Je m`aime comme je suis - Eki-Lib

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Je m`aime comme je suis - Eki-Lib
Mars 2005 | coupdepouce.com
Mieux-Vivre
Je m’aime comme je suis
S’aimer vraiment, avec ses qualités et ses défauts, dans
son corps et sa tête, est une tâche difficile. Pourtant,
certaines y arrivent. Pour percer leur
secret, nous avons rencontré cinq
femmes qui s’aiment comme elles sont.
Jocelyne Morissette, 38 ans
« Je pense que je possède une
certaine beauté intérieure, une
beauté qui m’appartient et avec
laquelle je me sens en harmonie.
Et
franchement,
je
déplore
qu’autant de femmes se tapent sur
la tête devant leur miroir. J’ai des
amies qui sont passées par des
chirurgies
importantes
pour
arriver à mieux s’aimer. Je me
sens personnellement à mille lieues
d’une telle démarche. Entendonsnous : je pourrais entretenir des
complexes majeurs, mais je les
réduis à des irritants! J’ai les
jambes croches, je suis très velue
et mon teint foncé me laisse les
yeux cernés. Certains matins, je
n’aime pas ce que je vois, mais
aussitôt, je pense qu’au lieu de
prendre le chemin du bureau, je
pourrais entrer en chimio. Quel
cache-cernes efficace!
J’enfile
alors mon plus beau chemisier et je
file, le cœur léger!
« Attention,
s’accepter
ne
signifie pas se laisser aller. J’ai
récemment suivi une diète où j’ai
perdu 20 livres. C’était important
pour moi de les perdre, et je me
sens mieux sans ce petit surplus de
poids. Est-ce que j’en faisais une
maladie? Non! J’ai un conjoint qui
m’aime, qui me trouve belle et qui
Par Isabelle Bergeron et Josée Larivée
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me le dit. Cela fait aussi
partie de la beauté d’une
femme.
Le commentaire du psy
« Les femmes insistent souvent sur
leurs défauts, contrairement à
« Au travail, j’ai connu un
Jocelyne, qui a su mettre l’accent
monde où les dates de
sur ses atouts. Elle a choisi de
tombée rattachées à des contrats
perdre du poids non pas parce que
d’un
demi-million
deviennent
sa valeur en tant que personne en
soudain plus importantes que ta
dépendait, mais pour son bien-être
propre vie. L’idée de rendre à
personnel.
Plusieurs femmes
temps des acétates à un client m’a
croient qu’une taille de guêpe va
un jour valu une fausse couche.
leur valoir une meilleure estime de
Nietzsche disait que ce qui ne tue
soi, ce qui n’est généralement pas
pas rend plus fort. Cette force, je
le cas. Si une personne a une
l’ai utilisée à bon escient :
mauvaise estime de soi,
apprécier ce que j’ai.
il y a peu de chances
Mon
apparence
que des facteurs
Je m’aime parce
physique fait partie
extérieurs
que…
du lot.
parviennent
à
l’améliorer.
je
m’attarde
à
mes
« Je
m’aime
Jocelyne
parce que je suis
mentionne
qualités plutôt qu’à
une épicurienne qui
également
que
mes
défauts.
sait profiter de la vie!
l’amour
de
son
J’aime mon sens de
conjoint et le fait qu’il
l’humour, ma capacité d’oser
la trouve belle font aussi
et de réaliser des choses.
