A Roubaix, Parkour 59 trace sa route

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A Roubaix, Parkour 59 trace sa route
LE MONDE SPORT&FORME
Date : 28 FEV 15
Page de l'article : p.1,6
Journaliste : Geoffroy Deffrennes
Pays : France
Périodicité : Hebdomadaire
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SPORT & FORME
AVIS
AUX
AMATEURS
A Roubaix, Parkour 59 trace sa route
LE
MONDE
»
-
FAIS-NOUS
REVER
Bondir d'un muret, s'agripper à une façade de brique tout en découvrant les monuments de la ville,
c'est ce qui enthousiasme les quelque So adhérents de l'association nordiste
GEOFFROY DEFFRENNES
Roubaix (Nord), envoyé spécial
etrouvez-nous à la
station
Eurotéléport», nous avait dit
Larbi Liferki. La foule
est dense à la lisière
du centre-ville de
Roubaix. Mais impossible de les manquer.
Sans élan, un gars vient de bondir du parapet qui borde le métro et s'est réceptionné
trois mètres plus loin, sur un autre muret.
Plus que la distance, c'est la masse des deux
hautes rampes de béton dont s'est joué le
matou humain qui impressionne. Aucun
droit à l'erreur. Cela s'appelle un saut de précision, de « press » dans le jargon des adeptes du « parkour », ou « PK », cette discipline sportive devenue véritable art urbain.
Avec son copain Yann Masia, 27 ans,
moulé dans un sweat bleu nuit à écusson
« Pompiers de Paris », Larbi Liferki, 28 ans,
est l'un des éducateurs titulaires d'un brevet fédéral qui ont créé Parkour 59 (du numéro du département du Nord) en 2009.
Ce club a permis de rassembler les petits
groupes dispersés de façon anarchique
dans le Nord-Pas-de-Calais et la métropole
lilloise. Parkour 59 s'est affilié à l'Union
française des oeuvres laïques d'éducation
physique (Ufolep). Plus de 150 jeunes ont
côtoyé la structure depuis cinq ans. Ils sont
désormais So à s'entraîner régulièrement.
Les traceurs, comme se nomment les
adeptes du PK, sont âgés de ii à 28 ans, sans
oublier Kader, un ancien judoka de 42 ans.
Président du club, Larbi travaille à la Maison
des associations de Roubaix. Il s'est autrefois essayé au sprint, mais surtout aux
sports de combat, «fai toujours eu besoin de
me dépenser et de découvrir différents sports.
J'avais du mal avec les clubs. Dès 2005, j'ai vu
R
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une forme de liberté dans le parkour. Mais
nous sommes obligés de fixer des règles afin
d'éviter les blessures. »
Alors que Larbi est occupé, des jeunes ont
commencé à grimper sur un dôme. Quatre
policiers s'approchent, l'air sévère. «Sortez
de là, c'est dangereux et vous risquez de dégrader du mobilier urbain!» Larbi présente
des excuses, les policiers s'éloignent sans un
sourire. «Je ne les ai jamais vus, les autres
sont en général sympas. A force de s'entraîner
dehors, on connaît à peu près toutes les patrouilles. » L'un des bons spots n'est pas loin ;
on passe derrière le commissariat et voici
l'esplanade du Trieux, idéalement bordée de
gros blocs de granit. Autour, des rampes de
« Dans le parkour,
j'aime le mélange
dè souplesse,
de vitesse, de force...
Et je m'y sens libre »
KIM CLETON
étudiante de 22 ans
parking, des barres, des murs, autant d'obstacles prisés. «Nous demandons aux jeunes
de préserver l'outil urbain; s'ils repèrent un
lieu privé intéressant, l'usage est d'aller voir le
propriétaire. » Convaincu dè son rôle éducatif, Parkour 59 organise pour ses adhérents
des visites guidées de lieux historiques,
comme la villa Savoye ou le parc Bardieu,
suivies d'un entraînement.
