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Le site de La Tourelle
à Lamballe (22) :
premières données sur la naissance
et l’évolution d’un espace rural
de l’âge du Bronze au Moyen Age
Stéphane BLANCHET, Serge MENTELE, Pierre POILPRE
R
éalisées dans le cadre de l’aménagement d’une
ZAC sur le site de La Tourelle à Lamballe (Côtes-d’Armor), deux fouilles menées sur un peu plus
de 5 hectares ont permis de reconnaître un ensemble d’enclos de l’âge du Bronze et de l’âge du Fer.
Plusieurs systèmes parcellaires ainsi que des chemins en connexion avec les différents enclos ont
également été étudiés.
Les plus anciennes traces d’occupation reconnues
dans le cadre des fouilles se rattachent à un probable
tertre du Néolithique moyen. Quelques éléments
diffus témoignent également d’une fréquentation
du secteur durant le Campaniforme et le Bronze
moyen. Cependant, la première entité archéologique remarquable correspond à une grande enceinte
ovalaire à entrées multiples qui couvre une surface
de près d’un hectare. La stratigraphie des fossés
montre qu’elle était bordée par un imposant talus.
Le mobilier archéologique mis au jour comprend
un important corpus céramique que l’on peut rattacher au Bronze final. De par ses caractéristiques,
cette enceinte s’apparente à un Ring Fort.
Par la suite, l’enceinte du Bronze final va constituer un point d’ancrage autour duquel vont se développer plusieurs sites archéologiques, ce jusqu’à
de l’époque gallo-romaine. Au premier âge du Fer,
un premier enclos quadrangulaire va être accolé à
l’enceinte primitive. Au cours du second âge du Fer,
un nouvel enclos d’habitat de forme ovalaire est
creusé et vient s’appuyer sur l’enceinte de l’âge du
Bronze. Cette dernière semble alors être utilisée
comme « basse-cour ». Plusieurs autres enclos emboîtées seront successivement aménagés.
Autour des enclos de l’âge du Bronze et de l’âge
du Fer, un système parcellaire protohistorique s’est
développé selon un plan rayonnant et plusieurs
chemins desservent différents espaces. Un des
chemins assure notamment la liaison avec un autre
habitat du second âge du Fer situé à 500 m. Ce
dernier, occupé durant La Tène moyenne et finale,
est constitué d’enclos quadrangulaires emboités et
cloisonnés par des petits fossés ou des palissades.
Il faut également souligner que le chemin qui relie les deux habitats de l’âge du Fer est bordé par
une série de petits enclos destinés à des activités
spécifiques (forge, stockage). Au début de l’époque
romaine, l’enceinte de l’âge du Bronze exerce encore une influence puisque du parcellaire vient s’y
installer et en épouse les formes. Il faudra attendre
la mise en place d’un important axe de circulation
à la fin de l’époque romaine ou au début du Moyen
Age pour observer une rupture dans l’organisation
des structures agraires.
Les premières études de paysage montrent que
les différentes limites parcellaires et les zones de
circulation découvertes sur ce secteur témoignent
d’une forte organisation de l’espace dès la période
protohistorique. Ce phénomène, souvent déduit
uniquement de l’analyse de photographies aériennes (non datables) ou de départs de fossés dans
les fouilles, voit avec les grands décapages effectués
à Lamballe une véritable confirmation. L’emprise
du diagnostic et des décapages nous permet, en
particulier, d’observer le développement d’un réseau de fossés entre les entités protohistoriques et
présente un cas de mise en relation de deux sites
concomitants suggérant une structuration du territoire très pensée.
Plus largement, le plateau de la Tourelle s’avère
être un site d’une richesse archéologique exceptionnelle et correspond à un pôle d’implantation
humaine. Cette attractivité est manifeste dès l’Âge
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du Bronze et se poursuit de l’Âge du Fer jusqu’au
début de la période gallo-romaine par l’implantation
d’une ceinture d’enclos sur le pourtour du plateau.
La fertilité de l’endroit comme sa position stratégique expliquent sans doute une telle polarisation.
Un bouleversement de l’espace rural apparaît à la
fin de l’époque antique avec la mise en place d’une
voie que l’on suit sur une trentaine de kilomètres.
La structuration de l’espace dépasse alors le simple
niveau local, puisque cette voie de circulation relie
des points du territoire qui dépassent de loin le
cadre du plateau. Cet axe va bouleverser l’organisation du paysage qui se fera désormais, et pour
un certain temps, en fonction de lui et de son
orientation. Cette nouvelle phase de structuration fondée sur les espaces de communication, qui
nous semblent être influents jusqu’au Moyen-Âge,
commandera l’implantation d’habitats et de lieux
symboliques (religieux, funéraires), mais surtout la
fondation primitive du bourg de Lamballe au carrefour de deux voies romaines. Le déménagement de
la ville, au XIème siècle, sur un lieu plus défensif engendrera le déclin progressif de cette organisation.
L’essor du nouveau Lamballe rendra très lentement
caduque la voie antique passant sur le site de la
Tourelle, et deviendra un nouveau pôle d’attraction
du paysage. Le déclin de la voie - surtout sensible
dans la dernière phase d’évolution de ce paysage verra l’apparition d’un parcellaire de bocage et d’un
réseau de communication peu structurés, montrant
un certain retour à une organisation spontanée de
petites unités, sans rationalisation extérieure. Cependant, l’évolution du paysage de la Tourelle après
le haut Moyen-Âge nous reste trop méconnue et
certains points restent à élucider. L’extension prochaine de la ZAC permettra sans doute d’éclaircir
davantage ce système.
Stéphane BLANCHET
INRAP Grand-Ouest, CReAAH – UMR 6566
Serge MENTELE
INRAP Grand-Ouest CReAAH – UMR 6566
Pierre POILPRE
INRAP Grand-Ouest , Université de Rennes 2
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