LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES AU SEIN DE L`UNION

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LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES AU SEIN DE L`UNION
ETTW
Europeans throughout the World
Comité économique et social européen
LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES
AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE REMISE EN CAUSE
Document de discussion pour la conférence du 27 janvier à Bruxelles
Conclusions (le document intégral n'est disponible qu'en anglais)
Bien qu'elle soit sans doute la réalisation la plus populaire de l’UE, la libre circulation
des personnes est de plus en plus contestée. La thèse avancée dans le document
est que si les pays d’origine, les pays d’accueil et les migrants eux-mêmes tirent
d'une manière générale profit de la libre circulation, le fait qu'elle se répartisse de
manière inégale suscite toutefois inévitablement des défaillances et problèmes au
niveau local. Ce n'est cependant pas une raison pour donner suite aux appels visant
à restreindre les droits européens. Au contraire, il convient de mettre l’accent sur la
défense de ces droits en renforçant leur mise en œuvre, afin de s’assurer qu’ils soient
davantage respectés, tout en apportant une solution locale aux problèmes qui se
posent à cet échelon. L’Union européenne est en train de sortir d'un processus
d’élargissement dans lequel les «dispositions transitoires» et les restrictions globales à
la libre circulation des citoyens européens de nouveaux États membres ont créé
plus de problèmes qu'elles n'ont apporté de solutions. Il conviendrait à présent
d'octroyer aux villes et aux collectivités locales davantage de compétences et de
ressources pour gérer efficacement les incidences de la libre circulation des
personnes dans les régions concernées. Certains éléments laissent penser que si l'un
des éléments de réponse aux craintes suscitées par la libre circulation consiste à
informer les citoyens des avantages généraux de la migration au sein de l’UE et des
progrès accomplis sur la voie d’un marché européen du travail, ce n'est toutefois
pas suffisant. Le message doit en effet prendre en compte les collectivités locales et
la situation sur le terrain.
L’éventail de mesures suivant est proposé comme base de discussion pour défendre
les droits européens à la libre circulation et veiller à ce qu’ils soient mieux respectés.
•
Accroître les statistiques disponibles, en particulier au niveau local, là où la libre
circulation a des incidences. Il ne fait aucun doute que nous en savons
aujourd'hui plus sur les modèles de libre circulation des personnes au sein de l’UE.
À la suite de l’élargissement et compte tenu de la nécessité d'évaluer l’impact
des dispositions transitoires, un nombre bien plus important de données a par
exemple été publié régulièrement par la Commission européenne, les autorités
nationales ou des instituts de recherche et groupes de réflexion européens.
Toutefois, des statistiques font toujours défaut au niveau local, qui permettraient
d'éclairer les citoyens, mais aussi d'élaborer des réponses politiques appropriées.
L'utilisation accrue des Fonds de cohésion de l’UE et la création, dans ce
contexte, d'un Fonds de solidarité européen pour la libre circulation devraient
reposer sur des statistiques fiables relatives aux arrivées et aux départs de
migrants et aux répercussions de ces flux sur les services.
•
Une approche équitable pour lutter contre les abus en matière de libre
circulation. La Cour de justice européenne a confirmé qu'à l'issue des trois
premiers mois de séjour, le droit à la libre circulation était subordonné à
l’existence de ressources suffisantes et d'une couverture maladie, et que l'accès
aux prestations sociales pouvait être refusé aux citoyens européens qui n'avaient
pas l’intention de chercher du travail. Dans le climat actuel, l’accent est
toutefois essentiellement mis sur les abus commis par les citoyens européens et
pas assez sur le comportement peu scrupuleux de certains employeurs au
niveau local. Les citoyens européens se rendent dans d'autres pays pour
travailler, pas pour bénéficier de prestations, mais les contrats précaires, les
rémunérations inférieures au salaire minimum et autres pratiques illégales
peuvent les rendre vulnérables. Si davantage de citoyens européens viennent
frapper à la porte des services d'urgence ou des refuges pour sans-abri, il ne
s'agit en général pas de «touristes de prestations» qui n'ont pas atteint leur
objectif mais de demandeurs d'emploi qui n'ont pas trouvé de travail ou de
travailleurs qui ont perdu leur emploi. La charge de contrer les abus en matière
de libre circulation devrait être répartie plus équitablement et requiert moins
l'élaboration d'une nouvelle législation que l'application des législations
européenne et nationale existantes.
•
Appliquer davantage le principe «Mieux vaut prévenir que guérir». La législation
sur la libre circulation des personnes prend généralement la forme de directives
qui établissent des principes et objectifs communs et laissent à chaque État
membre le soin de les mettre en œuvre en tenant compte de leurs propres
pratiques juridiques et administratives. Bien que la «directive sur la citoyenneté»
relative à la libre circulation des citoyens européens ne soit que le reflet de la
jurisprudence de la Cour, la Commission a constaté qu’aucun article n'était
correctement
transposé
dans
le
droit
national
des
États
membres.
