Demande de travail

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Demande de travail
Cours Marché du travail et politiques d’emploi
La demande de travail
Pierre Cahuc/Sébastien Roux
ENSAE-Cours MTPE
24 mars 2006
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
La demande de travail
24 mars 2006
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Introduction
Introduction
On se situe du point de vue de l’entreprise :
Le travail L est un facteur de production parmi d’autres : Capital K ,
Consommations intermédiaires CI , ...
La production Y de l’entreprise résulte de la mise en commun de ces
facteurs
L’objectif de l’entreprise est alors de maximiser les bénéfices retirés de
la vente des produits.
Objet du cours : Construire une théorie de la demande de travail pour
expliquer les demandes d’effectifs propres aux diverses catégories de
personnel et la durée de travail de chaque employé.
Idée principale : Une entreprise a intérêt à embaucher un salarié tant que
la recette qu’il rapporte est supérieure à son coût.
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Introduction
2 questions :
Quel est le coût d’un salarié ?
Exemple de coût : Salaire, Charges Sociales, Infrastructure, Lieu du
travail, Formation, ...
Que rapporte-t-il à l’entreprise ?
Travail inséré dans un processus collectif de production. Ce qu’un
salarié rapporte dépend des autres facteurs (capital, ...) et des autres
salariés (expérience, qualification, travail d’équipe)
Prix de vente du produit (dépend de la qualité du travail, ...)
Distinction entre court terme et long terme :
A court terme, choix du niveau de travail L à capital K fixé, en
réponse à des chocs exogènes.
A long terme, l’entreprise modifie aussi son capital K , ce qui pose les
questions de complémentarité et de substituabilité.
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Introduction
Distinction entre statique et dynamique
Théorie statique :
Considère l’entreprise qui n’existerait que sur une période
Établit les propriétés de base (Lois) de la demande de travail
Résultats qualitatifs précis sur le sens de variation des quantités en
fonction du coût des facteurs
Amplitude des élasticités de la demande de travail à son coût est un
enjeu important, notamment parce qu’elle conditionne la réaction de
l’emploi à certaines politiques publiques
Exemple : Elasticité de la demande de travail non qualifié à son coût
conditionne la mise en place des abaissements de charge sur les bas
salaires ou les hausses du SMIC.
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Introduction
Distinction entre statique et dynamique
Théorie dynamique :
Les choix de l’entreprise à un instant t peuvent affecter son profit
futur.
Prise en compte de cette interaction à travers les effets des coûts
d’ajustement, c’est-à-dire les coûts liés aux modifications de volume
des facteurs de production.
Outre une modélisation plus réaliste du fonctionnement des
entreprises, cette théorie donne des indications sur les stratégies
d’embauche et de licenciement.
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Théorie statique de la demande de travail
Une théorie statique de la demande de travail : la demande
de travail de “court terme”
Une seule période est considérée dans l’économie, il n’y a pas
d’évolution du temps.
Le court terme signifie ici que le capital K ne s’ajuste pas. On
considère le cas où seule la demande de travail L s’adapte. Dans ce
cas, elle va dépendre du salaire réel w et du pouvoir de marché.
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Théorie statique de la demande de travail
Le pouvoir de marché
Y (P) : Demande pour un bien particulier qui dépend du prix P
On définit la fonction de demande inverse par la liaison réciproque
P = P (Y ), on en déduit l’élasticité des prix à la demande.
ηYP =
YP 0 (Y )
P (Y )
Hypothèse de travail : ηYP est constante
ηYP = 0 : concurrence parfaite, entreprises ”price taker”
ηYP < 0 : concurrence imparfaite, entreprises ”price maker”
P
η : indicateur du pouvoir de marché de l’entreprise
Y
!
P
Remarque : P Yj +
Yj 0 , Seul l’effet de Yj nous intéresse.
j6=j 0
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Théorie statique de la demande de travail
Facteurs fixes et flexibles
Différents facteurs de production :
Travail : Qualifiés, non qualifiés, jeunes, vieux, hommes, femmes, ...