Un vrai échauffement de gym commence. Les jeunes prennent la foulée
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Pays : France
Périodicité : Hebdomadaire
Date : 28 FEV 15
Page de l'article : p.1,6
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d'Aminé et de Mohamed, plus expérimentés. On trotte, on slalome, puis on malaxe
ses poignets, on roule les épaules et le cou,
on travaille les genoux, les chevilles. Indispensable, d'autant que la température est
inférieure à zéro et que l'entraînement devait normalement se tenir en salle.
Ancien gymnaste de haut niveau, Yann
est pompier à Marcq-en-Barceul. Dans ce
corps de métier, on considère le parkour
comme une forme de préparation efficace.
«Je crois que, dès le lycée, je faisais du
parkour sans le savoir, en multipliant les
suites dans la cour de récré!» Le jeune
homme s'adonne aussi à la slackline, une
autre pratique récente consistant à marcher sur une corde lâche.
Trois groupes sont composés. Googy, Florian et Ramel sont les novices ; Philémon,
Brahim et Clément sont en «intermédiaire » ; et Mohamed, Julien, Samir et Abel
forment un quatuor confirmé. La plupart
portent un molleton, pantalon de sport
très large. Pendant que les débutants s'exercent à tenir en équilibre sur des boules en
métal, les aînés sont montés comme des
chats sur un mur de brique haut de trois
mètres, grâce à la technique dite du passemuraille (une course d'élan, un seul appui
sur le mur, et on saisit l'arête à main nue
puis on se hisse à la force des poignets). Un
peu de concentration, pieds joints, et ils
bondissent au-dessus du large portail métallique. On comprend que la maîtrise de la
peur et des émotions fasse partie de la préparation mentale des traceurs...
Au sol, notre attention se porte sur une
petite silhouette : Julien, 15 ans, sweat
gris, accomplit des bonds de kangourou
comme si son molleton cachait des ressorts. «J'aifait de l'athlé au lycée mais, depuis deux ans, j'ai découvert le parkour, et
c'est mon truc», sourit-il, à peine essouf-
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flé. On remarque aussi la chevelure rouge
de l'unique fille présente : Kim Cleton,
22 ans, possède un brevet professionnel
de la jeunesse, de l'éducation populaire et
du sport). «Je viens de Calais où je faisais
du hip-hop, je pratique aussi la boxe française et l'équitation. Dans le parkour,
j'aime le mélange de souplesse, de vitesse,
de force... Et je m'y sens libre», analyse
Kim. «Elle nous aide bien, et nous avons
désormais 10 % de filles, se réjouit Larbi.
Mais nous avons surtout besoin d'une
salle. Nous recherchons un hangar que
nous adapterions, en construisant nousmêmes notre matériel sécurisé. »
Le PK 59 commence aussi à préparer un
grand rassemblement européen en 2016,
autour des disciplines soeurs du parkour,
du free-running et de l'art du déplacement.
Et ce sous l'égide du « mouvement internationa» rassemblant ces disciplines, lancé
en septembre 2014 par le Français David
Belle. «La discipline est née à Lisses, à Evry
(Essonne) et à Sarcelles (Val-d'Oise), au début des années 1990, sous l'impulsion de
gens comme David», rappelle Larbi.
On peut y voir la résurgence des principes
d'éducation physique de Georges Hébert,
promoteur d'une méthode proche de son
environnement: pour cet ancien officier
qui n'appréciait guère la spécialisation
sportive, le sport est d'abord une lutte contre différentes formes d'éléments. Quatorze ans après la sortie du film produit par
Luc Besson Yamakasi. Les samouraïs des
temps modernes, qui popularisa le phénomène, le parkour s'étoffe et Roubaix trace
aussi la route. •
Cette initiative concourt au prix
«Le Monde» - Fais-nous rêver, qui vise
à récompenser un projet d'éducation par
le sport. Pour en savoir plus : Apels.org
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Journaliste : Geoffroy Deffrennes
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Des jeunes de l'association Parkour 59 multiplient les acrobaties dans le centre-ville de Roubaix, le 18 février
OLIVIER TOURON/DIVERGENCE IMAGES POUR «LE MONDE»
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