Je
partie de la beauté d’une femme.
m’aime parce que je suis sensible
Elle n’a pas tort. Il serait illusoire
et que j’ai des yeux expressifs.
de croire qu’on est imperméable à
J’aime ma féminité. J’ai dit adieu
l’opinion d’autrui, d’où l’importance
aux bikinis, mais j’ai mis au monde
de s’entourer de gens qui nous
deux belles filles. Ça vaut combien
estiment, qui nous perçoivent
de ventres plats? Je pense que ma
favorablement. »
mère a toujours apprécié sa
beauté, et j’espère donner la même
Mario Sirois, psychologue ►
inspiration à mes enfants. De mère
en fille, on se doit bien cela! »
Par Isabelle Bergeron et Josée Larivée
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Je m’aime comme je suis
Valérie Garceau, 22 ans
patron, les commentaires fusent de
« J’ai cessé de croître avant mon
toutes parts. "Tiens, tu as amené
temps. À 10 ans, j’Avais la taille
ta
fille
aujourd’hui!"
d’une enfant de 6 ans. Disons que
Inlassablement, il répond que je
ma lutte pour l’affirmation de soi a
suis la technicienne en charge et
commencé tôt! À l’adolescence, j’ai
j’assume que je devrai faire mes
souffert de ma petite taille. On
preuves pour démontrer mes
m’appelait la Schtroumpfette à
compétences. Mais je refuse de
lunettes et on me disait que la
laisser
les
autres
me
maternelle était juste en
décourager.
Je pense
face… Comme j’étais
même que ma petite
timide,
je
ne
Je m’aime parce
taille m’a permis de
répliquais pas.
que…
développer
mes
compétences et de
renforcer
mon
« Aujourd’hui, à
j’ai transformé ma
caractère
au
22 ans, je ne
petite taille en
maximum.
mesure que 1 m
force.
48 (4 pi 11 po) et
Je suis enceinte de 4
je pèse 90 livres.
Partout où je vais, les
mois. Dernièrement, chez le
coiffeur, je discutais de ma
gens croient que je n’ai que 16 ans.
Je suis technicienne en génie civil
grossesse et les dames présentes
me regardaient comme si j’étais
et, lorsque je me retrouve sur un
chantier de construction avec mon
une pauvre ado : "Une autre qui
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s’est
fait
mettre
enceinte!"
Parfois, ce genre de regard posé
sur moi m’attriste, mais sans plus.
Cette lutte pour établir ma
crédibilité m’a permis de mesurer
ma pleine valeur et de développer
ma confiance en moi. Cela m’a fait
grandir… intérieurement!
« Je m’aime pour ma différence.
J’ai compris que dans l’idée de ne
pas répondre à des normes réside
la notion d’être unique au monde!
Je m’aime pour tout ce que j’ai
appris
à
développer,
comme
l’affirmation de soi, la capacité de
dire non et celle de dire oui quand
j’en ai envie! J’aime ma propension
à foncer, même lorsque je me sens
paralysée par la peur. Je m’aime
parce que j’apprends et je
m’améliore chaque jour. J’ai un
amoureux qui me trouve belle
comme je suis. Mais ma beauté
vient d’abord de moi. J’ai appris à
m’apprécier telle que je suis. En ce
qui me concerne, la vraie grandeur
part des épaules, en montant! »
qu’elle a développée lui donnera
sans doute les outils nécessaires
pour traverser les difficultés qui
se présenteront dans l’avenir.
Certaines personnes qui n’ont
jamais eu à se battre pour prendre
leur place dans la vie ne
développent jamais leurs aptitudes
et, par conséquent, s’effondrent à
la moindre adversité. L’estime de
soi, c’est le regard qu’on porte sur
sa personne et le jugement qu’on en
retire. Si on ne peut modifier
certaines choses, comme sa taille
physique dans ce cas-ci, on peut
néanmoins changer la vision qu’on a
de soi. Le témoignage de Valérie
prouve bien qu’on peut choisir de
tirer avantage d’une contrainte
apparente. »
Mario Sirois ►
Le commentaire du psy
« Valérie a su transformer ce que
d’autres auraient pu percevoir
comme un obstacle en moteur de
réussite. Il fallait qu’elle ait au
départ une disposition d’esprit
positive,
une
grande
force
intérieure. La capacité à se battre
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Je m’aime comme je suis
Lucie Guilbault-Beauchamp, 46 ans
enseigner la technique de vitrail
« Toute ma vie a été sous le signe
Tiffany, que je pratique depuis 20
de la timidité.