Capital : Immeuble, Terrains, Machines (à différentier du capital pris
dans le sens comptable)
Consommations Intermédiaires : Matières premières, Facteurs de
production intégralement consommés lors du processus de production.
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Théorie statique de la demande de travail
Gradation dans la rigidité
Du plus flexible au plus rigide, les consommations intermédiaires, le travail,
puis le capital.
Quelques nuances :
CI et K se différencient par définition. Une consommation
intermédiaire est un bien intégralement consommé lors du processus
de production. S’il ne l’est pas, il est comptabilisé dans les entreprises
comme un élément du capital, dont une partie s’est dépréciée.
Le travail est beaucoup plus compliqué : Les non qualifiés sont plus
flexibles (coûts de recherche et de formation plus faibles), les très
qualifiés sont un facteur plus rigide (investissement en capital humain
très élevé).
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Théorie statique de la demande de travail
Problèmes de mesure :
Travail quantifié en heures (pertinence ?)
K , dans les entreprises, le capital (biens productifs) est mesuré à sa
valeur historique et non à sa capacité productive.
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Théorie statique de la demande de travail
Coût du travail et productivité marginale
Simplification : L flexible, K rigide, pas de consommation intermédiaire
Fonction de production
Y = F (L)
Hypothèses :
F croissante, concave, F 0 > 0, F 00 < 0
W : coût du travail
Le profit de l’entreprise s’écrit alors
Π (L) = P (Y ) Y − WL
s.c.Y
= F (L)
Condition du premier ordre :
Π0 (L) = F 0 (L) P (Y ) + P 0 (Y ) Y − W
= F 0 (L) P (Y ) 1 + ηYP − W
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Théorie statique de la demande de travail
Si 1 +
ηYP
> 0, la demande de travail est définie par
F 0 (L) = ν
W
P
1
avec ν = 1+η
P .
Y
Condition du second ordre :
Π00 (L) = F 00 (L) P (Y ) 1 + ηYP < 0
+F 0 (L)2 P 0 (Y ) 1 + ηYP
| {z }
ηP P
Y <0
Y
Donc Π00 (L)
<0
Si 1 + ηYP < 0, alors Π0 (L) est toujours négative, donc L = 0 est la
solution optimale.
Dans le cas d’une situation de concurrence parfaite, on aurait
F 0 (L) =
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W
P
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Théorie statique de la demande de travail
Une approche duale : la fonction de coût
Le coût à produire un bien Y est égal à ce qui est dépensé pour le
produire :
C (Y ) = WL = WF −1 (Y )
Le coût à produire une unité de bien supplémentaire est égal à
C 0 (Y ) =
W
F 0 (L)
Produire une unité de bien supplémentaire amène comme ressource :
P (Y ) revenu tiré de la vente d’un bien
YP 0 (Y ) effet de la modification du prix par la mise sur le marché d’un
bien supplémentaire
P (Y ) + YP 0 (Y ) = 1 + ηYP P
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Théorie statique de la demande de travail
La production se stabilise au point où produire une unité de bien
supplémentaire rapporte autant que cela ne coûte, soit
C 0 (Y ) = 1 + ηYP P =
W
F 0 (L)
En concurrence parfaite, le prix d’un bien égalise son coût marginal.
Élasticité de la demande de travail à son coût :
On examine les effets d’une variation dW du coût salarial sur le travail
WF 00 (L)
dW
+
F 0 (L) P 0 (Y ) 1 + ηYP dL = 0
dL
F (L)
F 0 (L)2
Donc
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dL
=
dW
1
1+
ηYP
F 02 P 0
<0
La demande de travail
+
F 00 P
<0
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La substitution capital-travail
La substitution capital-travail
Sur le long terme, le capital K est un facteur flexible
Raisonnement en deux étapes :
Pour atteindre un niveau de production Y donné, il existe une
combinaison optimale de K et L. Effet de substitution.
