Federico García LORCA

Transcription

Federico García LORCA
FACEEF
EXPOSITION
Chronologie
1898 : Naissance de Federico Garcia Lorca, le 5 juin, à Fuente Vaqueros (Grenade)
1908 : Antonio Rodríguez Espinosa devient son premier maître. Il étudie ma musique
1909 : Etudes secondaires à Grenade
1914 : Etudes de philosophie, de lettres et de droit à Grenade
1915 : Cours de guitare et de piano à Grenade
1917 : Il publie un travail littérraire sur Zorilla. Rencontre Manuel de Falla qui aura une grande influence sur lui
1918 : Publication de son premier livre « Impressions et paysages »
1919 : Il écrit « Le maléfice du papillon »
1921 : Publication de son premier livre de poèmes
1923 : Mise en scène de sa pièce pour guignol
1924 : Il se lie d’amitié avec le peintre Gregorio Prieto et avec Rafael Alberti
1925 : Amitié avec Salvador et Ana Maria Dalí
1926 : Première version de la « Savatière prodigieuse »
1927 : Publication de son livre de « chansons ». Première exposition de ses dessins à Barcelone
1928 : Publication du « Romancero Gitano »
1929 : Voyage à New York
1930 : Il écrit des chansons pour l’Argentinita. Voyage à Cuba
1931 : Publication du poème du « Cante Jondo »
1932 : Organise une tournée pour diffuser le théâtre du Siècle d’Or
1933 : Voyage en république d’Argentine. Il finit « Noces de Sang »
1934 : Mort d’Ignacio Sánchez Mejías : il écrit « Llanto por Ignacio Sánchez Mejías »
1935 : Grande Première de « Doña Rosita la soltera » à Barcelone
1936 : Il finit « La Maison de Bernarda Alba »
Il est fusillé à Viznar, le 19 août
GROUPE DU 27
LES PREMIERES CHANSONS
Federico García Lorca fait partie des écrivains connus
sous la « Génération du 1927 ». Les spécialistes et les
critiques n’aiment pas beaucoup le terme de
« génération », car ils préfèrent étudier chaque auteur
séparément. Cependant ils font exception lorsqu’il
s’agit des auteurs de cette période, car il semble bien
que des écrivains et des artistes ont eu conscience
d’appartenir à un groupe cohérent. En effet, on les
retrouve ensemble :
Dans sa ballade « Les trois fleuves », qui fait partie de
ses poésies recueillis, dans « Poème du Cante Jondo »
Lorca met en opposition Séville et Grenade, avec à la
fois une grande fermeté et légèreté. Cependant, il n’y
a pas dans celles-ci, la profondeur que l’on découvrira
dans ses futures créations.
• Dans l’organisation d’actes, comme celui fait en
commémoration du tricentenaire de la mort de
Góngora, en 1927.
• Dans la celèbre Résidence d’étudiants, à Madrid, où
ils ont organisé des conférences, des réunions, des
expositions, etc.
• Dans le conseil de rédaction de mêmes revues, telles
que « Occidente » et « la Gazeta Literaria »
• Dans l’anthologie faite par Gerardo Diego, en 1931,
où il recueille, au moins une contribution de chaque
membre du groupe.
Dans son poème « La Guitare », le poète fournit un
grand effort de concentration, qui révèle sa profonde
sensibilité. De chaque partie des on corps se distille
une grande mélancolie et tristesse, qui se manifeste
abruptement dans sa composition, « Coeur blessé par
cinq épées ».
CHANSON DU CAVALIER
Le livre de chansons, qui contient quelques poèmes et
des chansons de la même période, que celles
rassemblées dans son recueil, le Cante Jondo, Lorca
annonce déjà,, les qualités de son livre de romances,
pour le dynamisme, la vivacité, et la densité de
créations qui sont contenues dans cet ensemble.
Thématique
En ce qui concerne la thématique, on retrouve à la
fois chez ces auteurs tout ce qu’il peut y avoir de plus
recherché et de plus populaire, de plus féerique et de
plus humain, de plus select et de plus commun, de
plus espagnol et de plus universel. Modernité et
tradition se rencontrent, sans pour autant s’affronter.
C’est la coexistence parfaite entre différents styles,
conceptions, etc. On ne s’étonnera pas que ces
écrivains continuent à occuper, de nos jours une des
premières places dans l’histoire de la littérature
espagnole.