J’ai quelques
ans. J’ai accepté, mais j’ai cru
souvenirs pénibles où, enfant,
mourir! La simple idée de parler
j’étais plantée devant la classe,
devant des gens me rendait
incapable d’émettre un son alors
malade. J’ai perdu 5 livres avant
que
je
devais
faire
une
d’avoir ouvert la bouche.
J’ai
présentation orale. Plus tard, au
combattu le bégaiement, les
cégep, je ne m’entendais pas avec
jambes molles, les chaleurs et les
un professeur.
Au lieu de me
sueurs froides, mais j’ai foncé.
battre, j’ai battu en retraite.
Pour la première fois de ma
Après cet abandon, la recherche
vie, à 44 ans, j’ai
d’emploi s’est avérée une
montagne
affronté
les
Je
m’aime
parce
que…
autres, pour me
insurmontable.
en vainquant ma
rendre compte
Toute ma vie, je
suis
demeurée
que personne
timidité, j’ai
ne voulait ma
femme au foyer.
découvert
toutes
peau.
Après
Mais je ne veux
mes autres qualités.
six
semaines,
pas m’attarder au
passé.
C’est le
j’étais
transformée!
Après
présent qui compte.
huit
sessions,
je
peux
témoigner du bien immense que m’a
« Au printemps 2003, la Ville de
Contrecoeur m’a approchée pour
apporté le fait d’oser. J’ai réussi à
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conformer ma gêne, notamment en
faisant place à l’humour, et cette
simple idée m’a donné confiance.
« Je m’aime parce que j’ai trouvé
en moi la force de combattre un
monstre qui m’a bloqué la vue toute
ma vie.
Cela m’a permis de
découvrir enfin mes qualités. Je
suis
sensible
aux
autres. Mes années
de
silence
m’ont
appris
d’écouter.
C’est une qualité rare
et je la possède. Je
m’Aime parce que j’ai
un talent particulier,
et je suis capable de
la
transmettre.
Enseigner, c’est un
peu faire le don de soi. Je m’aime
parce que je sais être attentive
aux autres, reconnaître leurs
talents et les aider à le développer.
Cette victoire a requis un effort.
Mais le résultat en vaut la peine.
Aux femmes timides, je dis : osez,
une seule fois!
Faites-vous ce
cadeau. »
catapulter sa confiance en elle vers
les plus hauts sommets! Comme le
prouve Lucie, il n’est jamais trop
tard pour rebâtir son estime de
soi. Et j’admire le fait qu’elle soit
capable de tirer de toutes ses
"années de silence" quelque chose
de positif. Son exemple démontre
que reconnaître ses qualités est
nécessaire
pour
acquérir
et
solidifier une bonne estime de soi.
D’ailleurs, tout le monde devrait
faire l’exercice suivant : on dresse
une liste de ses qualités et de ses
aptitudes, on la pose bien à la vue
quelque part et on le relit
régulièrement.
Aussi, on doit
reconnaître ses réalisations et se
récompenser
d’une
façon
significative pour soi. Ce faisant,
on se témoigne de l’appréciation, on
juge qu’on mérite de s’offrir de
bonnes choses. Bref, on s’estime. »
Mario Sirois ►
Le commentaire du psy
« Lorsque Lucie a enfin osé
affronter les autres, elle a dû se
sentir infiniment libérée. Après
toutes ces années à traîner sa
timidité comme un boulet, cela a dû
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Je m’aime comme je suis
Brigitte Bertrand, 40 ans
de m’en être détachée. Je n’ai pas
« J’ai hésité avant d’accepter de
besoin de le dire dans un magazine.
faire ce reportage.
Quand la
Mais peut-être une femme a-t-elle
journaliste m’a contactée, j’ai
besoin de me lire. Alors, j’y suis.
gentiment refusé.