Quel est le niveau de production permettant de maximiser le profit ?
Effet de volume
Effets de substitution : Choix d’un facteur de production plutôt qu’un
autre sur un critère de minimisation des coûts
Effets volume : Eléments susceptibles d’affecter le niveau de la
production en conservant des proportions similaires entre les inputs.
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La substitution capital-travail
Première étape : Minimisation du coût total
Soit deux facteurs de production : K et L
Fonction de production :
Y = F (K , L)
Capital K et Travail L sont dits complémentaires si la production
d’un niveau Y de bien nécessite que K et L soient toujours associés
dans la même proportion, i-e KL constant. Il suffit de connaı̂tre Y pour
connaı̂tre la quantité d’inputs nécessaires à sa production.
Exemple : Fonction de production Léontieff Y = min (γK , L), où γ
est un facteur d’échelle
Capital K et Travail L sont dits substituables s’ils peuvent se
combiner dans des proportions différentes pour atteindre un niveau de
bien donné.
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La substitution capital-travail
Implications sur la fonction de production
FK > 0, FL > 0, croissante en chacun de ses facteurs
FKK < 0, FLL < 0, concave en chacun de ses facteurs
Définition : Propriété d’homogénéité
F (µK , µL) = µθ F (K , L)
Si 0 < θ < 1, les rendements d’échelle sont décroissants
Si θ > 1, les rendements d’échelle sont croissants
Si θ = 1, les rendements d’échelle sont constants
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La substitution capital-travail
Fonction de coût et demande de facteurs
La combinaison optimale des facteurs s’obtient en minimisant la
fonction de coût associée à la production de Y .
min (WL + RK )
K ,L
s.c. F (K , L) ≥ Y
où W est le coût du travail et R est le coût du capital.
Les solutions L et K sont les demandes conditionnelles de travail et
de capital.
La fonction de coût est alors une fonction de Y et des prix des
facteurs
C (W , R, Y ) = W L + RK
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La substitution capital-travail
Frontière de production
K
{(K , L ) / F (K , L ) ≥ Y }
E
WL + RK = C0
(Y)
L
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La substitution capital-travail
Pour illustrer la substituabilité entre les facteurs, on définit le taux
marginal de transformation entre K et L par la valeur absolue de
K 0 (L) = −
FL
FK
Il s’agit de la quantité de K que l’on peut économiser quand la
quantité de L s’est accrue d’une unité.
Remarque : Si la fonction de production est strictement concave, alors
les isoquantes sont strictement convexes (exercice)
Le dessin illustre qu’à l’optimum, dans le plan (K , L), la courbe
d’isocoût (C0 = WL + RK ) est tangente à l’isoquante. Ainsi, si K (.)
est strictement convexe, la solution est unique. Donc K , L vérifient
les équations
FL K , L
W
=
et F K , L = Y
R
FK K , L
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La substitution capital-travail
Propriétés des fonctions de coût
C (W , R, Y ) = W L + RK
C (W , R, Y ) est croissante en chacun de ses arguments et homogène
de degré 1 en W et R
C (W , R, Y ) est concave en (W , R)
C (W , R, Y ) vérifie le lemme de Sheppard, soit
L = CW (W , R, Y ) et K = CR (W , R, Y )
C (W , R, Y ) est homogène de degré 1θ par rapport à Y si la fonction
de production est homogène de degré θ
1
C (W , R, Y ) = C (W , R, 1) Y θ
1
W
W
L
,Y
= L
, 1, Y θ
R
R
1
W
W
K
= K
,Y
, 1, Y θ
R
R
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La substitution capital-travail
Propriétés des demandes conditionnelles de facteurs de
production
La demande conditionnelle est décroissante avec le coût des facteurs
∂L
= CWW < 0
∂W
On peut toutefois remarquer que L dépend en fait de W
R
La demande conditionnelle de travail est croissante avec le coût du
capital.
En effet, L W
,
Y
est décroissant en W
R
R , donc croissant en R. D’où
l’effet de substitution.