1
Rétrospectivement, les procédures d'infraction auraient peut-être pu être évitées
si l'on avait imposé aux États membres l'obligation de notifier à l'avance à la
Commission les mesures de mise en œuvre envisagées, mais aussi toute autre
mesure législative susceptible d'influencer la mise en œuvre des dispositions
concernées. Une autre solution serait de refondre ces dispositions sous la forme
d’un règlement, lequel présente l’avantage d’être directement applicable, sans
qu'il soit besoin de recourir à des mesures nationales de transposition pour le
mettre en œuvre correctement.
•
Un guichet unique dans chaque État membre pour une résolution rapide des
problèmes. Au niveau européen, «Europe-Direct» prévoit un système d’appel
gratuit qui retransmet les questions plus pointues vers le service «L’Europe vous
conseille» ou, si la question dépasse le cadre d'une simple demande
d'information, vers le service SOLVIT, dont l'objectif est de résoudre les problèmes
1
Rapport de la Commission sur l'application de la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de
l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États
membres (COM(2008)840 final, 10.12.2008). ECAS arrive à la même conclusion dans son étude réalisée
pour la commission des affaires juridiques du Parlement européen (CP 410/650).
dans un délai de 10 semaines. Ce délai, qui a pour but d'instaurer, dans
l'administration européenne, une approche davantage axée sur la résolution
des problèmes, devrait s’appliquer à tous les services d'assistance aux citoyens
de l’UE, services dont le fonctionnement devrait être harmonisé dans tous les
États membres. Une directive adoptée récemment invite les États membres à
établir des points de contact et confère aux organismes chargés de promouvoir
l’égalité et aux ONG un rôle plus important s'agissant de la défense des droits
européens 2.
•
Action collective des citoyens. La Commission dispose d’un large pouvoir
d’appréciation pour décider de donner ou non suite à des plaintes individuelles.
Les citoyens ont dès lors intérêt à présenter leurs préoccupations et éléments de
fait de manière groupée pour leur donner plus de poids, et peut-être à les étayer
par une pétition au Parlement européen ou un recours devant une juridiction
nationale. Lorsque la Commission tente d'inciter les États membres à lever les
obstacles à la libre circulation, les citoyens doivent manifester leur présence en
tant que tierce partie non officielle.
•
Une procédure de mise en œuvre accélérée. Il est relativement facile
d’introduire une plainte, mais, à moins qu’il existe une solution immédiate, cela
peut prendre deux ans au moins avant que la Commission n'introduise un
recours devant la Cour européenne de justice et dix-huit mois de plus au
minimum pour les procédures judiciaires. Dans l’intervalle, le(s) ou État(s)
membre(s) concerné(s) peu(ven)t maintenir l'obstacle à l’exercice des droits
européens. La Commission devrait se tourner vers la Cour européenne pour
exiger d'un État membre qu'il lève immédiatement, jusqu'à ce qu'un examen
plus approfondi soit effectué, tout obstacle à l’exercice de droits européens qui,
à première vue, enfreint le droit européen et affecte un grand nombre de
personnes.
2
La directive 2014/54/UE du 16 avril 2014 (OSL 128/8 du 30.4.2014) relative à des mesures facilitant l'exercice
des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs devrait être mise
en œuvre d'ici le 21 mai 2016.
•
Un Fonds de solidarité relatif à la libre circulation. En plus de contribuer à une
utilisation plus efficace de la législation européenne pour améliorer la mise en
œuvre de ses dispositions, le fait de prendre des mesures au niveau local peut
également réduire les tensions entre les citoyens européens migrants et la
société du pays d’accueil. Ces tensions renforcent les demandes visant à
restreindre de manière générale les droits européens et les craintes à l'égard les
«touristes de prestations». Toutefois, compte tenu de la répartition très inégale de
la libre circulation, les problèmes qui se posent sont en réalité les rares cas de
fuite de cerveaux dans les pays d’origine ou la pression que subissent les services
locaux dans les pays d’accueil. La politique de cohésion de l’UE est un cadre
idéal, dans la mesure où elle conjugue un cadre européen avec le
développement des communautés locales et des partenariats avec l'ensemble
des acteurs concernés. Ce serait le cadre idéal dans lequel créer le Fonds de
solidarité européen relatif à la libre circulation. Ce Fonds devrait poursuivre un
double objectif: apporter une aide d'urgence aux citoyens européens
vulnérables, en soutenant des cours de langue et l'orientation des demandeurs
d’emploi, tout en fournissant des ressources supplémentaires pour les services de
santé, d'éducation et de logement 3. Le pays d’origine, le pays d’accueil et le
budget de l’UE devraient contribuer à parts égales à ce Fonds.
_____________
3
La Commission européenne commence à attirer l’attention sur l’utilisation qui peut être faite des Fonds
social et régional de l’UE notamment dans sa communication «Libre circulation des citoyens de l’Union et
des membres de leur famille: cinq actions pour faire la différence». Le rapport Barca, commandé par la
Commission européenne sur le futur de la politique de cohésion de l’UE pour la période 2014-2020,
comporte des arguments convaincants pour faire de la question des migrations une priorité.