Mon chum
pensait que j’aurais dû
« Affirmer que je me sens belle
accepter. Je l’ai rappelée.
ne m’enlève pas le droit, un bon
Elle m’a conseillé d’y penser.
matin, de me sentir moche. Oui, il
À nouveau, je me suis
m’arrive d’être à l’étroit dans un
retirée. Pour une femme qui
siège d’avion ou de penser à mon
s’assume, ça commençait mal!
état de santé. J’ai déjà suivi une
C’est difficile de dire à des
diète—que dis-je, un jeûne –
milliers de lectrices :
pour perdre du poids.
"Regardez-moi, je
Ensuite,
j’ai
me trouve belle et je
Je
m’aime
parce
participé à
un
me
sens
bien",
que…
reportage pour
surtout
quand
affirmer à la
notre beauté est
face du monde
loin
d’être
je me sens belle
que je n’allais
moulée! Du coup,
avec
mes
rondeurs.
jamais reprendre
on s’expose à bien
le poids perdu!
des jugements. Et
J’avais tout faux.
c’est là, justement,
Sauf une chose : je
que commence la douleur
n’aurais plus besoin, avec le temps,
des femmes.
Est-ce que j’ai
de vouloir maigrir pour me sentir
toujours été toutoune? Est-ce que
j’ai abdiqué? Est-ce que je suis
belle. Lorsque je me regarde dans
le miroir, je ne vois pas une grosse
vraiment heureuse? Je connais ces
questions posées en silence, et mon
femme, je me vois, moi, Brigitte.
Je n’Ai pas la taille de Claudia
bonheur relève justement du fait
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Schiffer, mais j’ai appris à
connaître les chemins de ma propre
sensualité. En retour, j’ai un mari
qui me dit que je suis belle. Et en
prime, mon fils pense que je suis la
plus belle maman du monde! La
beauté, la vraie, viendrait-elle
d’abord de soi? Poser la question,
c’est y répondre!
Pourtant, même les topmodèles peuvent avoir une
très mauvaise estime de soi,
cela n’a rien à voir avec
l’apparence. Brigitte a raison
d’être fière d’avoir choisi d’être
bien dans sa peau. »
Mario Sirois ►
« Je m’aime parce que je suis
vive, je fais du sport, je rigole. Je
sais m’émerveiller et m’émouvoir,
être une grande dame et k’instant
d’après, me rouler dans la neige
avec les enfants. Je m’aime pour
avoir fait le choix d’être bien dans
ma peau. Je suis fière de la femme
que je suis devenue. Mes yeux qui
brillent, mon sourire qui séduit ne
sont que le reflet de la vie qui
brûle en moi. »
Le commentaire du psy
« C’est intéressant que Brigitte
dise que c’est à partir du moment
où elle a cessé de se demander si
elle était vraiment heureuse qu’elle
a commencé à l’être vraiment. En
fait, elle a réussi à détacher son
bonheur des standards habituels
de beauté. Bravo! Dans notre
société, on véhicule le message que
les femmes doivent à tout prix
ressembler aux modèles des
magazines et que celles qui n’y
arrivent pas ont moins de valeur.
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Je m’aime comme je suis
Johanne Pellerin, 47 ans
père m’a annoncé qu’il allait être
emporté d’un cancer. J’avais 44
ans, je combattais une dépression,
je n’arrivais pas à exprimer mes
sentiments et je n’avais jamais
étreint mon père de toute ma vie!
Et là, il allait mourir.
« Je l’ai pris dans mes bras et je
l’ai embrassé.
C’est là que j’ai
décidé de changer.
Il m’arrive
désormais de dire aux gens que je
les trouve beaux, bons, justes ou
drôles. Je peux dire à un patron
qu’il est bien vêtu, sans cette
satanée peur de ce que
l’autre va penser. Je
« À force de contenir mes
m’aime parce que
sentiments,
mon
je me suis
couvercle a sauté.