Sources d’inspiration
- Les écrivains du Siècle d’Or, et, en particulier,
Góngora
- Le romancero et les chansons traditionnelles
- l’Espagne et le monde de leur époque
INITIATION POETIQUE
Les premières poésies de Federico García Lorca ont
reçu les influences de Juan Ramón Jiménez et du
Modernisme. C’est le cas des « Poèmes et ballades »
C’est le cas des « Poèmes et ballades ». Cependant on
aperçoit déja dans ces débuts les extraordinaires
capacités du poète. Parmi ses meilleures créations de
cette époque, on peut signaler « Ballade d’un jour de
juillet ».
Dans la chanson du cavalier, Lorca reprend le thème
du brigand tragique, une sorte d’interprétation
également dramatique de ce qui est son Andalousie.
Elle débute dans un climat de mystère : « Au milieu
de la lune noire des brigands, les éperons sont en train
de chanter ». L’annonce de la mort du brigand qui
s’en fuit ne dilue pas le mystère. Bien au contraire, il
le fait encore plus dense, car il ne s’agit plus de sa
mort, mais de savoir pour quelle raison il a été tué.
C’est l’éternelle question que le poète se pose.
BALLADE D’UN JOUR DE JUILLET
Porte la fleur d’orange, porte l’olive,
Andalousie, à tes mers.
- Tu cherches donc l’amour,
Veuve infidèle?
Je souhaite pour toi
Que tu le trouves.
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
- Les étoiles du ciel
Sont mes désirs.
Où trouver mon amour
Qui vit et meurt?
Sous la lune noire
des pillards de route
tes éperons sonnent...
- Il repose dans l’eau;
Fille de neige,
Couvert de nostalgies
Et d’oeillets blancs.
- Ah, chevalier errant
Par les cyprès,
C’est une nuit de lune
Que je te donne.
PETITE BALLADE DES TROIS RIVIERES
CHANSON DU CAVALIER
Petit cheval noir
où emportes-tu ton cavalier mort?
... Tes durs éperons,
brigand inmobile
qui perdis les brides.
Petit cheval froid
quel est ce parfum de fleur de couteau?
Sous la lune noire
un cri! et la corne
d’un feu de montagne.
Le fleuve Guadalquivir
va parmi oranges et olives.
Les deux rivières de Grenade
descendent de la neige au blé.
Petit cheval noir
où emportes-tu ton cavalier mort?
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
Commence le pleur
de la guitare.
De la prime aube
les coupes se brisent.
Commence le pleur
de la guitare.
Il est inutile.
de la faire taire.
Il est impossible
de la faire taire.
C’est un pleur monotone,
comme le pleur de l’eau,
comme le pleur du vent
sur la neige tombée.
Il est impossible
de la faire taire.
Elle pleure sur des choses
lointaines.
Sable du sud brûlant
qui veut de blancs camélias.
Elle pleure la flèche sans but,
le soir sans lendemain,
et le premier oiseau mort
sur la branche.
O guitare!
O coeur à mort blessé
par cinq épées.
Le fleuve Guadalquivir
a la barbe grenat.
Des rivières de Grenade,
l’une pleure et l’autre saigne.
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
Pour les bateaux à voles
Séville a un chemin;
mais dans l’eau de Grenade
rament seuls les soupirs.
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
Guadalquivir, haute tour
et vent dans les orangers.
Darro et Genil, tourelles
mortes sur les étangs.
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
Qui dira que l’eau emporte
un feu follet de cris!
Hélas, amour
qui s’en fut et ne vint!
LA GUITARE
ROMANCE DE LA GARDE CIVILE
ESPAGNOLE
Ils montent de noirs chevaux
dont les ferrures sont noires.
Des taches d’encre et de cire
luisent le long de leurs capes.
S’ils ne pleurent, c’est qu’ils ont
du plomb au lieu de cervelle
et une âme en cuir vernis.
Par la chaussée ils s’en viennent.
Groupe bossu et nocturne,
sur leur passage ils font naître
d’obscurs silences de gomme
et des peurs de sable fin.
Ils vont par où bon leur semble,
cachant au creux de leur tête
une vague astronomie
de pistolets irréels.
O ville des gitans!
Aux coins de rues, des bannières.
Voici la Garde Civile.
Éteins tes vertes lumières.
O ville des gitans!
Qui jamais peut t’oublier?
Laissez-la loin de la mer
avec ses cheveux sans peigne.
Les gitans se réfugient
au portail de Bethléem.
Saint Joseph, couvert de plaies,
enterre une jouvencelle.
Des fusils perçants résonnent,
toute la nuit, obstinés.
La Vierge guérit les enfants
de salive d’étoiles.
Pourtant la Garde Civile
avance en semant des flammes
dans lesquelles, jeune et nue,
l’imagination s’embrase.
Rosa, fille des Camborios,
gémit, assise à sa porte,
devant ses deux seins coupés
et posés sur un plateau.