De plus, le lemme de Sheppard amène
∂K
∂L
= CWR = CRW =
∂R
∂W
La substitution est symétrique : il y a symétrie des “effets prix”.
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La substitution capital-travail
Élasticités croisées
η̄RL : Élasticité du travail au coût du capital
η̄RL
=
K
η̄W
=
R ∂ L̄
L ∂R
W ∂ K̄
K ∂W
A l’optimum, on a :
R K̄
W L̄
Les élasticités croisées n’ont pas de raisons d’être identiques : elles ne
constituent pas un indicateur synthétique des capacités de
substitution entre les deux facteurs.
K
η̄RL = η̄W
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La substitution capital-travail
On définit l’élasticité de substitution, élasticité du rapport des facteurs
K
W
L rapportée au coût relatif R
W /R ∂ K̄ /L̄
>0
σ=
K̄ /L̄ ∂ (W /R)
Le ratio capital-travail augmente de σ% lorsque le coût relatif du travail
au capital augmente de 1%.
Cf. Dessin : Une hausse de W /R augmente la pente de la droite d’isocoût
et déplace l’équilibre vers la gauche.
Si la fonction de coût C (W , R, Y ) est homogène on a :
σ=
CCWR
CW CR
Remarques :
σ est symétrique en W et R
ne dépend pas de Y (si F est homogène)
car
K̄
L̄
est une fonction de
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W
R
seulement
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La substitution capital-travail
Demandes conditionnelles en fonction de σ
Expression des élasticités en fonction de σ
η̄RL
=
R ∂ L̄
R CW CR
R
R K̄
= CWR =
σ=
σ
C
L̄ ∂R
L̄
L̄ C
Soit s = WCL̄ , part de la rémunération du travail dans les coûts.
On a alors
ηRL̄
De même, L̄
W
R
= (1 − s) σ
donc
∂ L̄
∂W
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=
1 0
L̄
R
W
R
=−
La demande de travail
R ∂ L̄
W ∂R
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La substitution capital-travail
Donc
L
η̄W
=
W ∂ L̄
R ∂ L̄
=−
= −η̄RL
L ∂W
L ∂R
Or s est un paramètre facile à estimer.
⇒ σ est un paramètre essentiel pour estimer les effets de long terme d’une
modification du coin fiscal (qui joue sur le coût du travail).
Ce paramètre est d’autant plus important que les possibilités de
substitution entre K et L sont importantes.
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La substitution capital-travail
Effets sur la production
Si Y varie de façon exogène
C
= W L̄ + R K̄ avec F K̄ , L̄ = Y
∂C
∂Y
= W
∂ L̄
∂Y
∂ K̄
∂ L̄
+ FL ∂Y
= 1. Donc
or FK d K̄ + FL L̄ = dY donc FK ∂Y
R
∂ K̄
FL ∂ L̄
+R
∂Y
F ∂Y
| {zK}
= W
∂ L̄
R
W
∂C
=
=
=
∂Y
FK
FL
∂Y
W
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La substitution capital-travail
Remarques :
CY > 0
Des hypothèses supplémentaires sont nécessaires pour connaı̂tre le
sens des demandes, au moins un des facteurs doit augmenter. Cela
dépend de l’élasticité de substituabilité entre les facteurs.
Si la fonction de production est homogène de rendement θ
1
W
K̄ = K̄
Yθ
R
1
W
L̄ = L̄
Yθ
R
Donc, dans ce cas, K̄ et L̄ croissent simultanément.
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Les effets d’échelle
Demande non conditionnelle des facteurs
Choix de la production par la firme
Soit P (Y ) Fonction de production inverse
Le profit s’écrit :
Π (W , R, Y ) = P(Y )Y − C (W , R, Y )
Condition de premier ordre :
P(Y ) + YP 0 (Y ) = CY
P(Y ) 1 + ηYP
= CY
P(Y ) = νCY
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Les effets d’échelle
Vérification de la condition de concavité. Si la fonction est homogène
de degré θ, il faut ν > θ. En effet,
ΠYY
=
P(Y ) θ − ν
θY
ν2
En cas de concurrence parfaite, ν = 1, les rendements d’échelle
doivent être décroissants.
