Rencontre d`art contemporain par Isabelle de Maison rouge : le

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Rencontre d`art contemporain par Isabelle de Maison rouge : le
 Rencontre d’art contemporain par Isabelle de Maison rouge : le collectionneur Elphège Fremy
Les collectionneurs en France
Motivations
Les raisons qui poussent les individus à s’intéresser à l’art de leur époque au point de dépenser de l’argent pour s’en
entourer et parfois aller jusqu’à soutenir l’art en train de se faire, sont évidemment diverses et multiples et renvoient
également à des modes de collaboration distincts des autres acteurs marchands et institutionnels.
La première raison invoquée par les collectionneurs est d’ordre émotionnel : le plaisir de collectionner est presque
toujours doublé d’une passion pour l’art. Collectionner devient également, pour certains, une manière de vivre, une
aventure, un état d’esprit, le désir aussi de combattre ses propres conformismes et de remettre aussi en question la
culture mainstream et conformiste. Cela se traduit par un besoin d’accumuler non seulement des objets, mais des
rencontres et des souvenirs, des moments d’émotion. Les ressorts qui motivent l’appropriation des œuvres agissent dans
la dimension du patrimoine culturel, qui sous-tend qu’on acquiert non pas un savoir-faire mais un « savoir-être » qui
contribue au rêve lié à la part d’immatériel et la dimension spirituelle que procure l’art. Une fraction très importante des
amateurs d’art déclare, en effet, partager cette affirmation : «Pour moi, collectionner des œuvres d’art est un moyen
d’exprimer ma créativité et mes émotions».
On peut noter une grande diversité des types d’investissements des collectionneurs dans la scène artistique. S’ils
revendiquent comme principal engagement l’acte d’achat lui-même, souvent lourd par rapport à leurs ressources
(l’équivalent de plus de deux mois de revenus pour 25 % d’entre eux), plus de 80 % d’entre eux consacrent une part
substantielle de leurs occupations à de multiples autres formes de soutien à la vie artistique.
Point de départ et étapes dans la construction d’une collection privée
Si collectionner de l’art contemporain s’avère motivant, une fois la décision prise, l’acte d’achat et surtout la construction
d’une véritable collection qui ait du sens ne coule pas de source. En lien avec les diverses motivations observées cidessus, force est d’observer que le regard du collectionneur doit se former et s’affiner, mais le regard des autres
collectionneurs voire de toute personne extérieure, peut avoir du poids également dans la démarche entreprise.
Pour le choix des œuvres, les motivations considérées comme importantes pour le collectionneur sont le choc
émotionnel (95%) puis la démarche artistique (85%). Le premier achat est souvent le coup de cœur. Le second devient
parfois « le diable « pour certains, celui qui va faire basculer l’achat originel vers le début d’une accumulation. Car
généralement, cela va ensuite crescendo, d’acheteur occasionnel l’on passe dans la catégorie des « amateurs d’art ».
Bien souvent, après, l’acheteur d’art contemporain devient addict, il ne peut plus s’en passer, il a besoin d’acheter
encore… C’est là que se situe l’amorce d’une collection.
Positionnement et engagement du collectionneur
Il ressort des études récentes que désormais le collectionneur ne se contente pas d’acheter et agréger les œuvres, mais il
veut aller au-delà en s’engageant dans la compréhension de l’œuvre et financièrement en soutenant la création. Les
personnes représentatives de ce discours recherchent l’information auprès des artistes, pour eux la possibilité de
dialoguer avec eux, de comprendre leur démarche est un moyen d’établir une relation intellectuelle avec la collection.
L’acte de collectionner demeure un engagement volontaire et engagé. Les soutiens que les collectionneurs apportent à
l’artiste vont en effet dans bien des cas au delà d’un simple acte de consommation. On découvre qu’une part
substantielle de collectionneurs (41%) consacre la majorité de leur temps libre à leur collection. Ce temps sert à
s’informer mais aussi à s’investir dans des projets.
L’engagement principal des collectionneurs se fait en direction des artistes. Ils sont un tiers à avoir participé à la
production d’une œuvre ou au financement d’un catalogue, un tiers également à soutenir directement les artistes sous
forme de prêts de locaux, soutiens financiers ou autres et 44 à 46% A leur avoir passé des commandes, 60% ont prêté
des œuvres pour une exposition (mais seulement 9% ont fait des dons ou déposé des œuvres dans un musée). Un tiers
des collectionneurs interrogés déclarent soutenir les artistes financièrement ou matériellement sans contrepartie directe
(dépannage financier, prêt d’ateliers, etc.). D’autres s’impliquent dans l’organisation d’expositions et l’édition de
catalogues, soit de façon régulière à travers la gestion d’un lieu, soit de façon plus épisodique. Autant de formes d’un
mécénat peu visible mais déterminant dans les premières années d’une carrière d’artiste.
Ainsi, le collectionneur engagé demeure central pour la reconnaissance des artistes, son action se coordonne
désormais avec celle des autres acteurs du marché et le décalage temporel qui existait au début du siècle entre
collections muséales et collections particulières tend dans bien des cas à s’estomper.