O ville des gitans!
Comment perdre ta mémoire?
Qu’on te cherche dans mon front.
Jeu de lune, jeu de sable.
ROMANCE DE LA LUNE, LUNE
La lune vint à la forge
avec ses volants de nards.
L’enfant, les yeux grands ouverts,
la regarde la regarde.
Dans la brise qui s’émeut
la lune bouge les bras,
dévoilant, lascive et pure,
ses seins blancs de dur métal.
Va-t’en lune, lune, lune.
Si les gitans arrivaient,
ils feraient avec ton coeur
bagues blanches et colliers.
Enfant, laisse-moi danser.
Quand viendront les cavaliers,
ils te verront sur l’enclume
étendu, les yeux fermés.
Comme chante sur son arbre,
comme chante la chouette!
Dans le ciel marche la lune
tenant l’enfant par la main.
Autour de l’enclume pleurent
les gitans désespérés.
La brise qui veille, veille,
la brise fait la veillée.
PRISE D’ANTOÑITO EL CAMBORIO
SUR LA ROUTE DE SEVILLE
ma maison n’est plus la mienne.
Ami, je voudrais mourir
Antonio Torres Heredia,
fils et neveu des Camborios,
badine d’osier en main,
va vers Séville, aux taureaux.
Le teint brun de verte lune,
il avance, grave et beau.
Ses cheveux lustrés en boucles
reluisent entre ses yeux.
dans un lit, tranquilement,
sur un bon sommier d’acier,
entre des draps de Hollande.
Vois-tu cette plaie qui s’ouvre
de ma poitrine à ma gorge?
A mi chemin, il s’arrête
pour couper les citrons clairs
qu’il lance à foison dans l’eau,
à la rendre toute d’or.
Et c’est à mi-chemin,
sous le feuillage d’un orme,
que les gendarmes des routes
l’entraînent vers la prison.
Antonio Torres Heredia,
fils et neveu des Camborios,
sans sa badine d’osier,
marche entre les cinq tricornes.
Antonio, qui donc es-tu?
Si tu t’appelais Camborio,
tu aurais fait une source
de sang, avec cinq ruisseaux.
Tu n’es le fils de personne,
ni véritable Camborio.
Et à neuf heures du soir
on verrouilla le cachot.
Tel la croupe d’u poulain
le soir reluisait encore.
ROMANCE SOMNAMBULE
Vert c’est toi que j’aime vert,
vert du vent et vert des branches,
le cheval dans la montagne
et la barque sur la mer.
L’ombre à la taille, elle rêve,
penchée à sa balustrade,
vert visage, cheveux verts,
prunelles de froid métal,
vert c’est toi que j’aime vert,
et sous la lune gitane
tous les objetes la regardent,
elle qui ne peut les voir.
Ami, veux-tu me donner
ta maison pour mon cheval,
ton miroir pour mon harnais,
ton manteau pour mon poignard?
Je reviens ensanglanté
depuis les cols de Cabra.
Mon garçon, si je pouvais,
j’accepterais ton marché.
Mais je ne suis plus moi-même,
Au miroir de la citerne
se balançait la gitane,
vert visage, cheveux verts,
prunelles de froid métal.
Un mince glaçon de lune
la soutient à la surface.
La nuit se fit plus intime
comme une petite place.
Ivres, des gardes civils
cognaient aux portes, là-bas...
Vert c’est toi que j’aime vert,
vert du vent et vert des branches,
le cheval dans la montagne
et la barque sur la mer.
LA BLESSURE ET LA MORT
A cinq heures de l’après-midi.
Il était juste cinqu heures de l’après-midi.
Un enfant apporta le drap blanc
à cinq heures de l’après-midi.
Une couffe de chaux toute prête
à cinq heures de l’après-midi.
Le reste était mort et rien que mort
à cinq heures de l’après-midi.
Le vent emporta les cotons
à cinq heures de l’après-midi.
Et l’oxyde sema cristal et nickel
à cinq heures de l’après-midi.
Luttent la colombe et le léopard
à cinq heures de l’après-midi.
Une cuisse avec une corne désolée
à cinq heures de l’après-midi.
Le bourdon se mit à sonner
à cinq heures de l’après-midi.
Cloches d’arsenic et fumée
à cinq heures de l’après-midi.
Au coin des rues, groupes de silence
à cinq heures de l’après-midi.
Quand vint la sueur de neige
à cinq heures de l’après-midi.
quand la plaza se couvrit d’iode
à cinq heures de l’après-midi.
la mort mit des oeufs
à cinq heures de l’après-midi.
A cinq heures de l’après-midi.
A cinq heures de l’après-midi.