On retrouve le résultat obtenu dans le cadre simple de la demande de
court terme : le prix est égal au coût marginal multiplié par le taux de
marge. De plus,
W
W
=ν
CY
P
R
= ν
P
FL =
FK
A l’optimum, la productivité de chaque facteur est égale à son coût
marginal multiplié par le taux de marge.
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Les effets d’échelle
Lois de la demande
Variation des demandes non conditionnelles des facteurs de production
selon les coûts unitaires.
4 lois
1
Relation décroissante entre demande et coût d’un facteur
2
Élasticité de la demande de travail
3
Élasticité croisée
4
Cas d’une fonction de production homogène
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Les effets d’échelle
Relation décroissante entre demande et coût d’un facteur
Π (W , R) = maxΠ (W , R, Y )
Y
Comme C (W , R, Y ) est concave en (W , R), Π(W , R, Y ) est concave en
(W , R)
Soit Y ∗ le niveau optimal de production, alors
Π (W , R) = Π (W , R, Y ∗ )
Le lemme de Hotelling amène
ΠW (W , R) = −L̄
ΠR (W , R) = −K̄
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Les effets d’échelle
Or Π étant convexe, on a :
ΠWW
= −
∂ L̄
>0
∂W
Donc la demande de travail est décroissante avec son coût
Remarques :
Les conditions de l’obtention de ce sens de variation sont très
générales
Le sens de variation croisé n’est pas déterminé : l’effet volume peut
s’opposer à l’effet de substitution.
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La demande de travail
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Les effets d’échelle
Élasticité de la demande de travail
L = CW (W , R, Y ∗ ) (Sheppard)
Donc
∂L∗
∂W
L
ηW
∂Y ∗
= CWW + CWY
∂W
W
∗ CWY
Y
=
CWW + Y
ηW
L∗
L∗
L
Y
= η̄W
+ η̄YL ηW
L est l’élasticité de la demande conditionnelle de travail.
où η̄W
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Les effets d’échelle
On peut alors décomposer les effets d’une hausse du coût du travail sur la
demande de travail en
L
un effet de substitution η̄W
L
Y
un effet volume η̄Y ηW
L’effet volume est toujours négatif et accentue l’effet de substitution
(exercice).
Remarques :
La relation précédente vaut à environnement inchangé. S’il existe un
choc sur les salaires sur plusieurs entreprises, elles sont toutes
affectées, d’où un effet sur les prix identique si les biens sont
substituables. La demande diminuera donc moins que si l’entreprise
est seule à augmenter ses salaires.
Y et η L sont les élasticités de la production et de la
Formellement, ηW̄
W̄
demande de travail à un choc sur tous les salaires. On a
L
ηW̄
L
Y
= η̄W
+ η̄YL ηW̄
Attention aux études empiriques où un choc sur tous les salaires est
souvent interprété comme un choc sur le seul salaire de l’entreprise.
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Les effets d’échelle
Élasticité croisée
ηRL
= η̄RL + η̄YL ηR̄Y
Définition :
ηRL > 0 : K et L sont substituts bruts
ηRL < 0 : K et L sont compléments bruts
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Les effets d’échelle
Cas d’une fonction de production homogène
η̄YL
=
1
Y ∂L
=
L ∂Y
θ
On a également
νC
Yθ
ln P(Y ) = ln ν − ln θ + ln C − ln Y
P(Y ) = νCY =
D’où
1 ∂Y
Y ∂W
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YP 0 YCY
−
+1
P
C
La demande de travail
=
CW
C
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Les effets d’échelle
Après quelques calculs, on obtient l’élasticité de la production au salaire
Y
ηW
=
θ
ηYP
θs
θν
=
s
θ−ν
+1 −1
Y <0
Rappel : la condition du premier ordre impose ν > θ donc ηW
On en déduit l’élasticité de la demande non conditionnelle de travail au
salaire
L
ηW
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= −(1 − s)σ +
La demande de travail
νs
θ−ν
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Les effets d’échelle
Pouvoir de marché
Il n’intervient pas dans les effets de substitution, seulement dans les
effets volume
L’effet volume est d’autant plus fort que ν est faible. Une firme à
faible pouvoir de marché transfert donc intégralement le choc sur le
volume en cas de hausse du coût des facteurs. Si elle a un pouvoir de
marché important, elle va manipuler ses prix pour limiter les pertes.
