Extrait du Journal des audiences de Poullain Du Parc sur la femme

Transcription

Extrait du Journal des audiences de Poullain Du Parc sur la femme
Extrait du Journal des audiences de Poullain Du Parc
sur la femme mariée commerçante
Présenté par M. Edouard Richard
Références du texte
POULLAIN DU PARC, Journal des audiences et Arrêts du Parlement de Bretagne, rendus
sur les Questions les plus importantes de Droit Civil, de Coutume, de Matières Criminelles,
Bénéficiales & de Droit Public.
Tome troisième, contenant les Arrêts rendus depuis le mois de Mars 1738 jusqu’à la SaintMartin 1747 & les Actes de Notoriété depuis le 29 Mars 1734 jusqu’au onze Janvier 1763.
Rennes, Vatar, M. DCC. LXIII
Extrait de l’ouvrage
Nota : Aux fins de citation, la pagination de l’ouvrage est indiquée en gras entre crochets. Les
majuscules sont reproduites à l’identique ainsi que les italiques.
CHAPITRE XIII [p. 31]
La femme mariée, qui fait un commerce séparé de la Profession de son mari,
s’oblige personnellement pour ce commerce, & n’est point dégagée de son
obligation, par la renonciation à la communauté, sauf son secours vers la succession
du mari.
Après la mort du mari, les créanciers, auxquels la femme est obligée
personnellement à cause de ce commerce, ne sont point obligés de discuter
préalablement les biens du mari ,avant la saisie & la discussion des biens de la
femme.
Ces deux maximes ont été confirmées par Arrêt du 12 Août 1738 en la Première des
Enquêtes, M. Boux de Saint Mars Rapporteur, au profit de Demoiselle Jeanne
Berthevin, veuve de Jean-Baptiste Dupuy, S.r de la Fontaine, Négociant à SaintMalo, intimée, contre Demoiselle Julienne-Marie Hericard, veuve de Pierre Chevalier,
sieur de Courchant, & épouse de Laurent-Maurice Bouton, sieur de Kcadiou,
appelante, comme de Juges incompétents & autrement, de sentence du Consulat de
Saint-Malo du 11 Février 1726 & d’autres Jugements. [Article 448 de la Coutume]
Su la première question, il a été rendu un Arrêt conforme le 16 Juillet 1750 en
Grand’Chambre, M. Hubert de Lasse [p. 32] Rapporteur, pour Nicolas Offray, sieur
de la Metrie, Négociant à Saint-malo, contre Marie-Catherine Juhel, veuve de Marc
le Guichoux, Notaire & Procureur de la Juridiction du Faou, & renonçante à sa
communauté, appelante, tant comme de Juges incompétents qu’autrement, de
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Sentence rendue au Consulat de Morlaix le 30 avril 1748 & d’autre Sentence du
18 Juin 1744.
La décision sur cette question dépend nécessairement des circonstances. Car en
général, dans un Pays de communauté conjugale, où le mari est le maître de sa
communauté, & administrateur des biens de sa femme, elle est réputée conduire le
commerce de son mari, & ne faire pas elle-même un commerce séparé. Ainsi dans
des circonstances décisives, elle est seulement considérée comme institrix mariti, ce
qui n’emporte, contre elle, aucune obligation personnelle, lorsqu’elle a renoncé à la
communauté.
Dans l’espèce du premier Arrêt, la Demoiselle Hericard était Marchande avant son
mariage, & faisait un commerce de cire, qu’elle continua toujours depuis son
mariage, soit en boutique, soit en magasin. Le sieur Chevalier son mari n’était point
Marchand. Il était Officier de Vaisseau au service de la Compagnie des Indes, & il
mourut dans le dernier voyage qu’il fit, en qualité d’Officier Major sur le Navire la
Galathée.
Dans l’espèce du second Arrêt, le sieur le Guichoux était Notaire & Procureur au
Faou, & sa femme faisait le commerce de draps.
Dans ces deux espèces, la distinction des Professions du mari & de la femme, a
déterminé la Cour à décider, que la femme avait fait un commerce absolument
séparé de la Profession de son mari, & que c’était assez pour la rendre débitrice
personnelle des créanciers de ce commerce.
Voyez ci-après un autre Arrêt du 16 Juillet 1750. Il n’est point contraire à ceux que je
viens de rapporter, qui sont dans l’espèce de la femme qui fait le commerce à la
connaissance de son mari, au lieu que dans l’espèce de l’Arrêt du 16 Juillet 1750 le
mari n’avait pu avoir de connaissance du commerce entrepris par sa femme pendant
son absence.
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