Un cercueil sur roues sert de lit
à cinq heures de l’après-midi.
Ossements et flûtes sonnent à son oreille
à cinq heures de l’après-midi.
Déjà dans son front mugissait le taureau
de qui la barbe touche à la mer.
à cinq heures de l’après-midi.
La chambre s’irisait d’agonie
à cinq heures de l’après-midi.
Au loin vient la gangrène
à cinq heures de l’après-midi.
Trompe d’iris dans l’aine verte
à cinq heures de l’après-midi.
Les plaies brûlaient comme des soleils
à cinq heures de l’après-midi.
et la foule brisait les fenêtres
à cinq heures de l’après-midi.
A cinq heures de l’après-midi.
Ah! terribles cinq heures de l’après-midi!
Il était cinq heures à toutes les horloges!
Il était cinq heures de l’après-midi.
Dis à la lune de venir.
Je ne veux pas voir le sang
d’Ignacio sur le sable.
LE ROI DE HARLEM
Qui donc me crie de me pencher!
Ne me dites pas de le voir!
Avec une cuillère
il arrachait les yeux des crocodiles
et battait le derrière des singes.
Avec une cuillère.
Un feu de toujours dormait dans le silex
et les scarabées ivres d’anisette
oubliaient la mousse des villages.
Ce vieillard couvert de champignons
allait à l’endroit où pleuraient les Noirs,
tandis que crissait la cuillère du roi
et qu’arrivaient les réservoirs d’eau pourrie.
Il faut traverser les ponts
et arriver à la rougeur nègre
pour que le parfum de poumon
nous frappe les tempes avec son vêtement
de chaud ananas.
Oh! Harlem! Harlem! Harlem!
Nulle angoisse comparable à tes yeux opprimés,
à ton sang qui frémit dans l’obscure éclipse,
à ta violence grenat sourde-muette dans la pénombre,
à ton grand roi prisonnier, en costume de concierge.
Cette nuit-là le roi de Harlem avec une très dure
cuillère
arrachait les yeux des crocodiles
et battait le derrière des singes.
Avec une cuillère.
Oh! Harlem, déguisée!
Oh! Harlem, menacée par une foule de costumes sans
têtes!
Ta rumeur m’arrive,
ta rumeur m’arrive à traves troncs et ascenseurs,
à travers des gravures grises
où flottent tes automobiles couvertes de dents,
à travers les chevaux morts et les crimes minuscules,
à travers ton grand roi désespéré
LE SANG REPANDU
Je ne veux pas le voir!
Je ne veux pas le voir!
La lune grande ouverte.
Cheval de nuages calmes,
et grise plaza du songe
avec des saules aux barrières.
Je ne veux pas le voir!
Mon souvenir se brûle.
Prévenez les jasmins
à la blancheur petite!
Je ne veux pas le voir!
Il ne ferma point les yeux
quand il vit tout près les cornes,
mais les mères terribles
relevèrent la tête.
Grand torero dans la plaza!
Bon montagnard à la montagne!
Si doux avec les épis!
Si dur avec les éperons!
Si tendre avec la rosée!
Eblouissant à la Feria!
Si terrible avec les dernières
banderilles de ténèbres!
Oh, mur blanc de l’Espagne!
Oh, noir taureau de douleur!
Oh, sang dur d’Ignacio!
Oh, rossignol de ses veines!
Non.
Je ne veux pas le voir!
Il n’est pas de calice qui le contienne,
pas d’hirondelles qui le boivent,
ni givre de lumière qui le refroidisse,
ni chant ni déluge de lis,
ni cristal qui le couvre d’argent.
Non. Je ne veux pas le voir!
LE ROMANCERO GITANO
Le Romancero est la meilleure réussite de Lorca, où
se manifeste ses grandes facultés pour faire de la
poésie, tout en recréant une Andalousie mythique et
polyvalente, avec des matériaux très simples. Lorca
déploie une grande richesse métaphorique pour
pénétrer dans les univers les plus sombres.
Lorsqu’il décide de revenir aux arènes, après les avoir
quittées durant quelques années, il vint de célébrer
son 43ème anniversaire. Son agilité devant le taureau
n’est plus la même qu’auparavant. Certains de ses
amis essayèrent de le dissuader, mais il ne les écouta
pas.Lorsque Lorca apprit
la nouvelle, il
déclara : « C’est sa mort que l’on vient de
m’annoncer ».
VOYAGE A NEW YORK
Lorca fait référence à la portée andalouse du livre, en
soulignant que les gitans, qui constituent une
thématique importante de ces romances, sont les
meilleurs dépositaires de la tradition andalouse.
