Culture artistique - Server Configuration
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1 FICHE ECTS 0204 TOU3 Anim3 0306 - ISALT - 3 - Culture artistique Culture artistique Formation générale, Catégorie : humaine, culturelle et technique Crédits ECTS : 2 Section : ISALT Option : Langue français d'enseignement Mise à jour : Année : 3 Objectifs du cours Au travers de destinations sélectionnées hors Europe, amener l'étudiant à : - préciser les atouts et les spécificités du patrimoine culturel matériel de cultures non européennes, - synthétiser l'apport des différents courants de création et les situer dans le temps, - développer un esprit critique face aux destinations culturelles et touristiques envisagées. Contenu du cours - Introduction aux civilisations non-européennes - Introduction aux civilisations précolombiennes - Apports de l'art américain après '45 - Notions d’arts traditionnels de l’Afrique noire - Notions d’art océanien - Notions d’arts asiatiques - Arts de l’Egypte ancienne Méthode(s) d'enseignement Cours magistral étayé de supports visuels et de visites guidées sur le terrain. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 2 Table des matières Chap. 1 Confrontations : le corps entre apparence et identité p. 3 Chap. 2 Introduction aux arts de l’Egypte pharaonique p. 12 Chap. 3 Introduction aux arts traditionnels de l’Afrique Noire p. 22 Chap. 4 Introduction aux arts de la Mésoamérique p. 40 Chap. 5 Regards sur quelques civilisations de l’Amérique Sud p. 67 Chap. 6 Brésil : Oscar NIEMEYER ou le modernisme lyrique en architecture p. 73 Chap. 7 Introduction à l’art des Etats-Unis du 20e siècle p. 76 Chap. 8 Introduction aux arts océaniens p. 89 Chap. 9 Introduction aux arts de l’Extrême-Orient p. 94 Chap.10 La Route de la Soie p. 108 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 3 Chap. 1 CONFRONTATIONS : le corps entre apparence et identité ___________________________________________________________________________ Introduction : Les marques sur le corps constituent un langage qu'il faut savoir lire. Le corps est une matière malléable. Nous ignorons souvent les motivations qui se cachent derrière les formes belles, étranges, voire grotesques que peuvent prendre les cultures du corps. Ces marques sont les aspects visuels de notre existence et le moyen pour nous identifier à des groupes spécifiques avec qui nous partageons une idéologie, une croyance, un goût, un style de vie ou une philosophie. Notre corps, notre apparence, notre tenue vestimentaire participent à définir notre identité, notre appartenance à un groupe social défini. Dans les sociétés traditionnelles, l’appartenance d’un individu au groupe social garantit la pérennité du groupe. Dans chaque société, l’individu doit respecter différents critères culturels s’il veut faire partie intégrante du groupe. Ces critères sont multiples et envisagent un code corporel défini qui rejoint un idéal de beauté. Les mutilations corporelles, signes d'appartenance sociale apparaissent comme une carte d'identité en image : tel motif dira : "je suis membre de telle tribu". Au travers des cultures, il existe différentes esthétiques du corps. En Afrique, en Asie, en Océanie, l'homme se mutile aussi pour afficher son pouvoir. Les marques corporelles traduisent le statut social. Ce qui touche au corps n'est jamais gratuit. Les marques faites sur la peau, c'est à la fois "je suis beau (ou belle) et j'existe". La douleur est admise car elle est largement compensée : les empreintes sur le corps des femmes signifient la plus-value de leur beauté, celles sur le corps des hommes signifient leur pouvoir. Toute l'organisation sociale, les hiérarchies, les rôles attribués dans la vie quotidienne passent obligatoirement par une mise en scène du corps. Le corps devient un théâtre où tout se joue : l'amour, la politique, l'économie. Il s'expose comme une sculpture vivante. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 4 Ce cours d'introduction envisage différents types de métamorphoses corporelles au travers de sociétés diverses. Surma-Mursi, Ethiopie, vallée de l’Omo Peinture faciale – parure labiale Se caractérise par le port de grands plateaux de lèvres chez les femmes. La lèvre inférieure des petites filles est percée puis on y enfile une fine cheville de bois. Par la suite la cheville est progressivement remplacée par des plateaux en bois ou en argile de plus en plus grands. La plupart des femmes portent de petits plateaux en argile parce qu’ils sont plus faciles à fabriquer. Les femmes ne les portent pas en permanence. Peulhs, Sud du Sahara -Niger Fête du Geerewol, occasion pour les jeunes hommes de se maquiller abondamment. Ils le font pour séduire les spectatrices pendant la cérémonie, montrer leur virilité et leur sensualité. Ils font appel à leurs talents et connaissances de la décoration corporelle. Les canons de la beauté masculine sont une peau pâle, un nez droit, un front haut, une chevelure lisse, un long cou, de grands yeux et des dents blanches. Ils couvrent leur visage d’un masque de pigments naturels rouges et jaunes en poudre mélangée à de la crème de lait. Le front est rasé pour paraître plus long et une ligne verticale est tracée sur le front et le nez pour le faire paraître plus rectiligne. Les yeux et la bouche sont mis en valeur par des couleurs plus foncées (noir et indigo) qui font ressortir le blanc des yeux, effet encore accentué lorsque les jeunes gens roulent des yeux pendant la cérémonie. Les cheveux sont décorés de coquillages et de plumes d’autruche et des franges richement ornées entourent leurs yeux. Cette exhibition de sexualité et de beauté dure 7 jours. La cérémonie commence par un chant ressemblant à une prière. Les jeunes gens se présentent sur une rangée et balancent légèrement sur leurs pieds tout en regardant les femmes. Ils restent très droits, les bras ballants, écarquillant les yeux et découvrant leurs dents. Le « public » fait ses commentaires et ses critiques. Pendant des heures, jusqu’au bord de l’épuisement, les danseurs tentent de séduire par leur danse les spectatrices. Selon le rituel Woodabe, 2 jeunes femmes choisiront l’homme le plus beau. Nuba - Soudan Les Nuba s'enduisent le corps d'huile d'arachide et se peignent de couleurs qui vont du jaune au rouge. Chaque clan possède sa nuance et doit s'y tenir strictement. Le noir profond est considéré comme la plus belle des couleurs et orne surtout le visage des meilleurs combattants. Entre 20 et 30 ans, les hommes luttaient et portaient un bracelet tranchant en bronze. Aujourd’hui, le combat oppose toujours des hommes de villages différents mais les bracelets tranchants ne sont plus d’actualité ! ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 5 Le gagnant est adulé par les femmes qui le désirent. L'art de la peinture corporelle atteint chez ces hommes une réelle beauté. Les femmes portent des scarifications sur le corps. Les instruments de scarification sont une lame tranchante et de longues épines qui servent à tendre la peau. Pendant l'opération, la peau est continuellement frottée d'huile et l'entaille saupoudrée de farine de sorgho, mêlée à des extraits de racines et à des poudres de simples; ceci pour calmer la douleur, protéger des infections et provoquer des cicatrices chéloïdiennes. Les premières scarifications sont pratiquées chez la petite fille, avant la puberté; les deuxièmes après les premières règles, les troisièmes et dernières, les plus longues et les plus douloureuses après la naissance et le sevrage du premier enfant. La femme est alors définitivement parée et devenue désirable. Nouvelle Guinée Maquillage d’adolescente Kaiapo - ethnie d'Amazonie - centre du Brésil. Les Kaiapo sont aujourd’hui une cause célèbre. Connus depuis plus d’un siècle, ils sont le groupe le plus nombreux de l’ensemble culturel Gê, plus de 6.000 personnes en 1990, réparties en une trentaine de villages sur un territoire d’environ 80.000 km2. Leur réputation actuelle tient moins à leur passé guerrier qu’au succès politique de leur lutte pour la survie et leur territoire. Ils ont été les fers de lance de la récente reconnaissance constitutionnelle de nouveaux droits pour les Indiens. Chez les Kaiapo la peinture corporelle fait référence à l'image de la structure sociale, des rapports avec la nature et des croyances. La décoration est un signe distinctif appliqué sur les nourrissons filles et garçons. Les mères dessinent des figures linéaires complexes sur tout le corps de l'enfant. On utilise pour cela la nervure centrale d'une feuille. Les femmes se peignent aussi mutuellement. Les hommes se peignent également le corps mais dans un style plus rudimentaire, plus simple. La technique exige du savoir-faire. Les ingrédients de la peinture noire, genipapo, charbon de bois, salive ou/et eau, sont mélangés dans une demicalebasse. Chez les Kaiapo, le chaman incarne la perfection ; son esprit a le pouvoir de voyager dans le monde des esprits. Ses pouvoirs lui viennent des oiseaux qui volent à la limite du monde visible et invisible. Le chamanisme repose sur le contact entre l’homme et le divin. Le chaman est l’intermédiaire entre le monde visible des vivants et du monde invisible où ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 6 habitent les ancêtres et les esprits de la nature. Ces deux mondes s’interpénètrent ; le rôle du chaman est de maintenir l’équilibre entre ces mondes. La transe lui permet de voyager dans les autres mondes. En transe, l’esprit du chaman se transforme en oiseau et il peut ainsi voyager dans le monde des esprits. Cette conception explique la prédilection pour les parures de plumes. Lors de rituels, les danseurs se transforment en hommesoiseaux. Konde – Tanzanie Yombe – République démocratique du Congo Les Yombe pratiquent 2 types de scarifications. Les scarifications plus élaborées sont réservées aux femmes. Les motifs de losanges entrelacés font référence à la fertilité. Le premier motif, un losange prolongé de 2 ailes aux coins brisés est généralement appliqué autour du nombril dès le plus jeune âge. De plus en plus de motifs sont ajoutés au fil du temps. Les femmes dont le dos et le ventre portent de nombreuses scarifications sont considérées comme des femmes fortes. Quantité de ces motifs se retrouvent sur les nattes qui sont exclusivement tissées par les femmes. Ils illustrent des dictons relatifs à la cohésion sociale. On peut imaginer que certaines scarifications féminines avaient la même fonction. Les scarifications soulignent souvent le rôle social ou politique d’une personne. Les scarifications sont aussi considérées comme une confirmation de la beauté, un signe de bonne santé. Elles ont le pouvoir d’augmenter le plaisir érotique de celui qui les porte comme son partenaire. Le port de scarifications implique aussi une appartenance au groupe et souligne des relations rituelles, spirituelles et cosmologiques. Chez les femmes africaines, on remarque surtout des scarifications sur les zones érogènes, comme le ventre, les seins, les fesses, les cuisses et les épaules. Dans de nombreux groupes culturels, les scarifications sont associées à une grande fécondité des jeunes femmes. Inuit Netsilik Tatouages féminins Wangi - Nouvelle Guinée Coiffure cérémonielle lourde (écorce, argile, scarabée, plumes d’oiseaux du paradis) ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 7 Mangbetu – République Démocratique du Congo Les Mangbetu, peuple du Nord-Est de la République Démocratique du Congo pratiquaient traditionnellement une déformation de la boîte crânienne. Jusqu’à la fin du 19e, elle était considéré comme un symbole de statut social exclusivement réservé aux classes dominantes. L’allongement des crânes est resté en usage jusque dans les années ’50. La déformation du crâne était commencée dès le plus jeune âge, lorsque le crâne des nourrissons était encore mou. Le crâne du bébé était ficelé dans des fibres de raphia ou des cheveux humains. La tête était ensuite huilée et les fils étaient dénoués à intervalles réguliers. La déformation progressive prenait 8 à 9 mois. Cette pratique tirait la peau du visage en arrière, étirant en même temps les paupières vers le haut, ce qui était considéré comme très esthétique. Pour faire paraître le crâne encore plus long et marquer une haute position sociale, les femmes Mangbetu décoraient leur tête d’une coiffe en éventail soutenue par un cadre en bambou. Pour obtenir cette coiffure, on ajoutait aux cheveux de la personne des cheveux « étrangers » pris sur des défunts ou des victimes de combats. On décorait la coiffe d’épingles et de peignes en ivoire et en métal . Les Mangbetu sont également connus pour leurs peintures corporelles. Les femmes utilisent pour les motifs du jus de gardénia qu’elles appliquent à l’aide de poinçons fabriqués en fer et en bois. Comme dans beaucoup de cultures, la peinture corporelle figure la séparation entre les hommes et les femmes. Elle donne aussi des indications sur l’âge et le statut social de la personne. Masaï -Tanzanie Padaung - Birmanie Les femmes portent des anneaux de cuivre autour du cou. La tradition est de poser le premier anneau dès l'âge de 5 ans. Jusqu'au mariage, le nombre des anneaux augmente graduellement en fonction de la dot. Les anneaux poussent le menton vers le haut, tout en poussant les os du cou et les côtes vers le bas ce qui se traduit par un allongement sensible du cou. Maori - Nouvelle-Zélande Les Maoris utilisent les tatouages faciaux pour indiquer leur position au sein de la communauté et de la famille. Cette tradition appelée le TA MOKO remonte très loin dans le temps. Le tatouage maori trouve ses racines dans une légende ancienne. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 8 Les Maoris considèrent le visage humain comme une toile blanche. Les traits du visage et la structure osseuse déterminent en partie la forme des dessins. L'usage des tatouages est essentiellement une affaire d'hommes. Les tatouages sont pratiqués par des spécialistes. Les arabesques du visage varient à l'infini : les signes géométriques sont généralement en spirales et symétriques. Leur ensemble constitue la signature de l'individu. La tête chez les Maoris jouit d'un statut particulier car elle contient la force sacrée, le mana, et doit être mise en valeur. Les entailles sur le visage sont faites à l'aide d'un os effilé ou du tranchant d'un couteau en néphrite (variété de jade). Le pigment est obtenu en brûlant des chenilles avec l'écorce du bois kapar ou de la résine. Le tatouage est une opération très douloureuse. Après le décès, on séparait la tête du corps et, avant de la momifier, on redessinait les motifs qui ornaient le visage du vivant. L'enjeu est essentiel puisqu'il s'agit d'affronter l'autre monde dans les meilleures conditions et de rester aussi, d'une certaine façon, dans le monde des vivants. Interdite en 1919 par les colons anglais, cette tradition connaît, depuis la fin des années ‘70, un regain d’intérêt. La société maorie, en quête d’identité, a fait du tatouage l’étendard du mouvement identitaire et compte un nombre croissant de candidats au Ta Moko. Le Moko est devenu marque de résistance de la culture indigène. Style punk - Grande-Bretagne Le style punk se veut anti-mode : vêtements déchirés et salis, attachés avec des épingles de sûreté, des tenues SM (chaînes, laisses, tour de cou en cuir clouté,…) Les visages blancs, les yeux noircis donnaient aux punks l’aspect de zombies qui coïncident avec leur slogan : no future. Le mouvement punk était davantage un phénomène de mode, une attitude, un style de vie qui forçait à réfléchir et à réagir face à des conventions sociales jugées absurdes. Le choix des vêtements n’étaient donc pas gratuit, mais manipulait les symboles : les bas résilles avec leur connotation de provocation sexuelle étaient par exemple combinés avec des uniformes scolaires, des vêtements en cuir avec une cravate bien sage,… En 1971, Vivienne Westwood et Malcom Mc Laren ouvraient à Londres une petite boutique de vêtements au 430 King’s Road, boutique devenue célèbre sous le nom de Sex. La boutique se voulait une attaque au bon goût. Les punks cherchaient à se démarquer de la génération hippie. Le retour à la nature et le « flower power » devait céder le pas devant l’artificiel. "peace & love » était remplacé par l’agressivité. Le rêve optimiste, utopique de l’Age du Verseau était balayé par le cri fataliste de « No future ». Le groupe des Sex Pistols est devenu rapidement le symbole du mouvement punk. Mais au fil du temps et avec l’aide des médias, le mouvement punk avec ses piercings, ses crêtes de coq est entré dans le domaine public. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 9 Talons hauts L’ancêtre du talon haut remonte à la Renaissance. Il s’agit de la chopine vénitienne, une chaussure à plateaux très haute portée par les courtisanes. Au 18e siècle, les cordonniers transforment la chaussure à plateaux en chaussure à talon. Les talons hauts étaient initialement portés autant par les hommes que par les femmes. Le port des chaussures a toujours été un signe de civilisation. La chaussure est pourtant en soi un instrument de déformation : le pied est enserré dans une structure symétrique. La hauteur des chaussures et la finesse du talon ont une connotation érotique. Pieds lotus - Chine Introduit pendant la dynastie Song (10e siècle) la tradition des pieds bandés a existé pendant 1.000 ans environ. En 1911, à la chute de la dynastie mandchoue, elle a été formellement interdite, mais on la pratiquait encore dans des régions isolées jusque dans les années ’40. La dernière usine à chaussures lotus a fermé ses portes en 1998. Les mères commençaient à bander les pieds de leurs filles à un très jeune âge (5 à 6 ans). Pendant la croissance, les bandages étaient encore resserrés. Le gros orteil restait libre, car sa liberté de mouvement est essentielle pour l ‘équilibre pendant la marche. Le reste de l’avant du pied et le talon étaient bandés de manière à les rapprocher le plus possible, les 4 orteils, repliés sous la plante des pieds. Le cou-de-pied formait alors une arche gracieuse. Les pieds lotus d’or avaient moins de 7,5 cm, les pieds lotus d’argent entre 7,5 et 10 cm et les pieds lotus de fer avaient plus de 10 cm. Les pieds lotus étaient pratiquement obligatoires pour les Chinoises aristocratiques car, ils accentuaient l’inutilité économique des femmes et marquait la richesse de l’époux qui pouvait s’offrir une épouse oisive. Les pieds d’une Chinoise étaient la propriété exclusive du mari et personne ne pouvait les toucher, même pas un parent proche. Les pieds lotus étaient en effet considérés comme des organes érotiques. Parallèlement à l’adoration des pieds lotus, les chaussures avaient une très grande signification. Les femmes fabriquaient elles-mêmes leurs chaussures en soie brodée et ne les quittaient pas pour dormir. La couleur de la chaussure était très importante ; le rouge était très populaire. Corset Les premiers exemples du corset datent de la civilisation crétoise (vers 2000 av JC). Dès la renaissance (15e siècle), le corset fait partie de l’habit féminin. Le corset change beaucoup au fil du temps, en fonction de l’image esthétique de la femme, de la mode, et des robes de l’époque. Il est parfois grand et long, se réduisant parfois à une simple ceinture large. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 10 Le port du corset a toujours été une affaire de femmes. Il était à l’origine de toute une série de problèmes de santé et causait une déformation du corps. Le style New Look de Ch. Dior En 1947, le New Look de Christian Dior choque le monde entier avec son accentuation excessive de la silhouette féminine. Réaction à la rigueur de la Seconde Guerre mondiale, ce nouveau style, le style Bar, se caractérise par la profusion de riches étoffes et de grandes jupes flottant sous une taille de guêpe. Les femmes se retrouvent prisonnière du corset qui devait leur donner un tour de taille de 45 cm et les seins étaient propulsés en avant et vers le haut. Twiggy Depuis le début du 20e siècle, la corpulence, en Occident, ne correspond plus à un critère de beauté. Inspirées par des modèles comme Twiggy, mannequin qui a fait fureur dans les années ’60, grand nombre de femmes s’adonnent à des cures d’amaigrissement extrêmes et vont même jusqu’à faire disparaître ou remodeler certaines parties de leur corps, toujours au nom de l’esthétique. Les jeunes femmes s’astreignent à des régimes amaigrissant au détriment de leur santé et tendent vers un idéal qui est inaccessible pour la majorité d’entre elles. Avec son look très spécial, Twiggy est un des premiers mannequins à être propulsé au rang de star. Elle crée un idéal pour les adolescentes qui n’a plus été remis en question depuis. L’aspect androgyne est très prisé. Bien que cette image de la femme moderne soit restée une constante depuis son lancement, elle connaît un nouvel élan dans les années ’90 avec des mannequins comme Kate Moss. Body-Art : Gina Pene A la fin des années ’60 et dans les années ’70, l’artiste utilise le corps tout entier comme support artistique. Dans les premières formes du Body-Art, le corps et les émotions constituent le sujet essentiel de la recherche. Le BodyArt explore les frontières extrêmes de la douleur et de l’effort physique et de l’automutilation pour tenter de saisir l’existence humaine et son intégrité physique. Les performances se font devant un public et sont enregistrées sur photo, film ou vidéo. Dans les années ’90, un nouvel intérêt se manifeste pour le corps à modeler. Les artistes soumettent leur corps à de nouvelles technologies comme la chirurgie esthétique, les prothèses. Des questions sur la relation corps-esprit, nature-culture, apparence-identité culminent dans ces pratiques artistiques qui comptent souvent sur la participation active du spectateur. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 11 Orlan (Saint-Etienne -1947) Son œuvre, qui intègre photographie, performance, vidéo et installation, interroge le statut du corps en faisant de celui-ci son matériau privilégié. Entre 1990 et 1993, ORLAN réalise plusieurs opérations-performances dans lesquelles elle modifie son propre visage par le moyen d'opérations chirurgicales. Elle explore ainsi de manière radicale les standards de beauté, les normes qui président à la représentation du corps féminin dans la culture occidentale. Plus récemment, dans la série des Self-Hybridations, l'image de l'artiste, métamorphosée grâce à l'outil informatique, interroge les canons de beauté non-occidentaux qui appartiennent à des civilisations et à des périodes historiques diverses. Le travail d'ORLAN a été exposé dans de très nombreux pays et a fait l'objet d'importantes rétrospectives. références bibliographiques : BOREL, F. 1997 Le corps : vêtement incarné, Flammarion, THEVOZ, M. 1984 Le corps peint, éd. Skira, Genève ZBINDEN, V. Lausanne 1997 Piercing, rites ethniques, Pratique moderne, éd. Favre, GRONING, K. 1997 La peinture du corps, Arthaud FORMENT, Fr. & BRILOT, M. 2004 Tatu-Tatoo, Fonds Mercator, Musées Royaux d’Art et d’Histoire revues : BOREL, F. Les rites dans la peau, in Géo,n° 271, septembre 2001 Hors-série GEO, 2005 Les plus belles parures du monde, Les signes du corps, in Connaissances des Arts, p 83-93, n°624 , Fév, 2005 Les fleurs de l’encre Maori, in Connaissance des Arts, p 6-15, n° 624, Fév ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 12 Chap. 2 EGYPTE PHARAONIQUE ____________________________________________________________ 1. pays du Nil et du soleil : Hérodote (historien grec du 5e siècle avt. notre ère) note que les prêtres égyptiens définissent leur pays comme "un don du Nil". Le Nil est un fleuve aux crues fertilisantes (limon). Sans le Nil, l'Egypte ne serait qu'un immense désert; il apparaît comme un miracle aux populations qu'il nourrit. A l'époque pharaonique, on ignore les sources du Nil et on ne connaît pas les mécanismes des crues. Le Nil est issu des massifs pluvieux du Centre et de l'Est Africain. Il franchit plus de 6.000 km. Le Nil Blanc provient des lacs équatoriaux et le Nil Bleu des neiges d'Ethiopie. Le confluent se situe à Khartoum. Son niveau s'élevait en juin (avant la construction du barrage d'Assouan) et il charriait les eaux boueuses en juillet. Les Egyptiens ont organisé l'irrigation; ils ont creusé des canaux, élevés des digues. Le paysage égyptien impressionne par sa netteté: désert /bande fertile/ NIL / bande fertile / désert. La zone fertile est réduite à environ 30.000 km2 (+/- la Belgique). 2. chronologie : Période pré-dynastique (4.000 à 3.000 avt. notre ère): Epoque où les premiers habitants se regroupent en petits royaumes : les nômes. Peu à peu les nômes se constituent en un royaume du nord et du sud. Vers 3.000 avt. notre ère, le roi du sud conquiert les provinces du nord. C'est l'unification sous l'autorité d'un seul souverain. L'institution pharaonique assure une autorité forte et centralisée. * palette de Narmer - 40 cm - musée du Caire Ancien Empire (3.000 à 2.260 avt. notre ère) (3ème à 10ème dynastie): Période d'apogée: 4ème et 5ème dynastie. Capitale: Memphis. Epoque des pyramides. Mise au point du premier système d'écriture. Première période intermédiaire Période de troubles, crise politique, économique et sociale. l'autorité pharaonique. Déclin de Moyen Empire (2.050 à 1.750 avt. notre ère) (11ème à 17ème dynastie): Période d'apogée: 11ème et 12ème dynastie. Capitale: Thèbes. Expansion territoriale. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 13 Deuxième période intermédiaire Période de troubles: invasions de populations asiatiques, les Hyksos. Nouvel Empire (1.580 à 1.080 avt. notre ère) (18ème à 25ème dynastie): Période d'apogée: 18ème et 19ème dynastie. Capitale: Thèbes. Les Hyksos sont chassés. Expansion territoriale. Floraison artistique. Révolution amarnienne: Aménophis IV instaure une religion monothéiste fondée sur l'adoration du soleil (Aton); il se fait appeler Akhénaton, installe sa capitale à Tell-el-Amarna. Retour au polythéisme sous Toutankhamon. Basse Epoque A partir du premier millénaire l'Egypte se morcelle. Domination perse à partir de 525 avt. notre ère. Epoque de déclin. 3. La vie après la mort : Pour les anciens Egyptiens, la mort était un passage ; au-delà les attendait un monde où ils espéraient pouvoir séjourner auprès des dieux. Les défunts commençaient un long et périlleux périple dans le monde inférieur : le Douât. Afin de les aider à accomplir ce voyage, le Livre des Morts était déposé dans leur tombe, accompagné de nourriture et d’un mobilier funéraire, gage d’une belle vie dans l’au-delà. Selon les traditions, l’homme se composait d’un corps physique et d’une âme elle-même composée de 2 entités ; le bâ, la conscience et le kâ, l’énergie vitale. Comme l’âme risquait de quitter le corps physique, on procédait à la momification. Au cours de la momification, les poumons, le foie, l’estomac et les intestins étaient prélevés. On les conservait dans les vases canopes à l’effigie des 4 fils protecteurs du dieu Horus. 4. architecture : En Egypte ancienne, l'architecture ne sert pas seulement de cadre de vie mais elle est aussi au service des dieux et des morts. Pour les défunts, il convient d'élever un tombeau, édifice indispensable à la survie. La demeure d'éternité abrite le corps du défunt soigneusement conservé par embaumement. Par le décor et des rites réguliers, le défunt possède tout ce dont il a besoin pour revivre agréablement. La tombe lui permet d'accéder à l'au-delà ce qui pour l'ancien égyptien est la récompense suprême. La notion d'immortalité est la clé de voûte de la civilisation égyptienne. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 14 Le pharaon, dieu vivant sur terre, seul maître du pays et des hommes, est l'initiateur de toute création architecturale. Les monuments sont réalisés sur ordre ou par faveur du pharaon qui seul dispose des ressources et des moyens nécessaires. L'architecture funéraire et religieuse est bien conservée contrairement à l'architecture civile. Les architectures funéraires et religieuses sont réalisées en pierre afin de durer l'éternité alors que les architectures civiles sont faites de briques crues et de bois, matériaux périssables. L'inondation annuelle (crue) en déposant le limon du Nil fournit au maçon la matière la plus courante, l'argile moulée en briques séchées au soleil. Le bois est rare (excepté le palmier-dattier). Des cités anciennes ont disparu sous des villes nouvelles ou sont enfouies sous les sables. L'Egypte est un pays de pierre. Au nord, on trouve le calcaire servant à la finition des pyramides. Au sud, on trouve les grès pour la construction des temples. Dans la région d'Assouan, on trouve les granites. A. L'architecture funéraire: 1. mastaba / 2. pyramide / 3. tombe hypogée Le mastaba est le premier type de tombeau qui apparaît en Egypte; il se compose d'une chapelle funéraire, d'un serdab (pièce destinée au double), d'un puits (comblé après les funérailles) et d'une chambre funéraire contenant le sarcophage. Les nécropoles sont toujours situées sur la rive des morts c'est-à-dire la rive ouest (soleil couchant) et se composent d'une multitude de mastabas construits en pierre et disposés très régulièrement (exemple de la nécropole de Saqqarah). A la 3ème dynastie, l'architecte Imhotep réalise la première pyramide d'Egypte, la pyramide à degrés de Saqqarah pour le pharaon Djeser. A l'origine la pyramide de Djeser est un mastaba construit sur un puits profond où se trouve une chambre funéraire. Progressivement, le mastaba se transforme en une succession de mastabas de plus en plus exigus pour devenir une pyramide à 6 degrés. Véritable escalier permettant à l'âme royale de s'élever vers le ciel, la pyramide de Saqqarah se trouve au milieu d'un vaste ensemble architectural (550m x 280m) entouré d'un mur d'enceinte (10m de Ht) On accède à l'intérieur par une seule porte (1 sur 14 est sculptée ouverte) et par une longue nef à colonnes. Autour de la pyramide, de nombreuses constructions sont destinées à la survie du pharaon et aux lieux de culte. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 15 Le complexe de Saqqarah est un simulacre destiné à l'au-delà. Toutes les constructions sont pleines, massives. Dès la 4ème dynastie, on évolue vers la pyramide vraie. * pyramide rhomboïdale de Houni à Dashour, * pyramide de Snefrou à Meidoum. L'ensemble des pyramides de Guizeh - Chéops, Kephren, Mykerinus représente l'apogée de ce type de construction. Ici l'idée solaire (faisceau de rayons solaires se répandant sur la terre) l'emporte sur l'idée plus concrète d'escalier. Il semble qu'il y ait eu de la part des constructeurs un désir réel de constituer un ensemble: non seulement ces pyramides valent par elles-mêmes mais leur groupement relance constamment le mouvement d'élévation et renforce leur symbolisme. Guizeh est situé exactement à l'ouest du Caire actuel, juste à la pointe du delta à l'endroit où se rejoignent la Haute et la Basse Egypte. La pyramide de Chéops, une des sept merveilles du monde antique, elle est la plus majestueuse. Haute de 145m environ pour 225m de côté, elle occupe une surface de plus de 5 hectares. En même temps que le sentiment d'appel vers le ciel, cet édifice est d'une extrême simplicité. A l'intérieur, on a voulu empêcher l'accès à la chambre funéraire et perfectionner le système de la voûte. La chambre a été prévue à 3 emplacements différents; souterraine d'abord puis à 21m au-dessus du sol puis à un niveau supérieur de la grande galerie. La chambre funéraire est surmontée de 5 espaces de décharges puis d'une voûte à double versant. La pyramide de Kephren est plus haute que celle de Chéops et l'inclinaison des faces est plus rapide. L'usage du granit rose est plus important (soubassement). La pyramide de Mykérinus complète harmonieusement l'ensemble. Elle est beaucoup plus petite (66m de hauteur). La pyramide est rarement isolée dans le paysage. Elle est associée aux temples funéraires : le temple d'en-bas (réservé à l'accueil du cortège) et le temple d'en-haut (lieu de culte) reliés par une rampe d'accès à degrés. Cet ensemble se complète de pyramides plus petites (pour la sépulture des reines ou des princes) et de mastabas. Le site prestigieux de Guizeh est pourtant l'un des derniers du genre. Le sphinx (être hybride mi-homme, mi-lion = image divine et royale par excellence) est l’un des symboles les plus forts de l’Egypte ancienne. Il est le garant de la bonne marche de l’univers et veille personnellement, tous les ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 16 matins, au lever du soleil, moment magique de la naissance du Monde. Il est le « Gardien de l’Horizon ». Dès la VIème dynastie, la préférence des pharaons va à la tombe hypogée creusée à flanc de rocher dont le plan perpétue la division tripartite du mastaba avec la chapelle, le puits et le caveau. C'est une architecture sobre et équilibrée. Le plan est en forme de T renversé. Les parois sont recouvertes de peintures. Au Nouvel Empire, les pharaons sont ensevelis sur la rive des morts de Thèbes, capitale religieuse de l'Egypte. Leurs tombes sont creusées dans la vallée des Rois et des Reines. B. L'architecture du temple : Les Egyptiens se dotent de sanctuaires grandioses, véritables "maisons des dieux". La structure du temple prend sa forme définitive au Nouvel Empire. Son plan révèle un aménagement de l'espace très hiérarchisé. Le temple est un modèle ordonné du cosmos et les rites qui s’y déroulent permettent de le perpétuer. Par les cultes rendus et les offrandes offertes, il s’agit de s’assurer que le soleil se lèvera tous les matins du monde. Quelle qu'en soit l'ampleur, il est généralement protégé par une enceinte de briques assez haute qui l'isole du monde extérieur et garantit le caractère sacré du lieu. Le temple est toujours surélevé pour être à l'abri des crues du Nil. Une allée pavée (dromos) bordée de sphinx conduit jusqu'au pylône, portail monumental composé de deux tours en plan incliné sommées d'un corniche et d'un tore, éléments classiques de l'architecture égyptienne, empruntés à l'architecture traditionnelle de briques crues. Des mâts portant banderoles ou oriflammes peuvent s'encastrer dans ces massifs. Deux obélisques, longs blocs de pierre quadrangulaire à la base et qui s'élèvent en s'affinant pour se terminer en pointe sont érigés à l'entrée du temple par les pharaons lors de leur jubilé et représentent un hommage à Ré, le dieu du soleil. Recouverts d'hiéroglyphes retraçant les hauts faits du fondateur du temple, ils sont la matérialisation de deux rayons de soleil. Des statues colossales se dressent également devant les pylônes. Entre les deux tours, une porte relativement basse fait pénétrer le visiteur dans une grande cour à ciel ouvert bordée d'un portique à colonnes où se déroulent les fêtes annuelles auxquelles le peuple est autorisé à assister. Cette cour (unique lieu réservé au public) est suivie d'un vestibule ouvrant sur la salle hypostyle elle-même suivie d'un autre vestibule précédant l'entrée du sanctuaire proprement dit, le naos. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 17 De part et d'autre, de petites chambres servent probablement de lieux d’offrandes. Le temple apparaît comme une succession de salles accolées les unes aux autres. Au rétrécissement progressif des espaces intérieurs correspond une élévation décroissante. De même, au fur et à mesure que l'on pénètre dans le temple, l'obscurité se fait de plus en plus grande. Les Egyptiens n'utilisent pas le système de la voûte mais celui de la platebande qui consiste à assurer la couverture par des dalles posées sur des supports. Or, la faible portée de ces dalles exige des supports nombreux si bien que l'espace se trouve encombré de plusieurs rangées de colonnes dont les chapiteaux sont l'objet d'un traitement esthétique original d'inspiration végétale. La colonne lotiforme représente une fleur de lotus fermée. La colonne campaniforme représente une fleur de papyrus ouverte ressemblant à une cloche renversée. La colonne palmiforme représente des feuilles de palmier évasées. Le temple est une architecture construite pour l'éternité (matériaux colossaux, aspect monumental). * temple d'Amon à Karnak, étude de la salle hypostyle avec ses 134 colonnes et ses claustra (fenêtres à claire-voie). Dans cet édifice monumental, deux types de colonnes sont utilisés: les colonnes trapues papyriformes à fleur fermées (bas-côtés) et les colonnes hautes payriformes à fleur ouverte, symbole d'épanouissement (nef centrale). * temple de Louxor situé sur la rive orientale du Nil, il est relié au temple de Karnak par une voie processionnelle de sphinx (disparue aujourd'hui). * temple d'Hatshepsout à Deir-el-Bahari où on accède au naos par deux terrasses bordées de portiques avec rampes axiales. Exemple grandiose d'intégration au paysage. * temple de Ramses II à Abou Simbel : sous Ramses II l'architecture se caractérise par des proportions grandioses, surhumaines. A Abou Simbel, les 4 colosses dominent de leurs 20m le temple rupestre. Lors de la construction du barrage d'Assouan, ce temple a été démonté puis remonté (1963/1968). 5. sculpture: La sculpture égyptienne est un art utilitaire de caractère religieux et funéraire. La sculpture doit imiter la vie, elle doit donner à l'âme un corps supplémentaire, un double où elle retrouve un asile impérissable dans le cas ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 18 où le corps de chair malgré les précautions de la momification viendrait à se dissoudre dans le néant. La sculpture est remarquable par son sens de la réalité et de la vie. L'idéalisation s'unit au sens du réel. Dans l’ Egypte pharaonique, tout ce qui est représenté existe en lien avec le concept d’immortalité. Exemples de sculptures analysées: * Djeser (IIIème dynastie), * Rahotep et Nefert (IVème dynastie), * Kephren (IVème dynastie), * triade Mykerinus, Hathor et un nôme d'Egypte (IVème dynastie), * scribe accroupi ( début de la Vème dynastie). Le Louvre -Paris Ces oeuvres sont sculptées dans des pierres dures (diorite, basalte, schiste). A l'Ancien Empire, les volumes sont puissamment synthétiques, le modelé toujours précis, l'artiste possède un sens de l'observation intensément réaliste. La sculpture se réfère toujours à un cadre géométrique. Frontalité, verticalité absolue des figures, les bras sont collés le long du corps. Une jambe est placée en avant pour la stabilité de l'oeuvre, les pieds sont posés à plat sur le sol. Hiératisme: les sculptures sont empreintes d'une grande tension intérieure, les attitudes sont rigides. Les vêtements sont toujours d'une grande simplicité. Le regard qui fixe légèrement le dessus de l'horizon est toujours intense; il est l'expression de la vie intérieure. Tous ces caractères contribuent à donner à la sculpture son plein épanouissement. Représentation d'êtres tendus dans une dimension de dépassement. Le pharaon est représenté sans âge, au maximum de sa puissance vitale. Evolution : Au Moyen Empire et surtout au Nouvel Empire, la sculpture acquiert charme, élégance, grâce des formes et du modelé. Sculpture plus fine, apparence plus humaine, plus sensible. Développement de la sculpture féminine. Modelé plus lisse. 6. Peinture-relief : a. Conventions de représentation des traits humains pour obtenir une représentation maximale du corps: - pas de profondeur dans le rendu de l'espace. - décomposition intellectuelle du corps humain: profil en principe à droite: tête de profil, oeil de face, épaules de face, jambes de profil. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 19 - visage impersonnel qui ne participe pas à l'action. - importance des gestes soumis à une cadence rythmique. - perspective morale (dimensions des personnages proportionnelles à leur importance). - division des parois en registres. b. Thèmes : scènes de cultes funéraires mais aussi scènes de la vie quotidienne de façon à replacer le défunt dans le contexte de sa vie de tous les jours (représentation d'animaux, scènes de chasse, de tenderie, de pêche, de travaux agricoles). c. Techniques : soit le relief (technique du méplat), soit la peinture (technique de la fresque). Pour la fresque, les artistes appliquent sur la paroi (pierre ou bois) un enduit fait d'une chaux blanche. Le dessin est tracé à la couleur rouge; le trait léger est parfois corrigé par le pinceau. On utilise un liant afin de faire adhérer ces mélanges au support choisi. Le liant est une solution à base de gomme arabique, de blanc d'oeuf. * mastaba de Ty (chasse à l'hippopotame), * oies de Meidoum. Ces oeuvres peuvent se ranger aussi bien dans le bas-relief (méplat) que dans la peinture. Les bas-reliefs sont traités normalement ou dans le creux (c'est-à-dire que les figures sont cernées d'un contour creux et restent au même plan que le parement du mur) et sont peints. Les scènes sont caractéristiques par leur vivacité et leur rythme. Elles nous apprennent beaucoup sur la vie quotidienne (sens de l'observation et naturalisme). Disposition en registres. Profonde harmonie des formes et couleurs finement nuancées. 7. arts décoratifs: On a découvert de très nombreux objets d'art mobilier. Le climat sec de l'Egypte a permis de conserver la plupart de ces objets. Exemples d'objets en pierre dure, en albâtre, en pâte de verre moulée: vases, coffres, objets de toilette (peignes, palettes à fard), bijoux en or, en argent incrusté de pierres semi-précieuses, mobilier (lits, fauteuils, chars) en bois incrusté d'ébène, d'ivoire. 8. période amarnienne: La période d'Amarna est une période entre parenthèse dans le Nouvel Empire et marque une rupture profonde avec le passé. A la tête de ce ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 20 mouvement, le pharaon Aménophis IV qui adoptera le nom d'Akhénaton. Son épouse et fidèle collaboratrice est Nefertiti. La réforme d'Akhénaton est fondée sur la religion. En opposition à la toute puissance du clergé d'Amon, Akhénaton tente de faire basculer la religion traditionnelle de l'Egypte basée sur un polythéisme vers un monothéisme centré sur la figure d'Aton, disque solaire, dieu unique, créateur, maître de l'univers, source d'ordre et de justice. Akhénaton quitte la capitale traditionnelle établie à Thèbes et crée une nouvelle capitale à Tell-El-Amarna, le long du fleuve en aval de Thèbes dans un endroit vierge de toute occupation. Tous les édifices construits à Tell-ElAmarna seront détruits par les successeurs d'Akhénaton qui rétabliront l'ordre et la religion traditionnels. L'art connaît également un changement radical. Les conventions sont tout à fait bousculées. Les sculpteurs remplacent l'idéalisme par un réalisme systématique tantôt expressionniste, tantôt maniériste (déformation, allongement, stylisation). Représentation d'une méditation intérieure, d'une douceur rêveuse, mélancolique mais aussi d'une certaine inquiétude. Le pharaon est souvent représenté dans des scènes de la vie quotidienne jouant avec ses filles, embrassant son épouse. Les sculptures féminines sont particulièrement gracieuses et élégantes. * * * * statue osiriaque d'Akhénaton buste en calcaire peint de Nefertiti tête de Nefertiti en quartzite bas-relief d'Akhénaton et Nefertiti. 9. Tombe de Toutankhamon: Toutankhamon succède à Akhénaton. Son règne ne dure que quelques années. Il meurt à l'âge de 19 ans. Son règne marque une période de transition, de restauration. Sous l'influence du puissant clergé d'Amon-Ré, il privilégie la ville de Thèbes et s'efforce d'effacer le souvenir de l'époque amarnienne. Fait exceptionnel dans l'histoire de l'Egypte ancienne, la tombe de Toutankhamon et ses trésors sont redécouverts en 1922 par un archéologue anglais, Sir Howard Carter. Située dans la vallée des Rois, cette tombe a livré de nombreux témoignages de l'art mobilier et cela malgré deux pillages. La tombe est très petite; elle se compose de la chambre funéraire et de la chambre aux trésors. La momie est protégée par un masque en or, trois sarcophages de forme anthropomorphe et trois catafalques. Dans la chambre du trésor, on a retrouvé de nombreux meubles, vases, coffres, bijoux, vêtements, aujourd'hui conservés au Musée du Caire. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 21 10. L'apport de l'architecture égyptienne : Le génie des proportions, la qualité de la taille des pierres, la stabilité des constructions, l'harmonie entre le tout et ses parties. Quelques éléments seront repris dans d'autres styles : le sphinx, la statue colossale, l'obélisque et vont inspirer les artistes de la Grèce et de Rome avant de fournir des modèles aux styles renaissance, baroque, néo-classique. La campagne d'Egypte de Napoléon Bonaparte en 1798 fera naître une mode à l'égyptienne qui marquera l'architecture directoire et empire en France puis en Europe dans la première moitié du 19e siècle. 11. références bibliographiques : LANGE, K., L’Egypte, Paris, HIRMER,M., OTTO, E., DESROCHES-NOBLECOURT, C., 1968 YOYOTTE, J., 1968 Les Trésors des pharaons, Genève, Skira, SUREDA, J., Les premières civilisations, Histoire Universelle de l'Art, Tome 1, 1989 Larousse, ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 22 Chap. 3 Introduction aux arts traditionnels de l’Afrique Noire ___________________________________________________________________________ Introduction : La découverte de l'art primitif compte parmi les grands apports du 20e siècle. Destin singulier que celui de l'art africain, successivement objet de curiosité puis de dédain et de mépris, document ethnographique soudainement promu, par la volonté de quelques artistes modernes du début du siècle, à la dignité d'art. Aujourd'hui négocié et recherché par des amateurs de plus en plus nombreux, le grand art africain a vu en cinq siècles se poser sur lui des regards forts contrastés avant d'entrer définitivement dans le patrimoine culturel de notre temps. 1 - le primitivisme : rencontre de l'art moderne et de l'art africain C'est vers 1906 que l'on a commencé à parler « d’art nègre » dans un plus large public. L'art africain ne sera reconnu en tant que tel qu'à la fin du 19e siècle / début du 20e siècle et cela en premier lieu par des artistes européens ; le cabinet de travail de Guillaume Apollinaire est décoré de statuettes exotiques. Les peintres modernes trouvent dans ces oeuvres une réponse concrète à leurs recherches de libération des formes plastiques. Ils admirent ces objets idéographiques. Picasso, en 1907, inaugure sa période "nègre". Modigliani allonge ses formes parfois d'une manière proche de celle des masques Fang du Gabon. Un exemple de masque Fang se trouvait dans la collection d'Henri Matisse. Traditionnellement, les objets d'art africain étaient conservés dans les musées d'Histoires naturelles. Ils avaient été ramenés par les voyageurs et les commerçants, principalement au 19e siècle. La plupart des musées ethnographiques d'Europe en sont les héritiers, par exemple les musées hollandais de Leyde et de Rotterdam, le musée portugais de Coimbra. Dans le dernier quart du 19e siècle, des musées d'ethnographie sont créés et bien organisés notamment à Berlin. En 1897, à l'occasion de l'Exposition Internationale de Bruxelles-Tervuren, des oeuvres venues du Congo sont exposées dans un petit musée, remplacé en 1910 par le majestueux bâtiment du Musée de Tervuren (archi. Girault), institution éminente pour l'étude de l'Afrique Centrale. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 23 2 - le temps colonial : Dans la deuxième moitié du 19e siècle, 2 destins se croisent ; celui de la Belgique et celui d’une vaste région de l’Afrique Centrale. « Dr Livingstone I presume « : Le nom de David LIVINGSTONE, médecin et missionnaire écossais est lié aux découvertes géographiques de la seconde moitié du 19e s. en Afrique. Son engagement missionnaire le conduit d’abord aux confins de Kalahari, puis de la reconnaissance du Zambèze aux lacs de l’Est Africain. Ses expéditions suivantes en feront le héros national de l’Angleterre qui dénoncera inlassablement l’esclavage. En 1871, à bout de ressources, il est rejoint sur les bords du lac Tanganika par le journaliste américain Henry M. STANLEY du NY Herald qui en le voyant lui aurait dit avec un sens de l’humour très british : « Dr Livinstone I presume ». Après quelques semaines d’exploration en commun, les deux hommes se séparent : Livingstone à la recherche des sources du Nil dont il ne reviendra pas et Stanley vers l’exploration du fleuve Congo. La mémoire du Congo : Léopold II (1835-1909) qui s’intéresse aux questions coloniales et gère une importante fortune personnelle suscite dès la 1876 la fondation d’une Association Internationale Africaine (AIA) à but essentiellement géographique : explorer le continent. En réalité, l’AiA et d’autres associations permettent au roi d’intensifier sa conquête du Bassin du Congo par l’entremise de Stanley qui obtient des concessions territoriales et fonde plusieurs stations le long du fleuve depuis son embouchure jusqu’au Stanley Pool où il crée le poste de Léopoldville en 1881. 1885, Léoplod II réussit à faire reconnaître lors de la conférence de Berlin, l’Etat Indépendant du Congo (EIC) comme étant sa propriété personnelle. C’est le début de l’exploitation et de la mise en valeur des richesses naturelles (ivoire, caoutchouc, cacao, coton et gisements miniers) de ce territoire grand comme 80 fois la Belgique et géré comme une entreprise privée. De multiples abus sont bientôt dénoncés. A la fin du règne de Léopold II, le débat fait rage. 1908, le roi cède le Congo à la Belgique. Une page est tournée et le Congo devient partie intégrante de la « nation belge ». La colonie est gérée par un système hiérarchique contrôlé depuis Bruxelles par un comité de parlementaires. 1960, le Congo accède à l’indépendance. 3 - Musée Royal de l’Afrique Centrale à Tervuren Dans le dernier quart du 19e siècle, des musées d’ethnographie sont créés ; Berlin, Paris,… En Belgique, à Tervuren, le Palais des Colonies accueille en 1897une exposition coloniale qui est une vitrine du Congo de Léopold II. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 24 Un an après l’événement qui connaît un succès important, l’exposition acquiert un caractère permanent et devient le Musée du Congo. Mais les collections ne cessant de s’accroître, y sont à l’étroit. En 1904 ; commence la construction du musée actuel, majestueux bâtiment de l’architecte français Charles Girault. 4 - aux origines de la culture africaine a) préhistoire Alors que le centre de l'Afrique tropicale n'a été découvert qu'au cours du 19e siècle, l'art de l'Afrique et surtout sa préhistoire se perd dans la nuit des temps. D'après les découvertes de Louis Leakey, l'Afrique Orientale est le berceau de l'humanité. L'Homo Sapiens Sapiens apparaît graduellement il y a plus de 40.000 ans ; ses outils et ses armes sont finement retouchés mais il vit encore uniquement de la cueillette, de la chasse et de la pêche. Cette économie de subsistance va se transformer en économie de production et l'ère néolithique caractérisée par la sédentarisation, l'agriculture, l'élevage, la fabrication de céramique débute sur le continent africain dès 7.000 ans avant J.-C. Les peintures et les gravures rupestres découvertes dans le Sahara particulièrement au Tassili (nord-est du Hoggar) ont été réalisées avant la désertification saharienne par des peuples préhistoriques qui y habitaient il y a 8 millénaires et dont les oeuvres les plus élaborées ont été peintes entre 5.000 et 1.200 avant notre ère. b) expansion musulmane et européenne Du 11e au 14e s., les Européens disputent aux Musulmans la maîtrise de la Méditerranée qu'ils avaient eue totalement aux 9e et 10e siècles. Un commerce terrestre existait depuis l'Antiquité à travers le Sahara, entre l'Afrique du nord et les savanes soudanaises. Après les découvertes portugaises du 15e siècle, ce commerce terrestre est supplanté par le commerce maritime : Portugais, Hollandais et Anglais en sont les concurrents. Mais l'histoire des peuples africains restés sans écriture, est ancienne. Ce sont les sources arabes qui nous éclairent sur l'existence d'anciens royaumes. c) découverte des anciens royaumes de l'Afrique Noire quelques grands sites archéologiques africains Le Nigéria Le Nigéria est le pays le plus peuplé d'Afrique Noire. Il est traversé par le fleuve Niger dont l'affluent principal est la Bénoué. Le Nigéria compte un plateau et des savanes dans le nord, la forêt tropicale dans sa partie méridionale. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 25 - culture NOK (400 avt J.C. - 200 de notre ère) Sur le plateau se développe à partir du 5e siècle avant notre ère, la culture NOK, culture la plus ancienne connue au sud du Sahara. Sculptures en terre cuite de style naturaliste : têtes caractérisées par de grands yeux aux lourdes paupières et au globe proéminent portant la marque de la pupille, un nez large aux ailes renflées. Elles se rapprochent de la grandeur naturelle et devaient surmonter le corps de grands personnages. Le sud du Nigéria connaît la floraison des cultures d'Ife (13e-15e siècle) et du Bénin (15e-19e siècle), capitales de royaumes où le souverain est un roi divin, issu de la dynastie Yoruba. Les Yorubas constituent le peuple le plus important du Nigéria. - Ife : découverte de têtes et de bustes en bronze représentant le roi d'Ife Le canon de l'effigie est purement africain : le volume de la tête domine les proportions du reste du corps. L'Oni est coiffé de sa couronne, le cou et la poitrine sont ornés de nombreux colliers; il est vêtu d'un pagne noué sur la hanche et tient dans ses mains ses insignes d'autorité. Willet, spécialiste de la culture d'Ifé suggère que ces sculptures étaient utilisées lors des secondes funérailles. Dans ces pays chauds l'enterrement a lieu assez rapidement après le décès et c'est un peu plus tard que la célébration des funérailles d'un roi ou d'un notable se fait avec solennité. - Bénin : Bénin est une vieille Cité-Etat dont la dynastie est d'origine Yoruba. Le Bénin entre dans l'histoire européenne dès le 15e siècle lorsqu'un Portugais visite la capitale. Au 17e siècle, c'est un Etat prospère dont parle le voyageur hollandais Dapper qui décrit en 1668 le vaste palais de l'Oba (roi) où les piliers sont décorés de plaques de bronze et où des tours sont surmontées d'oiseaux aux ailes déployées, coulés en bronze. L'art du Bénin est un art de cour. - période ancienne (15e /16e siècle) : comprend des têtes en bronze coulé, très fines et d'un grand naturalisme. Les colliers de perles étagés autour du cou ne couvrent pas le menton. Têtes de reine-mère portant une haute coiffure recouverte d'un réseau de perles de corail. - période moyenne : du milieu du 16e au 18e siècle : période très féconde. Les têtes portent des colliers très hauts. Le bronze est plus épais, plus lourd. Ces têtes ornaient les autels des ancêtres dans le sanctuaire du palais royal. Le 16e siècle est celui de la fabrication des plaques de bronze sur lesquelles sont rapportés les faits et gestes des Oba, des personnages de cour. - période récente : 19e siècle : Têtes monumentales, dernières oeuvres produites par les bronziers du Bénin. Après l'expédition punitive des Anglais en 1897, la cité tombe en pleine décadence. Les sculpteurs du Bénin ont aussi travaillé le bois et l'ivoire. Exemple de masques pendentifs représentant un Oba. - Archéologie malienne : La culture dite de Djenné (étudiée par Guimont - 1978 et de Grunne - 1980) ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 26 Dans le delta du Niger, on a découvert depuis les années '50, des statuettes en terre cuite, principalement à Djenné et à Mopti. Il s'agit d'un art essentiellement funéraire composé de terre cuite. Certaines conservent des traces de polychromie blanche, ocre ou noire. A l'inverse de la tradition de l'art africain, la tête est petite et les membres sont longs. Les attitudes variées présentent souvent de l'asymétrie. 5 - découverte de l'Afrique Poussé par le goût des voyages et du merveilleux mais surtout par des nécessités économiques profondes, l'Occident va se lancer progressivement dans la découverte des côtes de l'Afrique Occidentale. C'est dans le dernier quart du 15e siècle que l'Occident se tourne vers l'Afrique. Les explorations des côtes de l'Afrique Occidentale sont contemporaines de Léonard de Vinci, Michel-Ange et Raphaël. Mais quelles sont les raisons profondes de cette première rencontre entre l'Occident et l'Afrique? Jusqu'au 15e siècle, l'Europe, toujours à la recherche d'or et de produits exotiques tels que les épices, commerce avec l'Orient. Mais la chute de Constantinople en 1453, ferme définitivement la route classique qui relie par voie terrestre l'Occident à l'Orient. A la recherche de nouvelles routes vers les Indes, l'Europe se lance dans l'aventure des grandes découvertes. Ce vent d'aventure et de découvertes est désormais possible grâce aux récents perfectionnements apportés aux navires (gouvernail d'étambot, voile latine) et à la navigation (boussole, astrolabe, cartes marines). En 1454, le navigateur portugais Gil Eanes double le cap Bojador, alors point extrême de la navigation en Océan Atlantique. En 1471/72 des Portugais découvrent les côtes du Ghana, du Togo, du Dahomey et du Nigéria, jusqu'au delta du Niger. L'Afrique entre dans l'histoire occidentale. En 1482, Diego Cao atteint l'embouchure du fleuve Zaïre. En 1487, Bartholomeu Dias atteint l'Afrique du sud et voit le cap de Bonne Espérance. En 1497, Vasco de Gama dépasse le cap de Bonne Espérance fait escale sur la côte orientale de l'Afrique avant d'atteindre l'Inde en 1498. La "route des Indes" tant recherchée est dès lors tracée. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 27 C'est l'unique direction n/s des alizés qui avait empêché la découverte plus ancienne de l'Afrique Occidentale. Les côtes de l'Afrique Orientale, où souffle la mousson alternativement dans les 2 sens, avaient été découvertes dès le 7e siècle par la navigation arabe. 6 - naissance de l'exotisme Dès le 15e siècle, en Europe, les princes et les marchands se constituent des cabinets de curiosités où voisinent mille merveilles. Des objets d'art africain, le plus souvent d'inspiration européenne, sont collectionnés en raison de leur pittoresque par une Europe en mal d'exotisme. François I s'émerveille des pointes d'ivoire, des idoles provenant des côtes africaines. Dürer (1471 -1528) et Rembrandt (1606-1669) s'intéressent aux objets venus d'Orient dont ils admirent l'exécution technique et l'esprit original. Des artisans du Bénin travaillent suivant les indications de marchands portugais des ivoires de commande que se disputent les cours princières. On a retrouvé dans les palais d'Europe (trésor des Ducs de Bourgogne, 15e siècle / collection du Dauphin de France, 18e siècle), des salières en ivoire finement ciselées ainsi que de nombreuses cueilleres, coupes datant du 16e siècle. Mais les oeuvres traditionnelles sont beaucoup plus rares; leur caractère sacré en rend l'acquisition difficile, sans compter que leur caractère étrange rebute les esprits de la renaissance. Les 17e et 18e siècles oublient l'Afrique dont l'intérêt est en nette régression. Pour la conscience européenne, l'Afrique n'est plus qu'un réservoir inépuisable où les négriers se procurent à bon compte une main d'oeuvre abondante. L'Afrique Noire a cruellement souffert de la traite pratiquée de puis le XVIIe siècle jusqu'au milieu du 19e siècle par les Européens. 7 - l'art africain, générateur de mythes et fondateurs des sociétés La création plastique de l'Afrique Noire offre une grande richesse et une grande diversité de formes; elle présente aussi bien des statues, des masques, des charmes de toute nature que des objets d'usage courant tel que le mobilier, la céramique, les arts décoratifs. Malheureusement, la colonisation moderne a tué les arts traditionnels. La sensibilité nouvelle de l'Afrique s'exprime davantage dans la poésie, la danse et la musique. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 28 Il faut voir en Afrique une mosaïque de peuples et de civilisations très différentes possédant chacun son propre patrimoine artistique. On a trop souvent tendance à voir la sculpture africaine comme une entité et c'est faux. Il y a un art, des techniques, des conceptions propres à chaque ethnie ou à chaque région. On ne peut dès lors parler d'une sensibilité africaine mais d'une gamme incomparable de sensibilités plastiques. Les sculptures africaines ne sont pas signées, comme c'est aussi le cas, par exemple de nos sculptures du Moyen Age. Pourtant ce ne sont pas des oeuvres isolées, ni spontanées. Elles s'insèrent toujours dans une tradition stylistique propre à une ethnie. Les sculptures africaines utilisent quantité de supports différents. Elles peuvent être en ivoire, en bronze, en cuivre, en terre cuite, en paille recouverte d'argile, même en tissu. Le bois reste le matériau privilégié. L'immense majorité des sculptures ont un peu plus d'un siècle. Le bois résiste très mal aux agents destructeurs du climat tropical. En Afrique traditionnelle, une sculpture n'est jamais uniquement considérée comme un objet de pure contemplation. Avant d'être un plaisir pour les yeux, une sculpture est une nécessité, un instrument. Elle s'inscrit dans un contexte mythique et sacré nettement défini. Une sculpture n'est pas anecdotique, elle ne décrit pas ou ne raconte pas une histoire mais elle tend à être l'intermédiaire entre l'homme et l'invisible, entre le monde visible et invisible. Il s'agit d'un "art du contenu", d'un "art efficace", de l'expression visible de l'invisible. L’art africain revêt une signification rituelle, celle de faire vivre les mythes de la création, d’assurer la fertilité des récoltes et de commémorer la mémoire des ancêtres. Les sculptures ne sont pas destinées à être exposées au grand jour. Elles reposent dans la pénombre de cases et restent cachées aux yeux du commun. Elles ne sont sorties au grand jour uniquement lors de rituels. L'art entretient également des relations étroites avec la réalité sociale. Par exemple, les figures d'ancêtres, fondateurs de lignages conservent la mémoire des généalogies. Elles sont le symbole de l'identité d'un groupe. En Afrique, la notion de parenté est d'une importance capitale, elle apparaît comme le principal système de référence sociale. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 29 C'est par la parenté qu'un individu se situe dans la société, c'est elle qui détermine son comportement envers chaque catégorie de parent. Dans l'Afrique traditionnelle, un homme est avant tout le descendant d'un ancêtre. Notre société européenne utilise d'autres systèmes de référence pour identifier un individu (richesse, classe sociale, origine nationale, ...). Caractéristiques de la statuaire africaine traditionnelle : 1 - La sculpture reste soumise à la forme première du bois cylindrique dont elle est issue. Le sculpteur part d'une seule masse et travaille dans des limites étroites. Les volumes sont contenus dans une forme unique. 2 - La statuaire respecte la loi de la frontalité. L'artiste travaille sur les 4 faces mais avec une prédilection pour le corps vu de face ce qui crée une impression de statisme qui contribue à donner à la sculpture une monumentalité plastique et une expression d'éternité. 3 - La sculpture africaine respecte la symétrie des volumes de part et d'autre d'un axe médian. Cette régularité des volumes donne à la sculpture cette impression de calme, de sérénité, d'immobilité. 4 - Mépris frappant du naturalisme dans les proportions. Cette tendance est intimement liée à une symbolique proprement africaine. Les Africains donnent plus d'importance à la tête qu'au reste du corps parce qu'elle est le siège de la personnalité de l'être humain. La face occupe une position centrale et entre 3 ou 4 fois dans la hauteur totale. Le tronc et les membres inférieurs apparaissent dans des proportions plus trapues, plus ramassées. Statut du sculpteur : En Afrique traditionnelle, le sculpteur apparaît comme un artiste libre d'interpréter selon sa propre personnalité, l'esthétique d'un groupe. Cette liberté est néanmoins relative et doit s'inscrire dans le cadre stylistique fixé par la tradition si l'artiste veut rencontrer l'approbation du public. Ce n'est donc qu'à l'intérieur de ces limites strictement définies qu'un sculpteur à la possibilité de créer. Le sculpteur est avant tout le porte-parole d'un groupe. Sa création est dépourvue de toute gratuité, elle est l'interprétation plastique de la pensée, de la cosmologie du groupe auquel il appartient. Fondamentalement, le sculpteur africain reprend les gestes de l'artiste roman resté anonyme qui sculptait la pierre du tympan de Vézelay. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 30 Un sculpteur exerce en général la sculpture en plus de sa profession. Il jouit à l'intérieur du village d'une haute considération. Il n'est pas rare que le forgeron soit aussi sculpteur. Le forgeron est le maître du feu. Il façonne le fer et sculpte le bois Le sculpteur travaille dans la brousse, dans un endroit tenu secret. Les femmes et les non-initiés doivent se tenir à l'écart de l'atelier du sculpteur. Pour travailler le bois, le sculpteur dispose principalement d'une herminette qui se présente comme une petite hache au manche recourbé avec une lame au tranchant transversal. Le sculpteur l'utilise pour dégrossir la pièce de bois. Il possède aussi plusieurs couteaux à double tranchant qu'il emploie pour le finissage de la pièce. La surface du bois subit un polissage au moyen de feuilles rugueuses ou de peaux. Le sculpteur travaille le bois vert car plus facile à sculpter. Aussi les oeuvres ont-elles tendance à se fendre. Pour éviter cet inconvénient, le sculpteur enduit sa pièce d'huile de palme; de cette manière, il bouche tous les trous du bois qui ne sèche alors que très lentement. Notion de charme: Il existe en Afrique quantité de charmes aux fonctions diverses. Les charmes sont des incorporations d'esprits. Le charme est un objet matériel réalisé à base d'un mélange de diverses substances. On y trouve par exemples des plantes médicinales, une touffe de poil, des feuillages. Un charme n'a pas de valeur intrinsèque, la matière dont il est composé n'est qu'un support. Le charme ne possède pas un pouvoir par lui-même, il est fabriqué par l'homme mais il est le support d'un esprit et c'est l'esprit qui possède le pouvoir, qui agit. Il existe différentes catégories de charmes ; - ceux qui assistent l'homme dans les dangers et qui sont surtout les charmes des chasseurs et des guerriers, - ceux qui aident à lutter contre les sorciers, - ceux qui procurent de l'autorité, du pouvoir, de la richesse. Les charmes assurent à leurs détenteurs une protection contre les forces hostiles qui les entourent. L'action du charme se déroule dans le monde des esprits. On peut priver un charme de son pouvoir en dévoilant le secret de sa composition. L'esprit quitte alors le charme. Les sorciers s'efforcent de détruire les charmes pour affaiblir leurs détenteurs. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 31 Le couple sorcier et anti-sorcier : Un des fondements est la croyance fondamentale en l'agressivité des sorciers. Au premier plan se trouve la notion de sorcier et la seule idée qui opprime un homme sa vie durant, est la peur d'être ensorcelé. Le terme sorcier fait référence à un homme ou une femme qui peut dédoubler son existence pendant la nuit et en profiter pour nuire à une autre personne. Les sorciers se manifestent principalement aux moments où l'homme passe d'un stade à un autre ; à la naissance, pendant la période d'initiation. Pour lutter contre l'action d'un sorcier, il existe différents moyens ; - Les charmes, - L'anti-sorcier Le sorcier et l'anti-sorcier sont deux termes indissociables, complémentaires. Face au sorcier dont l'action est socialement condamnée se dresse l'antisorcier qui restaure l'intégrité de l'homme et de la société, menacée par les actions maléfiques. La notion de masque: Les masques révèlent une diversité de style et de fonction assez déconcertante, conséquence du rôle exceptionnel qui leur est réservé dans le domaine religieux, social et politique. Les masques sont hiérarchisés; il en existe de forts puissants qui n'apparaissent que 2 ou 3 fois durant la vie d'un homme, d'autres servent uniquement à distraire le public et sortent à l'occasion de nombreuses festivités. Cette diversité est impressionnante parce que le sujet traité constant et exclusif, représente invariablement le visage humain. Il existe toute une gamme de créations partant du réalisme idéalisé où l'artiste sculpteur cherche à utiliser des formes simples, des lignes harmonieusement élancées pour traduire les traits du visage humain. Cette tendance peut quelquefois aboutir à l'abstraction pure, le masque est alors une recomposition abstraite du visage où les différentes parties traitées éclatent en volumes saillants et géométriques. Chaque masque possède sa propre personnalité et donc sa propre forme d'apparence. Les masques sont des incorporations d'esprits de la nature. L'esprit peut se révéler en rêve à son futur détenteur, lui dicter sa forme d'apparition et lui enseigner ses danses, ses chants, sa musique. Un masque est pratiquement toujours porté par un homme initié. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 32 L'esprit se manifeste pour se mettre au service de la société; c'est un esprit bénéfique dont la présence aide à maintenir ou restaurer l'ordre de la société. Puisque les masques sont issus de la nature, ils portent des vêtements de fibres et de feuilles, leurs attributs ne sont pas façonnés par le sculpteur mais proviennent du domaine de la nature. La face de bois sculptée ne représente qu'une partie de la figure masquée. Le masque est toujours associé à un costume qui enveloppe le porteur de la tête aux pieds. Le porteur disparaît sous un épais vêtement de fibres qui soustrait aux regards tout indice permettant de reconnaître sa personnalité. Un masque a ses assistants : un seul homme ou tout un cortège avec orchestre et choeur. Un masque est aussi accompagné d'un interprète; il s'exprime en un langage déformé, émet des sons gutturaux ou suraigus. Pour se faire comprendre des hommes, le masque a donc besoin d'un intermédiaire, d'un interprète. Un autre assistant a pour tâche de recueillir les fibres de raphia, les plumes,... qui tombent du costume du masque pendant ses mouvements agités pour éviter que n'importe qui ne les emploie pour se livrer à des pratiques de sorcellerie. Tout cet ensemble constitue la véritable personnalité du masque. Cependant la face de bois sculpté représente la partie essentielle du masque. C'est à elle seule que le détenteur offre des sacrifices. D'autre part, la seule vue du masque est interdite aux femmes et aux noninitiés. Enfin, lorsqu'un homme désire être protégé par l'esprit d'un grand masque, par exemple lors d'un voyage, il peut se munir d'une réplique miniature qui agit comme charme protecteur. Il faut insister sur le caractère sacré de l'apparition d'un masque. Le masque est intouchable. Il est un être sacré même quand il plaisante avec les spectateurs ou les réjouit de ses danses. Le masque est le support matériel d'un esprit. Ce qui est fondamental dans la notion de masque, c'est qu'il est un esprit et pas seulement la représentation de celui-ci. Les masques servent à des fins positives comme les charmes. Le masque quitte la forêt, l'espace de la nature qui symbolise le monde des esprits pour pénétrer dans l'espace du village, monde de la culture pour manifester son alliance avec la société humaine. Les masques sont étroitement liés soit à la période d'initiation ou de deuil, soit aux fonctions sociales, soit aux divertissements. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 33 1- Les masques liés à la période d'initiation : L'initiation constitue une étape fondamentale dans les sociétés traditionnelles. Elle se déroule dans un camp de brousse établi dans un endroit tenu secret de la forêt. La retraite initiatique varie de quelques semaines à plusieurs mois. Pendant ce temps, les jeunes gens demeurent à l'écart des villages et des villageois. Au cours de la période initiatique, le néophyte devient progressivement un être social à part entière. Le passage de l'état d'enfant à celui d'adulte s'effectue par des épreuves rituelles suivies d'une période d'initiation qui comprend l'apprentissage de la vie communautaire, l'utilisation des ressources naturelles, ainsi qu'un enseignement touchant à l'univers religieux, aux traditions et au respect des interdits. Son accession à l'âge adulte est marquée par l'opération de circoncision, premier rite réalisé au moment de son entrée dans l'enclos initiatique et qui correspond à une mort symbolique. Après guérison des plaies, le nouveau circoncis subit l'épreuve des scarifications. Les rites initiatiques peuvent se terminer par un bain rituel purificatoire et l'imposition d'un nouveau nom à chaque initié. Ces rituels correspondent à une renaissance symbolique et marquent la fin de la période d'initiation. De nombreux masques interviennent au cours de la période d'initiation. Par l’initiation, les garçons et les filles deviennent des membres à part entière de leur communauté. La durée des rituels initiatiques et l’âge de l’initiation varient selon les ethnies. 2- les masques liés aux fonctions sociales: Les masques assurent des fonctions dans la vie sociale. Ils peuvent avoir un rôle de juge, de pacificateur, de policier ; ils ont pour fonction de maintenir ou de restaurer l'ordre social de la société 3- les masques liés au divertissement : Il existe également des masques profanes, des masques d'acteurs qui chantent et qui peuvent représenter certains animaux ou certains hommes. La transmission des masques : Les masques à hautes fonctions sociales peuvent être exécutés par le sculpteur. D'autres masques sont l'oeuvre de leur détenteur. Les masques à hautes fonctions sociales ne sont pas reproduits à chaque génération et demeurent longtemps au sein d'une même famille. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 34 Le masque se transmet selon le principe de l'héritage de père en fils ou est attribué par une société secrète à l'un de ses membres. Ces types de masques peuvent être renouvelés si leur état est jugé trop vétuste. Les masques mis ainsi hors d'usage sont cependant conservés précieusement jusqu'à leur destruction totale. Les masques de divertissement peuvent être, par opposition aux masques à hautes fonctions sociales, la propriété d'un individu. 8 - peinture corporelle, le tatouage Les Africains ne s'expriment pas seulement dans la sculpture. La peinture corporelle, le tatouage, la parure et la danse sont également un art. Exemple d'un peuple de l'Afrique Orientale : les NUBA. Leni Riefenstahl (1902-2003) a vécu chez les Nuba du Soudan en 1962. Les Nuba vivent nus; mais la pudeur leur fait porter une ceinture de cuir ou d'herbe, parfois enfilées de perles. Tous les jours, ils s'enduisent le corps d'huile d'arachide et se peignent de couleurs qui vont principalement du jaune au rouge. "Chaque clan familial possède sa nuance et doit s'y tenir strictement". L'art de la peinture corporelle chez les Nuba atteint une réelle perfection. C'est surtout leur peinture faciale qui est extraordinaire d'invention et évoque un masque. En effet entre 20 et 30 ans, les Nuba luttent avec, comme arme, un bracelet tranchant en fer. Le combat oppose toujours des hommes de 2 villages différents. On croit que la couleur noire rend le corps invulnérable. Le combat apparaît comme un jeu de séduction, le gagnant est adulé par les femmes, qui le désirent. Les Nuba se peignent réciproquement entre amis. Ces peintures n'ont qu'un but esthétique. Les tatouages sont communs aux 2 sexes chez les Nuba. Pourtant les garçons ne les portent que sur le visage; tandis que les femmes s'en ornent tout le corps. Les instruments de la spécialiste est une lame très tranchante et de longues épines qui servent à tendre la peau. Pendant l'opération la peau est continuellement frottée d'huile. Dans l'entaille est saupoudrée de la farine de sorgho, mêlée à des extraits de racines et à de la poudre de simples : ceci pour calmer la douleur, protéger des infections et provoquer des cicatrices en relief. Les premières scarifications sont faites chez la petite fille, avant la puberté; les deuxièmes après les premières règles; les troisièmes et dernières après la naissance et le sevrage du premier enfant. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 35 La femme est désormais définitivement parée et devenue très désirable. 9 - la récupération de la vie par la vertu de l'art : les Dogons Les Dogons (environ 200.000 habitants, république du Mali) se sont réfugiés depuis des siècles dans les falaises abruptes de Bandiagara, au sud de la boucle du Niger. Ils sont agriculteurs avec un système de descendance patrilinéaire. Chaque fraction dogon a un chef politique et religieux, le Hogon, l'homme le plus âgé ou le patriarche de la plus ancienne famille établie dans le pays. Secondé par un conseil des anciens, il représente l'ancêtre fondateur, contrôle les rythmes cosmiques, est le chef des prêtres totémiques. Le symbolisme religieux et la mythologie particulièrement riche des Dogons ont été longuement et patiemment étudiés par Marcel Griaule (1898-1956), son assistante Germaine Dieterlin (1903-1999) et une équipe de chercheurs dont le cinéaste Jean Rouch (1917-2004). En 1931, Marcel Griaule (1898-1956) dirige l'expédition Dakar/Djibouti, aventure à la fois scientifique et humaine, au cours de laquelle il découvre les Dogons. Marcel Griaule étudiera sans relâche les traditions et la cosmogonie dogons. Michel Leiris accompagne cette expédition mythique pour la connaissance de l'Afrique. Il écrit un journal de bord publié sous le titre "L'Afrique fantôme", premier essai sur l'envers du colonialisme. Les Dogons ont su préserver leur héritage spirituel. La tradition dogon est progressivement révélée aux hommes après l'initiation. Les hommes masqués interviennent lors de l'initiation et lors des rituels funéraires. Ils jouent un rôle de premier plan lors des cérémonies de lever de deuil. En 1948, Griaule publie "Entretiens avec Ogotemmêli", livre qui donne un aperçu de la pensée dogon, sa conception du monde. Le rituel de régénération Sigui commémore la révélation de la parole aux hommes. Ce rituel a lieu tous les 60 ans (…1907/1967/2027)et donne lieu à la taille d'un nouveau grand masque-serpent. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 36 10. … et aujourd’hui … L’Afrique est un espace de diversité artistique qui ne se limite pas aux arts premiers. L’art contemporain africain dresse un panorama contrasté mettant en lumière et affirmant autant les traditions que le questionnement des relations Nord-Sud, le monde post colonial et les réalités socio-économiques et politiques du continent. A partir des années 1990, des artistes de différentes cultures d’Afrique prennent part aux grandes expositions et manifestations internationales telles que la Documenta de Kassel, les Biennales de Venise, Sao Paulo, Dakar, … ce qui contribue à la reconnaissance mondiale d’une scène artistique émergente jusque là peu connue. El Anatsui (1944) représente le Nigéria à la Biennale de Venise en 1990 et acquiert une reconnaissance internationale. Art empreint de modernité et de tradition. L’artiste travaille le recyclage : capsules assemblées avec fil de cuivre. *Sasa (2004) – œuvre monumentale qui tient du tissage, du vêtement, de la peinture. Fait allusion à la notion de prestige du manteau porté par le chef mais aussi aux rapports Afrique/Occident dans l’importation de boissons alcoolisées (bière). Chéri Samba (1956) artiste contemporain de la République démocratique du Congo - vit à Kinshasa et à Paris. L'un des artistes contemporains africains les plus connus ; ses œuvres figurent dans les collections d'institutions comme le Centre Georges-Pompidou à Paris ou le Museum of Modern Art de New York. Ses peintures, à la croisée de plusieurs influences picturales, présentent la caractéristique d'inclure le plus souvent du texte en langue française, anglaise et en langue lingala, sous forme de commentaires sur différentes facettes de la vie quotidienne, sociale, politique et économique en Afrique, comme plus largement sur le monde moderne. * Matonge-Bruxelles - Porte de Namur, porte de l’amour ? Gigantesque fresque (12 x15m) accrochée sur une façade de la chassée d’Ixelles dans le quartier Matonge. Cette fresque symbolise le rapprochement des communautés et des peuples. Œuvre très colorée divisée en 3 niveaux de lecture : en haut le spectateur découvre une architecture européenne, la scène du centre se déroule à la Porte de Namur et fait allusion au carrefour des rencontres des cultures africaines. L’ambiance de la rue y est dépeinte, animée et colorée. Au dernier niveau, une atmosphère de nuit des snacks d’habitués. Petite touche d’originalité : des phrases viennent compléter le message véhiculé par l’image et ajoute au caractère « décalé » de cette peinture. (source : archives.lesoir.be, juin 2002) ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 37 Freddy Tsimba né à Kinshasa en 1967. Sculpteur, travaille le bronze et le ciment. Il doit sa notoriété à plus d’une cinquantaine d’expositions en Afrique, en Europe, au Canada et en Chine. A obtenu de nombreux prix et distinctions en France et au Canada. "Ma vraie école, même si j’ai fait les Beaux-Arts de Kinshasa, c’est la rue où je me fournis en abondance. Mes maîtres ont été les forgerons auprès desquels pendant 5 ans j’ai appris la technique du feu et de la soudure." Assemblant et soudant des matériaux de récupération – ici des douilles de cartouches, là des cuillères – il dénonce les tragédies engendrées par la guerre. Par ses sculptures expressionnistes morcelées et provocatrices, il témoigne des questions essentielles de l’humanité et de ses réponses ravageuses et universelles. (source : freddytsimba.wordpress.com) * Par delà l’espoir * Un aller sans retour Romuald Hazoumé (1962) artiste de la République du Benin, surtout connu pour ses masques réalisés à partir de bidons d’essence découpés. Une hanse dessine le nez, un goulot la bouche, de simples tresses finissent d’esquisser le visage. Avec ses créations, Hazoumé rend hommage aux « héros de la survie », ces Béninois qui font du trafic d’essence avec le Nigéria voisin, transportant jusqu’à 620 l d’essence sur leur mobylette. * La Bouche du Roi - œuvre exposée en Angleterre lors du Lors du l’anniversaire de la signature du Slave Trade Act de 1807. Samuel Fosso, (1962) photographe camerounais connu pour ses autoportraits. Remarqué lors des premières Rencontres africaines de la photographie de Bamako en 1994, il a participé à l'exposition d'art contemporain Africa Remix au Centre Pompidou en 2005. Ses dernières réalisations rendent hommage aux grandes figures africaines et aux militants des droits civiques. Vit aujourd'hui à Bangui, en République centrafricaine. Malick Sidibe, né en 1936 au Mali. Vit et travaille à Bamako. D'abord connu pour ses photographies de reportage, prises dans les surprises-parties organisées par des jeunes gens friands de musique et de liberté alors que le pays prépare à l’indépendance. Ces séries débutent vers 1957 et vont se poursuivre jusqu'au début des années1970. Par la suite, c'est le portrait réalisé en studio qui constitue la majeure partie de son travail. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 38 A partir de 1994, avec les premières Rencontres de la Photographie africaine de Bamako, le travail de Malick Sidibé est remarqué et fait rapidement l'objet d'expositions importantes – la première a lieu à la Fondation Cartier à Paris – dans les grandes galeries et musées du monde entier. En 2003 le prix de la photographie Hassselblad lui est décerné. C'est la première fois qu'un africain est ainsi promu au rang des plus grands photographes internationaux. 2007 est pour Malick Sidibé l'année de la consécration, il reçoit en juin le lion d'or à la biennale de Venise. à consulter pour un panorama de la création africaine contemporaine: http://www.paddle8.com/contemporaryafrican ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 39 11 - Références bibliographiques : BASTIN, M-L. Introduction aux arts d'Afrique noire, éd. Arts d'Afrique Noire, 1984 Arbouville, France de HEUSCH, L Hachette, 1963 L'art primitif et les sociétés primitives à travers le monde, LEIRIS, M. DELANGE, J. 1967 Afrique Noire, Coll. Univers des Formes, éd. Gallimard, Paris KERCHACHE, J. PAUDRAT, J.L. STEPHAN, L. 1988 L'Art Africain, éd. Mazenod, Paris MURRAY, J. 1982 Atlas des civilisations africaines, éd. Nathan, Paris NEYT, Fr. Arts traditionnels et histoire au Zaïre, Cultures forestières et 1981 royaumes de la savane, Société des Arts Primitifs, Bruxelles RUBIN, W. 1991 Le primitivisme et l'art du 20e siècle, éd. Flammarion, Paris Paris Catalogue de l'exposition : Trésors d'Afrique, Musée royal de l'Afrique centrale, 1995 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 40 Chap. 4 Introduction aux arts de la MESOAMERIQUE ___________________________________________________________________________ 1 / Introduction a) notion d’aire mésoaméricaine La notion « d’aire mésoaméricaine » définie par Paul Kirchnoff en 1943 est une aire culturelle où de nombreuses civilisations différentes partagent des traits culturels communs : - - - 1. agriculture basée sur le maïs, la courge et le haricot, Jusqu’à nos jours, en Mésoamérique, le maïs apparaît aussi important que le blé dans les pays occidentaux. Ce qui explique pourquoi le dieu du maïs a si souvent été décrit, tout comme le mythe dans lequel il meurt et renaît. Cette renaissance signifiait que les plants de maïs arriveraient à maturité. L’importance du maïs se trouve aussi dans le mythe selon lequel les Mayas étaient constitués de cette céréale. Du maïs était déposé dans chaque tombe et, sous forme de pâte, dans la bouche du mort. 2. marchés à intervalles réguliers, 3. pyramides à degrés, 4. existence du jeu de balle, rituel où le passage de la balle d’un camp à l’autre symbolise et suscite le mouvement des astres, l’alternance du jour et de la nuit et celle des saisons sèches et humides en rapport avec la fertilité de la terre. 5. emploi de simultané de 2 calendriers : les Mésoaméricains possédaient 2 calendriers qui se combinaient. L’un solaire de 365 jours (18 mois de 20 jours + 5 jours néfastes), l’autre divinatoire de 260 jours (20 semaines de 13 jours). La base commune des 2 calendriers était fournie par 20 noms de jours différents qui se suivaient toujours dans le même ordre, accompagnés de chiffres de 1 à 13. Après 20 semaines de 13 jours, on retrouvait le même nom accompagné du même chiffre : c’était le début d’un nouveau cycle de 260 jours. Pour l’année solaire, le même nom et le même chiffre reviennent aussi après 360 jours mais il y a 5 jours néfastes dès lors chaque année, le nom sera décalé de 5 jours, le chiffre d’une unité. Dès lors, 4 noms de jours sur 20 peuvent marquer le début d’une année ; ce sont les noms porteurs d’années. Ces 4 signes se combinant à des chiffres de 1 à 13, une même année revient tous ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 41 les 4 x 13 soit tous les 52 ans. C’est ce qu’on appelle la « ligatures des années », objet de rituels importants. - Contrairement aux Mayas, les Mexicains n’ont pas de compte long des années à partir d’une année 0. Chaque date revenant tous les 52 ans, il est très difficile d’établir la corrélation avec nos années. 6. livres de papiers et systèmes d’écriture 7. absence de métaux jusqu’à une date récente (8e/9e siècle). 8. absence d’animaux domestiques (sauf chien et dindon) avec pour conséquence pas d’emploi de la roue 9. absence du tour de potier b) géographie La Mésoamérique couvre le Mexique Central, la péninsule du Yucatan, le Guatemala, la partie occidentale du Honduras et du Salvador. Cette région est divisée en 2 parties par l’isthme de Tehuantepec. Grosso modo, à l’Est le monde maya et à l’ouest le monde mexicain. Dans la partie occidentale mexicaine se développe le long des côtes 2 grandes chaînes de montagneuses : la Sierra Madre occidentale et la Sierra Madre Orientale. A hauteur de Mexico, elles sont reliées entre elles par une chaîne volcanique dont les principaux pics culminent à 5.000 m. La chaîne volcanique dont les cendres ont enrichi le sol et qui recèle la pierre d’obsidienne, capitale pour les économies mésoaméricaine, contribue à la formation du plateau central mexicain avec ses vallées : de Mexico au Centre, de Puebla à l’Est de Toluca à l’Ouest de Morelos au sud et du Mezquital au nord. La partie orientale « maya » est moins accidentée. Une chaîne montagneuse volcanique se prolonge dans le sud formant les montagnes du Chiapas et les Hautes terres du Guatemala méridional. La péninsule du Yucatan est plate ; c’est un plateau calcaire sans fleuve. Les eaux s’y infiltrent et forment des lacs souterrains qui deviennent de grands puits naturels ou cenotes lorsque la voûte s’effondre. Plus au sud il y a 2 fleuves qui constituent d’importantes voies de communication : l’Usumacinta et le Montagua. c) Climat Quoique située au sud du Tropique du Cancer, la majeure partie de la Mésoamérique jouit d’un climat assez tempéré en raison de son altitude. Il y a 2 saisons, celles des pluies, de mai à octobre et la saison sèche. Dans les Terres basses, sur la Côte du Golfe, au Tabasco, au Guatemala couverts de forêts et de jungle, le climat est tropical. L’étagement et les altitudes différentes ont pour effet l’existence de zones très diverses et complémentaires. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 42 Le relief très accidenté est responsable du cloisonnement de l’aire qui se traduit par une grande diversité des cultures. d) Langues Là aussi, la diversité est extrême. On distingue 3 grands groupes : - l’uto-aztèque comprenant le nahuatl et le pipil, - l’oto-zapotèque : zapotèque, mixtèque, otomien - le macro-maya : huaxtèque, maya. e) Concept de vie et de mort : Pour les peuples de Mésoamérique, la vie et la mort formaient un tout indissociable. D’autre part, une croyance voulait que la manière dont on meurt, détermine dans quelle couche de quel monde on se retrouverait. En effet, dans ces civilisations, on pensait que le cosmos était triple : il se composait d’un monde inférieur et d’un monde supérieur entre lesquels se situait notre monde intermédiaire. Chacun de ces mondes était subdivisé en plusieurs couches. Le passage vers d’autres mondes n’était possible qu’après la mort. Les prêtres et les chamans qui avaient le pouvoir de pénétrer dans les mondes inférieur et supérieur bénéficiaient d’un statut particulier. Grâce à leurs connaissances du soleil, de la lune et des étoiles, ils savaient précisément quand semer les cultures et procéder aux récoltes. Ils étaient experts dans l’art de lire des calendriers agraires complexes tels ceux des Mayas. Ils accédaient au monde invisible pour, par exemple, demander pourquoi une personne était malade ou comment faire cesser la pluie. Pour cela, ils devaient d’abord entrer en transe, par la musique, la danse, le jeûne et le recours à des substances psychotropes. Dans leur état de transe, ils éprouvaient la sensation de voler ou de se transformer en animal. Dans les civilisations mésoaméricaines, la tête avait une signification particulière. Beaucoup de représentations montrent des décapitations rituelles, et également des crânes et des têtes séchées. Les nombreux crânes retrouvés dans les fondations des temples, des tombes et sous des terrains de jeu de balle attestent cette pratique. Selon les traditions, les dieux s’occupaient de l’humanité en échange d’offrandes car ils s’étaient eux-mêmes sacrifiés lors de la création du monde pour permettre à l’homme de vivre. Les sacrifices humains ou les offrandes de sang contribuaient à maintenir l’équilibre de l’univers. Afin de ne pas sacrifier des membres de sa propre communauté, on envoyait souvent des guerriers, capturer des ennemis à sacrifier. Rapporter une tête trophée signifiait triomphe et pouvoir pour le guerrier. Un défi doublé d’un enjeu capital : s’il revenait bredouille, le guerrier était décapité au cours d’un rituel. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 43 f) Chronologie - jusqu’à 7.000 B.C. : le lithique 7.000 B.C. / 1.700 B.C. : débuts de l’agriculture et de la sédentarisation 1.700 B.C. / 200- 100 B.C. : Préclassique : début des grandes civilisations 200 – 100 / 300 A.D. : Protoclassique 300 A.D. / 900 A.D. : Classique 900 A.D. / 1521 A.D. : Postclassique 2 / Le lithique - les débuts de l’agriculture – la période Préclassique a) le lithique Il est généralement admis que l’homme a pénétré en Amérique par le Détroit de Behring. Le retrait des glaces recouvrant l’Amérique du Nord au 8e millénaire isolera définitivement l’Amérique en noyant le passage de Behring. Au Mexique, la présence de l’homme est attestée vers 20.000 B.C. dans la vallée de Mexico. b) débuts de l’agriculture et de la sédentarisation En Amérique, la révolution néolithique se produit indépendamment du reste du monde puisque la domestication des plantes y précède la sédentarisation. La culture du maïs apparaît vers 5.000 B.C. L’invention du maïs est un événement considérable ; la plante est résistante, s’adapte à des milieux très différents, peut être cultivée jusqu’à près de 4.000 m et est très productive. c) le préclassique du Mexique Central préclassique ancien (1.700 – 1.200 B.C.) L’art de cette époque est formé par de nombreux objets en terre cuite, principalement des figurines et des statuettes, d’une extrême variété. Objets le plus souvent associés au mobilier funéraire retrouvé dans des sépultures. Les sujets les plus souvent représentés sont des femmes stéatopyges, des mères à l’enfant, des figures bicéphales. Représentations de la Terre-mère en rapport avec la fécondité et la fertilité. Divinités domestiques, elles avaient peut-être pour fonction d’assurer magiquement la fertilité des champs (à l’époque aztèque, des figurines en terre cuite étaient suspendues à des cordelettes au-dessus des champs). ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 44 préclassique moyen (1.200 – 600 B.C.) Les thèmes et les techniques se diversifient. Les figurines sont souvent à engobe et de la peinture rouge souligne les cheveux, les ornements. La technique du pastillage n’est plus systématiquement employée : les traits sont modelés, incisés, perforés. Les visages sont fins, sensibles d’où l’appellation de figurines de type « prettyladies ». Les figures doubles illustrent l’important concept religieux de la dualité qui voit partout 2 choses en une ou deux aspects en tout. De façon caractéristique, la divinité suprême s’appelait le Dieu Deux et était double masculine et féminine. Elle symbolisait l’union des principes contraires : d’un côté le masculin, céleste, actif, lumineux, igné de l’autre le féminin terrestre, passif, obscur, lié à la matière. Des figures de joueurs de balles peuvent avoir été associées à la fertilité car le jeu avec la balle qui passe d’un camp à l’autre symbolise le mouvement des astres et l’alternance des saisons. Certaines figurines peuvent avoir été utilisées par des chamans lors de séances de guérison. Outre les figurines, on a retrouvé de nombreux vases aux formes simples, le plus souvent monochromes (noir, beige, rouge) et à décor géométrique incisé. Les vases les plus remarquables sont les vases à anse-goulet en forme d’étrier et les écuelles tripodes. Il existe aussi des vases zoomorphes figurant des poissons ou des canards. préclassique récent (600– 200 B.C.) A partir de 600 B.C., l’architecture et la sculpture de pierre se développent. Dans la vallée de Mexico, Cuicuilco, devient un centre cérémoniel important ; on y construit une pyramide à degrés faite de deux corps ronds superposés, en terre séchée, surmontés d’un autel. Plus tard, cette construction deviendra le noyau d’une autre plus grande, la recouvrant entièrement. La nouvelle pyramide toujours ronde comprend 4 étages ou corps superposés et est revêtue de pierres non taillées. Des escaliers permettent l’accès au sommet où se trouvait probablement un temple en matériau périssable. d) L’art du Nord-Ouest et de l’Occident (Jalisco, Nayarit, Colima) Dans ces régions, l’art du préclassique se prolonge jusqu’aux alentours de 300 A.D. avec une floraison extraordinaire de la céramique où de multiples aspects de la vie quotidienne ou religieuse sont rendus avec un sens aigu de l’observation, en des styles très variés, le plus souvent naturaliste. Il s’agit d’un art essentiellement religieux puisque la plupart de ses objets ont été retrouvés ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 45 dans des chambres funéraires souterraines, taillées dans la roche auxquelles on accède par des puits de 4 à 6m de profondeur. e) les Olmèques (1.300 B.C. / 400 A.D.) La civilisation olmèque a rayonné dans tout la Mésoamérique, elle est considérée comme la civilisation-mère. La région olmèque se situe au sud du Golfe du Mexique, dans le Veracruz méridional et au Tabasco. Elle comprend les sites principaux : San Lorenzo, La Venta, Tres Zapotes, Laguna de los Cerros, … Le milieu géographique est peu favorable ; région de terres basses couvertes de jungle et de marais. Matières premières rares : pierre (basalte) provenant de régions éloignées d’une 100aine de km. Obsidienne importée du Mexique Central et du Guatemala. Toutes ces matières précieuses, les Olmèques les obtenaient soit par exploitation directe soit par échange contre des biens de prestiges (caoutchouc, plumes). On ne connaît rien de l’organisation politique olmèque. Mais l’art olmèque témoigne d’une grande unité stylistique. Il n’y a pas de villes olmèques mais des centres cérémoniels comprenant essentiellement des édifices publics et religieux où n’habitait qu’une population restreinte, l’élite. Les populations agricoles vivaient dispersées aux alentours et ne se rendaient dans les centres qu’aux jours de marché, pour des fêtes, des cérémonies importantes et des pèlerinages. L’architecture olmèque n’utilise pas de pierre, les tertres de terre étaient surmontés de temples de bois et de chaume. Découverte de tombes, faites de colonnes de basalte et recouvertes de tumuli. Elles contenaient des ossements couverts d’ocre rouge, des bijoux, des masques faits de mosaïques de blocs de serpentine et des figurines en terre cuite. la sculpture : Les Olmèques, maîtres de la ronde-bosse ont sculpté des reliefs sur des stèles, des autels, des trônes, des sarcophages, des parois rocheuses, … la matière employée est d’abord le basalte, importé de la région du lac Cetemaco et pour la petite sculpture, le jade, la serpentine de provenance diverse. Le thème principal est l’homme, avant tout le roi ou le prêtre figuré « en majesté » avec ses insignes de pouvoir. L’homme mais le plus souvent, l’homme-félin, a des traits qui évoquent le jaguar. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 46 Les traits du félin sont si fréquents qu’on a parfois qualifié les Olmèques de « peuple de jaguar ». Le jaguar symbolise la terre, l’intérieur de la terre et par extension la nuit (par opposition au ciel, au jour symbolisé par l’aigle). Son pelage tacheté évoque le ciel étoilé. La sculpture olmèque est un art monumental de style essentiellement réaliste. Les formes sont compactes, pesantes Les personnages sont souvent statiques. Le visage typiquement olmèque est assez carré ou rectangulaire ; la tête est allongée vers le haut (déformation crânienne). La bouche « du félin » est très caractéristique. Les Olmèques se considéraient comme les descendants d’hommes-jaguars, fruits d’un accouplement primordial d’un jaguar et d’une femme. Des têtes colossales sont caractéristiques de la culture olmèque. Leur hauteur varie entre 1,5m et 3,5m. Ce sont des masses compactes, fermées inscrites dans des prismes rectangulaires. Elles sont réalistes, individualisées. Les Olmèques ont été des artisans du jade, de la jadéite, de la néphrite d’autant plus étonnant que leurs outils étaient tout à fait rudimentaires. en conclusion : La culture olmèque, civilisation-mère des civilisations mésoaméricaines a développé : - de vastes centres cérémoniels orientés, - des terrains de jeu de balle - des autels, de stèles, des monuments sculptés disposés dans des centres cérémoniels, - des encensoirs et sacs à encens - l’écriture, les glyphes pictographiques, idéographiques - le calendrier 3 / la période classique La période classique est celle de l’éclosion et de l’apogée d’un certain nombre de civilisations régionales fortement diversifiées. Grosso modo, le classique couvre le premier millénaire, mais il commence au début de notre ère au Mexique Central et vers 300 dans l’aire maya. - Chez les mayas, l’apogée se situe entre 600 et 900. - A Teotihuacan et Monte Alban (culture Zapotèque) , l’apogée se situe entre 400 et 700. Les principales civilisations sont : 1) Civilisation deTeotihuacan au Mexique Central 2) civilisation zapotèque en Oaxaca (Monte Alban) 3) civilisation totonaque sur la Côte du Golfe (El Tajin) ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 47 4) civilisation maya A/ TEOTIHUACAN Teotihuacan est le premier véritable grand centre urbain de Mésoamérique. Il est situé dans la partie Nord-est de la vallée de Mexico, à une 50aine de km de Mexico, à une 15aine de km du lac salé de Texcoco Son emplacement est très favorable : riche plaine alluviale, fertile, coupée de nombreux cours d’eau ; à proximité, on trouvait du bois, une bonne argile pour la céramique et des carrières d’obsidienne ; les lacs fournissaient du sel, des poissons et formaient un moyen de communication commode. A son apogée (entre 400 et 700A.D.) Teotihuacan devait compter environ 150.000 habitants, le reste de la vallée 100.000. Les citadins étaient pour les 2/3 des paysans ; le tiers restant comprenait l’élite (administrateurs, prêtres,…) les marchands et les artisans. On ignore quel peuple habitait Teotihuacan, quelle langue il parlait, quelle était l’organisation politique. Sans doute, un royaume dominant un arrière-pays assez étendu et des cités vassales. L’influence culturelle de Teotihuacan est considérable et s’est fait sentir jusqu’au Guatemala. Au 8ème siècle se produit un effondrement. Le centre de la ville est saccagé. Le nombre d’habitants diminue très fortement. Urbanisme et architecture De façon générale, les réalisations de Teotihuacan révèlent un besoin d’ordre, d’organisation, de rigueur austère. Le plan de la ville à son apogée manifeste ce goût de l’organisation. C’est la ville la plus systématiquement planifiée de toute la Mésoamérique. Elle s’étend sur plus de 20 km2 et s’articule autour de 2 axes principaux qui se coupent à angle droit : - l’Avenue des Morts, longue de 3km, large de 40m, L’avenue des Morts part au Nord de la place de la Lune, dominée par la pyramide de la Lune et descend vers le sud. Elle est coupée d’escaliers et bordée de palais et de temples. A l’est, la pyramide du Soleil la domine. l’axe Est-Ouest traversant le cœur administratif et économique de la ville, le « Grand ensemble » (un marché à l’origine) et la « Citadelle ». Les rues se croisent à angle droit. - ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 48 La ville était fortifiée et devait compter 2.600 édifices ; habitations, temples et palais. La pyramide du Soleil est l’édifice principal et un des plus anciens. Il ne s’agit pas d’une tombe, mais du socle, de la base d’un temple disparu. Elle n’est pas le résultat de recouvrements successifs d’édifices, elle a été construite en une seule fois, ce qui implique compte-tenu de sa grandeur, une société déjà bien organisée. De plan carré, la pyramide mesure 220m de côté à la base, sa hauteur actuelle est de 65m ; elle est donc bien plus large que haute. Une caractéristique de l’art de Teotihuacan : le goût de l’horizontalité. L’édifice se compose de 4 corps ou étages superposés en retrait l’un par rapport à l’autre, le 3e corps est divisé en 2 de manière à rompre la monotonie et à freiner l’élan vertical. Les faces des corps sont fortement inclinées (à près de 40 °) ce qui accentue l’impression de hauteur. Outre l’allure imposante de la pyramide et le goût de l’horizontalité qui se traduit aussi par le fait qu’on n’a pas introduit de découpages verticaux des corps superposés, il faut noter la rigueur géométrique, la simplicité et l’austérité de l’ensemble. La méthode de construction est encore rudimentaire. Un noyau de terre battue est recouvert d’une chape de pierre non taillées noyées dans de la terre et du mortier. Cette chape devait éviter l’affaissement du noyau de terre. Une couche d’enduit, du mortier hydraulique recouvrait l’ensemble pour des raisons esthétiques et pour empêcher les infiltrations et donc l’érosion. La pyramide est orientée de telle façon à ce que le soleil se lève et se couche dans son axe à l’époque de l’année où il passe au zénith. Elle était donc peut-être réellement dédiée au Soleil. Au bas de l’escalier, on a découvert un puits menant vers un tunnel naturel, long de 103m, qui se prolonge sous la pyramide et se termine par une caverne à 4 chambres. Cette caverne se situe exactement en-dessous du sommet de la pyramide. Cette grotte devait être sacrée : peut-être la considérait-on comme une entrée vers l’intérieur de la terre. Dans chaque angle, on a découvert des ossements d’enfants, sans doute victimes sacrifiées lors des rites de fondation. La pyramide de la Lune, au bout de l’avenue des Morts est plus petite (hauteur 42m) et de plan rectangulaire. Les techniques de construction s’améliorent : l’édifice se soubassement de pierre ; le noyau se compose de grands angles se touchent ; les espaces entre les piliers sont remplis pierrailles. plus tardive et dresse sur un piliers dont les de terre et de ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 49 La Place de la Lune, au pied de la pyramide de la Lune et de l’Avenue des Morts est bordée d’édifices permettant de découvrir une caractéristique essentielle de l’architecture mésoaméricaine : plutôt que d’englober des espaces, on crée des formes monumentales à voir de l’extérieur. La forme architecturale typique de Teotihuacan est le système dit taludtablero qui sera imité dans toute la Mésoamérique. Les corps superposés des temples se composent désormais : - d’un petit talus surmonté, - d’un « tableau » plus haut que le talus ; le tableau consiste en un plan vertical en saillie par rapport au talus et encadré d’une moulure rectangulaire. Le système talud-tablero accentue l’aspect géométrique et l’horizontalité ; mais il introduit aussi le rythme et les jeux de lumière : quand le soleil est haut dans le ciel, les talus sous tableaux baignent dans l’ombre et sont presque invisibles ; les « tableaux » semblent flotter dans l’air. La pyramide de Quetzalcoatl présente le système du talud-tablero. Son bon état de conservation s’explique par le fait qu’elle a été recouverte postérieurement par un nouvel édifice qui l’a protégée. De plan carré, elle mesure 45m de côté ; sa hauteur est de 16m. Il y a 6 corps superposés ; l’escalier est situé à l’ouest. Revêtue de pierres taillées avec soin, elle est remarquable par l’ornementation sur les rampes d’escaliers, les talus et les tableaux. Haut et bas relief alternent : les talus sont décorés en bas-relief de serpents à plumes et de coquillages ; les tableaux présentent en alternance : - des têtes de serpents à plumes (Quetzalcoatl) - des masques de serpents de feu (Tlaloc), dieu de la terre et de la pluie symbolisant la nuit étoilée : il a le nez retroussé du serpent, le nœud audessus de la tête ; les « lunettes » au-dessus des yeux. Toutes les sculptures étaient recouvertes d’enduit de chaux et peintes. L’alternance de têtes de serpents à plumes et de serpents Tlaloc symbolise l’alternance du jour et de la nuit, de la saison sèche (Quetzalcoatl)et de la saison des pluies (Tlaloc). L’élément commun aux deux est l’eau, symbolisée par les coquillages : on croyait que les eaux de l’océan entourant le monde se prolongeaient sous terre et dans la voûte céleste. Le temple de Quetzalcoatl fait partie du complexe appelé la Citadelle, vaste carré de 400m de côté défini par des plates-formes entourant une vaste cour au fond de la quelle se dressait sur une terrasse la pyramide de Quetzalcoatl. Le tout était entouré de murailles. La Citadelle a pu être la résidence du (divin) souverain de Teotihuacan, représentant sur terre peut-être du dieu Serpent à plumes, dieu de la lumière, du jour, du sacrifice de soi. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 50 sculpture : La grande sculpture est essentiellement au service de l’architecture et se caractérise par : - la géométrisation poussée des formes, - la clarté de la composition, - la symétrie, - la frontalité - des attitudes statiques et hiératiques. C’est une sculpture religieuse : on représente des dieux, des êtres mythiques, des symboles. On a découvert de nombreuses figurines en jadéite, des masques funéraires en onyx parfois entièrement recouvert de mosaïques. peinture murale : Omniprésente à Teotihuacan, la fresque constitue, par sa maîtrise et sa variété, la forme d’art par excellence. Il en reste malheureusement peu de chose. C’est une peinture à deux dimensions ; les figures sont plates, il n’y a pas de modelé. Il n’y a pas de profondeur, pas de paysage, pas de décor. Les figures flottent sur un fond monochrome. On recherche la symétrie, l’équilibre, le rythme. Il s’agit de signifier plutôt que de figurer ; on écrit des incantations, des prières, des rites, on décrit des divinités et on les rend présentes par des images incorporant des glyphes et des symboles. céramique : - infinité de figurines représentant des divinités, des seigneurs, des guerriers, des hommes et des femmes ordinaires. - récipients aux formes très variées. Le vase de Teotihuacan le plus caractéristique est cylindrique, tripode, à couvercle conique pourvu d’un tenon. Le décor est soit en champ-levé, soit peint à fresque sur une fine couche de d’enduit de chaux. - grands encensoirs avec couvercle complexe représentant une divinité du feu (le motif du papillon est caractéristique puisque le papillon est un emblème du feu). déclin de Teotihuacan : Aux alentours de 700, le centre de Teotihuacan est détruit et brûlé. La cause est soit une révolution, soit ou en même temps des invasions de populations nomades venues du Nord. Un effondrement économique a sans doute contribué à ce déclin. B/ LES ZAPOTEQUES Implanté dans l’Oaxaca oriental, les Zapotèques ont pour principal centre Monte Alban, situé au centre de la vallée de l’Oaxaca. Véritable ville, Monte Alban occupe une position stratégique privilégiée, se dressant sur une série de 5 collines hautes de 300 à 400m, dominant la vallée. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 51 Capitale à la tête d’une confédération, vivant de tributs exigés des cités soumises et de taxes sur le commerce dans la vallée, son apogée se situe entre 200 et 700. L’architecture de Monte Alban est comparable pour l’essentiel à celle de Teotihuacan. Outre les pyramides et les palais, il y a un terrain de jeu de balle (pas à Teotihuacan). Temple des « danzantes » situé dans l’angle sud-ouest de la place principale. Corps à talus qui supportait un temple en matériau périssable. A sa base, le temple est revêtu de 4 rangées horizontales de grandes dalles sculptées en bas-relief figurant quelques 300 personnages reflétant des attitudes très variées. Ils semblent souvent blessés ou agonisants ; il faut probablement y voir des ennemis vaincus, représentant autant de cités soumises par Monte Alban. Nombreuses stèles ornées de reliefs et placées devant les édifices. C/ LES TOTONAQUES La culture de la Côte du Golfe est aussi dite totonaque d’après le nom des habitants de la région à l’époque aztèque. Elle s’est développée dans la partie du Veracruz située au nord du domaine olmèque, zone côtière tropicale couverte de forêts, riche en cacao, caoutchouc et en oiseaux au plumage multicolore. El Tajin, situé à l’extrême nord du Veracruz est un site important ; nombreux édifices groupés autour de places et plus de 11 jeux de balle dénombrés. Pyramide à niches est un cas unique ; de plan carré (35m de côté), elle comporte 6 corps superposés et présente une variante remarquable du système talud-tablero. Les tableros (tableaux) sont percés de niches carrées à 3 moulures en décrochement l’un par rapport à l’autre. Le décor produit un extraordinaire jeu d’ombre et de lumière. La culture de la Côte du Golfe a produit 3 types sculptures particulières appelées « joug », « hache » et « palme » en raison de leur forme et associée au rituel du jeu de balle : a) joug : pierre sculptée en forme de U ou de fer à cheval, de dimensions sont assez constantes (environ 40 cm). Elle est soit lisse soit décorée en vrai relief d’animaux tels que crapauds, jaguars, chouettes ou têtes de mort ; motifs en relation avec la nuit, la terre, la mort. b) hache : se présente sous forme de pierre plate, haute de 20 à 40 cm. La plupart représentent des têtes humaines. Mélange de réalisme et de stylisation. c) palme : haute de 40 cm, leur forme la plus fréquente est celle d’une hache allongée s’élargissant au sommet et arrondie. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 52 d) Elles sont pourvues d’un tenon et décorées de reliefs aux thèmes variés. Fonction des jougs, haches et palmes : Il s’agit de ceintures de protection des joueurs de balles : la hache était l’élément fixé sur le joug et qui sera remplacé par la palme. céramique : Production de figurines de qualité exceptionnelle ; les sujets sont religieux, le style est réaliste Les statuettes à visages souriant de Remojadas sont célèbres. Faites au moule, elles représentent des enfants assis ou debout, agitant des grelots vêtus de robes à décor géométrique. Le visage triangulaire et aplati vers le haut s’éclaire d’un large sourire ou d’un rire. Hypothèse d’enfants intoxiqués par des hallucinogènes avant d’être sacrifiés. Déesse chthonienne Xochiquetzal (110cm – Musées Royaux d’Art et d’Histoire-Cinquantenaire). Il reste des traces d’enduit de chaux et de peinture. Manque une partie de la coiffe en forme d’animal fantastique. La déesse est assise les jambes croisées ; sa jupe est retenue par une ceinture en forme de serpent ayant une tête à chaque extrémité. D/ LES MAYAS L’aire maya couvre - au nord, la péninsule du Yucatan avec les états mexicains du Yucatan, du Campeche et du Quintana Roo, - au centre, l’est du Tabasco et du Chiapas ainsi que la majeure partie du Guatemala, le Belize et l’ouest du Honduras - au sud, les hautes terres du Guatemala et l’ouest du Salvador. Le cœur de la civilisation maya classique se situe dans le Peten, une région de forêts tropicales et de marécages. C’est dans ce milieu aux communications souvent difficiles que se développe la plus grande civilisation précolombienne. A l’apogée, entre 600 et 900, les sites sont très nombreux, il y a des villes très peuplées. Les Mayas tiraient l’essentiel de leurs moyens de subsistance de l’arboriculture et en particulier de l’arbre à pain dont la noix est très nourrissante et la culture facile. Les marais, bajos, étaient cultivés grâce à des canaux de drainage et à des jardins dits flottants ou chinampas. Ceux-ci étaient aménagés comme suit : on délimitait un espace de marais au moyen de treillis et de branchages et on le remplissait de terre. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 53 Organisation sociale et politique : L’unité politique est la cité-état puis les grands royaumes régionaux comme Tikal, Copan, Palenque,… Les classes sociales se répartissent comme suit : au plus bas de l’échelle, les esclaves, peu nombreux, le plus souvent des prisonniers de guerre. Puis les paysans, l’essentiel de la population. Ensuite les artisans, enfin les rois et les seigneurs, les lignages nobles qui fournissaient l’essentiel des dignitaires, des prêtres et des guerriers. Les apports de la civilisation maya sont : - - - - - une écriture complexe, à la fois phonétique et figurative dont on lit les chiffres et les dates et dont on peut interpréter sans lire une petite partie du reste ; des connaissances très précises en matière de comput du temps, d’astronomie (connaissances des cycles de la lune, de Vénus et d’autres planètes,...) les Mayas avaient inventé le zéro en architecture ; les Mayas ont développé la voûte en encorbellement, faite d’assises successives de corbeaux, fermées au sommet par une rangée de dalles. Les saillants sont ensuite coupés. Ces constructions très lourdes nécessitaient des murs épais et ne pouvaient couvrir de grandes surfaces. Pour donner de la hauteur au temple, on y ajoutait une énorme crête trapézoïdale et pyramidale. Au Peten, elle repose sur le mur arrière qui est très épais et un peu plus large que la façade. On la décore de sculptures en stuc. La crête accentue l’élan vertical de l’édifice, enrichit le temple et transmet un message sacré au spectateur non admis à l’intérieur su temple. en sculpture ; le relief domine. Son support est l’ensemble autelstèle. Les stèles sont érigées avec régularité tous les 5, 20 ans. Elles ont pour fonction de glorifier par le texte et l’image les rois et la royauté et de fournir des renseignements historiques à leur sujet, surtout en matière de généalogies et d’exploits militaires. architecture : A l’époque classique, de nouveaux centres apparaissent ; on multiplie les temples et les édifices bas, les « palais » ou « centres administratifs » avec des quartiers d’habitations disposés autour de patios. 1) Dans le Peten, Tikal apparaît comme une véritable métropole défendue par un fossé et des remparts de terre. Ces ensembles constituent un jeu de volumes fermés et d’espaces ouverts. L’architecture de Tikal se caractérise par le goût du démesuré, les pyramides sont très hautes, très élancées et des découpages verticaux accentuent leur élan. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 54 Les temples occupent presque la totalité de la superficie du sommet de la pyramide ; les murs sont très épais, les chambres larges mais peu profondes, à voûte en encorbellement, la crête énorme repose sur le mur du fond. Temple I ou temple du Jaguar : plus haut que large, il mesure 35m à la base et culmine à 45m. La pyramide compte 9 corps superposés ; les corps sont à talus avec de profondes rainures à 1/3 de la hauteur. L’escalier monte d’un seul jet jusqu’au sommet et accentue la verticalité de l’ensemble. Le Temple I est le monument funéraire d’un souverain. Elle a été construite en fonction de la chambre funéraire, creusée dans le sol, sous la pyramide. Des édifices longs et bas, sans crête, sont disposés autour de cours intérieures. 2) Dans la vallée de l’Usumacinta, les pyramides sont plus larges et plus basses, les temples, étalés en largeur présentent plusieurs ouvertures, les chambres sont plus grandes, les crêtes, plus basses et plus légères reposent de préférence sur le milieu du toit et non plus sur le mur arrière. Piedra Negras regroupe des temples, des palais et des acropoles autour de places. Le site paraît tel un enchevêtrement de palais, d’escaliers monumentaux et de pyramides. Situé sur les premiers contreforts de la Sierra du Chiapas, Palenque est l’un des principaux sites mayas. Peu planifié, il est traversé par un cours d’eau canalisé passant dans un aqueduc souterrain à voûte. L’édifice le plus important est le Temple des Inscriptions érigé en 683. De plan rectangulaire, le long côté mesure environ 62m. La hauteur avec la crête devait être de 30m. L’horizontalité est accentuée par le fait que le temple est presque aussi large que le socle pyramidal est haut (19m). Celui-ci comporte 9 corps superposés à parement en talus décoré de bandeaux. L’escalier, divisé en 3 volées, est plus large et pourvu de balustrades jusqu’au départ du 5ème corps. Le temple, érigé sur un petit soubassement, est percé de 5 ouvertures. La façade est ornée de panneaux à reliefs de stuc, caractéristiques de Palenque. Les murs sont peu épais et l’espace intérieur est vaste. La crête, légère, basse, ajourée repose sur le milieu du toit. Plus que tout autre édifice maya, le Temple des Inscriptions est un monument funéraire. Il a été érigé lors de la mort du roi Pacal en 683. Le roi repose dans une crypte voûtée à l’intérieur de la pyramide. Un escalier monumental mène de la cella à la crypte. Après l’ensevelissement de Pacal, l’escalier a été entièrement comblé et son accès scellé par une dalle recouverte de reliefs. L’ensemble de la dalle funéraire est entouré d’un cadre décoré de signes stellaires et planétaires. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 55 Sujet : le roi Pacal, mort, à demi couché sur un monstre solaire décharné, est englouti dans la gueule béante de la Terre. De son corps naît une canne de maïs cruciforme autour de laquelle s’enroule un « serpent de feu ». Un oiseau-serpent est perché sur la canne de maïs. Le roi est assimilé au soleil couchant qu’engloutit la terre. De son corps naît la vie, symbolisée par le maïs et la lumière dans la nuit, symbolisée par le serpent de feu. Chez les Mayas, une année était assimilée à un jour, la nuit étant la saison des pluies, celle de la croissance du maïs et la journée étant l a saison sèche. Une ère était appelée Soleil et assimilée également à un jour ; à la fin de l’ère, la nuit tombait. Ici on est à la fin de la saison sèche. Le soleil se couche, meurt et féconde la terre en y pénétrant ; de cette semence naît le maïs et la lumière des étoiles. Mais 683 était aussi la fin d’une ère, d’un Soleil et le début d’une ère nouvelle. Pacal était le Soleil couchant de cette ère ; en l’ensevelissant dans le temple des Inscriptions, on assurait la naissance du maïs et de la première lumière d’un âge nouveau. La composition du relief très structurée, est divisée en 3 parties horizontales et suivant 3 axes verticaux. La crypte mesure 9 x 3 m ; sa voûte se situe à 6,5m. Le Palais se dresse sur une plate-forme trapézoïdale de 100 x 80 m et de 10 m de haut. Les édifices sont disposés autour de 4 patios. La Tour du Palais est un édifice exceptionnel. De plan carré, elle a un soubassement plein surmonté de 3 étages éclairés chacun par 4 grandes fenêtres. Les étages se développent autour d’un massif central au travers duquel passe l’escalier. La vallée du Motagua Site principal Copan au Honduras. Les espaces ouverts sont très grands ; les palais sont rares. On emploie moins de mortier et de stuc. Les édifices sont revêtus de pierres taillées. Le décor n’est pas en stuc mais taillé dans la pierre, souvent en ronde-bosse. Il est limité à la partie haute des édifices parfois aux angles et au pourtour des ouvertures. Il n’y a pas de crête. Certains édifices ont les angles décorés du masque du dieu à long nez, dieu Chac. L’escalier hiéroglyphique est une particularité de Copan ; flanqué de balustrades ornées de serpents, il est sculpté de milliers de glyphes. Le terrain de jeu de balle bordé d’édifices bas et orné de stèles devait être particulièrement important. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 56 Le style Chenes Le Yucatan, au nord du Guatemala, plus sec et plus aride, semble avoir été moins peuplé que les autres régions mayas. Le style y est très différent. Les centres cérémoniels ont peu de stèles ; les édifices bas y prédominent et délimitent de grands espaces ouverts. Les formes sont plus simples et plus rigoureuses. Les constructions sont revêtues de pierres taillées. Le décor architectonique fait d’un assemblage de pierres sculptées est plus stylisé, plus anguleux et géométrique. Le style Chenes occupe le Campeche central avec des sites tels que Hochob, Santa Rosa Xtampak, Dzibilnocac. Il se caractérise par des ouvertures entourées de sculptures de manière à suggérer la gueule ouverte d’un dragon, en forme de T inversé. Les édifices sont pourvus de crêtes. Le style Puuc Le nom est celui d’une série de collines basses de la région. Les sites principaux sont Kabah, Sayil, Labna, Uxmal, Chichen Itza. Les édifices sont revêtus de pierre. Accentuation de l’horizontalité, Lignes nettes et sévères. Les murs droits sont divisés en 2 parties, une partie basse puis une partie haute correspondant au toit, par des moulures (au profil de bobine). Le décor stylisé par géométrisation consiste en masques de Chac répétés inlassablement. On recherche l’équilibre et la symétrie, le rythme, les jeux de lumière. Souvent ce décor se limite aux parties hautes des édifices, formant de vastes frises. Les crêtes se raréfient. Chichen Itza Influencé par la culture de Teotihuacan, Chichen Itza possède une culture originale souvent plus mexicaine que maya. L’architecture combine des éléments mayas : emploi de la voûte en encorbellement, décor Puuc,… et mexicain : escalier à balustrades, taludtablero, toit surmonté de créneaux. - Castillo : pyramide de plan carré - jeu de balle : le plus grand de Mésoamérique, mesure 150m de long. En forme de I, il est bordé de 2 banquettes en talus. Présence d’anneaux de pierre par lesquels devait passer la balle - temple des guerriers à socle pyramidal large et bas, de plan carré ; il comporte des corps superposés à talud-tablero - le caracol ; tour ronde à 2 étages, sans doute un observatoire - tzompantli ; plate-forme en forme de T aux parements en taludtablero destinés à supporter des rangées de poteaux soutenant des baguettes horizontales sur lesquelles étaient enfilées, par les tempes, des têtes de guerriers sacrifiés ; des rangées de crânes sont d’ailleurs figurées en reliefs sur les parements. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 57 - En sculpture ; trônes-jaguars, atlantes, porte-étendards et chacmool caractérisés par la raideur, la géométrisation des masses, le hiératisme. chac-mool : représentation de personnages à demi couchés sur le dos, tenant un récipient sur le ventre et dont la tête est tournée à 90°. Il s’agit d’autels pour les sacrifices humains. Le plus souvent, ils étaient placés sur les terrasses devant les sanctuaires, là où avaient lieu les mises à mort. La peinture était omniprésente chez les Mayas. Les édifices et les sculptures en étaient recouverts de haut en bas. De tout cela, il ne subsiste que peu de choses, en raison de l’humidité. L’ensemble de peintures maya le plus important a été découvert à Bonampak au sud de Yaxchilan. Ce sont elles qui permettent de mieux se rendre compte de la peinture maya. Le style est réaliste et le thème principal est l’homme individualisé. Les personnages sont de profil, soit de face avec le visage et les pieds de profil. Les plus importants adoptent des attitudes rigides et solennelles ; ils occupent plus de place. La peinture est linéaire, La palette est riche mais il n’y a pas de jeux de lumière. L’attention allant à la personne humaine, il n’y a pas de décor ou de paysage. La composition présente une seule scène ou plusieurs registres. Les peintures de Bonampak datent du 8ème siècle et décorent 3 chambres. Les peintures représentent les préparatifs d’une campagne, une bataille et le jugement des prisonniers et la célébration de la victoire. Déclin de la civilisation maya Au 9ème siècle, les cités déclinent, se vident de leur population et retournent progressivement à la jungle. Quelles sont les causes de cet effondrement ? On a parlé d’invasions, de révoltes, de guerres civiles en réaction des exigences de plus en plus grande d’une élite coupée de la masse. Fléaux naturels, sécheresses, inondations tremblements de terre, changements climatiques, épidémies ont contribués au déclin de la culture maya. 4/ la période Postclassique a) Les Toltèques de Tula (900 – 1.200) Au début du 9ème siècle, des populations venues de l’Est, s’établissent à Tula (80 km au NO de Mexico). On les appelle les Toltèques ; leur langue est le nahuatl. Leur histoire essentiellement mythique se confond avec celle du roiprêtre Quetzacoatl. Selon la légende, Quetzalcoatl aurait vengé son père ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 58 assassiné, fondé Tula, conquis un empire d’une grande prospérité puis, à la fin de son règne, il y aurait eu des cataclysmes et il s’en serait allé vers l’Est en promettant son retour. Lorsque Cortes débarqua au 16ème siècle, on le prit pour Quetzalcoatl revenu. Tula a été détruit et brûlé après 1.100. Partiellement abandonnée par ses habitants, la ville perd toute influence politique. L’époque se caractérise par de nouvelles vagues d’invasions de Chichimèques qui se répandent dans toute la Mésoamérique. Ils se prétendent originaires d’une île mythique Aztlan, d’où leur nom d’Aztèques. Parmi les derniers envahisseurs, il faut citer les Mexicas qui fondent MexicoTenochtitlan et créeront l’empire aztèque. La culture aztèque dérive directement de la civilisation toltèque. b) les Aztèques et le Post-Classique récent (1325 – 1521) Selon leurs récits, les Aztèques (ou Mexicas) appartiennent à un groupe de chasseurs nomades descendu du nord, les Chichimèques. Vers 1325, ils s’établissent sur le plateau central aux abords de la lagune de Texcoco dans îlots marécageux et créent la ville de Tenochtitlan (Mexico). Suite à l’oracle de Huitzilopochtli, leur dieu d’origine, les Mexicas devaient s’établir « où ils verraient un aigle avec un serpent dans le bec, perché sur un cactus de Barbarie qui lui-même pousserait sur une pierre ». Les Aztèques règnent sur tout le centre du Mexique, du Golfe au Pacifique. Par une adroite expansion militaire et économique, ils forment le plus grand empire précolombien d’Amérique du Nord. Leur langue, le nahuatl, est encore parlée aujourd’hui par des millions de Mexicains. Le dieu principal des Aztèques, Huitzilopotchli, symbolise le soleil. On le considère comme un jeune guerrier qui naissait chaque matin de la déesse de la terre Coatlicue. En tant que guerrier, il devait triompher quotidiennement de ses frères, les étoiles et de sa sœur, la lune. Il fut imposé à tous les peuples vaincus. Selon la légende, Huitzilopotchli était le fils de la déesse de la terre, Coatlicue ; qui avait déjà 400 fils, les étoiles et une fille, la déesse de la lune. Lorsqu’elle fut une nouvelle fois enceinte, ses enfants en colère décidèrent de la tuer. Alors qu’ils s’approchaient d’elle, Huitzilopotchli surgit tout armé de son corps. Il tua ses frères et dépeça sa sœur. Lors des fouilles du Templo Mayor dans le centre de Mexico, on a découvert au pied de la pyramide, un bas-relief représentant l’effigie de la déesse de la lune rappelant cet épisode de la cosmologie aztèque. Pour réussir le combat quotidien, Huitzilopotchli devait être suffisamment nourri par les hommes, ce qui n’était possible qu’avec le sang humain. Selon le point de vue des Mexicas, seuls le cœur humain et le sang permettaient de fournir au soleil assez de force pour entreprendre son ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 59 parcours dans le ciel et dans l’infra monde et ainsi assurer la continuité du monde. Lorsque le monde actuel, le « 5e soleil » fut créé et que les hommes le peuplèrent, il n’était illuminé que par le feu. Les dieux réunis à Teotihuacan décidèrent de créer le soleil et la lune et deux d’entre eux sautèrent dans le feu. Mais le soleil ne se déplaçait pas, alors d’autres dieux se sacrifièrent pour qu’il se mette en mouvement. Depuis le soleil doit être régulièrement alimenté avec du sang et des cœurs afin de pouvoir gravir le ciel, réchauffer les hommes et faire pousser les plantes. Sans ces sacrifices, le monde serait proche de l’infra monde. L’au-delà selon les Aztèques : Totalement à l’opposé des croyances chrétiennes, les représentations aztèques de l’au-delà ne dépendaient pas de la vie menée sur terre mais de la manière de mourir et de la profession du défunt. Les guerriers morts au combat ou sur la pierre de sacrifice allaient au paradis de l’Est, « la maison du soleil ». De même que le paradis de l’Est, le paradis de l’Ouest la « Maison du maïs » promettait aussi une agréable survie après la mort. Dans ce paradis accédaient les femmes mortes en couches, auxquelles était rendu un culte semblable à celui des guerriers. Les noyés, les foudroyés mais aussi ceux qui étaient morts de la lèpre ou d’une autre maladie associée au dieu de la pluie accédaient au paradis du Sud. Finalement, il faut citer le Mictlan, l’empire des mots situé au Nord où accédaient les autres défunts. Aucun chemin direct ne menait à Mictlan. Il fallait réussir, en 9 lieux différents, de dangereuses épreuves de courage avant de parvenir enfin au but après 4 années. Par une politique systématique de relations diplomatiques et d’alliances matrimoniales puis de conquêtes et d’annexions, les Aztèques ont unifié la Vallée de Mexico en soumettant les autres états et ont ainsi créé un véritable empire. Par des travaux de digues, de création artificielle de terres cultivables (jardins flottants ou « chinampas »), puis par une extension progressive sur la terre ferme, ils créent une cité prestigieuse. En 1519, « l’empire aztèque » s’étendait de l’Océan Pacifique au Golfe du Mexique et atteignait les frontières guatémaltèques. Peuplé par 5 ou 6 millions d’habitants, il n’était pas une région unitaire unifiée continue. Il s’agissait d’une série de grands et de petits états dissidents, ce qui constituait des foyers de troubles constants. Le territoire aztèque se divisait en 38 provinces, soumises à un impôt et à la tête desquelles se trouvait un gouverneur. Résistaient encore à leur emprise les Tarasques dans l’Ouest, les Mixtèques du sud et les Huastèques du nord de la Côte du golfe qui payaient encore tribut mais gardait une relative indépendance dont Cortès profitera. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 60 Monarchie presque absolue, où le pouvoir de l’empereur était tempéré par l’autorité du clergé. Le marché principal était le lieu d’arrivage des produits de l’empire. En 1519, Tenochtitlan recouvrait une superficie de 12 à15 km2 et comptait quelques 250.000 habitants. Cette métropole rassemblait des hommes aux origines diverses appelés « aztèques » qui avaient opéré une synthèse des cultures les plus diverses. Tenochtlitlan était une ville fascinante, construite en quadrillage et comptant de nombreux canaux. Il y avait des ponts et des places, des temples et des palais, des canalisations et des jardins. Le centre de la ville comprenant le quartier du temple principal, un carré d’environ 400m de côté, entouré d’un mur au pied duquel étaient représentés en ronde-bosse des serpents ou des têtes de serpent. A l’intérieur de ce mur entrecoupé par 4 entrées donnant sur des rues principales, il devait y avoir 78 temples dont le plus important, le double temple consacré à Huitzilopotchli et à Tlaloc (le dieu de la pluie), le Templo Mayor, fouillé entre 1978 et 1982. D’autres dieux y possédaient également leur temple, comme le dieu de la guerre Tezcatlipoca, la déesse de la terre, le dieu du vent, le dieu du soleil, … Toutes les pyramides comme celle du Templo Mayor, ont été au cours de l’histoire de Tenochtlitlan, continuellement reconstruites. Le « quartier sacré » ne comprenait pas seulement des temples mais aussi des dépendances, des habitations, des écoles de prêtres, des magasins, des places de jeu de balle, des bassins d’eau,… Le Grand Temple : La pensée mésoaméricaine est tout entière dominée par l’idée de la dualité profonde qui caractérise l’univers. Pour les Aztèques, au commencement, il n’y avait pas un créateur mais un couple, réunissant en lui toutes les oppositions futures, le Dieu Deux eut 4 enfants desquels sont issus tous les autres dieux et finalement aussi le monde et les hommes. Cette dualité se retrouve au niveau des dieux Huitzilopotchli et Tlaloc, occupant le sommet du Grand Temple. Ils symbolisent les oppositions et les complémentarités de l’Univers, celles du ciel et de la terre, de la saison sèche et de la saison des pluies, des pouvoirs guerrier et sacerdotal. Le sanctuaire du dieu solaire se trouvait du côté sud, côté de l’astre au zénith, celui de Tlaloc au nord, direction de l’infra monde et de la nuit. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 61 L’opposition ciel-terre ne se traduit pas seulement horizontalement par un contraste sud-nord, elle se manifeste aussi verticalement. Le bas est le domaine de la terre, de la nuit et de la lune. La majorité des offrandes déposées au sein de la terre est destinée aux divinités nocturnes. Le disque lunaire retrouvé au pied du Grand Temple et orné d’une image de la déesse Coyaolxauhqui évoque la lune et ses 400 frères, les étoiles qui appartiennent à la nuit et donc à la terre et au bas. C’est du bas qu’ils partirent à l’assaut de la montagne pour empêcher le soleil de se lever, c’est dans l’abîme qu’ils furent refoulés. Le grand temple évoque le Coatepec, la Montagne des Serpents, lieu de victoire de Huitzilopotchli. On sait que les prisonniers de guerre qui escaladaient la pyramide pour y être sacrifiés représentaient les 400 demifrères de Huitzillopochtli. Les sacrifices de guerriers avaient toujours 2 destinataires : soleil et terre : le sacrifice en l’honneur du soleil était l’excision du cœur, celui de la terre était la décapitation. On tuait donc la victime 2 fois : d’abord en lui arrachant le cœur ensuite en lui tranchant la tête. Le cœur était tendu vers le haut, vers l’astre du jour ; le corps était jeté au bas des marches, en offrande à la terre. écriture et calendrier : Comparée à l’écriture maya, celle des Aztèques est un système pictoidéographique relativement simple, à base d’objets reconnaissables qui forment des noms de personnes et de lieux ainsi que des dates. Les écrits pictographiques aztèques sont éclairés par les commentaires espagnols et par de nombreux récits non illustrés, transcrits en latins, après la Conquête, d’après la tradition orale. Le calendrier aztèque comportait de nombreuses fêtes dont une des plus importantes était celle du début du cycle de 52 ans. Le passage d’un cycle au suivant était générateur d’angoisse car on craignait la fin du monde. A la cérémonie de l’allumage du Feu Nouveau était lié un rituel qui consistait à enterrer un paquet composé de 52 bâtons représentant chacun une année. les livres pliants mexicains (codex) : Les codex mexicains sont de longues aubes de papier amate (fibres de ficus ou d’agave) ou en cuir de cerf, pliées. Avant d’être peints, ils étaient recouverts d’une couche de chaux finement moulue ou d’autres minéraux blancs. Cette couche de stuc servait de base à la peinture elle-même. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 62 Il a dû y avoir un grand nombre de codex dans le Mexique préhispanique mais la plupart ont été détruit. De nos jours, il n’existe plus que 14 codex purement préhispaniques, répartis dans le monde, pour la plupart en Europe. 5 / rencontre de deux mondes : « Moi et mes compagnons de voyage souffrons d’une maladie de cœur qui ne peut être guérie que par l’or … » ce message d’Hernan Cortès au souverain aztèque Moctezuma décrit la principale motivation des Européens lors de la découverte du Nouveau Monde. Hernan Cortes a quitté Cuba, où les Espagnols s’étaient établis après la découverte de Christophe Colomb. A la tête d’une expédition, il débarque en 1519 sur la côte mexicaine inconnue et fonde la ville de Santa Cruz. C’est le début d’une longue conquête « pour Dieu, pour le Roi et pour luimême » (Cortes). Avec 700 hommes, une trentaine de chevaux et quatorze canons, il lui faudra 2 ans pour démanteler l’Empire aztèque, saisir sa capitale Tenochtitlan qu’il rebaptise Mexico et exécuter le dernier empereur aztèque, Moctezuma. En 1522, Hernan Cortes est nommé Gouverneur et Capitaine Général de la Nouvelle-Espagne, aujourd’hui le Mexique. C’est le début de trois siècles de domination espagnole et de destruction systématique des cultures indigènes. En moins de 25 ans, la nouvelle colonie inclut non seulement une bonne partie des Etats-Unis actuels, depuis la Californie jusqu’au Texas, ainsi que des territoires au sud de Panama. Les Conquistadors reçoivent de grandes parcelles de terrain appelées : encomiendas où ils établissent des exploitations et forcent les Indiens à cultiver le sol. Un système de classes sociales s'établit dans les colonies : les Espagnols, généralement appelés "peninsulares" à cause de leur origine sont les maîtres: ils possèdent le pouvoir politique et religieux. Le deuxième groupe est formé par les "criollos", les créoles: enfants nés dans la Nouvelle Espagne de parents espagnols. Ils peuvent posséder des terres, mais ne peuvent pas accéder aux plus hautes fonctions. Les "mestizos" (les métis) qui forment le troisième groupe sont de descendance mêlée espagnole et indienne. Ils travaillent dans les mines ou les fermes ou deviennent artisans. Les mestizos sont fiers de leur double ascendance. Enfin les Indiens constituent la classe la plus basse et travaillent dans les champs et les mines. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 63 Au cours du dernier quart du 18e siècle, les idées libérales qui se sont développées en Europe et aux Etats-unis d'Amérique commencent à s'infiltrer au Mexique. Les criollos se montrent de plus en plus mécontents des restrictions qui leur sont imposées par les maîtres espagnols. 1807, Napoléon envahit l'Espagne et nomme son frère Joseph Bonaparte roi d'Espagne, désignation que les colonies espagnoles refusent d'accepter. 1810, le père Miguel Hidalgo y Costilla, simple curé de paroisse participe à un mouvement clandestin d'indépendance et proclame l'indépendance du Mexique. Capturé par l'armée régulière, il est jugé et exécuté en 1811. L'histoire du Mexique devient alors une succession de révolutions et de présidents. la princesse Charlotte de Belgique, impératrice du Mexique : Le lien le plus intime que la Belgique ait eu avec la Mexique a été la fille du premier Roi des belges, Léopold I et de Louise-Marie d'Orléans. La princesse Charlotte est née en 1840. Très jeune, à la mort de la Reine, elle affirme un caractère mûr, un sens aigu des obligations royales. A 17 ans, elle tombe sous le charme de l'Archiduc Ferdinand-Maximilien de Habsbourg, frère de l'Empereur François-Joseph d'Autriche. En 1861, à la demande de Napoléon III, Maximilien accepte de devenir "Empereur du Mexique". Les voilà à la tête d'un pays rongé par l'anarchie, le banditisme. Revenue en Europe, Charlotte tente d'obtenir l'aide de la France mais en vain... Maximilien est fait prisonnier et fusillé en 1867. Charlotte terminera sa vie au château de Bouchout, isolée dans sa folie et meurt en 1927. une démocratie à parti unique Aujourd'hui le Mexique est une république fédérale composée de 31 états et du district fédéral de Mexico. La constitution de 1917 est toujours en vigueur pour les principes essentiels. Mais si chaque état a ses propres institutions législatives et exécutives, le pouvoir est resté centralisé. Le président de la république est élu pour 6 ans au suffrage universel direct et non rééligible. Le Président élu du Mexique depuis 2012 est Enrique Peno Nieto. la peinture murale Un des aspects les plus originaux de l'art mexicain est la peinture murale et la place qu'elle tient dans le décor urbain. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 64 Avec le 20e siècle et la révolution, on assiste à une prise de conscience nationale et une volonté délibérée de la part des gouvernants de réhabiliter le peuple mexicain et son histoire. En 1922, le Ministre José Vasconcelos, soucieux de sensibiliser le peuple aux valeurs de l'indépendance mexicaine et de fortifier la conscience nationale, confie à Diego Rivera la décoration des murs de l'amphithéâtre Bolivar de l'école préparatoire. Cette commande marque le début de l'essor de la peinture murale au 20e siècle Diego Rivera (1896-1956) revient d'un long séjour en Europe; c'est un jeune homme passionné de justice sociale. Il met son art au service de la révolution mexicaine en réhabilitant les valeurs anciennes, en exaltant les luttes du peuple composé essentiellement de paysans indiens et métis et en fustigeant les exploiteurs du peuple depuis les conquérants espagnols jusqu'à l'exploitation capitaliste européenne et nord américaine. Il s'agit d'un art engagé ce qui ne signifie pas qu'il s'agit d'une peinture de propagande. Ce qui fait précisément la qualité des oeuvres de Rivera, Siqueiros, Orozco c'est de mettre leur art au service des idées mais sans jamais renoncer à la qualité esthétique. Les peintures murales qui décorent le Palais Gouvernemental de Mexico et qui relatent l'épopée du peuple mexicain dans sa lutte pour l'indépendance constituent une excellente synthèse de l'art et de l'idéologie de Rivera. Parmi ses autres œuvres ; la décoration du Secrétariat de l'Education Publique (1923), la décoration de l'Ecole Nationale d'Agriculture (1923) qui correspond à la mise en place de la réforme agraire, le relief du stade olympique de l'Université (1947) et les mosaïques du théâtre Insurgentes (19521953). José Clemente Orozco (1883-1949) peintre et caricaturiste, homme d'extrême gauche, collabore à la décoration de l'école préparatoire où il rejoint Rivera en 1923. Il se réclame des mêmes idéaux politiques que Rivera. Siqueiros (1896-1974) tout aussi épris de justice sociale que ses 2 aînés rédige le manifeste du syndicat des peintres et des sculpteurs (1923). A côté des oeuvres consacrées et protégées, il existe encore aujourd'hui toute une tradition d'expression populaire spontanée qui utilise les murs des écoles et des édifices publics pour crier sa révolte ou réclamer justice, mais ces oeuvres souvent naïves n'ont qu'une durée de vie très éphémère. Dans le courant des années '30 apparaît une autre personnalité artistique, Frida Kahlo (1907-1954). Suite à un accident survenu pendant sa jeunesse, elle demeure partiellement paralysée. A partir de cette expérience traumatisante, elle cultivera pendant toute sa vie une thématique intimiste tournant autour de ses angoisses profondes et de sa relation avec Diego ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 65 Rivera, de 20 ans son aîné, qu'elle épouse en 1929. Elle appartient au même milieu social et intellectuel que les muralistes mais développe sa propre iconographie introvertie, indépendante. Sans que l'aspect idéologique ne soit complètement absent, son oeuvre est dominée par ses propres obsessions existentielles et son combat intérieur. C'est justement dans cette combinaison particulière d'éléments populaires et de glorification de soi que l'on retrouve l'authenticité de son oeuvre. * Les deux Fridas, double autoportrait qui révèle le thème principal chez Kahlo, son moi éprouvé et agité. une autre façon de voir la mort Comme chez nous, le 1er novembre est le jour des morts (dia de los Muertos) et le 2 le jour des âmes (todos santos) jour où les âmes qui n'ont pas trouvé le repos sont honorées. Mais la célébration des morts au Mexique, loin d'être une chose triste, au contraire, c’est une source de joie et de réjouissance. Les Mexicains sont convaincus que la vie dans l'au-delà est heureuse; c'est pourquoi, ils fêtent la mort dans l'allégresse. Les Indiens pensaient déjà que les morts revenaient une fois par an en visite et qu'ils devaient être nourris: la tradition veut que l'on dépose de la nourriture sur les tombes des membres de la famille. La journée commence par des défilés. On pique-nique dans les cimetières. Du "pan de los muertos" des pains en forme de squelettes et de crânes sont cuits pour l'occasion; les friandises pour enfants se présentent également sous ces formes. L'écrivain mexicain Octavio Paz, prix Nobel en 1990, a écrit "le Mexicain moderne n'attache aucune signification à la mort. Elle ne marque que la transition, l'accès à une autre vie qui est bien plus authentique que celle-ci. Mais l'inimportance de la mort ne l'a pas pour autant éliminée de la vie de tous les jours (...) Le Mexicain en contact avec elle, se moque d'elle, la caresse, s'endort avec elle, la soigne et l'entretient (...)". ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 66 Références bibliographiques : ALCINA, J. 1978 L'art précolombien, éd. Mazenod, BAUDEZ, C-F. 2002 Histoire de la religion des Mayas, éd Albin-Michel, BAUDEZ, C-F. BECQUELIN, P. 1984 Les Mayas, coll Univers des formes, éd. Gallimard, DUVERGER, C. 1999 La Méso-Amérique, éd. Flammarion DUVERGER, C. 2003 L'origine des Aztèques, éd Points seuil, LONGHENA, M. Mexique Ancien, éd. Gründ STIERLIN, H. Le monde de l'Amérique précolombienne, éd. Princesse, 1979 STIERLIN, H. L'Art maya, éd. Le Seuil, 1981 STIERLIN, H. L'Art aztèque, éd. Le Seuil, 1982 STIERLIN,H. 1492 :A la rencontre des Amériques, éd. Arthaud 1991 STIERLIN, H. Maya, palais et pyramides de la forêt vierge, éd. Taschen 1997 catalogues: - Les Azèques, Trésors du Mexique Ancien, Bruxelles, Musées Royaux d'Art et d'Histoire,1987 - Métropoles mayas, 1993 - L'aigle et le soleil, 1993 - Trésors du Nouveau Monde, Bruxelles, Musées Royaux d'Art et d'Histoire, 1992 revues : - Terres mayas, in Grands Reportages, septembre 2003, n° 260 - Incas, Mayas, Aztèques, peuples du soleil, in Historia Thématique, juillet/août 2003, n°84 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 67 Chap. 5 Regards sur quelques civilisations de l’Amérique Sud ____________________________________________________________ 1 - les Andes - les cultures de Colombie : La Colombie est l’une des régions qui possèdent le plus grand nombre d’objets en or ou en tumbaga (alliage or / cuivre). Ils sont remarquables par la perfection, la finesse et la variété de leurs formes. L’or avait une signification rituelle : par sa couleur et son éclat, il symbolisait l’astre solaire. Symbole de fertilité et d’énergie vitale, seuls l’élite et les chamans portaient ce métal. Les Espagnols ont découvert dans ce pays une telle abondance d’or que la légende de l’ « El Dorado », « l’homme recouvert d’or » s’est répandue et est à l’origine de nombreuses conquêtes. Les populations de Colombie retiraient de l’or mêlé à de l’argent des sables d’alluvions. Le tumbaga est un alliage artificiel composé de 30% d’or et de 70 % de cuivre. Il s’obtient à une température de fusion moins élevée et est en outre plus dur et donc moins fragile que l’or pur. L’inconvénient de cet alliage c’est qu’il verdit en s’oxydant. Pour éviter ce phénomène, les orfèvres avaient mis au point une technique consistant à « brûler » le cuivre des parties apparentes donner aux pièces l’éclat de l’or. Ce procédé de « mise en couleur » ou dorure qui consistait à attaquer le cuivre avec une solution d’acide oxalique provenant du suc de certaines plantes ce qui faisait ressortir la couche d’or pur. Les techniques de travail du métal étaient très perfectionnées : martelage, estampage, fonte à cire perdue, filigrane, soudure. La décoration des objets martelés était parfois complétée par la gravure et la ciselure. La céramique : Les poteries, brutes ou peintes, abondent dans toute la Colombie et se distinguent par leur élégance de forme et par l’esprit d’invention qui les anime. Cultures du Pérou : Les Andes centrales Les descendants des groupes de chasseurs-collecteurs qui étaient parvenus dans le continent américain par le détroit de Behring atteignent le territoire de l’actuel Pérou vers 15.000 avant notre ère. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 68 Ils vivent organisés en petites bandes, façonnent des outils en pierre, vivent de la chasse, de la cueillette, de la pêche, de la culture (haricot, courge, piment, maïs, coton). La céramique constitue un élément important dans la vie quotidienne. La métallurgie se développe ainsi que le métier à tisser qui contribue au développement et à la diffusion de l’art du tissage. - Chavin (1.300 –500 avant notre ère) : L’architecture de Chavin suggère une organisation hiérarchisée et complexe de la société. Le site de Chavin se situe dans les hautes terres du nord, à 3.200m d’altitude. L’ensemble est formé de plusieurs pyramides tronquées construites à différentes époques. La céramique de Chavin introduit un élément extrêmement précis : la bouteille dite à étrier, à la décoration peu recherchée : de couleur noire. De nombreuses pièces d’orfèvrerie ont été découvertes dans des tombes de la zone côtière : masques, disques, bracelets, pectoraux. Côte nord : - la culture Mochica (100 – 700 de notre ère): La culture mochica apparaît dans la région de Chicama, sur la côte nord. Le vestige archéologique le plus connu de la culture mochica est la céramique. Les bouteilles globulaires, anthropomorphes, zoomorphes avec une anse en étrier rattachée au goulot, ont été découvertes essentiellement dans des tombes. Ces récipients avaient une fonction cérémonielle et étaient sans doute destinés au rituel funéraire. Les Mochicas utilisent une technique simple : d’argile mêlée à du sable. La base était modelée puis des boudins de pâte (colombins) venaient s’ajouter pour former le corps et le col du récipient. La céramique était moulée. Les poteries ne présentent pas une grande variété de couleurs (brun, rouge et crème). La thématique des vases offre une grande variété. En premier lieu, les vasesportraits qui représentent des personnages avec un grand réalisme. Les représentations d’animaux sont également fréquentes (hibou, cochon d’Inde, grenouille et félins). La chasse, la pêche, le culture de la terre, l’architecture, la maladie, la médecine constituent d’autres thèmes illustrés par les vases. Les Mochicas excellaient également dans l’art du tissage mais les étoffes retrouvées sont rares car les conditions climatiques ne sont pas bonnes pour la conservation de vestiges aussi fragiles. - la culture de Chimù (1.200 de notre ère) : La culture de Chimù s’épanouit dans la vallée de Moche, région occupée antérieurement par les Mochicas dont elle assimile les traditions. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 69 La culture Chimù forme un Etat qui au 15e siècle s’étend sur un territoire important ; l’existence de grandes villes comme la capitale Chanchàn témoigne de cette grandeur. La céramique fabriquée en série à l’aide de moules ne réussit pas à atteindre le niveau technique et artistique de la poterie mochica dont elle s’inspire. Une forme typique de cette poterie ; les vases doubles composés de 2 récipients reliés par une anse. Ce sont, le plus souvent, des vases siffleurs. Les motifs utilisés pour la céramique se retrouvent sur les étoffes. L’orfèvrerie a connu un tel essor que les Incas, après la conquête du royaume chimù ont emmené les orfèvres à Cuzco afin de les faire travailler pour l’Inca. Ils travaillaient l’or et l’argent et produisaient des objets destinés à la cour et des objets de culte. Ils connaissaient les techniques du travail du métal : martelage, estampage, gravure, incrustation, filigrane, soudure, alliage et fonte. Le procédé de la fonte à cire perdue permettait la réalisation des objets décorés ensuite de filigranes et d’incrustations de pierres précieuses. Côte sud - Paracas Le climat extrêmement sec de la Côte Pacifique du Pérou a permis de conserver des sépultures extraordinaires dans la péninsule de Paracas, située à 300 km de Lima. Le cimetière de Paracas Cavernas comporte des chambres funéraires, en forme de coupole, creusées dans le sable à environ 6 ou 7 m de profondeur. Chaque tombe contient 30 à 40 momies enveloppées dans des tissus de coton au décor simple (mantos) et entourées d’offrandes funéraires ; bijoux, petits objets (ornements de plumes, armes) et poteries à décor polychrome. Les corps des momies appartiennent indifféremment aux 2 sexes et à des personnes de tous âges. Les momies présentaient souvent un crâne déformé intentionnellement. La plupart des tissus étaient en coton, en laine de lama, d’alpaga et de vigogne, en cheveux humains, en plumes d’oiseaux. Les coloris des tissus de Paracas surprennent par l’éventail de leurs nuances et leur état de conservation ; il existe par exemple plus de 18 nuances de rouge. Les teintures utilisées pour obtenir une coloration provenaient de végétaux, de minéraux et d’animaux ; le rouge de la cochenille, le bleu de l’indigotier, … Les artisans de Paracas utilisaient des schémas de composition très abstraits. La disposition la plus habituelle consiste en un damier entouré d’une bordure. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 70 - culture de Nazca (350 avant notre ère – 850 de notre ère) : La civilisation de la vallée de Nazca et d’Ica surprend par la variété et la richesse de la céramique trouvée dans les tombes. Les morts étaient recouverts de tissus et entourés de céramiques polychromes. Dans la Pampa de Ingenio, on peut voir sur le sol de mystérieux tracés dits géoglyphes : ces figures zoomorphes qui peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres de longueur ne sont clairement visibles que d’avion. Leur fonction (observations astronomiques, rôle cultuel, calendrier, procédé de tissage) demeure une énigme. Les vestiges qui se trouvent associés à ces glyphes prouvent qu’ils ont été exécutés par les Nazcas. Ces tracés, étudiés dès 1946 par Maria Reiche, sont situés dans un désert et couvrent une superficie de près de 500km2. Les cailloux qui recouvrent la surface sableuse contiennent probablement du fer, et le soleil y a déposé une patine sombre ; les hommes de Nazca retiraient ces pierres afin de faire apparaître la couleur claire du sable qui se trouve en-dessous et ont réalisé ainsi d’étranges réseaux de lignes, de longueur variable (de 500m à 8 km), enchevêtrées de représentations d’animaux. Aujourd’hui, il est généralement admis que cet ensemble de tracés serait un immense calendrier accompagné de figures à caractère rituel ou cérémoniel. Certains glyphes permettaient d’observer des solstices ou autres phénomènes astronomiques tous du plus grand intérêt pour une société qui devait compter sur les ressources de l’agriculture. - Culture inca Les Incas, peuple guerrier originaire du nord du lac Titicaca ont fondé un immense empire avec Cuzco comme capitale. Cet empire grandiose, unique dans toute l’Amérique précolombienne, s’étendait du nord au sud sur plus de 4.000 km. Malgré cette surface immense et les nombreuses ethnies qui le composaient, l’Empire inca était relativement homogène, grâce à l’application d’une politique délibérée : l’imposition d’une langue officielle, le quechua ; l’existence d’une religion officielle, fondée sur le culte su Soleil ; un pouvoir centralisé ; au sommet de la pyramide trônait l’Inca, souverain au pouvoir absolu et fils du Soleil. La population andine vivait en petites communautés entre 3.600 et 3.800 m d’altitude. L’agriculture était intensive et le réseau de communication excellent. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 71 Dans les hautes terres, les Incas ont construit une imposante architecture de pierre : forteresses, palais et temples faits de blocs de pierre taillée parfois gigantesques. Cet art illustre la puissance et le prestige de l’empire. L’architecture présente peu de variantes, car elle symbolise la recherche d’homogénéité caractéristique de l’art inca. L’appareil des murs est soit - en pierres irrégulières avec des moellons dégrossis non taillés, - en blocs taillés de forme polygonale utilisés surtout dans les ouvrages de type défensif comme les forteresses, - en blocs taillés de forme rectangulaire, disposés en assises régulières et parfaitement assemblés entre eux. Ce type de maçonnerie était utilisé pour la construction de palais, de temples et d’autres monuments administratifs et religieux. Cuzco exprime dans sa configuration urbaine la structure politique de l’empire. La ville était divisée en 2 parties ; la ville haute et la ville basse. La zone centrale de la ville était réservée aux Incas. Autour de ce secteur s’étendait la partie périphérique dans laquelle étaient installés les provinciaux. Cette périphérie était elle-même divisée en 4 parties. Les 2 principaux édifices de la ville sont le centre sacré (complexe architectural de différents temples et de résidences de prêtres) et la forteresse. Le sanctuaire du Soleil était l’édifice principal, orienté d’est en ouest ; les murs étaient recouverts d ‘or. La forteresse qui protégeait la ville de Cuzco est grandiose ; au centre 3 énormes tours dominaient Cuzco. Machu Pichu : Ignorée des Espagnols, cette ancienne ville inca est située à 2.045 m d’altitude, près de Cuzco. Les fouilles ont permis d’exhumer les restes de 173 personnes dont 150 femmes et 23 hommes et enfants qui provenaient d’hypogées. Ces découvertes supposent qu’il s’agissait d’un lieu de résidences des « Vierges du Soleil » (femmes choisies pour se consacrer au culte de la divinité ; leur fonction consistait à tisser des tissus très fins pour la garde-robe de l’Inca). La fonction exacte du Machu Pichu demeure une énigme ; s’agissait-il d’un refuge du dernier inca intronisé par les Espagnols, d’une forteresse ? Totalement entourée de murailles, la ville abrite quelques 200 édifices en granite. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 72 La cité elle-même, construite en terrasses, esplanades et terre-pleins, délimite différentes zones et édifices qui aboutissent à une place centrale. Tous les bâtiments semblent émerger du flanc de la montagne et épousent parfaitement la structure du terrain. Machu Pichu illustre l’importance accordée par les Incas à l’harmonie de l’architecture et de la nature. Dans l’empire inca, les textiles étaient considérés comme précieux : offrandes aux dieux, récompenses aux vainqueurs, offrandes à l’Inca. L’art textile inca avec sa géométrie austère atteint un remarquable niveau de qualité. Il existe une grande variété de couleurs mais ce sont essentiellement le rouge, le vert, le bleu, le violet et l’orangé qui dominent. Dans l’art des bijoux, les Incas ont profité de l’expérience des Chimùs qui avaient été emmenés comme orfèvres à Cuzco, après la conquête inca. Les potiers incas ont élaboré une céramique de formes bien caractéristiques décorées de motifs peints, géométriques (cercles, points, croix, damiers) ou naturalistes. Ces derniers sont moins courants et figurent surtout des poissons, des insectes, des oiseaux ou des fruits. Cette volonté d’homogénéité et de cohérence dans le domaine architectural se retrouve dans l’art de la céramique. Les Incas ont créé l’aryballe, récipient à long goulot évasé, au corps renflé, à anses latérales verticales et à base conique, de taille variable (de 0.20 cm à 1.50 m). Ces bouteilles auraient servi à stocker et à transporter des liquides. En 1532, les conquistadores détruisent l’Empire inca. Référence bibliographique : catalogue de l'exposition : Trésors du Nouveau Monde, Bruxelles, Musées Royaux d'Art et d'Histoire, 1992 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 73 Chap.6 BRESIL, NIEMEYER, Oscar (1907- 2012), le modernisme lyrique en architecture à voir : film de Marc-Henri WAJNBERG, Oscar Niemeyer, un architecte engagé dans le siècle, 2000 « J’ai cherché un chemin nouveau, en ayant la liberté comme point de départ et la beauté comme objectif essentiel ». Oscar Niemeyer Figure emblématique du renouveau de l’architecture du 20e siècle, Oscar Niemeyer, depuis le milieu des années ’30 jusqu’à aujourd’hui, a enrichi le patrimoine architectural mondial du Brésil à la France en passant par l’Italie, l’Algérie ou New York. Oscar Niemeyer né en 1907 à Rio de Janeiro, étudie à l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Rio de Janeiro, dirigée depuis 1931 par Lucio Costa et obtient en 1934 le diplôme d’ingénieur architecte. Il débute sa carrière dans le bureau de Costa où il participe en 1936 à la construction du ministère de l’Education nationale et de la Santé. Il y rencontre Le Corbusier que Costa avait invité comme architecte conseil et dont l’influence sera marquante à ses débuts. Sa création architecturale ne voit véritablement le jour que plus tard lorsque le nouveau maire de Belo Horizonte, Juscelino Kubitschek, lui demande en 1940 un projet pour l’ensemble architecturale de Pampulha, centre de loisirs au bord d’un lac comprenant un yacht club, une salle de bal, un casino, une église,… Niemeyer y rompt avec le credo de l’angle droit. La ligne courbe l’attire en particulier la courbe libre et sensuelle que la nouvelle technique suggérait. « Quand j’ai fait Pampulha, j’ai voulu contester l’angle droit, cette création rigide de l’homme et montrer que la tendance naturelle du béton armé est la courbe ». Désormais Niemeyer ne cessera d’exploiter le potentiel plastique du béton armé, mettant la technique au service de l’architecture, laissant libre cours à son amour du dessin, à la liberté de la ligne pour développer les surfaces courbes de ses arcs, voûtes, rampes, façades, colonnes et pilotis. « Lorsque j’ai construit Pampulha, j’affirmais l’architecture devait être avant tout une surprise, un spectacle pour les yeux . ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 74 L’architecture est invention, il ne faut pas se laisser enfermer dans des règles préétablies. Lorsque Heidegger affirme que la raison est l’ennemie de la pensée, je pense qu’il dit juste. Elle est l’ennemie de toute innovation ». Le béton armé permet à l’architecture qui a le sens de la poésie de s’exprimer. Niemeyer a travaillé avec un ingénieur remarquable, Joaquim Cardoso. En collaboration avec Le Corbusier, Niemeyer remporte en 1947 le concours du siège national de l’ONU à New York. Il construit ensuite les pavillons d’expositions du parc Ibirapuera à Sao Paulo et fonde la revue d’architecture Modulo où il défend ses théories. En 1956, Juscelino Kubitschek, élu président du Brésil, lui demande de concevoir un vaste projet pour une nouvelle capitale du Brésil. Le concours pour le plan urbanistique de Brasilia est gagné par Lucio Costa. « L’idée de Kubitschek n’était pas de faire une ville quelconque, simple et provinciale mais une ville actuelle et moderne, qui serait le symbole de l’importance de notre pays,… j’ai décidé de faire, à Brasilia, une architecture où la forme deviendrait plus importante, une architecture intégrée dans les structures. ». Niemeyer y réalise l’ensemble des bâtiments officiels : - - le Palais de l’Alvorada, résidence du chef de l’Etat dès 1957 la place des trois-Pouvoirs avec le Congrès national, signalé par deux coupoles en contrepoint de tours jumelées qui abritent les services administratifs, le Palais du Planalto, siège du gouvernement, la Cour Suprême fédérale le Palais de l’Itamaraty (ministère des Affaires étrangères) le ministère de la Justice, le théâtre national, la cathédrale,… L’ampleur et la monumentalité de cet ensemble exceptionnel, l’élégance plastique et la clarté linéaire de chacun des bâtiments, alliant puissance et légèreté forme un choc architectural qui a fait entrer le Brésil dans la modernité. En 1962, Niemeyer est nommé coordinateur à l’Ecole d’architecture de l’Université de Brasilia. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 75 En 1964, la dictature militaire prend le pouvoir au Brésil. Communiste engagé depuis 1945, Niemeyer se retire de l’Université en signe de protestation contre la politique du gouvernement. Celui-ci suspend la publication de sa revue Modulo et entrave sa liberté de travail au Brésil. Contraint à l’exil, il voyage à plusieurs reprises à Paris, en Europe, en Afrique et décide de s’installer à Paris en 1967. André Malraux, que Brasilia avait enthousiasmé, lui obtient du général de Gaulle l’autorisation de pratiquer sa profession en France. Après avoir conçu le siège du Parti communiste à Paris, il réalise la Bouse du Travail de Bobigny, le Centre culturel du Havre, le siège de l’Humanité à Saint-Denis. En Italie, il réalise le siège des éditions Mondadori à Milan et le bâtiment de la Fiat à Turin. En Algérie, il est l’auteur du projet de l’Université de Constantine. De retour au Brésil, avec le rétablissement de la démocratie, il enseigne à l’université de Rio et poursuit sa carrière d’architecte visionnaire réalisant en 1987 à Sao Paulo, le mémorial de l’Amérique latine conçu pour le rassemblement des peuples contre l’impérialisme ou le Musée d’Art contemporain de Niteroi à Rio de Janeiro en 1991. Il n’a cessé depuis lors de dessiner de nouveaux projets, qu’il réalise avec son équipe dans son bureau de Copacabana. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 76 Chap. 7 Le triomphe de l’art américain au 20e siècle ____________________________________________________________ La puissance de création de l'art américain après 45', ses moyens d'expression toujours plus directs et plus efficaces, ses attitudes et ses techniques font qu'aujourd'hui il apparaît comme un des mouvements créateurs les plus importants de la culture contemporaine. en architecture : 1 - Naissance de l'architecture moderne aux Etats-Unis : L'ECOLE DE CHICAGO (1885-1893) La course folle de l'industrie et du commerce touche les Etats-Unis vers 1850. De 1850 à 1890, colonisation des terres de l'Ouest. Le premier développement de l'architecture moderne aux Etats-Unis se produit dans la ville où l'industrialisation est la plus rapide : Chicago. Au milieu du 19e siècle, Chicago est une petite ville de 30.000 habitants. Le défrichement du Middle West fait de Chicago le plus grand marché de blé du monde et la capitale mondiale du bétail. 1871, un incendie détruit Chicago. Lorsqu'on reconstruit la ville, son environnement s'est complètement modifié. Des bâtiments de 12 à 20 étages se construisent hâtivement. Dans le Loop, centre des affaires, des rues entières de bureaux sont reconstruites. Pour satisfaire la demande urgente et massive de bâtiments commerciaux, il faut avoir recours aux techniques des constructeurs de ponts. De grands immeubles d'affaires, des hôtels géants, de grands immeubles à appartements surgissent. L'ensemble de ces constructions est effroyable… et ce qu'on appelle l'Ecole de Chicago sera la réaction d'un groupe d'architectes qui tente d'introduire dans ce chaos urbain un peu d'ordre, de fonctionnalisme. Ces architectes exploitent l'ossature en acier et la nouvelle technique de fondation sur radier afin de résoudre le problème du sol marécageux de la ville. L'Ecole de Chicago est la démonstration de l'excellence de l'acier comme structure architecturale. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 77 Caractéristiques de l'Ecole de Chicago : - mur nu, fenêtre large et horizontale "Chicago Window" - plan libre et flexible - principe de l'extension, issu de l'architecture populaire américaine. LOUIS SULLIVAN (1856-1924): Symbolise avec le plus de force l'Ecole de Chicago. Etudes au Massachusetts Institute of Technology (1870-1873) et stage chez Le Baron Jenney. Comme Richardson et Le Baron Jenney, Sullivan se rend à Paris pour y étudier l'architecture à l'Ecole des Beaux-Arts, dans l'atelier de Vaudremer, l'architecte "fonctionnaliste" de la prison de la Santé. A son retour aux Etats-Unis, Sullivan entre dans l'atelier de Dankmar ADLER (1844-1900). Très vite, Sullivan devient chef d'atelier et associé d'Adler et leurs carrières seront intimement mêlées. Sullivan défend l'idée " la forme suit la fonction". - Auditorium Building (Chicago 1886-1889), gigantesque complexe architectural comprenant un auditorium, des salles de réunions, des bureaux, un hôtel. Ornementation raffinée. Théorie tripartite : gratte-ciel = colonne qui comprend une base, un fût, un chapiteau. - Wainwright Building à Saint-Louis, 1er gratte-ciel structurel. - Schiller Building à Chicago (1892) avec 1 plan en U. - Guarantee Trust Building (1894-1895) au rez-de-chaussée entièrement vitré, laissant apercevoir ce que l'on pourrait appeler les 1ers pilotis. - Gage Building de Chicago (1898) - Magasin Carson, Pirie, Scott & C° Chicago (1899-1904). - Reliance Building entièrement vitré (anticipation des futurs gratte-ciel de Mies van der Rohe). - Marquette Building avec de grandes fenêtres dites "Chicago-windows" (1894) Incontournable dans cette aventure du gratte-ciel : OTIS Otis qui réalise le 1er ascenseur en 1853. En 1857, il installe son 1er ascenseur dans un grand magasin de New York. 2 - L'Exposition Universelle de Chicago de 1893 : L’Exposition Universelle marque un temps d’arrêt dans la modernité ; John W. Root (1850-1891) et de Daniel Burnham (1856-1913) orientent les plans de l’Exposition vers un éclectisme académique. Grand succès architectural, les bâtiments de l’Exposition surnommés la "ville blanche" sont construits dans le style impérial romain. Le stuc, le bois et le marbre y sont employés à profusion. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 78 Le pastiche deviendra le mot d'ordre de l'architecture américaine qui se tourne vers l'historicisme. L'ossature métallique sera cachée sous des façades néogothiques. Pendant 40 ans, les maisons américaines vont adopter le style géorgien, les grands collèges le style gothique, les banques le style florentin. La crise suscitée par l'Exposition universelle de 1893 entraîne la rupture entre Adler et Sullivan, Adler meurt peu de temps après mais pour Sullivan commencent de longues années de solitude et de misère. Il publie 2 livres qui sont parmi les grands écrits théoriques de l'architecture moderne: Kindergarten Chats (1901) et Autobiography of an Idea (1922). Fonctionnaliste, Sullivan l'est avec réserve. Demandant à l'architecte de se plier aux rythmes de la nature, il annonce l'architecture "organique" de son disciple Frank Lloyd Wright. 3 - FRANK LLOYD WRIGHT (1869 - 1959) Bien que se considérant comme le disciple de Sullivan, F. Lloyd Wright ne s'apparente pas à l'Ecole de Chicago dont il n'est pas le continuateur. A reçu une éducation originale dès le jardin d'enfant (méthode Fröbel) + culture littéraire et musicale. Etude d'ingénieur. 1887/1893 : travaille dans l'atelier d'Adler & Sullivan. 1889 : réalise sa maison personnelle à Oak Park, dans l'Illinois. A partir de 1900, affirme un style plus personnel et réalise une série de maisons individuelles dans Oak Park d'une absolue nouveauté, telle la maison Robie (1908). 1908 : séjourne un an en Allemagne où il publie un ouvrage monumental. 1916/1922 : séjourne au Japon et construit l'Imperial Hotel à Tokyo. 1932 : fonde la communauté Taliesin Fellowship. 1936/37 : maison sur la cascade pour la famille Kaufmann, à Bear Run en Pennsylvanie (80 km de Pittsburgh). Ce chef-d'oeuvre donne à Wright une célébrité mondiale; les Américains redécouvrent leur plus grand architecte. 1936/39: construction d'un bâtiment administratif transparent pour la firme Johnson Wax à Racine dans le Wisconsin. 1946/59: Musée Guggenheim - New York. Wright renonce à l'esprit fonctionnaliste et progressiste de l'Ecole de Chicago. Il repousse la structure d'acier, les grandes surfaces vitrées et les constructions en hauteur pour se préoccuper de l'intimité de la maison individuelle. Pour régénérer l'habitat individuel tombé dans le style historiciste, Wright s'inspire des maisons toutes simples des pionniers américains et de la maison japonaise. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 79 Il enracine ses maisons dans le paysage, se sert de matériaux naturels et locaux (bois, briques, pierre) et insiste sur le lien entre maison et paysage. Il appelle son architecture "organique" pour la différencier de l'architecture "fonctionnaliste" européenne. Contrairement aux architectes de l'Ecole de Chicago qui préconisent des lignes verticales soulignant l'élan de leurs édifices, Wright aime les lignes horizontales : "j'eus l'idée que les plans parallèles à la terre dans les constructions s'identifient avec ... et font beaucoup pour que les constructions appartiennent au sol". Plan ouvert dans un mouvement continu de surface en surface, continuité de l'espace et des formes, fenêtres de coin, chauffage par le plancher, éclairage indirect sont les principes de l'architecture de Wright. Il définit l'architecture en terme d'abri d'où l'importance du toit (horizontal couvrant largement le bâtiment), du soubassement et de la cheminée. Plan d'habitation concentré presque toujours autour de la cheminée. Au mur traditionnel, succèdent des panneaux continus séparés de la toiture par des séries de fenêtres. Le mur est utilisé non plus pour clôturer l'espace mais pour "apporter dans la maison le monde extérieur et pour permettre au monde intérieur de sortir au dehors". Pour accentuer l'impression de communication entre la nature et la maison, Wright utilise pour ses murs intérieurs des pierres brutes qui semblent continuer les rochers avoisinants. Comme Ruskin, Wright donne à l'architecture une mission morale et, comme Sullivan, il proclame ses convictions démocratiques. Dans la pensée de Wright, l'architecture organique était avant tout un humanisme, il pensait que l'homme, replacé dans la nature, devenait meilleur. A Taliesin, Wright vivait dans son utopie qu'il appelait "l'Usonie". 4 - 1930/1940 : les artistes du Bauhaus émigrés aux U.S.A. relancent l'abstraction géométrique et le fonctionnalisme architectural. Peintres et architectes fuient le nazisme (Hitler ferme le Bauhaus en 1933) et s'installent aux Etats-Unis. Ils y apportent la réflexion de 20 années de pratique artistique en Europe. L'esthétique fonctionnaliste instaure aux USA le style international en architecture. Venus du Bauhaus, 3 personnalités émergent : Walter Gropius, Marcel Breuer, Mies Van der Rohe. Gropius dirige l'Ecole d'architecture de Harvard où enseignera également Marcel Breuer. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 80 Mies van der Rohe émigre en 1937 et est à la tête de "l'Illinois Institute of Technology" de Chicago dont il conçoit les bâtiments : simplicité, pureté, tout est ramené à l'essentiel, façades fonctionnelles. L'architecture américaine est liée aux possibilités nouvelles offertes par l'utilisation de matériaux tels que le béton, l'acier et le verre. Le béton devient le symbole d'un nouveau style international d'esprit fonctionnel en permettant la création de structures en ossature et des volumes géométriques simples (le béton est utilisé depuis 1916 aux U.S.A). Il permet une fabrication standardisée en grande série mais aussi une variété infinie de formes grâce à la souplesse d'utilisation du matériau. Le mur, souvent remplacé par des matériaux translucides, n’a plus de rôle portant. Les voiles de béton varient de plus en plus dans leurs formes. en peinture : 1 - EDWARD HOPPER (1882 – 1967) * Oiseaux de nuit/Nighthawks – 1942 – 76 x 152 cm – Art Institute Chicago * South Carolina Morning – 1955 – 76 x 101 cm – Whitney Museum – NY * Compartment C, Car 293 – 1938 – 50 x 45 cm – Collection IBM - NY Peintre inclassable bien que proche de la grande tradition du réalisme américain. En 1970, 3 ans après la disparition de son mari, Joséphine N. Hopper, lègue au Withney Museum of american art de New York la presque totalité de l'atelier du peintre soit 2.500 œuvres : peinture, dessins, notes préparatoires. En 1899 et 1900, Edward Hopper fréquente une célèbre académie de publicité, la Correspondence School of Illustrating de New York. Il étudie ensuite à la New York School of Art jusqu'en 1906. Hopper reçoit un enseignement imprégné de l'art français (Degas, Lautrec et Manet) Importance de 3 séjours parisiens pour sa formation et le développement de son œuvre. Dans la lignée des naturalistes français du 19e, il peint des natures mortes ou des nus d'ateliers, oeuvres de petits formats. A Paris, il découvre les qualités de la lumière des bords de Seine et une harmonie de l'existence quotidienne qui s'oppose à la brutalité du mode de vie américain. En 1908, il s'installe définitivement à New York où il travaille comme dessinateur publicitaire puis comme illustrateur. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 81 De son studio situé dans Greenwich Village, Hopper capte l’essence de la ville : le train aérien, un ciné, un resto, etc. Les scènes qu’il dépeint sont souvent nocturnes, dégageant une ambiance particulière. Hopper dépeint l'American Way of Life. Il est célèbre pour ses tableaux d’espaces visiblement abandonnés du quotidien américain du milieu du vingtième siècle. Dans ces scènes apparemment anecdotiques et calmes domine un lourd sentiment d’ennui. Edward Hopper explore la composition, la lumière et la couleur, travaillant les cadrages, ciselant la pénombre, superposant et juxtaposant des pans colorés. L'artiste interpelle le spectateur et la peinture elle-même en faisant du contenu du tableau le produit d'un regard dérobé, érotique et même voyeur sur une réalité aperçue depuis un trottoir ou une rame de métro. Goût pour l'architecture : l'évocation du rapport de l'homme et de son environnement deviendra le sujet de sa peinture, hanté par la solitude et le déracinement de l'individu. Hopper décrit des moments suspendus de l'existence humaine. Il prend appui sur le réel mais jamais son réalisme ne s'adonne aux séductions de l'anecdote. Observateur distant, c'est l'espace entre les rêves et les choses qui l'intéresse, l'isolement de l'individu dans un monde qu'il ne maîtrise pas. Le monde silencieux de Hopper dénué de communication est celui des stations-service et des magasins déserts, des intérieurs de bureaux, d'hôtels et de restaurants, tous lieux d'une civilisation urbaine où Hopper met en scène le vide. Il se place délibérément à l'extérieur, accentuant ce sentiment par des prises de vue neuves inspirées de la photographie et du cinéma suggérant l'instantané. Hopper passionné de cinéma et n'a jamais cessé de s'inspirer du monde du spectacle. Mais les peintures de Hopper ont aussi fasciné les cinéastes qu'il s'agisse des réalisateurs des "films noirs" américains de l'après-guerre ou d'Alfred Hitchcok. Perspective plongeante, plan-séquence, cadrages insolites, la construction spatiale des peintures de Hopper est proche des plans cinématographiques, sans compter l'étirement du temps de ses peintures qui n'est pas sans évoquer ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 82 l'absence qui habite les films d'Antonioni, l'errance des "road movies" de Wenders. " le tableau me fut probablement suggéré par mes nombreux voyages sur la ligne L à New York après la nuit tombée. Plus les aperçus sur l'intérieur des bureaux étaient fugitifs, plus les impressions sur mon esprit étaient fraîches et vives. Mon intention était d'essayer de suggérer l'isolement et la solitude d'un intérieur de bureau assez haut en l'air, avec ce mobilier de bureau qui avait pour moi une signification très précise". Hopper craint plus que tout d'être explicite. Tout au long de son oeuvre revient l'image solitaire d'une femme en attente face à une fenêtre largement ouverte au vent et à la lumière, ou arrêtée dans l'embrasure illuminée d'une porte. Le regard de Hopper observe ces figures féminines sans complaisance, sans flatterie. Communes et anonymes, les femmes sont dans sa peinture les archétypes d'une société frappée par la crise, désenchantée, confrontée au vide spirituel. Elles caractérisent un type social des classes moyennes, déjà stéréotypé, répandu par les magazines ou le cinéma. On sait que toute sa vie Hopper n'a eu pour seul modèle que sa femme, Jo. Ainsi, l'ouvreuse de "New York movie" (1939) qui rêve dans la pénombre, humble, sexy comme une starlette, prisonnière d'un dispositif d'illusion extraordinairement mis en scène par le peintre. Hopper évite le récit : " le tableau n'a pas à raconter plus que cela et j'espère qu'il ne racontera pas quelque anecdote, car aucune n'est intentionnelle" mais il emprunte beaucoup à sa passion du théâtre et du cinéma, en s'attachant aux problèmes philosophiques du témoignage, de la réalité et de la vision pour dégager les codes universels de ses métaphores picturales. Hopper abandonnera le portrait et même l'autoportrait au profit d'architectures personnalisées, villas victoriennes, bâtisses aux décors éclectiques, vigies solitaires, témoins dérisoires d'une civilisation transplantée, déracinée. Peu à peu, il souligne le caractère intemporel et fugitif de ces constructions en insistant sur une vision à la dérobée, prise d'une fenêtre de voiture ou de train. La peinture de Hopper décrit tout à la fois l'immobilité de l'attente et la fuite du temps. Hormis son recours constant à l'allusion du voyage, il insiste sur un huis clos psychologique qu'accentuent les fenêtres sans cadre, ouvertes sur le vide. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 83 2 - ECOLE DE NEW YORK ACTION PAINTING / EXPRESSIONNISME ABSTRAIT / (1940 – 1955) La Seconde Guerre mondiale exile momentanément le groupe des peintres surréalistes de Paris qui émigrent vers les U.S.A : Ernst, Dali, Breton, Chagall, ... Le surréalisme impressionne profondément certains plasticiens américains; il constitue l'étape libératrice qui aboutira quelques années plus tard à l'Expressionnisme abstrait. Peggy Guggenheim alors mariée à Max Ernst ouvre en 1942 une galerie d'art à New York (Art of this Century Gallery) et encourage de jeunes artistes américains dont Jackson Pollock. Le surréalisme mène les peintres américains vers l'introspection, l'impulsion spontanée et l'automatisme considérés comme l'expression du subconscient et traduits d'une manière gestuelle. Jackson Pollock (1912-1956) fonde ses travaux sur les techniques automatiques et fait appel à un ensemble de signes et de formes inspirés par : - ses études sur la psychanalyse de Jung, - la mythologie des Indiens - l'influence du peintre muraliste mexicain Siqueiros - Picasso, Masson, Miro. Il émane de ses oeuvres une impression de brutalité immédiatement reconnue comme quelque chose de nouveau que l'on nommera l'Expressionnisme abstrait. Pollock attaque la toile avec rage dans une sorte de corps à corps avec la peinture. " Par terre, je me sens plus à l'aise, je me sens plus proche, j'ai l'impression de faire partie du tableau parce que je peux marcher autour, y travailler des quatre côtés et être littéralement "dans" le tableau. Cela rappelle la méthode utilisée par certains Indiens de l'ouest qui peignent sur le sable". La création est pour lui comme un rituel. Fréquemment de grands formats, les peintures privilégient la frontalité de l’espace pictural, l’absence de hiérarchisation entre les différentes parties de la toile (all-over). Pollock développe la technique du dripping, peinture par égouttage, procédé qui consiste à faire couler de la peinture liquide sur une toile posée au sol à l’aide d’un bâton. Il meurt, victime de la vitesse, dans un accident de voiture âgé de 44 ans. L'Action Painting (ou peinture gestuelle) de Pollock est l'exaltation du geste absolu et donc du risque absolu; il en ressort une perpétuelle angoisse. Autre artiste important de l’Action Painting : Willem de Kooning (1904 -1997) ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 84 - COLOR-FIELD PAINTING Mark Rothko (1903- 1970) D'origine russe, il émigre aux U.S.A. et s'installe à New York. Vers 1946, sa peinture abandonne le principe de composition hiérarchisée et d’espace profond au profit de l’intensité chromatique. Ses œuvres apparaissent sous forme de nuages rectangulaires superposés d’une immatérialité saisissante. Influencé par les apports du surréalisme et la philosophie de Nietzsche et Jung, sa recherche l'oriente vers la définition d'un langage personnel fondé sur l'élaboration de grands champs de couleurs. Il dispose la couleur par plans successifs et parallèles selon des structures simples. Il est un des artistes les plus représentatifs du courant Color-Field Painting. 3 - POP ART (1955) Véritable phénomène de société, le Pop Art est le mouvement artistique contemporain le mieux connu. Il désigne une culture de masse disqualifiée (publicité, télévision, magazines, vedettes, idoles, …) Le Pop Art insiste sur la matérialité physique de l'oeuvre d'art et considère n'importe quel objet comme oeuvre d'art. Il prend conscience de la réalité contemporaine industrielle, mécanique et publicitaire. L’utilisation massive des procédés mécaniques de reproduction (photos, sérigraphies), d’une facture plate, objective se superpose à des thématiques et à des références issues du quotidien (effigies de stars, objets ménagers, comics, marchandises, …) Andy Warhol (1929-1987) ira le plus loin dans la dépersonnalisation de l'image. « if you want to know all about A. Warhola, just look at the surface : of my paintings and films and me, and there I am. There’s nothing behind it” (A.W.) Message social absent : art désengagé, neutre. Mise à distance de la réalité par la répétition d’une image selon un procédé de reproduction mécanique. Warhol illustre la dépersonnalisation dans la société contemporaine. La répétition permet la mise à distance, l ‘anonymat et annule la charge émotive. Anesthésie de la sensibilité, disparition du style, du tragique, de l’individu. Message froid et ambigu. Warhol a inversé l’ordre moral par la démystification des excès ou des peurs collectives, désacralisation des héros et des stars. Autres artistes représentatifs ; Roy Lichtenstein, Tom Wesselmann, James Rosenquist, Claes Oldenburg. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 85 4 - MINIMAL ART (1960) En réaction contre l’exubérance de l’Expressionnisme abstrait et l’autocélébration de l’artiste, l’Art Minimal se fonde sur la nécessité d’un retour aux formes géométriques élémentaires clairement définies et utilise la répétition modulaire. En sculpture, il privilégie des matériaux usinés, le geste de l’artiste est remplacé par la fabrication industrielle qui permet une reproduction standardisée. Robert Morris, Carl Andre, Dan Flavin, Donald Judd, Sol Lewitt sont des artistes représentatifs de ce courant. Le principe élémentaire de l’Art Minimal est sa simplicité de lecture. Art de la réduction, de l’austérité stylistique et du geste artistique ramené à l’expression la plus neutre. 5 - FLUXUS - « un état d’esprit » (1961) Le mouvement Fluxus, multidisciplinaire, est proche de l’anticonformisme dada. Tiré du mot anglais « flux », Fluxus fait référence au cours ininterrompu de l’existence et manifeste la volonté de ne pas séparer l’art de la vie. Le but recherché est de libérer l’individu sur le plan intellectuel, physique et surtout politique. Les artistes représentatifs de Fluxus sont John Cage, Merce Cunningham, Rauschenberg, Nam June Paik, Yoko Ono, Kaprow, Joseph Beuys. Fluxus développe les « happenings » (actions dont le déroulement est souvent imprévu et indéterminé) et les « events »( succession d’actions déterminées, non narratives, jouées par des artistes. Les « events » propres à Fluxus se concentrent sur un seul geste, une seule action élémentaire du quotidien (par exemple : regarder voler un papillon, se serrer la main). 6 - ART CONCEPTUEL (1965) Dans l’art conceptuel, l’idée est la principale composante de l’œuvre. L’idée en soi, même si elle n’est pas visualisée, est autant une œuvre que le produit final. Toutes les étapes intermédiaires, notes, esquisses, dessins, ébauches ratées, modèles, recherches, pensées, conversations, présentent un intérêt. Celles qui révèlent le processus mental de l’artiste sont parfois plus intéressantes que le produit final. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 86 L’art conceptuel est de l’art parce qu’il se présente comme tel, dans un contexte propre à l’art. La contribution majeure de l’art conceptuel est une réflexion sur la signification de l’art, et non sur son aspect formel. Après avoir rejeté le goût, l’expertise et l’histoire de l’art, l’art conceptuel commence peut être à découvrir ce que l’art signifie. *one and three chairs – 1965 - KOSUTH, J., Une chaise, sa photographie in situ à l’échelle et un agrandissement photographique de sa définition. Il s’agit d’une invitation à analyser les liens et les différences entre 3 systèmes de représentation : un objet usuel (le référent), son image (l’icône) et sa définition langagière (le signe). 7 - Culture Graff / Street Art (1970) BASQUIAT (1960-1988) D’origine portoricaine et haïtienne, né en 1960 à Brooklyn dans l’Etat de New York et mort à New York en 1988 à la suite d’une overdose à l’âge de 27 ans, Basquiat appartient à la génération des graffiteurs qui a brusquement émergé à New York à la fin des années 70. En 1977, il commence à signer ses graffitis du nom de SAMO (pour « Same Old Shit » qui peut se traduire par « toujours la même merde ») accompagné d’une couronne et du sigle du copyright. Au cours de sa fulgurante carrière, sa peinture passe de la rue au tableau. Son univers mélange les mythologies sacrées du vaudou et de la Bible en même temps que la bande dessinée, la publicité et les médias, les héros afroaméricains de la musique et de la boxe, et l’affirmation de sa négritude. Il définit ainsi une contre-culture urbaine, underground, violente et anarchique, pétrie de liberté et de vitalité. En 1982, Basquiat est invité à participer à la Documenta 7 de Kassel en Allemagne. L’année suivante, il est le plus jeune et premier artiste noir à exposer à la Biennale du Whitney Museum of American Art à New York. À partir de 1984, il réalise en commun des peintures avec Andy Warhol jusqu’à la mort de ce dernier en 1987. S’étant toujours défini comme un peintre influencé par son environnement urbain quotidien, les racines de sa pratique «expressionniste primitiviste» sont à trouver du côté d’une peinture européenne d’après-guerre, celle de Jean Dubuffet, réfractaire à l’«asphyxiante culture» ou celle de Cobra, ainsi que du ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 87 côté de la grande tradition américaine de Robert Rauschenberg à Cy Twombly. Après sa mort prématurée en 1988, il laisse une œuvre considérable habitée par la mort, le racisme et sa propre destinée. Sa vie brûlante et explosive, mêlant le star-système et la révolte, a inspiré en 1996 le film « Basquiat » du peintre et cinéaste Julian Schnabel. Keith HARING (USA 1958-1990) A 18 ans, il commence des études de graphisme à Pittsburg, études qu'il abandonne assez vite après avoir vu une exposition Alechinsky. Il rentre alors dans l'école des Arts Visuels de New York. Découvre une culture alternative qui sort des musées et des galeries pour conquérir la rue, la ville, la vie. Haring aura toujours comme fer de lance une volonté de démocratisation de la culture, à l'instar de Warhol, Lichtenstein, Koons. Sa démarche est axée vers plus de lisibilité et de visibilité de l’art. Ses premiers dessins se font à la craie blanche sur des panneaux publicitaires du métro. Comme de véritables performances, il court, repère un espace vide, le recouvre de papier craft et dessine dessus rapidement. Il travaille le jour comme la nuit, sort dans les lieux underground branchés et prend du LSD. Il se fait connaitre en 1980 au Club 57 où il propose une énorme installation en recouvrant le club de plastique noir et en le taguant au marqueur or et argent. Warhol y passe dans la nuit et le lendemain l’invite à déjeuner. Il passe ensuite aux dalles de East Village. Les peintures et dessins de Keith Haring sont immédiatement reconnaissables : il peint des formes synthétiques de couleurs vives, qu'il souligne par un trait noir. Son travail est vivant et énergique. Des hommes, des enfants, des animaux, des TV et des soucoupes volantes, qui font référence à la société contemporaine s’additionnent de symboles plus lointains et symboliques comme des couronnes, des crucifix ou des pyramides. Il aborde les thèmes de la mort, de la sexualité et de la religion en proposant sa propre mythologie décalée, mais toujours compréhensible par tous. Découvrant dans la fin des années 1980 qu’il est atteint du sida, il travaille d’autant plus. Il s’éteint à l’âge de 31 ans. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 88 Références bibliographiques : SANDLER,I., Le triomphe de l’art américain au 20e siècle, éd Carré 1991 HUNTER,S., Peintres américains, éd Fabbri, Milan 1967 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 89 Chap. 8 L’Océanie ___________________________________________________________________________ 1. rêve océanien : L’exotisme a toujours accompagné l’exploration du Pacifique. Les grands voyageurs ont abordé les terres australes et y ont découvert différentes cultures riches en objets, rites et coutumes. Au 16e siècle, Magellan ouvre la voie du Pacifique. Au milieu du 18e siècle, navigateurs, scientifiques, missionnaires portés par une soif de connaissances, entreprennent une exploration méthodique de ces archipels du bout du monde. James Cook fait progresser les connaissances en dressant la carte du Pacifique. Durant les 3 voyages qu’il effectue entre 1768 et 1779, le capitaine découvre la Nouvelle-Calédonie et les îles Hawaii. Suivant les traces de Cook, l’Espagne, la Russie et l’Amérique lancent des expéditions Au 20e siècle, les avant-gardes s’intéressent aux arts océaniens et africains, découvrent leur puissance, leur beauté. Aujourd’hui les Arts océaniens font partie des chefs-d’œuvre du monde entier. 2. découverte : Les habitants de l’Océanie sont les descendants de peuples de l’Asie du sudest qui découvrent à bord de pirogues à double coque et à mât unique des îles, des archipels où ils s’installent, construisent des villages, cultivent des terres inventent des dieux et des rites. La dernière vague migratoire est celle des Polynésiens. Les embarcations qui ont emporté ces premiers hommes se retrouvent dans le mythe fondateur de la pirogue originelle. Elle se confond avec le bateau des âmes qui embarquait les morts au Pays des Esprits. Le mât central incarne l’arbre de vie. La répartition géographique de ces peuples contribue à la diversité de leurs cultures qui découle d’une nécessité d’adaptation aux conditions climatiques : déserts et steppes d’Australie, forêt tropicale des archipels mélanésien et polynésien. Ni la métallurgie, ni la roue, ni le tour de potier ne sont connus. 3. Australie : En 1788, début de la conquête et de l’implantation des Européens. Plus de 500 ethnies peuplaient l’Australie, la colonisation y a apporté maladies et discriminations. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 90 Cependant les aborigènes d’Australie ont continué à honorer leurs ancêtres par des chants, des danses, des pratiques artistiques. Isolés, les peuples aborigènes d’Australie ont créé des cultures, des rituels, des langues, des structures sociales où l’art a une place très importante souvent liée aux rituels qui permettent de relier le passé au présent, l’homme au monde surnaturel. Leur art, héritier de longues traditions, a laissé de nombreux témoignages influencés par la Nouvelle-Guinée : poteaux de section quadrangulaires sculptés en forme d’homme, peintures sur écorce d’eucalyptus à motifs géométriques, peintures rupestres figurant des scènes de la vie quotidienne. Les scarifications et les peintures qui ornent les corps des initiés ont un lien avec les héros mythiques. Les pouvoirs des ancêtres perpétués par l’art et les cérémonies rituelles, influencent la vie de chaque individu. Chaque clan a pour ancêtre un héros, incarné dans un animal ou une plante. Parures et tatouages donnent à voir le rang social, indique l’identité d’un homme, sa richesse, son emblème. Les parures exigent beaucoup de travail et la recherche de matériaux rares : coquillages, plumes,… Les couleurs sont très importantes et toujours symboliques. Parures et peintures mettent ceux qui les portent en relation avec leurs ancêtres. Les aborigènes de la Terre d’Arnhem située au Nord de l’Australie conservent aujourd’hui encore une culture qui est sans conteste une des plus anciennes de l’humanité. Ils ne connaissent ni l’agriculture, ni l’élevage, ni la métallurgie, ni la roue. Ils vivent de la cueillette et de la chasse. Regroupés en petites communautés (2 ou 3 familles), ils ne construisent pas de maisons, vivent dans des campements mobiles (abris d’écorce). L’art des aborigènes, reflet de leur mode de vie traditionnel est réalisé à partir de bois, écorce d’arbre, pigments végétaux, pointe de silex, charbon, … Cet art s’exprime sur les parois rocheuses, des troncs d’arbres, des paravents en écorce. La peinture rupestre : Aujourd’hui encore les aborigènes recouvrent les parois des abris rocheux de peintures à caractère mythologique (récits des origines du monde) ou relatif aux ancêtres totémiques. Les couleurs employées sont d’origine naturelle : le rouge s’obtient à partir de l’ocre naturelle ; le blanc avec du kaolin ou de la chaux (coquillage) ; le noir à l’aide d’oxyde de manganèse et de charbon. Ces matières sont broyées puis mélangée à de la graisse d’émeu, à des œufs de tortue ou à du miel. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 91 Les peintures les plus remarquables se trouvent dans les grottes du nord de l’Australie. Elles représentent des animaux mythiques évoquant la fécondité ou les origines de la vie, des esprits personnifiés La peinture sur écorce : Caractéristique de l’art aborigène, la peinture sur écorce trouve son origine dans les panneaux, sortes de paravents, utilisés pour s’abriter des intempéries. Les panneaux découpés sur le tronc des eucalyptus sont séchés et aplanis avant de recevoir un enduit coloré qui sert de fond pour la peinture. Les fragments d’écorce décorés servent aussi dans les cérémonies d’initiation et les funérailles. On y retrouve les mêmes thèmes que dans la peinture rupestre : scènes mythologiques et de caractère magique, esprits et animaux. Quel que soit le thème abordé, ces œuvres évoquent toujours les forces surnaturelles qui constituent l’essence même de leur religion. A une époque plus récente et vraisemblablement à la suite d’influences des peuples mélanésiens du détroit de Torres, les aborigènes ont commencé à sculpter des poteaux funéraires avec des représentations stylisées d’ancêtres. 5. Micronésie et Mélanésie : A l’est des Philippines, la Micronésie (du grec mikros, petit) compte quelques 2.500 îles largement dispersées. Cette zone dont les principaux archipels sont : les îles Mariannes, Carolines, Marshall, Kiribati est surtout formée d’îlots de corail (atolls). Zone stratégique, placée en partie sous la tutelle des Etats-Unis en 1947, la Micronésie a aujourd’hui, un statut de quasi-indépendance. Les habitants de la Micronésie sont originaires d’Insulinde comme le reste des Océaniens. Les ressources de la Micronésie sont très limitées ; la plupart des îles vivent des cultures traditionnelles : tubercules, arbres à pain et bananes La ressource essentielle est le coprah, fourni par les plantations de cocotiers. L’art micronésien, la sculpture comme les objets utilitaires, offre des formes extrêmement pures, rehaussées de par des couleurs ou des incrustations de coquillages. La plupart des œuvres portent des motifs de tatouages, que l’on retrouve sur les corps des hommes et des femmes de ces îles. Les habitants vénéraient les esprits des ancêtres, tissaient leurs vêtements dans des fibres de bananier. Les masques portés par des membres de sociétés secrètes, au cours de danses cérémonielles incarnent l’esprit des ancêtres chargés de protéger les récoltes. Autre ensemble d’archipels et d’îles qui constitue l’une des grandes régions de l’Océanie est la Mélanésie (du grec, melas, noir) appelée ainsi en raison de la couleur de peau de ses habitants. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 92 La Mélanésie comprend la Nouvelle-Guinée, l’archipel Bismarck, les îles Salomon, la république du Vanuatu, la Nouvelle-Calédonie, les îles Fidji. Les Hautes Terres de Nouvelle-Guinée sont découvertes en 1932 par des chercheurs d’or. Sur le plateau et dans les vallées vivent de nombreuses populations. Pour ces peuples, la confrontation avec la civilisation occidentale est très dure et les souffrances nombreuses : routes, immeubles, soins médicaux, chômage, ghettos, maladies, faim. Les masques sont très présents en Mélanésie ; ils ont des fonctions diverses et sont utilisés par des sociétés secrètes lors des rites d’initiation. Ils représentent des créatures mythologiques, des ancêtres qui apportent protection. En Nouvelle-Guinée, la région du fleuve Sepik se distingue par la richesse des formes et la variété des objets décorés. Les habitants vivent de l’agriculture et de la pêche. Les hommes forment des sociétés secrètes et se réunissent dans les maisons communes où se déroulent les rites d’initiation et les cérémonies du groupe. La maison cérémonielle des hommes est une maison sacrée qui symbolise le corps de la femme primordiale. La façade est son visage, le bâtiment son corps. L’extérieur est décoré d’un ou deux grands masques qui figurent cette femme mythologique. Cette maison, réservée aux initiés, peut atteindre 25m de long et dépasser 18 m de haut. Construite souvent au milieu du village, son rez-de-chaussée est ouvert aux vents. De hauts poteaux rehaussent la maison ; chaque pilier est décoré de symboles correspondant à un clan. C’est là que les hommes se réunissent, discutent, fument, sculptent. A l’intérieur de ces maisons sont entreposés les grands tambours, les pirogues ornées de proues sculptées en forme de tête de crocodile, les boucliers de combat et d’apparat. On y conserve aussi des masques en en osier, en bois. Les motifs s’inspirent des éléments du corps humain. 6. la Nouvelle-Irlande Cette île de l’archipel Bismarck constitue l’un des centres artistiques les plus intéressants et originaux de l’art océanien. Des objets richement ornés interviennent dans les cérémonies rituelles dédiées aux ancêtres. Il s’agit de sculptures en bois composées d’éléments superposés et incrustés de fragments de nacre de coquilles, d’écorce de fibres formant des structures complexes ; l’ensemble est peint de couleur vives. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 93 Le masque de danse se compose d’un élément de base qui recouvre la tête du danseur et représente un visage humain sur lequel s’entremêlent différentes formes (becs, têtes ou ailes d’oiseaux, touffes et pièces de vannerie,…) Les cérémonies consacrées aux ancêtres constituent une lourde dépense pour l’entourage qui doit réunir d’énormes quantités d’aliments et de nombreux objets rituels exposés. La notion de prestige social étant essentielle dans ce type de communauté. 7. Nouvelle-Guinée Les rencontres entre les chefs se déroulaient lors de grandes fêtes cérémonielles qui permettaient d’afficher leur puissance. La notion de prestige joue un rôle essentiel : on échange de précieux présents des dents de cachalot ou des tapas et on récitait solennellement son arbre généalogique. Il s’agissait alors d’impressionner et d’imposer le respect aux visiteurs. La présence du pouvoir des ancêtres est une composante essentielle de toute cérémonie. Le prestige, la richesse et l’autorité divine de l’élite se manifestent dans les tenues vestimentaires, les parures et les tatouages. Les plumes, les coiffes et les armes transmises de générations en génération sont imprégnées de mana, puissance divine. Les peintures sont représentées en Nouvelle-Guinée par les tapas qui ont l’apparence d’une étoffe. Ils sont obtenus en traitant l’écorce du mûrier de Chine, du ficus, de l’hibiscus ou de l’arbre à pain suivant un procédé particulier : un long trempage, suivi d’un battage l’aide d’un battoir spécial à section carrée qui assouplit les fibres et les feutre, donne des feuilles qui atteignent jusqu’à 2 fois leur largeur primitive. Les tapas permettent la fabrication de vêtements, de couvertures, de nappes à fonction rituelle. Le tapa protège le mana d’un corps ou d’un objet. Les membres de l’élite portaient plusieurs couches de tapa, ce qui accentue leur statut social. Les thèmes centraux de la sculpture sont le tiki à visage d’homme, être surnaturel doué de pouvoirs divins, et les motifs en spirales incisés dans le bois. Le décor, très raffiné, est soit fait à la main, soit imprimé au moyen de plaquettes de bois gravé. Les couleurs les plus employées sont le rouge, le noir et le brun. 8. la Polynésie : Polynésie signifie littéralement « îles nombreuses » ; cette région est la dernière à être peuplée par l’homme (1er millénaire avant notre ère). ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 94 Lorsque les missionnaires arrivent au début du 19e siècle, ils font disparaître en moins de 50 ans cultes et traditions. Il ne reste aujourd’hui de ces cultures que des danses et des contes transmis de génération en génération. La partie orientale de la Polynésie, comprenant les îles Marquises et l’étonnante île de Pâques, est la plus importante. L’art typiquement polynésien du tatouage connaît son plein essor chez les Maoris. Les femmes de rang avaient le plus souvent de petits tatouages sur les lèvres alors que les hommes en portaient sur tout le visage et sur le corps. Chaque homme possédait un dessin qui lui était propre et que l’on ne reproduisait jamais deux fois. Le jade, très abondant en Polynésie, constitue un matériau ornemental apprécié avec lequel les Maoris réalisent des tikis, amulettes protectrices qui représentent le plus souvent un minuscule monstre anthropomorphe. Le tiki présente souvent un corps trapu, une tête massive, des yeux énormes et circulaires, une bouche entrouverte avec indication de la langue. Les Maoris possèdent des massues en pierre taillée, en jade ou en os de baleine. L’île de Pâques colonisée par des Polynésiens vers le 5e siècle de notre ère, se singularise par ses sculptures monumentales, les moai représentant des êtres humains stylisés. Ces sculptures géantes se divisent en 2 catégories : d’une part celles anthropomorphes de taille approximativement humaine, placées à même le sol, d’autre part, d’énormes blocs dont la hauteur peut dépasser 10 m, représentant des personnages au visage prognathe et au corps grossièrement équarri. Sculptées dans une pierre volcanique très tendre à l’aide de simples outils en pierre, elles proviennent d’une carrière située sur les flancs du cratère d’un volcan éteint où gisent encore un certain nombre d’entre elles, ce qui démontre que le travail se déroulait in situ. Equipés de cordes, les habitants y traînaient les sculptures jusqu’aux platesformes, également en pierre volcanique, installées sur les escarpements du bord de mer. Ces sculptures se caractérisent par une tête au front saillant, des orbites creusées qui recevaient des yeux en corail taillé et poli, de longs nez et des joues lisses ; les aborigènes les coiffaient de sortes de bonnets de pierre de couleur rouge. De nombreuses sculptures ont été brisées et d’autres jetées à la mer. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 95 Certains spécialistes ont vu dans cet acte l’indice d’une révolte des habitants contre les prêtres qui les obligeaient à déployer les terribles efforts que constituaient la taille, le transport et la mise en place des statues dont certaines mesurent plus de 10 m et pèsent jusqu’à 40 tonnes. On ignore quel type de divinité représentaient ces figures mais les rites se déroulaient su les plates-formes elles-mêmes. Quoi qu’il en soit la taille de ces figures ne remonte pas au-delà du 15e siècle de notre ère. Malgré la rareté du bois dans l’île, on trouve de très belles sculptures. Sur cette terre perdue en plein océan Pacifique, située à quelques 3.760 km des côtes chiliennes, ne pousse qu’une végétation éparse. Ce paysage désolé est dominé par 3 volcans. 