L’élasticité de la production et de la demande de travail au coût
diminuent donc avec le degré de monopole.
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La demande de travail
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Les effets d’échelle
Part du travail dans le coût de production
Une entreprise avec s élevé utilise beaucoup de travail et peu de capital, la
production et l’emploi sont plus sensibles à une hausse du coût du travail.
L’élasticité de la demande non conditionnelle s’écrit :
ν
L
ηW = −σ + s σ −
ν−θ
L ν
décroı̂t avec s.
Si σ > ν−θ
, i-e, K et L sont substituts bruts, alors ηW
L’effet de substitution domine l’effet volume.
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La demande de travail
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
But : Estimer les élasticités dans les modèles permettant d’analyser la
demande de travail
Nécessité d’avoir une forme estimable des demandes de facteurs, d’où
le choix d’une fonction de production ou de coût.
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La demande de travail
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Fonction de production Cobb-Douglas à deux facteurs
Expression
Y = AK θ(1−α) Lθα , 0 < α < 1, A > 0
Taux marginal de transformation :
FL
αK
=
FK
(1 − α) L
La minimisation du coût total de production implique
FL
W
αK
=
=
FK
(1 − α) L
R
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La demande de travail
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
L’élasticité de substitution σ entre K et L
σ =
s =
∂ ln K /L
=1
∂ ln W /R
1
WL
1
=
=
=α
RK
C
1 + 1−α
1 + WL
α
Donc, au final,
η LW = −η LR = − (1 − α)
Demandes conditionnelles et fonction de coût :
1
α R 1−α Y θ
L =
1−αW
A
α 1
1−αW
Y θ
K =
α R
A
α 1−α 1
W
R
Y θ
C (W , R, Y ) =
α
1−α
A
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La demande de travail
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Cobb-Douglas à plus de deux facteurs
Expression
n
Y
θαi X
Y =A
Xi
,
αi = 1
i=1
Demandes conditionnelles et fonction de coût :


α j 1
n j
Y
θ
W
αi
i
 Y
X = 
Wi
αj
A
j=1


1
n j αj
Y
θ
W
1
n
 Y
C W , ..., W , Y
= 
αj
A
j=1
D’où,
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η ii
= − (1 − αi )
η ij
= αj , j 6= i
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
La fonction C.E.S. “Constant Elasticity of Substitution”
Expression
h
i σ
σ−1
σ−1 σ−1
, σ > 0, αK > 0, αL > 0
Y = (aL L) σ + (aK K ) σ
Taux marginal de transformation :
1
W
FL
aL (aL L)− σ
=
1 =
−
FK
R
aK (aK K ) σ
L’élasticité du substitution entre K et L est alors égale à σ.