Selon Lorca, »Le livre, même s’il porte dans le titre le
mot gitan, c’est le poème de toute l’Andalousie, et je
l’appelle gitan, car les gitans incarnent le meilleur, le
plus profond, le plus aristocratique de mon pays, le
plus représentatif de la forme d’être de leurs
habitants. Ce sont eux les gardiens de la chaleur, du
sang, de l’alphabet et de la vérité andalouse et
universelle ». ce n’est pas un livre sur les gitans, dit
Lorca, à ceux qui le prétendent. Également, ajout-il,
« Je suis très en colère contre ceux qui font de moi un
mythe gitan. Ils confondent ma vie et mon caractère.
Je ne veux pas cela. Les gitans ne sont pour moi
qu’un thème, et rein que cela. On pourrait dire aussi
que je suis un poète des aiguilles à coudre ou des
paysages hydrauliques. En outre, ce caractère gitan
que l’on m’attribue me fait passer pour quelqu’un qui
n’a ni culture, ni éducation. On pourrait croire ainsi
que je suis un poète sauvage, et, il faut le savoir, je ne
le suis pas ».
ROMANCE SONAMBULE
On range ce romance parmi ses créations, dont
l’interprétation est difficile. Cependant, c’est un des
romances, qui laisse transparaître le mieux les grandes
qualités du poète, dans les domaines les plus divers,
comme, dans la peinture.
IGNACIO SANCHEZ MEJIAS
Ignacio Sánchez Mejías n’était à priori pas un très
grand virtuose du « toreo », mais il était sans doute un
des personnages les plus connus du monde de la
tauromachie. Possesseur d’une grande fortune, il
décida d’abandonner les arènes pour d’autres
activités. Profond amateur de la littérature, il était en
rapport avec les plus grandes personnalités littéraires
de son temps, à commencer par Rafael Alberti. Ce fut
Ignacio qui subventionna le premier récital poétique
du groupe du 27. L’écrivain Sévillan Roméro Murube
a dit de lui « Lorsqu’on connaissait Ignacio, de
manière plus approfondie, on s’intéressait à sa
personne pour d’autres raisons que les taureaux.
Lorca développera le thème principal de son oeuvre
pendant son séjour à New York dans les années 1929
et 1930. Il s’agit peut-être de la période la plus
féconde de sa vie.
Ce fut dans cette ville où il allait découvrir ce qui
représente le pouvoir de l’argent et les injustices, le
manque d’humanisme. C’est cette réalité qui se reflète
dans son recueil, « Un poète à New York ».
New York était l’opposé de son Andalousie ;
l’indifférence et la froideur la plus totale face à la
chaleur de sa terre. C’était impossible pour lui de s’y
acclimater. Sa grande sensibilité ne pouvait pas
souffrir les injustices, dont les noirs étaient les
victimes. C’est à eux que Lorca consacrera l’une de
ses plus grandes créations : « Je voulais faire un
poème sur la race noire des Amériques, et souligner la
douleur des noirs face à un monde qui leur était
hostile.
POETE A NEW YORK
New York avait produit chez Lorca une profonde
émotion, qu’il définira en deux mots « Géométrie et
angoisse ». Il a pu voir là-bas les plus grandes
manifestations du pouvoir de l’argent, mais il a aussi
été le témoin des plus graves injustices sociales.
Toute l’oeuvre de cette époque est remplie d’une
considérable connotation sociale (expression employé
par Lorca lui-même). Ses poèmes sont des cris de
douleur et de protestation. Maintenant, l’angoisse et la
frustration vont au-delà du poète : son coeur blessé à
rejoint des millions de coeurs également blessés.
DESSINS
THEATRE
Lorca utilise tous les moyens pour manifester son
extraordinaire personnalité artistique. Très jeune il se
consacre à la musique. Mais il écrit aussi dès son
enfance, en prose et en vers, et ne néglige pas les arts
plastiques, surtout les dessins.
Les pièces de théâtre de Lorca et de Valle-Inclán
sont parmi les plus importantes qui se soient écrit
en langue espagnole, depuis le début de ce siècle. Il
s’agit d’un théâtre poétique, qui est axé autour des
symboles vitaux de l’être humain ; comme le sang,
le couteau et la rose. Il se déroule dans des espaces
mythiques, ou d’un réalisme transcendant. Lorca
aborde tous les problèmes essentiels de l’existence
dans ses oeuvres dramatiques.
Il réalisa une exposition de dessins à Grenade en
1925. Mais ce fut, un événement qui ne sortit pas du
cadre familial. C’est en 1927, qu’il organisa sa
première exposition, chez Dalmau, à Barcelone, la
salle où exposait l’avant-garde catalane.