Je
m’aime
parce
donné
le
J’ai sombré dans
que…
droit de dire : j’ai
une
dépression
peur, je suis en
majeure. J’ai été
colère, je suis
aidée par des
j’ai appris à
bien ou vous avez
professionnels,
respecter mes
tort. J’ai le droit
dont
une
de rire et de
travailleuse sociale
émotions.
extraordinaire qui, je
pleurer, même au
travail, où je passe quand
crois, m’a sauvé la vie.
Après une première année à
même près du tiers de ma vie! J’ai
le droit de détester et de dire je
déterrer de vielles blessures, mon
« Je suis une femme hypersensible,
mais je l’ai longtemps ignoré. J’ai
grandi en apprenant qu’il fallait
retenir ses larmes et que les excès
de peine comme de joie doivent
être contrôlés. J’ai refoulé mes
émotions
toute
ma
vie.
Aujourd’hui, je suis capable de leur
donner libre cours et je m’en porte
à merveille! Mais il
m’a fallu traverser
un
événement
majeur pour en arriver
là.
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t’aime. Cela me donne l’impression
que les gens ont changé à mon
égard, qu’ils sont plus réceptifs.
Mais ce n’est pas le cas. C’est moi
qui ai changé. Je suis plus ouverte,
sans peur d’être ridicule.
Je
m’aime parce que j’ai accepté mes
émotions. J’ai confiance en moi, je
sais que j’ai une bonne intuition et
je peux m’y fier. Me rapprocher
de ce que je ressens et l’exprimer
a changé ma vie.
Je suis
définitivement plus heureuse et
plus épanouie. »
d’apprendre à s’ouvrir, ce qui est
assez fréquent chez les gens qui
refoulent leurs émotions. Les
émotions, n’importe lesquelles,
doivent être exprimées. Elles ont
toujours une signification et une
raison d’être. On ne doit jamais
les renier. »
Mario Sirois ►
Le commentaire du psy
« Pour briser sa carapace, Johanne
a dû déterrer ses veilles blessures,
comme c’est le cas de bien des
gens qui veulent comprendre leur
dynamique personnelle d’adulte.
Pour donner un sens à
certaines de nos attitudes,
je pense qu’on retour sur le
passé est nécessaire, sauf
que cela ne changera pas
notre dynamique en soi. Pour en
changer, il faut agir, comme l’a fait
Johanne en prenant son père dans
ses bras, ou encore en n’ayant pas
peur d’Adresser des compliments à
son entourage. La maladie de son
père a été un moment décisif. Il
faut souvent un événement majeur
pour amener les gens à changer.
En plus, Johanne a dû traverser
une dépression majeure avant
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L’estime de soi en 5 questions
Qu’est-ce que l’estime de soi?
Comment l’acquiert-on?
Nous
avons demandé au psychiatre
Christophe André, auteur de
nombreux ouvrages sur le
sujet, d’éclaircir la question
pour nous.
Comment définit-on l’estime
de soi?
On pourrait dire que c’est le
jugement qui résulte du regard
qu’on porte sur soi, le degré de
satisfaction qu’on éprouve envers
soi-même.
Pourquoi certains ont-ils une
bonne estime de soi, et d’autres
pas?
Certains facteurs, tels la beauté,
l’intelligence ou le statut social,
peuvent faciliter une bonne estime
de soi, mais ce sont loin d’être des
garanties.
Dans une certaine
mesure, une bonne estime de soi
peut relever de la génétique : il y a
des gens qui semblent prédisposés
à voir le bon côté des choses, y
compris
d’eux-mêmes.
Puis,
évidemment, il y a l’éducation : nous
a-t-on aimé suffisamment? Nous
aimait-on pour ce que nous étions
plutôt que pour ce que nous
faisons? Au départ, l’estime de soi
dépend beaucoup des autres et se
forge dans leur reconnaissance.
