
Le 29 février 1944, Lucien Canus, responsable du ravitaillement à la mairie d’Avon est à son
tour arrêté et déporté. Il meurt dans le camp de Hartheim le 18 août 1944.
Le 4 mai 1944 la vague d’arrestation commence à 9h30 du matin par Aristide Roux, adjoint
au maire d’Avon, chez lui, 11 rue des Basses Loges. Puis à 13h30 c’est le tour d’Etienne
Chalut-Natal, premier adjoint, d’être arrêté dans son cabinet de comptabilité à
Fontainebleau. A 15 heures Charles Ziegler, né en Hongrie, ancien combattant de 14-18 dans
l’armée autrichienne, est arrêté à son domicile 12 rue du 14-juillet.
Rémy Dumoncel est dans son bureau à Paris ce jeudi 4 mai 1944. On lui téléphone d’Avon
pour annoncer cette série d’arrestations. Il peut facilement pu s’échapper, rejoindre la
Touraine ou la Dordogne et se mettre à l’abri. Il préfère rentrer à Avon pour tenter de sauver
son équipe municipale ou, à tout le moins, pour l’accompagner dans la captivité.
L’écrivain André Billy, membre de l’Académie Goncourt, conclut ainsi un hommage rendu à
Rémy Dumoncel en septembre 1946 :
« Il y a des degrés dans le courage. Le courage du combattant appelle l’admiration et le
respect, mais le courage de celui qui prend le train en sachant qu’à son arrivée des policiers
allemands lui mettront la main au collet pour le conduire dans un camp de concentration et
qui reste dans le train ; et qui, descendu à la gare où il sait que ces brutes l’attendent, leur
répond : ”Je suis bien celui que vous cherchez”, ce courage là quel nom faut-il lui donner ?
Ou le mot héroïsme n’a pas de sens, ou Rémy Dumoncel fut un héros. »
Rémy Dumoncel, Etienne Chalut-Natal, Aristide Roux et Charles Ziegler ont d’abord été
conduits à la prison de Fontainebleau pour y être interrogés avant d’être déportés en
Allemagne.
Au camp de Neuengamme, près de Hambourg, Rémy Dumoncel est désigné comme
interprète puis devient le chef d’une partie du camp.
Le 21 juin 1945, le révérend père Philippe de la Trinité, prononce ces mots : « En captivité
comme à Avon, parce qu’on apprend à le connaître, on apprend à l’aimer. Parce qu’on
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l’aime, on recourt à lui en toute confiance. Il continue d’être tout à tous. Mais les misères
physiques du camp, le froid et la faim, l’ont beaucoup affaibli. L’organisme est épuisé. »
Rémy Dumoncel est mort d’épuisement le 15 mars 1945. Dans le même camp sont morts
Aristide Roux le 20 août 1944 et Etienne Chalut-Natal le 2 décembre 1944. Charles Ziegler
est mort quant à lui à Sulingen le 25 mai 1945.
Observons une minute de silence et souvenons-nous de ces héros.
Merci.
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LE CHANT DES PARTISANS
Anna Marly, Joseph Kessel, Maurice Druon
Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne
Ohé, partisans, ouvriers et paysans c'est l'alarme
Ce soir l'ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes...
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Montez de la mine, descendez des collines, camarades,
Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades,
Ohé, les tueurs, à vos armes et vos couteaux, tirez vite,
Ohé, saboteurs, attention à ton fardeau, dynamite.
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C'est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frères
La haine à nos trousses et la faim qui nous pousse, la misère
II y a des pays où les gens au creux des lits font des rêves
Ici, nous, vois-tu, nous on marche, nous on tue ou on crève.
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Ici, chacun sait ce qu'il veut, ce qu'il fait quand il passe
Ami, si tu tombes, un ami sort de l'ombre à ta place,
Demain du sang noir séchera au grand soleil sur nos routes
Chantez, compagnons, dans la nuit la liberté nous écoute...
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Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne
Ami, entends-tu le vol noir du corbeau sur la plaine
Oh -Qh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh-Oh.
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