En 1927, Dali avait fait une analyse assez singulière
de ses travaux : « Le système poétique des dessins de
Lorca tendent vers une immatérialité organique. Ils
sont accompagnés de la plus fine calligraphie
physiologique. Lorca, qui est un vrai andalou, a un
sens très ancien des relations entre les couleurs et
l’architecture. Il se base sur une asymétrie non
contrôlée et harmonique, des éléments que l’on
retrouve dans la plus pure plasticité de l’orient ».
Musique, scénographie et chorégraphie s’y
entremêlent dans une synthèse parfaite. Le langage est
débordant de poèsie et de connotations mythiques.
Aussi bien Lorca que Valle-Inclán rejettent le
naturalisme de type « colloquial ».
Lorca a été très influencé par le drame moderniste (il
introduit, en effet, le genre poétique dans ses créations
dramatiques) mais il s’inspire aussi du théâtre de
Lope de Vega (utilisation stratégique de la chanson
populaire) de celui de Calderón de la Barca (démesure
tragique de ses allégories) et du guignol.
L’instinctif et le culturel, l’individuel et le collectif,
l’imaginaire et le réel, l’autorité et la liberté,
apparaissent toujours entremêlés dans ses drames.
Lorca manie de manière étonnante la combinaison de
la poésie et de la prose dans ses créations
dramatiques. Mais, plus il écrit, plus il reserve la
poésie pour mettre en valeur certaines situations, et en
particulier, celles où il veut communiquer une plus
haute intensité.
Pour Lorca, le théâtre est un moyen d’aborder les
problèmes collectifs, mais en acordant aussi une place
aux soucis personnels. Il se définit comme « un
partisan actif du théâtre d’action sociale ». pour Lorca
« le poète doit s’ouvrir les veines pour les autres... »,
« L’artiste doit rire et pleurer avec son peuple ».
génialités lyriques.
On peut distinguer quatre modèles d’oeuvres
dramatiques chez Lorca : les farces, les comédies (qui
selon l’auteur, ne peuvent être représentées) les
tragédies et les drames.
En ce qui concerne les farces qu’il à écrites entre
1921 et 1928, il convient d’établir une distinction
entre les pièces faites pour le guignol, telle que « La
tragicomédie de Don Cristobal » et « Retablillo de
Don Cristobal » (1931) et ses pièces les plus
classiques.
Dans la « Zapatera prodigiosa » Lorca nous montre
des atmosphères de son Andalousie, et les conflits qui
éclatent entre l’univers imaginaire et la réalité.
Cervantes en avait fait de même. « Amor de Don
Pelimplín con Belisa en su jardin »est un rituel
d’initiation à l’amour. Cette piéce annonce les drames
de sannées 1930 et 1931, et en particulier, « El
público » et « Así que pasen cinco años ». On
considère ces deux oeuvres comme les plus
hermétiques de Lorca. Il évoque les rapports qui
existent entre le théâtre, la révolution et
l’homoséxualité. Il fait également des exploration
autour de la personne humaine et se pose beaucoup de
questions sur le sens de l’existence.
Coscient du succés dont jouissaient les drames ruraux
poétiques, Lorca écrira ensuite les tragédies intitulées
« Bodas de sangre » (1933) et « Yerma » (1934). Ce
sont deux oeuvres étonnantes où le mythe, poésie et
réalité s’entremêlent.
« Doña Rosita la soltera » (1931) et « La Casa de
Bernarda Alba », (1936), sont centrés sur les
sentiments amoureux et sur les conditions pénibles
que connaissent les femmes surtout dans les
campagnes. Il en profite pour dénoncer une société,
qui voudrait maintenir les femmes sous la férule des
hommes. Mais lorsqu’il s’agit de dénoncer
l’autoritarisme chez les femmes, il ne s’en prive pas,
comme il le fait si brillamment dans la « Casa de
Bernarda Alba ».
MARIANA PINEDA
On a découvert un lien trè sétroit entre Mariana
Pineda et le drame moderniste. Mais Lorca donne
toujours une tonalité originale à ses créations.
C’est ainsi que Lorca n’a pas suivi le schéma épique
ou politique des romantiques, lorsqu’il présente le
personnage de Mariana Pineda. Lorca fait de Mariana
une héroïne par amour, comme il le souligne dans une
lettre adressée à Fernández Almagro. C’est par amour
que Mariana Pineda se rallie à la cause de la liberté. Il
s’agit d’un personnage typiquement « Lorquiano ».
C’est une femme passionnelle jusqu’au fond de son
être. Elle est obsédée par l’amour, un cas unique
d’amour andalou dans un milieu politique. Beaucoup
de ses contemporains n’avaient pas compris le sens de
son écrit. Il s’agit d’une oeuvre éclectique, pleine de
(Extrait de l’oeuvre)
Mariana, radieuse.