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Demandes conditionnelles et fonction de coût :
σ
−σ " 1−σ 1−σ #− σ−1
1
W
W
R
aL L =
+
Yθ
aL
aL
aK
σ
"
−σ 1−σ 1−σ #− σ−1
1
W
R
R
aK K =
+
Yθ
aK
aL
aK
1
" 1−σ # σ−1
1
W 1−σ
R
C (W , R, Y ) =
Yθ
+
aL
aK
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
La fonction C.E.S. ”Constant Elasticity of Substitution”
avec plus de deux facteurs
n
σθ
σ−1 σ−1
P
i
ai X σ
Y = A
, σ > 0, ai > 0
i=1
Demandes conditionnelles
ai X
i
=

 σ
−σ X
σ−1 − σ−1
n σ
1
Wj
Wi


Yθ
ai
aj
j=1

 1
σ−1 σ−1
n X
σ
1
W
j

C (W1 , ..., Wn , Y ) = 
Yθ
aj
j=1
Élasticité de substitution partielle entre i et j
σij =
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CCij
=σ
Ci Cj
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Fonction de coût Léontieff
∂C
∂W
Utilisation du lemme de Sheppard L =
Fonction de Léontieff
C W 1 , ..., W n , Y
1
= Yθ
n X
n
X
√
aij W i W j
i=1 j=1
n
X
i
=
1X
∂C
θ
=
Y
aij
∂W i
j=1
r
Wj
Wi
D’où l’élasticité de substitution partielle
√
i
CCij
aij W i W j
W iX
i
i
σj =
=
,
i
=
6
j,
où
s
=
Cij
2s i s j
C
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Modèles de Demande : Du modèle théorique à l’estimation.
Fonction de coût translog
Expression
ln C = a0 +
n
X
i=1
avec
n
P
ai = 1, aij = aji ,
i=1
n
n
1 XX
1
ai ln W +
aij ln W i ln W j + ln Y
2
θ
i
i=1 j=1
n
P
aij = 0.
j=1
La fonction de production sous-jacente est homogène de degré θ.
Propriété :
n
X
W iXi
si =
= ai +
aij ln W j
C
j=1
Si ai > 0 et aij = 0, fonction de production de type Cobb-Douglas
Élasticités de substitution :
aij + s i s j
σij =
, i 6= j
si sj
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Principaux Résultats empiriques
Principaux résultats empiriques
La plupart des résultats obtiennent
η L < 0 et η L < 1
W
W
Le travail non qualifié est plus facilement substituable au capital que
le travail qualifié
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Principaux Résultats empiriques
La demande de travail agrégée
Estimation la plus fréquemment effectuée : Élasticité conditionnelle de la
L
demande de travail η̄W
L : quantité homogène, somme des heures travaillées au niveau de
l’emploi
W : coût du travail, Problème de définition et de mesure.
Mesuré par la masse salariale divisée par les heures.
Sa variabilité peut correspondre à des modifications de structure de la
main d’œuvre (hétérogénéité des salariés selon l’ancienneté et la
qualification)
Modification de l’emploi à objectif de production donnée en tenant
compte des effets de substitution
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Principaux Résultats empiriques
Résultats
Dormont (1997), Données individuelles d’entreprises de l’industrie
manufacturière,
L
η̄W
∈ ]−0, 8; −0, 5[
Legendre et Le Maı̂tre (1998), 800 entreprises industrielles entre 1981
L ≈ −0, 2
et 1987, η̄W
Hamermesh (1993) Compilation de 70 études
L η̄W ∈ ]0, 15; 0, 75[
L ≈ −0, 3
Consensus, η̄W
Remarque :
wL
' 0, 7
C
Donc σ = 1 est une bonne approximation de l’élasticité de
substitution, compatible avec une représentation Cobb-Douglas.
L
η̄W
= − (1 − s) σ, s =
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Principaux Résultats empiriques
La prise en compte des effets de volume accroı̂t la valeur de l’élasticité,
mais relativement peu de résultats.
L ≈ −0.4
Données macro : ηW
L ≈ −0.45
Dormont Pauchet (1997) ηW
Effet volume modeste
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Principaux Résultats empiriques
Complémentarité et Substitution entre les facteurs de
production
Si le travail est un agrégat unique, il est p-substitut avec les autres
facteurs de production agrégés.
Remarque : ils ne sont pas substituts bruts (cf. choc pétrolier)
Le travail non qualifié est plus facilement substituable au capital que
le travail qualifié :
Travail qualifié et capital seraient p-compléments
Travail qualifié et non qualifié p-substituts
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