Celle de nos parents, bien sûr, mais
aussi de nos amis, des autres
adultes… Une fois qu’on est adulte,
elle continu de dépendre des
autres, mais en partie seulement,
car, si on a une mauvaise estime de
soi, l’appréciation d’autrui ne
suffira pas à nous faire nous
percevoir autrement. Il y aura une
sorte de décalage entre la vision
qu’on a de nous-même et celle des
autres, et on justifiera leurs
gentillesses en se disant qu’ils ne
font ça que pour nous faire plaisir.
Les échecs et les réussites
influencent-ils l’estime de soi?
À mesure qu’on se bâtit une estime
de soi solide, on ne laisse plus
celle-ci dépendre de nos défaites
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ou de nos succès.
On prend
conscience de la différence entre
ce qu’on est et ce qu’on fait. On
profite de nos réussites et on ne
se laisse pas trop affecter par nos
échecs. Bien sûr, sur le coup, ces
derniers nous dérangent, mais on
arrive à se reprendre rapidement.
À l’inverse, une personne qui a peu
d’estime de soi mijotera longtemps
ses déconvenues.
L’estime de soi des femmes
dépend-elle trop de leur aspect
physique?
La société a toujours exercé une
pression sur les femmes quant à
leur apparence, mais la situation
s’est
beaucoup
aggravée.
Maintenant, l’écart entre les
modèles de beauté et la réalité est
très grand, et la pression est, par
conséquent, encore plus forte.
Cela ajoute sans doute aux motifs
d’insatisfaction des femmes, et le
travail pour se bâtir une bonne
estime de soi, en faisant fi de ces
modèles, exige un peu plus
d’efforts.
Concrètement, que peut-on faire
pour avoir une meilleure estime
de soi?
D’abord, un petit retour sur notre
passé est nécessaire si on veut
comprendre
pourquoi
cette
dernière nous fait défaut. Ensuite,
on confronte les obstacles. Par
exemple, si notre piètre estime de
soi nous empêche d’exprimer notre
opinion, on se force à le faire. On
ne doit pas fuir ce qui nous effraie
mais l’affronter.
Un autre
exemple : on ne met jamais de jupe
parce qu’on trouve qu’on a de
grosses cuisses?
Eh bien,
désormais, on choisit d’en porter!
Généralement, on réalisera que le
ciel ne nous tombe pas sur la tête
et que cela peut même entraîner
des conséquences positives. Et,
surtout, on ne doit pas laisser une
défaite porter ombrage à notre
estime de soi. Si on a osé prendre
la parole lors d’une réunion et qu’on
a été mal accueilli, on ne doit pas
baisser les bras pour autant. Au
contraire, il faut persévérer. En
fait, le problème, ce n’est pas
d’avoir des doutes sur soi, tout le
monde en a, mais la façon dont on
les gère. On ne devrait pas voir
ces doutes comme des obstacles
mais comme des précurseurs à
l’amélioration de soi. Une personne
dotée d’une bonne estime de soi
sait qu’elle est loin d’être parfaite,
mais elle sait aussi qu’elle peut
être aimée et appréciée malgré, ou
plutôt avec, ses imperfections.
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POUR EN SAVOIR PLUS
L’estime
de
soi,
par
Christophe André. Odile
Jacob, 1999, 290 p., 39,95
$.
Petits complexes et grosses
déprimes, par Christophe
André et Muzo, Seuil, 2004,
174 p., 29,95 $.
Estime de soi, confiance en
soi, par Josiane Saint Paul,
Intéditions, 2004, 256 p.,
47,95 $.
Stratégies pour développer
l’estime de soi et l’estime du
par
Jean
soi,
Monbourquette,
Novalis,
2003, 416 p., 34,95 $.
L’estime de soi, une force
par
Nathaniel
positive,
Branden,
Science
et
cultures, 2004, 126 p., 14,95
$.
Nous remercions le magasin Mobilia du centre-ville de Montréal, où les photos ont
été prises.
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