Ma victoire, c’est de t’avoir près de moi,
de regarder tes yeux quand tu ne me regardes pas.
Quand je suis avec toi, j’oublie ce que je sens
et j’aime tout le monde.
Même le roi, même Pedrosa.
Le méchant et le bon. Pedro, les amoureux
sont en dehors du temps.
Il n’y a plus ni jour, ni nuit, mais nous deux
seulement.
Pedro, la prenant dans ses bras.
Mariana,
tes bras autour de mon corps épuisé sont comme
deux chastes rivières de silence.
Mariana, le tenant par la tête.
Maintenant, je peux te perdre, je peux perdre ta vie.
Comme la femme d’un fol navigateur
qui voguerait toujours sur une vieille barque,
j’appréhende la mer sans fond, sans houle, obscure,
j’attends confusément qu’on te ramène à moi noyé.
LA MAISON DE BERNARDA ALBA
La Maison de Bernalda Alba se dresse au sein de la
bourgeoisie aisée, urbaine ou rurale. Le thème
s’inspire, selon Lorca, de l’absurdité de devoir se
soumettre aux traditions et coutumes qui se heurtent
contre le besoin de l’être humain de vivre pleinement
libre. Le respect des traditions a des effets néfastes
pour les femmes, qui sont condamnées à la
soumission face au mâle et à la répression de leurs
instincts en dehors du mariage.
Toute tentative, de vouloir rompre ses chaînes, finit
toujours tragiquement, comme la fin que connaît
Adela, et dont la mort ne change pas le destin de ses
autres soeurs.
(Extrait de l'acte II)
Dans un hameau andalou, la despote Bernarda Alba, à
la mort de son mari, impose En un pueblo andaluz, la
despótica Bernarda Alba, a la muerte de su marido,
impone a sus cinco hijas el más riguroso luto, un
verdadero encierro, en nombre de la más estricta
moral tradicional y de las convenciones de casta. En
un ambiente sofocante, irá creciendo la tensión entre
madre e hijas, y entre ellas mismas. Sólo la mayor,
Angustias, está prometida; pero su novio, Pepe el
Romano, está enamorado de la hija más joven, la
hermosa, apasionada y rebelde Adela. El conflicto
acabará trágicamente.
(on entend des clochettes lointaines, comme à travers
plusieurs murs)
( Extrait du texte)
MAGDALENA.- Ce sont les hommes qui vont au
travail.
Alors, vous l’accueilleriez bien?
LA PONCIA.- Trois heures viennent de sonner.
MARTIRIO.- Avec ce soleil!
ADELA.- (s'asseyant) Oh, si je pouvais sortir aux
champs, moi aussi!
Savetière
Comme s’il était le roi et la reine tout ensemble.
Savetier, trembland.
Et si, par hasard,il arrivait à l’instant?
Savetière
J’en deviendrais folle de joie!
MAGDALENA.- (s'asseyant) chacun sa place!
MARTIRIO.- (s'asseyant) C'est ainsi!
AMELIA.- (s'asseyant) Hélas!
LA PONCIA.- Il n'y a rien d'aussi gai que les champs,
à cette époque. Hier matin, les moissonneurs sont
arrivés. Une cinquantaine de beaux gaillards.
MAGDALENA.- D'où viennent-ils, cette année?
LA PONCIA.- De très loin. Des montagnes. Joyeux!
Brillants comme des arbres grillés de soleil! Et ils
criaient, et ils lançaient des pierres! Hier soir, une
femme est arrivée au village, tout habillée de
paillettes; elle dansait à l'accordéon et quinze d'entre
eux l'ont louée pour l'emmener aux oliviers. Je les ai
vus de loin. celui qui la louait était un garçon aux
yeux verts, dru comme une gerbe de blé.
Savetier
Vous lui pardonneriez sa folie?
Savetière
Il y a belle lurette que je lui ai pardonné!
Savetier
Voulez-vous qu’il arrive à l’instant même?
Savetière
Ah, s’il venait!
Savetier, criant.
Eh bien, le voilà!
Savetière
Qu’est-ce que vous dites?
Savetier, arrachant ses lunettes et son déguisement.
Je n’y tiens plus! ma savetière bien-aimée!
AMELIA.- Vraiment?
ADELA.- Est-ce possible!
LA PONCIA.- Il y a quelques années, une de ces
femmes est venue et moi-même j'ai donné de l'argent
à mon fils aîné pour qu'il y aille. Les hommes ont
besoin de ça.
ADELA.- On leur pardonne tout.