8. Regard sur l’architecture contemporaine : * Opéra de SIDNEY Bâtiment représentatif du modernisme, symbole d’une ville et de son émergence culturelle, il a été construit durant 10 ans, à partir de 1963 et conçu par l’architecte danois Jorn UTZON (1918-2008). Il remporte haut la main, le concours lancé pour la construction d’un grand opéra, à l’occasion des Jeux olympiques de Melbourne en 1956. Le site de Bennelong, ancien repère où étaient détenus prisonniers des aborigènes est choisi pour son édification. La péninsule qui s’avance dans le port de Sidney sur lequel il est bâti lui donne l’allure d’un voilier majestueux. Il est supporté par 580 piliers de béton qui s'enfoncent jusqu'à 25 mètres au-dessous du niveau de la mer. Les énormes coquilles sculpturales en béton qui forment le toit de l’Opéra affirment son caractère sculptural. L’opéra se compose de 3 groupes de coquilles voûtées et entrelacées qui abritent les 2 principaux lieux de représentation et un restaurant. Le bâtiment est entouré de terrasses qui font office de promenades piétonnes. La toiture impressionnante est recouverte de plus d’un million de tuiles de céramique blanche inspirée de bol japonais. * Centre culturel Tjibaou (Nouméa - Nouvelle-Calédonie) 1998. Conçu par l’architecte Renzo Piano, le bâtiment s’inspire directement des huttes de la culture kanak à laquelle il est dédié. il comprend 10 pavillons d'une hauteur variant entre 20 et 28 m, organisés en villages immergés dans la végétation. Le complexe architectural impressionne par sa force, son originalité et son adéquation au projet d’un centre culturel dédié principalement à la culture kanak : chacune des salles du complexe culturel qui sont disposées en arc au ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 96 bord du lagon est insérée dans une structure creuse qui évoque les grandes cases traditionnelles des villages de Nouvelle-Calédonie. Cette structure, faite principalement d’un bois apporté d’Afrique, l’iroko, initialement de teinte marron, a pris en vieillissant des reflets presque métalliques, ce qui accroît le caractère insolite d’une architecture à la fois très moderne et très ancienne. Références bibliographiques : MONTAGU, A., 1957 Les premiers âges de l’homme, Les peuples primitifs des origines à aujourd’hui, Marabout Université, 1957 DE DECKKER, P. et F. 1982 Ta’Aroa, L’univers polynésien, Crédit Communal, FOUCHET, M.P. 1964 L’art et les sociétés primitives à travers le monde, Hachette, Paris D’ALLEVA, D. 1990 Le monde océanien, Coll. Tout l’Art,« Contexte », Flammarion Catalogues d’expositions : L’Ile de Pâques, une énigme, Musées Royaux d’Art et d’Histoire, 1990 Trésors du Nouveau Monde, Musées Royaux d’Art et d’Histoire, 1992 ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 97 Chap. 9 L’Extrême-Orient ___________________________________________________________________________ Introduction : Extrême-Orient… deux mots qui font rêver… Le monde asiatique a toujours fasciné l’Occident ; dès l’Antiquité, des relations commerciales s’établissent par la route de la soie, au Moyen-Âge, des missions sont organisées vers ces pays légendaires, des voyageurs se lancent dans l’aventure comme Marco Polo. Cependant, l’histoire dresse une nette séparation culturelle entre l’Orient et l’Occident. Il faut attendre le 16e siècle, pour que Portugais et Hollandais établissent des comptoirs commerciaux sur les côtes et le 18e siècle pour que les porcelaines et les laques d’orient influencent le goût et la sensibilité des Européens. 1. Inde : la genèse de l’art indien La civilisation de l'Indus a été détruite par les Arya, envahisseurs indoeuropéens venant des plateaux de l’Iran qui s’établissent dans la vallée du Gange (vers 1750 av J-C). C'est à cette époque que Les Veda ou livres du savoir sont élaborés en sanskrit. Le védisme appelé brahmanisme se développe et impose une organisation sociale et politique fondée sur le système rigide des castes où les brahmanes sont membres de la classe sacerdotale. Selon les codes brahmaniques, les castes sont issues du corps de Brahmà, considéré comme le dieu créateur et le maître des Véda. Son culte sera supplanté par ceux voués à Visnu, dieu de la conservation du monde et à Shiva, dieu de la destruction et de la création à la fois. Vishnou, le gardien de l’humanité. Il est le défenseur du bien contre le mal et possède le pouvoir de faire durer l’univers. Lorsque l’équilibre du monde est perturbé, il intervient sur la terre pour la protéger de la ruine. Vishnou est une divinité douce. Sa peau est bleue, il porte une haute couronne et ses 4 mains présentent 4 éléments capitaux : une roue incarnat le disque solaire, une conque marine, une fleur de lotus et une massue de combat. Shiva réunit toutes les polarités, tous les principes contraires : le féminin et le masculin, l’amour et la haine, la jouissance et l’abstinence, la création et la destruction, la vie et la mort. Shiva est représenté comme un jeune homme aux cheveux longs et hérissés. Ses nombreux bras témoignent de sa puissance surnaturelle. On le représente aussi en colère ou comme un ascète ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 98 mais la forme la plus connue est celle du lingam ou phallus, symbole de puissance et de fertilité. Au départ, il y a la croyance en la réincarnation : après la mort, l’âme du mort se réincarne dans un autre corps. Le karma, la somme des actes posés dans les vies précédentes détermine la qualité de la nouvelle existence : une loi de la nature. Il n’y adonc pas de dieu ou de juge. Atteindre la délivrance et échapper au cycle des réincarnations est l’objectif suprême. Le brahmanisme renaît au 8e siècle de notre ère sous le nom d’hindouisme. Au 7e siècle avant notre ère, apparaissent 2 mouvements réformistes issus du brahmanisme ; le bouddhisme et le jaïnisme. - Le bouddhisme, mouvement ascétique destiné à améliorer la vie des individus, est fondé en Inde du Nord par le fils d’un raja du Népal, le prince Siddhârta Gautama, dit le bouddha (« l’Eveillé » « l’Eclairé »). Ce prince, qui vivait au 6e siècle avant notre ère, se rebella contre le système des castes, l’idolâtrie et les pratiques sacrificielle. Il cherche une façon d’échapper à la souffrance et au cycle des réincarnations. Au terme de longues méditations, le Bouddha comprend que les principales causes de la souffrance sont la passion et le désir. La voie du bouddhiste est celle du renoncement et de la quête de la paix intérieure. C’est le moyen d’avoir une influence positive sur son karma. Une pratique correcte de la méditation et de la concentration permet d’atteindre l’éveil, l’illumination. Une fois que l’éveil est atteint après la mort, le bouddhiste accède au nirvâna, le néant infini d’où il échappera définitivement au cycle des réincarnations. Le bouddhisme est la religion la plus répandue en Asie. Le Bouddha est toujours représenté en position assise en méditation, couché ou debout. Il porte un habit de moine, a toujours une épaule dénudée et présente certaines caractéristiques : des lobes d’oreilles allongés, un mèche de cheveux entre les yeux, de petites boucles et une protubérance crânienne. Chaque statue exécute un geste symbolique. Le plus connu d’entre eux est un geste rassurant signifiant « N’aie crainte ». - Le jaïnisme est l’une des plus anciennes religions de l’Inde. Elle se rapproche de l’animisme : tout ce qui vit dans la nature a une âme. Les jaïns vénèrent les 24 jinas, des philosophes qui ont su s’affranchir du cycle des réincarnations. Leur doctrine décrit très précisément la façon dont l’âme habite le corps et comment en menant une vie ascétique, les hommes peuvent purifier leur âme pour atteindre, après la mort, la délivrance. Selon le jaïnisme, l’univers est un espace éternel, infini et vide intégrant en son centre un univers habité de structure ternaire : un monde supérieur peuplé d’êtres divins, un monde intermédiaire peuplé d’êtres humains, d’animaux et de végétaux, et un monde inférieur peuplé d’êtres démoniaques. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 99 Au-dessus de ce monde ternaire se situe le monde des âmes délivrées, en forme de croissant de lune. L’ascèse permet de purifier l’âme jusqu’à l’immaculation. Les jaïns délivrent leur âme par la connaissance, une foi correcte et un comportement juste ; ils respectent 5 principes : ne pas tuer, ne pas voler, ne pas mentir, ne pas se montrer impudent et ne pas s’attacher à la matérialité. A la base de l’éclosion de l’art indien, il y a l’opposition et la coexistence de ces mouvements spirituels. L’art bouddhique et l’art brahmanique coexistent pendant plus d’un millénaire, de leurs origines situées vers le 2e siècle avant notre ère à leur aboutissement vers les 10e/11e siècles de notre ère. 2. La période ancienne : le stûpas Les premiers temples et stûpas sont construits en bois. Cette architecture est ensuite transposée dans la pierre. L’emploi de la brique a permis l’apparition d’une architecture monumentale dont la création la plus originale est un monument commémoratif, le stûpa, caractéristique des cultes bouddhiques ; il s’agit d’un édifice massif de maçonnerie de structure hémisphérique qui s’inspire des tombes védiques. Les origines du Stûpa remontent à une ancienne coutume: l'inhumation des princes sous des monticules artificiels de terre et de brique. Ainsi les cendres de Bouddha furent répandues et ensevelies sous 8 stûpas. L’hémisphère est comme l’œuf (anda) d’où va surgir toute vie et il est traversé par le mât du parasol qui symbolise l’axe de l’Univers. L’enceinte, matérialisée par une balustrade représente le monde avec ses quatre portes orientées vers les points cardinaux. Le stupa résume la pensée bouddhique et constitue le monument le plus représentatif de cette philosophie. - Grand stupa, Sanchi, 1e siècle - Stûpa de Borobudur (au centre de Java - Indonésie) 8e siècle. Construit en pierre sur plan carré (111m de côté à la base). Sa signification symbolique explique sa forme architecturale. La succession de 9 terrasses qui mènent au stûpa central au sommet, symbolise selon l'enseignement bouddhiste, les étapes que tout homme devra surmonter jusqu'à sa libération dans le Vide. Le plan du cercle inscrit dans un carré représente le mandala bouddhique : le soubassement quadrangulaire et les 5 galeries symbolisent le monde terrestre, les 3 plates-formes circulaires le monde divin. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 100 Les bas-reliefs qui décorent les murs de 5 galeries promenoirs renforcent la signification cosmologique de l'édifice. Ces bas-reliefs relatent la vie de Bouddha et les actes de foi de ses disciples. Le style même de ces sculptures traduit cette ascension loin du monde terrestre, confus, désorganisé qui conduit le fidèle vers le monde immobile, lumineux que symbolisent les 3 terrasses. Là 72 Bouddhas en méditation contemplent l'horizon dans 72 stûpas évidés qui bordent les terrasses tandis qu'au sommet un grand stûpa arrondi renferme l'esprit de bouddha. Cette longue marche des pèlerins en direction du sommet symbolise le pèlerinage spirituel que chaque Bouddhiste doit accomplir. L'ensemble est orienté selon les 4 points cardinaux. A côté de ce type de construction en pierre et en brique, il existe une architecture rupestre, totalement excavée dans la roche, elle aussi de caractère religieux. Ce sont des sanctuaires (caitya) et des monastères (vihàra). - grottes Ajanta Dans la paroi rocheuse est taillée une façade, ouverte par un grand arc en plein cintre qui annonce la structure voûtée de l’intérieur. 3. art et religion : Le temple hindou représente l’image du cosmos avec toutes ses composantes. Les espaces concentriques successifs, rectangulaires ou carrés, sont délimités par des murs entourant le sanctuaire où demeure de la divinité. Avec sa structure pyramidale, le sanctuaire ressemble à une montagne, et ses niveaux indiquent les divers ciels superposés. Les temples et les palais sont très vastes et doivent disposer de grandes richesses pour subvenir aux besoins des multitudes qui les entretiennent ; les ressources de certains temples provenaient des revenus de centaines de villages et d’immenses terres cultivées. L’architecture se complète par la peinture et la sculpture afin de manifester son intention didactique : figures et éléments décoratifs remplissent tous les espaces disponibles. Ces sculptures imprégnées d’un esprit paisible, bienveillant et souriant s’inscrivent dans la plus pure tradition de la Loi bouddhique. Représentation d’un idéal, la figure de Bouddha se présente comme un homme jeune, imberbe, au visage arrondi et serein, assis ou debout dans une attitude solennelle. L’évolution de la sculpture bouddhique montre un enrichissement progressif avec des scènes toujours plus complexes et plus libres. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 101 Bouddha occupe le plus souvent le centre des bas-reliefs, inscrit dans un médaillon et entouré de figures et de scènes de sa vie. L’érotisme constitue un autre thème important de la sculpture ; à partir du 8e siècle de notre ère, un des thèmes préférés des sculpteurs est l’acte sexuel ; illustration plastique du Kama-sùtra, le célèbre « art d’aimer » de l’Inde. Ces représentations, exposées sur des édifices cultuels avec une intention religieuse, démontrent clairement que pour l’hindouisme, l’acte sexuel est symbolique de la création qui est l’œuvre de la divinité ; le linga ou organe mâle représente l’emblème sacré de l’un des dieux associés à cette création, Siva. A côté de la sculpture qui couvre toutes les surfaces architecturales, il faut noter l’importance de la peinture murale. Les thèmes sont des scènes de la vie du bouddha. Le monument mondialement connu qui réunit le plus grand ensemble de peintures bouddhiques est constitué par les 30 grottes d’Ajantà. L’évolution de l’art indien tend toujours vers un baroque qui surcharge et fractionne les éléments. Les temples se transforment en structures de plus en plus compliquées et décorées ; un corps rectangulaire supporte une toiture pyramidale, très pointue et composées de nombreux étages ; au centre des 4 faces, un grand kudù joue le rôle de fronton. Ces hautes superstructures échelonnées conservent le symbolisme primitif de la montagne sacrée. 4. la diffusion de l’art indien : La Birmanie, le Sud-est asiatique, l’Indonésie assimilent les enseignements indiens. Parmi les cultures du Sud-est asiatique se détache particulièrement le royaume khmer du Cambodge, en Indochine dont la capitale était Angkor, fondée au 9e siècle de notre ère. Les Khmers établissent une monarchie théocratique où le roi assume les pouvoirs civils et religieux ; l’époque la plus florissante s’étend du 9e siècle au 12e. Les temples d’Angkor constituent un des ensembles monumentaux les plus grandioses du patrimoine mondial. On peut y suivre l’évolution d’une architecture qui se développe dans de larges espaces et construit ses bâtiments sur des terrasses étagées. La sculpture et les bas-reliefs se caractérisent par un aspect plus hiératique. 5. La Chine : Les Shang (1523-1028 avant notre ère) dominent le nord de la Chine. Société très raffinée ; les Shang construisent d’immenses palais en bois et fabriquent une céramique blanche, décorée de bandes en zigzag. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 102 Les pièces de bronze constituent la grande nouveauté de l’art Shang. Ce sont le plus souvent des vases rituels qui présentent une décoration en relief. L’écriture, qui apparaît avec les Shang, est encore éloignée des caractères chinois classiques. Les Shang connaissaient les éclipses, l’année solaire et l’année lunaire, ils calculaient selon le système décimal. Les Zhou (jusqu’en 221 avant notre ère) L’évolution de l’art accompagne l’évolution du sentiment religieux ; c’est l’époque des grands penseurs avec Laozi qui définit le Tao (Dao) comme le principe de tout mouvement sur la terre et Confucius (vers 552 avant notre ère) codificateur et réformateur de la société. Les artisans Zhou travaillent l’argile, le bronze, l’os, l’ivoire et surtout le jade. Cette pierre considérée comme un matériau noble pour sa dureté garante de sa longévité, pour sa couleur et son toucher. Le jade était le symbole de la pureté et de la vertu du souverain. On lui attribuait le pouvoir de préserver les cadavres de la putréfaction. Et c’est pourquoi on a retrouvé des corps qui portaient de jade sur les orifices du visage. L’année 221 avant notre ère voit l’avènement de l’éphémère dynastie des Qin dont le souverain Qin Shihuangdi (259-210 av J-C) despote unificateur est considéré comme le fondateur de l’Empire. Ce « fil du ciel » se proclame « Premier Empereur », il triomphe et unifie la Chine pour la première fois. Il organise le pays en commanderies et préfectures, standardise l’écriture, les mesures, les poids et régit les lois. Dès la première année de son règne, il entreprend de compléter l’énorme ouvrage de la Grande Muraille afin de constituer une défense contre les barbares des steppes. Elle sera conservée et renforcée par les dynasties successives ; son tracé et son état actuels datent de l’époque des Ming. La découverte de la sépulture de Qin Shihuangdi, près de Xi'an (nord de Pékin), est une des découvertes majeures du 20e siècle. A partir de 1974, on commença à fouiller le mont Li, où une colline recouvre la sépulture impériale qui, avec ses dépendances, couvre une surface de près de 2 km carrés. Sa puissance militaire se reflète aujourd’hui par la découverte de son impressionnante armée en terre cuite. Le plus remarquable de ce qui a été mis au jour est l’armée impériale, représentée par des figures de soldats grandeur nature réalisés en terre cuite peinte. Ces guerriers étaient alignés dans des fossés parallèles, et en formation parfaites par 3 ou 4, avec chars et chevaux. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 103 Au total, la sépulture est gardée par 6.400 figures de soldats, toutes différentes et modelées spécialement pour l’occasion. Cette armée impériale offre le témoignage guerrier le plus complet et le plus impressionnant de toute l’Antiquité. La première fosse, la plus grande, contient une armée rangée en ordre de combat, constituée de fantassins et de chars; la deuxième abrite des statues de guerriers assistés par des corps de cavalerie, la troisième se révèle le siège de l'état-major de cette gigantesque armée souterraine. Ces 3 fosses forment un tout représentant l'armée de la dynastie des Qin. En 206 avant notre ère, le régime trop autoritaire est remplacé par la dynastie des Han. La maturité de l’art chinois : les Han, les Tang et les Song La dynastie des Han va se maintenir au pouvoir durant plus de 4 siècles, jusqu ‘en 220 de notre ère. Période paix intérieure. La cour est installée à Luoyang, et c’est de là que s’établit le contact avec l’Occident, par la route de la Soie, cet itinéraire commercial qui traversait toute l’Asie pour aboutir aux portes de la Syrie. Cet ensemble d’éléments propices va favoriser l’économie et le niveau de vie. Les Han On peut mesurer l’influence des lettrés dans la tendance intellectuelle que prend l’art chinois : conçu comme une image de l’Univers, il se situe dans un espace à quatre directions qui sont représentées par le tigre blanc de l’ouest, le dragon vert de l’est, l’Oiseau rouge du sud et le Guerrier noir du nord ; ce dernier prend la forme d’une tortue qui lutte contre un serpent. Ces quatre couleurs garderont toujours une valeur symbolique. Il faut noter des progrès techniques concernant aussi bien l’invention du papier et de l’encre que le perfectionnement du pinceau pour peindre sur ce nouveau support qui va remplacer les tablettes de bambou. Ce premier art impérial est essentiellement funéraire. Les objets déposés dans les tombes sont très variés. Cet art est naturaliste, équilibré et tranquille en accord avec les tendances moralisatrices du confucianisme qui veillaient à mettre en relief la bonté et l’exemplarité. Parmi les objets enterre cuite, on trouve aussi des maisonnettes seules références qui nous soient parvenues de l’architecture de l’époque des Han. Les Tang (581 – 618 de notre ère) Le pays connaît une des plus brillantes époques autant par ses conquêtes que par l’ouverture au monde ou par la rénovation de son art. C’est la période classique de la sculpture chinoise. La fabrication de la porcelaine connaît un essor remarquable. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 104 La tolérance religieuse règne au sein d’un empire qui rassemble toutes les religions : taoïsme, confucianisme, bouddhisme, manichéisme, islam. L’épanouissement de l’architecture se manifeste dans les temples bouddhiques. Construits en bois, ils comportent un ou deux étages et portent une toiture curviligne certaines pagodes en brique sont dotées de plusieurs étages superposés. Dans la production de la céramique, l’époque des Tang est particulièrement remarquable. Des tons chatoyants (jaune, vert, brun) animent la surface des céramiques « trois couleurs » tandis qu’apparaissent les premières porcelaines blanches, grande innovation pour l’époque. Les Song Les 300 années du règne des Song représentent une époque brillante pour l’art chinois. La culture se répand avec plus de facilité grâce aux progrès de l’imprimerie. Le 11e siècle marque l’apogée de l’art de la peinture et de la technique du monochrome. Au cours de cette époque se généralise la peinture de paysage sur des rouleaux horizontaux ; de ce fait, la large composition ne peut être contemplée dans son ensemble et il faut au contraire la parcourir des yeux à la manière d’un voyageur qui cheminerait sur cet itinéraire. La peinture constitue l’art majeur de l’époque Song. L’architecture Song développe en hauteur le type de pagode de plan hexagonal ou octogonal. On élève un nombre impair d’étages, séparés par des toits en saillies sur des consoles incurvées. Comme dans la peinture, la céramique Song est l’évocation parfaite d’une culture raffinée avec une perfection technique qui restera inégalée. Dans le nord, on produit des vases en céladon (porcelaine vert pâle) ; leur surface externe est décorée de motifs floraux en léger creux. Cette splendeur de la céramique Song s’explique par la perfectionnement du tour et celui des fours. Des Ming à la décadence Tout au long du 13e siècle, Gengis Khan et ses successeurs envahissent peu à peu la Chine. L’apport essentiel de cette époque est le bleu de cobalt, venu d’Iran, qui fait naître une nouvelle porcelaine bleu et blanc dont la vogue ira croissant jusqu’en Europe et qui, dès le milieu du 14e siècle provoque une floraison de pièces au décor complexe. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 105 Les Ming transportent leur capitale à Pékin, cité fastueuse et manifestation extérieure de la grandeur impériale. La ville de Pékin est construite selon une structure concentrique qui part de la Cité interdite, résidence impériale et symbole de l’éminente position de l’empereur, Fils du Ciel. Une seconde enceinte entourait la Cité impériale centre administratif de l’Etat. Une troisième muraille enfin délimitait la Cité intérieure édifiée par les Ming. Les impératifs stratégiques d’un pays constamment menacé sont à l’origine de la rénovation de la Grande Muraille qui avait été abandonnée et en partie détruite lors des invasions mongoles. On éleva sur l’ancienne structure de puissantes murailles revêtues de briques, couronnées de créneaux et enfin garnie de distance en distance par des tours carrées. La décadence : Venus des steppes sibériennes, les Mandchous étendent encore leur domination en annexant la Mongolie. Les Mandchous rénovent une grande partie de la cité de Pékin. La céramique, art de prédilection est travaillée avec les plus grandes exigences de perfection technique. 6. Le Japon Quatre îles importantes (Hokkaido, au centre, Honshu au nord, Shikoku et Kyushu au sud) et un millier d’îles plus petites composent l’archipel où se créa le pays d’Orient le plus éloigné de l’Europe : le Japon. Distance et insularité expliquent les très faibles contacts que ces terres ont pu avoir au cours de l’histoire avec l’Occident. En même temps que le bouddhisme, se codifie le Shintoïsme, religion à caractère chamanique très ancienne. A cette époque débute l’histoire japonaise avec l’implantation d’un régime féodal, gouverné par des nobles qui administrent les territoires sous l’autorité d’une famille impériale dominante. 1336, Ashikaga Takauji, devenu le seigneur le plus puissant du japon se retourne contre l’empereur et se fait nommer Shogun. Il transporte sa capitale à Kyoto. Cette période affirme le bouddhisme zen comme religion officielle. Les religieux zen sont les gardiens de la culture au milieu d’un peuple de guerriers ; il leur revient d’élaborer une esthétique proprement japonaise qui part de l’observation de la nature pour y découvrir la raison d’être de la divinité. Le goût pour l’art se répand de plus en plus, on construit des pavillons particuliers appelés chaseki dans lesquels religieux et nobles se réunissent pour contempler des peintures ou prendre le thé ; cette dernière activité se ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 106 convertit en une cérémonie complexe qui pousse les artisans à créer une délicate vaisselle en céramique. Pour célébrer la cérémonie du thé, on érige de gracieux pavillons faits de bois et de papier avec un toit de chaume et qui sont à l’origine de la demeure japonaise typique. L’architecture continue à être soumise à l’influence chinoise. C’est de cette époque que datent le pavillon d’Or et le pavillon d’argent de Kyoto. Les 2 édifices sont de plan carré, de 2 et 3 étages respectivement, avec des toits incurvés et en saillie, dotés de larges ouvertures carrées dans la partie inférieure, et de fenêtres en plein cintre à l’étage supérieur. La grande nouveauté est constituée par les jardins zen dont le propos est de disposer à échelle réduite une imitation de la nature, dans le but de créer un environnement propice à la médiation. C’est la peinture qui constitue la manifestation artistique la plus remarquable de l’époque avec la technique chinoise du lavis. On peint aussi des rouleaux verticaux où la peinture se combine à la poésie calligraphiée. Les estampes (ukiyo-e) largement diffusées au moyen de la gravure sur bois. Elles étaient imprimées en noir puis décorées à la main. C’est à partir de 1765 que sont édités des almanachs et que sont tirées des planches de plusieurs couleurs. Hokusai, Hiroshige développent l’estampe de paysage où la nature japonaise est traduite avec poésie et sensibilité. Leurs œuvres sont présentées à l’Exposition universelle de Londres, en 1862 et à celle de Paris en 1867, leurs estampes font sensation et inspirent Gauguin, Van Gogh, ToulouseLautrec. ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 107 Références bibliographiques : HARPUR, J., 2002 Lieux sacrés du monde, Saint-André des Arts, Paris ROWLAND, B., édition 1963 Peintures des grottes d’Ajanta, Unesco, Le grand art en de poche, Flammarion GARDINIER, S., 1984 Introduction à l’architecture, Somogy GYMPEL, J., Könemann 1996 Histoire de l’architecture de l’Antiquité à nos jours, NUTTGENS, P., 2002 Histoire de l’architecture, Phaidon HATTSTEIN, M., 1997 Les grandes religions, Könemann, ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 108 Chap. 10 La Route de la Soie Il y a deux mille ans, l’Europe et l’Asie étaient connectées par un vaste réseau de routes commerciales, qui traversaient les continents et permettaient des échanges planétaires dans un monde qui n’était pas encore globalisé. Hier comme aujourd’hui, ce n’étaient pas uniquement soies et autres denrées de luxe qui transitaient par ces routes : idées, technologies et croyances se transmettaient grâce aux marchands, moines, missionnaires, soldats et artisans qui s’aventuraient. La Route de la Soie raconte l’histoire incroyable de tous ces échanges culturels et technologiques dans ce monde prémoderne. La Route de la Soie, en tant que route commerciale, est née au 3e siècle avant J.C. et a été activement empruntée jusqu’au 16e siècle. L’histoire de l’Asie Centrale est aussi celle de la naissance du commerce international, celle d’un axe où se mariaient les cultures, où s’échangeait, où se volaient les technologies, où se mêlaient les religions. Les plus grandes civilisations ont participé à la formation de cet axe entre les deux extrémités de l’Eurasie. Un vaste commerce s’établit entre le monde méditerranéen, la Chine et le continent Indien grâce à un réseau de routes, de pistes, et même de sentiers. La Route de la Soie est une expression générique ; elle rassemble un ensemble d’axes caravaniers qui traversaient l’Europe et l’Asie, allant de la Méditerranée jusqu’à la Chine en traversant l’Asie Centrale. Les caravanes, chargées de soie chinoise, épices et pierres précieuses d’Inde, de récipients en argent d’Iran, de tissus de Byzance, de céramiques d’Afrosiab et d’autres marchandises, traversaient les déserts Karakoum et Kyzylkoum, les oasis de Merv et de Khorezm, franchissaient le Pamir, Tian Chan, Altaï, traversaient les fleuves Mourgab, Amou-darya et Syr-darya. Tout au long de l’histoire des routes caravanières, on voit l’apparition de riches cités, de colonies d’artisanat et de commerce, de caravansérails : Merv en Turkménistan ; Boukhara, Samarkand, Ourgentch et Khiva en Ouzbékistan ; Otrar, Turkestan, Taraz, Ispejab au Kazakhstan ; Jul, Souyab, Novokent, Balasagoun, Tach Rabat, Och, Uzgen au Kirghizistan. Un diplomate chinois, Zhang Quian, a effectué son pélirinage de la Chine à l’Asie Centrale au 1e siècle avant J.C. Lors de fouilles archéologiques en Ouzbékistan, il a été découvert un grand nombre de pièces chinoises : miroirs en bronze, morceaux de tissus en soie, fragments de récipients de porcelaine chinoise. Ces découvertes témoignent des rapports commerciaux de l’Asie ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016 109 Centrale avec la Chine. La production de soie et de cellulose se développe sous l’influence de la technologie chinoise, les Chinois rapportent de l’Asie Centrale la culture de la vigne et du vin, oignon, coton, grenade, noix, concombre et autres. Bardi Francesco Pagolotti, un commerçant de la Maison de Commerce de Florence, est revenu en Italie après 8 ans de périples à travers la Route de la Soie passant par la Chine, l’Arabie, et l’Europe. Il est devenu l’auteur d’une œuvre sans égale « La pratique du commerce ou les notes sur les terrains lointains, des règles du commerce et autres conseils pratiques pour les tous les marchands du monde » Il est paradoxal que cette ancienne route ait été baptisée « Route de la Soie » au 19e siècle seulement, sur proposition de Ferdinand fon Riztgofen (auteur d’œuvres classiques et de la géographie physique de la Chine et topographie d’Asie). La communauté internationale soutient favorablement la décision de l’UNESCO « sur la Renaissance de la Route de la Soie – dialogues et rapprochement des cultures ». (1) (1)www.advantour.com ISALT - 3e année - culture artistique - mdustin – 2015-2016