AMELIA.- Naître femme est le pire des châtiments.
MAGDALENA.- Nous, rien ne nous appartient, pas
même nos yeux.
LA SAVETIERE PRODIGIEUSE
« La Savetière prodigieuse est une farce très simple,
sans tonalité classique »
« J’ai voulu exprimer dans ma savetière, tout en
respectant les limites de la farce et sans me servir des
éléments poétiques qui étaient à ma portée, la lutte
entre le réalité et l’imaginaire (dans le sens
d’irréalisable) et qu’il existe dans tous les être
humains ».
La Savetière est comme folle, les deux bras écartés du
corps. Le Savetier l’embrasse et elle le regarde
fixement au milieu de son bouleversement. Dehors, on
entend clairement la rumeur des chansons.
Savetière, se ressaisissant.
Bandit, fripouille, vaurien, canaille! Tu entends? Tout
ça par ta faute!
Elle renverse les chaises.
Savetier, très ému. Il se dirige vers son établi.
Ma femme chérie!
Savetière
Vagabond! Ah, comme je me réjouis que tu sois
revenu! Quelle vie je vais te faire!... L’Inquisition, les
Templiers de Rome... pire encore!
NOCES DE SANG
Le thème de ce drame est celui de la jalousie, sur un
fond de mariage. Noce de sang est considéré comme
un exemple d’intégration parfaite des différents
éléments du langage théâtrale : la musique, le
pantomime, le langage gestuel, la plastique, la prose
et le vers.
(Extrait de l’oeuvre)
La femme de Léonard
Ils se sont enfuis! Elle, et Léonard! A cheval! Serrés
l’un contre l’autre! Soufflant la même haleine!
Le père
Ce n’est pas vrai! Pas ma fille! Non!
La mère
Ta fille, oui! Fruit de mauvaise mère! Et lui aussi, lui!
Mais elle est déjà la femme de mon fils!
Le fiancé, entrant
Poursuivons-les! Qui a un cheval?
La mère
Qui a un cheval, tout de suite! Qui a un cheval? Je
donnerai tout ce que j’ai, mes yeux, ma langue, pour
un cheval!
une voix
Il y a un cheval
La mère, au fiancé.
Va! Suis-les! (il sort avec deux garçons) Non! N’y va
pas! Ces gens tuent vite et bien... Mais si! Cours!
J’irai derrière.
YERMA
Yerma est l’une des oeuvres de Lorca où apparaît, le
plus clairement, la coneption de Lorca sur la
psychologie des femmes. Pour lui l’appétit charnel se
manifeste aussi fortement chez l’homme, que chez la
femme. On voit ceci avec une grande force, aussi bien
dans les propos des personnages principaux que dans
les secondaires.
La tragédie qui résulte de la stérilité se situe beaucoup
plus au niveau mythique, que psychologique : « Pour
avoir un fils, il a fallu que le ciel et la terre
s’unissent » Il est vrai qu’à la fin, il y a une sorte de
résignation des personnages. « Tu dois savoir, dit Jean
à Yerma, que tout devait se passer comme cela (...)
Beaucoup de femmes seraient heureuses de mener la
vie que tu mènes. La vie est plus douce lorsqu’on n’a
pas d’enfants... »
(Extrait de l’oeuvre)
Vieille.
Lorsque je t’ai vu au bal mon coeur s’enflamma. Les
femmes accourent ici pour faire connaissance avec de
nouveaux hommes. Le saint patron fait des miracles.
Mon fils t’attend, assis derrière la Chapelle. Ma
maison a besoin d’une femme. Va le chercher et nous
vivrons tous les trois ensemble. Mon fils a du sang
dans ses veines, comme moi. Si tu viens chez moi, tu
sentiras l’odeur des berceaux. Le drap de ton couvrelit deviendra du pain et du sel pour tes nourrissons.
Vas-y! Laisse parler les gens. Et pour ce qui est de ton
mari, il y a chez moi du courage et les moyens pour
qu’il ne traverse pas la rue.
Yerma.
«Tais-toi, tais-toi, ce n’est pas cela! Je ne le ferais
jamais. Je ne peux pas aller à la recherche d’aucun
autre homme. As-tu pu imaginer que je puisse
connaître un autre homme? Qu’en fais tu de ma
renommée? L’eau ne peut pas revenir en arrière, ni la
pleine lune briller à midi. Vas-y! Je continuerai à
marcher par le même chemin. As-tu pensé
sérieusement que je puisse me plier à un autre
homme, ou que j’aille lui demander ce qui
m’appartient? Apprends à bien me connaître, pour
que tu ne m’adresses plus jamais la parole. Je ne
cherche pas.

Documents pareils